Projet de code civil pour l'Empire du Japon (1889)

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LIVRE II. DES BIENS. DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES. DE LA DIVISION DES BIENS ET DES CHOSES Art. 1er. Les Biens sont les droits composant le patrimoine soit des particuliers ou des corporations, soit de l'Etat, des départements, des communes ou des établissements publics. Ils sont de deux sortes: les droit réels et les droits personnels ou de créance. 2. Les droits réels, s'exerçant directement sur une chose et opposables à tous, sont principaux ou accessoires. Les droits réels principaux sont: 1°  La propriété, pleine ou démembrée; 2°  L'usufruit, l'usage et l'habitation; 3°  Les droits de bail, d'emphytéose et de superficie; 4°  Le droit de possession. Ces droits, avec les servitudes foncières par lesquelles une propriété est démembrée pour l'utilité d'une autre, sont l'objet de la Ire Partie du présent Livre. Les droits réels accessoires, formant la garantie ou sûreté des droits personnels sont: 1°  Le gage, 2°  L'antichrèse, 3°  Le droit de rétention, 4°  Le privilége, 5°  L'hypothèque. Ces droits sont l'objet du Livre IVe, IIe Partie. 3. Les droits personnels ou de créance, s'exerçant contre une personne déterminée, pour obtenir d'elle des prestations ou des abstentions auquelles elle est obligée par les causes que la loi reconnaît, sont également principaux ou accessoires. Les droits personnels principaux sont l'objet de la IIe Partie du présent Livre; Les droits personnels qui garantissent accessoirement d'autres créances, tels que le cautionnement et la solidarité, sont réglés au Livre IVe, Ire Partie. 4. Les droits des écrivains, des artistes et des inventeurs, sur la publication de leurs ouvrages, sur la reproduction de leurs œuvres ou l'application de leurs découvertes, sont réglés par des lois spéciales. [C. civil ital., art. 437.] 5. Les droits, tant réels que personnels, sont modifiés d'après les diverses distinctions des choses qui en sont l'objet, telles qu'elles résultent, soit de leur nature, soit de la volonté de l'homme, soit des dispositions de la loi, ainsi que ces distinctions sont énoncées ci-après. 6. Les choses sont corporelles ou incorporelles. Les choses corporelles sont celles qui tombent sous les sens physiques de l'homme, comme les fonds de terre, les bâtiments, les animaux, les ustensiles. Les choses incorporelles sont celles que l'intelligence seule perçoit; tels sont: 1°  Les droits réels ou personnels eux-mêmes; 2°  Les droits de propriété littéraire, artistique ou industrielle, énoncés à l'article 4; 3°  L'universalité des biens et des dettes d'une succession ouverte, d'une société dissoute ou d'une communauté en liquidation. 7. Les choses sont mobilières ou immobilières, suivant qu'elles sont ou non susceptibles de déplacement, soit d'après leur nature, soit par la destination que leur donne le propriétaire, soit par la détermination de la loi. [C. civil fr., art. 516, 517, 527.] 8. Sont immeubles par nature: 1°  Les fonds de terre, les chaussées, terrasses et autres parties du sol; [518.] 2°  Les murs de clôture, les haies et palissades; 3°  Les réserves, étangs, lacs, fossés, canaux, sources et cours d'eau quelconques; [C. it., 412.] 4°  Les jetées, digues, pieux et autres ouvrages destinés à contenir ou à amortir les eaux; 5°  Les bains, les moulins à eau ou à vent, attachés au sol, les machines hydrauliques ou à vapeur fixes, quel que soit leur usage; [519.] 6°  Les forêts, bois, arbres, arbustes et plantes quelconques tenant au sol, sauf ce qui est dit des pépinières, à l'article 13; [520.] 7°  Les fruits et récoltes, même arrivés à maturité, tant qu'ils ne sont pas détachés du sol, sauf l'exception portée au même article; [521.] 8°  Les mines, minières et carrières, de quelque nature qu'elles soient, tant que les produits n'en sont pas détachés du sol; Il en est de même des marnières et tourbières; [L. fr. 21 avr. 1810, art. 1" à 4, 8 et 9.] 9°  Les édifices ou bâtiments fixés ou appuyés au sol, par quelque personne que ce soit, quel que soit leur emploi ou leur destination, et lors même qu'ils devraient être démolis dans un temps fixé, sauf l'exception portée à l'article 13; [518.] 10°  Les tuyaux attachés au sol ou aux bâtiments, pour l'arrivée, la conduite ou la sortie des eaux ou pour la conduite du gaz ou de la chaleur; [523.] 11°  Les appareils électriques et leurs accessoires, attachés au sol ou aux bâtiments; 12°  Les fermetures extérieures des bâtiments; Et, généralement, tous les objets, mêmes mobiles par leur nature, formant des accessoires essentiels des bâtiments. 9. Sont immeubles par destination les objets mobiliers, de quelque nature qu'ils soient, qui ont été placés par leur propriétaire sur le sol ou dans les bâtiments qui lui appartiennent, pour l'exploitation, l'utilité ou l'agrément desdits fonds, soit à perpétuelle demeure, soit pour un temps indéterminé. [524, 1er, 2e et 13e al.] Il en est de même des objets mobiliers placés sur les fonds, dans le même but, par celui qui a sur lesdits fonds un droit d'usage ou de jouissance temporaire. 10. Sont présumés immeubles par destination, d'après l'article précédent, s'il n'y a preuve du contraire: [Comp. 524, 3e à 12e al.] 1°  Les bêtes de somme ou de trait attachées à la culture ou à l'exploitation d'un fonds; 2°  Les animaux mis sur le fond pour l'engrais; 3°  Les instruments et ustensiles aratoires; 4°  Les semences, pailles et engrais destinés à la culture d'un fonds, lors même qu'ils ne proviendraient pas dudit fonds; 5°  Les graines de vers-à-soie destinées à l'exploitation des magnaneries; 6°  Les échalas, pieux et bambous destinés à soutenir les vignes, les arbres à fruits et autres; 7°  Les appareils et ustensiles destinés à la transformation ou à la mise en valeur des produits agricoles du fonds, tels que pressoirs, chaudières, alambics, cuves et tonnes; 8°  Les machines, appareils et ustensiles servant à l'exploitation des établissements industriels; 9°  Les bains flottants, les bacs ou barques des tinés au service permanent d'un fonds, lors même que les eaux seraient publiques ou appartiendraient à un autre propriétaire; [C. ital., art. 409.] 10°  Les lanternes de pierre, vases et rochers, placés dans les jardins; 11°  Les tableaux, glaces, sculptures et ornements quelconques attachés aux bâtiments, de manière à ne pouvoir en être détachés sans détérioration; [525.] 12°  Les tatami, tatégou et autres compléments analogues des habitations, lorsqu'ils ont été placés par le propriétaire et que la maison est inhabitée ou est habitée par un autre que lui; 13°  Les matériaux détachés d'un édifice en réparation et destinés à y être replacés; [comn. art. 532.] 14°  Les poissons des étangs, les abeilles des ruches à miel et les pigeons des colombiers. 11. Sont immeubles par la détermination de la loi: 1°  Les droits réels sur les immeubles corporels ci-dessus énumérés; [526.] 2°  Les droits personnels ou de créance tendant à acquérir ou à recouvrer un droit réel sur un immeuble; 3°  Les créances ayant pour objet la construction d'un bâtiment, avec les matériaux du constructeur; 4°  Les rentes sur l'Etat et autres créances mobilières immobilisées par la loi, ou par les particuliers, en vertu d'une disposition de la loi. 12. Sont meubles par nature les choses susceptibles de déplacement, soit par elles-mêmes, comme les animaux, soit par l'effet d'une force étrangère, comme les choses inanimées, sauf les exceptions portées par les articles 8 et 10 ci-dessus. [528.] 13. Sont meubles par destination les objets qui n'ont été fixés au sol que provisoirement ou dans un but momentané; tels sont: 1°  Les échafaudages et étais des constructions; 2°  Les hangars destinés à abriter les ouvriers ou les matériaux, pendant lesdites constructions; 3°  Les arbres, arbustes et fleurs élevés ou entretenus en terre, pour être vendus, par les pépiniéristes et jardiniers; 4°  Les bâtiments et autres ouvrages aliénés pour être démolis, et les arbres, arbustes et récoltes aliénés pour être arrachés. 14. Sont meubles par la détermination de la loi: 1°  Les droits réels sur les meubles ci-dessus désignés; 2°  Les droits personnels ou de créance tendant à acquérir ou à recouvrer une somme d'argent, des denrées, marchandises ou autres meubles corporels, lors même que des immeubles seraient affectés à la garantie de la créance; [529.] 3°  Les créances ayant pour objet d'exiger d'autrui l'accomplissement d'un fait ou l'abstention de l'exercice d'un droit, même immobilier; 4°  Les droits dans les sociétés civiles ou commerciales constituant une personne morale ou juridique, jusqu'à leur dissolution, lors même que des immeubles appartiendraient auxdites sociétés; [529.] 5°  Les droits de propriété littéraire, artistique et industrielle désignés à l'article 4. 15. La nature mobilière ou immobilière des droits à une part de succession ouverte, de société dissoute ou de communauté de biens en liquidation, est déterminée par la nature des biens que chaque intéressé reçoit lors du partage. La nature d'une créance alternative ayant pour objet des meubles ou des immeubles, au choix de l'une des parties est de même déterminée par la nature des choses choisies pour le payement. 16. Les choses sont principales ou accessoires, suivant qu'elles ont ou non leur entière utilité sans être adjointes à d'autres dont elles dépendent. Ainsi, les immeubles par destination sont accessoires des immeubles par nature; les servitudes foncières sont accessoires du fonds dominant; les garanties des créances sont accessoires desdites créances. L'aliénation de la chose principale emporte celle de ses accessoires, si le contraire n'est exprimé. [1615.] 17. Les choses peuvent être envisagées: Soit comme objets individuels ou corps certains; tels qu'une maison, un champ, un animal, spécifiés ou déterminés; Soit comme quantités, en poids, nombre ou mesure; tels qu'une somme d'argent, des kokou de riz, des tonneaux de vin; Soit comme collection d'objets plus ou moins semblables et susceptibles d'augmentation ou de diminution; tels qu'un troupeau, les livres d'une bibliothèque, les marchandises d'un magasin; Soit, enfin, comme universalité de biens formant tout ou partie d'un patrimoine; tels que tous les meubles ou tous les immeubles d'une succession, ou la succession tout entière, ou une quote part des mêmes biens. [v. 1003, 1010.] 18. Les choses sont, par leur nature, susceptibles ou non de se consommer par le premier usage. Cette distinction reçoit sa principale application en matière d'usufruit et de prêt de consommation. [587.] 19. Les choses sont fongibles ou non fongibles, suivant que, d'après l'intention des parties ou la disposition de la loi, elles peuvent ou non se remplacer par des choses équivalentes. [1291.] Les choses de quantité et celles qui se consomment par le premier usage, sont, en général, considérées comme fongibles d'après l'intention des parties. 20. Les choses sont divisibles ou indivisibles, suivant qu'elles sont ou non susceptibles d'être partagées, soit matériellement, soit intellectuellement ou par parties aliquotes. [1217, 1219, 1221.] Sont indivisibles par leur nature, la plupart des servitudes foncières et certaines obligations de faire ou de ne pas faire. Sont indivisibles par la disposition de la loi, l'hypothèque et les autres sûretés réelles des créances. [Comp. 2083, 2090 et 2114.] Une chose est indivisible par l'intention des parties, lorsque l'utilité que celles-ci se proposent, dans une convention, ne peut être atteinte aucunement par une prestation partielle de la chose. 21. Les choses sont appropriées ou non appropriées. Les choses appropriées sont celles qui font partie, soit d'un patrimoine privé, soit du patrimoine public. Les choses non appropriées sont, les unes sans maître, les autres communes. [537 s.] 22. Les choses sans maître sont celles qui n'appartiennent à personne, mais peuvent devenir l'objet d'un droit de propriété; tels sont: les biens abandonnés, les animaux sauvages, les oiseaux vivant en liberté, les poissons des rivières et de la mer. 23. Les choses communes sont celles dont la propriété ne peut être à personne et dont l'usage appartient à tous; tels sont: l'air, la lumière, la haute mer, l'eau courante et celle des lacs ou étangs qui ne sont pas enclos. [717.] 24. Les choses appropriées qui n'appartiennent pas à des particuliers font partie du domaine public ou du domaine privé de l'Etat, des départements ou des communes. L'aliénation et l'administration de ces choses sont réglées par les lois administratives. 25. Les choses font partie du domaine public lorsqu'elles sont consacrées à un usage ou à un service national; tels sont: 1°  La mer territoriale et ses rivages, jusqu'où s'étend la plus haute marée d'équinoxe; 2°  Les routes et chemins de fer, les rivières et canaux navigables ou flottables et leur lit; 3°  Les forteresses, remparts et autres ouvrages de défense des places de guerre ou des côtes; 4°  Les arsenaux militaires et maritimes et les armes, engins, trains et équippements de toute sorte qui s'y trouvent; 5°  Les vaisseaux de guerre, de transport militaire et autres navires constituant la marine de de l'Etat, avec leurs accessoires; 6°  Les palais impériaux et les bâtiments des administrations publiques centrales ou locales. [538 s.] 26. Font partie du domaine privé de l'Etat, des départements ou des communes, les choses que ces personnes civiles possèdent au même titre que les particuliers et qui sont destinées à donner des revenus appréciables en argent; tels sont: les lais et relais de la mer, les forêts, bois et pâturages nationaux, départementaux et communaux. Les immeubles qui n'ont pas de maître particulier appartiennent de droit à l'Etat; il en est de même de la succession de ceux qui meurent sans héritiers. [539, 713.] La propriété des épaves terrestres, fluviales et maritimes, est réglée par des lois spéciales. [717.] 27. Les choses sont dans le commerce ou hors du commerce, suivant qu'elles peuvent ou non devenir l'objet d'un droit privé de propriété ou de créance, ou que ceux auxquels elles appartiennent peuvent ou non en faire l'objet de conventions particulières. [128.] Sont hors du commerce, les biens du domaine public et les choses dont la loi défend la disposition, dans l'intérêt de l'ordre public, comme les successions non ouvertes, les titres et dignités honorifiques, les emplois publics, les pensions civiles et militaires. 28. Les choses sont aliénables ou inaliénables. Sont inaliénables, bien que se trouvant dans le commerce, en général, les droits d'usage et d'habitation, après qu'ils sont démembrés de la propriété, les servitudes foncières envisagées séparément du fonds dominant, les concessions de mines et autres priviléges ou monopoles accordés par le Gouvernement. [v. 1554, 1598.] Les autres choses non déclarées incessibles par la loi, ou par la volonté de l'homme dans les les cas où la loi le permet, sont aliénables. 29. Les choses sont prescriptibles ou imprescriptibles, suivant qu'elles sont ou non susceptibles d'être acquises par une possession remplissant les conditions fixées par la loi. [1560, 1561, 2226.] 30. Les choses sont saisissables ou insaisissables, suivant que les créanciers de ceux auxquels elles appartiennent, peuvent ou non en requérir la vente forcée pour être payés sur le prix. Sont insaisissables les choses hors du commerce et les choses inaliénables et, en outre, les choses dont la loi ou la disposition de l'homme interdit la saisie; telles sont les rentes sur l'Etat et les rentes viagères ou pensions alimentaires déclarées insaisissables par une constitution gratuite. [C. pr. civ., 581 à 582, 592, 593.] PREMIÈRE PARTIE. DES DROITS RÉELS. CHAPITRE PREMIER. DE LA PROPRIÉTÉ. Art. 31. La propriété est le droit naturel d'user, de jouir et de disposer d'une chose, de la manière la plus étendue, dans les limites et sous les conditions apportées par la Loi et les Règlements ou par les conventions particulières. [544.] Les règles et conditions d'après lesquelles le propriétaire d'une chose acquiert ce qui s'y incorpore ou s'y unit accessoirement, ou ce qui résulte de sa transformation, sont établies au Livre IIIe. [546, 551.] 32. Le propriétaire d'un immeuble peut être contraint de céder sa propriété à l'Etat, au département ou à la commune, pour cause d'utilité publique légalement reconnue et déclarée, et moyennant une indemnité préalable à la prise de possession, réglée conformément aux lois spéciales de l'expropriation. [545.] A l'égard d'un objet mobilier, corporel ou incorporel, l'expropriation pour cause d'utilité publique n'en peut avoir lieu qu'en vertu d'une loi spéciale faite pour chaque cas. Sont exceptés de la précédente disposition les droits de préemption qui sont ou seront attribués à l'Etat ou aux administrations publiques et les réquisitions de denrées, en temps de siége, de guerre ou de calamités publiques. 33. Le propriétaire peut être forcé, sous condition d'indemnité, de permettre l'occupation temporaire de sa propriété, pour faciliter l'exécution de travaux d'utilité publique. 34. Les servitudes relatives à l'extraction des matériaux, à l'alignement, aux coupes de bois, aux prises d'eau et autres, établies dans un intérêt public, général ou local, sont réglées par les lois administratives. [650.] 35. Le propriétaire du sol peut établir ou supprimer, sur la surface, toutes constructions, plantations, cultures, étangs, qu'il juge à propos. Il peut faire au-dessous du sol toutes excavations, fouilles et extractions de matériaux. Pourvu, dans l'un et l'autre cas, qu'il se conforme aux prescriptions et restrictions établies dans l'intérêt général par les lois administratives. Les autres limites et conditions apportées à l'exercice du droit de propriété dans l'intérêt du voisinage sont établies au Chapitre des Servitudes. [552.] 36. Le propriétaire peut faire des fouilles, pour la recherche des mines qui pourraient exister dans sa propriété; mais il ne peut les mettre en exploitation qu'après en avoir obtenu la concession du Gouvernement, conformément aux lois particulières sur les mines. [Ibid.] 37. Si le propriétaire est troublé dans la possession de sa chose ou en est privé, il peut exercer contre tout détenteur l'action en revendication ou les actions possessoires; sauf ce qui est dit, au Livre Ve, de la prescription des meubles et des immeubles. [C. ital., 439.] Il peut aussi intenter une action négatoire contre ceux qui exerceraient sur son fonds des droits de servitude qu'il prétendrait ne pas exister. La compétence et les formes de procéder, dans l'un et l'autre cas, sont réglées au Code de procédure civile. 38. Si une chose appartient en commun à plusieurs personnes, pour des parts indivises, égales ou inégales, chacun des copropriétaires peut user de la chose intégralement, mais en se conformant à sa destination et pourvu qu'il ne mette pas obstacle à l'usage des autres propriétaires. Les parts des copropriétaires sont présumées égales, s'il n'y a preuve contraire. Les fruits et produits se partagent périodiquement, dans la mesure du droit de chacun. Chacun peut faire les actes d'administration ou autres, nécessaires à la conservation de la chose. Les charges sont supportées par chacun, proportionnellement à sa part. Le tout, sans préjudice des conventions particulières qui régleraient autrement l'usage, la jouissance ou l'administration: notamment, par un partage provisionnel. [C. it., 673 à 684.] 39. A l'égard du droit de disposer, aucun des copropriétaires ne peut, sans le consentement des autres, modifier la condition matérielle de la chose, ni la grever de droits réels au-delà de sa part indivise. L'aliénation, par un des propriétaires, de sa part indivise, met le cessionnaire en son lieu et place vis-à-vis des autres; sauf l'effet ultérieur du partage, comme il est expliqué à l'article 15. [C. it., 676.] 40. Chacun des copropriétaires peut toujours demander le partage de la chose commune, nonobstant toute convention contraire. Les propriétaires peuvent cependant convenir de rester dans l'indivision pendant un temps déterminé qui ne peut excéder cinq ans. [815; C. it., 681.] Ce délai peut toujours être renouvelé, à toute époque, mais de manière à ne lier les parties que pour ladite période de cinq ans. Cette disposition ne s'applique pas à la copropriété indivise résultant de la mitoyenneté appliquée aux cours, passages, puits, haies, murs ou fossés communs à plusieurs propriétés. [C. it., 683.] 41. Les règles particulières à la copropriété entre héritiers, entre époux ou entre associés, sont établies au Livre IIIe, aux Chapitres des Successions, du Contrat de mariage et des Sociétés. 42. Si une maison appartient divisément à plusieurs personnes dont chacune est propriétaire d'une portion distincte, leurs droits et leurs devoirs respectifs sont réglés comme il suit: Chacun des co-propriétaires peut disposer de sa part comme d'une propriété divise; Sont à la charge commune, en proportion de la valeur de la part de chacun dans la maison, les impôts généraux et locaux, l'entretien et la réparation des portions des bâtiments et accessoires servant à tous en même temps, tels que portes, clôtures, fondations, charpentes principales, gros murs, toits, escaliers, puits, citernes, tuyaux, etc.; Chacun supporte seul les frais relatifs au plancher et aux cloisons de la portion qui lui appartient, et, s'il y a plusieurs étages, chacun contribue à l'entretien de la partie de l'escalier qui conduit chez lui. [664; C. it., 562 à 564.] 43. Le droit de propriété s'acquiert, se conserve et se transmet, tant entre les parties qu'à l'égard des tiers, par les causes et par les moyens qui sont expliqués au présent Livre, IIe Partie, et au Livre IIIe. 44. La propriété se perd: 1°  Par l'aliénation volontaire ou forcée; 2°  Par l'accession ou incorporation de la chose à une autre chose appartenant à un autre propriétaire; sauf l'indemnité due par celui qui se trouve enrichi; 3°  Par la confiscation prononcée en vertu des lois pénales; 4°  Par la résolution, la rescision, ou la révocation d'une acquisition sujette à ces éventualités; 5°  Par l'abandon volontaire de la chose, fait par le propriétaire capable d'en disposer; 6°  Par un acte de l'autorité compétente mettant la chose hors du commerce; 7°  Par la destruction totale de la chose; sauf l'indemnité du propriétaire, si le fait est imputable à autrui. 45. Le caractère et les effets de la prescription dite “ acquisitive,” dans ses rapports avec l'acquisition et la perte de la propriété des meubles et des immeubles, sont réglés au Chapitre dernier du Livre Ve. CHAPITRE II. DE L'USUFRUIT, DE L'USAGE ET DE L'HABITATION. DISPOSITION PRÉLIMINAIRE. Art. 46. L'Usufruit est le droit d'user et de jouir, temporairement et en bon administrateur, d'une chose dont un autre a la propriété, suivant sa destination et sans en changer la nature ni la substance. Les règles particulières à l'Usage et à l'Habitation forment un Appendice à la fin du présent Chapitre. SECTION PREMIÈRE. DE L'ÉTABLISSEMENT DE L'USUFRUIT. Art. 47. L'Usufruit est établi par la loi, par la volonté de l'homme ou par la prescription. [579.] Les cas d'usufruit légal sont déterminés au Chapitre de la Puissance paternelle et au Chapitre des Successions. Les moyens de constituer volontairement l'usufruit sont les mêmes que ceux par lesquels la propriété s'acquiert et se transmet. L'usufruit peut aussi être constitué par rétention sur des biens aliénés à titre gratuit ou onéreux. L'usufruit du mari sur les biens communs ou sur les biens propres de sa femme est réglé, au Livre IIIe, au Chapitre du Contrat de mariage. La prescription acquisitive de l'usufruit s'accomplit par le même délai et aux mêmes conditions que la prescription de la propriété. 48. L'usufruit peut être établi sur toute espèce de choses, mobilières ou immobilières, corporelles ou incorporelles, pourvu qu'elles soient dans le commerce. [580.] Il peut même être établi sur un autre usufruit ou sur une rente viagère. Il peut aussi être établi à titre universel, sur un patrimoine: soit sur tous les meubles ou tous les immeubles, soit sur tous les biens qui le composent, soit sur une part indivise des meubles, des immeubles ou de la totalité dudit patrimoine. 49. L'usufruit peut être constitué purement et simplement, ou pour un terme fixe, à partir duquel il doit commencer ou à l'expiration duquel il doit finir. Il peut aussi être subordonné à une condition dont l'accomplissement doit le faire commencer ou finir. [581.] L'usufruit constitué purement, à terme ou sous condition, ne peut excéder la vie de l'usufruitier. 50. L'usufruit peut être constitué sur une ou plusieurs têtes, pour être exercé, dans ce dernier cas, soit simultanément, soit successivement. Dans aucun cas, il ne peut être constitué qu'au profit de personnes déjà nées ou au moins conçues au moment de l'ouverture du droit. SECTION II. DES DROITS DE L'USUFRUITIER. Art. 51. L'usufruitier peut se faire mettre en possession de la chose soumise à l'usufruit, dès que son droit est ouvert et le terme échu et après avoir rempli les obligations relatives à l'état des immeubles, à l'inventaire et au cautionnement, telles qu'elles sont établies à la Section suivante. Il prend les choses en l'état où elles se trouvent, sans pouvoir exiger aucune réparation ou appropriation, à moins qu'elles n'aient été détériorées par la faute du constituant ou de son héritier depuis l'ouverture du droit, ou même antérieurement et de mauvaise foi. [600]. 52. L'usufruitier a droit aux fruits perçus par le nu-propriétaire, depuis le moment où il a pu entrer en jouissance, lors même que le retard serait venu de son fait; à la charge de rembourser les frais faits pour la récolte et la conservation des fruits. A l'égard des fruits attachés au sol par branches ou racines, au moment de son entrée en jouissance, il a le droit de les percevoir à l'époque de leur maturité, sans indemnité au propriétaire pour les frais de labour, semences et cultures. [585.] 53. L'usufruitier a droit, comme le propriétaire lui-même, à tous les fruits naturels et civils produits par la chose pendant la durée de son droit. [588, 682.] 54. Les fruits naturels, tant ceux produits spontanément par la terre que ceux obtenus par la culture, sont acquis à l'usufruitier dès leur séparation du sol, soit qu'il l'ait opérée lui-même, soit qu'elle ait été opérée en son nom, soit qu'elle ait eu lieu par accident ou même par l'effet d'un vol. [583.] Toutefois, si la séparation des fruits a eu lieu avant leur maturité, et que l'usufruit vienne à cesser avant l'époque ordinaire de la perception de ces fruits, le profit doit en être rendu au propriétaire. 55. Les petits des animaux appartiennent à l'usufruitier dès leur naissance, ainsi que la laine recueillie à l'époque de la tonte. Le lait et les engrais lui appartiennent également. [593.] 56. Les fruits civils sont acquis à l'usufruitier, jour par jour, à partir du moment où il a pu entrer en jouissance, jusqu'à la fin de l'usufruit, quelle que soit l'époque de leur prestation ou de leur exigibilité. [586.] Cette règle s'applique aux redevances en argent dues par des tiers à raison des choses sujettes à l'usufruit: spécialement, au prix des baux à ferme ou à loyer, aux intérêts des capitaux prêtés ou placés, aux dividendes afférents aux actions ou parts de sociétés, aux arrérages des rentes et aux redevances des mines, minières et carrières exploitées par des tiers. [514.] 57. Si l'usufruit comprend des valeurs mobilières dont on ne peut user et jouir sans les consommer, comme l'argent comptant, les grains, vins et autres denrées, l'usufruitier peut les consommer ou les aliéner, à charge de rendre, à la fin de l'usufruit, pareilles quantités et qualités, ou leur valeur, si l'estimation en a été faite avant l'entrée en jouissance. [587.] La même règle s'applique aux marchandises composant un fonds de commerce soumis à l'usufruit et aux autres choses fongibles déterminées à l'article 19 des Dispositions Préliminaires. 58. A l'égard du mobilier des habitations et des autres objets sujets à une détérioration plus ou moins prompte par l'usage, tels que les ustensiles, le linge et les vêtements, l'usufruitier peut en user suivant leur destination et les restituer en l'état où ils se trouvent à la fin de l'usufruit, pourvu qu'il n'y ait pas eu de détérioration grave par sa faute ou sa négligence. [589.] Il peut aussi les donner à loyer, sous sa responsabilité, lorsque leur nature le comporte. 59. L'usufruitier d'une rente viagère a le droit de percevoir les arrérages, comme le rentier lui-même, s'il n'y a condition contraire. [588.] Celui qui a l'usufruit d'un usufruit antérieurement constituté exerce de même tous les droits qui appartiennent à l'usufruitier titulaire. 60. L'usufruitier d'un haras, d'un troupeau de bêtes à laine ou à cornes, d'une magnanerie, d'animaux de basse-cour et d'autres animaux déterminés seulement par l'espèce et le nombre, peut disposer chaque année d'une portion d'animaux qu'il n'est pas nécessaire de conserver, à charge de tenir le troupeau au complet, au moyen du croit. 61. L'usufruitier jouit des bois taillis et des plantations de bambous et même des futaies, en faisant les coupes périodiques, conformément à l'usage et à l'aménagement suivis par les précédents propriétaires. Si l'aménagement n'avait pas encore été régulièrement établi, l'usufruitier se conformerait aux usages forestiers des bois les plus voisins appartenant, soit aux principaux propriétaires, soit à l'Etat, aux départements ou aux communes, en prévenant le nu-propriétaire un mois avant la coupe. [590, 591.] 62. A l'égard des baliveaux et arbres de futaie qui n'étaient pas mis en coupe réglée par les précédents propriétaires, l'usufruitier n'a droit qu'à leurs produits périodiques. Toutefois, si les bâtiments soumis à l'usufruit ont besoin de grosses réparations, l'usufruitier peut y employer les arbres de futaie morts ou renversés par accident, et même en faire abattre pour cet usage, s'il est nécessaire, après en avoir fait constater la nécessité en justice, contradictoirement avec le nu-propriétaire. [592.] 63. L'usufruitier peut, à toute époque, prendre, dans les bois et plantations de bambous, les échalas, pieux et supports nécessaires au soutien des autres arbres. [593.] 64. Il peut prendre de jeunes arbres dans les pépinières du fonds, pour tenir les plantations au complet ou les étendre. Il peut aussi vendre périodiquement les arbres et arbustes des pépinières, si telle était leur destination antérieure, ou si les produits excèdent les besoins du fonds sujet à usufruit. Mais, dans l'un et l'autre cas, il doit entretenir les pépinières avec de nouveaux plants ou semis. [590, 2e al.] 65. Si le fonds sujet à usufruit contient des carrières, soit de pierre ou de marbre, soit de chaux, plâtre, ciment, sable ou d'autres minéraux, déjà mises en exploitation et non soumises à une législation spéciale, l'usufruitier en continue l'exploitation à son profit, comme les précédents propriétaires. Si les carrières n'ont pas été mises en exploitation ou si l'exploitation en a été difinitivement abandonnée, l'usufruitier peut seulement prendre les matériaux nécessaires à l'entretien et à la réparation des bâtiments, murs et autres parties des biens sujets à son usufruit, après en avoir fait constater la nécessité, comme il est dit à l'article 62, et sans dégradation du fonds. Il use aussi des tourbières et marnières, sous les distinctions qui précèdent. [598.] 