Art. 26. 27 et 28. Il peut y avoir promesse unilatérale soit de vendre, soit d'acheter, ou promesse réciproque de vendre et d'acheter.
I. Promesse unilatérale de vendre. Une pareille promesse ne peut être actuellement translative de propriété, puisque le promettant ne pourrait être dépouillé de son droit de propriété sans acquérir une créance du prix et que l'autre partie, en obtenant le droit d'acheter, n'a pas encore déclaré vouloir en user.
Le promettant est donc obligé sous une condition suspensive dont l'accomplissement dépend de la volonté d'autrui.
Lorsque le stipulant déclarera vouloir acheter, la condition sera remplie et le promettant devra passer le contrat de vente, naturellement par écrit, pour qu'il n'y ait pas d'incertitude sur l'exécution de son obligation. D'ailleurs le stipulant ne devrait pas laisser le promettant dans une incertitude indéfinie sur le parti qu'il prendra ; si donc la convention n'a pas fixé de délai pour l'exercice de la faculté d'acheter, le promettant pourrait demander au tribunal d'en fixer un, passé lequel le droit d'acheter sera perdu. C'est l'application d'un principe général déjà posé par les articles 403 et 415 du Livre des Biens et qu'on retrouvera dans plusieurs autres matières.
Supposons que le promettant requis de passer le contrat s'y refuse. Il y a là une obligation de faire et il semblerait que, le promettant ne pouvant être matériellement contraint à un acte qui exige sa volonté, l'obligation ne puisse que se résoudre en dommages-intéiets. Mais on nest pas dans un de ces cas où 1 exécution forcée soit impossible : rien n'empêche que le promettant soit dessaisi de la possession de la chose qui sera considérée dès lors comme vendue et, si le stipulant en est évincé, rien ne s'opposera à ce qu il ait contre le promettant l'action en garantie d'éviction, surtout s il a déjà payé le prix.
Pour que ces effets se produisent, il suffit, mais il est nécessaire, que le tribunal rende un jugement qui tienne la vente pour faite et qui forme titre de vente et d'achat entre les parties : ce sera même un titre authentique, là où le promettant ne devait fournir qu'un titre sous seing privé.
Mais une grande difficulté pourrait sc présenter et la loi doit la résoudre.
Si, dans l'intervalle, le promettant avait aliéné la chose à un tiers, et qu'il s'agît d'un immeuble, et que ce tiers eût fait l'inscription, il serait impossible que le jugement dépouillât ce tiers ; un contrat volontaire de vente ne l'aurait pas pu, le jugement qui en tient lieu ne doit pas le pouvoir davantage.
D'un autre côté, celui auquel a été faite la promesse de vente ne doit pas être à la pure discrétion du promettant.
La loi déclare donc que si le stipulant a fait l'inscription de la promesse de vente, il a sauvegardé son droit éventuel de propriété contre les aliénations intérimaires que pourrait faire le promettant : les tiers sont alors prévenus que celui avec lequel ils traitent n'a plus qu'un droit résoluble sur la chose et que cette résolution s'accomplira quand le stipulant exercera la condition suspensive de son droit.
Ce cas est loin d'être le seul où une inscription s'applique à des droits éventuels (voy. Liv. des Biens art 352).
Lorsque, plus tard, le jugement sera rendu en faveur du stipulant, il sera mentionné en marge de ladite inscription et toute incertitude cessera.
Si l'inscription de La promesse n'avait pas été faite, l'inscription du jugement seul ne mettrait obstacle qu'aux aliénations postérieures. Toutefois, le stipulant pourrait toujours faire l'inscription de sa demande, pour se garantir contre les aliénations qui auraient lieu pendant le procès.
Si, au lieu d'un immeuble, objet de la promesse unilatérale de vente, nous; supposons qu'il s'agisse d'un meuble et qu'avant la décision du stipulant, il ait été aliéné et livré à un tiers de bonne foi, celui-ci ne pouvant être privé de la chose (Liv. des Biens, art. 46), la promesse ne pourrait se résoudre qu'en dommages-intérêts II Promesse unilatérale d'acheter. Cette promesse a des similitudes et des différence avec la précédente. Elle est régie par les deux mêmes articles, 26 et 27 sauf le dernier alinéa de l'article 27 qui ne s'applique qu'à la promesse de vendre.
Ainsi, celui qui a promis d'acheter dès que le stipulant déclarera vouloir vendre, sera tenu de passer le contrat quand le stipulant se prévaudra de la promesse qui lui a été faite ; il pourra seulement, s'il n'y a pas de délai fixé pour l'exercice du droit auquel il est soumis. en faire fixer un par le tribunal.
Si le promettant refuse de passer le contrat, le tribunal rendra un jugement qui le déclarera acheteur, au prix et aux conditions fixées, et s'il s'agit d'un immeuble, le jugement sera inscrit.
Jusqu'ici nous n'avons que des ressemblances entre les deux promesss ; mais voici où est la différence, et elle est considérable.
Lors même que la promesse d'achat aurait été inscrite par le promettant, elle ne le préserverait pas des aliénations que le stipulant aurait pu faire de la chose qui est restée à son entière disposition : ici, il n'y a pas eu, pour le promettant, acquisition de la propriété sous condition, ou, cette condition étant purement potestative pour le stipulant, on doit reconnaître qu en aliénant sa chose à un autre, il s'est mis volontairement hors d'état de se prévaloir vis-à-vis du promettant de la faculté de lui imposer la vente stipulée.
Il en est de même s'il s'agit d'un objet mobilier et qu'il l'ait aliéné et livré à un tiers.
III. Promesse réciproque de vendra et d'acheter. La promesse, quoique réciproque, ne produira, en principe, que les effets de la promesse unilatérale. Seulement, comme il y a deux promesses, l'effet, au lieu d'être simple, sera double : au lieu qu'une seule partie puisse contraindre l'autre, elles pourront se contraindre toutes deux; chacune pourra demander la fixation d'un délai, pour ne pas rester indéfiniment dans l'incertitude; s'il s'agit d'immeuble, celui qui doit jouer le rôle d'acheteur a intérêt à faire inscrire la promesse qui lui a été faite, pour être admis à invoquer son droit contre les cessionnaires intérimaires qui auraient traité avec celui qui devait être vendeur.
Cependant, la loi ne voulant pas donner une solution absolue et inflexible qui pourrait être contraire à l'intention des parties, laisse aux tribunaux le droit de décider, suivant les circonstances, que “les parties ont entendu faire une vente actuelle et immédiate,” et, s'il y a un délai fixé dans la promesse, “qu'il n'est pas donné aux parties pour passer le contrat, mais pour l'exécuter”