旧民法・法例(明治23年)

Code civil de l'Empire du Japon

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LIVRE DE L'ACQUISITION DES BIENS. DISPOSITION GÉNÉRALE. Art. 1er. Indépendamment des causes d'acquisition des droits, tant réels que personnels, reconnues au Livre précédent, les mêmes droits peuvent encore être acquis, comme il est réglé au présent Livre. CHAPITRE PREMIER. DE L'OCCUPATION. Art. 2. L'occupation est un moyen d'acquérir la propriété des choses mobilières sans maître, par une prise de possession originaire, avec intention de se les approprier. 3. L'exercice des droits de chasse et de pêche et l'acquisition des épaves tant terrestres que pluviales ou maritimes et des choses perdues sont réglés par des lois spéciales. Il en est de même des prises maritimes et du butin faits en temps de guerre. 4. Celui qui se prévaut de l'occupation d'une chose prétendue abandonnée est tenu de prouver l'abandon volontaire de l'ancien propriétaire. 5. La propriété du trésor découvert dans la chose d'autrui par l'effet du hasard et dont le propriétaire est inconnu appartient pour moitié à l'inventeur. Les droits du propriétaire de la chose dans laquelle le trésor était enfoui ou caché sont réglés, au Chapitre suivant. 6. L'ancien propriétaire du trésor ne peut faire valoir son droit contrairement aux attributions qui précèdent que dans le délai de trois ans après la découverte. Ce délai est réduit pour celui qui est en même temps le propriétaire de la chose dans laquelle le trésor a été découvert, à un an après qu'il a eu connaissance de la découverte. Mais la prescription ordinaire reste applicable, si les possesseurs du trésor sont de mauvaise foi. CHAPITRE II. DE L'ACCESSION. Art. 7. Le propriétaire d'une chose, soit immobilière, soit mobilière acquiert tout ce qui y est uni accessoirement, sous les distinctions ci-après. SECTION PREMIÈRE. DE L'ACCESSION RELATIVE AUX IMMEUBLES. Art. 8. Toutes constructions, plantations et ouvrages quelconques, faits au-dessus et au-dessous du sol ou des bâtiments, sont présumés faits par le propriétaire desdits sol et bâtiments et à ses frais, si le contraire n'est prouvé. La propriété desdits ouvrages et constructions lui appartient, s'il n'y a titre ou prescription au profit d'un tiers. En ce qui concerne les plantations, le cas est réglé à l'article 10 du présent Livre. 9. Si le propriétaire du sol ou des bâtiments a fait des constructions ou autres ouvrages avec des matériaux appartenant à autrui, il ne peut être forcé de détruire lesdits ouvrages et de rendre les matériaux, il ne peut non plus en imposer la reprise à celui auquel les matériaux appartenaient. Mais il sera condamné à indemniser ce dernier, conformément à l'article 385 du Livre des Biens, sous les distinctions qui y sont portées. 10. A l'égard des plantations d'arbres, arbustes ou plantes appartenant à autrui, le propriétaire ou le possesseur du sol qui les a faites peut être contraint, dans l'année, de les arracher et de les restituer, avec indemnité, s'il y a lieu. Si le propriétaire desdits arbres, plantes ou arbustes préfère ne pas les reprendre, ou si l'année est écoulée depuis la plantation, il sera indemnisé en argent. 11. Le possesseur de bonne foi d'un sol ou d'un bâtiment d'autrui qui a fait dans ledit sol ou bâtiment des constructions, ouvrages ou plantations avec ses propres matériaux, arbres ou arbustes, ne peut être tenu de les enlever lors de la revendication de l'immeuble par le vrai propriétaire: ce dernier lui payera, à son choix, soit le prix des matériaux et de la main-d'œuvre, soit la plus-value qui en résulte pour le fonds. Si celui qui a fait les constructions ou plantations était possesseur de mauvaise foi, le propriétaire peut le contraindre à les détruire en remettant les lieux en l'état antérieur, avec indemnité, s'il y a lieu; il peut aussi conserver lesdits ouvrages et plantations, en indemnisant le possesseur, comme il est dit ci-dessus. 12. L'attribution de la propriété des attérissements, des îles ou ilots, des relais, des cours d'eau navigables, flottables ou non, et celle de la propriété de la portion du terrain submergée par suite du changement d'un cours d'eau et de son ancien lit sera réglée par une loi spéciale; sauf ce qui est dit, à l'article 23 du Livre des Biens, à l'égard des relais de la mer. 13. Les poissons des étangs privés et les pigeons des colombiers qui passent dans un autre étang ou colombier sans y avoir été attirés ou retenus par artifice, appartiennent au propriétaire chez lequel ils se sont établis, s'ils ne sont pas réclamés dans une semaine, avec justification de leur identité. A l'égard des abeilles qui se sont transportées en essaim sur un fonds voisin, elles peuvent y être suivies et réclamées pendant une semaine. S'il s'agit d'animaux de nature sauvage, mais apprivoisés et fugitifs, la revendication peut en être exercée pendant un mois contre celui qui les a recueillis de bonne foi. SECTION II. DE L'ACCESSION RELATIVE AUX MEUBLES. Art. 14. Lorsque deux ou plusieurs choses mobilières appartenant à différents propriétaires ont été réunies par un tiers et sans leur volonté, et qu'elles peuvent être séparées facilement et sans détérioration ou dépréciation notable de l'une ou de l'autre, chacun des propriétaires peut en demander la séparation, avec indemnité, s'il y a lieu, à la charge de celui qui a fait l'adjonction. Peut être considérée comme détérioration, la modification des choses préalable à leur adjonction. 15. Si les deux choses ne peuvent être séparées ou ne peuvent l'être qu'avec une notable détérioration ou dépréciation, ou avec trop de frais ou de lenteurs, aucun des propriétaires ne peut demander la séparation, et la chose toute entière reste au propriétaire de la chose principale, à la charge par lui d'indemniser le propriétaire de la chose accessoire, dans la mesure où il est enrichi au préjudice de celui-ci. Est considérée comme chose accessoire, celle qui est réunie pour l'utilité, l'agrément ou le complément de l'autre; si les deux choses sont de même caractère, à ce point de vue, la chose accessoire est celle qui a le moins de valeur. Dans les autres cas, le caractère principal ou accessoire de chaque chose par rapport à l'autre est laissé à l'appréciation des tribunaux. 16. Si l'adjonction a eu lieu par la faute ou le dol du propriétaire de la chose principale et que la séparation ne doive pas avoir lieu, d'après les règles précédentes, l'indemnité du propriétaire de la chose accessoire se mesure sur le dommage qu'il éprouve, apprécié comme il est dit aux articles 370 et 385 du Livre des Biens. Si ce dernier est l'auteur de l'adjonction, il ne sera indemnisé de sa perte que dans la mesure du profit de l'autre propriétaire. 17. Dans le même cas où les choses ne peuvent être séparées sans inconvénient, si aucune d'elles ne peut être considérée comme principale par rapport à l'autre, soit par sa nature, soit par sa qualité ou sa valeur, l'objet formé par l'adjonction sera commun entre les propriétaires, par portions égales, sans préjudice de l'indemnité contre celui qui est en faute ou de mauvaise foi. 18. Les mêmes règles s'appliquent, sous les mêmes distinctions, au mélange de liquides, de solides ou de métaux appartenant à différents propriétaires. Toutefois, lorsqu'il y aura lieu à copropriété entre les intéressés, parce que les matières inséparables seront de mêmes nature et qualité, les droits de chacun seront proportionnels à la quantité provenant de lui dans le mélange. 19. Dans le cas où, soit l'adjonction, soit le mélange, résulte du fait de l'un des propriétaires, l'autre n'est pas tenu d'accepter la propriété exclusive, ni la copropriété: il peut alors exiger que l'auteur de l'accession lui fournisse en nature une chose de pareille qualité ou sa valeur en argent. 20. Si quelqu'un, avec la matière d'autrui, a formé un objet d'une destination nouvelle, la propriété dudit objet peut être réclamée par le propriétaire de la matière, en payant le prix de la main-d'œuvre. Si pourtant la valeur de la main-d'œuvre excède notablement celle de la matière, la propriété de l'objet nouveau appartient au spécificateur, à la charge d'indemniser le propriétaire de la matière. Si le spécificateur a fourni, en même temps, une partie de la matière, la valeur de celle-ci sera jointe à celle de la main-d'œuvre, pour déterminer le droit de préférence. Le propriétaire de la matière employée sans son consentement peut toujours renoncer à la préférence qui lui appartiendrait et demander une matière pareille à la sienne, en qualité et quantité, ou sa valeur en argent. 21. Si l'adjonction, le mélange ou la spécification ont eu lieu du consentement exprès ou tacite des propriétaires intéressés, la propriété sera déterminée d'après la convention: dans le doute, la séparation ne pourra être demandée, lors même qu'elle serait facile, et les dispositions précédentes relativement au droit de préférence ou à la copropriété seront applicables. 22. Dans les cas d'accession mobilière non prévus aux articles précédents, les tribunaux règleront les questions de propriété et d'indemnité, en s'aidant, s'il y a lieu, des analogies avec les cas ici prévus et en s'inspirant des principes de l'équité naturelle. 23. La portion du trésor qui n'est pas attribuée à l'inventeur, d'après l'article 5, appartient, par droit d'accession, au propriétaire de la chose mobilière ou immobilière dans laquelle le trésor était enfoui ou caché. Si la découverte fortuite est faite par le propriétaire même de cette chose, le trésor lui appartient en entier: savoir, pour une moitié, par occupation et, pour l'autre moitié, par accession. Le trésor découvert par l'effet de recherches faites à cet effet par le propriétaire ou par son ordre, ou même par un tiers sans son ordre, appartient pour le tout au propriétaire, par accession. La prescription établie par l'article 6, en faveur de l'inventeur du trésor contre la revendication de l'ancien propriétaire, est applicable ici. CHAPITRE III. DE LA VENTE. SECTION PREMIÈRE. DES RÈGLES COMMUNES DE LA VENTE. § Ier. DE LA NATURE ET DE LA FORMATION DE LA VENTE. Art. 24. La vente est un contrat par lequel une partie transfère ou s'oblige à transférer à l'autre la propriété ou un démembrement de la propriété d'une chose, moyennant un prix déterminé en argent que l'autre partie ou un tiers s'engage à lui payer. Le contrat de vente est soumis aux règles générales des contrats à titre onéreux et synallagmatiques, sauf les dispositions ci-après. 25. La vente est parfaite par le seul consentement des parties. Celles-ci peuvent cependant la subordonner à la rédaction d'un acte, soit authentique, soit sous seing privé, destiné à servir de preuve à chaque partie. 26. La promesse unilatérale de vendre ou celle d'acheter oblige le promettant à passer le contrat, aux prix et conditions déterminés dans la promesse, dès que le stipulant l'exigera, sous les conditions et distinctions portées à l'article 308 du Livre des Biens. 27. Si le promettant refuse de passer le contrat, le tribunal rendra un jugement qui tiendra la vente pour faite. Le jugement sera inscrit, lorsqu'il s'agira de vente de droits immobiliers. Si la promesse unilatérale de vendre a été inscrite comme telle, le jugement sera mentionné à la suite de l'inscription, laquelle produira rétroactivement ses effets contre les ayant-cause du vendeur. 28. S'il y a promesse réciproque de vendre et d'acheter, chaque partie peut contraindre l'autre à passer le contrat, comme il est dit à l'article précédent. Le tribunal peut décider, dans ce cas, par interprétation de la volonté des parties, que la promesse de vente a valu vente actuelle et immédiate, et si un délai a été fixé, qu'il ne s'applique qu'à l'exécution. 29. Dans le cas où, d'après les quatre articles précédents, les deux parties ou l'une d'elles se sont obligées à passer ultérieurement un contrat de vente et d'achat, ou seulement à le rédiger, et qu'il a été donné des arrhes comme garantie de la promesse, la partie qui refuse de passer le contrat ou de le rédiger perd les arrhes qu'elle a données ou rend au double celles qu'elle a reçues. 30. Dans les ventes actuelles et immédiates, les arrhes ne sont un moyen de se départir du contrat qu'au profit de celui qui les a données; néanmoins, si les arrhes données par l'acheteur consistent en argent, le caractère de moyen de dédit doit leur être formellement attribué par la convention, sauf les cas où il leur est attribué par l'usage local. Dans aucun cas, le dédit n'est possible, lorsque le contrat a été exécuté, en tout ou en partie. 31. Si la vente a été faite à l'essai, elle peut être, suivant les circonstances, considérée comme faite sous la condition suspensive de l'agrément de l'acheteur ou sous la condition résolutoire de son refus. Les ventes de denrées qu'il est d'usage de goûter sont présumées faites sous la condition suspensive qu'elles seront agréées. 32. Dans les deux cas prévus à l'article précédent, l'acheteur, à défaut d'un délai fixé pour l'exercice de la faculté qui lui appartient, peut être sommé d'avoir à se prononcer à bref délai; faute de le faire, il est présumé avoir accepté, s'il a pris livraison de la chose ou des denrées vendues, et avoir refusé, dans le cas contraire. 33. Le prix de vente doit être déterminé par le contrat même, sinon dans sa totalité, au moins dans ses éléments. Il peut être aussi, soit référé au cours commercial, actuel ou prochain, de pareilles marchandises, soit laissé à l'estimation d'un tiers désigné par le contrat. Ladite estimation peut être contestée, si elle est manifestement erronée ou contraire à l'équité; mais la contestation doit être élevée par la partie qui se prétend lésée, aussitôt qu'elle a connaissance de l'estimation. S'il y a dol concerté entre le tiers et l'une des parties, les articles 312 et 544 du Livre des Biens sont applicables. Le prix fixé par les parties peut consister, soit en capital, soit en rente perpétuelle ou viagère; mais, s'il est fixé par un tiers, il ne peut consister qu'en capital, à moins que les parties n'aient expressément donné au tiers des pouvoirs plus étendus. 