66. Si l'usufruit comprend des mines ou minières dont l'exploitation a déjà été concédée ou autorisée par le Gouvernement, l'usufruitier en jouit, en se conformant à la législation spéciale des mines, en ce qui concerne le mode et les conditions de l'exploitation. [598.] La constitution d'un usufruit sur un sol dans lequel se trouve une mine concédée au propriétaire dudit sol, ne donne l'usufruit de la mine que s'il y a, à cet égard, une disposition expresse dans la constitution. 67. L'usufruitier jouit des alluvions ou attérissements et des îles ou autres accessions qui augmentent la propriété sujette à l'usufruit. [596.] Toutefois, si l'accession n'a eu lieu qu'à charge d'une indemnité à payer par le nu-propriétaire, l'usufruitier doit lui en payer les intérêts pendant la durée de son usufruit. Il n'a aucun droit sur le trésor qui serait découvert par un tiers dans le fonds sujet à l'usufruit. [598, 2e al.] 68. L'usufruitier a, comme le propriétaire lui-même, les droits de chasse et de pêche sur le fonds sujet à l'usufruit. 69. L'usufruitier exerce toutes les servitudes réelles ou foncières appartenant au fonds usufructuaire; il est responsable envers le nu-propriétaire, s'il a laissé lesdites servitudes s'éteindre par le non-usage. [597.] 70. L'usufruitier peut exercer directement, contre le nu-propriétaire et contre les tiers, les actions réelles, possessoires et pétitoires, relatives à son droit de jouissance. Il exerce aussi, dans la mesure de son droit, les actions confessoires et négatoires, tant pétitoires que possessoires, relatives aux servitudes foncières respectivement prétendues au profit ou au préjudice du fonds usufructuaire. 71. L'usufruitier, autre que le père ou la mère, peut céder son droit à titre gratuit ou onéreux, le donner à bail ou en usufruit, et même l'hypothéquer, quand la chose sujette à usufruit est elle-même susceptible d'hypothèque. [2118]. Dans tous les cas, les droits consentis par l'usufruitier sont subordonnés à la durée, aux limites et aux conditions auxquelles l'usufruit est lui-même soumis. [595, 2125.] 72. L'usufruitier n'a droit, à la fin de l'usufruit, à aucune récompense à raison des fruits et produits qu'il aurait manqué à percevoir, lors même qu'ils seraient encore attachés au sol. [595, 1er al.] Il ne peut non plus réclamer du propriétaire aucune indemnité pour les améliorations qu'il aurait faites à la chose soumise à l'usufruit, encore que la valeur en soit augmentée. Il peut seulement enlever les constructions, plantations, ornements et autres additions par lui faites, en rétablissant les choses dans leur état primitif. [599.] 73. Le nu-propriétaire peut exiger, à la fin de l'usufruit que l'usufruitier ou ses héritiers lui cèdent, pour leur valeur actuelle, à dire d'experts, les constructions et plantations que ceux-ci ont le droit d'enlever d'après l'article précédent. A cet effet, la démolition ou l'enlèvement ne peuvent être commencés que dix jours après la sommation faite au propriétaire d'avoir à déclarer s'il entend user du droit de préemption et sur son refus ou à défaut de ladite déclaration. Le propriétaire qui a déclaré vouloir user de ladite préemption en est déchu, s'il n'en a versé le prix, dans le mois où la décision des experts ou du tribunal est devenue définitive; sans préjudice des dommages-intérêts, s'il y a lieu. Le propriétaire peut toujours, à l'avance, signifier à l'usufruitier son intention de préempter, lorsque celui-ci voudra supprimer lesdits ouvrages. L'usufruitier et ses héritiers peuvent rester en possession des bâtiments jusqu'à la décision des experts ou du tribunal et au payement du prix. SECTION III. DES OBLIGATIONS DE L'USUFRUITIER. Art. 74. L'usufruitier, avant d'entrer en possession des biens sujets à son droit, doit faire dresser, contradictoirement avec le nu-propriétaire ou lui dûment appelé, un inventaire complet et exact des objets mobiliers et faire constater l'état des immeubles. [600.] 75. Si les deux parties intéressées sont présentes et capables ou valablement représentées, l'inventaire et l'état des immeubles peuvent être faits sous signature privée; dans le cas contraire, ils sont dressés par un officier public. 76. L'estimation des choses fongibles,, faite dans l'inventaire, vaut vente, si le contraire n'a été exprimé; à l'égard des choses non fongibles, l'estimation n'en vaut vente que si l'inventaire le mentionne expressément. Les frais d'inventaire et d'estimation sont à la charge de l'usufruitier et du nu-propriétaire, chacun pour moitié. 77. Si, lors de la constitution de l'usufruit, l'usufruitier a été dispensé de faire inventaire des meubles ou état des immeubles, le nu-propriétaire peut toujours y faire procéder, à ses frais, contradictoirement avec l'usufruitier ou lui dûment appelé, sans pouvoir, de ce chef, retarder l'entrée en jouissance de plus de dix jours. [C. it., 496.] Les articles 75 et 76,1er alinéa, sont applicables à ce cas. 78. Si l'usufruitier est entré en possession avant d'avoir fait procéder à l'inventaire et à l'état des biens, quand il n'en a pas été dispensé, il est présumé, jusqu'à preuve contraire, avoir reçu les immeubles en bon état. A l'égard des objets mobiliers, le nu-propriétaire pourra en prouver la consistance et la valeur par toutes les preuves ordinaires, même par commune renommée. 79. L'usufruitier ne peut pareillement entrer en jouissance, sans avoir fourni une caution ou d'autres garanties suffisantes pour les restitutions auxquelles il peut être tenu, à la fin de l'usufruit et pour les autres indemnités. 80. En cas de désaccord entre les parties sur la nature de la garantie à fournir, le tribunal pourra admettre l'engagement d'une tierce personne notoirement solvable, ou le dépôt de sommes ou valeurs, soit à la caisse publique des dépôts et consignations, soit aux mains d'un tiers agréé par les parties; il pourra aussi admettre un gage ou une hypothèque. 81. A l'égard de la somme à garantir, le tribunal ne pourra la fixer au-dessous des sommes d'argent soumises directement à l'usufruit ou de la valeur estimative intégrale des objets mobiliers, lorsque l'estimation en vaut vente, ni au-dessous de la moitié de ladite valeur, lorsque l'estimation ne vaut pas vente. Mais, dans ce dernier cas, si, au cours de l'usufruit, l'usufruitier cède ou loue son droit sur les meubles estimés, la garantie sera toujours exigée pour la valeur estimative intégrale. Pour les immeubles, le tribunal arbitrera la somme à laquelle la garantie devra s'élever. 82. L'acte qui constituera la garantie contiendra, en même temps, l'engagement personnel de la caution ou de l'usufruitier pour le montant des sommes fixées à l'article précédent. 83. Si l'usufruitier ne peut fournir une garantie suffisante, soit pour les meubles, soit pour les immeubles, il est procédé comme il suit, à défaut de convention entre les parties: Les denrées et autres choses fongibles sont vendues publiquement et le prix en est placé, avec l'argent comptant soumis directement à l'usufruit, soit à la caisse publique des dépôts, soit en obligations de l'Etat, sous les noms réunis des deux ayant-droit, et l'usufruitier en perçoit les intérêts ou arrérages; Les autres meubles restent en la possession du nu-propriétaire; Les immeubles sont donnés à bail à un tiers ou conservés à ce titre par le nu-propriétaire, et l'usufruitier perçoit les loyers ou fermages, sous la déduction des frais d'entretien et des autres charges annuelles. [602, 603.] 84. Si l'usufruitier ne peut donner qu'une garantie partielle, il aura, dans cette mesure, le choix des objets qui pourront lui être délivrés. 85. L'usufruitier peut être dispensé de fournir caution par le titre constitutif ou posté-térieurement; mais cette dispense cesse, s'il devient insolvable [601.] S'il est déjà entrée en jouissance, les objets sont restitués au nu-propriétaire et il est procédé conformément aux deux articles précédents. 86. L'usufruit légal des père et mère est toujours dispensé du cautionnement. Il en est de même de l'usufruit réservé par le donateur à son profit, sur les choses par lui données entre-vifs. [601.] Toutefois, au cas d'insolvabilité des père et mère ou du donateur, il devra être fourni caution pour l'argent comptant et pour le montant de l'estimation valant vente d'après l'article 76. 87. Dès que l'usufruitier est entré en jouissance, il doit veiller, en bon administrateur, à la conservation des choses usufructuaires. Il est responsable des pertes ou détériorations qui proviendraient de sa faute ou de sa négligence; sans préjudice des mesures autorisées contre lui par l'article 107, pour la sauvegarde des droits du propriétaire. 88. Si les choses soumises à l'usufruit ont péri par un incendie, en tout ou en partie, l'usufruitier est présumé en faute, s'il ne fournit la preuve du conttaire. 89. L'usufruitier est tenu de faire, sans recours, les réparations d'entretien des meubles et des immeubles. Il n'est tenu des grosses réparations que si elles sont devenues nécessaires par sa faute ou par le défaut de réparations d'entretien. [605.] S'il y fait procéder, même sans en être tenu, il n'a droit de ce chef, à aucune indemnité. 90. Le nu-propriétaire n'est pas tenu non plus des grosses réparations; s'il y fait procéder, il ne peut réclamer de l'usufruitier aucune contribution à la dépense. [607.] 91. Sont considérées comme grosses réparations des bâtiments: celles, même partielles, des murs principaux ou des voûtes, et le changement d'une ou plusieurs poutres principales. Sont aussi grosses réparations: la réfection de la couverture, celle d'un mur de soutènement, d'une digue et d'un mur de clôture, soit en entier, soit sur une superficie de plus du dixième de la totalité. [606; C. it., 504.] 92. L'usufruitier est tenu d'acquitter les contributions et autres charges publiques annuelles ordinaires, tant générales que locales, imposées au fonds dont il a la jouissance. [608.] 93. A l'égard des charges ou contributions extraordinaires qui pourraient être imposées à la propriété pendant la durée de l'usufruit, le nu-propriétaire en paye le capital et l'usufruitier en supporte les intérêts annuels pendant la durée de l'usufruit. [609.] Sont considérées comme charges extraordinaires: 1°  Les emprunts forcés, 2°  Les impôts nouveaux ou les augmentations d'impôts anciens, lorsque l'acte législatif qui les a établis leur a donné la qualification de temporaires ou d'extraordinaires. 94. Si les bâtiments ont été assurés contre l'incendie, par le propriétaire, avant la constitution de l'usufruit, l'usufruitier peut être contraint à supporter l'intérêt des primes annuelles, à charge, par le propriétaire, de lui laisser la jouissance de l'indemnité payée en cas de sinistre. L'usufruitier peut aussi faire l'assurance, à ses frais, dans l'intérêt du propriétaire et dans le sien réunis; dans ce cas, il prélève sur l'indemnité le montant des primes par lui payées et il jouit du surplus. Les mêmes dispositions sont appliquées, si l'usufruit porte sur des navires ou bateaux assurés contre les risques de mer. 95. L'usufruitier peut aussi n'assurer les bâtiments que pour la valeur de son droit d'usufruit; dans ce cas, il supporte seul les primes annuelles et, en cas de sinistre, le montant de l'indemnité lui appartient en toute propriété. Il en est de même, s'il assure les récoltes ou produits, contre les gelées, la grêle ou les autres accidents naturels. 96. L'usufruitier universel ou à titre universel d'une succession, tel qu'il est prévu à l'article 48, est tenu des intérêts des dettes qui la grèvent, dans la proportion de son émolument. [612, 1er al.] Il supporte, dans la même proportion, les arrérages des rentes viagères ou des pensions alimentaires dues par ladite succession. [610.] 97. L'usufruitier d'un ou plusieurs biens particuliers ne contribue pas au payement des dettes du constituant, lors même que les biens sujets à l'usufruit seraient grevés d'hypothèque ou de privilége. [611, 1024.] S'il est poursuivi comme détenteur, il a son recours contre le débiteur, sans préjudice de son action en garantie d'éviction contre le constituant ou son héritier, s'il y a lieu. [874.] 98. Dans les divers cas où une charge doit être supportée par le nu-propriétaire pour le capital, et par l'usufruitier pour les intérêts, il est procédé de l'une des trois manières ci-après: Ou le nu-propriétaire paye le capital et l'usufruitier lui en sert les intérêts annuels; Ou l'usufruitier fait l'avance du capital et le nu-propriétaire le lui rembourse à la fin de l'usufruit; Ou l'on vend une partie des biens usufructuaires, jusqu'à concurrence de la somme exigible. [612.] 99. Si, pendant la durée de l'usufruit, un tiers commet sur le fonds quelque usurpation ou entreprise qui puisse compromettre les droits du nu-propriétaire, l'usufruitier doit dénoncer le fait à celui-ci; faute de quoi, il est responsable de tous les dommages causés et des prescriptions ou des droits de possession qui pourraient être acquis aux tiers. [614.] 100. Si le propriétaire soutient, comme demandeur ou défendeur, un procès concernant la pleine propriété du fonds, il doit appeler l'usufruitier en cause, et celui-ci supporte les intérêts des frais du procès. L'usufruitier supporte seul les frais des procès ne concernant que la jouissance seulement. Dans l'un et l'autre cas, l'usufruitier est exempt des frais, si la constitution de l'usufruit a eu lieu par un acte lui donnant droit à la garantie d'éviction. En aucun cas, l'usufruitier ne contribue aux frais des procès ne concernant que la nue-propriété. [613.] 101. Si, du nu-propriétaire ou de l'usufruitier, l'un n'a pas été mis en cause quand il devait l'être, le jugement ne peut nuire à celui qui n'a pas été partie en cause; mais il peut lui profiter, conformément aux règles de la gestion d'affaires. SECTION IV. DE L'EXTINCTION DE L'USUFRUIT. Art. 102. L'usufruit s'éteint par les mêmes causes qui mettent fin au droit de propriété, conformément à l'article 44. Il s'éteint encore: 1°  Par la mort de l'usufruitier, 2°  Par l'accomplissement du terme pour lequel il avait été établi, 3°  Par la renonciation expresse de l'usufruitier à son droit, 4°  Par le non-usage continu pendant trente ans, 5°  Par la révocation pour abus de jouissance de l'usufruitier. 103. Si l'usufruit a été constitué sur plusieurs têtes, simultanément et par indivis, la part des usufruitiers décédés profite aux survivants et l'usufruit ne s'éteint qu'au décès du dernier mourant. 104. L'usufruit constitué au profit d'une personne juridique s'éteint par le terme de trente ans, s'il n'a été fixé pour une moindre durée. [619.] 105. La renonciation de l'usufruitier à son droit ne le décharge pas de ses obligations antérieures qu'il n'aurait pas exécutées. Elle ne peut nuire aux tiers qui avaient acquis des droits sur la chose du chef de l'usufruitier. [622.] 106. Le non-usage n'est pas opposable aux mineurs ni aux autres personnes contre lesquelles la prescription ne peut courir. Les autres règles relatives à la prescription libératoire s'appliquent d'ailleurs au non-usage. 107. Si l'usufruitier commet sur la chose des dégradations graves, ou s'il en compromet la conservation par défaut d'entretien ou par abus de jouissance, le tribunal pourra mettre la chose sous séquestre, aux frais de l'usufruitier, ou déclarer l'usufruit révoqué, au profit du nu-propriétaire, en fixant une somme ou portion de fruits ou revenus que celui-ci devra payer annuellement à l'usufruitier, jusqu'à l'arrivée d'une des autres causes d'extinction de l'usufruit. Le tribunal règlera, en même temps, le partage des fruits et produits de l'année courante. La valeur en argent ou en fruits due à l'usufruitier pour l'avenir lui sera acquise, jour par jour: à la fin de l'usufruit, le calcul se fera à proportion du temps qu'il aura duré pendant la dernière année. [618.] 108. La révocation de l'usufruit ne préjudicie pas à l'indemnité des dommages antérieurement causés par l'usufruitier. [Ib.2e al.] 109. Hors le cas prévu à l'article 107, les fruits et produits encore attachés au sol, au moment de la cessation de l'usufruit, appartiennent au nu-propriétaire, sans indemnité des frais de culture ou d'exploitation; sans préjudice des droits qui pourraient être acquis à un fermier ou à un colon partiaire. [585, 2e al.] 110. Si un bâtiment usufructuaire est détruit en totalité, par accident ou par vétusté, l'usufruitier ne jouit ni du sol ni des matériaux, à moins que le bâtiment ne soit l'accessoire d'un domaine sujet à l'usufruit. [624.] 111. Si les bâtiments incendiés étaient assurés, soit par le propriétaire, soit par l'usufruitier, ce dernier jouit de l'indemnité, suivant les distinctions portées aux articles 94 et 95. 112. Si le fonds usufructuaire a été exproprié pour cause d'utilité publique, l'usufruitier jouit de l'indemnité. [Loi fr. du 3 mai 1841, art 39.] 113. Dans les cas prévus aux deux articles précédents, l'usufruitier donne caution pour les sommes dont il jouit, s'il n'en a pas été spécialement dispensé en prévision desdits cas. [Ib.] 114. L'usufruit d'un lac ou d'un étang s'éteint quand le fonds vient à être desséché d'une façon permanente. Réciproquement, l'usufruit d'un sol cesse, si le sol vient à être envahi d'une façon permanente par les eaux. Toutefois, l'usufruit renaît si les eaux disparues reviennent ou si l'envahissement des eaux cesse, spontanément, avant qu'il se soit écoulé trente ans de non-usage du fonds tel qu'il était à l'origine, et lors même qu'un jugement aurait prononcé l'extinction de l'usufruit en vertu du présent article. 115. L'usufruit d'un troupeau ne s'éteint que par la perte totale du troupeau. Dans ce cas, si la destruction a eu lieu par un accident subit, l'usufruitier doit rendre les cuirs au nu-propriétaire. [615, 616.] APPENDICE. RÈGLES PARTICULIÈRES A L'USAGE ET A L'HABITATION. Art. 116. L'Usage est un usufruit restreint à la mesure des besoins de l'usager et à ceux de sa famille. [630.] L'Habitation est le droit d'usage des bâtiments. [632, 633.] Les droits d'usage et d'habitation s'établissent de la même manière et s'éteignent par les mêmes causes que l'usufruit. [625.] 117. Sont considérés comme formant la famille de l'usager, pour déterminer la mesure de son droit d'usage ou d'habitation: son conjoint légitime, ses descendants ou ascendants légitimes, adoptifs ou naturels, habitant avec lui, et les serviteurs attachés à sa personne ou à celle desdits parents. [630, 632.] 118. Si le titre constitutif ou une convention ultérieure ne détermine pas le mode d'exercice du droit d'usage d'un fonds de terre, ni les bâtiments où s'exercera l'habitation, le tribunal les déterminera, après avoir entendu contradictoirement les parties. [Comp. 628, 629.] 119. L'usage et l'habitation ne peuvent être cédés ni loués. [631, 634.] 120. Celui qui a un droit d'usage ou d'habitation est soumis, comme l'usufruitier, à faire un inventaire des meubles et un état des immeubles, ainsi qu'à donner caution. [626.] Il est soumis aux mêmes soins et à la même responsabilité de ses fautes. [627.] Il contribue comme l'usufruitier aux réparations, aux charges annuelles et aux frais de procès, en proportion de sa jouissance. [635.] CHAPITRE III. DU BAIL, DE L'EMPHYTÉOSE ET DE LA SUPERFICIE. DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES. Art. 121. Le Bail ou louage d'une chose corporelle, mobilière ou immobilière, donne au preneur le droit d'user et de jouir de la chose louée, pendant un certain temps, moyennant une somme d'argent ou de denrées qu'il s'engage à fournir périodiquement au bailleur; sans préjudice des obligations respectives dont les parties sont tenues en vertu de la convention ou par l'effet de la loi, telles qu'elles sont déterminées aux Sections II et III ci-après. [1708, 1709, 1713.] L'Emphytéose et la Superficie font l'objet d'un Appendice au présent Chapitre. 122. Les contrast de louage d'ouvrage ou d'industrie et de services sont réglés au Livre IIIe. Les règles particulières au bail d'animaux ou bail à cheptel sont portées au même Livre. 123. Les baux des biens de l'Etat, des départements, des communes et des établissements publics sont régis par les lois administratives. [1712.] SECTION PREMIÈRE. DE L'ÉTABLISSEMENT DU DROIT DE BAIL Art. 124. Le droit de bail s'établit par le contrat dit de bail ou de louage. [1714.] Dans le cas où le droit de bail aurait été légué par testament, l'héritier devrait passer avec le légataire un contrat de louage aux clauses et conditions portées dans le testament. Il en serait de même dans le cas d'une promesse de bail: le promettant devrait passer un contrat de louage au stipulant. 125. Le contrat de bail des choses est soumis aux règles générales des contrats à titre onéreux et synallagmatiques, sauf les dérogations ci-après. 126. Les administrateurs légaux ou judiciaires de la chose d'autrui peuvent la donner à bail; toutefois, le bail par eux consenti sans un pouvoir spécial, quant à la durée, ne peut excéder: Deux ans, s'il s'agit d'un animal ou d'un autre objet mobilier; Cinq ans, s'il s'agit d'un bâtiment d'habitation, d'un magasin ou d'une autre construction; Dix ans, s'il s'agit d'une terre labourable, d'une prairie, d'un bois, d'un étang, d'une carrière ou d'une autre partie du sol. [1429, 1430, 1718.] 127. L'administrateur ne peut renouveler les baux, pour une même durée, que trois mois, six mois, ou un an, avant l'expiration de la précédente période, sous la distinction des choses louées, telle qu'elle est portée à l'article précédent. [Ib.] Toutefois, le renouvellement anticipé n'est pas nul si, au moment où cessent les pouvoirs de l'administrateur, la nouvelle période est commencée. [1430.] 128. L'administrateur de la chose d'autrui peut faire un bail à part de fruits ou à colonage. Il peut aussi stipuler une quantité fixe des produits du fonds, sauf au preneur à effectuer le payement en argent, en tout ou en partie, s'il le préfère, d'après la valeur locale courante. 129. Les règles posées aux trois articles précédents s'appliquent aux mandataires ou administrateurs conventionnels, soit généraux, soit spéciaux, à moins que le mandat n'ait étendu ou restreint leurs pouvoirs par écrit. 130. Les mineurs émancipés et les femmes mariées ayant l'administration de leurs biens ne peuvent les donner à bail qu'aux mêmes conditions que les administrateurs de la chose d'autrui. 131. Le preneur ne pourra demander la nullité ou la réduction des baux ou des renouvellements de baux contraires aux articles précédents, si le propriétaire, étant maître de ses droits, déclare les ratifier. [1125.] Il pourra seulement, à toute époque, requérir le propriétaire de déclarer sa volonté à cet égard, dans un délai de 8, 15, ou 30 jours, suivant la nature de l'objet loué, telle qu'elle est distinguée à l'article 126. Si le propriétaire refuse de se prononcer, le preneur pourra déclarer qu'il maintient la durée du bail telle qu'elle a été fixée à l'origine ou dans le renouvellement. 132. Lorsque les baux d'immeubles faits par le propriétaire excèdent trente années, ils deviennent des baux emphytéotiques et sont soumis aux règles particulières établies à l'Appendice ci-après pour ces sortes de baux. SECTION II. DES DROITS DU PRENEUR A BAIL. Art. 133. Le preneur peut tirer de la chose louée les mêmes profits et avantages qu'un usufruitier, sauf les restrictions ou extensions qui pourraient avoir été apportées à ses droits par l'acte constitutif du bail et celles qui résultent des dispositions de la loi. 134. Le preneur peut se faire mettre par le bailleur en possession de la chose louée, à l'époque fixée pour l'entrée en jouissance, sans être tenu de faire un inventaire ou un état des biens, ni de donner caution, à moins que le contrat ne l'y oblige. 135. Il peut exiger que le bailleur, avant la délivrance, mette la chose en bon état de réparations de toute nature, suivant sa destination. Le bailleur est tenu, en outre, pendant la durée du bail, de faire toutes les réparations, grosses et d'entretien, autres que les suivantes et celles qui sont rendues nécessaires par la faute ou la négligence du preneur et de ses serviteurs, lesquelles restent à la charge du preneur. Le bailleur n'est pas tenu, pendant la durée du bail, de supporter l'entretien des tatami, des tatégou, des peintures et des papiers de tenture. Il n'est pas tenu, non plus, du curage des puits, citernes, cloaques, des conduites d'eaux, ni, généralement de faire les réparations dites localivés. [1750, 1754 à 1756.] 136. Le bailleur peut faire aux bâtiments les grosses réparations devenues nécessaires, lors même que le preneur ne les exigerait pas et qu'il en devrait résulter pour lui quelque inconvénient. Toutefois, si les réparations durent plus d'un mois, le preneur devra être indemnisé, s'il y a lieu; il pourra même faire résilier le bail, si les réparations doivent le priver, pendant un temps quelconque, de toute la partie habitable de la chose louée ou de celle qui lui est absolument nécessaire pour son commerce ou son industrie.[1724.] 137. Si le preneur éprouve, par le fait d'un tiers, quelque trouble ou contestation du droit à la jouissance, pour une cause qui ne lui soit pas imputable, le bailleur, dûment averti par lui, doit intervenir et l'en garantir ou l'en indemniser. [1725 à 1727.] 138. Si le trouble provient d'une force majeure, telle que guerre, inondation, incendie, ou d'une mesure de l'autorité publique, et que le preneur en éprouve une perte du tiers de la jouissance ou des profits annuels, ou au-delà, il peut obtenir une réduction proportionnelle du prix du bail. Le preneur peut même faire résilier le bail, si ledit trouble a duré trois années consécutives, et même, au cas d'incendie ou d'autre destruction des bâtiments, si le propriétaire ne les a pas rétablis dans l'année de la destruction. [1769, 1770.] 139. Si, dans un bail ayant pour objet principal un sol ou un bâtiment, il se trouve une contenance moindre ou plus grande que celle annoncée au contrat, il y a lieu à diminution ou augmentation du prix de bail ou à résiliation du contrat, aux mêmes conditions que dans la vente des mêmes objets. [1765.] 140. Si le bail d'un bâtiment a été fait pour l'exercice d'un commerce de détail et que le bailleur ait conservé une partie de bâtiments contigus ou situés dans la même enceinte, il ne peut la louer à un autre ou l'occuper lui-même pour l'exercice du même commerce. 141. Le preneur peut faire sur le fonds loué des constructions ou plantations à sa convenance, pourvu qu'il n'apporte aucun changement aux constructions ou plantations existantes, sans le consentement formel du bailleur. A la fin du bail, il peut enlever les constructions et plantations qu'il a faites, si les choses peuvent être rétablies dans leur état antérieur; sauf la faculté accordée au bailleur par l'article 156. 142. Le preneur peut, s'il n'y a stipulation contraire, céder son bail, à titre gratuit ou onéreux, ou sous-louer la chose, pour le temps du bail qui reste à courir. [1717.] Dans le premier cas, il a les droits d'un donateur ou d'un vendeur et, dans le second cas, ceux d'un bailleur. Dans l'un et l'autre cas, il reste tenu de ses obligations envers son bailleur, si celui-ci n'a pas fait novation avec le nouveau preneur. Si le prix du bail consiste en une part de fruits ou produits non convertible en argent, la cession du bail ni la sous-location ne peuvent avoir lieu sans le consentement du bailleur. [1763.] 143. Le preneur d'un immeuble peut hypothéquer son droit, si la cession ou la sous-location ne lui a pas été interdite. 144. Le preneur peut exercer contre les tiers, pour la conservation de son droit et pour la jouissance des servitudes attachées au fonds, les actions énoncées à l'article 70, au Chapitre de l'Usufruit. SECTION III. DES OBLIGATIONS DU PRENEUR. Art. 145. Le preneur est tenu, au moment de son entrée en jouissance, ou à toute autre époque, d'admettre le bailleur à procéder, contradictoirement avec lui, à l'inventaire des meubles et à l'état des lieux loués, si le bailleur le désire, pour la conservation de ses droits; mais il ne contribue pas aux frais de ces actes. Le preneur peut aussi faire procéder lui-même auxdits état ou inventaire et à ses frais, après y avoir appelé le bailleur. S'il n'a été fait aucun état des meubles ou immeubles, le preneur est présumé, jusqu'à preuve contraire, les avoir reçus en bon état de réparation. A défaut d'inventaire des meubles, la preuve de leur consistance et de leur état incombe au bailleur et se fait d'après les moyens ordinaires. [1731.] 146. Le preneur est tenu de payer aux époques convenues, le prix du bail stipulé en argent et, à défaut de convention, à la fin de chaque mois. [1728-2°.] A l'égard des portions de fruits dues au même titre, elles ne sont exigibles qu'après la récolte, mais alors en entier. 147. A défaut d'exécution desdites prestations et faute par le preneur de remplir les autres clauses et conditions particulières du bail, le bailleur peut l'y contraindre directement, par voie d'action, ou faire résilier le bail avec dommages-intérêts, s'il y a lieu. [1741, 1760.] 148. Le preneur est tenu, pour la garantie du bailleur, d'engranger les produits du fonds dans les lieux loués, s'ils sont disposés à cet effet. Il ne peut les déplacer sans autorisation ou avant d'avoir payé l'année courante. [1767.] 149. Le preneur n'est tenu d'aucun des impôts ordinaires ou extraordinaires qui peuvent peser directement sur la chose louée: ceux qui pourraient être exigés de lui, en vertu des lois de finances, entreraient en déduction de son prix de bail ou lui seraient remboursés par le bailleur; le tout, sauf convention contraire. Mais les impôts et charges mis sur les bâtiments élevés par le preneur et sur le commerce ou l'industrie qu'il exerce sur le fonds loué sont à sa charge. 150. Le preneur ou son cessionnaire ne peut user de la chose louée que suivant la destination qui lui a été donnée par la convention, expressément ou tacitement, ou, à défaut de convention, à cet égard, suivant la destination qu'elle avait au moment du contrat ou que sa nature comporte sans détérioration. [1728-1°.] 151. Le preneur est tenu, quant à la garde et à la conservation des choses louées, des mêmes obligations que l'usufruitier. [Ib.] Si un tiers commet une usurpation ou autre entreprise sur la chose louée, le preneur doit en avertir le bailleur, comme il est dit à l'article 99, au sujet de l'usufruitier et sous la même sanction. [1726, 1727.] 152. S'il y a plusieurs locataires d'un même bâtiment ou de plusieurs bâtiments situés dans la même enceinte et appartenant au même propriétaire, ils sont solidairement responsables de l'incendie envers celui-ci, à moins qu'il ne soit prouvé que tous ou quelques-uns sont exempts de faute. [1733,1734; Contrà, L. fr. du 5 janv. 1883.] 