Art. 785. — 437. La première disposition de cet article ne fait qu'appliquer le principe de la liberté des associés pour le règlement des parts: si la loi s'en explique, c'est d'abord parce que le cas avait paru assez important chez les Romains pour être formellement consacré; c'est aussi et surtout pour introduire dans la loi la présomption qui s'y rattache et la manière d'appliquer ce règlement.
Ainsi, d'après le 1er alinéa, on peut convenir que l'un des associés aura une part plus grande ou moindre dans l'actif que celle qu'il supportera dans le passif.
Nous employons ici ces deux mots comme préférable aux mots consacrés de bénéfices et pertes qui peuvent prêter à l'équivoque (le mot bénéfices, au moins) et faire croire qu'il s'agit seulement de l'excédent des profits sur le capital primitif résultant des; apports.
Cette clause pourra se trouver motivée, dans l'intention des parties, sur la circonstance que l'un des associés aura apporté un capital plus considérable ou moindre que les autres, ce qui expliquera qu'il prenne une part plus forte ou moindre dans l'actif. En même temps, suivant qu'il participera à la gestion ou qu'il y restera étranger, cela motivera qu'il subisse une part plus ou moins forte dans le passif, comme ayant pu être ou non cause de l'insuccès des opérations. Dans ce cas. on verra sans doute le gérant, ayant apporté peu ou point de capital, prendre une moindre part clans l'actif que celle qu'il supportera dans le passif.
438. Le 2" alinéa tend à empêcher que l'on ne se méprenne sur l'intention des parties, lorsqu'elles n'auraient exprimé la part d'un des associés que pour les bénéfices ou l'actif: on aurait pu croire que, n'ayant pas réglé les parts du passif, elles entendaient le laisser sous l'empire du règlement légal, tel qu'on le trouvera à l'article 789, pour le cas de silence des parties, cas auquel les parts sont proportionnelles aux apports; ce serait établir indirectement, et peut-être contrairement à l'intention des parties ou de l'une d'elles, le défaut d'identité des parts dans l'actif et le passif.
La loi rejette ce résultat, en présumant que le règlement de l'actif implique, par présomption, celui du passif.
Il est raisonnable, en effet, de penser que si les associés n'ont réglé que leurs parts dans l'actif, c'est qu'il était naturel aussi qu'elles n'eussent songé qu'au succès de leur entreprise, comme s'il eût été de mauvaise augure de prévoir que la société se liquiderait en perte.
Dans ce cas donc, il n'y aura pas diversité de part3 dans l'actif et dans le passif.
Mais la loi ne prévoit pas le cas inverse; par conséquent, elle ne présume pas, si les parties n'ont réglé que le passif, qu'elles aient entendu régler l'actif de la même manière: l'actif alors sera partagé proportionnel1ement aux apports, d'après l'article 789. En effet, du moment que la prévision d'une liquidation en perte est anormale et qu'on a chargé du passif un ou plusieurs associés plus que les autres, c'est qu'il y a de cela quelque raison tout exceptionnelle et les exceptions ne s'étendent pas par analogie.
439. Le 3a alinéa prévient une autre erreur qui pourrait être commise dans l'interprétation de ces deux clauses distribuant diversement l'actif: et le passif. Ainsi, si l'un des associés a droit ft la moitié des bénéfices et ne doit subir que. le tiers des pertes, on ne fera pas deuy calculs distincts dont l'un consisterait à faire la somme des profits réalisés dans toutes les affaires pour les partager par moitié, et dont l'autre additionnerait les pertes pour les diviser par tiers: on retranchera les pertes des profits ou les profits des pertes, on soustraira la plus faible somme de la plus forte, et c'est sur le reliquat qu'on assignera à l'associé favorisé la moitié des bénéfices s'ils excèdent les pertes, 'ou le tiers des pertes si elles excèdent les profits. Les Romains ont pris grand soin de faire cette remarque; tous les auteurs modernes la reproduisent; il est dont; utile qu'elle prenne place, au Japon, dans la loi ellemême.
Remarquons qu'ici, du moment que le règlement n'est pas le même pour les bénéfice* que pour les perte*, ces deux mots ne sont pas synonymes de l'actif et (Ill passif social: on devra d'abord mettre à part le montant des apports et si le fonds social les excède il y aura bénéfice; s'il y est inférieur il y aura lJerte.
440. Le Ie alinéa tranche encore une question importante, en déclarant que toutes les attributions de bénéfices ou les répartitions de pertes qui ont pu être faites pendant la durée de la société sont définitives et ne peuvent se trouver modifiées par le compte qui se fait à la dissolution de la société. Ln effet, lorsque la société doit avoir une durée indéterminée ou très longue, il ne serait guère possible aux associés d'attendre sa dissolution pour distribuer les profits réalisés et encore moins pour répartir les pertes: souvent, la plus grande partie de l'avoir de chacun se trouve engagée dans les affaires sociales et s'il n'était pas fait de répartition des bénéfices, les associés ne pourraient faire face à leurs dépenses courantes; de même, s'il y avait des pertes à subir, il ne serait pas possible de les laisser, jusqu'à la dissolution, à la charge du gérant. On fait donc des réparations périodiques.
Lorsque les parts, égales ou inégales entre les associés, sont les mêmes dans l'actif que dans le passif il est évident que ce que chacun a reçu des profits ou supporté des dettes ne peut qu'être définitif et qu'à la dissolution il n'y aura plus qu'à compléter les répartitions. Mais si l'on est dans le cas prévu par le 1er alinéa, celui où la part de certains associés n'est pas la même dans l'actif que dans le passif, on pourrait croire alors que les répartitions n'ont pu être que provisoires: si, par exemple, l'un d'eux a reçu la moitié des profits existants, parce qu'ils excédaient alors les pertes, et si, à la dissolution, les pertes sont assez fortes pour excéder les derniers profits, il semblerait qu'il dût rapporter aux autres tout ce qu'il n'aurait pas dû recevoir si le calcul général avait été fait au dernier moment.
Cependant cette solution n'est pas celle de la loi: il serait trop dur à celui qui a reçu sa part de bénéfices conformément à l'état des affaires et aux statuts, d'être obligé de les rapporter, en tout ou en partie, lors de la liquidation, alors que peut-être il les a dépensés. D'ailleurs, une partie des bénéfices a été sans doute portée à la réserve et il suffira de la partager conformément aux droits inégaux (1).
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(1) L' ancienne rédaction n'admettait que des répartitions provisoires; mais nous avons proposé et le Texte officiel admet la solution du présent article (v. art, 137, 4e al. du présent Livre).