Art. 38. — 68. Il n'est pas rare que plusieurs personnes se trouvent simultanément propriétaires d'une même chose.
Dans les pays où il n'y a pas de droit d'aînesse (et ce sont aujourd'hui les plus nombreux), il arrive souvent que plusieurs héritiers de même degré sont appelés ensemble à une succession.
Il peut arriver aussi que plusieurs personnes se réunissent pour acheter un bien, sans se mettre d'ailleurs en société proprement dite.
Enfin, quand une société se trouve dissoute, les droits de propriété qui appartenaient précédemment à la personne morale société, appartiennent désormais aux exassociés, individuellement.
Tels sont les principaux cas de copropriété.
Comme les copropriétaires ou communistes ont chacun un droit sur toute la chose et sur chaque partie de la chose, on dit qu'ils sont dans l'indivision, que leur droit est indivis.
Il ne faut pas confondre l'indivision avec l'indivisibilité, ni une chose indivise avec une chose indivisible. Une chose indivise n'est pas encore divisée, mais pourra l'être; une chose indivisible ne pourra jamais être divisée: sa nature, la convention ou la loi s'y oppose.
La loi règle ici la manière dont les copropriétaires peuvent user de la chose, en jouir et l'administrer.
Dans l'article suivant elle en règlera la disposition.
Du moment que la chose n'est pas divisée, l'usage de chacun pourra porter sur la chose toute entière; mais, pour que l'usage de l'un ne mette pas obstacle à l'usage de l'autre, il faudra, le plus souvent, éviter l'usage simultané: par exemple, s'il s'agit d'un cheval, d'une voiture, chacun usera à son tour.
Mais, s'il s'agit d'une maison, l'usage de chacun pourra être intégral, continu, et simultané avec celui des autres: ils habiteront ensemble, comme les membres d'une même famille.
La jouissance se résumant, ordinairement, dans une certaine quantité de fruits et produits périodiques, ces fruits se partageront probablement chaque année; car s'ils restaient indivis eux-mêmes, comme le fonds, leur utilité ne se comprendrait pas.
Au lieu de partager les fruits chaque année, après une culture faite eu commun, les copropriétaires peuvent aussi faire un partage de jouissance, dit provisionnel ou provisoire;" pour cela, ils font des lots dont chacun jouit séparément, à sa convenance, ce qui évite des contestations sur le mode de culture ou d'administration.
Toute propriété mobilière ou immobilière est sujette à se dégrader, si elle n'est pas l'objet de- soins. Chacun des copropriétaires, ayant intérêt à la conservation de la chose en bon état, a aussi le droit de faire les actes d'administration nécessaires à ce résultat, et si ces actes occasionnent des dépenses, elles seront supportées à frais communs, comme les autres charges: notamment, comme les impôts.
Mais le pouvoir d'administrer qui, en d'autres circonstances, permet d'améliorer la chose, ne pourrait pas ici aller aussi loin: la conservation d'une chose est un fait précis et limité; son amélioration est indéfinie et, comme elle entraîne toujours des dépenses proportionnelles, il pourrait arriver que l'un des copropriétaires fît des améliorations téméraires et ruineuses.
Ce que chacun pourrait faire, ce serait de continuer une exploitation commencée, de donner la chose à bail, de manière à en tirer un revenu raisonnable et surtout de continuer un bail antérieur et sur le point d'expirer (voy. l'art, suivant).
Cette situation née de la copropriété n'est évidemment pas favorable, elle peut créer des difficultés sans nombre; aussi arrivera-t-il, le plus souvent, que les copropriétaires régleront par des conventions particulières, l'usage, la jouissance et l'administration.