Art. 609. — N° 24. Le présent article contient deux dispositions distinctes et d'un caractère assez différent.
Le Code français, en les réunissant dans une seule formule (art. 553), a affaibli la portée de l'une d'elles, mais l'interprétation doctrinale et judiciaire lui a rendu sa valeur.
D'après le Code français, il y a ici deux présomptions et chacune pourrait être démentie par la preuve contraire: 1° présomption que les constructions, ouvrages et plantations ont été faits par le propriétaire du sol et à ses frais, 2° présomption qu'ils lui appartiennent. Or, le Code français paraît ici fonder la seconde présomption sur la première, en sorte que, si celle-ci était démentie, celle-là tomberait à son tour. Mais telle n'est pas, au fond, la pensée de la loi: lors même qu'il est prouvé que les constructions et ouvrages ont été faits par les soins et aux frais d'un autre que le propriétaire du sol ou des bâtiments, lesdits ouvrages et constructions n'en appartiennent pas moins à ce dernier, sauf l'indemnité à raison de son enrichissement indû, ou sauf le droit de faire détruire et enlever les matériaux, sous certaines distinctions.
Lors même que l'on attribuerait aux deux dispositions un caractère de présomption légale, il faudrait reconnaître que la première est simple ou susceptible de toute preuve contraire, tandis que la seconde serait, si non absolue, au moins plus difficile à renverser: elle ne comporterait d'autre preuve contraire que celle d'un titre opérant cession desdits ouvrages à un tiers ou celle de la prescription qui est une autre présomption résultant d'une longue possession par un tiers.
Il y a là, en somme, la consécration d'un axiome qui remonte au droit romain: “tout ce qui est construit sur le sol accède au sol”, omne quod incedificatur solo cedit.
C'est en ce sens qu'a été rédigé le présent article du Projet.
Le texte a soin de parler séparément du propriétaire du sol et de celui des bâtiments, lesquels sont plus souvent distincts au Japon que dans la plupart des autres pays; or, le propriétaire des bâtiments peut être un superficiaire, un emphytéote, un usufruitier, na fermier. Si donc les bâtiments d'une de ces personnes ont été construits, augmentés ou réparés, la présomption est que c'est par elle que le travail et la dépense ont été faits, et s'il est prouvé qu'elle y a em ployé des matériaux d'autrui, elle acquierra lesdits matériaux, sauf l'indemnité dont il est parlé à l'article suivant.
On remarquera encore que notre article, contrairement au Code français, établit une différence entre les constructions ou autres ouvrages et les plantations: pour celles-ci, la présomption est bien, comme pour les constructions, qu'elles ont été faites par le propriétaire du sol et à ses frais; mais, quand il est prouvé qu'elles ont été faites avec les plants d'autrui (arbres, arbustes ou plantes), la propriété ne lui est acquise que si le propriétaire desdits plants ne les revendique pas dans l'année, comme il est dit à l'article 611. C'est là que cette exception sera justifiée.