153. Le recours de celui qui aura payé les dommages sera réparti par le tribunal entre tous les preneurs, en tenant compte tant de l'étendue des divers locaux que des dangers plus ou moins considérables que chaque location présentait, d'après la profession du locataire et ses habitudes. [C. ital., 1590.] 154. Si le propriétaire habitait lui-même une partie des bâtiments incendiés, il ne pourra agir en indemnité contre les locataires qu'en prouvant que l'incendie n'a pas commencé chez lui et, dans ce cas même, la responsabilité solidaire des locataires est limitée à la valeur des locaux à eux loués. [C. it., ib.] 155. Si, à la fin du bail, le preneur ne restitue pas les choses louées, il peut être poursuivi, à cet effet, par action personnelle ou par action réelle, au choix du bailleur. 156. Le bailleur peut exiger, à la fin du bail, que le preneur lui cède, pour leur valeur actuelle, à dire d'experts, les constructions et plantations que celui-ci a le droit d'enlever d'après l'article 141. L'article 73 est applicable au présent droit de préemption. SECTION IV. DE LA CESSATION DU BAIL. Art. 157. Le bail finit de plein droit; 1°  Par la perte totale de la chose louée, sauf l'indemnité due par la partie à la faute de laquelle la perte est imputable; [1722, 1741.] 2°  Par l'expropriation totale de la chose pour cause d'utilité publique; 3°  Par l'éviction du bailleur ou par l'annulation de son droit sur la chose louée, lorsqu'elles sont prononcées en justice et pour des causes antérieures au contrat; 4°  Par l'expiration du terme expressément ou tacitement fixé, ou par l'accomplissement d'une condition résolutoire stipulée; [1737,1774,1775.] 5°  Par le délai légal écoulé depuis la signification d'un congé, en l'absence de terme originairement fixé. [1739.] Le bail finit encore par la résolution ou résiliation prononcée en justice, à la demande de l'une des parties, pour inobservation des conditions ou pour les autres causes que la loi détermine. [1729, 1741, 1760, 1764, 1766.] 158. Dans le cas de perte partielle de la chose louée, par cause fortuite ou majeure, le preneur peut demander la résolution du bail, ou son maintien avec diminution du prix, sous les conditions portées à l'article 138. [1722.] Au cas d'expropriation partielle pour cause d'utilité publique, le preneur a toujours droit à une diminution de prix. 159. Si, à l'expiration du bail ayant une durée fixée, le preneur reste en jouissance, au su et sans opposition du bailleur, il s'opère tacitement un nouveau bail, aux mêmes charges et conditions que le précédent. [1738, 1759.] Toutefois, les cautions qui garantissaient le premier bail sont libérées et les hypothèques fournies au même titre sont éteintes. [1740.] Le nouveau bail cessera par le congé, comme il est dit aux articles suivants. [1736, 1739.] 160. Le bail fait sans durée expressément fixée, d'une maison, d'un corps de logis ou d'un appartement meublés, est présumé fait pour un an, pour un mois ou pour un jour, si le prix en a été déterminé par année, par mois ou par jour; sans préjudice de la tacite réconduction, comme il est dit à l'article précédent. [1758.] 161. S'il n'a pas été fixé de durée pour un bail de bâtiments non meublés ou si, à l'expiration du terme fixé, il y a eu tacite réconduction le bail finira par un congé donné par l'une des parties à l'autre, à toute époque de l'année. [1736.] L'intervalle entre le congé et la sortie sera: De trois mois, pour une maison entière; De deux mois, pour un corps de bâtiments ou de logis, ou pour un local moins étendu où le preneur exerce un commerce ou une industrie; D'un mois, pour tous autres locaux non meublés. 162. L'intervalle entre le congé et la sortie, pour les locaux meublés, à l'égard desquels il y aura eu tacite réconduction, sera d'un mois, si la durée primitive du bail était de trois mois ou davantage; Pour le bail de moins de trois mois, ledit intervalle sera du tiers de la durée primitive; Il sera de 24 heures pour les locations de jour à jour. Les mêmes délais s'appliquent aux locations de meubles, après la tacite réconduction, et, si la location a été faite, à l'origine, sans durée fixée, le congé doit être donné quinze jours à l'avance pour faire cesser le bail. Toutefois, s'il s'agit de meubles garnissant des bâtiments loués, ou de meubles réputés immeubles par destination, la location n'en cesse qu'avec celle des bâtiments. [1757.] A l'égard du bail d'un bien rural, fait sans durée fixée, le congé doit être donné un an avant l'époque de la principale récolte annuelle. [1774, 1775.] La durée du bail d'animaux donnés à cheptel est réglée au Livre IIIe. 163. Les dispositions des trois articles précédents sur l'époque du congé et sur celle de la sortie ne sont applicables qu'à défaut d'usage local certain sur lesdites époques. [1736,1756 à 1759.] 164. Dans tous les cas, si le bail se trouve expiré avant que le preneur ait pu détacher ou enlever toutes les récoltes auxquelles il a droit, le bailleur ou le nouveau preneur doit lui en laisser la faculté. Réciproquement, le preneur doit permettre au bailleur ou au nouveau preneur de faire, avant l'expiration du bail, les travaux urgents sur les portions de terrain dépouillées de récoltes, lorsqu'il ne doit en éprouver aucun trouble sérieux. 165. Si le bailleur s'est réservé la faculté de résilier le bail avant l'expiration du temps fixé, soit au cas d'aliénation de la chose louée, soit au cas où il reprendrait la jouissance pour lui-même, ou pour toute autre cause particulière, de même, si le preneur s'est réservé ladite faculté, en vue de certaines éventualités où la location lui deviendrait inutile, ils doivent se donner respectivement congé à l'avance, au temps fixé par les articles précédents, à moins que le temps restant à courir d'après la convention ne se trouve plus court. [1744 s., 1761, 1762.] APPENDICE. DE L'EMPHYTÉOSE ET DE LA SUPERFICIE. § Ier. DE L'EMPHYTÉOSE. Art. 166. L'Emphytéose est un bail d'immeuble à long terme ou de plus de trente années. Elle ne peut excéder cinquante ans: si elle a été faite pour une plus longue durée, elle est réduite à ce terme. Elle peut toujours être renouvelée, mais de façon à ne jamais excéder cinquante ans depuis le renouvellement. [Comp. C. ital., 1556.] Les baux d'immeubles faits avant la promulgation du présent Code pour une durée déterminée, même supérieure à cinquante années, seront valables pour tout le temps qui leur a été assigné. Les baux de terres en friches ou incultes faits, à la même époque, pour une durée indéterminée, cesseront par un congé donné par l'une des parties à l'autre, dix ans à l'avance. A l'égard des baux formellement stipulés perpétuels, il sera statué ultérieurement par une loi spéciale sur la faculté et les conditions du rachat de la redevance par l'emphytéote. 167. Le bail emphytéotique ne s'établit que par le contrat d'emphytéose: l'article 124 est applicable au legs ou à la promesse d'emphytéose. 168. Les droits et obligations respectifs des parties sont réglés par le titre constitutif de l'emphytéose. A défaut de conventions particulières, les règles du bail ordinaire, ci-dessus établies, s'appliquent à l'emphytéose, sous les modifications ci-après. 169. L'emphytéote d'un terrain peut en changer la nature, pourvu qu'il n'y apporte pas de détérioration permanente. Il peut toujours dessécher les marais. Il peut aussi modifier les cours d'eau qui traversent le fonds, s'il en doit résulter quelque avantage pour l'exploitation, 170. L'emphytéote peut défricher les landes, buissons et bambous; mais il ne peut, sans le consentement du proprétaire, arracher les bois taillis, ni les arbres qui, n'étant pas destinés à être coupés périodiquement, ont déjà plus de 20 ans et dont la croissance peut se prolonger au-delà du temps que doit durer le bail. 171. L'emphytéote ne peut, en aucun cas, sans le consentement du propriétaire, supprimer les bâtiments principaux, ni même ceux des bâtiments accessoires dont la durée peut excéder celle du bail. 172. Dans tous les cas où, d'après l'article précédent et d'après l'article 170, l'emphytéote est autorisé à supprimer des constructions ou des arbres, les matériaux et les bois en provenant appartiennent au propriétaire. 173. L'emphytéote ne peut, en cette qualité, continuer l'exploitation des mines souterraines existant dans le tréfonds. Il n'a aucun droit aux redevances payées par les concessionnaires des mines. [v. C. it., 1561.] Il reçoit, au contraire, les indemnités pour dommages causés à la surface par lesdits concessionnaires. 174. S'il existe sur le fonds emphytéotique des minières ou des carrières de pierre, de chaux, de sable ou d'autres minéraux, le preneur peut en continuer, à son profit, l'exploitation déjà commencée. Si les carrières ne sont pas encore ouvertes ou si l'exploitation en a été abandonnée, il peut seulement y prendre des pierres ou d'autres matériaux pour l'amélioration du fonds. 175. Le bailleur livre la chose en l'état où elle se trouve au moment du contrat d'emphytéose. Il n'est tenu à aucune réparation, grosse ou d'entretien, pendant la durée du droit. 176. Les détériorations survenues, par cas fortuit ou force majeure, pendant la durée de l'emphytéose, ne donnent pas lieu à diminution du prix du bail; sans préjudice du droit de résolution réservé au preneur par l'article 181. 177. Le preneur paye sans recours tous les impôts fonciers, ordinaires et extraordinaires, quand la loi qui établit ces derniers n'en a pas décidé autrement. [Ib. 1558.] 178. Si un fonds a été donné en emphytéose à plusieurs personnes, par un seul contrat, l'obligation de payer la rente annuelle est solidaire et indivisible à la charge de chaque preneur ou de ses héritiers. 179. En cas de cession ou de sous-location du bail emphytéotique, lesdites obligations passent au cessionnaire ou au sous-locataire, et le cédant en reste garant, comme caution, si le bailleur ne l'en a pas expressément affranchi ou n'est pas intervenu à l'acte de cession, en l'acceptant sans réserver ses droits. [Ib. 1562.] 180. Le bailleur peut demander la résolution du bail emphytéotique pour défaut de payement de la redevance pendant trois ans consécutifs. [Ib 1565.] Il peut même demander la résolution pour tout défaut de payement, si le preneur est déclaré en faillite ou insolvable, sur la poursuite d'autres créanciers; à moins que ceux-ci n'assurent le payement régulier de la redevance. 181. Le preneur peut demander la résolution du bail, si, par cas fortuit ou force majeure, la jouissance du fonds est devenue impossible pour le tout, pendant trois années consécutives, ou si la détérioration partielle ne doit pas laisser dans l'avenir de profits supérieurs à la rente annuelle à payer. [Ib. 1559, 1560.] 182. A l'expiration du bail ou à sa résolution, le preneur laisse, sans indemnité, les plantations et améliorations qu'il a faites sur le sol. Quant aux constructions, les dispositions portées à l'article 156, pour le bail ordinaire, lui sont applicables. [Comp. ib. 1566.] § II. DE LA SUPERFICIE. Art. 183. La Superficie est le droit de posséder en pleine propriété des constructions ou des plantations d'arbres ou de bambous, sur un sol appartenant à un autre propriétaire. 184. Le droit de superficie s'établit et se transmet par les moyens ordinaires d'acquérir et de transmettre la propriété immobilière. 185. Lorsque les constructions existent déjà sur le sol, au moment de l'établissement du droit de superficie, l'acte constitutif en est soumis, tant pour le fond et la forme que pour la publicité, aux règles générales des aliénations d'immeubles, à titre gratuit ou onéreux, suivant les cas. 186. Si le titre constitutif soumet le superficiaire au payement d'une redevance annuelle envers le propriétaire du sol, à raison de l'espace occupé par les constructions ou plantations cédées, ses droits et obligations sont régis, à cet égard, par les dispositiens ci-dessus établies pour le bail ordinaire, sauf en ce qui concerne leur durée, telle qu'elle est réglée par l'article 188 ci-après. Il en est de même, sous le rapport de ladite redevance, si le terrain a été loué pour bâtir ou pour établir des plantations. 187. Si, lors de l'établissement du droit de superficie sur des constructions et plantations déjà faites, il n'a pas été fait mention de la portion du sol environnant qui en dépendrait comme accessoire, le superficiaire a droit, autour des constructions, à une portion de sol égale à la superficie totale du sol des bâtiments; la répartition de cet espace sera faite par experts, en tenant compte tant de la configuration respective du sol et des bâtiments que de la destination de chaque portion de ceux-ci. S'il s'agit de plantations d'arbres ou de bambous, le superficiaire a droit à l'espace que pourraient couvrir les branches extérieures arrivées à leur plus grand développement. 188. Si le titre constitutif ne fixe pas la durée du droit de superficie à l'égard des constructions déjà faites ou à établir par le superficiaire, le droit est présumé établi pour un temps égal à la durée desdites constructions, lesquelles ne pourront recevoir de grosses réparations que du consentement du propriétaire du sol. Si le sol est déjà planté ou doit être planté par le superficiaire comme il est dit ci-dessus, le droit de superficie est censé établi pour durer jusqu'à l'époque où les arbres seront abattus, ou auront atteint leur plus grand développement utile. Le droit de superficie s'éteint, en outre, par les mêmes causes que le droit de bail ordinaire, à l'exception du congé donné par le propriétaire du sol. Le superficiaire peut toujours donner congé, en prévenant un an à l'avance ou en payant une annuité non échue. 189. Les constructions et plantations tant celles établies antérieurement au contrat que celles faites par le superficiaire, ne peuvent être enlevées par celui-ci que si le propriétaire du sol n'en requiert pas la cession à dire d'experts. Le superficiaire ne peut enlever lesdites plantations ou constructions qu'après avoir sommé le propriétaire du fonds, un mois à l'avance, d'avoir à déclarer s'il entend user du droit de préemption. L'article 73 s'applique audit cas, pour le surplus de ses dispositions. 190. Les droits de superficie qui se trouveront établis au moment de la promulgation du présent Code seront réglés ainsi qu'il suit: Ceux qui auront été établis pour un temps déterminé cesseront de plein droit avec le temps qui leur avait été assigné; Ceux auquels les parties n'avaient pas assigné de durée fixe et au sujet desquels il n'aura pas été, à la même époque, donné un congé en forme, de part ou d'autre, dureront autant, que les bâtiments, conformément à l'article 188. Les uns et les autres seront soumis au droit de préepmtion réglé par l'article 189. CHAPITRE IV. DE LA POSSESSION. SECTION PREMIÈRE. DES DIVERSES ESPÈCES DE POSSESSION ET DES CHOSES QUI EN SONT SUSCEPTIBLES. Art. 191. La possession est naturelle ou civile. 192. La possession naturelle est la détention d'une chose corporelle, sans que le détenteur ait aucune prétention à un droit sur cette chose. Les biens du domaine public ne sont susceptibles que d'une possession naturelle de la part des particuliers. [C. ital. 690.] 193. La possession civile est la détention d'une chose corporelle ou l'exercice d'un droit, avec l'intention de l'avoir pour soi. [C. fr., 2228.] Tous les droits, tant réels que presonnels, sont susceptibles de possession civile, avec des effets différents, suivant les cas, tels qu'ils sont déterminés ci-après. La possession appliquée à l'état civil des personnes est réglée au Livre Ier. [C. fr., 320 à 322.] 194. La possession civile est dite à juste titre ou à juste cause, lorsqu'elle est fondée sur un acte juridique destiné par sa nature à conférer le droit possédé, encore que, faute de qualité chez le cédant, elle n'ait pu produire cet effet. [550.] Si la possession a été usurpée, elle est dite sans titre ou sans cause. 195. La possession à juste titre est dite de bonne foi, lorsque le possesseur a ignoré les vices de son titre, au moment où il a été créé. Elle est dite de mauvaise foi, dans le cas contraire. L'erreur de droit n'est pas admise pour donner les avantages de la bonne foi, sauf ce qui est dit à l'article 206. La bonne foi cesse lorsque les vices du titre sont découverts. [Ibid.] 196. La possession est dite vicieuse, lorsqu'elle est violente ou clandestine. [2229.] Elle est violente, quand elle a été obtenue ou conservée par la force ou la menace. Elle est clandestine, quand elle ne se révèle pas suffisamment aux intéressés par des actes extérieurs et publics. La possession cesse d'être vicieuse, lorsqu'elle est devenue paisible, ou lorsqu'elle est devenue publique. 197. La possession naturelle est dite précaire, lorsque le possesseur détient une chose ou exerce un droit au nom et pour le compte d'autrui. La possession cesse d'être précaire et devient civile, lorsque le possesseur a commencé à posséder pour lui-même. [2236, 2237.] Toutefois, lorsque la précarité résulte de la nature du titre sur lequel la possession est fondée, elle ne cesse que par l'une des deux causes ci-après: 1°  Par un acte judiciaire ou extrajudiciaire signifié à celui pour le compte duquel la possession avait lieu et contenant une contradiction formelle à ses droits; 2°  Par l'interversion du titre, provenant du contractant ou d'un tiers et donnant une nouvelle cause à la possession. [2238.] 198. Le possesseur est toujours présumé posséder pour son propre compte, si la précarité n'est prouvée, soit par son titre, soit par les circonstances du fait. [2230.] 199. Celui qui prouve posséder en vertu d'un juste titre est présumé posséder de bonne foi, si le contraire n'est prouvé. [2268.] 200. La possession est présumée paisible, si la violence n'est pas prouvée. La publicité ne se présume pas, elle doit être prouvée. La possession prouvée à deux époques différentes est présumée avoir été continuée dans l'intervalle, s'il n'est prouvé qu'elle a été interrompue ou suspendue. [2234.] SECTION II. DE L'ACQUISITION DE LA POSSESSION. Art. 201. La possession civile s'acquiert par le fait de l'appréhension d'une chose ou par l'exercice effectif d'un droit, avec l'intention d'avoir à soi la propriété de la chose ou le droit exercé. 202. La détention de la chose ou l'exercice du droit peut avoir lieu par le fait d'un tiers; l'intention de posséder doit se rencontrer en la personne de celui qui prétend bénéficier de la possession. [2228]. Toutefois, les incapables et les personnes juridiques peuvent bénéficier de la possession, par le fait et l'intention de leur représentant. 203. La prise de possession matérielle peut être remplacée par la tradition de brève main et par le constitut possessoire. Il y a tradition de brève main, lorsqu'une chose possédée précédemment à titre précaire est laissée au possesseur en vertu d'un autre titre également précaire ou d'un titre qui lui permet de la considérer désormais comme sienne. Il y a constitut possessoire, lorsque celui qui possédait précédemment une chose comme sienne déclare en conserver désormais la possession au nom et pour le compte d'autrui. 204. La possession se transmet aux héritiers et successeurs universels à l'égard desquels elle continue, avec les qualités et les vices qu'elle pouvait avoir en la personne de leur auteur. Les acquéreurs à titre particulier d'une chose ou d'un droit peuvent, suivant leur intérêt, ou invoquer seulement leur propre possession, ou se prévaloir de celle de leur cédant, en la joignant à la leur. [2235]. SECTION III. DES EFFETS DE LA POSSESSION. Art. 205. Celui qui possède civilement est présumé, jusqu'à preuve contraire, avoir légalement le droit qu'il exerce: il est toujours défendeur aux actions pétitoires ou en revendication relatives à ce droit. 206. Le possesseur qui a juste titre et bonne foi acquiert les fruits et produits naturels et industriels, au moment où ils sont séparés du sol, par lui ou en son nom. [549.] Il acquiert les fruits civils jour par jour, comme il est dit pour l'usufruitier. Si le possesseur, sans avoir de juste titre, est de bonne foi, par une erreur de fait ou de droit, il est dispensé de restituer les fruits consommés, en justifiant qu'il n'en est pas enrichi. Les présents avantages cessent pour l'avenir, dès que le possesseur a découvert que la chose ou le droit possédé ne lui appartient pas; ils cessent, dans tous les cas, à partir de la demande en justice, si elle triomphe définitivement. [550.] 207. Le possesseur de mauvaise foi est tenu de rendre, avec la chose ou le droit revendiqué, les fruits et produits qu'il possède encore en nature, ou la valeur tant de ceux qu'il a consommés ou laissés se détériorer par sa faute que de ceux qu'il a négligé de percevoir. Le revendiquant, de son côté, doit lui rembourser les frais et impenses qui sont la charge ordinaire des fruits. [548.] Celui qui possède par violence ou clandestinement est toujours considéré comme possesseur de mauvaise foi quant aux fruits, lors même qu'il croirait à la légitimité de son titre. 208. Tout possesseur, de bonne ou de mauvaise foi, doit être remboursé, par le revendiquant, des dépenses nécessaires ou faites pour la conservation de la chose et des dépenses utiles ou qui en ont augmenté la valeur. [1634.] Aucun possesseur n'a droit, eu cette seule qua lité, au remboursement des dépenses voluptuaires ou de pur agrément. 209. Dans le cas des deux articles précédents, le possesseur de bonne foi jouit du droit de rétention de la chose, jusqu'à l'entier remboursement des dépenses auxquelles le revendiquant est condamné. Le possesseur de mauvaise foi n'en jouit que pour les dépenses nécessaires. [v. C. it., 706.] 210. Si la chose a subi des dégradations ou dépréciations imputables au possesseur, le possesseur de mauvaise foi est tenu d'en indemniser le propriétaire, dans tous les cas, et le possesseur de bonne foi seulement dans le cas et dans la mesure où il en est enrichi. [1632.] 211. Les conditions sous lesquelles le possesseur peut arriver à la prescription acquisitive de la propriété, tant des meubles que des immeubles, sont réglées au Livre Ve. 212. Le possesseur a, pour retenir ou recouvrer la possession, les actions possessoires dites en complainte, en dénonciation de nouvel œuvre ou de dommage imminent et en réintégrande, sous les distinctions ci-après. [C. pr. civ., art. 23 à 27; Loi du 25 mai 1838, art. 6.] 213. L'action en complainte appartient au possesseur qui éprouve de la part d'un tiers un trouble de fait ou de droit impliquant une prétention contraire à sa possession. Elle tend à faire cesser le trouble ou à en obtenir la réparation. Elle appartient au possesseur tant d'un immeuble que d'une universalité de meubles ou d'un meuble particulier. 214. La dénonciation de nouvel œuvre appartient au possesseur d'un immeuble, pour faire cesser ou modifier des travaux commencés sur un fonds voisin et dont l'achèvement constituerait un trouble à sa possession. La dénonciation de dommage imminent appartient au possesseur d'un immeuble qui a juste sujet de craindre un dommage, soit de la chûte d'un édifice, d'un arbre ou autre objet, soit de la rupture d'une digue, d'un réservoir ou d'un aqueduc, soit de l'emploi, sans les précautions nécessaires, du feu ou de matières inflammables ou explosibles. Elle tend à faire ordonner des mesures préventives contre le danger, ou à obtenir caution de la réparation du dommage éventuel. [C. ital., 699.] 215. L'action en complainte et celle en dénonciation de nouvel œuvre ou de dommage imminent n'appartiennent qu'à celui qui a une possession civile, paisible et publique; en outre, pour un immeuble, la possession doit avoir duré depuis une année entière. 216. L'action en réintégrande appartient au possesseur qui a été dépossédé par voies de fait, par menaces ou par ruse, de tout ou partie d'un immeuble, d'une universalité de meubles ou d'un meuble particulier, pourvu que sa possession ne fût pas elle-même entachée d'un des mêmes vices, à l'égard du défendeur. Elle ne peut être exercée contre ceux qui ont succédé à titre particulier à la possession usurpée, à moins qu'ils n'aient participé aux actes illicites constituant l'usurpation. Elle appartient tant au possesseur précaire qu'au possesseur civil et à celui dont la possession ne serait pas encore annale. 217. Les actions en complainte et en réintégrande ne sont recevables que dans l'année du trouble ou de la dépossession. La dénonciation de nouvel œuvre est recevable tant que les travaux contestés ne sont pas terminés, à moins qu'il ne se soit écoulé un an depuis que les travaux, même inachevés, ont causé un trouble au possesseur. La dénonciation de dommage imminent est admise tant que le danger subsiste. 218. Les actions possessoires ne peuvent être cumulées avec l'action pétitoire. Le juge de l'action possessoire ne peut fonder sa décision sur des motifs tirés du fond du droit des parties et de nature à le préjuger. Il ne peut non plus surseoir à statuer sur le possessoire jusqu'à ce que les parties aient fait juger le pétitoire, lors même qu'il serait déjà pendant en justice. 219. Si l'action pétitoire est intentée par l'une ou l'autre des parties après que l'action possessoire a été portée, soit devant le même tribunal, soit devant un tribunal différent, il doit être sursis à la procédure au pétitoire jusqu'au jugement définitif sur le possessoire. Il en est de même si le défendeur à l'action pétitoire se porte, au cours du procès, demandeur au possessoire, comme il est prévu à l'article 221. 220. Celui qui a formé une demande au pétitoire ne peut plus agir au possessoire à raison de faits antérieurs à la première demande, même en se désistant de celle-ci; mais il peut suivre, comme demandeur ou défendeur, sur une demande au possessoire déjà formée. Dans tous les cas, celui qui a succombé définitivement au pétitoire est déchu du droit d'agir au possessoire. 221. Le défendeur, soit à l'action pétitoire, soit à une action possessoire, peut, pendant la même instance, se porter lui-même, reconventionnellement, demandeur au possessoire, soit par une action semblable, soit par une autre. 222. Si l'action possessoire est justifiée, le juge ordonnera, suivant les cas, la cessation du trouble, la restitution de la chose usurpée, la discontinuation ou la modification des travaux dénoncés ou les mesures préventives du dommage imminent; il condamnera, en même temps, le défendeur aux dommages-intérêts, s'il y a lieu. Dans le cas de dénonciation de nouvel œuvre ou de dommage imminent, il peut aussi ordonner au défendeur de fournir caution pour le montant des dommages éventuels qu'il arbitrera. [C. it., 699.] 223. Le défendeur qui a succombé au possessoire peut agir au pétitoire, mais seulement après avoir satisfait aux condamations portées contre lui. Si elles ne sont pas liquidées, il consignera au greffe une somme suffisante pour y satisfaire. 224. Le demandeur qui a succombé au possessoire, faute de preuve des faits allégués, ou dont la demande a été déclarée non recevable, comme tardive ou parce que sa possession ne remplissait pas les conditions requises, peut encore agir au pétitoire. 225. La compétence et les autres règles de forme relatives aux actions possessoires sont déterminées par la Loi organique des Cours et Tribunaux et par le Code de Procédure civile. SECTION IV. DE LA PERTE DE LA POSSESSION. Art. 226. La possession se perd: 1°  Par la cessation de l'intention de posséder pour soi-même ou pour autrui; 2°  Par l'abandon volontaire ou légalement forcé de la détention de la chose ou de l'exercice du droit; 3°  Par la prise de possession d'un tiers, même illégale, lorsqu'elle a duré plus d'une année, sans que l'action en complainte ou en réintégrande ait été exercée; 4°  Par la destruction totale ou par la perte de la chose ou du droit qui fait l'objet de la possession. CHAPITRE V. DES SERVITUDES FONCIÈRES. DISPOSITION PRÉLIMINAIRE. Art. 227. Les servitudes foncières sont des charges établies sur un fonds, pour l'utilité d'un fonds appartenant à un autre propriétaire. [C. fr., 637, 639.] Elles sont établies par la loi ou par le fait de l'homme. [C. ital., 532.] SECTION PREMIÈRE. DES SERVITUDES ÉTABLIES PAR LA LOI. § 1. DES DROITS D'ACCÈS ET DE PASSAGE SUR LES FONDS VOISINS. Art. 228. Tout propriétaire peut obtenir l'accès sur le fonds voisin, pour la construction et la réparation de ses murs ou bâtiments placés sur la limite des fonds ou à une distance trop rapprochée pour qu'il puisse faire les travaux sur son propre fonds. [C. ital., 592.] 229. Sauf le cas d'urgence ou de nécessité absolue, les travaux de construction ou de réparation ne doivent pas être faits à l'époque où ils pourraient nuire aux récoltes, ni en cas d'absence momentanée du propriétaire ou possesseur voisin. En aucun cas, ils ne peuvent, sans le consentement du voisin, motiver l'accès dans sa maison d'habitation, même contiguë aux bâtiments demandant réparation. 230. Dans tous les cas, le voisin qui donne l'accès peut obtenir une indemnité mesurée sur le trouble à lui causé, eu égard à la nature et à la durée des travaux exécutés. 231. Si un fonds se trouve enclavé dans un ou plusieurs autres fonds, de telle sorte qu'il ne puisse communiquer avec la voie publique, il devra lui être fourni un passage sur ces fonds, jusqu'à la voie publique, moyennant une double indemnité, comme il est dit ci-après. [C. fr., 682; C. it., 593.] Un fonds peut être considéré comme enclavé, quand il n'a de communication qu'avec un canal, même public, avec une rivière ou la mer, ou lorsqu'il est notablement en contre-haut ou en contre-bas de la voie publique. 232. Le passage fourni doit être assez large pour l'emploi de voitures, si les besoins des habitants ou l'exploitation du fonds enclavé le requièrent, soit temporairement, soit d'une façon permanente. En cas de désaccord des intéressés sur la nécessité du passage ou sur le mode et les conditions de son exercice, les tribunaux doivent concilier, autant que possible, les besoins du fonds enclavé et la commodité du passage avec le moindre dommage au fonds traversé. 233. Les travaux d'établissement et d'entretien du passage; sont à la charge du fonds enclavé. Il est alloué une première indemnité, à payer une seule fois, au propriétaire du fonds traversé, s'il est nécessaire de supprimer ou modifier des constructions ou des plantations d'arbres. Une autre indemnité est due annuellement pour la diminution de l'usage ou des cultures et pour la dépréciation permanente causée au fonds servant. 234. Le passage et l'indemnité annuelle cessent d'être dus respectivement, dès que l'enclave a cessé. Le propriétaire du fonds dominant peut toujours renoncer au passage et s'affranchir de son obligation corrélative, en payant six mois non échus de l'annuité. 235. Après cinq ans, le propriétaire du fonds dominant peut, en conservant le passage, s'affranchir de l'annuité, en payant un capital égul à vingt fois son montant. Le propriétaire du fonds servant peut aussi demander le même capital, si le débiteur de l'annuité a laissé passer deux années sans la payer, après en avoir été dûment sommé. 