IV.—PRIVILÉGE DES PRÊTEURS DE DENIERS,
Art. 1180. — 352. Les dispositions du Projet, au sujet des prêteurs de deniers appelés au privilége, diffèrent de celles du Code français à deux égards.
D'abord, elles comprennent le prêt de deniers pour payer les trois créanciers privilégiés qui précédent: l'aliénateur, le copartageant, l'entrepreneur, tandis que le Code français, sans qu'on en trouve de motif, a omis le prêt fait pour payer la soulte de partage ou le prix de licitation (v. art. 2103-2° et 5°, 2108 et 2110) (c).
Ensuite, le Projet distingue entre le cas où les deniers sont prêtés au moment de l'acte même auquel ils se rat. tachent et celui où ils ne le sont que “postérieurement."
Au premier cas, le privilége naît, “ directement et en vertu de la loi,” en la personne du prêteur, sans passer par le créancier principal; on peut même dire que le vendeur, le copartageant, l'entrepreneur, payés au moment du contrat, avec les deniers prêtés, n'ont pas été un instant créanciers, de sorte que les prêteurs de deniers, dans ce cas, ne sont pas subrogés au privilége, mais en sont investis à l'origine, par la loi. C'est pour ce motif que le Projet n'exige pas, comme le Code francais, qu'il y ait un acte d'emprunt avec indication des deniers, et une quittance subrogative avec indication de leur origine, tous deux en forme authentique: “il suffit que le prêt " et son emploi soient mentionnés dans l'acte auquel ils “ se rattachent”; or, cet acte peut être sous seing privé aussi bien qu'authentique.
Au second cas, et si le prêt est postérieur à l'acte d'où naît le privilége, la créance privilégiée a d'abord appartenu au vendeur, au copartageant, à l'entrepreneur; elle ne peut dès lors passer au prêteur de deniers que par voie de "subrogation conventionnelle, et le texte a soin d'exprimer que la forme et les conditions ordi. naires en doivent être observées.
Le texte prévoit enfin le cas où les deniers prêtés, soit à l'origine, soit plus tard, n'auraient servi à désintéresser le créancier principal que pour partie, alors il rappelle une disposition de droit commun à cet égard, le concours du subrogé avec le subrogeant, ce qui est encore une différence entre le Projet et le Code français (comp. Proj. art. 508 et c. civ. fr., art. 1252].
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(c) On peut remarquer que la place et les termes de notre article ne le rendent pas applicable à ceux qui auraient désintéressé le dernier groupe de créanciers privilégiés: ce n'est qu'après avoir parlé des créan. ciers demandant la séparation des patrimoines qu'on donnera la raison de cette exclusion (v, no 358).