Art. 568. — 658. Cet article ne présente pas de difficultés. En général, les actions passent activement aux héritiers et passivement contre eux. Ce principe est surtout applicable quand il s'agit d'actions ayant un intérêt purement pécuniaire, comme l'action en nul. lité ou en rescision. Mais, bien que l'action pienne à l'héritier du chef de son auteur, elle subit, au moins quant au délai, quelque modification du chef de l'héri. tier. Ainsi, l'action appartenait à un mineur et, comme telle, elle n'était pas prescriptible pendant sa minorité; si l'héritier est majeur, la prescription commencera de suite à courir; réciproquement, l'auteur était majeur et la prescription courait contre lui: si l'héritier est mi. neur, la prescription est suspendue en sa faveur.
Si l'auteur était majeur et si l'héritier l'est également, ce dernier ne jouira que du reste du délai non encore écoulé et ce temps pourrait être très-court.
La loi française a ici une disposition fort sévère qu'il sera peut être bon de ne pas reproduire dans le Projet, lorsque l'on arrivera à la matière de la Prescription dans son ensemble: la prescription n'est pas suspendue pendant le délai accordé à l'héritier pour faire inven. taire et pour délibérer sur son acceptation ou sa répudiation de la succssion (c. civ. fr., art. 2259). Il est vrai que l'héritier peut, avant d'avoir pris parti sur la succession, faire un acte judiciaire interruptif de la prescription, lequel n'est qu'un acte conservatoire; mais s'il restait très-peu de temps à courir, il pourrait arriver que le délai se trouvât expiré avant même que l'héritier eût connaissance de l'action en nullité qui appartenait à son auteur. Il n'y aurait pas grand inconvénient pour les tiers à subir une suspension de la prescription de quelques mois: ils souffriraient bien plus de celle qui résulterait de la minorité.
659. Dans les trois articles précédents la loi n'a parlé que des actes annulables et des actions ou exceptions qui tendent à les détruire; il n'a pu être question des actes radicalement nuls ou inexistants, comme ceux auxquels ont manqué une ou plusieurs des conditions fondamentales exigées par l'article 325: le consentement, un objet déterminé, une cause licite; dans ces cas, le contrat ne peut avoir, tout au plus, qu'une apparence d'existence qui disparaîtra au premier examen: il ne peut être question d'annuler ce qui n'existe pas.
Cependant, ce n'est pas à dire qu'il n'y aura jamais procès à cet égard: si l'inexistence est contestée, si l'une des parties veut se prévaloir du contrat, il faudra bien que la justice statue sur cette prétention et la déclare mal fondée; ce sera alors par voie d'exception que l'inexistence, que la nullité radicale sera démontrée, mais, ici, l'exception sera évidemment perpétuelle: le temps, même le plus long, ne pourrait donner naissance à une obligation et l'inaction ne peut confirmer une convention inexistante.
En sens inverse, si l'une des parties a exécuté la con. vention qui n'avait que l'apparence d'existence, il faudra bien qu'elle prenne l'initiative d'une action pour revenir sur ce qui a été fait, pour le faire détruire; mais ce ne sera pas une action en nullité ou en rescision, ce sera une revendication des choses livrées, lesquelles n'ont pas été réellement aliénées, ou une répétition des sommes ou valeurs payées indûment et sans cause (vor. art. 381-2° et 387).
Ces actions différeront beaucoup de l'action en res. cision, notamment, quant à la durée: elles seront prescriptibles cependant, parce que toutes les actions le sont, en général, mais ce sera la prescription du droit commun, la plus longue, dont le délai n'est pas encore fixé dans le Projet. En France, il est de trente ans (art. 2262).