236. Si l'enclave résulte de la cession partielle d'un fonds ou d'un partage entre co-propriétaires, le passage est dû, sans indemnité, par le cédant ou le copartageant, et il cesse de même avec la création d'une voie publique faisant cesser l'enclave. [v. nouvel art. 684.] § II. DE L'ÉCOULEMENT. DE L'USAGE ET DE LA CONDUITE DES EAUX. Art. 237. Les propriétaires des fonds inférieurs sont assujettis à recevoir les eaux pluviales ou de sources qui découlent naturellement des fonds supérieurs, sans que la main de l'homme y ait contribué. [640.] Si même l'écoulement des eaux a été créé ou modifié par des travaux de main d'homme remontant à plus de trente ans ou à une époque inconnue, la servitude ne peut être contestée. 238. Si, par la rupture de digues, chaussées ou autres ouvrages destinés à contenir les eaux, ou par des encombrements d'aqueducs ou canaux, il se produit sur le fonds supérieur des débordements qui aggravent l'écoulement ou en modifient la direction, les propriétaires inférieurs peuvent faire la dénonciation de dommage imminent et être autorisés à faire les réparations aux frais du propriétaire supérieur, conformément aux articles 214 et 222. Si, par accident, le cours des eaux se trouve obstrué sur les fonds inférieurs, le propriétaire supérieur peut faire à ses frais les travaux nécessaires pour rétablir l'écoulement normal; mais il n'en est pas tenu. [C. it., 537, 538.] 239. Les propriétaires ne peuvent faire ni laisser écouler sur les fonds voisins leurs eaux ménagères, ni des eaux altérées par l'industrie ou par l'irrigation; sauf ce qui est dit de la servitude d'aqueduc par l'article 252. Ils ne peuvent non plus disposer leurs toits ou terrasses de telle façon que l'eau pluviale tombe directement sur le fonds voisin. [681.] 240. Le propriétaire d'une source peut en user à son gré et même priver le voisin de l'excédant d'eau qui s'écoulait naturellement chez celui-ci; sauf ce qui est dit à l'article suivant et à l'article 296, et ce qui est statué par les lois administratives sur l'exploitation et la jouissance des eaux minérales. [641, 642.] 241. Si les eaux de la source sont nécessaires aux usages domestiques des habitants d'une commune ou hameau, le propriétaire est tenu de laisser s'écouler la portion de ces eaux qui ne lui est pas utile. La commune peut même, à ses frais, faire exécuter sur le fonds les travaux nécessaires à la réunion et à la conduite des eaux, pourvu qu'ils ne causent pas de dommage permanent au fonds et moyennant indemnité. La commune doit, en outre, une indemnité pour l'usage des eaux, s'il n'a pas été déjà exercé gratuitement pendant trente ans. [643.] 242. Dans les autres cas, si l'excédant des eaux d'une source privée se perd au dehors, sans profiter à personne, le plus proche voisin de la sortie desdites eaux peut réclamer la faculté de les amener chez lui, précairement, en faisant les travaux nécessaires, comme il est dit à l'article précédent. [C. it., 545.] 243. Celui dont la propriété est contiguë à une eau courante ne faisant pas partie du domaine public, d'après l'article 25, et n'appartenant pas non plus à un particulier, peut en user à son passage, pour les usages domestiques, pour l'irrigation de ses terres ou pour son industrie; mais sans en modifier le cours. Si, au contraire, un fonds est traversé par une eau de la même nature, le propriétaire peut en dériver le cours dans l'intérieur de son fonds, pour les mêmes besoins, mais à la charge de la rendre à son cours naturel, à la sortie de son fonds. [644.] Dans l'un et autre cas, les riverains ont le droit de pêche, en se conformant aux règlements locaux. 244. Dans les deux cas prévus à l'article précédent, s'il y a contestation de la part des propriétaires inférieurs auxquels ces eaux peuvent être utiles, les tribunaux civils statueront, en tenant compte des usages locaux et en conciliant les besoins de l'hygiène domestique avec les intérêts de l'agriculture et de l'industrie. [645.] 245. Au surplus, la police générale des eaux de la nature qui précède appartient à l'autorité préfectorale, laquelle peut prescrire les mesures nécessaires, tant pour leur libre écoulement que pour leur conservation et pour celle du poisson. 246. Le curage desdits cours d'eau est à la charge des riverains qui peuvent se concerter et même s'associer à cet effet. A défaut par eux de procéder au curage, aux époques déterminées par l'autorité locale, il y sera procédé, par celle-ci, à leurs frais. Le recouvrement de la part contributoire de chacun se fera de la même manière que pour les autres contributions locales. 247. Un riverain ne peut élever de digues de son côté, s'il en doit résulter un dommage pour le riverain opposé. Si un endiguement reconnu nécessaire à la localité intéresse plusieurs riverains et s'ils ne se concertent pas pour l'exécuter, il pourra y être procédé par l'autorité locale, aux frais des intéressés, comme il est dit ci-dessus. 248. Les dispositions des cinq articles précédents sont applicables aux lacs ou étangs se trouvant dans les mêmes conditions. 249. L'usage et la police des eaux faisant partie du domaine public général ou local sont réglés par l'autorité supérieure ou préfectorale, conformément aux lois administratives. 250. Tout propriétaire qui a le droit d'user d'eaux naturelles ou artificielles situées en dehors de son fonds, peut en exiger, moyennant indemnité, le passage à travers les fonds intermédiaires supérieurs, tant pour l'industrie que pour l'irrigation et les usages domestiques. [Lois fr. des 29 avril 1845, 11 juillet 1847; C. it., 598.] 251. La disposition qui précède s'applique aux prises d'eau concédées par l'administration, quelle que soit leur durée, et à celles faites par les particuliers, soit pour la vie du concessionnaire, soit pour un temps fixe, s'il doit durer encore cinq ans au moins, au moment où le passage est réclamé. [C. it., 604.] 252. Pareillement, les propriétaires des fonds inférieurs sont tenus de fournir le passage, soit jusqu'à la voie publique, soit jusqu'à un égoût ou un cours d'eau public, pour l'écoulement des eaux provenant du drainage ou de l'asséchement des terres submergées, et pour l'évacuation des eaux surabondantes, après leur usage domestique, agricole ou industriel. Si les eaux pour lesquelles le passage est réclamé sont altérées par les usages domestiques, agricoles ou industriels, le passage ne pourra être exigé que souterrainement. [Loi fr. du 10 juin 1854; C. it., 609, 610.] 253. Le passage sera pris, autant que possible, dans les lieux oit il doit être le moins dommageable aux fonds servants. Dans aucun cas, il ne pourra être exigé à travers les bâtiments, ni les cours ou jardins attenant aux habitations. [Ib.; C. it., 598.] 254. Dans tous les cas, l'établissement et l'entretien des travaux nécessaires au passage des eaux seront exécutés aux frais du propriétaire dans l'intérêt duquel ils sont faits. 255. Le propriétaire du fonds servant peut exiger que le passage des eaux, soit pour l'arrivée, soit pour la sortie, se fasse, en tout ou en partie, dans les canaux existant déjà sur son fonds, si leurs dimensions le permettent et si les eaux qui y passent déjà ne sont pas de nature à nuire à celles destinées au fonds dominant. Réciproquement, il peut, sous les mêmes conditions, demander à se servir, pour le passage de ses eaux, des ouvrages faits sur son fonds par le propriétaire du fonds dominant. Dans l'un et l'autre cas, celui qui use des ouvrages faits par l'autre contribue aux dépenses d'établissement et d'entretien, proportionnellement à son avantange. [Ibid.; C. it., 599.] 256. Si un propriétaire ayant le droit d'user d'une eau courante, conformément au 1er alinéa de l'article 243, a besoin d'élever les eaux par un barrage, il peut l'appuyer sur la rive opposée, moyennant une indemnité. Si le propriétaire qui n'a pas fait le barrage a le droit d'user des mêmes eaux, il peut utiliser ledit barrage à son profit, en participant à la dépense, comme il est dit à l'article précédent. [Loi fr. du 11 juillet 1847.] § III. DU BORNAGE. Art. 257. Tous propriétaires voisins peuvent se contraindre respectivement à la délimitation de leurs propriétés contiguës, au moyen de signes indicatifs appropriés, tels que pierres, arbres ou poteaux, d'après l'usage des lieux. [C. fr., 646; C. it. 441.] 258. L'action en bornage n'a pas lieu pour les bâtiments, ni pour les terrains enclos en maçonnerie ou en charpente. Elle n'a pas lieu non plus pour les terrains séparés l'un de l'autre par un chemin ou un cours d'eau publics. 259. L'action en bornage est imprescriptible, tant que les fonds contigus n'ont pas été délimités, soit à l'amiable, soit judiciairement. Néanmoins, si l'un des voisins se prévaut de la prescription acquisitive ou seulement d'une possession annale de tout ou partie du terrain au profit duquel le bornage est réclamé, le demandeur devra préalablement agir en revendication ou en réintégrande. 260. Hors les cas qui précèdent, si les limites sont incertaines ou contestées, le bornage se fait d'après la contenance et les limites portées aux titres de propriété ou, à défaut de titres, d'après les autres preuves ou documents qui peuvent les suppléer. S'il y a contestation sur le droit de propriété, il est statué préalablement, à cet égard, par le tribunal compétent. 261. Dans le cas où ce qui manque à l'un des voisins ne serait pas possédé par l'autre, il y a lieu de mettre en cause les arrière-voisins jusqu'aux limites non contestées; il est alors procédé, contradictoirement avec tous, au bornage commun. S'il se trouve, sur la totalité des fonds, un excédant ou une insuffisance de contenance, le profit ou la perte se répartissent entre tous les fonds, proportionnellement à leur étendue. 262. Le retranchement à opérer en vertu de l'article précédent se fait par voie d'indemnité à fournir, lorsque, pour l'opérer en nature, il serait nécessaire d'entamer des bâtiments ou des enclos tels qu'ils sont prévus à l'article 258. 263. Si le bornage est fait à l'amiable entre toutes les parties intéressées, il en est dressé acte, en telle forme qu'elles jugent à propos, et ledit acte vaut titre définitif pour et contre elles, quant à la contenance et aux limites respectives de leurs fonds. A défaut d'accord mutuel, il est rendu un jugement déterminant lesdites contenances et limites, avec plan annexé; les bornes y sont indiquées avec la mention de leur distance, tant entre elles que par rapport à des points fixes de la localité. 264. Le coût et la pose des pierres, arbres ou poteaux sont, par portions égales, à la charge des voisins auxquels ils servent de limite. Les frais d'arpentage et ceux d'actes ou de procédure sont suppotés par tous les intéressés, proportionnellement à l'étendue de leurs fonds. Toutefois, les frais de procédure spécialement relatifs à une contestation jugée mal fondée sont à la charge de la partie perdante. 265. La compétence et les mitres formes de l'action en bornage sont réglées par la Loi organique des Cours et Tribunaux et par le Code de procédure civile. [L. fr. du 25 mai 1838, art. 6-2°.] § IV. DE LA CLÔTURE. Art. 266. Tout propriétaire peut clore son fonds à la hauteur et avec les matériaux qu'il juge à propos, sauf le minimum prescrit a l'article 267. Si le fonds est soumis à une servitude légale ou du fait de l'homme, autorisant l'entrée ou le passage du voisin, la faculté d'exercer la servitude doit être ménagée. [C. fr., 649; it., 442.] 267. Lorsque des terrains contigus, formant cours ou jardins entre des habitations ou des bâtiments d'exploitation agricole ou industrielle, appartiennent à des propriétaires différents, chacun d'eux peut, en tout lieu, contraindre son voisin à contribuer il une clôture séparative. A défaut d'accord, la clôture ne pourra être exigée qu'en planches minces ou en bambous juxtaposés. La hauteur sera de six pieds, au moins, à partir de la surface de la ligne séparative. Si l'un des fonds forme terrasse au-dessus de l'autre, la clôture sera placée sur ledit fonds et de hauteur seulement il compléter les six pieds, sans pouvoir toutefois être inférieure à trois pieds. 288. Si la clôture a été faite et terminée par l'un des voisins, sans qu'il ait mis l'autre en demeure d'y contribuer, il ne pourra exiger la participation de celui-ci à la dépense. [663.] 269. L'établissement, l'entretien et la réparation se feront à frais communs et jour moitié par chacun. Néanmoins, si l'un des voisins croit dans son intérêt de faire une clôture en matériaux autres ou à une plus grande hauteur que ce qui est prescrit ci-dessus, il en aura toujours la faculté, en payant seul la différence du prix de construction; dans ce cas, l'entretien et la réparation seront à sa charge exclusive. § V. DE LA MITOYENNETÉ. Art. 270. Lorsqu'une clôture, de quelque nature qu'elle soit, a été faite à frais communs et sur la ligne séparative des fonds, soit en vertu de l'obligation déterminée au paragraphe précédent, soit volontairement et d'un commun accord, elle appartient par indivis, avec le sol qui la supporte, à chacun des voisins et est dite mitoyenne. Il en est de même des murs en pierre, en brique ou en maçonnerie séparant les bâtiments respectifs des voisins, des fossés creusés ou des haies, vives ou sèches, plantées à frais communs sur la ligne divisoire des terrains contigus. [C. fr., 653 à 673; C. it., 546 à 569.] 271. Toute clôture ou séparation de terrains ou de bâtiments, de quelque nature et en quelque lieu qu'elle soit, est présumée mitoyenne, comme ayant été faite à frais communs et sur la ligne divisoire, s'il n'y a preuve du contraire en faveur d'un seul des voisins, soit par titre écrit, soit par la prescription de trente ans, ou par un des signes matériels, désignés ci-après, auxquels la loi attache la présomption de non-mitoyenneté. [653.] 272. A défaut de preuve écrite ou de prescription établissant la propriété exclusive d'un des voisins, les signes de non-mitoyenneté, à l'égard des terrains, sont: 1°  Pour les murs en pierre, en brique ou en maçonnerie, l'existence sur un seul côté, soit d'un plan incliné pour l'écoulement de l'eau pluviale, soit de saillies, ouvertures, enfoncements, ouvrages ou ornements quelconques; 2°  Pour les clôtures en planches ou en bambous, la circonstance que les poteaux de soutènement sont exclusivement d'un seul côté; 3°  Pour les fossés, le rejet de la terre d'un seul côté; 4°  Pour les haies vives ou sèches, la circonstance qu'un seul des fonds est clos de tous côtés. [666; Loi du 20 août 1881.] Dans ces quatre cas, la propriété exclusive est présumée appartenir à celui des voisins du côté duquel sont les ouvrages particuliers ou qui est seul entièrement clos. [654.] 273. S'il s'agit d'un mur, soit en pierre en brique ou en maçonnerie, soit en charpente, séparant deux bâtiments d'inégale hauteur, la présomption de mitoyenneté cesse pour la partie dont le mur le plus élevé excède l'autre bâtiment. [653.] La présomption n'a lieu pour aucune partie, si le mur ne soutient qu'un seul bâtiment. 274. S'il se rencontre, tout à la fois, dans une même clôture ou autre ouvrage séparatif de deux fonds, des signes de mitoyenneté et de non-mitoyenneté, les tribunaux apprécieront, d'après les circonstances, si la propriété est commune aux deux voisins ou exclusive pour un seul. 275. La réparation et l'entretien de la séparation mitoyenne sont, à la charge des copropriétaires, par égale portion, à moins que les dégradations ne proviennent du fait d'un seul. Toutefois, s'il ne s'agit pas des clôtures obligatoires d'après l'article 267, chacun peut se soustraire à la charge de l'entretien, en renonçant au droit de mitoyenneté, pourvu qu'il ne s'agisse pas d'un mur soutenant un bâtiment qui lui appartienne et sauf à payer les réparations déjà nécessitées par son fait. [655, 656, 667.] 276. Dans le cas de mitoyenneté, chacun des voisins peut user de la séparation mitoyenne, suivant sa nature et sa destination, de façon toutefois à ne pas en compromettre la solidité. Chacun peut appuyer un bâtiment au mur mitoyen, en y enfonçant des poutres jusqu'aux trois quarts de son épaisseur, en y adossant une cheminée ou en y faisant passer des tuyaux pour la fumée, l'eau ou le gaz, ou pour les autres usages domestiques ou industriels, si la nature et l'épaisseur du mur le permettent; mais, il ne peut y pratiquer d'ouvertures, ni même de simples enfoncements pour l'usage des appartements. [657, 675.] Tout copropriétaire peut aussi exhausser le mur mitoyen, si la solidité du mur le permet, ou en faisant à ses frais les travaux de confortation; dans ce cas. la partie exhaussée n'est pas mitoyenne. [658, 652.] S'il s'agit d'un fossé mitoyen, chacun des voisins peut y conduire les eaux pluviales, industrielles ou ménagères, si le fossé a une pente suffisante pour éviter une stagnation nuisible. S'il s'agit d'une haie vive, chacun profite pour moitié de la taille et peut demander l'abattage des arbres à haute tige qui s'y trouveraient. 277. Si un mur de séparation, en pierre, en brique ou en maçonnerie, a été construit par un seul des voisins, l'autre peut toujours en acquérir la mitoyenneté, en tout ou partie, en payant la moitié de la valeur du terrain, des matériaux et de la main-d'œuvre, au prix qu'ils valent alors. [661; C. it., 571.] Il en est de même pour l'exhaussement du mur opéré conformément au 3e alinéa de l'article précédent. [660.] Celui qui a ainsi acquis la mitoyenneté d'un mur peut en user comme il est dit à l'article précédent; mais, il ne peut faire fermer les ouvertures qui s'y trouvent, si elles ont été établies comme servitudes de vue par le fait de l'homme. La présente disposition n'est pas applicable aux koura ou do-zô. § VI. DES VUES ET DES JOURS DE TOLÉRANCE SUR LA PROPRIÉTÉ D'AUTRUI. Art. 278. Les bâtiments ne pourront avoir de vues droites ou directes sur la propriété d'autrui, au moyen de fenêtres d'aspect, balcons ou vérandas (engawa), s'il n'y a une distance d'au moins trois pieds de la ligne séparative des deux fonds. [678; C. it., 587.] Est considérée comme vue droite celle qui s'obtient d'un bâtiment ou d'un ouvrage parallèle à la ligne séparative ou qui ne s'en écarte que d'un angle de 45 degrés (ou de 1/8e du cercle). Les autres vues, dites obliques ou par côté, obtenues par un angle de 46 à 90 degrés, pourront être établies à un pied de la ligne séparative. [679.] La distance se calcule, dans les deux cas, entre la ligne séparative et la partie la plus avancée des ouvrages donnant la vue. 279. Si la distance prescrite à l'article précédent ne peut être observée sans inconvénients, les ouvertures devront être masquées par un auvent, sans toutefois que ledit auvent puisse avancer au-dessus de la ligne séparative. En cas d'impossibilité d'établir un auvent, il ne pourra être pratiqué que des jours dits de tolérance, dont la partie inférieure sera à six pieds au moins au-dessus du plancher, avec châssis ou grillage fixe, en fer ou en bois, dont les mailles auront un pouce d'écartement au plus. [676, 677.] Le propriétaire voisin pourra même, dans ce cas, exiger un auvent, s'il consent à ce que ledit auvent excède la ligne séparative d'un pied ou davantage. 280. Les restrictions apportées par les deux articles précédents à la liberté des vues ou jours cessent lorsque la partie du fonds voisin faisant face aux constructions est elle-même une construction sans ouvertures. VII. DES DISTANCES REQUISES POUR CERTAINS OUVRAGES. Art. 281. Le propriétaire qui veut creuser dans son fonds, soit un puits ou une citerne, soit une fosse pour recevoir des eaux ménagères ou des matières fécales ou stercorales, doit laisser une distance d'au moins six pieds de la ligne séparative; sans préjudice des travaux nécessaires pour empêcher l'éboulement des terres ou les infiltrations. [674; C. it., 573.] La distance sera réduite à trois pieds, s'il s'agit d'une cave sèche et couverte. S'il ne s'agit que d'une rigole, d'un caniveau ou d'un simple fossé, destinés au passage des eaux, la distance devra être égale à la moitié au moins de leur profondeur, sans qu'elle doive néanmoins excéder trois pieds; le fossé devra, en outre, être taillé en talus du côté de la ligne séparative ou soutenu par un revêtement en pierre ou en bois. [C. it., 575 à 577.] 282. Il n'est pas permis de planter ou d'avoir à une distance moindre de six pieds de la ligne séparative des arbres ayant plus de trois ken de hauteur. Les arbres ayant moins de trois ken et plus d'un ken de hauteur devront être à la distance de deux pieds. Les autres arbres, arbustes ou arbrisseaux pourront joindre immédiatement la ligne séparative. Dans tous les cas, le voisin pourra requérir le propriétaire desdits arbres d'élaguer les branches qui dépasseraient la ligne séparative; il pourra lui-même couper les racines qui pénétreraient dans son fonds. [C. fr., nouv. art. 671 à 673; C. it., 579 à 582.] 283. Les dispositions des deux articles précédents ne sont pas obligatoires s'il existe des usages locaux différents, anciens et non contestés, lesquels seront observés. Elles sont d'ailleurs applicables, lors même que la séparation des deux fonds serait mitoyenne. 284. Les conditions requises, dans l'intérêt du voisinage, pour l'exercice des industries dangereuses, insalubres ou incommodes, sont déterminées par les lois administratives. DISPOSITION COMMUNE AUX PARAGRAPHES PRÉCÉDENTS. Art. 285. Les charges et conditions imposées aux propriétaires par la présente Section sont applicables, activement et passivement, à l'Etat, aux départements et aux communes, pour leurs biens privés ou patrimoniaux. Elles ne s'appliquent pas, passivement, aux biens du domaine public, mais elles leur profitent. [C. it., 556.] SECTION II. DES SERVITUDES ÉTABLIES PAR LE FAIT DE L'HOMME. § Ier. DE LA NATURE DES SERVITUDES DU FAIT DE L'HOMME ET DE LEURS DIVERSES ESPÈCES. Art. 286. Les propriétaires voisins peuvent établir toutes espèces de servitudes foncières, au profit et à la charge de leurs fonds, respectivement, pourvu qu'elles ne soient pas contraires à l'ordre public. Ne sont pas considérées comme servitudes fonciéres les charges qui exigent, principalement, le travail individuel d'un propriétaire ou de quelque personne placée sur son fonds, ni celles qui profitent, principalement, à la personne d'un propriétaire ou à ceux qu'il se substitue: les premières pourront valoir comme droits personnels à des services, les secondes, comme droit réels d'usage ou de bail; sans préjudice de ce qui est dit à l'article 305, 2e alinéa. [686.] 287. Les servitudes foncières restent attachées accessoirement aux fonds, tant activement que passivement, en quelques mains qu'ils passent. Les servitudes actives ne peuvent être cédées, louées ni hypothéquées séparément du fonds dominant; elles ne peuvent non plus être grevées d'une autre servitude. 288. Les servitudes sont indivisibles, en ce sens que si les fonds appartiennent à plusieurs par indivis, l'un d'eux ne peut, pour sa part, priver le fonds dominant de la servitude, ni en affranchir le fonds servant. De même, en cas de partage ou de cession partielle des fonds, les servitudes affectent indivisiblement chaque partie du fonds servant ou profitent à chaque partie du fonds dominant; sauf le cas où elles ne pourraient s'exercer utilement que sur une partie du fonds servant ou ne procureraient d'avantage qu'à une partie du fonds dominant. [709, 710; C. it., 639, 644.] 289. Le propriétaire du fonds dominant peut exercer les actions confessoires, tant possessoires que pétitoires, au sujet des servitudes qu'il soutient lui appartenir. Réciproquement, le propriétaire du fonds prétendu servant peut exercer les actions négatoires, tant possessoires que pétitoires, pour prévenir ou faire cesser l'exercice des servitudes qu'il conteste. Dans l'un et l'autre cas seront observées les règles et distinctions établies au Chapitre de la Possession. Les droits, actions et obligations de l'usufruitier et du preneur à bail, au sujet des servitudes, sont établis aux articles 69, 70. 99, 144 et 151. 290. Les dispositions des trois articles précédents sont applicables aux servitudes établies par la loi. 291. Les servitudes sont: 1°  Continues ou discontinues, 2°  Apparentes ou non apparentes, 3°  Positives ou négatives. Les unes et les autres s'établissent, s'exercent et s'éteignent conformément aux trois paragraphes ci-après. 292. Les servitudes août continues, lorsqu'elles procurent au fonds dominant une utilité permanente ou grèvent sans interruption le fonds servant, par la seule disposition des lieux et sans qu'il soit besoin de la coopération de l'homme. Elles sont discontinues, lorsque, pour être utiles au fonds dominant, elles ont besoin du fait actuel de l'homme. [688.] 293. Les servitudes sont apparentes, lorsqu'elles se révèlent par des ouvrages extérieurs ou par des signes visibles. Elles sont non apparentes dans le cas contraire. [689.] 294. Les servitudes sont positives: 1°  Lorsqu'elles autorisent le propriétaire d'un fonds à tirer quelque avantage du fonds d'autrui; 2°  Lorsqu'elles l'autorisent à faire sur son propre fonds quelque ouvrage que la loi interdit, en général, dans l'intérêt des voisins. Elles sont négatives: 1°  Lorsque le propriétaire d'un fonds peut interdire au voisin de faire sur son propre fonds un des actes permis, en général, aux propriétaires; 2°  Lorsqu'un propriétaire peut s'abstenir de faire ou de souffrir sur son propre fonds un des actes que le droit commun ordonne d'y accomplir ou d'y permettre dans l'intérêt des voisins. § II. DE L'ÉTABLISSEMENT DES SERVITUDES. Art. 295. Toutes les servitudes peuvent être établies par convention entre les propriétaires ou par testament. [690, 691.] Dans l'un et l'autre cas seront observées les règles ordinaires des aliénations de droits réels immobiliers, soit à titre gratuit, soit à titre onéreux, pour leur validité, tant entre les parties qu'à l'égard des tiers. 296. Les servitudes continues et apparentes peuvent être acquises par la prescription, au moyen d'une possession de la nature et la durée requises pour l'acquisition de la propriété immobilière. [Ibid.] S'il s'agit d'une prise d'eau tirée du fonds voisin, le temps de la prescription ne compte qu'à partir du moment où le propriétaire qui l'invoque a fait, soit sur son fonds, soit sur le fonds servant, des ouvrages apparents destinés à recueillir et conduire les eaux pour son avantage. [642; C. it., 637.] 297. Les servitudes continues et apparentes sont considérées comme tacitement établies par la destination du propriétaire, lorsqu' entre deux fonds actuellement séparés, mais ayant primitivement appartenu à un seul propriétaire, celui-ci avait établi ou laissé subsister une disposition des lieux constitutive de cette sorte de servitude, et si, lors de la séparation des fonds, il n'a été rien fait ni stipulé qui modifie cet état de choses. [692, 693, 694; C. it., 632, 633.] 298. Les servitudes discontinues et les servitudes non apparentes ne peuvent être établies que par l'un des deux titres prévus à l'article 295. [691.] 299. Le propriétaire du fonds prétendu dominant sera dispensé de représenter un titre originaire constitutif de la servitude ou d'en prouver directement l'acquisition par prescription ou par destination du propriétaire, s'il peut produire un acte émanant du propriétaire du fonds servant ou de l'un de ses prédécesseurs et portant reconnaissance de la servitude, comme constituée antérieurement par l'un des trois modes ci-dessus énoncés. [697; C. it., 634.] § III. DE L'EFFET DES SERVITUDES. Art. 300. Le droit de servitude légalement acquis emporte les droits et facultés accessoires nécessaires à son exercice, d'après sa nature. [696; C. it., 639.] Au surplus, si la servitude a été établie par titre, les règles générales sur l'interprétation des conventions et des testaments seront observées; si elle a été acquise par la prescription, son étendue se mesure sur celle de la possession effective; si la servitude résulte de la destination du propriétaire, son étendue se détermine d'après l'intention présumée du constituant. 301. Dans le cas d'une servitude de passage, de prise d'eau, continue ou discontinue, de pacage ou autre, permettant de tirer des substances du fonds d'autrui, si le titre constitutif ou une convention postérieure ne détermine pas les quantités qui pourront être prises, ni le temps, le lieu ou le mode d'exercice de la servitude, chacune des parties pourra toujours demander au tribunal de les fixer contradictoirement avec l'autre. Dans ce règlement, le tribunal tiendra compte des besoins respectifs des deux fonds et s'éclairera des résultats de l'exercice antérieur de la servitude. 302. Le propriétaire du fonds assujetti à une prise d'eau n'est responsable du manque d'eau que si elle résulte de son fait. En cas d'insuffisance de l'eau pour les besoins des deux fonds, la priorité appartient aux usages personnels et domestiques, ensuite, aux besoins agricoles avant les besoins industriels; le tout, proportionnellement à l'importance des fonds. S'il y a plusieurs fonds dominants, ils concourent à l'usage de l'eau pour les besoins domestiques; à l'égard des besoins agricoles et industriels, la préférence appartient à celui des fonds dont le droit est antérieur en date. [C. it., 650 à 652.] 303. Celui auquel appartient une servitude ne peut changer le mode, le temps ni le lieu de son exercice régulièrement fixés, sans le consentement du propriétaire du fonds servant, à moins que celui-ci n'en doive éprouver aucun dommage. De son côté, si le propriétaire du fonds servant a un intérêt légitime à un pareil changement, sans que le propriétaire du fonds dominant en éprouve aucun dommage, il peut le demander et l'obtenir. [701, 702; C. it., 645.] 304. Si l'établissement de la servitude nécessite certains ouvrages ou travaux sur l'un des deux fonds, ils sont à la charge du propriétaire du fonds dominant, à moins qu'il n'ait été stipulé dans l'acte constitutif qu'ils seront à la charge du constituant. [697, 698.] 305. L'entretien et la réparation des ouvrages ou travaux relatifs à l'exercice de la servitude sont également à la charge du propriétaire du fonds dominant, à moins que les réparations ne soient devenues nécessaires par la faute du propriétaire du fonds servant. [Ib.] On peut aussi convenir que l'entretien et la réparation seront à la charge du propriétaire du fonds servant, même sans qu'il y ait faute de sa part; mais, dans ce cas, celui-ci peut toujours s'affranchir de ladite charge en abandonnant au propriétaire du fonds dominant la partie du fonds servant sur laquelle porte la servitude. [699.] 306. Le propriétaire du fonds servant ne perd pas le droit d'exercer toutes les facultés légales inhérentes à la propriété, en tant qu'il n'en résulte aucun obstacle à la servitude ni aucune diminution de son utilité. Il peut même utiliser les ouvrages établis sur son fonds pour l'exercice de la servitude, en contribuant aux dépenses d'établissement ou d'entretien, proportionnellement à l'utilité respective qu'il en tire et à l'aggravation de frais qui en peut résulter. § IV. DE L'EXTINCTION DES SERVITUDES. Art. 307. Les servitudes s'éteignent: 1°  Par l'expiration du laps de temps pour lequel elles ont été constituées, 2°  Par In révocation, la résolution ou la rescision du titre constitutif ou des droits du constituant, 3°  Par l'expropriation du fonds servant pour cause d'utilité publique, 4°  Par la renonciation, 5°  Par la confusion, 6°  Par le non-usage pendant trente ans, 7°  Par la prescription acquisitive de la liberté du fonds servant au profit d'un tiers-détenteur. [703 à 710.] 