Art. 1060. — 153. Cet article demande une grande attention, sans quoi il pourrait paraître en opposition avec l'article 531 qui, statuant sur la remise de la solidarité par le créancier à l'un des codébiteurs, lui fait produire un effet favorable aux autres.
Mais le cas n'est pas le même: dans la remise, le créancier abandonne son droit de poursuite pour le tout contre l'un des débiteurs: il ne peut plus lui demander que sa part dans la dette; il est juste, dès lors, qu'il ne puisse plus poursuivre les autres pour cette même part, autrement, il aggraverait leur position.
Ici, la question est de savoir si telle personne est ou non codébitrice solidaire avec d'autres
Ainsi, un des codébiteurs, lié avec d'autres par la solidarité ou prétendu tel, a contesté ce lien vis-à-vis du créancier et a triomphé, soit en obtenant un jugement ou un aveu favorable à sa prétention, soit en prêtant un serment extrajudiciaire qui le dégage du lien: les autres n'en devront pas souffrir, parce que leurs parts définitives dans la dette ne peuvent se trouver augmentées par la sortie d'un des débiteurs du lien de la solidarité, sans leur consentement.
Ils n'en profiteront pas non plus, en ce qu'ils ne pourront faire diminuer sa part dans la dette, car le créancier n'a pas moins droit à la totalité de la dette contre les autres; le seul profit qu'ils trouveront dans cette situation nouvelle, c'est que, contre le débiteur soustrait aux droits du créancier, il ne pourra pas être fait de poursuites ayant en même temps contre eux un effet interruptif de prescription ou de mise en demeure, comme il est dit à l'article suivant.
En sens inverse, si le créancier obtient contre un nouveau débiteur un jugement ou un aveu favorable à sa prétention, cela ne peut nuire aux autres et les constituer, sans leur volonté ni leur concours, mandataires de ce nouveau débiteur, avec les effets attachés à ce mandat par l'article précédent. Cela ne peut non plus leur profiter, en diminuant leurs parts respectives dans la dette; de sorte que, si ce nouveau codébiteur a payé toute la dette, sur la poursuite ultérieure du créancier, il recourra pour le tout contre eux réunis comme un gérant d'affaires qui aurait payé; il jouira même de la subrogation légale, car il s'est trouvé '1 tenu avec d'autres et pour d'autres" (v. art. 504-1°) et il pourra demander le tout à chacun, ce que ne pourrait un codébiteur solidaire (v. art. 1065, 2° al.); en effet, pour eux, il n'est pas un codébiteur, mais un tiers.