Art. 317. — 17. Bien que les expressions de convention et de contrat, soient souvent employées l'une pour l'autre, dans l'usage et même dans les lois, il est bon cependant de reconnaître le sens propre de chacune; elles ne sont pas synonymes: la convention est plus large que le contrat; elle est le genre, celui-ci est l'espèce. Le sens propre ou étymologique n'est pas le même, dans les langues dérivées du latin: la convention (b) exprime l'idée de personnes qui, après avoir été dans des dispositions d'esprit différentes, arrivent à se réunir dans un même sentiment, dans une même volonté; le contrat (c) suppose aussi l'accord de deux volontés, mais, spécialement, dans le but de former un lien juridique, une obligation. Le contrat est donc toujours une convention, mais la convention n'est pas toujours un contrat.
Ainsi, soit une convention ayant pour but d'éteindre une obligation, par exemple, une remise de dette, il serait tout à fait impropre de dire qu'il y a contrat (d). De même, si l'on suppose une donation de meuble ou d'immeuble dont l'objet est déjà aux mains du donataire: comme alors le donateur, tout en se dépouillant du droit de propriété, ne contracte aucune obligation, pas même celle de livrer la chose, puisqu'elle est déjà possédée par le donataire, ni celle de garantir de l'éviction (à la différence du cas de vente), on ne doit pas dire qu'il y a contrat, mais qu'il y a convention. Si, au contraire, on suppose une vente ou un échange, bien que l'effet principal soit la transmission de la propriété, il y a aussi des obligations créées: l'acheteur doit. payer un prix; pour lui, la convention est un contrat; pour le vendeur et le coéchangiste, il y a aussi, outre l'obligation de livrer, celle de garantir le cessionnaire de tout trouble ou éviction fondé sur un droit antérieur prétendu par un tiers; la convention est donc, de ce chef, un contrat, et c'est ce qui explique que l'on dise bien plus souvent " le contrat de vente ou d'échange " que la convention de vente, la convention d'échange.
Quelquefois, la convention ne crée ni n'éteint entièrement une obligation: elle modifie, elle change quelque chose d'une obligation antérieurement formée, elle y ajoute, y substitue ou en retranche quelque chose; en pareil cas, on ne recherche guère s'il y a plus d'ajouté que de retranché, et l'on peut indistinctement employer l'expression générique de convention ou celle plus étroite de contrat: c'est ce que l'on fera ici, le plus souvent.
Mais ce qu'on ne doit jamais faire, ce que le Code français a fait trop souvent et ce qu'on ne trouvera pas dans le Projet japonais, c'est employer le mot obligation pour celui de contrat ou de convention; ce qui est confondre l'effet avec la cause et brouiller toutes les idées (e).
18. La loi va présenter successivement: 1° la classification des conventions; 2° leurs conditions d'existence et de validité: 3° leur force ou leurs effets, tant entre les parties qu'à l'égard des tiers; enfin, 4° les règles de leur interprétation.
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(b) Du latin: venire cum: "venir avec, venir ensemble, se rencontrer."
(c) Du latin: trahere cum: "tirer avec, tirer ensemble, serrer un lien.'
(d) C'est pourtant ce que fait le Code italien (art. 1098).
Les Romains, toujours scrupuleux dans la langue juridique, disaient que, dans'ia remise de dette, il y a moins contractus (lien, nœud) que distractus (dénoûment).
(e) Cette fâcheuse confusion se trouve, notamment, au Code français, dans le Chapitre II, Sections 39 et 4°, dans les rubriques du Chapitre III et de la Section 2e, et dans l'important article 1138.