Art. 35. — 62. Le propriétaire est supposé ici n'avoir pas démembré sa propriété par des concessions de droits réels; autrement, l'obligation de les respecter diminuerait ou suspendrait les facultés que la loi lui reconnaît dans cet article.
Mais un plein propriétaire peut à son gré, construire, ou ne pas construire, cultiver et planter ses terres ou les laisser incultes, dessécher les étangs ou marais, ou en établir.
Les constructions dans les villes sont cependant soumises, dans plusieurs pays d'Europe, à des règlements sur l'alignement et sur la hauteur des maisons, sur la salubrité des logements, etc.; mais ce sont encore là des mesures d'utilité publique, et elles sont jugées si légitimes qu'elles ne donnent lieu, en général, à aucune indemnité (e).
63. Un cas assez embarrassant pourrait se présenter au Japon, depuis que l'on songe à prendre de sérieuses mesures contre les incendies.
L'administration préfectorale ou municipale pourrait-elle exiger des propriétaires qui construisent une première fois ou reconstruisent des maisons incendiées, qu'ils n'emploient que la pierre, la brique on le pisé (terre agglomérée) et ne couvrent les toits qu'en tuiles, en ardoises ou en métal?
Pourrait-elle même ordonner la destruction des toits actuellement couverts en bois ou en paille, pour y faire substituer des couvertures incom bustibles?
Certaines personnes ont des doutes sur les deux questions; d'autres admettent la solution affirmative et favorable au pouvoir des préfets.
La sol ution la plus conforme aux principes com binés du droit civil et du droit administratif paraît être justement de diviser les deux questions et de donner une solution différente pour chaque cas.
Lorsqu'il s'agirait, soit de construire des bâtiments nouveaux ou des annexes nouvelles, soit de reconstruire des bâtiments incendiés, tombant de vétusté ou que le propriétaire veut transformer, l'autorité préfectorale pourrait, à titre de mesure de police, ordonner l'emploi de matériaux incombustibles; le propriétaire ne souffrirait pas sérieusement de cette mesure: si elle exigeait une plus forte mise de capitaux, il en serait compensé par la plus value de son bâtiment; si les fonds suffisants lui manquaient, il pourrait retarder sa construction: il n'y aurait de gêne réelle que pour une réparation urgente qui deviendrait plus difficile par l'augmentation de dépense; mais l'autorité préfectorale pourrait toujours accorder le droit de faire le nécessaire, d'après l'ancien mode, à titre provisoire et temporaire; sauf à faire démolir, à l'expiration du temps fixé, s'il y avait refus d'obéir.
Au contraire, on devrait refuser à l'autorité préfectorale le droit d'ordonner la suppression des toitures et autres parties de bâtiments n'ayant pas besoin de réparations: ce serait porter une atteinte beaucoup plus grave à la propriété foncière; elle ne devrait être prise qu'eu vertu d'une décision do l'autorité législative, laquelle manquerait elle-même aux principes généraux du droit civil, si elle ne prescrivait pas une indemnité au profit des propriétaires.
L'indemnité pourrait être fixée administrativement, d'après des bases et en suivant certaines formes réglées eucore par la loi.
En France, depuis plus de trente ans, on a interdit les couvertures en paille ou chaume, dans les communes ou hameaux où les maisons sont rapprochées: on ne les tolère que pour les constructions isolées. Il ne paraît pas qu'on ait fait de loi à ce sujet; mais la mesure n'a été prise qu'à l'égard des nouvelles constructions et des reconstructions. Elle a rencontré d'ai lleurs, à cette époque, une vive résistance dans les campagnes: il a fallu faire des avances et même des dons de matériaux aux propriétaires peu aisés; mais aujourd'hui tout est en ordre.
La distinction ici proposée s'appuierait sur une disposition analogue du droit français déjà citée (p. 88, e). Lorsqu'un bâtiment riverain de la voie publique se trouve, par le changement d'alignement, sujet à reculement, l'administration préfectorale défend les réparations et réconfortations; mais, si elle désire le redressement immédiat de la voie, elle doit acquérir le bâtiment avec indemnité, d'après les règles de l'expropriation (Loi du 16 sept. 1807, art. 50).
64. Le propriétaire du sol est maître de l'espace aérien qui se trouve au-dessus dudit sol; en conséquence, les voisins ne pourraient faire, sur la limite, des constructions qui dépasseraient la ligne verticale partant de ladite limite; ils ne pourraient non plus jeter un pont suspendu d'une propriété à l'autre et passant sur celle du milieu qui ne leur appartiendrait pas. Cela ne fait de difficulté nulle part.
A l'égard des fouilles et excavations, comme elles pourraient, par leur proximité de la ligne séparative, nuire aux voisins, la loi prescrira des mesures préventives de ces dommages (voy. art. 281 et suiv.).
Les lois administratives prescrivent aussi des mesures de précautions dans l'intérêt des ouvriers et des propriétaires du sol, pour l'exploitation des mines et carrières.
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(e) En France, notamment, il n'y a pas d'indemnité pour la défense de réconforter les bâtiments sujets à rcculement: l'idfmmité n'a lieu, après la destruction finale du bâtiment, que pour le terrain exproprié.