Art. 1153. — 302. La loi ne se borne pas à autoriser le bailleur à se considérer comme tacitement nanti des objets "garnissant les lieux loués" elle l'autorise à exiger que cette garantie lui soit fournie, non pas, il est vrai, pour une valeur égale à tous les loyers à échoir, mais au moins pour le terme courant et pour un terme à échoir.
Au Japon, les termes sont généralement mensuels;en France, ils sont plus souvent trimestriels. Le Code français (art. 1752) impose bien au preneur la même obligation de garnir de meubles suffisants, mais il ne fixe aucun nombre de termes: en cas de contestation les tribunaux décideraient; mais ils ne pourraient, évidemment, exiger une garantie pour tout le temps à échoir: ce serait excessif, et, pour le terme courant seul, ce serait insuffisant, parce que, si le payement n'avait pas lieu exactement à l'échéance, le terme suivant serait commencé sans garantie. La solution du Projet serait très justifiable en jurisprudence française.
Si le preneur ne peut fournir la sûreté pour les deux termes, mais pour un seul, alors il doit payer le terme courant, par anticipation, et continuer de façon à être toujours en avance d'un terme: faute de quoi, il est exposé à la résiliation pour inexécution de ses obligations (aa).
303. Le 2e alinéa suppose que le preneur, après avoir garni suffisamment les lieux loués, déplace une partie des objets; il permet alors au bailleur de les faire réintégrer dans les lieux, mais sous deux conditions: 1° que sa garantie soit devenue insuffisante (or, cela pourrait ne pas être), 2° que quelque droit sur ces objets appartienne encore au preneur, et c'est dans la limite de ce droit que le bailleur exercera son droit de reprise; par conséquent, les aliénations seront maintenues, et si les objets, bien que restés la propriété du preneur, ont été par lui donnés en gage, soit conventionnel, soit tacite, en faveur d'un autre bailleur, de droit du nouveau créancier gagiste sera respecté.
Mais il fallait prévoir aussi le cas où le détournement du gage aurait été frauduleux à l'égard du bailleur et, dans ce cas, permettre la révocation contre les tiers, conformément au droit commun; or, comme cette révocation comporte des " conditions et distinctions " sur la nature gratuite ou onéreuse de l'aliénation et sur la bonne ou la mauvaise foi de l'acquéreur, le texte renvoie, à cet égard, aux articles 361 et suivants qui sont généraux.
Le Projet tranche ainsi, par l'application des principes généraux à notre cas particulier, une difficulté sérieuse que soulève l'article 2] 02-10, 5e al., du Code français, lequel permet au bailleur de " revendiquer," dans un délai de 15 ou 40 jours, suivant les cas, "les meubles déplacés sans son consentement." On peut hésiter sur le point de savoir si cette disposition est écrite en vue d'un simple " déplacement " du gage, transporté dans des lieux appartenant au preneur, ou si même elle s'applique à une aliénation, et dans ce cas, on est encore embarrassé sur le point de savoir s'il faut distinguer entre la bonne et la mauvaise foi du tiers acquéreur.
La dernière disposition finale fait une autre réserve, par renvoi à l'article 1138: soit que le bailleur puisse ou non faire révoquer l'aliénation, il n'est pas réduit à cette seule voie: si donc il préfère se faire attribuer le prix de l'aliénation dû par un tiers, il le peut, et ce sera souvent plus simple.
Ce renvoi à l'article 1138 n'est pas reproduit pour chaque privilége, mais il faut le suppléer chaque fois que le privilége ne peut plus s'exercer sur la chose en nature, sans avoir pourtant été perdu en lui-même.
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(aa) Jusqu'ici, au Japon, en l'absence de ce privilége du bailleur sur les meubles, l'usage a été que le preneur payât, en avance, le montant d'un mois applicable au dernier terme.