Art. 985. — 842. La loi arrive au cas où le travail a un caractère immobilier, c'est-à-dire consiste en ouvrages faits sur le sol.
Il ne s'agit d'abord que d'ouvrages entièrement nouveaux et non de simples réparations, lors même qu'elles auraient le caractère de "grosses réparations" (voy. art. 89); c'est ce qui résulte du mot " construction " employé par le texte.
La loi ne prétend pas énumérer tous les ouvrages qui peuvent donner lieu à l'application du présent article; mais elle énonce les principaux, pour mieux faire comprendre la nature des travaux dont il s'agit. Elle ne se borne pas d'ailleurs à'pré voir, comme dans l'article précèdent, des vices non apparents, découverts plus tard et rendant la chose impropre à l'usage auquel elle est destinée; il s'agit de conséquences plus sérieuses de la malfaçon: les édifices ou constructions se sont écroulés, ont péri, en tout ou en partie, ou ont subi des détériorations graves, et la cause en est, non dans une force majeure, mais dans un vice de construction ou dans un vice du sol qui aurait dû être corrigé avant le commencement de la construction.
La responsabilité de ces accidents est mise par la loi à la charge de l'architecte qui a d i r i g é les travaux ou de l'entrepreneur qui les a exécutés.
Si le travail a été dirigé par un architecte, l'entrepreneur est déchargé de la responsabilité; si la loimentionne l'entrepreneur, c'est pour le cas où il n'y a pas eu d'architecte occupé au travail.
Au sujet de la perte partielle ou des détériorations, la loi n'exige pas qu'elles aient une importance déterminée; il faut au moins qu'elles soient "graves:" du moment qu'elles sont assez sérieuses pour être l'objet d'une réclamation et que la cause en est une faute de l'architecte ou de l'entrepreneur qui en a fait l'office, il est juste que l'indemnité en soit due.
La loi exprime aussi que la responsabilité est la même contre les constructeurs, soit qu'ils aient constrtÏft sur le terrain du maître ou sur un autre dont le ' maître était locataire, soit qu'ils aient construit sur leur propre terrain, pour livrer ensuite le bâtiment tout fait; enfin, la même responsabilité incombe à ceux qui ont fourni leurs propres matériaux et à ceux qui ont employé les matériaux du maître: dans ce dernier cas, si les matériaux étaient défectueux, ils doivent s'imputer de les avoir acceptés et employés.
843. Il fallait fixer la durée de cette responsabilité.Le Code français la fait durer 10 ans, sans distinguer les diverses natures de constructions: la solution est simple par son uniformité, mais elle ne répond pas à la justice absolue.
Le Projet distingue ici trois sortes d'ouvrages:
1° Les terrassements, murs et autres ouvrages en terre, avec emploi de bois, de pierres ou de tuiles, pour lesquels la responsabilité dure deux ans. La condition qu'il y ait emploi de matériaux autres que la terre a pour but d'affranchir l'entrepreneur de la responsabilité à l'égard de simples chaussées ou talus faits en terre, avec revêtement de gazon, comme on en fait beaucoup au Japon; il pourrait cependant arriver que le talus fût trop droit, mal affermi et s'éboulât; mais c'est là un dommage peu important qui ne doit pas autoriser le maître à revenir sur son acceptation du travail, laquelle a le caractère d'une convention;
2° Les maisons, édifices ou bâtiments dont le bois est la matière principale, ce qui n'exclut pas des fondations, ou assises en pierre pour les poutres maîtresses, et souvent une couverture en tuiles; ce sont là les constructions les plus fréquentes au Japon;
3° Enfin, les édifices, maisons ou constructions quelconques, en pierres ou briques, c'est-à-dire dont ces matériaux sont l'élément principal; la loi y ajoute les kouru ou do-zô, maisons à l'épreuve du feu: elles sont souvent construites en terre seulement, mais dans des conditions exceptionnelles de solidité qui permettent de les assimiler aux bâtiments de pierre.
Cette distinction des constructions en trois classes a pour effet de graduer la durée de la responsabilité de l'entrepreneur à raison du temps que doivent durer les constructions à l'état normal. La responsabilité durera: deux ans au 1er cas, cinq ans au 28 cas, et dix ans au 38 cas. Ce n'est pas à dire que ces divers ouvrages n'aient qu'une durée normale de 2, 5 ou 10 ans; mais c'est parce que, lorsque ces divers délais se sont écoulés sans accident, il est vraisemblable qu'il n'en surviendra pas qui soient dus à la faute de l'entrepreneur, c'est-à-dire à des vices de la construction ou du sol, et il est bon que l'entrepreneur se sache déchargé à un moment donné, afin de pouvoir entreprendre d'autres travaux, sans trop d'inquiétude pour le passé.
Le point de départ de ces divers délais est la réception de l'ouvrage, comme dans l'article précédent; si le maître tardait à vérifier et recevoir, l'entrepreneur le mettrait en demeure, pour faire courir le délai.