Art. 753. — 353. Pour que la licitation ait le caractère d'une vente, il faut que l'adjudication ou attribu. tion du bien au plus fort enchérisseur, ait lieu au profit d'un étranger: si elle a lieu au profit d'un des copropriétaires eux-mêmes, ce n'est plus une vente mais un partage, dont les effets sont fort différents de ceux de la vente qui sont maintenant connus; ceux du partage ne le sont pas encore dans leur ensemble; on a seulement signalé l'un d'eux, le plus remarquable, il est vrai, dans l'article 15 (voy. aussi ci-dessus, nos 83 et 84, 1 10 et 111).
Dans le Code français, les effets du partage sont réglés au sujet des Successions (art. 883 et suiv.) et ses formes le sont tant dans le Code civil (art. 815 et s.) que dans le Code de Procédure civile (art. 966 à 985).
Lorsqu'ensuite ce Code arrive au partage des Sociétés, il renvoie pour ses formes et ses effets aux règles (111 partage des Successions (art. 1872).
Ce n'est pas à la matière des Successions que le Projet japonais doit rattacher principalement le siège de la théorie du partage: jusqu'aujourd'hui, les successions étant déférées, en général, à un seul héritier, ordinairement à l'aîné des enfants légitimes ou adoptifs, il ne pouvait être question de partager les biens du défunt; il semblerait donc préférable de placer la théorie générale du partage dans une matière qui la comporte nécessairement, en tout temps et en tous lieux, c'est-àdire dans celle de la Société.
Toutefois, comme le présent Projet admet, en prin. cipe, la pluralité d'héritiers et la prévoit souvent, il est dans son esprit qu'il y ait partage de successions, c'est pourquoi notre article y renvoie en même temps qu'au partage des sociétés. En outre, le Code officiel admet aussi et règle le partage entre l'héritier unique et un légataire à titre universel. S'il y a des particularités à l'égard de chaque classe de copartageants elles seront observées dans la licitation faite entre eux.
354. Pour donner un intérêt immédiat à notre article, nous indiquerons, dès à présent, sans développements ni j ustifications, les principales différences entre la vente et le partage.
1° La vente est translative de propriété au moment où le contrat est parfait (ex mine, d'à présent), tandis que le partage est déclaratif d'une propriété antérieure remontant à l'acte qui a constitué l'indivision (ex tune, d'alors) (v. art. 15 et art. 804).
Cette différence est la plus importante comme application de notre présent article: si la chose indivise est acquise en entier par l'un des copropriétaires, il la reçoit franche et quitte des droits conférés par ses copropriétaires pendant l'indivision; si c'est un tiers qui est l'acquéreur, il reçoit la chose telle qu'elle se trouve, grevée des droits qui ont pu être conférés antérieurement par chaque propriétaire sur sa part indivise et dans la mesure de cette part.
2° La vente d'immeuble est soumise à la formalité de la transcription pour être opposable aux tiers: le partage n'y est pas soumis (sauf pour la conservation du privilége-, s'il y a lieu, v. art. 1185 et 1197), soit qu'elle ait déjà eu lieu quand l'indivision a commencé, comme pour une société ou une vente faite à plusieurs, soit que l'acte qui a fait naître la copropriété indivise ne fût pas soumis à cette formalité, comme l'ouverture d'une succession (c).
3° La vente est soumise à la rescision pour lésion, mais seulement lorsqu'elle a pour objet un immeuble et lorsque la lésion est pour le vendeur et de plus de moitié (en France, de plus des 7/1 2e,); le partage est rescindable, en France (et cela sera proposé plus loin dans le Projet japonais, par l'article 806), même s'il a pour objet des meubles et pour lésion de plus d' un quart.
355. Il y a aussi des points communs ou de ressemblance entre la vente et le partage.
1° Ce sont deux actes à titre onéreux: pour la vente, il n'est pas besoin de le démontrer et, pour le partage, lors même qu'il n'est pas fait par contrat, mais par autorité de justice, et bien qu'il ne soit pas translatif de propriété, il n'en produit pas moins des effets réciproques pour les parties, dont chacune fait un sacrifice.
2° Le partage, comme la vente, produit l'obligation de garantie d'éviction, si l'une des parties y reçoit un objet appartenant à autrui; dans le cas de licitation, nous supposerions que la chose que les parties croyaient indivise entre elles et qui a été adjugée à l'une d'elles appartenait à un tiers, pour le tout ou pour une portion.
Il n'y aura pas lieu à rescision du partage pour vices cachés, si la loi ne l'exprime pas, et nous ne le proposerons pas: il suffit qu'il soit annulable pour lésion de plus du quart et pour dol, même causant une faible lésion.
3° Le partage, comme la vente, donne un privilége sur l'immeuble licité, pour sûreté du prix de licitation dil par l'adjudicataire.
Ces ressemblances et ces différences suffisent a, prouver qu'il y a un grand intérêt à distinguer si la licitation a le caractère d'une vente ou celui d'un partage, c'est-à-dire si elle a eu lieu' en faveur d'un étranger ou en faveur d'un des copropriétaires.
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(c) Une loi de la XIXe année de Meiji (1886), sur la transcription, paraît soumettre à cette formalité les acquisitions par succession légitime. Nous sommes étrangers à cette loi, Elle est 1'11:tv:mce sur le droit européen (v. T. If, n° 189).