34. Les frais de l'acte de vente sont à la charge des deux parties, par portions égales, si elles n'en ont décidé autrement. § II. DES INCAPACITÉS DE VENDRE OU D'ACHETER Art. 35. Le contrat de vente, de meubles ou d'immeubles, est interdit entre époux. Les époux peuvent se faire respectivement une dation en payement, lorsqu'il s'agit pour l'un d'eux d'éteindre une dette sincère et légitime qu'il a envers l'autre. Ladite dation en payement ne sera valable et parfaite entre les parties que lorsqu'elle aura été homologuée par le tribunal après due justification. Si elle a pour objet un droit réel immobilier, elle ne vaudra à l'égard des tiers que si l'homologation en a été mentionnée dans la inscription de l'acte. 36. L'action en rescision fondée sur l'article précédent n'appartient qu'à l'époux qui a fait la vente ou la dation en payement non autorisée et à ses héritiers ou ayant-cause; elle est d'ailleurs soumise aux dispositions générales des articles 544 et suivants du Livre des Biens. 37. Les mandataires ou administrateurs, légaux, judiciaires ou conventionnelles, ne peuvent se rendre acquéreurs, soit à l'amiable, soit aux enchères publiques, directement et en leur nom personnel ou par personnes interposées, des biens qu'ils sont chargés de vendre. La même prohibition s'applique aux officiers publics chargés par la loi de procéder aux enchères ou de les présider. 38. L'action en rescision de la vente faite contrairement au précédent article n'appartient qu'à l'ancien propriétaire, à ses héritiers et ayant-cause. 39. Les juges, les officiers du ministère public et les greffiers ne peuvent se rendre acquéreurs de droits réels ou personnels contestés et de nature à être l'objet d'un procès devant le tribunal près duquel ils exercent leurs fonctions. La même prohibition s'applique aux avocats et aux notaires, sous les mêmes conditions. 40. L'action en rescision résultant de l'article précédent ne peut être exercée que par le cédant, par celui contre lequel les droits contestés ont été cédés, et par leurs héritiers ou ayant-cause. Celui contre lequel les droits contestés ont été cédés, ses héritier ou ayant-cause peuvent aussi exercer le retrait desdits droits, en remboursant au cessionnaire le prix réel de cession et les intérêts depuis le jour du payement. Le tout, sans préjudice des peines disciplinaires contre les contrevenants. § III. DES CHOSES QUI NE PEUVENT ÊTRE VENDUES. Art. 41. La vente est nulle lorsqu'elle a pour objet une chose qui, par sa nature, est hors du commerce général ou dont la disposition est refusée aux particuliers par une loi spéciale. La nullité de cette vente peut être invoquée par les deux parties, tant par voie d'exception que par voie d'action. Si la prohibition de la vente a été dissimulée par le dol de l'une des parties, celle-ci pourra être condamnée à des dommages-intérêts. 42. La vente de la chose d'autrui est nulle à l'égard des deux parties. Toutefois, la nullité ne peut être invoquée par le vendeur que s'il ignorait, lors de la vente, que la chose était à autrui. 43. La vente est nulle, si, au moment du contrat, la chose est périe en totalité; sauf l'indemnité à l'acheteur de bonne foi, si le vendeur a connu cette perte ou a été en faute de l'ignorer. Si la chose n'est périe qu'en partie, l'acheteur, s'il l'ignorait, a le choix, ou de faire résilier la vente, en justifiant que ce qui reste ne suffit pas à sa destination, ou de la maintenir avec diminution proportionnelle du prix; sans préjudice de dommages-intérêts, dans les deux cas, si le vendeur est en faute. La demande en résiliation ne sera plus recevable après six mois, et celle en diminution du prix après deux ans, depuis que l'acheteur aura eu connaissance de la perte partielle. SECTION II. DES EFFETS DU CONTRAT DE VENTE. § Ier DU TRANSFERT DE PROPRIÉTÉ ET DES RISQUES. Art. 44. Le contrat de vente est soumis, quant au transfert de propriété et aux risques de la chose vendue, aux règles du droit commun, telles qu'elles sont établies par les articles 331, 332, 335 et 419 du Livre des Biens. 45. Si l'objet de la vente est un immeuble, le contrat doit être inscrit, aux termes des articles 348 et suivants du Livre des Biens, pour être opposable aux ayant-cause particuliers et de bonne foi du vendeur. Les articles 346 et 347 du même Livre sont applicables, dans le même but, aux ventes de meubles corporels et de créances. § II. DES OBLIGATIONS DU VENDEUR. Art. 46. Indépendamment de l'obligation de transférer la propriété, lorsqu'il s'agit de choses de quantité, le vendeur a l'obligation de délivrer la chose vendue, celle de la conserver jusqu'à la délivrance, enfin, celle de garantir l'acheteur contre les troubles et évictions. I. DE L'OBLIGATION DE DÉLIVRER. Art. 47. Le vendeur est tenu de délivrer la chose vendue, au temps et au lieu convenus, en l'état où elle se trouve, sauf l'indemnité due à l'acheteur, au cas de négligence dans la conservation. A défaut de convention sur le temps et le lieu de la délivrance, l'article 333, 6e et 7e alinéas du Livre des Biens, est applicable. Toutefois, le vendeur peut retenir la chose vendue jusqu'au payement du prix, si l'acheteur n'a pas obtenu un délai conventionnel à cet égard. Le vendeur peut encore retarder la délivrance, lors même qu'il a accordé un délai pour le payement, si l'acheteur est tombé en faillite ou devenu insolvable depuis la vente, ou si même il a dissimulé son insolvabilité antérieure à la vente. 48. Le vendeur doit, en général, délivrer toute la quantité promise au contrat et cette quantité seulement. Toutefois, il peut être tenu de céder et l'acheteur peut être tenu d'acquérir plus que cette quantité, dans les cas et sous les distinctions portées aux articles suivants. 49. Si la chose vendue est un immeuble déterminé dont la contenance totale a été déclarée au contrat, avec indication du prix de chaque mesure, et que la contenance réelle soit moindre que celle annoncée, le vendeur doit subir une diminution proportionnelle du prix, lors même qu'il aurait déclaré vendre "sans garantie de la contenance." Si la contenance réelle est supérieure à celle déclarée, l'acheteur doit payer un supplément proportionnel du prix. 50. Si l'immeuble a été vendu avec indication de la contenance totale, pour un prix unique, le vendeur, au cas de moindre contenance, ne subira de diminution du prix que s'il est de mauvaise foi ou, au cas de bonne foi, s'il a garanti la contenance, ou si ce qui manque est au moins d'un vingtième. La mention que "la contenance n'est pas garantie" ou qu'elle n'est qu'approximative" ne diminue pas la responsabilité du vendeur de mauvaise foi. En cas d'excédant, l'acheteur ne doit payer de supplément de prix que si l'excédant est d'un vingtième en sus. 51. Si deux ou plusieurs fonds, bâtis ou non, ont été vendus par un seul et même contrat et pour un prix unique, avec indication de la contenance de chacun, et qu'il y ait une contenance plus grande dans l'un et moindre dans l'autre, la compensation se fait d'après la valeur respective des mesures et non d'après leur étendue; Après quoi, il y a lieu à augmentation ou à diminution proportionnelle du prix, si la compensation laisse, en plus ou en moins, une différence d'un vingtième du prix primitif. La présente disposition est applicable au cas où, les diverses parties d'un même fonds étant de natures différents, la contenance de chaque partie aurait été annoncée. 52. Dans les cas où l'acheteur a droit à une diminution du prix pour moindre contenance, il peut aussi demander des dommages-intérêts, et même la résiliation du contrat, s'il prouve que la contenance promise était nécessaire à la destination de la chose; sauf le cas où la vente été faite sans garantie de contenance. Au cas d'excédant, si l'acheteur doit payer un supplément de prix d'un vingtième ou plus, il peut résilier le contrat purement et simplement. 53. Les règles qui précèdent sont applicables aux ventes de denrées et de chose mobilières dont la quantité déclarée, en poids, nombre et mesure, ne peut être facilement et immédiatement vérifiée par l'acheteur. 54. Les actions en redressement du prix, en dommages-intérêts ou en résiliation autorisées par les articles précédents doivent être exercées dans le délai d'un an, s'il s'agit d'immeubles, et d'un mois, s'il s'agit de meubles. Le délai court, pour le vendeur, du jour du contrat, et, pour l'acheteur, du jour de la délivrance. 55. Si, dans les ventes de meubles ou d'immeubles, l'erreur porte sur les qualités de la chose vendue, l'article 310 du Livre des Biens est applicable. II. OBLIGATION DE GARANTIE D'ÉVICTION. Art. 56. Lorsqu'il y a eu vente de la chose d'autrui et qu'il n'est intervenu aucune convention spéciale au sujet de la garantie, l'acheteur peut faire prononcer la nullité de la vente, avant même d'être menacé d'éviction et encore que, lors du contrat, il ait su que la chose n'appartenait pas au vendeur et que celui-ci l'ait ignoré 57. Si l'acheteur a été de mauvaise foi, l'effet de la nullité de la vente et de la garantie d'éviction est seulement de le libérer de l'obligation de payer le prix encore dû ou de l'autoriser à répéter ce qui en a déjà été payé. Il n'est pas tenu de subir une diminution dans ladite répétition, lors même que la chose aurait diminué de valeur, à moins que la diminution ne résulte de son dol ou n'ait tourné à son profit. Dans tous les cas, lorsque l'acheteur recouvre le prix qu'il a payé, il doit restituer au vendeur la possession de la chose. 58. Si l'acheteur a été de bonne foi lors du contrat, il obtient, en outre, le remboursement: 1° De la part des frais de contrat qu'il a payée; 2° Des dépenses qu'il a pu faire sur la chose vendue et dont il n'est pas remboursé par le vrai propriétaire; 3° Du montant de la plus-value que la chose a pu acquérir, même par cas fortuit; 4° Des fruits perçus depuis la demande du propriétaire et qui ont dû être restitués à celui-ci. Toutefois, l'acheteur peut, s'il le préfère, demander, au lieu et place des fruits, les intérêts légaux de son prix, pendant la période correspondante. L'acheteur de bonne foi peut encore demander tous autres dommages-intérêts, conformément au droit commun, tels que les frais faits en défense à la revendication du propriétaire et ceux de la demande même en garantie. 59. Si le vendeur a été de bonne foi au moment du contrat, les indemnités prévues aux nos 2 et 3 et au dernier alinéa de l'article précédent ne sont dues par lui que dans la mesure où il a pu raisonnablement les prévoir, conformément à l'article 385 du Livre des Biens. 60. Si le vendeur de bonne foi a découvert depuis le contrat que la chose appartient à autrui, il peut, lorsqu'il est assigné en délivrance, opposer la nullité de la vente et faire statuer, par voie d'exception, sur le règlement de la garantie, lors même que l'acheteur offre de lui payer le prix, à moins que celui-ci ne déclare formellement renoncer à tout recours en cas d'éviction. 61. Si cette découverte n'a lieu qu'après la délivrance, le vendeur peut mettre l'acheteur en demeure d'exercer immédiatement l'action en garantie ou de faire constater contradictoirement avec lui le montant des indemnités actuellement dues, d'après l'article 58. Dans ce dernier cas, le vendeur, en consignant, après offres réelles, ladite valeur estimative, avec le prix qu'il a reçu, est à l'abri de toute autre responsabilité, à quelque époque qu'ait lieu l'action en garantie. Le vendeur qui, aux termes de l'article 478 du Livre des Biens a usé du droit de retirer les sommes consignées ne peut invoquer une seconde fois la faculté accordée par le présent article. 62. Si le vendeur de la chose d'autrui est devenu plus tard propriétaire de la chose vendue, il peut, à toute époque, faire sommation à l'acheteur d'avoir à opter entre l'action en garantie et la ratification de la vente. Le même droit appartient au vrai propriétaire devenu héritier du vendeur de la chose d'autrui. 63. Si la chose vendue appartient à un tiers pour une portion divise, en pleine ou eu nue propriété, et que l'acheteur prouve que, par sa nature ou par son étendue, cette portion est d'une utilité telle qu'il n'aurait pas acheté s'il avait su ne pas l'acquérir, il peut obtenir la résiliation du contrat, avec dommages-intérêts, comme il est dit pour le cas d'éviction totale. Si l'acheteur ne fait pas prononcer la résiliation du contrat, il sera indemnisé dans la mesure de la perte directe et actuelle qu'il éprouve. 64. Si c'est une portion indivise qui appartient à un tiers, l'acheteur aura le droit de résiliation, avec dommages-intérêts, quelle que soit l'importance de cette portion. S'il ne fait pas résilier, il recouvrera toujours une partie correspondante de son prix d'acquisition et des frais de contrat, lors même que la chose aurait diminué de valeur, et avec dommages-intérêts, s'il y a plus-value. 65. Les dispositions de l'article 63 sont applicables lorsqu'il y a eu, soit éviction d'une servitude active déclarée au contrat comme appartenant au fonds vendu, soit réclamation par un tiers d'une servitude passive établie par le fait de l'homme et non déclarée par le contrat, d'un usufruit ou d'un droit de bail portant sur une portion des biens, ou même sur le tout, si le temps restant à courir n'excède pas un an pour les bâtiments et deux ans pour les terres. S'il s'agit d'un usufruit total ou d'un droit de bail portant sur la totalité du bien vendu et dont la durée doive excéder un an pour les bâtiments et deux ans pour les terres, l'acheteur pourra faire résilier la vente, sans avoir à prouver l'insuffisance des droits qui lui restent, conformément à l'article précédent. 66. Si le fonds vendu est grevé de priviléges ou hypothèques, déclarées ou non par le contrat, et que l'acheteur, faute d'avoir rempli les formalités nécessaires pour le dégrever, avant ou avec le payement de son prix, soit exproprié par les créanciers du vendeur, il a contre celui-ci son recours en garantie, tel qu'il est réglé par les articles 58 et 59. 67. L'adjudicataire sur saisie qui a subi l'éviction peut recourir pour la restitution du prix contre le saisi, et, en cas d'insolvabilité de celui-ci, contre les créanciers auxquels le prix a été attribué. L'adjudicataire ne peut réclamer de dommages-intérêts au saisissant que si celui-ci a su, lors de la saisie, que la chose n'appartenait pas au débiteur, et, à ce dernier, que s'il a frauduleusement dissimulé les droits des tiers sur la chose. Les officiers publics chargés de la rédaction du cahier des charges et de la procédure d'adjudication ne pourront être soumis à des dommages-intérêts que s'ils ont contribué à l'erreur de l'acheteur par un manquement aux devoirs de leur fonction. 