Art. 1098. — 214. Après l'analogie sient la différence entre le droit de rétention et le gage. On verra bientot que le gage donne au créancier gagiste, outre le droit de rétention, un droit de privilége ou de préférence sur la valeur de la chose engagée, lorsqu'elle sera vendue, à la requête, soit du créancier gagiste, soit des autres créanciers (art. 1116); c'est ce droit de préférence qui n'appartient pas au créancier simpleinent rétenteur et si la loi prend soin de s'en expliquer (1 er al.), c'est pour prévenir une trop facile confusion de ce droit avec le gage.
Le créancier rétenteur n'ayant pas de privilége sur la valeur de la chose, on peut se demander à quoi lui sert le droit de rétention. La réponse est facile: liv rétention opérera sou effet par l'intérêt que le débiteur ou ses autres créanciers auront à dégager la chose retenue, en payant la dette qu'elle garantit; comme cette chose vaudra, en général, plus que le montant de la créance, les intéressés ne la laisseront pas longtemps aux mains du rétenteur.
215. Le 2e alinéa nous ramène à une analogie avec le gage, en ce que la rétention confère au créancier un véritable privilége sur les fruits et produits de la chose, lesquels s'imputeront sur les intérêts et, subsidiairement, sur le capital. Cette innovation est une juste compensation de ses peines et soins dans la gestion et la conservation de la chose.
Le présent article devant servir en même temps à régler le droit aux fruits du créancier nanti par convention d'un meuble ou d'un immeuble (v. art. 1113 et 1131), il est bon qu'il soit explicite sur les diverses espèces de fruits.
Comme le droit de rétention peut s'appliquer à toute espèce de biens, il y aura souvent lieu, pour le créancier, à une perception de fruits naturels de fonds de terre; des meubles il ne pourra obtenir de fruits naturels que s'il s'agit d'animaux; mais, des deux sortes de biens il pourra obtenir des fruits civils, par suite de location de la chose, ou par les intérêts, s'il s'agit d'un titre de créance retenu par un cédant.
La disposition du 3° alinéa est facile à justifier: ni le débiteur ni ses créanciers ne doivent souffrir de la négligence du rétenteur à percevoir les fruits.