Art. 388 et 389. Il y a avantage pour les parties à régler à l'avance les dommages-intérêts : le créancier est alors dispensé d'établir non-seulement l'étendue du dommage qu'il éprouve, mais l'existence même de ce dommage ; le débiteur, de son côté, n'a pas à en craindre une évaluation judiciaire exagéreé ; c'est une sorte de forfait ou prix à l'avance.
La clause pénale n'aura pas, du reste, un effet aussi étendu que celui d'une transaction qui interviendrait entre les parties après le dommage causé : elle n'empêchera pas toujours le procès : certains points resteront à décider par le tribunal, si les parties n'ont pas poussé leurs prévisions jusqu'au bout.
Ainsi, la clause pénale a-t-elle été stipulée pour le cas d'inexécution ou pour celui de simple retard ? Ce sera une question à décider d'après les circonstances, et, principalement, d'après le montant même de la somme stipulée : si elle est relativement faible, il sera vraisemblable quelle n'a été établie que pour le retard et, dans ce cas, le créancier pourra demander, en même temps, l'exécution et la somme pénale.
Il pourra aussi y avoir procès sur le point de savoir si l'inexécution ou le retard est imputable au débiteur, ou s'il y a eu cas fortuit, force majeure, ou même négligence du créancier ; car, la clause pénale, représentant les dommages-intérêts, n'est due que dans les mêmes cas et aux mêmes conditions que ceux-ci ; c'est ainsi encore qu'elle n'est due que si l'inexécution ou le retard ont eu lieu après la mise en demeure.
Au contraire, il n'y aura pas à distinguer si l'inexécution ou le retard provient de la mauvaise foi du débiteur ou seulement de sa négligence, ni, par suite, si les dommages éprouvés sont ou non “un effet inévitable” de l'inexécution ou du retard ; en effet, la stipulation pénale, qui ne modifie pas les cas dans lesquels les dommages-intérêt sont encourus, a justement pour but de prévenir les difficultés relatives à leur fixation.
Le pouvoir d'appréciation des tribunaux, même quant au montant des dommages-intérêts, conserve cependant encore une application importante prévue à l'article 389 : s'ils ne peuvent, en principe, augmenter ni diminuer la clause pénale, c'est parce que les parties ont entendu pourvoir elles-mêmes à leurs intérêts ; mais ils peuvent, par exception, la diminuer dans deux cas où des circonstances postérieures à la stipulation exigent que l'indemnité soit diminuée pour rester juste. Ces deux cas, indiqués au texte, n'ont pas besoin d'explication.
On remarquera seulement que ce n'est pas un devoir que la loi impose au tribunal, mais un pouvoir qu'elle lui accorde: dans chacun des deux cas, il y a à faire une appréciation pour laquelle une grande latitude doit être laissée au tribunal. Ainsi, l'exécution partielle peut n'avoir procuré au créancier aucun avantage réel, comme on le verra dans les obligations indivisibles, il ne devra donc pas toujours y avoir diminution de la clause pénale ; ainsi encore, la faute du débiteur peut avoir eu beaucoup plus d'influence sur l'inexécution ou le retard que le cas fortuit, la force majeure ou même la négligence du créancier.
Une autre sorte de contestation pourra s'élever sur la clause pénale, à savoir, sur sa validité même : l'une des parties pourra prétendre qu'elle n'a été amenée à y consentir que par erreur, violence ou dol ; le créancier se plaignant, à ce sujet, de son exiguïté, ou le débiteur, de son exagération. La loi n'a pas à réserver ce genre de contestation qui peut s'élever au sujet de toute convention.
Il y a plus de difficulté au sujet de la clause pénale ajoutée à une convention qui serait nulle par elle-même, soit par son objet, soit par sa cause.
En principe, la nullité de la convention principale entraînera celle de la clause pénale (art. 302) ; ainsi, s'il y a eu convention de donner une chose placée hors du commerce, ou promesse d'un fait illicite, la stipulation d'une peine sera nulle comme la stipulation principale. Il en serait autrement, si la stipulation principale n'était nulle que faute d'un intérêt appréciable pour le stipulant : dans ce cas, la clause pénale, en donnant un intérêt déterminé au stipulant, validerait la stipulation principale (voy. art. 322, 4e al.).
Il faut encore citer comme cas où la clause pénale serait nulle, étant contraire à la loi, celle où elle aurait pour but d'éluder les limites du taux de l'intérêt d'une somme d'argent. Quand le taux des intérêts compensatoires n'est pas laissé à la liberté des conventions celui des intérêts moratoires ne peut être libre non plus ; si donc le créancier avait stipulé, pour le cas de retard dans le payement d'une somme d'argent, une somme fixe qui se trouvât supérieure au taux légal, eu égard au temps du retard, elle serait réduite à ce taux. Quelques personnes pourraient soutenir que la clause pénale est nulle pour le tout et que les intérêts moratoires seront alors fixés par le tribunal, d'après les articles qui suivent, comme s'il n'y avait pas de clause pénale; mais il paraît plus exact de dire que la clause pénale n'est nulle que pour ce qui excède le taux légal ; et il n'est pas indifférent de le décider, parce que, si la clause était garantie par un cautionnement ou par une autre sûreté, cet avantage serait maintenu dans la mesure du taux légal, ce qui n'aurait pas lieu si la clause était annulée pour le tout.
Un cas assez fréquent où la validité de la clause pénale sera discutable est celui où elle aura été stipulée en vue de prévenir les procès sur la convention. Il faudrait la déclarer nulle, si elle avait pour but de priver l'une des parties du recours à la justice pour le redressement des torts qu'elle aurait subis, soit lors de la formation du contrat, soit lors de son exécution.
Ainsi, une partie ne pourrait valablement se soumettre à une clause pénale pour le cas où elle demanderait la nullité de la convention, pour erreur, violence, dol ou incapacité : elle ne peut renoncer ainsi, d'une façon déguisée, à la protection des tribunaux, pas plus qu'elle n'y pourrait renoncer expressément ; si donc, elle triomphait, sur une pareille demande, la clause pénale serait sans effet contre elle ; au contraire, si la partie succombait, comme, en pareil cas, le tribunal pourrait la comdamner aux dommages-intérêts, la clause pénale se trouverait encourue, comme fixant le montant des dommages-intérêts, sans préjudice des frais du procès.
Au contraire, la clause pénale serait valable, si elle avait pour but de prévenir un appel contre une première sentence rendue ou à rendre, parce que les parties peuvent toujours renoncer à l'appel, soit avant le jugement de première instance, soit après.