Art. 780. — 431. La distinction ici proposée, au sujet de la responsabilité des fantes, entre les associés qui gèrent en vertu d'un mandat formel et ceux qui ne gèrent que parce qu'il n'a pas été nommé de gérant par le contrat de société (v. art. 773), est facile à justifier, et c'est par elle que l'on peut conserver ce qui avait été annoncé sous l'article 351, en même temps que l'on fait, tout à la fois, une part à la tradition romaine et une part au principe plus sévère du Code français.
Quand le contrat n'a pas désigné d'administrateurs, comme il n'en faut pas moins que la société soit administrée, la loi reconnaît à chacun le droit de gérer; mais on comprend que la responsabilité corrélative à l'exercice de ce droit soit moins rigoureuse que contre ceux qui ont reçu à cet égard un mandat formel; en effet, ou le défaut de nomination de gérants résulte d'un oubli, d'une négligence commune, et alors les associés n'ont pas le droit d'être bien sévères contre ceux qui auront géré; ou bien, c'est à dessein qu'ils n'ont pas désigné de gérant, ayant confiance les uns dans les autres également; dans les deux cas, ils n'ont pas à se plaindre si ceux qui ont géré ont pris autant de soins pour les affaires de la société que pour les leurs propres.
Dans l'explication du présent article et du précédent on a supposé des fautes ou des négligences commises dans la gestion, mais on n'a pas prévu le cas où l'associé qui devait gérer aurait tout-à-fait négligé de le faire. La même différence de sévérité devrait s'appliquer entre les deux sortes de gérants: celui qui a été formellement nommé gérant ou administrateur serait toujours responsable du défaut de gestion, même du simple retard apporté dans la prise de la gérance; tandis que celui qui n'a le droit de gérer que par application de l'article 773, n'en a le devoir et ne serait responsable du défaut de gestion que si, d'après les circonstances, il était le seul qui pût faire les actes de gestion négligés: autrement, les autres associés seraient responsables à leur tour envers lui et ces responsabilités mutuelles se neutraliseraient.
Mais si nous supposons que certains biens de la société étaient situés dans une localité où un seul des associés résidait, ce serait à lui naturellement qu'aurait incombé l'obligation de gérer ces biens; s'il s'agissait de vendre des produits agricoles de la société et que l'un des associés eût l'habitude de vendre lui-même des produits similaires de ses propriétés, il serait en faute de n'avoir pas vendu en même temps et aux mêmes cours les produits des fonds sociaux.
Dans l'application de ces deux articles sur la responsabilité des fautes, les tribunaux devront, plus encore qu'en toute autre cas, tenir grand compte des circonstances du fait et être peu rigoureux.