68. Le vendeur d'une créance est, de droit, garant de l'existence de la créance en sa faveur et de sa validité. Il n'est garant de la solvabilité du débiteur que s'il a promis expressément cette garantie. Dans ce cas même, il ne répond que de la solvabilité au jour de la cession, si la créance est déjà échue, et dans les limites du prix qu'il a reçu, à moins d'engagement formel plus étendu et sauf les règles particulières aux effets de commerce cessibles par endossement. S'il s'agit d'une créance non encore échue et que le cédant ait garanti, sans autre spécification, "la solvabilité future du débiteur," la garantie cesse quand l'insolvabilité du cédé est survenue après un an depuis l'échéance, et s'il s'agit d'une rente perpétuelle, après dix ans depuis la cession. 69. Dans la cession d'un droit litigieux, soit réel, soit personnel, le cédant, en l'absence de convention spéciale et si le cessionnaire a eu connaissance du litige, n'est garant que de la réalité de sa prétention et non de l'existence véritable du droit cédé. La présente disposition n'est applicable qu'à l'égard du droit qui est déjà l'objet d'une contestation formelle au fond, soit judiciaire, soit extrajudiciaire. Dans le cas où la prétention du cédant était fausse, il est tenu, outre la restitution du prix de cession, de l'indemnité des avantages que le cessionnaire a légitimement espérés. 70. Celui qui vend son droit dans une société, n'est garant que de l'existence de son droit et de son étendue annoncée dans la vente. Les droits et obligations résultant pour le vendeur des opérations de la société antérieures à la vente et déjà liquidées ne profitent ni ne nuisent à l'acheteur. Il en est de même des comptes particuliers du vendeur avec la société. 71. Dans les cas qui précèdent, s'il a été convenu que la vente était faite sans garantie, le vendeur reste tenu de restituer le prix, si l'acheteur est évincé, à moins que celui-ci n'ait connu lors de la vente le danger de l'éviction, auquel cas cette restitution n'est pas due. Le vendeur reste également affranchi de la restitution du prix, par cela seul que la vente a été faite "aux risques et périls de l'acheteur." Mais, dans aucun cas ni à la faveur d'aucune clause, le vendeur ne peut se soustraire à la garantie des troubles ou évictions résultant de droits par lui conférés avant ou depuis la vente. 72. Lorsque le vendeur prétendra, à raison de la mauvaise foi de l'acheteur, se soustraire à tout ou partie de ses obligations résultant de l'éviction, les inscriptions d'actes affectant la chose vendue au profit des tiers ne suffisent pas en elles-mêmes à prouver la mauvaise foi de l'acheteur et ne dispensent pas le vendeur de fournir la preuve directe que l'acheteur avait eu, avant la vente, connaissance desdits actes, par des certificats du conservateur des registres ou autrement. 73. Les articles 399 et 400 du Livre des Biens sont applicables à l'appel du vendeur en garantie et à la déchéance de l'acheteur évincé, faute d'avoir mis le garant en cause. § III. DES OBLIGATIONS DE L'ACHETEUR. Art. 74. L'acheteur doit payer le prix au temps convenu et, à défaut de convention spéciale à ce sujet, au moment de la délivrance. La convention qui retarde la délivrance est présumée retarder tacitement le payement du prix. Si le vendeur a obtenu du tribunal un délai de grâce pour la délivrance, l'acheteur jouit du même délai pour le payement du prix. Réciproquement, le délai de grâce accordé pour le payement du prix s'étend à la délivrance. 75. A défaut de lieu convenu, le payement se fait au lieu où s'effectue la délivrance, s'il s'agit d'une chose mobilière corporelle, et au lieu de la remise des titres, s'il s'agit d'un immeuble, d'une créance, d'un droit litigieux ou d'un droit dans une société. Si le payement est exigible avant ou après la délivrance, il se fait au domicile de l'acheteur. 76. L'acheteur doit, de plein droit, les intérêts du prix à partir de la délivrance, si la chose produit des fruits ou autres avantages périodiques appréciables en argent. Dans le cas contraire, les intérêts ne sont dus qu'en vertu d'une convention spécial ou d'une sommation de payer. 77. Si l'acheteur est troublé ou a juste sujet de craindre d'être troublé par une action réelle, il peut, suivant la gravité de l'action, refuser de payer tout ou partie du prix, jusqu'à ce que le vendeur ait fait cesser le trouble ou le danger, ou lui ait donné caution de restituer le prix, au cas d'éviction. La présente disposition ne préjudicie pas au droit pour l'acheteur de faire prononcer la nullité de la vente et d'exercer l'action en garantie, s'il peut prouver directement que la chose appartient à autrui. 78. S'il existe sur l'immeuble vendu des inscriptions d'hypothèque ou de privilége, l'acheteur n'est tenu de payer le prix qu'après avoir accompli les formalités de la purge, pourvu qu'il y procède dans les délais légaux. 79. Dans les cas prévus aux deux articles précédents, si la publicité nécessaire à la conservation du privilége du vendeur et de son droit de résolution contre les tiers n'a pas été observée, celui-ci peut exiger que le prix soit consigné sans délai par l'acheteur, au nom des deux parties, de manière à ne pouvoir être retiré qu'à la fin de la procédure, en vertu de leur consentement réciproque ou d'une décision du tribunal. 80. Si l'acheteur de choses mobilières, ayant ou non payé le prix, refuse de prendre livraison, au moment où il a le droit de le faire, le vendeur peut procéder aux offres et à la consignation des choses vendues, conformément aux articles 474 à 478 du Livre des Biens. Toutefois, s'il s'agit de denrées ou autres objets susceptibles d'une prompte détérioration le vendeur doit les revendre pour le compte de l'acheteur, s'il en a la possibilité. SECTION III. DE LA RÉSOLUTION ET DE LA RESCISION DE LA VENTE. § Ier DE LA RÉSOLUTION POUR INEXÉCUTION LES OBLIGATIONS. Art. 81. Si l'une des parties manque à remplir tout ou partie de ses obligations, telles qu'elles sont déterminées ci-dessus ou de toutes autres obligations auxquelles elle se serait spécialement soumise, l'autre peut demander en justice la résolution du contrat, avec indemnité de ses pertes, s'il y a lieu, conformément aux article 421 à 424 du Livre des Biens. Si la résolution a été expressément stipulée entre les parties, le tribunal ne peut la retarder par la concession d'un délai de grâce; mais elle ne produit son effet de plein droit que si la partie qui manque à exécuter a été inutilement mise en demeure. 82. La résolution faute de payement ou d'exécution des autres obligations de l'acheteur ne peut être poursuivie par le vendeur contre les sous-acquéreurs que si l'acte de vente inscrit porte que tout ou partie du prix lui est encore dû ou exprime les autres charges, sauf ce qui est dit à l'article 182 du Livre des Garanties. 83. Dans les ventes de meubles faites avec terme pour le payement, si la délivrance en a été effectuée, le vendeur ne peut exercer le droit de résolution faute de payement au préjudice des autres créanciers de l'acheteur. Si la vente a été faite sans terme, le vendeur peut faire résoudre la vente dans la huitaine de la délivrance, mais sans préjudicier aux droits réels déjà acquis aux tiers de bonne foi. § II. DE L'EXERCICE DE FACULTÉ DE RETRAIT. Art. 84. Le vendeur peut, au moyen du pacte de retrait inséré dans l'acte de vente, stipuler que ladite vente sera résolue si, dans un délai déterminé, il restitue à l'acheteur le prix et la portion de frais que celui-ci a payée. Le délai ne peut excéder cinq ans pour les immeubles et deux ans pour les meubles; si la stipulation a été faite pour un temps plus long, elle est, de droit, réduite à ce terme. Le délai, une fois fixé, ne peut être prorogé, même dans ladite limite. Toutefois, la prorogation peut être considérée comme promesse de revente; elle est alors soumise aux dispositions des articles 26 et 27. Il en est de même de la stipulation de retrait faite après la vente ou dans un acte séparé. Le vendeur ne peut valablement stipuler la faculté de retrait, s'il donne un terme pour le payement de la moitié du prix ou davantage et si ce terme est égal ou supérieur à la moitié du délai fixé pour le retrait. 85. A l'égard des immeubles, l'exercice de la faculté de retrait, dans le délai et sous les conditions fixés par la loi, fait rentrer le bien vendu dans les mains du vendeur, libre de tous les droits réels conférés par l'acheteur ou acquis aux tiers de son chef, à l'exception des baux dont la durée restant à courir n'excède pas un an. S'il s'agit d'un objet mobilier, la faculté de retrait ne peut s'exercer contre les tiers qui ont, de bonne foi, acquis des droits réels sur la chose vendue. 86. Les créanciers du vendeur peuvent exercer la faculté de retrait en son lieu et place. Toutefois, l'acheteur peut exiger qu'ils établissent préalablement l'insolvabilité de leur débiteur et se fassent subroger judiciairement au vendeur pour l'exercice de cette faculté, conformément à l'article 339 du Livre des Biens. L'acheteur peut aussi, dans le même cas, arrêter l'action des créanciers en leur payant la valeur actuelle de l'immeuble à dire d'experts, déduction faite du montant des sommes qu'ils auraient à lui restituer, du chef du vendeur, d'après l'article 88. 87. Si la chose vendue à retrait a été ensuite hypothéquée ou grevée d'autres droits réels par le vendeur, l'effet de ces droits ne peut se produire qu'après l'exercice de la faculté du retrait par le vendeur ou par ses créanciers. Si le vendeur a aliéné la propriété de la chose sujette à retrait, son acquéreur peut exercer le retrait en son propre nom, mais à charge de respecter les autres droits réels antérieurement consentis par le vendeur au profit d'un tiers et révélés par l'inscription, sauf son recours en garantie. 88. Le vendeur usant de la faculté de retrait doit, dans le délai fixé, rembourser à l'acheteur, outre le prix originaire de la vente et les frais de contrat, les dépenses faites pour la conservation de la chose. Si l'acheteur refuse de recevoir lesdites sommes, le vendeur doit les consigner sans délai. Le vendeur doit également rembourser les dépenses qui ont amélioré la chose; mais il peut, à cet égard, obtenir un délai du tribunal. L'acheteur jouit du droit de rétention de la chose jusqu'au parfait payement desdites sommes. 89. Dans le cas ou l'un des copropriétaires d'un immeuble a vendu à retrait sa part indivise si l'acheteur, sur une licitation provoquée contre lui, s'est rendu adjudicataire, le vendeur ne peut exercer le retrait que pour la totalité du bien en ajoutant à la somme mentionnée à l'article précédant le montant du prix de licitation; l'acheteur ne peut non plus s'y opposer. Si la licitation a été provoquée par l'acheteur, le vendeur peut n'exercer le retrait que pour la part qu'il a vendue; l'acheteur peut aussi s'opposer au retrait total. 90. Si l'adjudication sur licitation, par quelque partie qu'elle ait été provoquée, a eu lieu en faveur d'un des autres copropriétaires ou d'un étranger, le vendeur conserve son droit au retrait contre l'adjudicataire, pour la portion seule qu'il a vendue, s'il n'a pas été appelé à la licitation; il le perd, dans le cas contraire. 91. Si le partage a été fait en nature et que le vendeur y ait été appelé, celui-ci ne peut élever aucune réclamation sur la part échue aux autres propriétaires, quelle que soit la partie qui a provoqué le partage; il peut seulement reprendre la part échue à son acheteur; sauf aux deux parties à se tenir compte respectivement de la soulte fournie ou reçue par l'acheteur. Si le vendeur n'a pas été appelé au partage, il peut, à son choix, ou ratifier le partage et exercer contre son acheteur le droit sus-énoncé, ou rembourser à celui-ci la somme mentionnée à l'article 88 et provoquer contre ses copropriétaires un nouveau partage. 92. Si les copropriétaires d'une chose indivise l'ont vendue à retrait par un seul même contrat et pour un prix unique, l'acheteur n'est pas tenu de subir le retrait pour partie. Il peut aussi s'opposer au retrait total par un seul des vendeurs. Si, au contraire, les divers copropriétaires ont vendu leur portion par des contrats séparés, chacun peut en exercer le retrait séparément, sauf l'application des articles 89 et 91, s'il y a lieu. 93. Si plusieurs acheteurs ont acquis un bien à retrait, soit par un seul contrat, soit par des contrats distincts et séparés, et que le vendeur veuille exercer le retrait avant que le partage ait été fait entre eux, il peut l'exercer contre chaque acheteur pour sa part, soit conjointement, soit séparément. Si le partage a déjà eu lieu, le vendeur ne peut exercer le retrait contre chacun que pour la part qui lui est échue par le partage ou la licitation. § III. DE L'ACTION RÉDHIBITOIRE POUR VICES NON APPARENTS. Art. 94. Lorsque la chose vendue, mobilière ou immobilière, avait, au moment de la vente, des vices non apparents, irrémédiables et ignorés de l'acheteur, si ces vices la rendent impropre à l'usage auquel elle a été destinée, soit par sa nature, soit par l'accord des parties, ou diminuent tellement cet usage que l'acheteur n'aurait pas acheté s'il les avait connus, il peut en demander la rédhibition par le vendeur. Dans ce cas, il recouvre le prix qu'il a payé et les frais du contrat; mais les intérêts du prix se compensent avec la jouissance ou l'usage de la chose, jusqu'au jour de la demande. 95. Si l'acheteur ne peut justifier que les vices cachés soient assez graves pour fonder l'action rédhibitoire, ou s'il préfère garder la chose, il peut demander une diminution du prix à raison de la privation d'utilité qu'il éprouve. 96. Dans les deux cas, soit que l'acheteur obtienne contre le vendeur la rédhibition de la chose ou la diminution du prix, il peut réclamer, en outre, si le vendeur a connu les vices de la chose, des dommages-intérêts pour le préjudice éprouvé ou pour le gain manqué. 