Art. 611. — 28. Nous avons dit qu'au sujet des plantations le Projet s'écarte du Code français, ajoutons et du Code italien; en effet, ces Codes mettent les plantations sur la même ligne que les constructions, et défendent au propriétaire des plants employés sans son consentement de les faire arracher pour les reprendre. Il n'y a pourtant pas la même raison économique d'interdire cette revendication: les arbres ne perdront pas sensiblement de leur utilité en changeant de sol pour retourner à leur propriétaire et, dès lors, il ne paraît pas bon de sacrifier le droit de propriété.
Toutefois, on ne pouvait non plus permettre cette revendication après un temps assez long pour que les plants aient pu se nourrir et de se développer dans le fonds où ils ont été indûment placés: la loi fixe un an comme prescription de cette action en revendication. Ce système n'a pas l'inconvénient de celui des Romains, lequel nécessitait la vérification difficile du point de savoir " si les arbres avaient poussé des racines" dans le fonds qui les avait indûment reçus.
Si le propriétaire des plants exerce sa revendication dans l'année de la plantation, il n'en aura pas moins droit à une indemnité, s'il y a lieu, pour la dépréciation de valeur et pour la privation de jouissance qu'il a subie. Après l'année, il aura droit à la valeur même des plants, estimés au jour où ils ont été employés, plus l'indemnité pour sa jouissance perdue. Mais il n'est pas obligé d'attendre un an pour demander cette valeur; s'il renonce désormais à la revendication. Bien entendu, le propriétaire du sol ne pourrait le forcer à reprendre ses plants dans l'année, mais il pourrait, à toute époque, le mettre en demeure de se prononcer dans un sens ou dans l'autre (comp. art. 616, 2e al.).
Comme les plantations d'arbres d'autrui peuvent avoir été faites par un usufruitier, un emphytéote ou un fermier, et que la solution devait être la même, la loi, pour comprendre toutes ces personnes d'une façon abrégée, ajoute le nom générique de " possesseur."
Le texte a soin de ne parler que des arbres, arbustes, ou plantes: il ne s'appliquerait pas au cas de graînes d'autrui qui auraient été semées sans la permission de leur propriétaire dans un fonds étranger: ici, il n'y aurait jamais lieu qu'à une indemnité, car les semis une fois levés, ne sont plus des graines; ce ne sont pas non plus des plantes, des choses plantées, dans le sens de notre article.