308. La renonciation à la servitude doit être expresse; toutefois, si les ouvrages exécutés sur le fonds servant pour l'exercice d'une servitude continue ont été détruits ou mis hors d'usage, du consentement exprès du propriétaire du fonds dominant et sans réserves pour l'avenir, la servitude est réputée éteinte par renonciation. La renonciation n'est valable que si le renonçant a la capacité d'aliéner ses droits immobiliers. 309. La servitude est éteinte par confusion, lorsque le fonds dominant et le fonds servant sont réunis dans les mêmes mains; toutefois, si l'acte qui a opéré la réunion du fonds est judiciairement révoqué, résolu ou rescindé, la servitude est considérée comme n'ayant jamais été éteinte. S'il s'agit d'une servitude continue et apparente et que, la disposition des lieux étant restée la même, les fonds soient de nouveau séparés à une époque quelconque et par quelque cause que ce soit, la servitude renaît, conformément à l'article 297. 310. La servitude est éteinte par le non-usage, lorsque le propriétaire du fonds dominant a, volontairement ou non, laissé écouler trente ans sans exercer la servitude. Les trente ans se comptent à partir du dernier acte d'usage, s'il s'agit d'une servitude discontinue, et à partir du moment où il est survenu un obstacle matériel au fonctionnement spontané de la servitude, si elle est continue. [706, 707.] Dans l'un et l'autre cas, si l'obstacle à l'usage de la servitude provient d'un accident arrivé sur le fonds servant, le propriétaire du fonds dominant peut se faire autoriser à rétablir, à ses frais, l'ancien état de choses; le rétablissement se fera aux frais du propriétaire du fonds servant, si l'obstacle provient de son fait. 311. Si le fonds dominant est indivis entre plusieurs, l'exercice de la servitude par un seul des co-propriétaires conserve le droit des autres. [709.] Au surplus, les causes qui suspendent ou interrompent le cours de la prescription libératoire sont applicables au non-usage des servitudes. 312. La servitude est éteinte par prescription, lorsque le fonds servant a été acquis et possédé par un tiers comme libre de la servitude et que celle-ci n'a pas été exercée pendant le temps requis pour la prescription acquisitive des droits immobiliers. 313. L'étendue des avantages conférés par la servitude peut être diminuée quant au mode, quant au temps et quant au lieu de son exercice, par l'effet du non-usage ou de la prescription. [708.] DEUXIÈME PARTIE. DES DROITS PERSONNELS OU DE CRÉANCE ET DES OBLIGATIONS EN GÉNÉRAL. DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES. Art. 314. Le droit personnel ou de créance, tel qu'il est défini à l'article 3, est toujours corrélatif à une obligation. L'obligation est un lien de droit positif ou naturel qui astreint une ou plusieurs personnes à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose, envers une ou plusieurs autres personnes déterminées. Celui qui est obligé s'appelle débiteur; celui au profit duquel l'obligation existe s'appelle créancier. 315. Les obligations de droit positif, ou civiles, sont celles à l'exécution desquelles le débiteur peut être contraint par toutes les voies de droit et d'autorité: spécialement, par voies d'action en justice. Les obligations naturelles n'engendrent pas d'action judiciaire: leurs effets sont réglés en Appendice à la présente Deuxième Partie. La loi n'intervient pas dans l'exécution des obligations purement morales ni dans l'observation des devoirs religieux. CHAPITRE PREMIER. DES CAUSES OU SOURCES DES OBLIGATIONS. DISPOSITIQN PRÉLIMINAIRE. Art. 316. Les obligations naissent: 1°  Des conventions ou des contrats, 2°  D'un enrichissement indû ou sans cause légitime, 3°  D'un dommage injuste, causé volontairement ou par imprudence, 4°  Des dispositions de la loi. SECTION PREMIÈRE. DES CONVENTIONS ET DES CONTRATS. Art. 317. La convention est l'accord de deux ou plusieurs volontés, dans le but de créer, de modifier ou d'éteindre un droit, soit réel, soit personnel. La convention prend le nom particulier de contrat, lorsqu'elle a pour objet principal la création d'un droit personnel ou d'une obligation. [C. civ. fr., 1101; C. it., 1098.] § I. DES DIVERSES ESPÈCES DE CONVENTIONS OU CONTRATS. Art. 318. Les contrats sont bilatéraux ou unilatéraux. Le contrat est bilatéral ou synallagmatique, lorsque les parties s'obligent réciproquement, ou l'une envers l'autre. Il est unilatéral, lorsqu'une ou plusieurs parties s'obligent envers une ou plusieurs autres, sans réciprocité. [1102, 1103.] 319. Les contrats sont à titre onéreux ou à titre gratuit. Le contrat est à titre, onéreux ou intéressé quand chacune des parties fait un sacrifice en faveur de l'autre ou en faveur d'un tiers; Il est à titre gratuit ou de bienfaisance, quand l'une des parties reçoit un avantage de l'autre, sans en fournir aucun, de son côté. [1105, 1106; C. it., 1101.] 320. Les contrats sont consensuels ou réels. Le contrat est consensuel, quand il n'exige pour sa formation que le consentement des parties; Il est réel, quand il exige, outre le consentement, la livraison de la chose qui en fait l'objet. 321. Les contrats sont solennels ou non solennels. Le contrat est solennel, quand le consentement doit y être donné dans un acte public ou authentique. Il est non solennel dans tous les autres cas. 322. Les contrats sont fermes ou aléatoires. Le contrat est ferme, lorsque, dès la convention, son existence et ses effets sont certains; Il est aléatoire, lorsque son existence ou tout ou partie de ses effets sont subordonnés à un événement qui dépend du hasard. [1104.] 323. Les contrats sont principaux ou accessoires. Le contrat est principal, lorsque son existence est indépendante de celle d'un autre contrat; Il est accessoire dans le cas contraire. La nullité du contrat principal entraine celle du contrat accessoire, à moins que le contrat accessoire n'ait eu pour but de suppléer à la nullité du contrat principal. [1227.] La nullité du contrat accessoire n'entraîne celle du contrat principal que si les parties avaient considéré les deux contrats comme indivisibles. 324. Les contrats sont nommés ou innommés. Les contrats nommés sont ceux qui ont une dénomination propre et sont l'objet de dispositions particulières dans le présent Code ou dans le Code de Commerce; ils sont aussi régis par les règles de la présente IIe Partie, pour tous les cas à l'égard desquels il n'est pas autrement statué par les dispositions qui les concernent. Les contrats innommés sont soumis aux présentes règles générales; les règles particulières des contrats nommés peuvent aussi être appliquées aux contrats innommés qui ont le plus d'analogie avec les premiers. [1107.] § II. DES CONDITIONS D'EXISTENCE ET DE VALIDITÉ DES CONVENTIONS. Art. 325. Quatre conditions sont nécessaires à l'existence des conventions en général: 1°  Le consentement des parties ou de leur représentant, 2°  Un objet certain ou déterminé, 3°  Un objet dont les particuliers aient la disposition, 4°  Une cause vraie et licite. [1108,1126 à 1131.] Les conventions ou contrats solennels n'existent que si, en outre, la solennité requise a été observée, et les contrats réels, s'il y a eu tradition de la chose qui doit être restituée. 326. Indépendamment des conditions nécessaires à l'existence de la convention, deux autres conditions sont requises pour sa validité: 1°  L'absence d'erreur ou de violence viciant le consentement, [1109.] 2°  La capacité des parties ou leur valable représentation. [1108.] La lésion ne vicie les conventions que dans les cas déterminés par la loi. [1118, 1313.] 327. Le consentement est l'accord des volontés de toutes les parties qui figurent dans la convention comme intéressées. Le défaut de consentement de l'une d'elles empêche la convention de se former, même entre les autres; à moins qu'il n'y ait preuve d'une intention différente. 328. Le consentement peut être donné par écrit, verbalement, ou même par signe; pourvu, dans ce dernier cas, qu'il y ait eu obstacle à une autre forme d'adhésion et qu'il y ait preuve certaine de la volonté parfaite de la partie. Le consentement peut aussi être tacite, d'après les circonstances. 329. Une offre ou proposition peut être acceptée tant qu'elle n'est pas rétractée, à la connaissance de celui à qui elle a été adressée. Si celui qui a fait l'offre ou la proposition vient à mourir ou à être frappé d'incapacité de contracter. l'acceptation de l'autre partie est valable tant que ces faits ne sont pas parvenus à sa connaissance. Si un délai a été assigné pour l'acceptation, l'offre prend fin par la seule expiration de ce délai. Les erreurs postales ou télégraphiques sont à la charge de l'expéditeur, sauf son recours contre l'administration, s'il y a lieu. 330. Il n'y a pas de consentement, lorsque, par suite d'une erreur, les parties n'ont pas entendu faire la même convention, ou n'ont pas eu en vue le même objet ou la même cause. L'erreur sur le motif de la convention n'est jamais, par elle-même, une cause de nullité; sauf ce qui sera dit à l'égard du dol pratiqué par l'une des parties. L'erreur sur la personne du co-contractant entraîne la nullité absolue de la convention, lorsque la considération de la personne en a été la cause déterminante, comme dans le contrat de bienfaisance. [1110, 2e al.] La convention est seulement annulable, pour erreur sur la personne, si la considération de celle-ci n'a été qu'une cause secondaire de la convention, comme dans les contrats à titre onéreux qui entraînent le risque de l'insolvabilité du débiteur ou l'obligation de conserver la chose. [Ib.] 331. L'erreur sur la chose vicie seulement le consentement, lorsqu'elle porte sur une ou plusieurs des qualités principales que la partie a cru exister dans la chose et qui ont contribué à la déterminer à stipuler ou promettre, à acquérir ou aliéner cette chose. Les qualités substantielles des choses sont présumées, jusqu'à preuve contraire, avoir été considérées comme qualités principales, dans l'intention des parties. [1110, 1er al.] Les qualités non-substantielles, au contraire, ne sont considérées comme principales que si l'intention des parties a été exprimée à cet égard ou résulte clairement des circonstances. Il en est de même des qualités abstraites ou métaphysiques des choses, telles que leur ancienneté, leur provenance ou leur destination. L'erreur de calcul, de nom, de date ou de lieu est réglée par l'article 582. 332. L'erreur de droit exclut ou vicie le consentement, comme l'erreur de fait, si elle a porté, soit sur la nature, sur les effets légaux ou sur la cause de la convention, soit sur les qualités légales de la chose ou de la personne, lorsqu'elles ont été déterminantes, en tout ou en partie. Toutefois, les tribunaux n'admettront la nullité de la convention pour erreur de droit qu'avec une grande réserve et si l'erreur est excusable, d'après les circonstances. L'erreur de droit ne sera jamais admise pour relever les parties contre une pénalité, contre une déchéance légale résultant du temps ou contre une nullité provenant de la violation des formes prescrites pour les actes, ni, généralement, quand il s'agira de l'ignorance de dispositions légales ou réglementaires intéressant l'ordre public. [voy. 1356, 4e al., 2052, 2e al.] 333. Le dol n'exclut ou ne vicie le consentement que s'il a entrainé l'une des erreurs ayant cet effet par elles-mêmes, comme il est dit aux trois articles précédents. Dans les autres cas, il ne peut donner lieu qu'à une action en dommages-intérêts contre celui qui l'a pratiqué. Toutefois, si l'auteur du dol est l'autre partie contractante elle-même et si les manœuvres frauduleuses ont été telles que sans elles la partie trompée n'aurait pas contracté, celle-ci pourra obtenir l'annulation de la convention, à titre de réparation, même avec dommages-intérêts, s'il y a lieu. [1116, 1er al.] Dans ce cas, l'annulation de la convention ne pourra préjudicier aux tiers de bonne foi. 334. La violence exclut le consentement, si l'adhésion de l'une des parties à la convention lui a été arrachée par des voies de fait auxquelles elle n'a pu résister. Il en est de même si un engagement excessif ou téméraire a été contracté ou si une aliénation déraisonnable a été faite par une personne, pour échapper à un péril imminent, même provenant d'une force majeure qui lui ôtait toute faculté de délibérer. La violence n'est qu'un vice du consentement, lorsque les voies de fait, les menaces ou le péril n'étaient pas irrésistibles, mais ont déterminé la partie à contracter, pour éviter un mal plus considérable, immédiat ou prochain, soit pour sa personne ou pour ses biens, soit pour la personne ou les biens d'autrui. [1112, 1er al.] 335. Si le tiers dont la personne ou les biens sont mis en danger par les violences ou les menaces est le conjoint, le parent ou l'allié en ligne directe du contractant, la violence est toujours considérée comme dirigée contre la partie elle-même. [1113.] Pour les autres personnes, parentes, alliées ou étrangères, les tribunaux apprécieront, d'après les circonstances, l'influence que les menaces faites contre celles-ci auront eue sur le consentement du contractant. [C. it. 1113.] 336. La violence, avec les distinctions faites ci-dessus, exclut ou vicie le consentement, sans qu'il y ait à distinguer si elle provient du fait de l'autre partie ou du fait d'un tiers, même sans complicité. [1111.] 337. Dans les cas où la partie violentée peut obtenir la nullité du contrat, elle peut aussi le maintenir, en demandant seulement des dommages-intérêts contre l'auteur de la violence. Si la violence n'a pas été déterminante de la convention, mais a seulement fait accepter des conditions désavantageuses, la convention sera maintenue, sauf indemnité. 338. Dans tous les cas de violence, le tribunal prendra en considération l'âge, le sexe, l'état physique et mental, et la condition respective des personnes. [1112, 2e al.] Toutefois, la seule crainte révérentielle des descendants envers les ascendants et celle de la femme envers le mari ne suffisent pas pour faire annuler la convention. [1114.] 339. L'erreur, la violence, le dol, la lésion, l'incapacité ne se présument pas: elles doivent être prouvées par celui qui les invoque. [1116, 2e al.] Les moyens de nullité qui appartiendraient aux deux parties ne se détruisent pas réciproquement, lors même qu'ils seraient fondés sur des torts respectifs; sauf la compensation des dommages-intérêts, s'il y a lieu. 340. L'action en nullité, dans les cas prévus aux articles précédents, n'appartient qu'aux personnes incapables ou dont le consentement a été vicié. [1125, 2e al.] Néanmoins, l'incapacité résultant des condamnations pénales peut être invoquée par ceux qui ont traité avec le condamné. [C. it., 1107.] 341. Si la convention annulable n'a pas été attaquée dans le délai fixé au Chapitre III, Section VII, elle est considérée comme confirmée tacitement. Les autres cas de confirmation tacite et les formes de la confirmation expresse sont réglés à la même Section. [1115.] 342. Une convention peut avoir pour objet des choses futures et dont l'existence est incertaine; dans ce cas, le promettant est tenu de ne rien faire pour empêcher ou restreindre la réalisation de sa promesse; il ne doit non plus rien omettre ou négliger de ce qui peut la favoriser. Néanmoins, on ne peut faire aucune convention donnant ou ôtant des droits à une succession non ouverte, même avec le consentement de celui de la succession duquel il s'agit, si ce n'est dans les cas formellement exceptés par la loi. [1130.] 343. La convention est nulle, si elle a pour objet un acte ou une abstention illicite ou impossible. [1172.] Est considérée comme promesse d'un fait impossible au promettant celle du fait ou de l'abstention, même licite ou possible, d'un tiers sur lequel le promettant n'a pas autorité. [1119.] On peut néanmoins se porter expressément garant du fait ou de l'abstention d'un tiers; auquel cas, le promettant est soumis aux obligations de la caution. [1120; C. it., 1129.] On peut aussi se soumettre au payement d'une clause pénale, pour le cas où le tiers n'exécuterait pas la promesse faite pour lui. Si le promettant s'est engagé seulement à procurer la ratification de l'engagement pris par lui au nom d'un tiers, il est déchargé de son obligation, dès que le tiers a ratifié. [Ib.; ib.] 344. La convention est nulle pour défaut de cause, quand le stipulant n'y a pas d'intérêt légitime et appréciable. [1131.] La stipulation est considérée comme sans intérêt appréciable pour le stipulant, lorsqu'elle est faite au profit d'un tiers et si elle n'est pas accompagnée d'une clause pénale. [1119.] Toutefois, la stipulation dans l'intérêt d'autrui est valable, si elle est la condition accessoire d'une stipulation que l'on fait pour soi-même ou d'une donation faite au promettant. [1121, 1er al.] Dans ces deux cas, l'inexécution de la condition ne donne au stipulant qu'une action en résolution de la convention ou en payement de la clause pénale stipulée. 345. Une stipulation principale ou accessoire peut toujours être faite au profit d'un ou plusieurs des héritiers du stipulant, dans la mesure et sous les conditions où la loi des Successions permet d'avantager un héritier au préjudice des autres. Pareillement, une promesse principale ou accessoire peut être faite à la charge d'un ou plusieurs des héritiers du promettant. [1221-4°.] 346. La stipulation faite dans l'intérêt d'autrui, aux cas prévus par les deux articles précédents, peut être révoquée au profit du stipulant ou transférée par lui à une autre personne, tant qu'elle n'a pas été acceptée par le bénéficiaire. [1121, 2e al.] 347. Soit que la cause ait été exprimée ou non dans l'acte destiné à constater la convention, c'est au défendeur à prouver que la cause n'existe pas ou qu'elle est fausse ou illicite; il peut d'ailleurs, si la cause n'a pas été exprimée, sommer le créancier de déclarer sur quelle cause il prétend la convention fondée, sauf à la contester, s'il y a lieu. [1132; C. it., 1121.] § III. DE L'EFFET DES CONVENTIONS. I. DE L'EFFET DES CONVENTIONS A L'ÉGARD DES PARTIES ET DE LEURS AYANT-CAUSE. Art. 348. Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que du consentement mutuel des parties, sauf dans les cas où la loi autorise la révocation par la volonté d'une seule. [1134, 1er et 2e al.] 349. On peut, par des conventions particulières, déroger à la loi commune, y ajouter ou en retrancher des effets, pourvu qu'il ne soit dérogé ni à l'ordre public ni aux bonnes mœurs. [6, 1387.] 350. Les conventions produisent non seulement les effets que les parties ont exprimés et ceux qui étaient compris dans leur intention tacite, mais encore ceux que l'équité, l'usage ou la loi y attachent d'après leur nature. [1135, 1160.] Elles doivent être exécutées de bonne foi. [1134, 3e al.] 351. La convention de donner, à titre onéreux ou gratuit, une chose individuellement déterminée ou corps certain, soit mobilière soit immobilière, transfère la propriété au stipulant, immédiatement et indépendamment de la tradition due; sans préjudice de ce qui sera ultérieurement statué au sujet de la condition suspensive dont la convention peut être affectée. [1138, 1583.] 352. La convention de donner des choses fongibles ou appréciées au poids, au nombre ou à la mesure, oblige le promettant à transférer au stipulant la propriété des choses promises, dans la nature, la qualité et la quantité convenues; dans ce cas, la propriété sera transférée par la tradition ou par une détermination faite contradictoirement entre les parties. [1585.] 353. Dans le cas des deux articles précédents, la chose donnée ou promise doit être livrée par les soins et aux frais du promettant, au temps et au lieu convenus. [1136.] Les frais de l'enlèvement sont à la charge du stipulant. [1608.] Ceux de l'acte instrumentaire sont à la charge des deux parties, si l'acte est onéreux, et du bénéficiaire, si l'acte est gratuit. [1593.] La délivrance des immeubles se fait au moyen de la remise des titres et de l'évacuation des lieux; sans préjudice de ce qui est dit, à l'article 203, de la tradition de brève main et du constitut possessoire. [1605.] La délivrance des créances se fait par la remise des titres. [1689.] Si aucun terme n'a été fixé pour la délivrance, elle est immédiatement exigible. Si le lieu n'en a pas été désigné, elle se fait au lieu où était la chose lors de la convention, s'il s'agit d'un corps certain, et au lieu où la détermination des objets a été faite, s'il s'agit de choses fongibles; dans les autres cas, elle se fait au domicile du débiteur. [1217.] 354. Jusqu'à la livraison d'un corps certain, le promettant doit conserver la chose avec les soins d'un bon administrateur, à peine de dommages-intérêts, en cas de négligence ou de mauvaise foi. [1136, 1137.] Toutefois, s'il s'agit d'une aliénation gratuite, le promettant n'est tenu d'apporter à la garde de la chose que les mêmes soins qu'il apporte aux choses qui lui appartiennent. Les autres cas où le débiteur ne doit que les mêmes soins sont réglés au sujet des contrats qui comportent cette exception. [Ibid.] 355. Dans tous les cas où la chose objet de la convention de donner est individuellement déterminée, les pertes et détériorations provenant de cas fortuits ou de force majeure sont au détriment du stipulant, à moins que le promettant ne se soit chargé des risques et sauf ce qui est dit au sujet de la condition suspentive; pareillement, tous les accroissements de la chose sont à son profit. Toutefois, la perte retombe sur le promettant, s'il est en demeure de livrer et si la chose n'eût pas nécessairement péri ou subi de dégradations au cas où elle eût été livrée. [1138, 1148, 1302.] 356. Le promettant ou tout autre débiteur est mis ou constitué en demeure: soit par une demande en justice, par une sommation ou un commandement en bonne et due forme faits après l'échéance du terme fixé, soit par la seule échéance dudit terme, si telle est la disposition expresse de la loi ou de la convention, soit enfin par le fait que le promettant a laissé passer l'époque après laquelle il savait que l'exécution ne pouvait plus être utile au stipulant. [1239, 1145, 1146.] 357. Les effets de la convention portant obligation de faire ou de ne pas faire sont réglés à l'article 402. 358. Les conventions profitent ou nuisent aux héritiers et autres ayant-cause généraux des parties, sauf les cas où il en est décidé autrement, soit par la loi, soit par la convention. [1122.] 359. Les créanciers peuvent faire valoir les droits et exercer les actions tant réelles que personnelles appartenant à leur débiteur. Ils procèdent, à cet égard, soit par voie de saisie, soit par voie d'intervention dans les actions exercées par leur débiteur ou contre lui, soit même par action indirecte contre les tiers, en vertu d'une subrogation judiciaire obtenue conformément au Code de Procédure civile. Néanmoins, les créanciers ne peuvent ni exercer les simples facultés légales qui appartiennent à leur débiteur ou les droits exclusivement réservés à sa personne, ni saisir les biens déclarés insaisissables par la loi ou par les conventions. [1166.] 360. En sens inverse, les créanciers subissent l'effet des obligations renonciations et aliénations consenties par leur débiteur, à l'exception des actes qui sont faits en fraude de leurs droits. Il y a fraude, lorsque le débiteur diminue son actif ou augmente son passif, sachant que l'acte nuira à ces créanciers. [1167.] 361. L'annulation des actes faits en fraude des créanciers est demandée en justice par une action révocatoire, de la part de ceux-ci contre ceux qui ont traité avec le débiteur et, s'il y a lieu, contre les sous-acquéreurs, sous les distinctions portées à l'article suivant. Si le débiteur s'est laissé frauduleusement condamner comme défendeur, ou débouter d'une demande, les créanciers agissent par la tierce-opposition, conformément au Code de Procédure civile. Dans tous les cas, le débiteur doit être mis en cause. Si la révocation de l'acte ne peut être obtenue spécifiquement des défendeurs, ceux-ci seront condamnés aux dommages-intérêts envers les créanciers. 362. Quel que soit l'acte attaqué, les créanciers devront fournir la preuve de la fraude de leur débiteur; en outre, s'il s'agit d'un acte à titre onéreux, ils devront prouver qu'il y a eu collusion ou participation à la fraude de la part de ceux qui ont traité ou plaidé avec lui. L'action révocatoire d'une aliénation ne peut être exercée contre les sous-acquéreurs, à titre onéreux ou gratuit, que si, en traitant avec le premier acquéreur, ils ont connu la fraude commise à l'égard des créanciers. 363. La révocation ne peut être demandée que par ceux des créanciers dont les droits sont antérieurs à l'acte frauduleux; mais, si elle est obtenue, elle profite à tous les créanciers indistinctement, à moins qu'il n'existe entre eux des causes légales de préférence. 364. L'action révocatoire se prescrit par trente ans écoulés depuis l'acte frauduleux; toutefois, elle est réduite à deux ans, à partir du moment où les créanciers ont découvert la fraude. La même prescription s'applique à la tierce-opposition. II. DE L'EFFET DES CONVENTIONS A L'ÉGARD DES TIERS. Art. 365. Les conventions, en général, n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes et à l'égard de leurs ayant-cause; elles ne profitent aux tiers et ne peuvent leur être opposées que dans les cas et sous les conditions que la loi détermine. [1165.] 366. Toutefois si une chose mobilière corporelle a été, de la part du propriétaire, l'objet de deux conventions de donner faites avec deux personnes différentes, celle qui s'en trouve en possession réelle est préférée et en demeure propriétaire, encore que son titre soit postérieur en date, pourvu qu'elle ait ignoré la première aliénation au moment de sa propre convention et si elle n'est pas d'ailleurs chargée d'administrer les biens de la première personne. [1141.] La présente disposition est applicable aux créances au porteur. 367. Le cessionnaire d'une créance nominative ne peut opposer son droit aux ayant-cause du cédant ou au débiteur cédé qu'à partir du moment où la cession a été dûment signifiée à ce dernier, ou acceptée par lui dans un acte authentique ou ayant date certaine. [1665.] L'acceptation du cédé l'empêche d'opposer au cessionnaire toutes les exceptions ou fins de non-recevoir qu'il eût pu opposer au cédant; la simple signification ne fait perdre au cédé que les exceptions nées depuis qu'elle a été faite. [1295.] Jusqu'à l'un desdits actes, tous payements ou conventions libératoires du débiteur, toutes saisies-arrêts ou oppositions des créanciers du cédant, toutes acquisitions nouvelles de la créance, dûment signifiées ou acceptées, sont présumées faites de bonne foi et sont opposables au cessionnaire négligent. [1691.] La mauvaise foi des intéressés ne peut être prouvée que par leur aveu ou leur refus de serment en justice; toutefois, s'il y a eu fraude concertée avec le cédant, la collusion pourra être établie par tous les moyens ordinaires de preuve. Les règles particulières à la cession des effets de commerce, par voie d'endossement, sont établies au Code de Commerce. 368. Sont transcrits en entier sur un registre spécial tenu à la mairie ou à la sous-préfecture (kou ou goun yakou-sho) de la situation des biens: 1°  Tous actes entre-vifs, authentiques ou sous seing-privé, a titre gratuit ou onéreux, portant aliénation de propriété immobilière ou de tout autre droit réel immobilier; 2°  Tout acte portant modification ou renonciation aux mêmes droits; 3°  Tout jugement constatant l'existence d'une convention verbale ayant l'un desdits objets; 4°  Tout jugement d'adjudication sur saisie immobilière; 5°  Tout acte judiciaire ou administratif prononçant une expropriation pour cause d'utilité publique. [Loi fr. du 23 mars 1855, art. 1er et 2; C. it., 1932.] Les règles particulières à la publicité des hypothèques et des priviléges sur les immeubles sont établies au Livre IVe. 368 bis. La transcription peut être remplacée, en vertu d'un Règlement, par le dépôt, au bureau des transcriptions, de deux originaux semblables de l'acte à publier, lesquels, après avoir été collationnés et trouvés conformes, sont revêtus du timbre des transcriptions, à mi-marge de chacun, sur chaque feuillet. L'un des originaux est conservé audit bureau, avec mention de sa substance sur un registre spécial; l'autre original est rendu à la partie intéressée, avec mention marginale du lieu et du jour où le dépôt a été fait. Les autres formalités relatives à la transcription sont déterminées par des Règlements spéciaux et par le Code de Procédure civile. 369. La transcription est faite à la requête et aux frais des parties intéressées après due justification. Il est délivré au requérant un certificat de la transcription portant l'extrait des dispositions principales de l'acte transcrit. Toute personne peut aussi requérir à ses frais un extrait du registre des transcriptions concernant les immeubles par elle désignés. [Ib.. art. 5; C. civ. 2196 et s.] 370. Jusqu'à la transcription, les droits réels acquis, modifiés ou recouvrés par l'effet des actes sus-énoncés, ne peuvent être opposés aux ayant-cause qui ont traité, au sujet des mêmes droits, avec la partie qui était restée titulaire apparent, ou qui ont acquis d'elle ou de son chef des droits incompatibles avec les premiers; pourvu, dans les deux cas, qu'ils aient été de bonne foi et qu'ils aient eux-mêmes fait faire la transcription ou l'inscription de leur titre, quand elle est requise. [Ib., art. 3; C. it., 1942.] La mauvaise foi et la collusion peuvent être prouvées conformément à l'article 367. [Secùs, C. fr., 1071; Sic, Loi belge, 16 déc. 1851, art. 1er.] 371. Le défaut de transcription ne pourra être opposé au premier acquéreur par les acquéreurs ou cessionnaires subséquents, même de bonne foi, qui étaient chargés par la loi, par la justice ou par convention, de faire faire la première transcription, ni par leurs héritiers ou ayant-cause généraux. [941; C. it., 1944, 3e al.] 372. Dans les cas où les actions tendant à la résolution, à la rescision ou à la révocation d'une aliénation transcrite ne peuvent s'exercer au préjudice des sous-acquéreurs de bonne foi, la demande en justice sera mentionnée par extrait, en marge de la transcription de l'acte attaqué, à l'effet d'arrêter les transcriptions ou inscriptions opposables au demandeur. Si lesdites actions sont autorisées contre tous les sous-acquéreurs indistinctement, la demande ne sera pas reçue en justice tant qu'elle n'aura pas été mentionnée en marge de la transcription de l'acte attaqué. [Loi belge, art. 3 et 4.] Le jugement prononçant l'annulation de l'acte devra également être mentionné à la suite de la transcription de la demande, avant sa mise à exécution, même provisoire, et, en tout cas, dans le mois à partir du moment où il sera devenu inattaquable, à peine d'une amende de 10 à 100 yens contre la partie qui l'a obtenu. [L. fr. de 1855, art. 4.] Si la demande est rejetée, ou si elle est déclarée périmée, le tribunal ordonnera d'office la radiation de la mention de la demande, pour être effectuée lorsque le jugement de rejet ou de péremption sera devenu inattaquable. [C. it., 1933, 1934.] Si le demandeur s'est désisté, la radiation de la mention de la demande sera faite à la requête de la partie intéressée. 