97. La stipulation de "non garantie des vices cachés" n'affranchit pas le vendeur de la responsabilité des vices qu'il connaissait et qu'il a dissimulés par dol. 98. La preuve, tant de l'existence des vices de la chose au moment de la vente et du préjudice qui en résulte pour l'acheteur que de la connaissance qu'avait de ces vices l'acheteur ou le vendeur, se fait par témoignage, par expertise ou par tous autres moyens légaux de preuve. 99. L'action rédhibitoire et celles en diminution du prix et en dommages-intérêts doivent être intentées dans les délais suivants: De six mois pour les immeubles; De trois mois pour les meubles; D'un mois pour les animaux. Ces délais se comptent à partir de la livraison. Toutefois, ils sont réduits à la moitié, à partir du jour où il est prouvé que l'acheteur a acquis la connaissance du vice, si ce qui en restait à courir excède cette moitié. L'action peut être reçue après l'expiration du délai, si l'acheteur prouve que, par une circonstance fortuite ou majeure, le vice caché n'a pu se révéler dans ledit délai; le nouveau délai est alors du tiers du délai normal, depuis la cessation de cette circonstance. 100. L'action en diminution du prix fondée sur les vices cachés n'est pas perdue pour l'acheteur par l'aliénation gratuite de la chose, ni par l'aliénation à titre onéreux, si, à raison de ces vices, elle a été faite avec perte, ou si l'acheteur lui-même est actionné par son cessionnaire ou en danger de l'être. 101. Si la chose vendue vient à périr en entier ou pour plus de moitié, par cas fortuit ou par force majeure, l'action rédhibitoire n'est plus recevable. Quelle que soit la perte partielle, l'action en diminution du prix subsiste en proportion de ce qui reste de la chose. Dans tous les cas, le vendeur reste responsable de la perte totale ou partielle provenant du vice caché. 102. Les ventes forcées, faites en bonne forme, ne donnent lieu ni à l'action rédhibitoire ni à celle en diminution du prix. 103. Jusqu'à ce qu'il soit statué par des lois spéciales sur l'effet des vices cachés dans les ventes de certains animaux et de certaines denrées, les présentes dispositions s'appliqueront aux ventes de ces objets. SECTION IV. DE LA LICITATION. Art. 104. Lorsqu'il y a lieu au partage d'un bien indivis, si un seul des propriétaires refuse le partage en nature, il est procédé soit à la vente amiable, soit à la vente aux enchères dudit bien, et le prix en est distribué aux ayant-droit dans la mesure de la part de chacun. 105. Si les copropriétaires ne peuvent se mettre d'accord, soit pour vendre à l'amiable à un tiers ou à l'un d'eux, soit pour enchérir entre eux, ou si parmi eux se trouve un absent ou un incapable, la licitation se fait devant le tribunal ou devant un officier public désigné par lui, avec les formalités requises pour les enchères par le Code de Procédure civile. Chacun des colicitants peut toujours exiger l'admission des étrangers aux enchères, et elle est de droit et nécessaire, lorsque l'un des copropriétaires est absent ou incapable. 106. Lorsque la chose est acquise en entier par l'un des copropriétaires, la licitation ou la vente amiable est considérée comme une opération de partage entre eux et produit les effets qui sont déterminés au sujet du partage des sociétés. Si l'adjudication ou la vente amiable est faite à un tiers, la vente produit entre lui et les anciens copropriétaires respectivement les effets d'une vente, tels qu'ils sont réglés au présent Chapitre. CHAPITRE IV. DE L'ÉCHANGE. Art. 107. L'échange est un contrat par lequel une partie transfère ou s'engage à transférer à l'autre la propriété d'une chose ou tout autre droit considéré comme équivalent d'une chose ou d'un droit qu'elle acquiert ou qui lui est promis. Si la valeur des droits respectivement cédés est inégale, l'inégalité est compensée par une soulte en argent ou autrement. Le contrat est considéré comme une vente, si la soulte en argent excède la valeur fournie en contre-échange de la valeur reçue. 108. Les parties se doivent respectivement la garantie de tous troubles et évictions au sujet des choses ou des droits fournis ou promis en contre-échange. Si l'une d'elles n'a pas acquis les choses ou les droits qui lui ont été promis, elle peut, à son choix, ou en réclamer l'équivalent en argent, ou agir en résolution du contrat et reprendre ce qu'elle a donné; le tout, avec dommages-intérêts, s'il y a lieu. La résolution, dans ce cas, ne s'exerce pas contre les tiers qui ont acquis des droits sur l'immeuble sujet au retour, si l'inscription de leur titre a eu lieu avant la publication de la demande, conformément à l'article 352, 1er alinéa du Livre des Biens. 109. Les règles de la vente s'appliquent à l'échange, sous les exceptions qui suivent: L'échange est permis entre époux; sauf l'application des règles prohibitives ou limitatives des donations, si l'inégalité des valeurs respectivement fournies constitue un avantage indirect. La résolution facultative de l'échange dans un délai fixe, stipulée au profit de l'une des parties ou de toutes deux, ne peut être opposée aux tiers que sous les conditions où peut l'être la promesse de vente, conformément à l'article 27 du présent Livre. CHAPITRE V. DE LA TRANSACTION. Art. 110. La transaction est un contrat par lequel les parties, au moyen de concessions ou sacrifices réciproques, terminent une contestation déjà née ou préviennent une contestation qui peut naître. La transaction est soumise aux règles générales des conventions, pour sa formation, sa validité, ses effets et sa preuve, sauf les dispositions qui suivent. 111. La transaction ne peut être rescindée pour erreur de droit, à moins que celle-ci ne provienne du dol de l'autre partie. 112. Elle ne peut être rescindée comme consentie en vertu de pièces fausses ou d'un acte nul que si le faux ou le fait auquel la loi attache la nullité de l'acte a été ignoré de la partie qui aurait pu en arguer. 113. La transaction faite à l'égard de contestations déterminées peut encore être rescindée pour erreur de fait, s'il apparaît, par des titres nouvellement découverts, que l'une des parties n'avait aucun droit sur l'objet de la contestation ou que l'autre partie y avait un droit entier et incontestable. Il en est de même, si la transaction a été faite, dans le cas où la contestation était déjà terminée par un jugement irrévocable ou par un contrat inattaquable, ignoré de la partie. Mais si la transaction a eu pour but de terminer ou de prévenir toutes les contestations quelconques que les parties pourraient avoir en vertu de causes antérieures, la découverte de titres décisifs en faveur d'une partie ne donne lieu à rescision que s'ils ont été retenus par le fait de la partie adverse. 114. La transaction valable produit entre les parties l'effet déclaratif d'un jugement irrévocable, lorsque les droits ou avantages respectivement reconnus au profit de chacune d'elles étaient déjà en jeu dans la contestation née ou prévue; dans ce cas, ils sont considérés comme retenus en vertu de leur cause antérieure, à moins que les parties n'aient entendu faire une novation. Si, au contraire, les droits ou avantages respectivement fournis ou promis sont, en tout ou en partie, étrangers à la contestation, la transaction est soumise, quant à ceux-ci, aux règles des conventions à titre onéreux qui produisent, transfèrent ou éteignent les droits réels ou les droits personnels. CHAPITRE VI. DE LA SOCIÉTÉ. SECTION PREMIÈRE. DE LA NATURE ET DE LA FORMATION DE LA SOCIÉTÉ. Art. 115. La société est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes font ou promettent chacune un apport déterminé dans le but de tirer des bénéfices destinés à être partagés entre elles, soit en faisant valoir les choses mises en commun, soit en accomplissant une entreprise ou exerçant une profession. 116. Les règles particulières aux sociétés commerciales sont exposées ou Code de commerce. 117. Les apports des associés peuvent consister, soit en propriété ou en jouissance de meubles ou d'immeubles, soit en argent, en services ou en industrie. Ils peuvent être inégaux. 118. Les sociétés civiles constituent des personnes morales, lorsque telle est la volonté des parties. Dans ce cas, elles doivent prendre un nom social et le contrat doit être publié dans les formes prescrites par la loi pour la publication des sociétés commerciales; le seul fait d'avoir donné un nom social à la société ou d'avoir publié l'acte de société fait présumer de la part des associés la volonté de lui donner une personnalité propre. 119. Les dispositions générales des conventions sont applicables aux sociétés: spécialement, en ce qui concerne le consentement et la capacité des parties, l'objet, la cause et la preuve. 120. Les sociétés dont le capital est divisé en actions sont soumises aux règles du Code de Commerce, lors même que leur objet n'est pas commercial. SECTION II. DES DROITS ET OBLIGATIONS DES ASSOCIÉS. Art. 121. La société commence au jour du contrat, si elle n'a été soumise expressément ou tacitement à un autre terme ou à une condition. C'est au même jour et sous la même réserve que chaque associé doit effectuer l'apport qu'il a promis; faute de ce faire, il doit, de plein droit, les fruits et tous les autres dommages-intérêts, s'il y a lieu, à raison du retard, même pour les sommes d'argent. 122. L'associé qui a promis à la société son industrie ou ses services et manque à sa promesse, lui doit, au choix des autres associés, ou l'indemnité des dommages qu'elle a éprouvés à partir du moment où il a manqué à remplir son obligation, ou le partage des profits qu'il a réalisés, en employant au dehors ses services. 123. L'associé qui a promis d'apporter à la société un corps certain, mobilier ou immobilier, en propriété, est garant envers la société, comme un vendeur, de tous troubles et évictions, du défaut de contenance ou de quantité et des vices cachés de la chose. S'il n'a promis à la société que la jouissance de la chose, il est tenu de la garantie comme un bailleur. 124. Si l'acte de société désigne un ou plusieurs administrateurs ou gérants parmi les associés, chacun doit se renfermer dans la limite des pouvoirs qui lui ont été conférés. Ceux dont les pouvoirs n'ont pas été déterminés se bornent à faire, ensemble ou séparément, les actes ordinaires d'administration. Ils peuvent aussi, mais ensemble seulement, faire les actes d'une plus grande importance qui rentrent dans l'objet de la société: en cas de désaccord, il doit être sursis à l'acte contesté et il en est référé à tous les associés qui décident à la majorité absolue des voix. 125. Si les gérants n'ont pas été désignés par le contrat et tant qu'il n'y est pas pourvu, à l'unanimité des voix, chacun d'eux a le pouvoir de faire les actes déterminés à l'article précédent, aux conditions qui y sont portées. 126. Les associés nommés gérants par l'acte de société ne peuvent être révoqués pendant la durée de leur mandat, si ce n'est pour cause légitime ou de l'accord de tous les associés, y compris le consentement des premiers. Ceux qui ont été nommés par acte postérieur peuvent être révoqués sans leur consentement, de la manière en laquelle ils ont été nommés. 127. Quelle que soit la manière dont les gérants ont été nommés, s'il y a décès, démission ou révocation d'un ou plusieurs d'entre eux, et si cet événement ne dissout pas la société, leur remplacement se fait à la majorité absolue des voix de tous les associés. 128. Toutes les autres mesures à prendre en exécution des statuts de la société sont prises également à la majorité absolue des voix. S'il s'agit de déroger auxdits statuts ou de faire des actes qui n'y sont pas prévus, l'unanimité des voix est nécessaire. Le tout, sauf les dispositions à ce contraires desdits statuts ou de la loi. 129. Lorsqu'un tiers est tenu de dettes de même nature envers la société et envers un des associés ayant pouvoir de gérer, s'il paye à l'associé une somme ou valeur qui ne suffise pas à éteindre les deux dettes, celui-ci ne peut imputer le payement sur sa propre créance que proportionnellement à sa valeur comparée à celle de la créance sociale; mais l'imputation faite par le débiteur doit être observée. Toutefois, si le débiteur a fait l'imputation totale sur la créance de l'associé, sans avoir un intérêt légitime à le faire, celui-ci est tenu de communiquer à la société une part proportionnelle dans le payement. A défaut d'imputation valable par le débiteur ou par l'associé, les règles de l'imputation légale s'appliquent, conformément à l'article 472 du Livre des Biens. 130. L'associé, gérant ou non, qui a reçu d'un débiteur de la société une partie de la chose due à celle-ci doit, dans tous les cas, en faire profiter la société, lors même qu'il aurait donné la quittance "pour sa part." 131. Tout associé, gérant ou non, est tenu de réparer les dommages qu'il a causés à la société par sa faute ou sa négligence. Ces dommages ne peuvent être compensés avec les profits ou avantages que l'associé aurait procurés à la société dans d'autres affaires, à moins qu'elles ne soient liées entre elles. 132. Les associés qui gèrent, parce qu'il n'a pas été désigné de gérants par le contrat, ne sont responsables de leurs fautes que s'ils n'ont pas apporté aux affaires de la société les mêmes soins qu'à leurs propres affaires. 133. Chaque associé est tenu de contribuer, dans la proportion de ses droits, aux dépenses nécessaires et d'entretien relatives aux choses appartenant à la société, s'il n'y a pas de sommes disponibles dans le fonds social. 134. Tout associé, gérant ou non, peut se faire restituer par la société les sommes qu'il a utilement déboursées pour elle au-delà de sa mise, ou lui faire ratifier les engagements qu'il a contractés de bonn foie dans son intérêt, enfin, se faire indemniser des dommages inévitables qu'il a éprouvés dans ses propres biens, à raison des affaires sociales. 135. Les sommes déboursées par un associé pour les affaires de la société produisent intérêt de plein droit à son profit du jour de leur emploi. Réciproquement, tout associé doit à la société, de plein droit, les intérêts des sommes qu'il a tirées du fonds social pour ses affaires particulières; sans préjudice des dommages-intérêts, s'il y a lieu. 136. Les associés peuvent, à leur gré, déterminer, soit par l'acte de société, soit par un acte postérieur, leurs parts respectives dans le fonds social, tel qu'il se comportera à la dissolution de la société; sauf les deux exceptions portées à l'article 138. 