Art. 71. — 103. Bien que le droit de l'usufruitier soit viager et ainsi établi en considération de la personne, quant à la durée, il n'est cependant pas inséparable de la personne au point de ne pouvoir être cédé. Or, si l'usufruitier peut céder son droit, l'aliéner pour le tout, à plus forte raison, peut-il le grever de droits moindres, comme le louer ou l'hypothéquer.
On remarquera seulement que l'hypothèque ne pouvant être établie que sur les immeubles, il faut. que l'usufruit, pour être hypothéqué, soit lui-même immobilier, par l'objet auquel il s'applique (v. art. 1203). On aurait pu croire qu'il était défendu à l'usufruitier de céder son droit ou de le donner à bail, quand il porte sur des objets qui se détériorent plus ou moins prompte- ment par l'usage; mais la loi ne l'a pas défendu: elle y a seulement apporté quelque tempérament (voy. art. 58); le nu-propriétaire trouvera d'ailleurs des garanties contre l'abus de jouissance du cessionnaire ou du preneur à bail, dans le cautionnement qui sera fourni au début de l'usufruit.
Mais, comme il ne saurait dépendre de l'usufruitier de prolonger son droit indéfiniment, la loi prend soin d'exprimer que les droits qu'il a consentis sont soumis aux mêmes limites et conditions que le sien propre, notamment, quant à la durée.
L'usufruit légal des père et mère, sur les biens de leurs enfants mineurs, forme exception au droit de cession par l'usufruitier. Cette exception se justifie par la brièveté du droit et par les charges spéciales qu'il impose. Elle ne sera sans doute pas la seule. Ainsi le Projet ne se prononce pas ici sur la question de savoir si l'usufruit qui, vraisemblablement, sera reconnu au mari, pourra être par lui cédé ou loué: la question ne devra pas être négligée à l'occasion du Contrat de mariage et elle devra être résolue négativement, au moins pour la cession, car l'usufruit marital entraîne des charges de famille dont l'accomplissement serait souvent compromis par une cession.
Le danger serait le même pour l'hypothèque qui peut mener à l'expropriation forcée.
Quant à la location du droit d'usufruit, elle peut être permise au mari, comme aux père et mère, dans la mesure où est valable la location des choses mêmes soumises à l'usufruit, en tant quelle constitue un acte d'administration de ces choses: pratiquement, la location du droit d'usufruit et celle des choses usufructuaires pourront être confondues (2).
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(2) On a ajouté au texte cette réserve en faveur des baux ayant un caractère d'actes d'administration, et de leur renouvellement.