Art. 352. On a déjà rencontré les principales applications des trois actions qui tendent à détruire des conventions : on sait que la résolution est demandée par une partie pour l'inexécution des obligations de l'autre, que la rescision est demandée pour vice de consentement ou pour incapacité, enfin, que la révocation a pour but de détruire un acte fait en fraude des créanciers. D'autres causes de résolution, de rescision ou de révocation seront admises par la loi ; mais ces applications déjà connues suffiront à l'intelligence de deux présent article.
Le plus souvent la demande en nullité viendra de l'aliénateur; mais ce pourrait être aussi de la part de l'acquéreur ; dans les deux cas l'action tend à faire rentrer le bien aliéné dans le partrimoine du cédant.
L'article 352 présente une distinction capitale. Dans certains cas, les actions dont il s'agit ici ne sont pas tellement favorables qu'elles doivent être données contre des sous-acquéreurs, c'est-à-dire contre des ayant-cause qui ont acquis de bonne foi des droits réels du chef de celui dont l'acquisition doit être annulée. Dans d'autres cas, c'est le demandeur qui a droit à la préférence. Assurément, il est pénible pour le législateur de ne pouvoir toujours préserver de l'éviction un sous-acquéreur qui, voyant le titre de son auteur régulièrement inscrit en la forme et ignorant d'ailleurs la cause de nullité de ce titre, ne peut être accusé ni de mauvaise foi ni d'imprudence. Mais le législateur ne peut non plus sacrifier l'incapable ou celui dont le consentement a été vicié par violence ou erreur, ni celui à l'égard duquel les conditions d'un contrat synallagmatique n'ont pas été remplies. Il ne reste à la loi qu'un moyen de se rapprocher ici de la justice idéale qu'elle poursuit toujours, c'est de rechercher quel est celui des intéressés qui est le plus digne de protection.
Ce n'est pas ici le lieu de rechercher les différents cas où l'action atteindra ou n'atteindra pas les sous-acquéreurs : ils sont indiqués dans chaque matière : rappelons seulement qu'on a déjà vu que la rescision pour erreur et violence est opposable aux sous-acquéreurs et qu'il en est autrement de la rescision pour dol.
La loi commence par les cas dans lesquels l'action ne peut atteindre les sous-acquéreurs. Dans ces cas, il est de l'intérêt du demandeur d'avertir les tiers, au plus tôt, de son intention de faire tomber son aliénation inscrite et de recouvrer son immeuble ; il devra donc faire mentionner sa demande en marge ou à la suite de l'acte inscrit et les tiers qui ont traité avec l'acquéreur postérieurement à cet avertissement ne pourront imputer qu'à leur imprudence l'éviction à laquelle ils se sont exposés.
La sanction de la disposition de la loi est la préférence donné au plus diligent Si, au contraire, on est dans 1 un des cas où l'action est de nature à détruire le droit des sous-acquéreurs aussi bien que celui du contractant primitif, alors le demandeur n'a pas d'intérêt à les avertir de sa demande : peu lui importe que le nombre de ceux que son action dépouillera augmente jusqu'au jour où il rentrera dans son bien; mais, la loi pourvoit à l'intérêt des tiers, en obligeant le demandeur à mentionner sa demande en marge de l'acte transcrit, et plus tard, quand le jugement sera rendu en sa faveur, il devra en faire une pareille mention.
Il fallait établir, ici encore, une sanction contre le demandeur négligent On ne pouvait songer à le déclarer déchu du droit d'évincer les sous-acquéreurs qui auraient traité depuis la demande formée et avant qu'elle fût publiée: il y aurait eu Ii une grave inconséquence de la loi, il eût été déraisonnable que les droits du demandeur fussent diminuéx par l'exercice même de son action, Il ne restait comme sanction qu'un moyen de procédure, à savoir, déclarer l'action non recevable tant que la mention prescrite ne serait pas opérée.
Enfin, il fallait une sanction à l'obligation de mentionner le jugement à la suite de la demande. Elle ne pouvait plus être trouvée dans la procédure, puisqu'elle est terminée; il ne restait plus guère qu'une amende, c'est la sanction adoptée par la loi.
Il fallait aussi fixer le délai dans lequel la publicité serait donnée au jugement: le délai d'un mois a paru suffisant, à partir du jour où le jugement est devenu inattaquable. Mais comme les jugements peuvent être déclarés exécutoires provisoirement, nonobstant opposition, appel ou pourvoi en cassation, il a paru juste d'en ordonner la publicité avant l'exécution, même provisoire, sous la sanction de la susdite amende.
En cas de rejet de la demande, la loi veut, pour simplifier la procédure, que le tribunal en ordonne d'office, sans qu'il soit besoin de conclusions spéciales à cet effet, la radiation sur le registre; seulement, cette radiation ne pouvant être définitive que quand le jugement qui a rejeté la demande ne sera plus attaquable, elle ne sera effectuée qu'après l'expiration des délais de recoure, ou la confirmation du jugement, s'il y a en des recours formés. Il en sera de même au cas de péremption de l'instance par l'effet de la discontinuité des poursuites.
Reste enfin le cas où le demandeur en nullité renonce à son action ; la loi ne l'oblige pas à faire radier la mention de sa demande : elle laisse ce soin à la partie intéressée ; ce peut être le demandeur lui-même, cédant ou cessionnaire, ce peut être un des sousacquéreurs.