137. Les associés peuvent convenir que les parts d'un ou plusieurs d'entre eux ne seront pas identiques dans les bénéfices et dans les pertes. Mais si les parts ont été fixées en prévision des bénéfices seulement, le même règlement est présumé convenu pour les pertes. Dans tous les cas, on ne considère comme bénéfices à partager que ce qui reste de l'actif social, déduction faite des pertes éprouvées, et comme pertes que ce qui reste dû après épuisement dudit actif. Toutefois, les répartitions partielles de bénéfices ou pertes faites sans fraude pendant la durée de la société sont maintenues. 138. La clause qui attribuerait à l'un des associés la totalité du fonds social ou seulement celle des bénéfices réalisés est nulle. Il en est de même de celle qui affranchirait de toute contribution aux pertes un associé autre que celui qui a apporté son industrie ou ses services. Si lesdites clauses ont été insérées dans l'acte de société, elles le rendent nul en entier; si elles ont été adoptées postérieurement, elles laissent subsister le contrat primitif, et la liquidation de la société se fait conformément à l'article 141. 139. Les associés peuvent convenir dans l'acte de société ou dans un acte postérieur que leurs parts respectives seront déterminées, lors de la dissolution, par un ou plusieurs arbitres, soit associés, soit étrangers, nommés ou à nommer par eux. Le règlement fait par les arbitres ne peut être attaqué que pour inobservation des formes légales de l'arbitrage ou des conditions qui leur auraient été imposées par le compromis ou pour violation évidente de l'équité. La demande en nullité dudit règlement n'est plus recevable de la part de l'associé qui s'en prétend lésé, dès qu'il a concouru à son exécution, ou lorsque trois mois se sont écoulés depuis que ledit règlement a été porté à sa connaissance. 140. Si les associés ne peuvent se mettre d'accord pour nommer les arbitres, à la majorité absolue au moins, dans le cas où l'acte de société a réservé ce mode de règlement des parts, la nomination en est faite par le tribunal. Il en est de même si, les arbitres désignés ne voulant ou ne pouvant faire le règlement, les associés ne s'accordent pas pour les remplacer. 141. A défaut de règlement des parts par les associés eux-mêmes ou par des arbitres, ou si la décision arbitrale est annulée, le fonds social et les bénéfices ou pertes se répartissent en proportion de la valeur des apports respectifs. Si l'industrie ou les services apportés par un associé, n'ont pas été évalués, le tribunal en fixera le montant d'après les diverses circonstances. Celui qui a apporté, en même temps, son industrie ou ses services et d'autres biens prend ou supporte, outre la part déterminée au précédent alinéa, une autre part calculée d'après l'importance desdits biens. 142. Tout membre de la société peut s'associer un tiers pour sa part et même engager ou céder ladite part, mais sans que ces actes soient opposables à la société, à moins que l'acte de la société ne lui ait reconnu ce droit; dans ce cas, si la société s'est réservé le droit de préemption sur les parts que les associés voudraient céder, pour les supprimer, l'associé devra mettre la société en demeure d'exercer son droit ou d'y renoncer. 143. Les engagement valablement contractés par les gérants, au nom de la société ou pour ses affaires, sont garantis par le fonds social, par préférence aux créanciers personnels de chaque associé, lorsque la société est constituée comme personne morale ou juridique. En cas d'insuffisance du fonds social, ou s'il n'est pas représenté aux créanciers poursuivants, tous les associés sont tenus solidairement des obligations de la société, lors même que la société n'est pas une personne morale. Le règlement définitif a lieu alors entre les associés d'après la part de chacun dans l'actif et le passif, telle qu'elle est déterminée aux articles 136 à 141. SECTION III. DE LA DISSOLUTION DE LA SOCIÉTÉ. Art. 144. La société est dissoute de plein droit: 1° Par l'expiration du temps pour lequel elle a été contractée ou par l'accomplissement de la condition résolutoire à laquelle elle a été soumise; 2° Par l'achèvement de l'entreprise pour laquelle elle a été formée ou par l'impossibilité dudit achèvement; 3° Par la perte de la totalité ou de plus de la moité du fonds social; 4° Par l'impossibilité pour un des associés d'effectuer son apport continu en industrie, en services ou en jouissance; 5° Par la mort, l'interdiction, la faillite déclarée ou l'insolvabilité notoire d'un des associés, sauf ce qui est dit à l'article 147. 145. La société peut être dissoute: 1° Par la volonté unanime des associés, dans tous les cas; 2° Par la volonté d'un seul des associés, lorsque la société n'a pas de durée fixée expressément ou tacitement et si, en outre, la demande n'est formée ni de mauvaise foi, ni en temps inopportun; 3° Par l'action en résolution fondée sur l'inexécution des obligations d'un des associés, par la demande de dissolution fondée sur des motifs légitimes, même si la société a une durée fixée. 146. Les parties peuvent proroger expressément ou tacitement la durée de la société avant qu'elle ne soit expirée. La prorogation tacite peut aussi être faite après l'expiration du temps fixé et résulter du fait que les opérations en ont été continuées sans opposition d'aucun associé; dans ce cas, la société prorogée peut être dissoute par la volonté d'un seul associé, conformément au numéro 2 de l'article précédent. 147. On peut convenir que la société ne sera pas dissoute par les causes indiquées au n'5 de l'article 144 et qu'elle continuera avec les autres associés, en réglant la part de celui qui cesse d'en être membre. On peut convenir aussi que la société continuera avec l'associé devenu incapable et même avec les héritiers de l'associé décédé. Dans ce dernier cas, il faut un nouveau consentement de l'incapable dûment représenté ou des héritiers du décédé. SECTION IV. DE LA LIQUIDATION ET DU PARTAGE DE LA SOCIÉTÉ. Art. 148. Après la dissolution de la société, la liquidation peut en être demandée par chacun des associés ou par ses ayant-cause. La liquidation doit être préalable au partage, à moins que la majorité des associés ne requière la priorité pour le partage total ou partiel. Tout créancier de la société peut aussi s'opposer à ce qu'aucun partage ait lieu avant la liquidation. 149. La liquidation comprend: 1° L'achèvement des affaires commencées; 2° Le payement des dettes de la société et le recouvrement de ses créances; 3° Le règlement du compte particulier de chaque associé avec la société; 4° La détermination de la part de chaque associé ou de ses représentants dans l'actif partageable ou dans le passif à supporter. 150. A défaut des dispositions de l'acte de société sur le choix du liquidateur et sur l'étendue de ses pouvoirs, la liquidation est faite, soit par tous les associés conjointement, soit par un ou plusieurs d'entre eux ou par un tiers, choisis par eux, à l'unanimité. S'ils ne peuvent se mettre d'accord sur le choix, le liquidateur est nommé par le tribunal. 151. Le liquidateur doit, dans tous les cas, aliéner les objets susceptibles d'une détérioration ou d'un dépérissement rapide. Il peut aliéner les autres objets mobiliers, si cela est nécessaire pour l'acquittement des dettes échues. A l'égard des immeubles, il ne peut les hypothéquer ou les aliéner qu'en vertu de pouvoirs spéciaux des associés. Dans ce dernier cas, l'aliénation n'aura lieu que par adjudication publique, à moins d'autorisation de traiter à l'amiable; le tout, à la majorité absolue des voix. Il peut plaider, comme demandeur ou défendeur, au nom des associés. La transaction et le compromis qu'il aura consentis sur les dettes ou créances de la société ne pourront être attaqués que pour dol concerté avec les tiers. 152. Le compte général de liquidation est soumis à l'approbation des associés. La majorité absolue des voix suffit pour l'approuver. Le vote peut porter sur tout le compte réuni ou, séparément, sur certaines parties du compte. Ceux des actes qui ne seront pas approuvés et qui pourront être refaits le seront, aux frais du liquidateur; s'ils ne peuvent être refaits, le liquidateur sera responsable du préjudice causé par sa faute, conformément aux règles du mandat. Les actes faits par le liquidateur, en vertu des pouvoirs qui lui ont été confiés ou en conformité à l'article précédent, ne seront pas annulés au préjudice des tiers de bonne foi. 153. Après la liquidation de la société, le partage des biens restés indivis peut être demandé par chacun des anciens associés ou par ses ayant-cause; sauf le cas où les parties seraient convenues, depuis la dissolution, de rester dans l'indivision, conformément à l'article 39 du Livre des Biens. 154. A défaut d'accord des intéressés sur la formation des lots et sur leur attribution à chacun d'eux, on observera les règles spéciales établies sur ce point pour les partages des communautés de biens. 155. Les droits de chaque associé sur les objets provenant du fonds social, à lui échus par le partage, remontent au jour de la dissolution de la société, et ceux conférés au tiers sur les mêmes objets par les autres associés, pendant la liquidation, se trouvent résolus. 156. Les copartageants sont respectivement garants, en raison de leur part et portion, des troubles et évictions qu'ils pourraient éprouver dans les droits qui leur seraient acquis par le partage. Si l'un d'eux se trouve insolvable, la portion d'indemnité dont il est tenu est répartie entre les autres, y compris le garanti. CHAPITRE VII. DES CONTRATS ALÉATOIRES. DISPOSITIONS GÉNÉRALES. Art. 157. Le contrat aléatoire est une convention dont les effets, quant aux avantages ou quant aux pertes, soit pour les deux contractants, soit pour un seul, dépendent d'un événement futur et incertain. 158. Les contrats sont aléatoires par leur nature ou par la volonté des parties. Sont aléatoires par leur nature: le jeu et le pari, la constitution de rente viagère ou d'autres droits viagers, les assurances terrestres et maritimes, le prêt à la grosse aventure. Les autres contrats sont aléatoires par la volonté des parties, lorsque leur existence ou leurs effets sont subordonnés à une condition casuelle, soit suspensive, soit résolutoire. 159. Les assurances terrestres et maritimes et le prêt à la grosse aventure sont régis par le Code de Commerce. SECTION PREMIÈRE. DU JEU ET DU PARI. Art. 160. Il n'est admis d'action en justice pour l'exécution d'un engagement de jeu que si le jeu consiste dans un exercice physique de nature à développer le courage, la force ou l'adresse des joueurs. L'action fondée sur un pari n'est également admise qu'au profit d'une personne prenant part à un tel exercice, ou encore s'il s'agit du succès d'une entreprise intéressant l'agriculture, l'industrie ou le commerce et à laquelle les parieurs prennent une part directe. Si la somme ou valeur promise dans lesdits jeux ou paris paraît excessive, eu égard aux circonstances, les tribunaux ne peuvent la réduire et doivent rejeter la demande en entier. 161. Dans les autres cas, le jeu et le pari n'engendrent aucune obligation, même naturelle et la reconnaissance de dette, la novation ou le cautionnement qui en auraient été faits sont nuls. Toutefois, la répétition n'est pas admise à l'égard de ce qui aurait été payé volontairement et par une personne capable, en vertu desdits engagements, s'il n'y a eu d'ailleurs ni dol ni surprise de la part du gagnant. 162. Les loteries non autorisées sont assimilées aux jeux et paris dépourvus d'action. Il en est de même des spéculations à terme sur les effets publics ou les marchandises, lorsque le défendeur prouve que, dès l'origine, les parties n'ont pas eu l'intention d'effectuer la livraison et le payement des quantités ou valeurs promises, mais seulement de se tenir compte respectivement de la différence entre la hausse et la baisse des cours. 163. Si, dans le cas des deux articles précédents, l'exception de nullité n'est pas opposée par le défendeur, elle peut être suppléée d'office par les juges, lorsqu'il est exprimé dans l'engagement ou dans la demande que la dette a pour cause un jeu, une loterie ou un pari sur les différences de cours. SECTION II. DE LA RENTE VIAGÈRE. § Ier. DE LA CONSTITUTION DE LA RENTE VIAGÈRE. Art 164. La rente viagère peut être constituée à titre onéreux, en retour de l'aliénation d'un capital mobilier ou immobilier ou comme prix de services rendus ou à rendre. Elle peut aussi être constituée à titre gratuit, par donation ou par testament. La rente viagère peut aussi être retenue sur un capital aliéné à titre onéreux ou gratuit. 165. La rente viagère peut être stipulée au profit d'une personne autre que celle qui en fournit la contre-valeur. Dans ce cas, elle suit les règles des contrats à titre onéreux entre le stipulant et le promettant et celles des donations entre le stipulant et le bénéficiaire; mais elle n'est pas soumise aux formalités des donations. 166. Elle peut reposer, soit sur la tête du créancier, soit sur celle du débiteur, soit même sur celle d'un tiers. Dans ce dernier cas, le consentement de ce tiers est nécessaire à la formation du contrat, s'il est onéreux; mais les arrérages payés avant ce consentement ne peuvent être répétés. 167. Elle peut reposer sur la tête de plusieurs créancier, soit conjointement soit, successivement. Dans ces cas, la disposition de l'article 100 du Livre des Biens, au sujet de l'usufruit, lui est applicable. 168. Le contrat de rente viagère constituée à titre onéreux est nul, si la personne sur la tête de laquelle la rente a été créée était déjà morte au moment de la convention, même à l'insu des deux parties. Il est résolu de plein droit, si cette personne est décédée, dans le délai de soixante jours, d'une maladie dont elle était déjà atteinte au moment de la convention. 169. La rente viagère constituée à titre gratuit peut être déclarée incessible et insaisissable par le constituant. La clause n'est opposable aux tiers que si elle est insérée dans l'acte constitutif lui-même. Si la rente viagère a été établie gratuitement comme pension alimentaire, elle est de droit incessible et insaisissable. Les présentes dispositions ne s'appliquent pas à la rente viagère retenue au profit du donateur sur des biens donnés ni aux arrérages échus. 