Art. 1073. — 177. La présente disposition se trouve en substance dans l'article 534; mais comme cet article pose un principe commun au cautionnement et à la solidarité et que l'application n'en est pas exactement ' la même pour les deux sûretés, il a dû renvoyer à l'article 1045 et au nôtre (a).
Lorsqu'il s'agit de la caution, comme elle a droit à un remboursement intégral de ce qu'elle a payé, elle peut demander sa décharge entière contre le créancier qui a rendu impossible sa subrogation aux sûretés qui garantissaient la créance. Mais, un débiteur solidaire n'ayant droit contre chacun de ses codébiteurs qu'au remboursement de la part de celui-ci, la décharge exigée du créancier ne peut s'appliquer qu'à la part de celui des codébiteurs auquel le créancier a fait remise des sûretés particulières qu'il avait reçues de lui.
177 bix. Nous avons annoncé (n° 147) que nous terminerions la matière de la solidarité passive en la comparant au cautionnement avec lequel elle a de frappantes analogies.
Assurément, on est porté à voir dans l'engagement de chaque débiteur solidaire deux obligations dont l'une serait principale, celle de sa propre part dans la dette, et l'autre accessoire, laquelle serait un cautionnement pour la part des autres dans la dette commune; mais le parallèle que nous allons présenter prouve que cette assimilation au cautionnement comporte tant de restrictions qu'il ne faut pas y attacher une trop grande importance.
Il faut, en effet, reconnaître que l'obligation solidaire est une; seulement, elle a une modalité particulière.
Voici, du reste, des ressemblances incontestables:
1° La solidarité et le cautionnement, augmentant pour le créancier les chances d'être payé, appartiennent tous deux à la matière des sûretés ou garanties des créances, et comme il n'y a pas affectation spéciale d'un bien au payement de la dette, mais seulement engagement d'une personne, ce sont des sûretés p ers 0 n. nelles;
2° Quand le créancier poursuit l'un des obligés pour le payement de la dette, celui-ci peut demander un délai pour appeler en cause l'autre obligé: la caution appelle le débiteur principal, le débiteur solidaire appelle son codébiteur;
3° Celui qui est poursuivi peut opposer les moyens de défense qui résultent du défaut de formation de la dette ou de son extinction;
4° Celui qui a payé la dette dont il était garant vis-' à-vis du créancier a, à son tour, un recours en garantie contre l'autre obligé;
5° Celui qui a payé a non seulement une action en garantie, de son chef, par suite de ses rapports de droit avec l'autre, mais encore il est subrogé légalement aux droits et actions qu'avait le créancier.
Voici maintenant les différences.
1° La caution n'est jamais engagée, comme telle, que par sa volonté et par un engagement envers le créancier, lors même que le cautionnement est imposé au débiteur par la loi ou par un jugement; -la solidarité est souvent légale et imposée aux codébiteurs sans leur volonté;
2° la caution ne peut s'obliger à plus ni sous des conditions plus onéreuses que le débiteur principal;- les codébiteurs peuvent être obligés inégalement et sous des modalités plus dures pour les uns que pour les autres;
3° La caution jouit des bénéfices de discussion et de division; -ces deux bénéfices sont refusés aux codébiteurs solidaires;
4° La caution ne doit les intérêts, les frais et autres accessoires de la dette que si elle a donné un cautionnement indéfini;-les codébiteurs doivent tous les accessoires, sans distinction;
5° La caution qui a payé la dette peut recourir pour le tout contre le débiteur principal et, s'il y a plusieurs débiteurs solidaires, elle peut également recourir pour le tout contre chacun d'eux, non seulement par la subrogation aux droits du créancier, mais même par l'action qu'elle a de son chef, au moins lorsqu'elle est mandataire;-le codébiteur solidaire qui a payé, non seulement garde une part de la dette à sa charge, mais encore ne peut demander à chacun de ses codébiteurs que la part de celui-ci, lors même qu'il use de la subrogation aux droits du créancier, et s'il y a des insolvabilités, il en supporte encore sa part;
6° La caution peut exiger du créancier sa décharge entière du cautionnement, lorsque celui-ci a diminué ou laissé périr les sûretés que la subrogation devait transmettre à la caution, -le codébiteur solidaire, en pareil cas, ne peut demander sa décharge que pour la part de celui ou de ceux à l'égard desquels les sûretés ont été perdues.
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(a) Le Code français a placé cette disposition dans la matière du cautionnement (art. 2037), ce qui rend difficile son application à la solidarité.