373. Si la résolution, la rescision ou la révocation d'un acte transcrit est consentie à l'amiable, elle est, dans tous les cas, considérée comme rétrocession volontaire et soumise à la transcription ordonnée et réglée par les articles 368 à 371. Ladite transcription est mentionnée d'office, par le conservateur du registre, en marge de la transcription de l'acte annulé. 374. Les transcriptions et mentions marginales faites sur les registres peuvent être contestées en justice par tous ceux qui y ont intérêt, pour être radiées ou rectifiées. La demande et le jugement sont mentionnés en marge de la transcription de l'acte contesté, comme il est dit à l'article 372 et sous les sanctions qui y sont portées. Les parties capables, ou dûment représentées ou assistées, peuvent consentir à l'amiable la radiation ou la rectification. [2157.] Les radiations ou rectifications dûment ordonnées en justice ou consenties à l'amiable ne sont opposables à ceux qui ont des droits régulièrement transcrits ou inscrits qu'autant que ceux-ci ont été appelés à y contredire ou qu'ils y ont acquiescé. 375. Les conservateurs des registres sont responsables, envers les parties requérantes ou intéressées, de leurs omissions ou inexactitudes, soit dans les transcriptions ou mentions, radiations ou rectifications énoncées aux articles précédents, soit dans les certificats destinés à faire connaître l'état des registres. [2197.] § IV. DE L'INTERPRÉTATION DES CONVENTIONS. Art. 376. Dans l'interprétation des conventions, les tribunaux doivent rechercher l'intention commune des parties, plutôt que s'attacher au sens littéral des termes par elles employés. [1156.] 377. Lorsqu'une expression n'a pas en tous lieux le même sens ou la même portée, on doit lui donner, de préférence, le sens usité au lieu où les deux contractants ont leur domicile, et, si leur domicile n'est pas au même lieu, on préférera le sens usité au lieu où le contrat est passé. [1159.] Si une expression est, par elle-même, susceptible de deux sens, elle doit être entendue dans celui qui convient le mieux à la nature et à l'objet de la convention. [1158.] 378. Toutes les clauses de la convention s'interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui s'accorde le mieux avec l'acte entier. [1161.] Si une clause peut s'interpréter de deux manières dont une seule lui donne un effet utile, on doit l'entendre de cette manière et non de celle qui ne lui donne aucun effet. [1157.] 379. Quelque généraux que soient les termes de la convention, ils ne sont présumés comprendre que les objets sur lesquels les parties se sont proposé de contracter. [1163.] Réciproquement, si les parties ont exprimé un des effets naturels ou légaux de la convention ou son application à un cas particulier, elles ne sont pas présumées, par cela seul, avoir voulu exclure les autres effets que l'usage ou la loi y attache, ou les autres applications qu'elle peut raisonnablement recevoir. [1164.] 380. Dans tous les cas, s'il reste du doute sur l'intention des parties, la convention s'interprète contre le stipulant et en faveur du promettant. [1162.] Si la convention est synallagmatique, la présente règle s'applique séparément à chaque clause obscure ou ambiguë. SECTION II. DE L'ENRICHISSEMENT INDÛ OU DES QUASI-CONTRATS. Art. 381. Quiconque se trouve enrichi du bien d'autrui sans cause légitime, volontairement ou sans sa volonté, par erreur ou sciemment, est soumis à la répétition de ce qui a indûment tourné à son profit. [Comp. 1371.] La présente disposition s'applique, principalement, sous les distinctions faites ci-après: 1°  A la gestion des affaires d'autrui; 2°  A la réception de choses payées sans être dues, ou fournies soit pour une cause fausse ou illicite, soit pour une cause qui ne s'est pas réalisée ou qui a cessé d'exister; 3°  A l'acceptation d'une succession grevée de legs ou d'autres charges testamentaires; 4°  A l'augmentation de propriété résultant de l'accession de la chose ou du travail d'autrui, comme il est dit au Livre IIIe, 1re Partie, Chapitre II; 5°  Aux fruits, produits et autres profits illégalement perçus par le possesseur de la chose d'autrui, et, réciproquement, aux améliorations apportées par celui-ci à la chose qu'il a possédée, sous les distinctions établies aux articles 206 à 210. [1381.] 382. Celui qui, sans mandat conventionnel, légal ou judiciaire, gère spontanément tout ou partie des affaires d'un absent ou d'une autre personne dont les biens paraissent en souffrance, est tenu de restituer tous les profits et avantages qu'il a tirés de la chose du maître et de lui transférer les droits et actions qu'il a pu acquérir en son propre nom, à l'occasion de ladite gestion. [1372.] Il est tenu de continuer la gestion jusqu'à ce que le maître ou les héritiers de celui-ci puissent la prendre eux-mêmes. [1373.] Il est responsable des dommages causés au maître par sa faute ou sa négligence, eu égard aux circonstances qui l'ont conduit à se charger de la gestion. [1374.] 383. De son côté, le maître doit indemniser le gérant de toutes les dépenses nécessaires ou utiles qu'il a faites pour la gestion, et le décharger ou le garantir des engagements qu'il a contractés personnellement au même titre. [1375.] 384. Celui qui, n'étant pas créancier, a reçu une prestation à titre de payement, est soumis à la répétition, sans distinguer s'il a été de bonne foi ou de mauvaise foi, ni si celui qui a payé l'a fait par erreur ou sciemment. [1235, 1376.] 385. Si celui qui a reçu un payement était créancier, mais a reçu d'un autre que du débiteur, la répétition n'est admise que si celui qui a payé l'a fait par erreur. La répétition cesse encore, si le créancier a, de bonne foi, supprimé son titre de créance, par suite du payement. [1377.] Sauf, dans ces deux cas, le recours de celui qui a payé contre le véritable débiteur, par l'action de gestion d'affaires ou par le bénéfice de la subrogation, tel qu'il sera expliqué au sujet du payement. 386. Si le payement a été fait an véritable créancier par le véritable débiteur, il n'y a lieu à répétition que si le débiteur a, par erreur, donné en payement une chose d'une autre nature que celle qu'il devait ou une chose qui ne lui appartenait pas. La répétition n'a pas lieu si le payement a été fait, soit avant le terme, soit dans un lieu autre que celui où il devait être effectué, soit d'une chose d'une autre qualité, valeur ou bonté que celle promise; sauf, s'il y a eu erreur de l'une des parties, l'indemnité de la perte qui en résulte pour elle, dans la limite du profit de l'autre. 387. L'article 384 est applicable aux autres prestations prévues au 2e alinéa de l'article 381, lorsqu'elles n'ont pas le caractère de payement. Toutefois, la répétition des choses ou valeurs données pour une cause illicite n'est pas admise, si la cause est illicite de la part de celui qui a donné. 388. Celui qui a reçu de mauvaise foi les prestations prévues à l'article 381-2° doit restituer, outre ce dont il est indûment enrichi au jour de l'action: les intérêts légaux des capitaux, depuis qu'il les a reçus, les fruits et produits des corps certains, lors même qu'il a négligé de les percevoir, enfin, l'indemnité des pertes ou dégradations causées par sa faute ou sa négligence, et même de celles provenant d'une cause fortuite ou majeure, si elles n'avaient pas dû se produire chez celui qui a livré la chose. [1378, 1379.] 389. Si la chose indûment reçue est un immeuble et qu'il ait été aliéné, celui qui l'a livré peut, à son choix, ou le revendiquer contre le tiers-possesseur, ou agir en répétition contre celui qui l'a aliéné. La répétition, au cas de mauvaise foi, sera de la valeur estimative de l'immeuble; au cas de bonne foi, elle ne sera que du prix qui en aura été obtenu ou des actions qui subsistent à ce sujet. [1380.] SECTION III. DES DOMMAGES INJUSTES OU DES DÉLITS ET DES QUASI-DÉLITS. Art. 390. Celui qui cause à autrui un dommage, par sa faute ou sa négligence, est tenu de le réparer. [1382.] Si le fait dommageable est volontaire, il constitue un délit civil; s'il est involontaire, il n'est qu'un quasi-délit. L'étendue de la responsabilité des délits et des quasi-délits se règle comme celle du dol et des fautes commises dans l'exécution des conventions, ainsi qu'il est dit au Chapitre suivant, Section IIe. 391. Chacun est responsable non seulement de ses propres faits ou négligences, mais encore des faits et négligences des personnes sur lesquelles il a autorité et des choses qui lui appartiennent, sous les distinctions ci-après. [1383, 1384, 1er al.] 392. L'ascendant qui exerce la puissance paternelle est responsable des dommages causés par ses descendants mineurs, habitant avec lui. [1384, 2e al.] La même responsabilité incombe au tuteur, à l'égard des dommages causés par son pupille, et au mari, à l'égard des dommages causés par sa femme, sous la même condition d'habitation commune. Ceux qui ont la garde des aliénés ou des faibles d'esprit sont responsables des actes dommageables de ceux-ci. Les instituteurs, maîtres d'apprentissage et chefs d'ateliers sont responsables des dommages causés par leurs élèves, apprentis et ouvriers mineurs, pendant le temps où ceux-ci sont sous leur surveillance. [1384, 4e al.] La responsabilité des personnes désignées au présent article cesse, si elles prouvent qu'elles n'ont pu empêcher les faits dommageables. [1384, 5e al.] 393. Les maitres et patrons, les entrepreneurs de travaux, de transports ou d'autres services, les administrations publiques et privées, sont responsables des dommages causés par leurs serviteurs, ouvriers, employés ou préposés, dans l'exercice ou à l'occasion des fonctions qui leur sont confiées. [1384, 3e al.] 394. La responsabilité des dommages causés par les animaux incombe au propriétaire ou à celui qui en a l'usage au moment du dommage; sauf les accidents fortuits ou de force majeure. [1385.] 395. Le propriétaire d'un bâtiment, d'une terrasse ou d'un autre ouvrage édifié est responsable des dommages causés par leur chûte, lorsqu'elle est la suite du défaut de réparations ou d'un vice de construction; sauf, dans ce dernier cas, son recours contre l'entrepreneur, s'il y a lieu. [1386.] La même responsabilité est encourue pour les dommages causés par la rupture de digues, par la chûte d'arbres, de mâts, d'auvents, d'enseignes, de tuiles et d'autres parties mal consolidées des bâtiments, ainsi qu'aux dommages qui seraient causés par les navires, bateaux ou barques mal ancrés ou amarrés. 396. Les mineurs, émancipés ou non, peuvent être déclarés civilement responsables, en tout ou en partie, des dommages injustes qu'ils ont causés volontairement ou par imprudence, lors même qu'ils seraient exempts de la responsabilité pénale. [1310.] Ils peuvent être également responsables civilement des dommages causés par leurs serviteurs ou préposés ou par les choses qui leur appartiennent, sauf leur recours contre le tuteur, s'il y a lieu. 397. Dans les cas prévus aux articles précédents, si l'auteur du fait dommageable peut être considéré comme personnellement responsable de ses actes, le tribunal prononce contre lui la condamnation principale et détermine l'étendue de l'obligation subsidiaire des personnes civilement responsables; le recours de ces dernières contre le délinquant est de droit. Les personnes civilement responsables du fait d'autrui ne sont pas responsables des amendes qui pourraient être prononcées contre le délinquant, si ce n'est dans les cas spécialement prévus par la loi. 398. Dans tous les cas prévus à la présente Section, si plusieurs personnes sont responsables d'un même fait, sans qu'il soit possible de connaître la part de faute ou de négligence de chacune, leur obligation est solidaire. [C. it., 1156.] 399. Si les délits civils ou les quasi-délits constituent en même temps une infraction punie par la loi pénale, on observe les règles relatives à la compétence et à la prescription de l'action civile, telles qu'elles sont fixées par le Code de Procédure criminelle, tant pour les délinquants eux-mêmes que pour les personnes civilement responsables. SECTION IV. DE LA LOI. Art. 400. Certaines obligations sont imposées par la loi, indépendamment d'un fait actuel de l'homme; telles sont: L'obligation alimentaire entre certains parents et alliés; L'obligation de gérer une tutelle, dans les cas où les excuses ou dispenses ne sont pas admises; Les obligations entre co-propriétaires et celles entre voisins, lorsqu'elles ne constituent pas des servitudes foncières. [1370.] Ces obligations, pour ce qu'elles ont de spécial, sont réglées au sujet des matières auxquelles elles se rapportent. CHAPITRE II. DES EFFETS DES OBLIGATIONS. DISPOSITION PRÉLIMINAIRE. Art. 401. L'effet principal d'une obligation est de donner au créancier une action en justice pour l'exécution directe de ladite obligation et, subsidiairement, pour les dommages-intérêts, en cas d'inexécution, suivant les distinctions portées aux Sections I, II et III ci-après. [1142; C. it., 1218.] Lesdits effets des obligations sont, en outre, plus ou moins étendus, suivant les diverses modalités des obligations, telles qu'elles sont prévues à la Section IV. SECTION PREMIÈRE. DE L'ACTION POUR L'EXÉCUTION DIRECTE. Art. 402. Dans tous les cas où l'exécution directe de l'obligation, suivant sa forme et teneur, est requise par le créancier et peut être obtenue sans contrainte sur la personne du débiteur, les tribunaux doivent l'ordonner; S'il s'agit de choses corporelles à délivrer et se trouvant dans les biens du débiteur, elles sont saisies par autorité de justice et délivrées au créancier; S'il s'agit de faits à exécuter, le tribunal autorise le créancier à les faire exécuter par des tiers, aux frais du débiteur; [1144.] S'il s'agit d'obligation de ne pas faire, le créancier est autorisé à faire détruire, aussi aux frais du débiteur, ce qui a été fait en contravention à l'obligation, et à prendre pour l'avenir telles mesures qu'il convient; [1143.] Sans préjudice de dommages-intérêts, dans tous ces cas, s'il y a lieu. Les voies d'exécution forcée contre le débiteur sont réglées au Code de Procédure civile. SECTION II. DE L'ACTION EN DOMMAGES-INTÉRÊTS. Art. 403. En cas de refus par le débiteur ou d'impossibilité à lui imputable d'exécuter l'obligation, ou même de simple retard dans l'exécution, le créancier, à défaut d'exécution forcée, obtient la condamnation du débiteur aux dommages-intérêts. [1142, 1147.] Hors les cas où les dommages-intérêts sont fixés par la loi et quand ils ne l'ont pas été par les parties, ils sont fixés par le tribunal, sous les distinctions et conditions ci-après. 404. Les dommages-intérêts ne sont encourus qu'après que le débiteur a été constitué en demeure, conformément à l'article 356. [1146.] Toutefois, si l'obligation est de ne pas faire, le débiteur est toujours de plein droit en demeure. [1145.] 405. En général, les dommages-intérêts comprennent l'indemnité de la perte éprouvée par le créancier et la compensation du gain dont il a été privé. [1149.] Si cependant l'inexécution ou le retard ne provient que de la négligence du débiteur, sans qu'il y ait dol ou mauvaise foi, les dommages-intérêts ne comprennent que les pertes ou les privations de gains que les parties ont prévues ou ont pu prévoir lors de la convention. [1150.] Dans le cas de mauvaise foi, le débiteur doit les dommages-intérêts même imprévus, pourvu qu'ils soient la suite inévitable de l'inexécution. [1151.] 406. Quand les dommages-intérêts sont l'objet d'une action principale, la condamnation en fixe le montant en argent. Si les dommages-intérêts sont demandés accessoirement à l'action pour l'exécution directe ou à l'action en résolution, le tribunal peut, en statuant sur la demande principale, allouer des dommages-intérêts indéterminés, en en réservant la liquidation, pour être faite ultérieurement, sur les justifications à fournir. [C. pr. civ. fr., 128.] Le tribunal peut aussi, en ordonnant l'exécution directe par le débiteur, allouer au créancier une indemnité conditionnelle, pour chaque jour ou mois de retard, en fixant un délai extrême pour l'exécution, passé lequel il sera statué défifitivement. Dans ce dernier cas, le débiteur peut toujours provoquer une liquidation immédiate. 407. Si les parties ont eu des torts réciproques, relativement au retard ou à l'inexécution, le tribunal en tient compte dans la fixation des dommages-intérêts. 408. Les parties peuvent faire, à l'avance, au moyen d'une clause pénale, le règlement des dommages-intérêt, en prévision, soit de l'inexécution, soit du simple retard. [1226, 1229, 1er al, 1230.] 409. Les juges ne peuvent jamais ajouter à la clause pénale; ils ne peuvent la diminuer que si l'exécution a eu lieu partiellement ou si l'inexécution ou le retard ne proviennent pas uniquement de la faute du débiteur. [1152, 1231.] 410. Dans le cas d'un contrat synallagmatique ou bilatéral, le créancier qui a stipulé une peine pour inexécution de l'obligation ne perd pas son droit de résolution, à moins qu'il n'y ait formellement renoncé. Il ne peut cumuler la résolution et la peine que si cette dernière a été stipulée pour le simple retard. [Comp. 1229, 2e al.] 411. Lorsque l'obligation a pour objet une somme d'argent, les dommages-intérêts à raison du retard ne peuvent être fixés par le tribunal à une somme différente du taux légal de l'intérêt, sauf les cas exceptés par la loi. Si les parties règlent elles-mêmes les dommages-intérêts, elles peuvent fixer une somme inférieure mais non supérieure au taux maximum de l'intérêt conventionnel. [1153.] 412. Pour obtenir ces dommages-intérêts, le créancier n'est tenu de justifier d'aucune perte et le débiteur n'est pas reçu à prouver le cas fortuit ou la force majeure. [Ibid.] 413. La mise en demeure nécessaire pour faire courir les intérêts moratoires ne peut résulter que d'une demande en justice desdits intérêts ou d'une reconnaissance spéciale du débiteur; sauf les cas où la loi les fait courir de plein droit et ceux où elle permet de les faire courir par une simple sommation ou autre acte équivalent. [Ib.] 414. Les intérêts, tant compensatoires que moratoires, des capitaux exigibles, ne peuvent être capitalisés, pour porter eux-mêmes intérêts, qu'en vertu et à partir d'une convention spéciale ou d'une demande en justice faites seulement après une année échue, et ainsi d'année en année. [1154.] Mais les revenus échus, tels que le prix des baux à loyer ou à ferme, les arrérages des rentes perpétuelles ou viagères, les restitutions à faire de fruits ou produits, peuvent porter intérêts à partir d'une demande ou d'une convention, lors même qu'ils seraient dus pour moins d'une année. Il en est de même des intérêts de capitaux payés par un tiers en l'acquit du débiteur. [1155.] SECTION III. DE LA GARANTIE. Art. 415. Toute personne qui a conféré ou promis de conférer un droit, soit réel, soit personnel, est tenue d'en assurer ou garantir le plein exercice et la libre jouissance contre toute éviction ou tous troubles de droit fondés sur une cause antérieure à la cession ou imputable au cédant. La garantie a deux objets: la défense ou protection du cessionnaire contre les prétentions des tiers et l'indemnité des troubles et évictions qui n'ont pu être empêchés. 416. La garantie est due de plein droit dans les actes à titre onéreux, s'il n'y a stipulation contraire; elle n'a lieu dans les actes gratuits que si celle a été promise. Toutefois, dans aucun cas et à la faveur d'aucune stipulation, le cédant ne doit lui-même causer de troubles au cessionnaire; il est pareillement garant de tous troubles ou évictions causés par des tiers en vertu de droits par lui conférés, même avant la cession faite sans garantie. Les héritiers du cédant sont soumis aux mêmes obligations. 417. Les règles particulières à la garantie du vendeur et du bailleur en faveur de l'acheteur et du preneur, et des copartageants respectivement, sont établies au sujet des contrats et actes qui y donnent lieu. 418. Les personnes qui sont tenues d'une obligation avec d'autres ou pour d'autres ont un recours en garantie pour ce qu'elles ont payé en l'acquit d'autrui, ainsi qu'il est réglé au sujet du cautionnement, de la solidarité et de l'indivisibilité. [1213, 1214, 1216.] Pareillement, si l'un des créanciers a reçu le montant intégral d'une obligation solidaire ou indivisible, les autres ont contre lui, à défaut d'autre action spéciale, une action en garantie pour la communication du profit qu'il a tiré. 419. Celui qui a droit à la garantie peut, au moment où il est actionné, demander la mise en cause du garant, suivant les formes déterminées au Code de Procédure civile. [C. pr. civ. fr., 175 et s.] 420. Si le garant n'a pas été mis en cause, celui qui a subi l'éviction ou acquitté la dette d'autrui peut agir en garantie par action principale; à moins que le garant ne prouve qu'il avait des moyens valables de faire rejeter la demande. [1640.] SECTION IV. DES DIVERSES MODALITÉS DES OBLIGATIONS. Art. 421. Les effets des obligations se trouvent modifiés, comme il est dit aux paragraphes ci-après, suivant qu'elles sont: 1°  Pures et simples, à terme ou conditionnelles, quant à leur existence; 2°  Simples, alternatives ou facultatives, quant aux objets dus; 3°  Simples ou multiples, quant au nombre des créanciers ou des débiteurs; 4°  Divisibles ou indivisibles, quant à leur nature ou à leur exécution. Les effets de la solidarité active et passive et ceux de l'indivisibilité conventionnelle, sont réglés au Livre IVe, comme sûretés des créances. § I. DES OBLIGATIONS PURES ET SIMPLES. A TERME OU CONDITIONNELLES, QUANT A LEUR EXISTENCE. Art. 422. L'obligation est pure et simple, lorsque son existence est assurée et que son exigiblité est immédiate, dès l'instant où elle est formée. 423. L'obligation est à terme, lorsque le créancier ne peut agir avant un certain temps ou avant un événement déterminé qui ne peut manquer d'arriver, lors même que l'époque en serait incertaine. [1185.] Le terme est dit “de droit,” lorsqu'il est établi par les parties ou accordé par la loi. S'il a été dit que le débiteur payera “quand il pourra” ou “quand il voudra,” le tribunal, sur la demande du créancier, fixe un délai pour l'exécution, d'après les circonstances et l'intention présumée des parties; sans préjudice du cas où les parties auraient entendu constituer une rente perpétuelle. [1901.] 424. Le débiteur peut renoncer au bénéfice du terme et exécuter son obligation avant l'échéance, à moins qu'il ne soit prouvé, par la stipulation ou par les circonstances du fait, que le terme a été établi dans l'intérêt des deux parties ou du créancier exclusivement; dans ce dernier cas, le créancier peut également renoncer au terme. [1187.] Le cas où la partie a payé par erreur avant l'échéance du terme est réglé par l'article 386. [1186.] 425. Le débiteur est déchu du bénéfice du terme de droit, dans les cas suivants: 1°  S'il est tombé en faillite ou devenu notoirement insolvable; [1188.] 2°  S'il a aliéné la majeure partie de ses biens ou si elle est saisie par d'autres créanciers; [Comp. C. pr. civ. fr., 124] 3°  S'il a détruit ou diminué les sûretés particulières qu'il a fournies, ou manqué à fournir celles qu'il a promises; [1188. 1912.] 4°  S'il manque à payer les intérêts compensatoires. [1912, 1er al.] 426. Soit qu'il y ait. eu, ou non, un terme de droit, et lors même qu'il y aurait titre exécutoire, les tribunaux peuvent accorder au débiteur un délai de grâce modéré, s'il est malheureux et de bonne foi et si le créancier ne doit pas en éprouver un préjudice sérieux. [1244.] Ils pourront aussi, aux mêmes conditions, autoriser l'exécution partielle de la dette. [Ib.] Toute stipulation contraire est nulle. 427. Le débiteur qui a obtenu un délai de grâce en est déchu pour les causes prévues à l'article 425 et, en outre: 1°  S'il est en fuite ou si, ayant quitté son domicile, il dissimule sa résidence à son créancier; 2°  S'il est condamné à un emprisonnement correctionnel d'un an ou plus; [C. pr. civ. fr., 124.] 3°  S'il a manqué à remplir l'une des conditions à lui imposées par le jugement; 4°  S'il est devenu lui-même créancier de son créancier, dans un cas où la compensation légale est possible. [1292.] Le délai de grâce ne peut être prorogé par le tribunal. [C. pr. civ., 122.] 428. L'obligation est sous condition, lorsque les parties ou la loi font dépendre sa naissance ou sa résolution d'un événement futur et incertain; la condition est dite “ suspensive ” dans le premier cas et “résolutoire” dans le second. [1168, 1181, 1183.] Les droits réels, principaux ou accessoires, peuvent être également soumis à une condition suspensive ou résolutoire. 429. La condition suspensive, lorsque l'événement prévu est accompli, rétroagit au jour de la convention. [1179, 1er al.] L'accomplissement de la condition résolutoire remet les parties dans la situation où elles étaient respectivement avant la convention. [1183,1er al.] 430. Tant que la condition suspensive ou résolutoire n'est pas accomplie, chacune des parties peut conférer sur l'objet de la convention des droits subordonnés à la même condition que le sien. [2125.] Toutefois, la condition n'est opposable par une partie ou ses ayant-cause aux ayant-cause de l'autre que si la condition a été révélée à ceux-ci, au moyen de la publicité prescrite par les articles 367 et suivants. 431. Les actes d'administration faits de bonne foi et en conformité à la loi, par celui dont les droits sont sujets à résolution, sont maintenus au profit des tiers. A l'égard des jugements intervenus entre les tiers et la partie dont le droit est résoluble, ils peuvent être invoqués par l'autre partie ou ses ayant-cause; mais ils ne peuvent être opposés aux mêmes personnes, si elles n'ont pas été appelées à y contredire; sauf le cas où les jugements ne concerneraient que les actes d'administration. 432. Lorsque la condition est accomplie, celle des parties qui doit livrer ou restituer une chose ou une somme d'argent doit en fournir les fruits ou intérêts perçus ou échus dans l'intervalle, à moins que la preuve d'une intention contraire des parties ne résulte des circonstances. 433. La convention est nulle si son objet principal est subordonné à une condition impossible ou illicite. [1172.] La condition est illicite quand elle doit, soit profiter à une partie, parce qu'elle aura accompli un acte défendu ou se sera abstenue d'un devoir, soit lui nuire, parce qu'elle se sera abstenue d'un acte défendu, ou aura accompli un devoir. [1133.] Si la condition impossible ou illicite ne concerne qu'un effet accessoire de la convention, la clause qui en dépend est seule non avenue. 434. La condition casuelle et celle qui dépend en tout ou partie de la volonté du stipulant sont réputées accomplies, lorsque c'est le promettant qui en a empêché l'accomplissement. [1178.] 435. Si la condition est potestative ou dépendant de la seule volonté de l'une des parties, l'autre partie peut demander au tribunal la fixation d'un délai, passé lequel la condition sera réputée défaillie si le fait n'est pas accompli. 436. Si la condition positive a été limitée à un temps fixe, soit par les parties, soit par le tribunal, elle est réputée défaillie lorsque ce temps s'est écoulé sans que l'événement soit arrivé; elle est également défaillie, soit qu'il y ait, ou non, un temps fixé pour l'accomplissement de la condition, dès qu'il est devenu certain que l'événement ne peut s'accomplir. [1176.] La condition négative limitée à un temps fixe est réputée accomplie lorsque l'événement prévu n'est pas arrivé dans le temps fixé; elle est encore réputée accomplie, soit qu'il y ait, ou non, un temps fixé, dès qu'il est devenu certain que l'événement n'arrivera pas. [1177.] Dans l'un et l'autre cas, le délai fixé par les parties ne peut être prorogé par le juge. 437. Si l'une des parties ou toutes les deux sont décédées avant que la condition soit accomplie ou défaillie, la convention subsiste, activement ou passivement, à l'égard de leurs héritiers; à moins que la condition ne soit, par sa nature ou par l'intention des parties, attachée ou imposée à la personne même du stipulant ou du promettant. [1179, 2e al.] 438. Les autres questions relatives au point de savoir comment les conditions doivent être remplies, et quand elles peuvent être considérées comme accomplies ou défaillies, se décident d'après l'intention expresse ou tacite des parties; il en est de même au sujet de l'effet que peut avoir leur accomplissement partiel. [1175.] 439. Si, avant l'accomplissement de la condition suspensive, la chose promise ou cédée a péri en totalité ou pour plus de moitié de sa valeur, sans la faute du promettant ou du cédant, la convention est réputée non avenue et il ne peut être rien exigé de part ni d'autre. En sens inverse, si la promesse ou cession a été faite sous condition résolutoire, la même perte ou détérioration est à la charge du stipulant ou du cessionnaire dont le droit devient irrévocable, sans qu'il puisse exiger aucune restitution. Si, dans les mêmes cas, la perte ou détérioration n'excède pas la moitié de la valeur, l'accomplissement de la condition produira les effets convenus. [Comp. 1182.] 440. En cas de perte ou détérioration imputable à l'une des parties, l'autre peut, à son choix, demander l'exécution de la convention avec indemnité de la perte, ou la résolution avec dommages-intérêts. [1182, 4e al.] 441. Dans tout contrat synallagmatique, la condition résolutoire est toujours sous-entendue au profit de la partie qui a exécuté ses obligations ou qui offre de le faire, pour le cas où l'autre partie ne remplirait pas les sieunes en entier. Dans ce cas, la résolution n'a pas lieu de plein droit: elle doit être demandée en justice par la partie lésée; mais le tribunal peut accorder à l'autre un délai de grâce, conformément à l'article 426. [1184.] 442. Les parties peuvent, par convention formelle, exclure ladite résolution. Elles peuvent aussi convenir expressément qu'elle aura lieu de plein droit contre la partie constituée en demeure d'exécuter; mais celle-ci ne peut se prévaloir de la résolution opérée que si l'autre partie l'invoque contre elle. [1656.] 443. La partie lésée par l'inexécution peut renoncer à la résolution, tant qu'elle n'a pas formé sa demande en justice, dans le cas de la résolution tacite, ou déclaré se prévaloir de la résolution expresse. 444. La partie qui demande la résolution en justice ou invoque la résolution opérée de plein droit, peut, en outre, obtenir la réparation du préjudice éprouvé. [1184, 2e al.] 445. La partie dont le droit est subordonné à une condition suspensive ou dont l'action est retardée par un terme de droit ou de grâce peut néanmoins prendre, dans l'intervalle, toutes les mesures conservatoires de son droit, telles qu'elles sont réglées tant au présent Code qu'au Code de Procédure civile. [1180.] 