170. L'incessibilité et l'insaisissabilité de la rente viagère ont lieu cumulativement, lors même qu'une seule des prohibitions a été stipulée. § II. DES EFFETS DU CONTRAT DE RENTE VIAGÈRE. Art. 171. Le débiteur doit payer les arrérages de la rente pendant toute la vie de la personne sur la tête de laquelle elle est constituée, sans pouvoir en exercer le rachat, s'il n'y a convention particulière. 172. Les arrérages sont acquis au créancier, jour par jour, lors même que le payement ne doit s'en faire que par mois ou par périodes plus longues. Toutefois, s'ils sont payables d'avance, la période commencée est due tout entière. 173. Le défaut de payement des arrérages n'autorise pas le créancier à demander la résolution du contrat, s'il ne s'est réservé ce droit: il peut seulement saisir et faire vendre une partie suffisante des biens du débiteur pour assurer le service des arrérages au moyen du capital à en provenir; sauf à subir le concours des autres créanciers, s'il y a lieu. Il sera procédé de même, quand la rente a été constituée à titre gratuit ou retenue sur un capital donné ou légué. 174. Le débiteur de la rente peut refuser le payement des arrérages, s'il ne lui est fourni la preuve par un certificat de vie que la personne sur la tête de laquelle porte la rente existait au jour de l'échéance des arrérages. Le certificat de vie sera délivré par l'officier de l'état civil ou par un notaire de la circonscription où cette personne a sa résidence actuelle. § III. DE L'EXTINCTION DE LA RENTE VIAGÈRE. Art. 175. Si le débiteur de la rente viagère constituée à titre onéreux manque à fournir les sûretés promises pour le service des arrérages ou s'il diminue celles qu'il a fournies, le créancier peut demander la résolution du contrat, sans toutefois être tenu de restituer les arrérages déjà acquis. Le même droit appartient au créancier d'une rente viagère retenue sur un capital donné ou légué. La résolution n'est pas prononcée si la personne sur la tête de laquelle portait le droit de rente vient à mourir avant le jugement définitif. 176. Les causes de rescision et de révocation autorisées par le droit commun sont applicables à la rente viagère. La rente viagère s'éteint encore par le rachat stipulé, par la novation, par la remise conventionnelle, par la confusion et par la prescription. Toutefois, la rente viagère est imprescriptible lorsqu'elle est incessible ou insaisissable, en vertu de la loi ou de la convention, conformément aux articles 169 et 170. Dans tous les cas, les arrérages se prescrivent séparément par cinq ans depuis l'échéance. 177. La rente viagère s'éteint par la mort de la personne sur la tête de laquelle elle est constituée, sans préjudice de ce qui est dit à l'article 168. Toutefois, au cas de décès de cette personne, par une cause illégitime imputable au débiteur, si la rente a été constituée à titre onéreux ou comme charge d'une donation ou d'un legs, le contrat ou la libéralité seront résolus et le débiteur restituera les biens acquis par lui, sans recouvrer les arrérages payés. Si, dans le même cas de décès, la rente avait été directement donnée ou léguée, le service des arrérages sera continué pendant le délai que le tribunal fixera comme étant celui de la durée probable qu'aurait eue la vie de la personne sur la tête de laquelle la rente est constituée. CHAPITRE VIII. DU PRÊT DE CONSOMMATION ET DE LA RENTE PERPÉTUELLE. SECTION PREMIÈRE. DU PRÊT DE CONSOMMATION. Art. 178. Le prêt de consommation est un contrat par lequel l'une des parties transfère à l'autre la propriété de choses fongibles, à la charge par celle-ci de lui rendre, après un certain temps, des choses semblables, en pareilles quantité et qualité. 179. Si l'époque du remboursement n'a pas été fixée par les parties, elle est déterminée par le tribunal, d'après l'intention probable de celles-ci et les circonstances. A défaut de détermination d'un autre lieu, le remboursement est dû au domicile du prêteur, si le prêt a été fait sans intérêts; dans le cas contraire, il est dû au domicile de l'emprunteur. 180. Si, par force majeure, la restitution des choses prêtées est devenue impossible, l'emprunteur en doit la valeur estimative calculée au jour et au lieu où les choses ont été atteintes de cette circonstance. 181. Le prêt de choses n'appartenant pas au prêteur est nul et donne lieu à garantie s'il est à intérêts, et si l'emprunteur a été de bonne foi. Toutefois il devient valable dans les cas suivants: 1° Si l'emprunteur a consommé de bonne foi les choses prêtées; 2° S'il a repoussé la revendication du vrai propriétaire par la prescription; 3° S'il y a eu ratification du prêt par celui-ci. 182. Si les choses prêtées avaient des défauts non apparents, ignorés de l'emprunteur, mais connus du prêteur, et si ces défauts ont causé un dommage à l'emprunteur, le prêteur n'en est responsable, lorsque le prêt est gratuit, que s'il y a eu, de sa part, dol ou intention de nuire. Si le prêt est à intérêts, le prêteur est responsable même des défauts cachés qu'il a ignorés, lorsqu'il pouvait les connaître. Les dispositions des articles 94 à 101, sur l'action rédhibitoire de la vente, sont applicables d'ailleurs au prêt. 183. Les articles 463 à 466 du Livre des Biens sont applicables au prêt fait en monnaie métallique ou en papier-monnaie, ayant cours forcé. Toutefois, le prêteur ne peut stipuler le remboursement d'une valeur énoncée en or ou en argent, ou payable en l'une de ces monnaies, comme il est permis par l'article 465, qu'autant qu'il a effectivement prêté la même valeur, soit dans des espèces de même nature, soit dans leur équivalent, en une autre monnaie ou en papier-monnaie. 184. Si le prêt a été fait en lingots, l'emprunteur doit rendre des lingots de même nature, poids et qualité, comme s'il s'agissait de toute autre marchandise. 185. L'emprunteur de sommes d'argent, de denrées ou marchandises, peut s'engager à payer, sous le nom "d'intérêts," comme prix du service rendu, outre le capital, une certaine somme ou valeur proportionnelle aux valeurs prêtées. 186. Les intérêts ne sont exigibles de l'emprunteur que s'ils ont été stipulés. S'il a été convenu que l'emprunteur payerait des intérêts, sans que le montant en ait été fixé, ils sont dus au taux légal. L'emprunteur ne peut ni répéter, ni imputer sur le capital, les intérêts non stipulés qu'il a volontairement payés dans les limites posées par la loi. 187. Les intérêts conventionnels peuvent excéder les intérêts légaux sans pouvoir dépasser le taux des intérêts conventionnels fixés spécialement par la loi. S'ils ont été ostensiblement fixés à un taux supérieur à celui que la loi permet, ils sont réductibles à ce taux et ce qui en a été payé au-delà est sujet à imputation sur le capital ou à répétition. Mais lesdits intérêts illégitimes ne sont pas dus, et, s'ils ont été payés, ils sont sujets à répétition, lorsque le créancier les a fait dissimuler, soit par la reconnaissance d'un capital supérieur à celui qu'il a effectivement prêté, soit de toute autre manière. 188. Si le prêteur reçoit, en tout ou en partie, le capital dû, sans faire de réserves au sujet des intérêts échus, il est présumé, jusqu'à preuve contraire, les avoir reçus ou en faire l'abandon. 189. Si le prêt à intérêts a été fait pour un temps excédant dix ans, l'emprunteur a toujours la faculté de le rembourser après dix ans, nonobstant toute convention contraire. Toutefois, le remboursement anticipé n'est pas admis, si les annuités comprennent, outre les intérêts, un amortissement graduel du capital. 190. Les dispositions des articles 186 à 189 sont applicables à toute obligation de sommes d'argent ou de choses de quantité autre que celle née d'un prêt, et aux intérêts légaux comme aux intérêts conventionnels. SECTION II. DU CONTRAT DE RENTE PERPÉTUELLE. Art. 191. Le prêteur peut s'interdire le droit d'exiger le capital, en stipulant de recevoir les arrérages seulement; dans ce cas, le contrat prend le nom de constitution de rente perpétuelle. Cette interdiction doit être formelle ou résulter clairement des circonstances. 192. L'emprunteur à charge de rente perpétuelle peut toujours effectuer le remboursement du capital reçu, nonobstant toute convention contraire. Toutefois, il peut s'engager à ne pas effectuer ledit remboursement avant un certain temps qui ne peut excéder dix ans. Cet engagement peut toujours être renouvelé, mais sans jamais excéder dix ans; autrement, il est réduit à ce terme. Le remboursement doit être intégral, à moins de convention contraire. Le débiteur doit prévenir le créancier de son intention de rembourser, six mois à l'avance, si un autre délai n'a pas été fixé par les parties. A défaut de remboursement au temps par lui fixé, le débiteur est passible de dommages-intérêts; mais il ne peut être contraint au remboursement, à moins qu'il n'y ait eu novation. 193. Le débiteur peut être contraint au remboursement du capital, dans les trois premiers cas où l'article 405, 1° à 3° du Livre des Biens déclare tout débiteur déchu du bénéfice du terme de droit ou dans le cas où il manque au payement des arrérages pendant deux ans consécutifs, après une mise en demeure régulière; Dans ce dernier cas, les tribunaux peuvent accorder au débiteur un délai de grâce et la division du payement, conformément à l'article 406 du même Livre. 194. Les dispositions des deux articles précédents sont applicables à la rente perpétuelle établie comme prix ou comme condition de l'aliénation d'un immeuble et aussi à la rente perpétuelle constituée à titre gratuit. Dans l'un et l'autre cas, le remboursement consiste dans le capital qui aura été évalué entre les parties, ou, à défaut de cette évaluation, dans le capital qui produirait les arrérages annuels calculés d'après le taux légal de l'intérêt. Si les arrérages consistent en denrées, le remboursement se fera, à défaut de convention spéciale, en un capital évalué sur le prix moyen desdites denrées pendant les dix dernières années. CHAPITRE IX. DU PRÊT A USAGE. SECTION PREMIÈRE. DE LA NATURE DU PRÊT A USAGE. Art. 195. Le prêt à usage est un contrat par lequel l'une des parties remet à l'autre une chose mobilière ou immobilière, pour s'en servir, à charge de la rendre en nature, après le temps expressément ou tacitement fixé. Ce prêt est essentiellement gratuit. 196. L'emprunteur n'acquiert pas le droit réel d'usage, mais seulement un droit personnel contre le prêteur et ses héritiers. Le droit de l'emprunteur ne passe pas à ses héritiers, à moins que ceux-ci ne prouvent que l'intention des parties a été différente, et sauf la possibilité pour les héritiers d'obtenir du tribunal un délai pour se procurer autrement l'usage d'une chose semblable. SECTION II. DES OBLIGATIONS QUI NAISSENT DU PRÊT OU A SON OCCASION. Art. 197. L'emprunteur ne doit employer la chose prêtée qu'à l'usage auquel elle est destinée par sa nature ou par la convention, et pendant le temps pour lequel elle lui a été prêtée. Il est responsable de la perte ou détérioration qui résulterait d'un autre emploi ou d'un usage trop prolongé, et même de la perte ou détérioration par cas fortuit ou force majeure dont cet usage ou emploi aurait été l'occasion. 198. L'emprunteur est encore responsable de la perte ou détérioration résultant d'un cas fortuit ou d'une force majeure, s'il avait pu y soustraire la chose en employant la sienne propre ou si, dans un péril commun de sa chose et de la chose prêtée, il a préféré sauver la sienne. 199. L'emprunteur est tenu des frais ordinaires d'entretien de la chose prêtée, sans répétition contre le prêteur. 200. L'emprunteur doit restituer la chose prêtée, au temps convenu, ou même auparavant, dès que l'usage autorisé est terminé, sans préjudice de ce qui est dit au 2e alinéa de l'article 203. Si aucun temps n'a été convenu et que l'usage de la chose puisse être continu, le tribunal, sur la demande du prêteur, fixe un délai convenable pour la restitution. 201. La restitution doit être faite au prêteur ou à son représentant, lors même que l'emprunteur saurait que la chose appartient à un tiers, à moins qu'il n'y ait une opposition à la restitution, formée par celui-ci, en bonne et due forme. Hors ce dernier cas, la restitution se fait au domicile du prêteur ou à celui de son représentant. 202. Si plusieurs personnes ont emprunté une chose conjointement et pour un usage simultané ou alternatif, chacune d'elles est tenue solidairement avec les autres des obligations qui précèdent. 203. Le prêteur ne peut réclamer l'usage de la chose avant le temps expressément ou tacitement accordé à l'emprunteur. Néanmoins s'il lui survient un besoin urgent et imprévu de la chose, il peut obtenir du tribunal qu'elle lui soit restituée avant le temps, soit pour un usage momentané, soit définitivement. 204. Le prêteur est tenu de rembourser à l'emprunteur les dépenses nécessaires et urgentes qu'il a faites pour la conservation de la chose prêtée. A l'égard des dommages causés à l'emprunteur par les vices de la chose prêtée, la disposition du 1er alinéa de l'article 182 est applicable. 205. L'emprunteur peut exercer le droit de rétention sur la chose prêtée, jusqu'au remboursement de ce qui lui est dû en vertu de l'article précédent. CHAPITRE X. DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE. SECTION PREMIÈRE. DU DÉPÔT. Art. 206. Le dépôt est un contrat par lequel une personne remet une chose mobilière à une autre personne, pour que celle-ci la garde et la lui restitue identiquement, à première demande. Le dépôt est essentiellement gratuit. Il est purement volontaire ou nécessaire. § 1er. DU DÉPÔT VOLONTAIRE. Art. 207. Le dépôt volontaire est celui qui a lieu dans les circonstances où le déposant a pu librement choisir le temps et le lieu du dépôt et la personne du dépositaire. 208. Le dépôt, peut être fait non seulement par le propriétaire, mais encore par toutes personnes ayant intérêt à la garde et à la conservation de la chose, ou par leurs mandataires. Il peut être fait également par les représentants légaux des incapables. 