Art. 4. Parmi les choses sans maître se trouvent encore les choses qui ont été abandonnées par leur propriétaire ; elles sont donc susceptibles d'être acquises par le premier occupant.
Il faut en exclure, comme on l'a déjà annoncé, les immeubles qui, dans ce cas, sont acquis à l'Etat, en vertu de la loi, sans aucune appréhension de sa part et pourraient l'être à son insu (v. Liv. des Biens, art. 24).
Même avec cette limite, il reste encore une assez large application de ce cas d'occupation. Pans les grandes villes, où les habitations sont étroites, les particuliers se débarrassent sur la voie publique, ou dans des lieux à ce destinés, des objets mobiliers hors d'usage et qui ne pourraient même être vendus ; mais les pauvres s'en accommodent encore volontiers et même la récolte- de ces objets de rebut donne naissance à une industrie spéciale ; dans les campagnes, ce sont souvent de mauvaises pierres, des boues, des herbes, des détritus de jardins, qui sont déposés hors des propriétés, à la disposition de ceux qui pourraient les utiliser ; l'industrie aussi rejette souvent des résidus de matières premières dont les pauvres peuvent valablement s'emparer.
Mais il pourrait arriver que, par mégarde, par la négligence des serviteurs ou employés, des objets dont le propriétaire n'a eu aucune intention de se démunir fussent jetés avec des débris inutiles ; il pourrait arriver aussi que le propriétaire eût déposé provisoirement sur la voie publique des objets encombrants, destinés soit à être rentrés, soit à être expédiés. Il est clair que de pareils objets ne peuvent être acquis par occupation, même s'il y a bonne foi de l'inventeur, car il n'y a pas abandon sans intention d'abandonner.
De là, une question de preuve que la loi a cru devoir trancher : la présomption légale est que nul n'est supposé avoir entendu renoncer à ce qui lui appartient, lors même qu'il aurait momentanément cessé de l'avoir sous sa garde. Si donc, il y avait contestation au sujet d'une chose que le propriétaire prétendrait n'avoir pas abandonnée et qu'un possesseur prétendrait avoir acquise par occupation, la preuve qu'il y a eu abandon volontaire incomberait à ce dernier.