446. Les conditions suspensives ou résolutoires potestatives spécialement usitées dans le contrat de Vente sont réglées au Livre III, Chapitre XII, articles 666 à 669. § II. DES OBLIGATIONS SIMPLES, ALTERNATIVES OU FACULTATIVES, QUANT A L'OBJET DÛ. Art. 447. L'obligation est simple, lorsqu'elle a pour objet, soit une ou plusieurs choses individuellement déterminées, soit des choses de genre déterminées seulement par la quantité et la qualité, soit une collection ou une universalité d'objets. L'obligation est encore considérée comme simple, lorsqu'elle a pour objet plusieurs prestations différentes, soit simultanées, soit successives, pourvu qu'elles soient dues en vertu d'une seule convention ou de conventions connexes. Dans ces divers cas, le débiteur n'est libéré que par la prestation de toutes les choses dues. 448. L'obligation est alternative, lorsqu'elle a deux ou plusieurs objets distincts, mais de telle sorte que le débiteur doive être libéré par la prestation d'un ou plusieurs d'entre eux. [1189.] Le choix de la chose à donner appartient au débiteur, à moins qu'il n'ait été accordé au créancier. [1190.] Mais le débiteur ne peut forcer le créancier à recevoir, ni le créancier forcer le débiteur à donner une partie des diverses choses dues alternativement. [1191.] 449. Lorsque le choix appartient au débiteur, si l'une des deux choses a péri par sa faute, l'obligation porte sur celle qui reste, sans que le débiteur puisse se libérer en donnant la valeur de celle qui a péri. [1193, 1er al.] Si les deux choses ont péri successivement par la faute du débiteur, il doit le prix de celle qui a péri la dernière. Si elles ont péri simultanément et que le débiteur soit en faute à l'égard de toutes deux ou à l'égard d'une seule, le choix est transféré au créancier, pour obtenir la valeur de l'une ou de l'autre. [Comp. Ib., 2e al.] 450. Dans le même cas où le choix appartient au débiteur, si l'une des deux choses dues a péri par la faute du créancier, le débiteur est libéré, à moins qu'il ne préfère donner celle qui reste et se faire rembourser la valeur de celle qui a péri. Si les deux choses ont péri par la faute du créancier, le débiteur peut se faire rembourser la valeur de l'une ou de l'autre à son choix. Si les deux choses ont péri simultanément, l'une par la faute du créancier, l'autre par cas fortuit, le débiteur est libéré, sans répétition contre le créancier. 451. Lorsque le choix a été donné au créancier par la convention et que l'une des deux choses a péri par la faute du débiteur, le créancier peut demander celle qui reste ou la valeur de celle qui a péri. Si toutes deux ont péri par la faute du débiteur, le créancier a le choix de la valeur de l'une ou de l'autre. [1194.] Il en est de même si les deux choses ont péri simultanément, l'une par la faute du débiteur et l'autre par cas fortuit. 452. Dans le même cas où le choix appartient au créancier, si l'une des deux choses a péri par la faute de celui-ci, le débieur est libéré. Si toutes deux ont péri simultanément par la faute du créancier, le choix est transféré au débiteur, pour se faire donner la valeur de l'une ou de l'autre. Dans le même cas de pertes simultanées, si l'une des choses a péri par la faute du créancier et l'autre par cas fortuit, le débiteur est libéré, sans répétition contre le créancier. 453. Quelle que soit la partie qui a le choix, si l'une des deux choses a péri par cas fortuit, l'obligation devient simple et porte sur la chose qui reste. [1193, 1er al.] Si les deux choses ont péri en entier, l'obligation est éteinte. [1195.] Si, par cas fortuit ou force majeure, l'une des deux choses est détériorée ou perdue pour plus de la moitié de sa valeur, elle ne peut plus être l'objet du choix du débiteur. 454. Si la partie qui a le choix est décédée, laissant plusieurs héritiers, ceux-ci doivent se concerter pour exercer un choix unique, comme il est dit au sujet des obligations indivisibles. Le choix, une fois exercé valablement, soit par le débiteur, au moyen d'offres réelles, soit par le créancier, au moyen d'une demande en bonne forme, ne peut plus être rétracté sans le consentement de l'autre partie. 455. Lorsque, aux termes des articles précédents, l'obligation alternative vient à ne porter que sur un seul objet, ou lorsque le choix est exercé sur un des objets par la partie qui en a le droit, ses effets rétroagissent, comme il est dit à l'article 429, au sujet de l'obligation sous condition suspensive. 456. L'obligation est dite “ facultative,” lorsque le débiteur est tenu principalement d'une ou plusieurs choses déterminées, mais a la faculté de se libérer en donnant une ou plusieurs autres choses. [Comp. 891, 1681.] La chose principale est considérée comme due sous la condition résolutoire du payement de la chose due facultativement. Si la chose due principalement a péri par cas fortuit ou par force majeure, le débiteur est libéré. Si la chose due principalement a péri par la faute du débiteur, il en doit la valeur avec dommages-intérêts; mais il conserve la faculté de se libérer en donnant la chose due facultativement. Si l'une des deux choses a péri par la faute du créancier, le débiteur peut invoquer sa libération, ou donner la chose qui reste, en se faisant indemniser pour celle qui a péri. Si les deux choses ont péri par la faute du créancier, le débiteur est libéré et peut se faire rembourser la valeur de l'une ou de l'autre, à son choix. Si les deux choses ont péri simultanément, l'une par cas fortuit, l'autre par la faute du créancier, sans qu'on sache sur laquelle a porté la faute de celui-ci, le débiteur est libéré, avec répétition contre le créancier de l'une des deux valeurs, à son choix. § III. DES OBLIGATIONS SIMPLES OU MULTIPLES, QUANT AUX CRÉANCIERS ET AUX DÉBITEURS. Art. 457. L'obligation est simple, lorsqu'il n'y a qu'un seul créancier et un seul débiteur; elle est multiple, lorsqu'il y a plusieurs créanciers ou plusieurs débiteurs, soit à l'origine, soit par suite du décès de l'une des parties laissant plusieurs héritiers. L'obligation multiple est conjointe ou solidaires; elle peut aussi être indivisible, comme il est prévu au § suivant. 458. Dans l'obligation conjointe, chacun des créanciers ne peut agir ou chacun des débiteurs ne peut être poursuivi que pour sa part dans la créance ou dans la dette, telle qu'elle est fixée au § suivant. Dans l'obligation solidaire, chaque créancier peut agir ou chaque débiteur peut être poursuivi pour le tout, tant en son nom et pour sa part qu'au nom et pour la part des autres; sauf les recours respectifs, par l'action en garantie, pour ce que chacun a reçu ou payé au-delà de sa part réelle, ainsi qu'il sera expliqué au Livre IVe, 1re Partie, Chapitre II § IV. DES OBLIGATIONS DIVISIBLES OU INDIVISIBLES, QUANT A LEUR NATURE OU A LEUR EXÉCUTION. Art. 459. L'obligation simple, déterminée à l'article 457, doit être exécutée entre le créancier et le débiteur comme si elle était indivisible; sauf la faculté accordée aux tribunaux, par l'article 426, d'autoriser des payements partiels. [1220.] 460. Dans l'obligation conjointe, la part réelle pour laquelle chacun des créanciers peut agir ou celle pour laquelle chacun des débiteurs peut être pousuivi se détermine d'après la convention ou d'après les circonstances du fait. Si cette part ne peut être ainsi déterminée, elle est virile ou calculée par tête; sauf les recours respectifs, pour ramener chacun à sa part réelle dans le profit de la créance ou dans la charge de la dette. 461. En cas de décès du créancier ou du débiteur, l'obligation simple, ou conjointe se divise activement ou passivement entre les héritiers, pour la part pour laquelle chacun représente le défunt. [1220.] L'obligation solidaire est pareillement divisible entre les héritiers des parties. [1219.] 462. L'obligation multiple est indivisible entre les créanciers et les débiteurs: 1°  Lorsque, d'après la nature de l'objet dû, l'exécution partielle est matériellement et juridiquement impossible; [1217.] 2°  Lorsque, d'après l'intention des parties, soit expresse, soit résultant du but qu'elles se sont proposé ou des autres circonstances du fait, il a été entendu que l'obligation, même divisible par sa nature, ne pourrait être exécutée partiellement. [1218.] 463. L'obligation, quoique divisible par sa nature, est encore indivisible par l'intention des parties, mais seulement passivement: 1°  S'il s'agit de la délivrance d'un corps certain qui se trouve à la disposition d'un seul des débiteurs, auquel cas celui-là peut être poursuivi pour le tout; mais il peut, s'il y a en même temps plusieurs créanciers, exiger la mise en cause de tous, pour se libérer simultanément entre leurs mains; [1221-2°.] 2°  Si, par le titre constitutif de la dette, l'un des débiteurs a été seul chargé de l'exécution, laquelle peut alors être exigée de lui seul. [1221-4°.] 464. L'indivisibilité peut aussi être stipulée à la charge des débiteurs, conjointement ou non à la solidarité, comme sûreté de l'exécution d'une dette divisible par sa nature, ainsi qu'il est réglé au Livre IVe, Ire Partie, Chapitre III. [1221-5°, 1222, 1223.] 465. Celui des créanciers qui a obtenu seul l'exécution de la dette indivisible doit en communiquer le profit aux autres créanciers dans la mesure de leur droit. Pareillement, celui des débiteurs qui a exécuté seul l'obligation a un recours en garantie contre les autres débiteurs, pour la portion pour laquelle ils doivent y contribuer, d'après la cause de l'obligation ou d'après leurs rapports respectifs antérieurs. [1221, dern. al., 1222.] 466. Aucun des créanciers ne peut diminuer ou éteindre le droit des autres, si ce n'est en recevant le payement tel qu'il a été stipulé. Si l'un des créanciers a fait une novation, une remise de la dette ou quelque autre convention tendant à libérer les débiteurs ou l'un d'eux, ou s'il existe contre lui une cause de compensation légale, les autres créanciers peuvent encore demander l'exécution intégrale de la dette; mais ils tiendront compte au débiteur poursuivi de la valeur dont ils seraient tenus envers le créancier lui-même s'il n'avait pas perdu son droit, ainsi qu'il est dit aux articles 523, 4e alinéa, 537, 2e alinéa, 543, 4e et 5e alinéas, et sous les distinctions qui y sont portées. [1224.] 467. Au contraire, la mise en demeure et les autres actes conservatoires faits par l'un des créanciers profitent aux autres. Pareillement, les causes légales qui suspendent la prescription au profit de l'un d'eux la suspendent, en même temps, au profit des autres. [709, 710.] 468. Aucun des débiteurs ne peut aggraver la condition des autres; de même, la mise en demeure de l'un d'eux ne peut être opposée aux autres. Toutefois, la reconnaissance de la dette et les autres causes d'interruption ou de suspension de la prescription opposables à l'un des débiteurs le sont également aux autres. [2249, 2e al.] 469. Si, par la faute de l'un des débiteurs, l'obligation indivisible ne peut être exécutée, les dommages-intérêts ou la peine stipulée ne sont encourus que par celui qui est en faute, même si la clause pénale a été établie pour assurer l'exécution intégrale d'une obligation divisible. [Comp. 1232, 1233.] 470. Le débiteur actionné pour l'exécution d'une obligation indivisible, dans les cas de l'article 462, peut demander un délai pour mettre en cause les autres débiteurs, afin qu'il puissent subir condamnation conjointement avec lui, s'il y a lieu, et pour faire statuer sur son recours subsidiaire contre eux. [1225.] CHAPITRE III. DE L'EXTINCTION DES OBLIGATIONS. Art. 471. Les obligations s'éteignent: 1°  Par le payement, 2°  Par la novation, 3°  Par la remise conventionnelle, 4°  Par la compensation, 5°  Par la confusion, 6°  Par l'impossibilité d'exécuter, 7°  Par la rescision, 8°  Par la révocation et la résolution, 9°  Par la prescription libératoire. [1234.] SECTION PREMIÈRE. DU PAYEMENT. Art. 472. Le payement, ou exécution de l'obligation suivant sa forme et teneur, peut être simple ou avec subrogation, d'après les distinctions portées aux §§ 1er et 4e ci-après. Lorsqu'il y a plusieurs dettes et un seul payement, il y a lieu à imputation du payement, sur une ou plusieurs des dettes, conformément au § 2e. Si le créancier ne peut ou ne veut recevoir le payement, le débiteur peut se libérer au moyen des offres réelles et de la consignation, comme il est dit au § 3e. Les cas où le débiteur est autorisé à faire à ses créanciers l'abandon ou la cession de ses biens sont réglés au Code de Procédure civile. § Ier. DU PAYEMENT SIMPLE. Art. 473. Le payement peut être fait valablement, non seulement par le débiteur ou par l'un des coobligés, si la dette est solidaire ou indivisible, mais encore par les obligés subsidiaires ou intéressés, tels qu'une caution ou le tiers détenteur d'un bien hypothéqué à la dette. Le payement peut aussi être fait par un tiers non intéressé, soit au nom du débiteur, soit en son propre nom. [1235.] 474. Le consentement du créancier n'est pas nécessaire à la validité du payement fait par un tiers, intéressé ou non, à moins qu'il ne s'agisse d'une obligation de faire dans laquelle la personne même du débiteur aura été prise en considération spéciale par le créancier. [1237.] Il n'est pas nécessaire non plus que le débiteur consente au payement fait par un tiers, même non intéressé; toutefois, dans ce dernier cas, si, ni le débiteur, ni le créancier, ne consentent au payement, il ne pourra avoir lieu. 475. Indépendamment des cas où le tiers qui a payé est subrogé par la loi ou la convention aux droits du créancier, et en l'absence de mandat, il a contre le débiteur un recours dans la mesure du profit que le payement a procuré à celui-ci. 476. Lorsque l'obligation a pour objet la translation de propriété de choses de quantité, le payement, par tradition ou autrement, n'en peut être fait que par celui qui en est propriétaire et qui a la capacité de les aliéner. [1238, 1er al.] Si la chose d'autrui a été livrée, le payement peut être argué de nullité par les deux parties. Si la chose a été livrée par un propriétaire incapable d'aliéner, lui seul peut demander la nullité du payement. Dans l'un et l'autre cas, le débiteur ne peut répéter la chose livrée qu'en offrant un payement valable. La répétition ne lui est plus possible, si le créancier a, de bonne foi, consommé ou aliéné la chose mobilière reçue en payement. [1238, 2e al.] Le créancier peut aussi ratifier le payement de la chose d'autrui, sauf son action en garantie contre le débiteur, en cas de revendication par le vrai propriétaire. 477. Le payement doit être fait au créancier ou à son représentant; toutefois, le payement fait à celui qui n'avait pas qualité pour le recevoir est valable, si le créancier l'a ratifié ou en a profité. [1239.] 478. Le payement fait à celui qui, sans être le véritable créancier, était en possession de la créance, est valable, si le débiteur l'a fait de bonne foi. Sont considérés comme possesseurs de la créance, l'héritier ou autre successeur universel apparent, le cessionnaire apparent d'une créance nominative, le possesseur d'un titre payable au porteur. [1230.] 479. Le payement fait au créancier ou au possesseur incapable de recevoir peut être annulé sur la demande de celui-ci, sauf pour ce dont il a profité. [1241.] 480. Si le payement a été fait après une saisie-arrêt de la créance, régulièrement formée et suivie, conformément au Code de Procédure civile, les créanciers saisissants peuvent contraindre le débiteur à payer de nouveau, dans la mesure du préjudice qu'ils éprouvent, sauf le recours de celui-ci contre le créancier qui a reçu. [1242.] 481. Le créancier ne peut être tenu de recevoir en payement une autre chose que celle qui lui est due, quoique la valeur de la chose offerte soit supérieure; [1243.] Réciproquement, le débiteur ne peut être tenu de donner une autre chose que celle qu'il doit, quoique la valeur de la chose demandée soit inférieure. S'il s'agit d'une chose de nature fongible, déterminée seulement par son espèce, le débiteur n'est pas tenu de donner la meilleure qualité, ni le créancier de recevoir la plus mauvaise. [1022, 1246.] 482. Si, d'un commun accord, une chose est donnée ou promise en payement, au lieu d'une somme d'argent ou réciproquement, ou une chose au lieu d'une autre, l'obligation primitive est considérée comme novée et l'opération est régie par les règles de la vente ou de l'échange, suivant les cas. 483. Le débiteur d'un corps certain est libéré en le livrant dans l'état où il se trouve au moment où la livraison doit être faite; sauf ce qui est dit, à l'article 439, des risques dans l'obligation conditionnelle. Si la chose a été conservée ou améliorée aux frais du débiteur, ou détériorée par sa faute ou sa négligence, les indemnités sont dues respectivement par les parties, conformément aux Sections II et III du Chapitre Ier. [1245.] 484. Lorsque la dette est d'une somme d'argent, le débiteur peut se libérer en donnant, à son choix, des monnaies nationales d'or ou d'argent ou des papiers-monnaie ayant cours forcé. Le débiteur ne doit jamais plus ni moins que la somme numérique promise, quels que soient les changements légaux survenus dans la valeur nominale des monnaies ou dans leur composition intrinsèque. [1895, 2e al.] La convention qui dérogerait à l'une des deux règles précédentes est nulle, sauf ce qui est dit au 2e alinéa de l'article 486. 485. On peut convenir, au contraire, que la hausse ou la baisse respective des monnaies ou papiers-monnaie, résultant du cours commercial du change, au moment où le payement est exigible, sera compensée entre les parties par le payement de la valeur moyenne, en telle monnaie légale qu'il plaira au débiteur. 486. Si la somme due a été énoncée en valeur d'or ou d'argent, le débiteur peut toujours se libérer en une autre monnaie légale, mais en subissant seul la perte ou en obtenant seul le profit du change. Il en est de même si la somme due a été stipulée payable en monnaie d'or ou d'argent. S'il a été convenu que le payement sera fait en monnaie étrangère, le débiteur peut toujonrs se libérer en en fournissant la valeur en monnaie légale de son choix, comme il est dit aux deux dispositions précédentes. 487. La monnaie de cuivre ne peut être donnée pour plus de 5 ni les monnaies divisionnaires d'argent de 0.50 sens et au-dessous, pour plus de 50 yens, sauf convention contraire. [Décr. fr. 18 août 1810.] 488. Les règles particulières au prêt d'argent sont établie à l'article 878. 489. Si le lieu où doit être fait le payement n'a pas été déterminé par les parties, il se fait au domicile réel du débiteur, sauf ce qui sera dit ultérieurement à l'égard de certains contrats, et sans préjudice des dispositions relatives à la délivrance d'un corps certain, conformément à l'article 353. [1247.] Si la partie au domicile de laquelle le payement doit être fait en a changé sans fraude, le payement se fait au nouveau domicile; mais il est tenu compte à l'autre de la différence du change et des frais supplémentaires de déplacement des personnes ou de transport des choses dues. Les autres frais du payement sont à la charge du débiteur. [1247.] 490. Ce qui concerne l'époque à laquelle le payement doit se faire est réglé ci-dessus, aux articles 423 à 428. Si le jour fixé pour le payement est un jour férié légal, le payement ne peut être exigé que le lendemain. [C. com. fr., 162, 2e al.] § II. DE L'IMPUTATION DES PAYEMENTS. Art. 491. Lorsque le débiteur a plusieurs dettes de même nature envers le même créancier et qu'il effectue un payement qui ne peut les éteindre toutes, il peut, au moment du payement, déclarer laquelle il entend accquitter et faire insérer dans la quittance l'imputation ainsi faite. [1253.] Cependant, le débiteur ne peut, sans le consentement du créancier, faire l'imputation sur une dette non échue, quand le terme a été établi pour l'avantage de celui-ci, ni sur les capitaux avant les frais et intérêts, ni sur plusieurs dettes partiellement. [1254.] 492. A défaut d'imputation valable par le débiteur, le créancier peut faire lui-même librement l'imputation du payement dans la quittance, sauf ce qui est dit par l'article 777, à l'égard du contrat de société. [1848, 1849.] Si le débiteur a accepté la quittance sans protestations ni réserves, il ne peut critiquer l'imputation que s'il y a eu erreur de sa part, ou fraude ou surprise de la part du créancier. [1255.] 493. Si l'imputation n'a été faite valablement, ni par le débiteur, ni par le créancier, elle a lieu, de plein droit, comme il suit: 1°  Sur les dettes échues avant celles non échues; 2°  Sur les frais et intérêts avant les capitaux; 3°  Si elles sont toutes échues ou toutes non échues, sur celles que le débiteur a le plus d'avantage à acquitter; 4°  Si le débiteur n'a pas plus d'avantage à acquitter l'une que l'autre, sur les dettes le plus anciennement échues ou sur celles dont l'échéance est la plus prochaine; 5°  Toutes choses égales, l'imputation se fait proportionnellement. [1256.] 494. Les règles qui précèdent ne s'appliquent pas aux versements faits en compte courant, lesquels sont simplement portés au crédit de celui qui les effectue. § III. DES OFFRES DE PAYEMENT ET DE LA CONSIGNATION. Art. 495 et 496. Si le créancier ne veut ou ne peut recevoir le payement, le débiteur peut se libérer au moyen des offres et de la consignation, sous les distinctions ci-après. [1257, 1er al.] 1°  Si la dette est d'une somme d'argent, les offres doivent être réelles ou accompagnées de la présentation des espèces; 2°  Si la chose due est un corps certain et qu'il soit livrable au lieu où il se trouve, le débiteur fait sommation au créancier de procéder à son enlèvement; [1264.] 3°  Si le corps certain est livrable au domicile du créancier ou dans un autre lieu, et qu'il soit d'un transport coûteux, difficile ou dangereux, le débiteur déclare, dans les offres, qu'il est prêt à en effectuer immédiatement la livraison, suivant la convention; 4°  Il en est de même s'il s'agit de choses de quantité; 5°  S'il s'agit d'une obligation de faire exigeant la présence ou le concours du créancier, il suffit que débiteur déclare qu'il est prêt à exécuter son obligation. 497. Les offres ne sont valables que si elles réunissent, en outre, les conditions prescrites ci-dessus pour la validité du payement et si elles sont faites suivant les formes et conditions portées au Code de Procédure civile. [1258; C. pr. civ., 812 et suiv.] 498. Les offres valables et faites en temps utile préviennent les déchéances, réfutions ou pénalités établies par la loi ou stipulées par la convention. Elles empêchent la mise en demeure et, si elle a eu lieu, elles en font cesser les effets pour l'avenir et arrêtent le cours des intérêts moratoires. 499. Si le créancier refuse d'accepter les offres, le débiteur peut faire la consignation des sommes à la caisse publique à ce destinée, avec les intérêts compensatoires produits par la dette jusqu'au jour du dépôt. [1259-2°.] S'il s'agit d'un corps certain ou d'une chose de quantité, le débiteur demande au tribunal de désigner le lieu où elle sera déposée et d'en nommer un séquestre ou gardien. [1264.] Les formes et les autres conditions de la consignation sont réglées au Code de Procédure civile. [C. pr. civ. fr., 812 et s.] 500. La consignation valablement faite libère le débiteur et met la chose aux risques du créancier, lors même que le débiteur se serait chargé des cas fortuits; [1257, 2e al.] Toutefois, tant que le créancier n'a pas accepté la consignation ou qu'elle n'a pas été, à la demande du débiteur, déclarée valable par jugement ayant acquis force de chose jugée, celui-ci peut la retirer et la libération est réputée non avenue. [1261.] Après l'acceptation du créancier ou le jugement de validité devenu irrévocable, le débiteur peut encore retirer la consignation, avec le consentement du créancier; mais sans préjudicier à la libération des codébiteurs et des cautions, à l'extinction des droits de gage et d'hypothèque, ni aux saisies-oppositions faites du chef du créancier sur les choses consignées. [1262, 1263.] § IV. DU PAYEMENT AVEC SUBROGATION. Art. 501. Le payement fait par un tiers, avec subrogation, libère le débiteur à l'égard du créancier et transporte au tiers la créance elle-même, avec les garanties et les effets qui y sont attachés; sans préjudice de son action de gestion d'affaires ou de mandat, suivant les cas. La subrogation est conférée par le créancier, par le débiteur ou par la loi, suivant les distinctions ci-après. [1249.] 502. La subrogation conférée par le créancier n'est valable que si elle est mentionnée clairement dans la quittance; sans qu'il y ait à distinguer, d'ailleurs, si le tiers est intéressé ou non à payer, ni s'il paye en son propre nom ou au nom du débiteur. [Comp. 1236, 2e al; 1250-1°.] 503. Le débiteur peut subroger lui-même aux droits du créancier, sans le consentement de celui-ci, un tiers qui lui prête les sommes ou valeurs nécessaires à l'acquittement de sa dette. A cet effet, l'acte d'emprunt en mentionne la destination, et la quittance porte l'origine des valeurs données en payement. Les actes authentiques ou ayant date certaine sont seuls admis comme preuve desdites opérations, à l'égard des tiers. [1250-2° ; C. it., 1252.] Néanmoins, s'il s'est écoulé entre l'emprunt et le payement un intervalle de temps plus long qu'il n'est nécessaire, les tribunaux peuvent déclarer la subrogation non avenue. 504. La subrogation a lieu de plein droit: 1°  Au profit de celui qui, étant tenu d'une obligation avec d'autres ou pour d'autres, soit personnellement, soit comme tiers détenteur d'un bien grevé de privilége ou d'hypothèque, avait intérêt à acquitter ladite obligation; [875, 1251-2° et 3°, 2029.] 2°  Au profit du créancier qui paye un autre créancier, soit pour prévenir une action hypothécaire, soit pour arrêter une saisie immobilière ou une demande en résolution de contrat; [1251-1°.] 3°  Au profit de l'héritier bénéficiaire et de l'héritier apparent et de bonne foi qui payent de leurs biens tout ou partie des dettes de la succession. [1251-4°.] 505. La subrogation établie par les trois articles précédents permet au subrogé d'exercer tous les droits et actions, tant réels que personnels, qui appartenaient à l'ancien créancier comme effets ou comme garanties de sa créance, sous les exceptions ci-après: 1°  Si les parties ont limité les droits et actions transmis au subrogé, cette limitation est observée; 2°  Si c'est un tiers détenteur qui a payé la dette en cette qualité, il n'est subrogé contre la caution que pour les sommes dont il n'a pu dégrever l'immeuble, au moyen de la purge des hypothèques, sans faire une avance de fonds; [Comp. 1252, 1er al.] 3°  Dans le même cas de payement par un tiers détenteur, s'il y a d'autres immeubles hypothéqués à la même dette et se trouvant dans les mains d'autres tiers détenteurs, la subrogation de celui qui a payé ne s'exerce contre ces derniers que proportionnellement à la valeur respective des immeubles; 4°  Si la dette a été payée par l'un des codébiteurs qui étaient garants les uns des antres, celui qui l'a payée n'est subrogé contre chacun des autres que dans la mesure où ceux-ci doivent y contribuer définitivement. [Comp. 875,1214.] 506. Le subrogé ne peut exercer les actions du créancier que jusqu'à concurrence des sommes par lui déboursées. 507. La subrogation ne doit pas nuire au créancier primitif; en conséquence, il peut refuser pour une de ses créances le payement avec subrogation qui diminuerait ses sûretés pour d'autres créances. [1252, 2e al.] 508. Si le payement avec subrogation n'a eu lieu que partiellement, le subrogé concourt avec le créancier primitif dans la proportion de ce qu'il a payé. [Contrà, 1252, 3e al.; Sic, C. it., 1254.] Toutefois, le créancier exercerait seul la résolution du contrat, faute de payement intégral, sauf à indemniser le subrogé. 509. Le créancier désintéressé entièrement par un payement avec subrogation doit remettre au subrogé les titres et gages de la créance. S'il n'a reçu qu'un payement partiel, il doit communiquer les titres au subrogé, autant que de besoin, et lui permettre de veiller à la conservation du gage. 510. Les dispositions des trois §§ précédents, sur les conditions requises pour la validité du payement, sur l'imputation des payements et sur les offres et la consignation, sont applicables au payement avec subrogation. SECTION IV. DE LA NOVATION. Art. 511. La novation, ou changement d'une première obligation en une nouvelle obligation, a lieu de quatre manières: 1°  Lorsque les parties conviennent d'un nouvel objet de l'obligation substitué au premier; 2°  Lorsque, l'objet dû restant le même, les parties conviennent qu'il sera dû à un autre titre ou par une autre cause; 3°  Lorsqu'un nouveau débiteur prend la place de l'ancien; 4°  Lorsqu'un nouveau créancier est substitué au premier. [1271.] 512. Il n'y a pas novation, si les parties ont seulement modifié l'obligation par l'addition ou le retranchement, soit d'un terme ou d'une condition, soit d'une sûreté réelle ou personnelle, par le changement du lieu de l'exécution, ou par celui de la quantité ou de la qualité de la chose due. Il n'y a pas davantage novation dans le règlement d'une dette en billets ou effets de commerce, si la cause de la dette y est indiquée, ni dans l'acte récognitif d'une dette antérieure, même en forme exécutoire. 513. Le créancier ne peut consentir une novation, que s'il est capable de disposer, au moins à titre onéreux, de sa première créance et des sûretés qui la garantissaient. La même règle s'applique aux administrateurs et mandataires conventionnels, légaux ou judiciaires, lorsque leur mandat n'est pas général. [1272.] 514. L'intention de nover ne se présume pas chez le créancier: elle doit résulter clairement de l'acte ou des circonstances. [1273.] Toutefois, lorsqu'il est douteux s'il y a novation ou cumul de deux obligations entre les mêmes parties, le doute s'interprète en faveur du débiteur et dans le sens de la novation, conformément à l'article 380. 515. Lorsque la première obligation était sous condition, soit suspensive, soit résolutoire, la novation est présumée affectée de la même condition. Réciproquement, si la nouvelle obligation est conditionnelle, la novation n'a lieu que si la condition suspensive s'accomplit ou si la condition résolutoire fait défaut; Sauf, dans l'un et l'autre cas, la preuve que les parties ont entendu faire une novation pure et simple. 516. La novation est nulle et la nouvelle obligation ne se forme pas, si la première n'existait pas légalement, à l'origine, ou avait été éteinte ou annulée par une des causes que la loi autorise. De même, la première obligation subsiste, si la nouvelle ne réunit pas les conditions légales d'existence et de validité; A moins, dans l'un et l'autre cas, qu'il ne soit prouvé que les parties ont entendu substituer une obligation civile à une obligation naturelle, ou réciproquement. 517. Le débiteur qui a valablement contracté une nouvelle dette pour en nover une première, sans protestations ni réserves, ne peut plus opposer au créancier les moyens de nullité qui existaient contre la première obligation et dont il avait connaissance. Il en est même, s'il s'est engagé envers un nouveau créancier sur délégation du premier, conformément à l'article suivant. [C. it., 1278.] 