209. Le dépôt ne peut être reçu que par ceux qui ont la pleine capacité de contracter. Toutefois, les incapables sont civilement tenus de restituer les choses déposées qui se trouvent encore dans leurs mains, ou la valeur de ce dont ils se trouvent enrichis par suite du dépôt; sans préjudice de l'action publique s'il y a lieu, au cas d'abus de confiance. 210. Le dépositaire doit apporter à la garde et à la conservation de la chose déposée les mêmes soins que ceux qu'il apporte à ses propres biens. Toutefois, il est tenu des soins d'un bon administrateur, s'il s'est offert lui-même à recevoir le dépôt, ou si le dépôt a été fait uniquement dans son intérêt et pour lui permettre d'user de la chose en cas de besoin; dans ce dernier cas, l'article 198 est applicable au dépositaire, lorsqu'il a usé de la chose. 211. Le dépositaire mis en demeure de restituer est tenu de la perte fortuite ou par force majeure, conformément au droit commun. 212. Le dépositaire ne doit pas chercher à connaître la nature des choses déposées, lorsqu'elle lui a été cachée, ni dans aucun cas, la faire connaître à d'autres, sous peine de dommages-intérêts, s'il y a lieu. 213. Il ne doit pas se servir des choses déposées, ni en consommer les fruits, s'il n'en a la permission expresse ou tacite du déposant. Cette permission ne suffit pas à donner au dépôt le caractère d'un prêt à usage. 214. Il doit restituer la chose identiquement, avec les fruits et produits qu'il en a perçus, ou leur valeur s'il a dû les convertir en argent; sauf le cas prévu à l'article précédent. S'il a reçu quelque indemnité ou acquis quelque droit ou profit au sujet de la chose, il doit les transférer au déposant. S'il a consommé, aliéné ou détourné sciemment la chose déposée, il est, de plein droit et sans mise en demeure, tenu de tous les dommages-intérêts; sans préjudice de l'action publique pour abus de confiance. 215. Si l'héritier du dépositaire, ignorant le dépôt, a consommé ou aliéné la chose déposée, il est tenu des dommages-intérêts jusqu'à concurrence du profit qu'il a ainsi tiré. La même disposition s'appliquerait au dépositaire lui-même qui, par oubli ou par erreur, aurait disposé de la chose, la croyant sienne. 216. La restitution du dépôt ne doit être faite qu'au déposant, ou à son représentant légal ou conventionnel. 217. A défaut de fixation d'un lieu pour la restitution, elle se fait au lieu où se trouve la chose déposée, lors même que celle-ci aurait été déplacée par le dépositaire, pourvu que ce fût sans fraude. 218. L'obligation pour le dépositaire de rendre la chose à la première réquisition du déposant cesse dans les cas suivants: 1° S'il peut prouver que la chose lui appartient; 2° S'il peut user du droit de rétention, conformément à l'article suivant; 3° Si une saisie-arrêt à la restitution lui a été signifiée en bonne forme; 4° S'il a découvert que la chose a été volée et s'il en connaît le propriétaire, auquel cas il doit dénoncer le dépôt à celui-ci, avec sommation de réclamer la chose contradictoirement avec le déposant, dans un délai déterminé et suffisant, passé lequel, si le propriétaire ne se présente pas, il devra faire la restitution au déposant. 219. Le déposant doit indemniser le dépositaire des dépenses nécessaires que celui-ci a faites pour la conservation de la chose et des dommages que la chose lui a causés. Jusqu'au remboursement intégral desdites indemnités, le dépositaire peut exercer le droit de rétention sur la chose déposée. § II. DU DÉPÔT NÉCESSAIRE ET DU DÉPÔT DANS LES HÔTELLERIES. Art. 220. Le dépôt est dit "nécessaire" lorsque le déposant y est contraint par un accident majeur et imprévu, tel qu'incendie, inondation, naufrage, tremblement de terre, sédition. Le dépôt nécessaire peut être prouvé par tous les moyens possibles, même par présomption de fait résultant des circonstances. Le dépôt nécessaire est d'ailleurs soumis aux règles du dépôt volontaire. 221. Les hôteliers, aubergistes, logeurs en garni, sont considérés comme dépositaires nécessaires, à l'égard des effets apportés par les voyageurs qui logent chez eux. Il en est de même des voituriers, bateliers et autres entrepreneurs de transport par terre ou par eau, à l'égard des effets qui leur sont confiés pour être transportés. Toutefois, les dépositaires prévus au présent article sont tenus de l'obligation ordinaire résultant des conventions à titre onéreux. SECTION II. DU SÉQUESTRE. Art. 222. Le séquestre est le dépôt, fait entre les mains d'un tiers, d'une chose objet d'un litige de la part de deux ou plusieurs personnes. Il peut avoir pour objet des meubles ou des immeubles. Il est conventionnel ou judiciaire. 223. Le séquestre conventionnel doit être consenti par tous les intéressés, tant pour le dépôt lui-même que pour le choix de celui qui sera séquestre-gardien. Le séquestre-gardien judiciaire ne sera choisi d'office par le tribunal que si les parties ne peuvent s'accorder sur le choix. La justice peut nommer séquestre-gardien une des parties en cause. 224. Le séquestre-gardien, tant conventionnel que judiciaire, peut être salarié; il est alors tenu d'apporter à la chose les soins ordinaires d'un bon administrateur. 225. Le séquestre-gardien judiciaire peut faire des baux, conformément à l'article 119 du Livre des Biens; mais le séquestre-gardien conventionnel ne le peut qu'en vertu d'un pouvoir spécial des intéressés. Tous deux peuvent exercer les actions possessoires, pour conserver ou recouvrer leur possession. La possession du séquestre-gardien profite à celle des parties qui triomphe définitivement dans la contestation. 226. La chose mise en séquestre doit être rendue à celle des parties qui a triomphé. Toutefois, le séquestre-gardien peut exiger, pour couvrir sa responsabilité, une autorisation des parties en cause ou un ordre du tribunal. 227. Les règles du dépôt ordinaire s'appliquent, pour le surplus, au séquestre conventionnel et au séquestre judiciaire. 228. La garde judiciaire des objets saisis et le dépôt ou la consignation des sommes ou valeurs offertes par le débiteur en payement au créancier qui refuse de recevoir seront réglés par une loi spéciale. CHAPITRE XI. DU MANDAT. SECTION PREMIÈRE. DE LA NATURE DU MANDAT. Art. 229. Le mandat est un contrat par lequel une partie charge l'autre de faire quelque chose en son nom et dans son intérêt. Si le mandataire doit agir en son propre nom, mais toujours dans l'intérêt du mandat, le contrat prend le nom de "commission." La commission est réglée par le Code de Commerce. 230. Le mandat peut être donné et accepté tacitement. 231. Le mandat est gratuit, s'il n'y a convention contraire, expresse ou tacite. 232. Il est général ou spécial. Le mandat général, ou sans désignation particulière des actes à faire, ne comprend que les actes d'administration du patrimoine du mandant. Le mandant est spécial lorsqu'il a pour objet un ensemble d'actes d'une nature particulière et limitée, soit d'administration, soit de disposition ou d'obligation. 233. Tout mandat, général ou spécial, comprend tacitement les suites nécessaires des actes formant son objet. Mais le pouvoir de promettre un capital ne comprend pas celui de le payer. Celui de stipuler un capital ne comprend pas celui d'en recevoir le payement. Le pouvoir de plaider ne permet pas de nommer des arbitres, ni d'acquiescer à la demande ou de se désister de l'action, ni même de transiger. Le pouvoir de transiger ne permet pas de déférer la contestation à des arbitres, ni même aux tribunaux. Le pouvoir de nommer des arbitres ne comprend pas celui de transiger, ni même de déferer la contestation aux tribunal. 234. Le mandat peut être donné valablement à une personne incapable d'agir pour elle-même; mais le mandataire n'encourt vis-à-vis du mandant que la responsabilité limitée des incapables. 235. Le mandataire peut se substituer quelqu'un pour tout ou partie des actes de sa gestion, si ce pouvoir ne lui a pas été refusé expressément, ou si la nature de l'affaire n'est pas telle qu'elle doive être considérée comme exclusivement confiée au mandataire: il est alors responsable de la gestion de son substitué comme de la sienne propre. S'il lui a été désigné une personne qu'il pourrait se substituer, il ne peut en choisir une autre, même en cas d'impossibilité de se conformer aux choix désigné: s'il s'y est conformé, il n'encourt de responsabilité pour l'incapacité ou l'infidélité du substitué que s'il a négligé d'en avertir le mandant ou de révoquer le substitué. Au cas de substitution faite malgré la prohibition, ou d'un choix autre que celui qui était autorisé, le mandataire est responsable des dommages, même fortuits ou résultant d'une force majeure, s'ils n'avaient pas dû arriver sans cette substitution. 236. Dans les cas prévus aux deux premiers alinéas de l'article précédent, le mandant peut exercer directement contre le substitué les actions relatives à la gestion de celui-ci, et il est tenu directement envers lui. Dans les cas prévus par le troisième alinéa du même article, le mandant a le choix entre ladite action directe et l'action indirecte du chef du mandataire; mais l'exercice de la première emporte ratification de la substitution. SECTION II. DES OBLIGATIONS DU MANDATAIRE. Art. 237. Tant que le mandat n'a pas pris fin, le mandataire est tenu, sous peine de dommages-intérêts, de l'accomplir dans sa forme et teneur, en tenant compte aussi de l'intention du mandant connue de lui, quoique non exprimée. Si l'exécution totale est impossible, l'exécution partielle n'est obligatoire et permise qu'autant qu'elle est utile au mandant. 238. Si le mandataire chargé d'acheter pour un prix déterminé n'a pu obtenir la chose qu'à un prix supérieur, il peut, en renonçant à répéter l'excédant, exiger du mandant la ratification de l'achat; le mandant, de son côté, peut exiger la livraison de la chose au prix qui a été payé. S'il s'agit d'un mandat de vendre et que le mandataire ait vendu au-dessous du prix fixé, il peut faire ratifier la vente, en suppléant la différence. 239. Le mandataire est tenu d'apporter à l'accomplissement du mandat tous les soins d'un bon administrateur. Néanmoins, ses fautes seront appréciées avec moins de rigueur dans les cas suivants: 1° S'il rend le service gratuitement; 2° S'il ne s'est pas offert au mandat; 3° Si son inhabileté était connue ou soupçonnée du mandant; 4° S'il a fait quelques autres actes de gestion produisant pour le mandant un profit inespéré. 240. Le mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, avec les pièces d'appui, lorsque le mandat a pris fin, et même auparavant, s'il en est requis par le mandant. 241. Il doit restituer au mandant toutes les sommes ou valeurs qu'il a reçues au nom du mandant ou en son propre nom à raison de sa gestion, lors même que le mandant n'aurait pas pu légitimement les recevoir ou qu'il n'aurait pas autorisé le mandataire à les recevoir; mais sous la déduction de ce qui lui est dû par le mandant, conformément à la Section suivante. Il y joint le montant des valeurs qu'il a négligé de percevoir ou qu'il a perdues par sa faute, ainsi que les dommages-intérêts dus en vertu des articles précédents. 242. Le mandataire qui a, sans autorisation, employé à son profit les capitaux du mandant en doit les intérêts de plein droit, à dater de cet emploi, sans préjudice des dommages-intérêts, s'il y a lieu. A l'égard du reliquat, il en doit les intérêts à compter de sa mise en demeure. 243. Si plusieurs mandataires ont été constitués pour la même affaire, soit par un seul acte, soit par des actes séparés, chacun n'est responsable que de ses fautes personnelles et il n'y a solidarité entre eux que si elle a été stipulée, ou si les fautes ont été conjointes. 244. Le mandataire n'est pas tenu vis-à-vis des tiers de l'exécution des actes qu'il a faits avec eux au nom et pour le compte du mandant, à moins qu'il ne s'y soit soumis expressément, ou qu'ils ne se soit présenté à eux comme ayant des pouvoirs qu'il n'avait pas. SECTION III. DES OBLIGATIONS DU MANDANT. Art. 245. Le mandant doit: 1° Rembourser au mandataire les avances et frais légitimes que celui-ci a déboursés pour l'exécution du mandat, avec les intérêts légaux à partir du jour du déboursement; 2° Lui payer le salaire qui a pu être convenu; 3° L'indemniser des pertes ou dommages qu'il a éprouvés, sans sa faute, par suite ou à l'occasion de sa gestion, en exceptant toutefois les dommages qui ont pu être prévus et motiver, en tout ou en partie, la promesse spécial d'un salaire; 4° Lui procurer la décharge ou l'indemnité des engagements personnels qu'il a pu prendre à raison de ladite gestion. 246. Le mandataire n'est pas tenu de faire les déboursés prévus à l'article précédent, s'il ne s'y est engagé; mais il ne peut, retarder l'exécution du mandat, sans avoir fait constater le refus ou le retard du mandant à fournir les provisions nécessaires. 247. Le salaire n'est dû qu'après que le mandat a été exécuté en entier, à moins qu'il n'ait été stipulé payable par fractions. Si l'exécution totale a été empêchée par une cause non imputable au mandataire, le salaire lui est dû en proportion de ce qui a été exécuté. 248. Jusqu'à l'acquittement des obligations du mandant, le mandataire jouit du droit de rétention des choses qu'il détient en vertu du mandat et à raison desquelles il est créancier. 249. Si le mandat a été constitué par plusieurs personnes pour une affaire commune, soit par un seul et même acte, soit par des actes séparés, chacun des mandants est solidairement tenu des obligations qui précèdent, s'il n'y a stipulation contraire. 250. Le mandant est tenu, envers les tiers avec lesquels le mandataire a traité, de tous les engagements pris en son nom conformément au mandat. Il est même tenu de ce qui a été fait au-delà des pouvoirs qu'il a donnés: 1° S'il a ratifié les actes, expressément ou tacitement; 2° S'il en a profité et dans la mesure dudit profit; 3° Si les tiers ont été de bonne foi et ont eu de justes motifs de croire aux pouvoirs du mandataire. SECTION IV. DE LA CESSATION DU MANDAT. Art. 251. Indépendamment de l'exécution du mandat ou de l'impossibilité de l'exécuter et de l'accomplissement du terme ou de la condition auxquels il pourrait avoir été soumis, le mandat prend fin: 1° Par la révocation qu'en fait le mandant; 2° Par la renonciation du mandataire; 3° Par la mort, la faillite, l'insolvabilité ou l'interdiction, soit du mandant, soit du mandataire; 4° Par la cessation, dans la personne du mandataire ou du mandant, de la qualité en vertu de laquelle le mandat a été donné ou accepté. 