Art. 528 et 529. -582. La loi règle maintenant l'effet de la remise lorsqu'il y a divers débiteurs, soit principaux, soit accessoires, et que la convention a été faite avec l'un d'eux, expressément ou même tacitement.
Il n'y a pas de difficulté sur le 1er alinéa de l'article 52â-; il est clair que lorsque le débiteur principal est libéré, les cautions le sont également.
Si la convention de remise a été faite avec un seul des codébiteurs solidaires, il est encore naturel que les autres en profitent (quoique, dans ce cas, le créancier n'ait été mu, vraisemblablement, que par des considérations personnelles à celui auquel il a fait la remise); s'il en était autrement, si les autres débiteurs restaient tenus, même déduction faite de la part du gratifié, et que l'un d'eux fût insolvable, le gratifié serait encore exposé à un recours en vertu de la garantie mutuelle que se doivent les codébiteurs solidaires et ce résultat doit être évité (c).
Mais la libération des autres débiteurs solidaires n'est pas d'une nécessité absolue: le créancier peut ne faire qu'une remise personnelle à celui qu'il veut gratifier, et, pour cela, il lui suffit de réserver ses droits contre les autres; mais, dans ce cas encore, ceux-ci demeurent libérés de la part virile ou réelle que le gratifié devait définitivement supporter dans la dette, ainsi que de sa contribution éventuelle dans la part des insolvables (d).
Quoique l'indivisibilité présente de notables différences avec la solidarité, ainsi qu'on l'a vu en son lieu, il y a ici une similitude qui dispense de développements, au moins quand il s'agit de l'indivisibilité volontaire prévue à l'article 464: si la dette, par sa nature même ou par l'intention des parties, dans le cas du 29 alinéa de l'article 462, ne comportait pas de division entre les débiteurs et que le créancier ait fait avec l'un d'eux un pacte de remise, il est évident, et plus encore que dans la solidarité, qu'il ne peut plus rien demander aux autres; mais, dans le cas où il aura fait contre eux la réserve de ses droits, il y aura une différence, moins au fond d'ailleurs qu'en la forme: quand la dette, par sa nature ou par l'intention qui y est assimilée, ne comporte pas de division, le créancier, en vertu de la réserve qu'il a faite, demandera le tout à celui des autres débiteurs qu'il jugera à propos, mais il lui tiendra compte, en argent, de la valeur de la part de celui qu'il a entendu libérer tant de ses poursuites que du recours des autres (comp. art. 466, 522, 531 et 537).
583. On pourrait douter, au sujet de l'effet de la remise de la dette faite-à une caution (e): comme celle-ci n'est qu'un débiteur accessoire, il semble moins naturel que la remise qui lui est faite profite au débiteur principal. Mais ce qu'il faut voir c'est la volonté du créancier d'abandonner son droit, et la caution qui est toujours, mandataire du débiteur, ou au moins son gérant d'affaires, a bien, comme telle, qualité pour accepter un avantage offert à celui-ci.
Bien entendu, on suppose ici que la remise porte sur la dette même et non sur le cautionnement: ce dernier cas est prévu et réglé plus loin (art. 533).
Quant aux autres cautions, sans nul doute, elles sont libérées, puisque le débiteur principal l'est lui-même.
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(c) Le droit romain présentait, à cet égard, une distinction qui n'est plus possible aujourd'hui, mais qui mérite d'être signalée pour sa singularité. On y reconnaissait deux espèces de remises de dette: l'une, solennelle en la forme, par laquelle le créancier déclarait "tenir pour reçu" (habere acceptum) ce qui lui était dû; c'était un payement fictif; cette remise s'appelait acceptilatio; bien entendu, elle libérait tous les débiteurs solidaires (qu'on appelait conrei ou correi); l'autre remise se faisait sans solennité, par simple pacte ou promesse " de ne pas demander " (pacturn de non petendo); ce pacte fait avec un seul des débiteurs ne libérait les autres que pour la part du gratifié. Les lois modernes ont supprimé les formules solennelles et le caractère fictif de l'acceptilation, mais elles en ont transporté au simple pacte de remise les effets plus larges.
(d) Bien que la solidarité ne doive être traitée dans son ensemble qu'au Livre IVe, il paraît préférable, lorsqu'elle touche à une autre théorie spéciale, de compléter cette dernière, pour n'y plus revenir, par ses liens avec la solidarité.
C'est encore pour ne pas revenir, au Livre IVe, à la remise de la solidarité, au sujet des présomptions de remise, que le Projet en traite ici (v. art. 532).
La même observation s'applique à l'indivisibilité conventionnelle dont la remise est réglée plus loin.
(e) C'est par la raison donnée plus haut (note d) que, bien qu'il doive y avoir un Chapitre spécial sur le Cautionnement, la loi en indique, chemin faisant, les diverses combinaisons avec les autres matières.