Art. 697. — 234. La loi suppose ici que le vendeur a été de bonne foi lors du contrat et qu'il a découvert ensuite que la chose appartenait à autrui. Sa position doit évidemment être meilleure que dans l'hypothèse où il était de mauvaise foi.
On est très-divisé en France sur le point de savoir si le vendeur de bonne foi peut invoquer la nullité de la vente.
Si l'on admet que cette nullité n'est que relative, comme celle qui résulterait d'un vice de consentement chez l'acheteur, spécialement d'une erreur de celui-ci sur la qualité principale ou substantielle de la chose (voy. art. 331), elle ne peut être invoquée que par lui, car c'est lui seul que la loi a voulu protéger (art. 340), et encore devrait-on exiger qu'il eût été de bonne foi: autrement, il ne mériterait pas la protection de la loi.
Mais si l'on admet, avec les meilleurs auteurs et comme le Projet, que la nullité est radicale et absolue, faute de cause, alors, la logique du droit semble exiger que l'acheteur et le vendeur soient, tous deux et dans tous les cas, admis à se prévaloir de cette nullité et à refuser d'exécuter le contrat. Il faut pourtant refuser ce droit au vendeur de mauvaise foi, comme peine de son dol (v. ci-dess., p. 239-240, n° 194). Mais la même rigueur serait exagérée à l'égard du vendeur de bonne foi, lequel n'est coupable que d'imprudence.
On a cependant prétendu qu'il ne doit pas être admis non plus à se prévaloir de la nullité, à cause de son obligation de garantir l'acheteur de l'éviction; or, c'est un principe fondamental de la matière que “celui qui doit la garantie ne peut lui-même opérer l'ériction” (b). Mais nous répondrons que lorsque le vendeur de bonne foi, prévenu tardivement des droits du vrai propriétaire, refuse de livrer la chose à l'acheteur, dans l'intention évidente ou présumée de la restituer à son propriétaire, ce n'est pas lui vendeur, c'est le propriétaire qui opère l'éviction: c'est au nom de celui-ci qu'elle a lieu et par l'effet de ses droits.
Le même raisonnement ne serait plus applicable, si le vendeur était de mauvaise foi, car on ne pourrait plus dire, sans choquer la vraisemblance, qu'il est présumé avoir l'intention de restituer la chose au propriétaire et que c'est au nom et en vertu des droits de celui-ci qu'il opère l'éviction.
235. Lorsque le vendeur de bonne foi invoque la nullité de la vente, il n'a pas seulement le droit de refuser la délivrance, en abandonnant son droit au prix, il a encore le droit de demander le règlement immédiat des indemnités dont il est tenu comme garant: autrement, l'acheteur pourrait, dans l'espérance d'une plus-value, attendre un temps plus ou moins long et aggraver ainsi la position du vendeur (v. ci-dess., p. 240, n° 194). Si celui-ci a négligé de faire régler immédiatement les conséquences de la garantie, il doit l'imputer à sa négligence.
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(b) Quem de evictione tenet actio cumdem agentem repellit exceptio (voy. ci-dessus, p. 238, n° 192).