252. La révocation du mandat établi dans l'unique intérêt du mandant peut être faite par celui-ci à toute époque et à son gré, même s'il a promis un salaire. 253. La révocation n'a lieu que pour l'avenir et sans préjudicier à ce qui a été valablement fait jusque-là. 254. S'il y a plusieurs mandants, la révocation faite par l'un d'eux ne met pas fin au mandat des autres. 255. La révocation du mandat peut être tacite et résulter, soit de la constitution d'un nouveau mandataire pour la même affaire, soit de la reprise de la gestion par le mandant, ou de toute autre circonstance. 256. La renonciation au mandat par le mandataire, hors le cas où elle est fondée sur une cause légitime ou nécessaire, donne lieu à indemnité en faveur du mandant, si elle lui est préjudiciable. Elle peut aussi être faite tacitement. 257. Les causes qui mettent fin au mandat, du chef du mandant ou du mandataire, ne sont opposables entre les parties respectivement qu'autant qu'elles leur ont été notifiées ou sont parvenues autrement à leur connaissance d'une manière certaine. En cas de décès d'une des parties, la notification doit être faite par ses héritiers. 258. Les mêmes causes de cessation du mandat ne sont pas opposables aux tiers qui, depuis lors, ont traité avec le mandataire, en ignorant la fin du mandat, sans négligence à eux imputable, lors même que le mandant aurait retiré des mains de celui-ci sa procuration écrite. 259. Lorsque le mandat a pris fin par l'une des causes ci-dessus désignées, le mandataire ou ses héritiers doivent pourvoir aux intérêts déjà engagés du mandant, jusqu'à ce que celui-ci ou ses héritiers puissent y pourvoir par eux-mêmes ou par un nouveau mandataire. Cette disposition est applicable avec plus de rigueur si la cessation du mandat provient de la renonciation du mandataire que si elle provient de la révocation par le mandant. CHAPITRE XII. DU LOUAGE DE SERVICES ET D'OUVRAGE. SECTION PREMIÈRE. DU LOUAGE DE SERVICES. Art. 260. Les employés, commis ou préposés, les ouvriers et les autres serviteurs peuvent louer leurs services pour un gage ou salaire fixé par année, par mois ou par jour. Dans ce cas, le louage dure tant qu'il n'y a pas été mis fin par un congé donné d'avance, de part ou d'autre, aux époques établies par l'usage du lieu, ou, à défaut d'usage certain, à toute époque, pourvu que ce ne soit ni en temps inopportun, ni de mauvaise foi. 261. Le louage de services des mêmes personnes peut aussi être fait pour un temps fixe, lequel ne peut excéder cinq ans pour les employés commis ou préposés, et un an pour les ouvriers et les autres serviteurs; sauf ce qui est dit, ci-après, au sujet du contrat d'apprentissage. En cas d'engagement plus long, il est réduit à ce terme, au gré de l'une ou de l'autre partie; sauf la faculté de renouvellement pour le même délai. 262. Lorsque le louage de services est fait pour un temps fixe, il peut prendre fin auparavant, soit par la résolution pour inexécution des obligations de l'une des parties, soit pour une cause légitime et impérieuse, provenant d'un côté ou de l'autre. Dans tous les cas, la mort du maître met fin de plein droit au louage de services envers la personne. 263. Si la cause légitime qui met fin au louage de services survient en la personne du maître et arrive à une époque de l'année où, d'après l'usage du lieu, il soit difficile au bailleur de services de contracter un nouvel engagement, il lui sera alloué une indemnité fixée par le tribunal, d'après les circonstances. 264. Dans tous les cas, la mort de celui qui fournit les services met fin au contrat; sauf restitution, par ses héritiers, de ce qui aurait été payé du salaire ou des gages par anticipation. 265. Les règles qui précèdent sont applicables au louage passé entre les lutteurs, acteurs, musiciens, ou autres artistes et les entrepreneurs de théâtres ou autres divertissements publics. 266. Les médecins, les avocats, les professeurs de sciences, de belles-lettres et de beaux-arts, ne louent pas leurs services; ils ne sont pas civilement tenus de donner ou de continuer les soins qu'ils ont promis ou commencé de donner aux malades, aux plaideurs ou aux élèves, et ceux-ci ne sont pas tenus de recevoir leurs soins après en avoir demandé et obtenu la promesse. Mais si les soins ont été effectivement donnés, les honoraires ou la rémunération en peuvent être réclamés en justice, eu égard tant à la qualité respective des personnes qu'à l'usage et à la convention. La partie qui s'est fait promettre les soins desdites personnes et qui, sans cause légitime, a refusé ensuite de les recevoir, peut être condamnée à une indemnité envers l'autre partie, s'il résulte de ce refus un préjudice pécuniaire pour celle-ci. Réciproquement, celui qui, ayant promis ses soins, les refuse ensuite, sans cause légitime, peut être condamné à réparer le préjudice causé. SECTION II. DU CONTRAT D'APPRENTISSAGE. Art. 267. Un industriel, un artisan ou un commerçant, peut s'engager, par un contrat spécial dit d'apprentissage, à enseigner la connaissance et la pratique de son métier ou de sa profession à un apprenti, lequel, de son côté, s'engage à l'aider dans son travail. L'apprenti mineur ne peut faire le contrat d'apprentissage sans être assisté ou représenté par son père, son tuteur ou toute autre personne ayant autorité sur lui. 268. L'engagement d'apprentissage pris par un mineur dûment assisté, ou par son représentant, ne peut excéder le temps de sa minorité; sauf à être renouvelé ou prolongé par l'apprenti devenu majeur. 269. Le contrat d'apprentissage règle la la nature et l'étendue des obligations respectives des parties. Ce qui y manque peut être suppléé d'après l'usage du lieu où s'exerce la profession du maître ou patron. 270. Le maître ou patron doit, en l'absence de stipulations ou d'usage local contraires, fournir à l'apprenti, la nourriture, l'entretien et les outils ou instruments de son métier et satisfaire aux besoins journaliers de celui-ci. Il doit aussi lui donner le temps, les soins et toutes les facilités nécessaires pour le mettre en mesure d'apprendre le métier ou la profession formant l'objet de l'apprentissage. Si l'apprenti mineur ne sait pas encore lire, écrire et compter, le patron doit lui laisser, pour son instruction, nonobstant même toute convention contraire, une heure au moins par jour, en dehors du temps de repos. 271. L'apprenti, de son côté, doit au patron tout son temps et ses services se rapportant au métier ou à la profession qu'il veut apprendre. 272. Si, par maladie ou par une autre cause majeure provenant de lui ou de sa famille, l'apprenti a été empêché de fournir ses services pendant un mois continu ou davantage, il doit prolonger d'autant son travail, sous les mêmes conditions respectives, après l'expiration du temps de l'apprentissage, même au-delà de sa majorité. 273. Le contrat d'apprentissage prend fin de plein droit: 1° Par la mort du maître ou patron ou de l'apprenti; 2° Par l'entrée de l'un ou de l'autre au service militaire de terre ou de mer; 3° Par la condamnation de l'un ou de l'autre pour crime, ou pour délit entraînant trois mois d'emprisonnement ou davantage; 4° Par l'expiration du temps fixé par la convention ou par la loi. 274. La résolution du contrat peut être prononcée en justice, sur la demande de la partie qui y a intérêt: 1° Pour inaccomplissement des obligations respectives, même par cause majeure; 2° Pour mauvais traitements du maître ou patron envers l'apparenti; 3° Pour inconduite habituelle de l'apprenti; 4° Pour délit du maître ou patron ou de l'apprenti, hors le cas prévu à l'article précédent; 5° Pour changement de résidence du maître ou patron, hors du lieu où devait s'exécuter la convention. La partie contre laquelle la résolution est prononcée en vertu du présent article peut, en outre, s'il y a faute de sa part, être condamnée à des dommages-intérêts envers l'autre partie; il en est de même au cas de la condamnation prévue à l'article précédent. SECTION III. DU LOUAGE D'OUVRAGE. Art. 275. Lorsqu'une personne se charge d'exécuter un travail déterminé, industriel ou manuel, moyennant un prix fixé d'avance ou à forfait, soit pour tout le travail, soit pour ses diverses parties, la convention est un louage d'ouvrage si la matière principale est fournie par celui qui demande le travail, et une vente sous condition de l'exécution du travail, lorsque la matière principale et le travail sont fournis par l'entrepreneur. 276. Dans les deux cas spécifiés à l'article précédent, si la chose sur laquelle le travail est déjà exécuté, en tout ou en partie, vient à périr par cas fortuit ou par force majeure, la perte de la matière est supportée par celui auquel elle appartenait, et le prix du travail n'est pas dû à l'entrepreneur. Si l'une des parties est cause de la perte ou est en demeure à l'égard de la livraison ou de la vérification, elle supporte seule ladite perte, tant pour la matière que pour la main-d'œuvre, sans préjudice des dommages-intérêts, s'il y a lieu. Lorsque la matière est fournie par l'entrepreneur la perte partielle ou la simple détérioration est assimilée à la perte totale, si elle enlève plus de la moitié de la valeur de la chose; si la dépréciation est inférieure à la moitié, les articles 146 et 419, 3e alinéa et 420 du Livre des Biens sont applicables. Si la matière est fournie par le maître, il est tenu de payer le travail dans la mesure dont la portion de matière qui subsiste se trouve augmentée de valeur. 277. Dans le cas où la matière est fournie par le maître, il peut être convenu que l'ouvrage sera verifié et reçu par parties, lors même que la livraison n'en devrait être effectuée qu'après l'achèvement complet du travail. Dans ce cas, l'entrepreneur est déchargé des risques du travail fait, si le maître l'a vérifié et reçu ou est en demeure de le vérifier. Les avances d'argent ou à-compte fournis par le maître au cours du travail n'impliquent pas par eux-mêmes la réception du travail déjà fait; mais si la chose périt avant la réception formelle ou avant la mise en demeure du maître, celui-ci ne peut répéter les avances ou à-comptes que pour ce qui en excédait le travail effectué. 278. La réception de l'ouvrage, même sans réserves de la part du maître, n'enlève pas à celui-ci le droit de rétracter son acceptation et de demander une réduction ou une restitution partielle du prix, s'il découvre plus tard des défauts non apparents qui rendent la chose impropre à l'usage auquel elle est destinée. L'action en réclamation de ce chef est éteinte trois mois après la réception de l'ouvrage total, lorsqu'il s'agit d'un travail exécuté sur des objets mobiliers ou immobiliers appartenant au maître. S'il s'agit d'objets confectionnés dont l'ouvrier fournit la matière, l'article 99 est applicable. 279. S'il s'agit de la construction à forfait d'édifices, de murs, ou autres gros ouvrages faits sur le sol, les entrepreneurs sont responsables de la perte totale ou partielle ou de la détérioration grave desdits ouvrages survenues par vice de construction ou par vice du sol; sans distinguer si l'entrepreneur a construit sur le terrain d'autrui ou sur le sien propre, ni s'il a fourni ou non les matériaux. La durée de ladite responsabilité est: 1° De deux ans après la réception de l'ouvrage, pour les murs et autres ouvrages en terre; 2° De trois ans, pour les édifices ou bâtiments en bois; 3° De dix ans, pour les édifices en pierres ou briques et pour les do-zô. 280. L'action en indemnité à raison de ladite responsabilité se prescrit: 1° Par un an, en cas de perte totale de la chose, à partir de ladite perte; 2° Par six mois, en cas de perte partielle ou de détérioration grave, à partir de l'expiration des délais pendant lesquels l'entrepreneur est responsable. 281. L'entrepreneur ne peut demander d'augmentation du prix convenu, ni le maître en demander de diminution, sous prétexte de modification des plans primitifs, si ladite augmentation ou diminution du prix n'a été réglée par écrit. La présente disposition ne s'applique pas s'il y a eu addition de constructions entièrement distinctes de celles comprises dans le forfait, ou suppression d'une portion distincte des constructions convenues: dans ce cas, à défaut d'accord entre les parties, l'augmentation ou la diminution du prix primitif est réglée par le tribunal. L'entrepreneur ne peut non plus se soustraire à la responsabilité établie par l'article 279, sous le prétexte que les plans primitifs ou modifiés lui ont été imposés par le maître, à moins qu'il n'ait obtenu, par écrit, une décharge de responsabilité à cet égard. 282. Soit que l'entrepreneur fournisse seulement son travail, soit qu'il fournisse aussi la matière, le maître peut toujours résilier le contrat par sa seule volonté; mais à charge d'indemniser l'entrepreneur, tant du travail déjà fait que de la perte subie sur les matières déjà préparées et des autres dommages, et aussi en lui payant la totalité du gain légitime qu'il aurait tiré du contrat. 283. Soit qu'il y ait résiliation du contrat ou exécution du travail à faire avec tout ou partie de la matière d'autrui, l'entrepreneur peut retenir ladite matière jusqu'à parfait payement de ce qui lui est dû pour son travail ou pour l'indemnité de la résiliation; ce droit de rétention ne s'applique qu'aux objets mobiliers. 284. Le contrat est résoluble par la mort de l'entrepreneur ou par l'impossibilité où il se trouve d'exécuter le travail, lorsque la considération de son travail personnel a été déterminante pour le maître. Dans ces deux cas, le maître n'est tenu de payer à l'entrepreneur ou à ses héritiers que la valeur des travaux ou des materiaux dont il profite, eu égard au but qu'il se proposait. 285. Les sous-entrepreneurs qui se chargent de diverses parties du travail sont soumis aux règles qui précèdent, pour leurs rapports particuliers avec l'entrepreneur principal. A défaut de payement de ce qui leur est dû par celui-ci, ils peuvent agir directement et en leur nom contre le maître, dans la mesure où il est encore débiteur envers l'entrepreneur. Les ouvriers ont le même droit contre le maître, à défaut de payement de leur salaire par celui qui les a employés.