Art. 54. — 84. Certaines législations, notamment la législation romaine et la législation française, ont fait une division tri part ite des fruits: elles ont fait une catégorie à part, sous le nom de fruits industriels, des fruits obtenus par la culture ou autre travail de l'homme; mais, quand il a fallu en tirer les conséquences, elles ont négligé de le faire, comme le Code français qui les traite de même que les fruits naturels, ou bien elles sont restées confuses, à cet égard, comme le droit romain.
Le Projet assimile nettement ici les fruits purement naturels et les fruits industriels: tous s'acquièrent au moment où ils sont détachés du sol, où ils deviennent meubles. Il fallait choisir un moment précis pour le changement de maître de ces fruits, en vue du cas où l'usufruit viendrait à cesser. Il était impossible de s'attacher à l'époque seule de la maturité, parce que, variant avec le temps, les lieux et les climats, elle n'a pas assez de fixité et de précision, et aussi parce que non seulement les diverses espèces de fruits, mais encore les fruits de même espèce, ne mûrissent pas tous simultanément.
Le Projet tranche ici une question qui aurait pu faire doute, au sujet du vol des fruits ou de leur séparation par accident. Chez les Romains, les fruits n'étaient acquis à l'usufruitier que par une perception volontaire et personnelle: les fruits arrachés par le vent ne lui appartenaient que s'il les avait fait recueillir, et ceux enlevés par un voleur ne pouvaient être revendiqués que par le nu-propriétaire, sauf, à celui-ci, à les restituer ensuite à l'usufruitier. C'était une complication assez inutile.
Dans le Cude français, le principe est plus simple: c'est la séparation du sol qui change la propriété des fruits; mais la loi n'en a pas formellement déduit les conséquences.
Dans le Projet japonais on n'a pas voulu laisser d'incertitude à cet égard
Le 2e alinéa a prévu le cas où la séparation des fruits a eu lieu avant leur maturité, par quelque cause que ce soit. Si l'usufruit durait au-delà de la maturité, il n'y aurait pas à s'occuper de cette circonstance; mais si l'usufruit vient à cesser avant l'époque de la maturité, l'usufruitier se trouve avoir fait un gain illégitime et il doit le restituer au nu-propriétaire, sur l'action personnelle de celui-ci.