Art. 1148. — 292. Quoique les priviléges dont il s'agit dans cette Section s'étendent sur les meubles et les immeubles, ce n'est pas à dire que ce soit indistinctement et qu'il dépende des créanciers auxquels ils appartiennent de les faire valoir à leur gré sur les immeubles ou sur les meubles. Déjà l'article 1139-1° nous a dit que les priviléges généraux ne s'étendent sur les immeubles que " subsidiairement," ce qui veut dire en cas d'insuffisance ou à défaut de meubles.
Le 1er alinéa de notre article l'exprime formellement, Si la vente des meubles et la distribution du prix qui en provient a lieu d'abord, ce qui sera le plus fréquent. la collocation subsidiaire sur les immeubles des priviléges généraux ne fera pas de difficulté.
293. Le 2e alinéa prévoit qu'en fait, et pour des causes qui n'ont pas à nous arrêter, il y a eu lieu d'abord à la distribution du prix d'un ou plusieurs immeubles. Comme on ne sait pas ce que produira la vente du mobilier et quel sera le reliquat dû aux créanciers privilégiés sur tous les meubles, on doit nécessairement admettre ceux-ci à produire leurs titres et à se faire colloquer sur le prix des immeubles vendus, pour le montant intégral de leur créance. Mais cette collocation est " conditionnelle" ou provisoire: elle a seulement pour but de préserver les créanciers d'une perte, au cas où les prévisions sur la vente du mobilier ne seraient pas atteintes et aussi de ne pas retarder la collocation des autres créanciers ayant privilége ou hypothèque sur les immeubles.
Aussi les créanciers qui nous occupent ne touchentils pas le montant de leur collocation, puisqu'il peut arriver qu'ils n'aient besoin de rien toucher sur le prix des immeubles; c'est seulement après la vente du mobilier, que, si quelque chose leur reste dû, ils le recevront sur cette collocation immobilière, laquelle, en attendant, est consignée.
La loi devait prévoir le cas où les créanciers qui nous intéressent auraient négligé de se présenter en temps utile à la distribution du prix des meubles; dans ce cas, ils seraient déchus non de tout droit sur le prix des immeubles, mais des sommes qu'ils auraient pu toucher sur le prix des meubles; or, ces sommes sont faciles à connaître quand les meubles sont vendus, puisque ces créanciers eussent été les premiers à toucher.