518. La novation par changement de débiteur s'opère, soit par délégation ou mandat du premier débiteur au nouveau, soit par l'intervention spontanée de celui-ci, sans le consentement du premier débiteur. [1274.] La délégation est parfaite ou imparfaite. L'intervention spontanée d'un tiers constitue une expromission ou une simple adpromission, comme il est expliqué ci-après. 519. La délégation n'est parfaite et n'opère novation que si le créancier a manifesté clairement l'intention de décharger le premier débiteurs; à défaut de cette intention, la délégation est imparfaite et les deux débiteurs peuvent être poursuivis solidairement. [1275.] Au cas d'intervention spontanée d'un tiers, si le créancier a déchargé le premier débiteur, il y a novation par expromission; dans le cas contraire, il y a simple adpromission et le créancier acquiert un second débiteur pour le tout, mais sans solidarité. 520. Dans les cas de délégation parfaite et d'expromission, si le nouveau débiteur ne peut acquitter la dette, le créancier n'a de recours en garantie contre l'ancien que si le nouveau débiteur était déjà insolvable au moment de la délégation ou de l'expromission et à l'insu du créancier; sans préjudice des conventions particulières qui peuvent étendre ou restreindre cette garantie. [1276.] 521. La novation par changement de créancier n'a lieu que du consentement tant du débiteur que de l'ancien et du nouveau créancier. 522. Lorsqu'un débiteur est délégué par son créancier, soit gratuitement, soit en acquit d'une dette du délégant, avec réserve de tout ou partie des sûretés qui garantissaient la créance primitive, comme il est prévu à l'article 525, le délégataire n'est saisi de ladite créance à l'égard des tiers que sous les conditions prescrites à l'article 367 pour la cession de créance. 523. La novation faite entre le créancier et l'un des débiteurs solidaires ou l'un des codébiteurs d'une dette indivisible libère les autres débiteurs et les cautions. Mais, si le créancier a mis comme condition à la novation l'accession des codébiteurs et des cautions et que les uns ou les autres s'y refusent, la novation est non avenue. [1281.] La novation faite avec un des créanciers solidaires ne libère le débiteur que de la part de ce créancier. Si la première dette était indivisible, la novation faite avec l'un des créanciers laisse subsister pour le tout le droit de poursuite des autres, à charge de l'indemnité prescrite à l'article 466. 524. La novation faite avec une caution est présumée porter sur le cautionnement et non sur la dette principale, si l'intention contraire des parties n'est prouvée: elle ne libère ni les débiteurs principaux ni les autres cautions. 525. Les sûretés réelles qui garantissaient la première créance ne passent pas à la nouvelle, à moins que le créancier ne les ait réservées. [1278.] Cette réserve peut s'appliquer tant aux biens hypothéqués qui sont restés dans les mains des codébiteurs et des cautions qu'à ceux qui se trouvent dans les mains de tiers détenteurs. [Comp. 1280.] Le consentement à cette réserve n'est nécessaire que de la part de celui avec lequel la novation est faite. Dans tous les cas, les biens ne restent hypothéqués que dans la mesure de la première obligation. SECTION III. DE LA REMISE CONVENTIONNELLE. Art. 526. La remise ou décharge conventionnelle de la dette, pour tout ou partie, peut avoir lieu à titre onéreux ou à titre gratuit. Dans le premier cas, elle constitue, suivant les circonstances, une dation en payement, une novation, une transaction ou une résolution; dans le second cas, elle constitue une donation, sans toutefois être soumise à aucune solennité particulière. La remise partielle dite concordat, accordée au débiteur failli, par délibération des créanciers, est réglée par le Code de commerce. [C. com, fr., 507.] 527. La remise de la dette peut être expresse ou tacite; mais, dans le doute, elle ne se présume pas, si ce n'est dans les cas spécialement prévus par la loi. 528. La remise de la dette faite au débiteur principal libère les cautions. [1287, 1er al.] Celle faite à l'un des débiteurs solidaires libère les autres, à moins que le créancier n'ait réservé ses droits contre ceux-ci; dans ce cas même, la réserve ne vaut que sous la déduction de la part de celui auquel la remise a été faite. [1215, 1284, 1285.] Il en est de même de la remise faite à l'un des débiteurs d'une dette indivisible; toutefois, si la dette est indivisible par sa nature et que le créancier ait réservé ses droits contre les autres débiteurs, il les exercera pour le tout, en tenant compte au débiteur poursuivi de la part du gratifié. 529. La remise de la dette faite à une caution libère les débiteurs principaux et les autres cautions. [Comp. 1287, 2e et 3e al.] 530. Le codébiteur et la caution auxquels la remise de la dette a été faite n'ont de recours contre les codébiteurs ou les cofidéjusseurs que pour la valeur de ce qu'ils ont effectivement fourni pour obtenir du créancier la décharge commune. 531. La simple remise de la solidarité ou de l'indivisibilité conventionnelle faite à l'un des débiteurs l'affranchit de la part des autres et affranchit les autres de la sienne. [1210.] S'il y a remise de l'indivisibilité naturelle à l'un des débiteurs, le créancier conserve le droit de demander le tout à chacun des autres; mais en lui tenant compte, en valeur, de la part du gratifié. 532. Le créancier est présumé avoir entendu remettre la solidarité ou l'indivisibilité conventionnelle à l'un des débiteurs dans les cas suivants: 1°  S'il a reçu de l'un d'eux une somme ou valeur déclarée être la part de celui-ci dans la dette, sans réserver ses droits de garantie; [1211, 1er et 2e al.] 2°  S'il a formé contre l'un d'eux une demande en justice qualifiée ‘‘pour sa part.” sans réserve de sa garantie, et que celui-ci ait acquiescé à la demande ou ait été condamné à payer; [1211, 3e al.] 3°  S'il a reçu de l'un des débiteurs le payement de sa part dans les intérêts ou arrérages de la dette, pendant dix ans consécutifs et sans réserves. [1212.] 533. La remise du cautionnement seul, faite à une caution, ne libère pas le débiteur principal et ne libère les autres cautions que de la part de celle à laquelle le cautionnement a été remis; sauf le cas où les cautions sont solidaires entre elles, auquel cas toutes les cautions sont libérées, si le créancier n'a pas réservé son droit, contre les autres, comme il est dit à l'article 528, 2e alinéa. [1287, 2e et 3e al.] 534. La renonciation du créancier au gage ou à l'hypothèque ne diminue pas la créance elle-même; mais elle autorise les cautions à demander leur décharge par le créancier, si elles justifient qu'en s'engageant elles ont compté sur la subrogation à ces garanties. [1286, 2037.] 535. Ce qu'un codébiteur ou une caution a donné au créancier pour obtenir la simple remise de la solidarité, de l'indivisibilité ou du cautionnement ne diminue pas la dette et ne peut être l'objet, d'aucun recours contre les autres coobligés. [Contrà, 1288.] 536. La remise de l'obligation de livrer ou de restituer un corps certain n'entraîne pas rétrocession ou cession au profit du débiteur et laisse subsister le droit de revendication du propriétaire. 537. La remise, soit de la dette même, soit de la solidarité seulement, faite par l'un des créanciers solidaires, n'est opposable aux autres que pour la part de celui-ci dans la créance. [1298, 2e al.] Si l'obligation est indivisible, la remise faite par l'un des créanciers ne peut nuire aux autres, lesquels exerceront la créance entière, conformément à l'article 466. [1224, 2e al.] 538. Le créancier est présumé avoir fait remise de la dette, lorsqu'il a livré volontairement au débiteur l'acte original portant son engagement, même sans y ajouter aucune mention libératoire; sauf le droit pour le créancier de prouver qu'il a eu une intention différente. [1282.] La tradition volontaire de la copie ou expédition d'un acte notarié ou d'un jugement, même revêtue de la formule exécutoire, ne suffit pas à faire présumer la remise de la dette; sauf aux tribunaux à l'induire des circonstances du fait. [Contrà, 1283.] Au surplus, la détention desdits actes par le débiteur en fait présumer, jusqu'à preuve contraire, la tradition volontaire de la part du créancier. 539. La destruction, lacération ou cancellation volontaire par le créancier, soit du titre entier, soit de la signature du débiteur ou de toute autre partie essentielle du titre, fait présumer la remise de la dette, au même degré que la tradition volontaire, sous les distinctions portées à l'article précédent. Lesdites altérations sont présumées, jusqu'à preuve contraire, faites par le créancier ou de son consentement, si l'acte était alors en sa possession. [1332, 1er al.] 540. La remise de la dette, expresse ou tacite, prouvée directement ou présumée légalement, est présumée, jusqu'à preuve contraire, faite à titre onéreux. Toutefois, si la remise a eu lieu entre personnes respectivement incapables de se donner ou de recevoir l'une de l'autre, la preuve directe que la remise a été faite à titre onéreux devra être fournie. SECTION IV. DE LA COMPENSATION. Art. 541. Lorsque deux personnes sont créancière et débitrice l'une de l'autre, il y a lieu à la compensation légale, facultative ou judiciaire, sous les conditions et distinctions ci-après. Les deux dettes s'éteignent alors jusqu'à concurrence de la plus faible. [1289, 1290.] 542. La compensation légale s'opère de plein droit, même à l'insu des parties, lorsque les deux dettes sont principales, fongibles entre elles, liquides, exigibles, et lorsque d'ailleurs la compensation n'est pas prohibée par une disposition de la loi ou par la volonté expresse ou tacite des parties. [1290, 1291, 1er al.] 543. Le débiteur principal ne peut opposer la compensation de ce que le créancier doit à la caution; mais la caution poursuivie peut opposer au créancier la compensation, tant de ce qu'il doit au débiteur principal que de ce qu'il lui doit à elle-même. [1294, 1er et 2e al.] Le débiteur solidaire ne peut opposer la compensation de ce que le créancier doit à son codébiteur que pour la part de ce dernier dans la dette; mais, de son propre chef, il peut l'opposer pour le tout, s'il y a lieu. [1294, 3e al.; C. ital.. 1290.] S'il y a plusieurs créanciers solidaires, le débiteur peut toujours opposer au poursuivant la compensation de tout ce qui lui est dû par l'un quelconque des créanciers. Si l'obligation est indivisible, soit entre les débiteurs, soit entre les créanciers, la compensation est admise de la même manière que dans la solidarité, soit passive, soit active. 544. Les prestations périodiques dues par l'une des parties à l'autre, de denrées cotées au marché public local, se compensent avec des sommes d'argent dues par l'autre partie. [1291, 2e al.] 545. Les dettes sont liquides, lorsque leur existence, leur nature et leur quotité sont certaines, lors même qu'elles seraient contestées de bonne foi. 546. Le terme de grâce accordé par le tribunal ne fait pas obstacle à la compensation; il en est de même du terme accordé gratuitement par le créancier, sur la demande du débiteur. [1292; C. it., 1288.] Si l'une des deux dettes est sous condition résolutoire, la compensation a lieu, sauf la résolution éventuelle. 547. Si les deux dettes ne sont pas payables au même lieu ou dans la même monnaie, la compensation n'en a pas moins lieu, sauf à tenir compte, dans le premier cas, des frais de transport des espèces ou du prix du change de places, et, dans le second cas, du change des monnaies. [1296.] 548. La compensation légale n'a pas lieu: 1°  Lorsque l'une des dettes a pour cause une appropriation injuste du bien d'autrui; [1293-1°.] 2°  Lorsqu'il s'agit de la restitution d'un dépôt dit irrégulier; [Comp. 1293-2°.] 3°  Lorsque l'une des créances a pour objet une valeur insaisissable sur le créancier; [1293-3°.] 4°  Lorsque l'une ou l'autre des parties a renoncé d'avance au bénéfice de la compensation, ou lorsque le but qu'elle se proposait, en devenant créancière, ne serait pas atteint avec la compensation. [C. it., 1289-4°.] 549. La simple signification d'une créance, faite au débiteur cédé, ne lui enlève pas le droit d'opposer au cessionnaire les causes antérieures de compensation légale qu'il eût pu opposer au cédant. [1295, 2e al.] Si le cédé accepte la cession, sans réserver ses droits à la compensation légale déjà acquise contre le cédant, il ne peut plus s'en prévaloir contre le cessionnaire; [1295, 1er al.] Sauf, dans les deux cas, le droit de se faire rembourser par le cédant les sommes ou valeurs dont il n'a pu opposer la compensation. 550. Celui entre les mains duquel est pratiquée une saisie-arrêt ne peut opposer au saisissant la compensation des créances qu'il acquerrait postérieurement contre le debiteur saisi. Il ne peut même opposer les causes antérieures de compensation que s'il les a déclarées dans les formes et délais fixés au Code de Procédure civile; [C. proc. civ. fr., 557.] Sauf, dans l'un et l'autre cas, le droit de se faire colloquer, pour ce qui lui est dû, concurremment avec le saisissant, sur les sommes saisies sur lui-même. [1298.] 551. Celui qui a payé, même par erreur, une dette déjà éteinte par compensation ne peut plus exercer que la répétition de l'indû; sauf ce qui est dit à l'article suivant. [1299.] 552. Dans les cas prévus aux trois articles précédents, celui qui a reconnu, au profit du cessionnaire ou du saisissant, ou qui a payé à son créancier lui-même la dette déjà éteinte par compensation, ne peut plus se prévaloir des cautionnements, des priviléges ou hypothèques qui garantissaient son ancienne créance, à moins qu'il ne prouve avoir eu une juste cause d'ignorer la compensation acquise, auquel cas, la créance primitive lui est restituée, avec ses sûretés et ses autres caractères. [1299; C. it., 1294.] 553. La compensation facultative peut être opposée par celle des parties en faveur de laquelle la loi refuse la compensation légale; dans tous les cas, la compensation peut être conventionnelle, si tous les intéressés y consentent. La compensation facultative ne rétroagit pas. 554. La compensation judiciaire s'obtient au moyen d'une demande reconventionnelle du défendeur tendant à faire reconnaître ou liquider une créance à son profit contre le demandeur. Les tribunaux peuvent alors, suivant les cas, ou statuer d'abord sur l'action principale, ou y surseoir et statuer conjointement sur les deux actions, en opérant la compensation et en condamnant seulement celui dont la dette est la plus forte. La compensation judiciaire rétroagit au jour où elle a été opposée. 555. Si l'une des parties a envers l'autre plusieurs dettes sujettes à compensation légale ou judiciaire, l'ordre dans lequel ces dettes se compensent est celui de l'imputation légale des payements, tel qu'il est réglé par l'article 493. [1297.] Si la compensation est facultative ou conventionnelle, l'imputation suit les règles portées aux articles 491 et 492, ou le commun accord des parties. SECTION V. DE LA CONFUSSION. Art. 556. L'obligation s'éteint par confusion lorsque les qualités de créancier et de débiteur de la même obligation se trouvent réunies dans la même personne, par succession ou autrement. [1300.] Si ladite confusion se trouve résolue, rescindée ou révoquée, pour une cause légale antérieure, l'obligation est considérée comme n'ayant pas été éteinte. 557. Si le créancier succède à l'un des débiteurs solidaires, ou réciproquement, la dette solidaire n'est éteinte que pour la part de ce débiteur. [1209, 1301, 3e al.] La confusion n'a lieu également que pour une part, si la confusion s'opère entre l'un des créanciers solidaires et le débiteur. 558. Si l'obligation est indivisible, la confusion entre l'un des créanciers et l'un des débiteurs laisse subsister l'obligation en entier, au profit ou à la charge des autres; mais celui en la personne duquel la confusion a eu lieu ne peut poursuivre ou être poursuivi pour le tout qu'en fournissant ou en recevant l'indemnité d'une part, conformément à l'article 466. 559. S'il y a réunion en une même personne des qualités de deux créanciers ou de deux débiteurs solidaires, il n'y a aucune extinction de droit ou d'obligation, et celui en la personne duquel la réunion s'est opérée peut agir ou être poursuivi pour le tout, tant en son propre nom qu'au nom et du chef de celui auquel il a succédé, suivant l'intérêt du créancier. Il en est de même d'une obligation indivisible activement ou passivement. 560. Si la caution succède au créancier, ou réciproquement, le cautionnement est éteint avec tous ses accessoires. [Comp., 1301, 1er et 2e al.] Si le débiteur succède à la caution, ou réciproquement, le créancier conserve son action tant contre le débiteur principal que contre les cofidéjusseurs et contre les garants de la caution; de même, les gages et hypothèques attachés au cautionnement subsistent. SECTION VI. DE L'IMPOSSIBILITÉ D'EXÉCUTER. Art. 561. L'obligation est éteinte lorsqu'elle a pour objet la livraison d'un corps certain et que, sans la faute du débiteur et avant qu'il soit en demeure, l'objet vient à périr, à être perdu ou retiré du commerce; il en est de même si l'obligation a pour objet une chose à prendre dans un ensemble de choses déterminées et que la livraison de toutes soit devenue impossible. [1302, 1er al.] L'obligation de faire ou de ne pas faire est éteinte également lorsque l'exécution ou l'abstention est devenue impossible, dans les mêmes conditions. 562. Le débiteur n'est pas libéré par les causes qui précèdent, s'il a pris à ses risques et périls les cas fortuits et la force majeure, ou s'il est constitué en demeure, soit par le fait du créancier, soit par la nature de l'obligation, conformément aux articles 356 et 404. [1302, 2e al.] Celui qui est tenu par un délit de rendre la chose d'autrui ou d'indemniser de sa perte est considéré comme étant de plein droit en demeure. [1302, 4e al.] 563. Le débiteur est tenu de prouver le cas fortuit ou la force majeure qu'il invoque. Si, étant en demeure, il allègue pour sa libération, conformément à l'article 355, 2e alinéa, que la chose aurait également péri chez le créancier, il doit en faire la preuve. 564. Lorsque le débiteur est libéré par l'impossibilité d'exécuter, il n'a droit à la contre-valeur qui lui avait été promise que dans la mesure des sacrifices qu'il avait déjà pu faire en vue de l'exécution. 565. Dans le cas de perte seulement partielle, ou si le débiteur a quelque action en réparation contre un tiers, à raison de la perte, le créancier peut réclamer ce qui reste de la chose ou exercer ladite action. [1303; C. it., 1299.] SECTION VII. DE LA RESCISION OU NULLITÉ. Art. 566. Les obligations contractées par les incapables ou par les personnes dont le consentement a été donné par erreur, extorqué par violence ou surpris par le dol de l'autre partie, peuvent être rescindées ou annulées en justice pendant cinq ans, soit sur leur demande ou sur celle de leur représentant, soit sur l'exception de nullité par eux opposée à l'action pour l'exécution. [1304, 1er al.] Le même délai est accordé aux majeurs pour l'exercice de l'action en rescision pour lésion, ou pour opposer l'exception de lésion; sauf les cas particuliers où la loi les limite à un délai plus court. 567. Le délai de cette prescription est suspendu: dans le cas de violence, jusqu'à ce qu'elle ait cessé; dans le cas d'erreur, jusqu'à ce qu'elle ait été reconnue; dans le cas de dol, jusqu'à ce qu'il ait été découvert; dans le cas d'incapacité, jusqu'à ce qu'elle ait cessé; [1304, 2e et. 3e al.] Toutefois, s'il s'agit de conventions passées avec un interdit pour démence ou avec un aliéné, la prescription ne commence à courir qu'après que l'acte qu'ils ont consenti leur a été notifié en substance ou est parvenu à leur connaissance, depuis qu'ils ont recouvré la capacité. [Loi fr. du 30 juin 1838, art. 39.] A l'égard des condamnés interdits légalement, l'action et l'exception de nullité ne se prescrivent, tant pour eux que contre eux, qu'à partir de l'expiration de leur peine. Dans le cas de lésion d'un majeur, la prescription commence à courir du jour du contrat. Les causes ordinaires de suspension et d'interruption de la prescription libératoire sont, en outre, applicables à la présente prescription. 568. Si la personne à laquelle appartenait l'action en nullité est décédée avant l'expiration du susdit délai, l'action passe à ses héritiers. Elle se prescrit, à l'égard de ceux-ci, à partir de l'ouverture de leur droit, si le délai n'avait pas encore commencé à courir contre le défunt et, dans le cas contraire, par le reste du temps non encore écoulé. [C. it., 1311.] 569. Les conventions et actes faits par le tuteur, relativement aux biens du mineur ou de l'interdit, peuvent être rescindés si les formes et conditions prescrites par la loi dans l'intérêt de l'incapable n'ont pas été observées. [1314.] Il en est de même des actes faits par l'interdit dans tous les cas, par le mineur sans les formes requises, et par le prodigue ou le faible d'esprit sans l'assistance de leur conseil judiciaire; [502.] Sans préjudice des actions en rescision ou en nullité pour les causes qui ouvrent ces actions aux personnes capables. 570. A l'égard des conventions ou actes pour lesquels aucune forme ou condition particulière n'est requise, s'ils ont été consentis par le mineur seul, l'action en rescision n'est recevable que s'il y a eu pour lui une lésion ou un préjudice appréciable en argent ou autrement. Pareillement, les actes de même nature passés par le mineur émancipé sans l'assistance de son curateur, lorsqu'elle était seule requise par la loi, ne sont attaquables que pour lésion. [1305.] La lésion s'apprécie au moment où l'acte a été passé: il n'est pas tenu compte de celle qui résulte d'un événement casuel et imprévu. [1306.] 571. La simple déclaration de majorité faite par le mineur ne fait pas obstacle à sa restitution pour incapacité ou pour lésion, s'il n'a pas d'ailleurs usé de manœuvres frauduleuses pour faire croire à sa majorité. [1037.] Il en est de même pour les fausses déclarations des autres incapables. 572. Les mineurs émancipés autorisés à faire le commerce ou à exercer une industrie sont réputés majeurs pour les actes relatifs à leur commerce ou à leur industrie. [487, 1308.] Toutefois, ils ne peuvent aliéner leurs immeubles que conformément au droit commun de la minorité. [C. com, fr., 2.] 573. Les actes et engagements de la femme mariée ne peuvent être rescindés, sur sa demande ou sur celle du mari, que dans les cas déterminés par la loi, au sujet des Droits et Devoirs respectifs des Époux. [1124, 1125.] 574. Le majeur qui a obtenu la rescision d'un acte ou engagement, pour vice de consentement ou pour lésion, est tenu de restituer tout ce qu'il a reçu par suite dudit acte. S'il s'agit d'un incapable, il n'est tenu de restituer que ce dont il se trouve encore enrichi par suite de l'acte annulé. [1312.] Lesdites actions en restitution ne s'éteignent que par la prescription ordinaire. 575. Les aliénations d'immeubles viciées par incapacité, par erreur ou violence, ou sujettes à rescision pour lésion, peuvent être annulées contre les tiers acquéreurs, sous les distinctions et conditions portées aux articles 372 et 373. 576. Le défendeur à l'action en rescision pour lésion peut en arrêter l'effet, jusqu'à ce que le jugement du fait soit devenu inattaquable, en offrant au demandeur l'indemnité entière de la lésion justifiée et les frais de justice; [891, 1681; C. ital., 1534.] 577. Indépendamment de la prescription établie par les articles 566 à 568, l'action en nullité ou en rescision ne peut plus être exercée lorsque la partie intéressée a confirmé la convention annulable, soit expressément, soit tacitement, après le moment où l'action est devenue prescriptible, conformément à l'article 567. [1311, 1338, 2e al.] 578. La confirmation expresse résulte d'un acte formel relatant la substance de la convention annulable, indiquant la cause de la rescision dont elle est entachée et déclarant la volonté de renoncer à la demande en nullité. [1338, 1er al.] Si l'acte est entaché de plusieurs vices, la confirmation expresse n'en efface que celui ou ceux qui ont été spécialement relatés. Les actes rescindables pour lésion au profit de majeurs ne sont susceptibles que de confirmation expresse et à condition que ladite confirmation n'ait pas lieu dans l'acte même sujet à rescision. [888, 2e al., 1674.] 579. La confirmation tacite résulte de l'exécution volontaire, soit totale, soit partielle, de la convention, ou même de l'exécution forcée, sans protestations ni réserves; elle résulte aussi de la novation et de la dation volontaire d'une garantie réelle ou personnelle; elle résulte encore, pour le créancier, de la demande en justice à fin d'exécution et de l'aliénation volontaire de tout ou partie des choses acquises par une convention annulable. [1338, 2e al.] Les autres cas de confirmation tacite sont laissés à l'appréciation des tribunaux. 580. La confirmation ne peut nuire aux ayant-cause particuliers de celui auquel appartenait l'action en nullité, lorsque leurs droits sont subordonnés à l'exercice de ladite action. [1338, 3e al., in fine.] 581. Les actes radicalement nuls ne peuvent être confirmés; sauf ce qui est dit, à l'Appendice ci-après, au sujet de la confirmation, par les héritiers, d'une donation ou d'un testament nuls en la forme. [1339, 1340.] 582. L'action ayant pour objet le redressement d'une erreur de calcul, de nom, de date ou de lieu est imprescriptible; sans préjudice de la prescription des droits qui en dépendent. [2058.] SECTION VIII. DE LA RÉVOCATION ET DE LA RÉSOLUTION. Art. 583. La révocation des engagements contractés en fraude des créanciers et la prescription de l'action révocatoire sont réglées aux articles 360 à 364. Les causes spéciales de révocation établies en faveur du donateur et de ses héritiers sont réglées à la matière des Donations. 584. Les obligations s'éteignent par la résolution de la convention, stipulée expressément ou obtenue en justice, conformément aux articles 429, 441 et 442. [1234.] Lorsque la résolution doit être demandée en justice, l'action résolutoire ne se prescrit que par le laps de temps de la prescription ordinaire, sauf le cas où la loi fixe un délai plus court. [2262.] SECTION IX. DE LA PRESCRIPTION. Art. 585. La prescription libératoire est réglée, conjointement avec la prescription acquisitive, à la IIe Partie du Livre Ve et dernier. [1234.] APPENDICE. DES OBLIGATIONS NATURELLES. Art. 586. L'exécution des obligations naturelles ne peut être exigée ni par voie d'action, ni par l'exception de compensation: elle doit être volontaire de la part du débiteur, à la bonne foi et à raison duquel elle est laissée par la loi. L'obligation naturelle peut aussi être acquittée par un tiers, soit au nom du débiteur, soit en son propre nom. 587. Ce qui a été volontairement payé ou acquitté, soit par le débiteur lui-même, soit par un tiers, ne peut être répété comme indûment payé. [1235, 2e al.] Il n'est pas nécessaire que la cause du payement ait été exprimée, pourvu que la preuve de l'intention d'acquitter une dette naturelle résulte des circonstances du fait. 588. A défaut d'exécution volontaire, l'obligation naturelle peut être l'objet d'une reconnaissance formelle du débiteur, d'un cautionnement par un tiers, d'une novation ou de la dation d'un gage ou d'une hypothèque, soit de la part du débiteur, soit de la part d'un tiers. Dans ces divers cas, l'obligation naturelle reconnue, novée ou garantie, produit les effets civils ordinaires. [2012.] 589. Lorsque l'exécution, la novation ou la garantie de l'obligation naturelle ont été procurées par un tiers, sans mandat du débiteur, celui-ci n'est tenu, pour le remboursement, que d'une obligation naturelle. 590. L'exécution volontaire, la reconnaissance ou la garantie des obligations naturelles ne sont valables que si elles émanent de personnes capables d'aliéner ou de s'obliger. 591. L'obligation naturelle peut résulter d'une convention nulle à l'origine, pour erreur excluant le consentement civil, pour défaut ou insuffisance de détermination de l'objet ou pour défaut des formes solennelles requises. Toutefois, s'il s'agit d'une donation nulle pour défaut de formes, il ne peut y avoir exécution ou reconnaissance d'une obligation naturelle par le donateur lui-même, mais seulement par ses héritiers ou ayant-cause. [1339, 1340.] La présente disposition est applicable aux héritiers de celui qui a laissé un testament nul en la forme. 592. La convention nulle pour défaut de cause ou pour cause illicite ne peut produire d'obligation naturelle; il en est de même de la convention ayant pour objet des choses sur lesquelles il est défendu de contracter, par raison d'ordre public. 593. La nullité prononcée par les articles 343 et 344, à l'égard de la promesse du fait d'autrui et de la stipulation dans l'intérêt d'autrui, ne met pas obstacle à la formation d'une obligation naturelle de la part du promettant. 594. En dehors des cas où le débiteur peut être civilement tenu à raison d'un enrichissement indû, d'un dommage injuste ou des dispositions de la loi, il peut valablement se reconnaître tenu, à ce titre, d'une obligation naturelle. [1906.] 595. Une obligation naturelle peut subsister après que l'annulation, la révocation ou la résolution d'une obligation civile a été prononcée en justice. Il en est de même après qu'une obligation civile a été éteinte par un autre mode légal d'extinction. 596. Celui qui a usé du bénéfice de la prescription libératoire ou acquisitive, en faveur duquel est intervenu un jugement passé en force de chose jugée, ou qui pourrait invoquer toute autre présomption ou preuve directe de son droit ou de sa libération, peut encore se reconnaître obligé naturellement. 597. La cession civile d'une créance naturelle n'est admise que de la part du créancier d'un failli et pour les sommes seulement dont il a été fait remise à celui-ci par un concordat. [C. comm. fr., 604.] 598. La dette naturelle peut être solidaire ou indivisible, si la dette civile qu'elle supplée ou à laquelle elle survit avait ce caractère. 599. Lorsque les tribunaux ordinaires sont appelés à statuer sur l'exécution volontaire, la reconnaissance ou les autres effets légaux d'une obligation naturelle, ils jugent souverainement l'intention du débiteur; mais leur décision est sujette à cassation, s'ils ont fait une fausse application des dispositions légales qui précèdent. 600. Les parties peuvent, par un compromis, soumettre à des arbitres le jugement de l'existence ou de l'étendue d'une obligation naturelle, avant même qu'il y en ait eu exécution ou reconnaissance volontaire; dans ce cas, la sentence arbitrale déclarant l'obligation naturelle est civilement obligatoire; mais elle est nulle, si les arbitres ont admis l'existence d'une obligation naturelle dans un cas où la loi la dénie, ou l'ont déclarée impossible quand la loi permet de la reconnaître; à moins, dans l'un et l'autre cas, que les parties ne leur aient donné les pleins pouvoirs d'amiables compositeurs. [C. pr. civ. fr., 1019.] LIVRE III. DES MOYENS D'ACQUÉRIR LES BIENS. DISPOSITION PRÉLIMINAIRE. Art. 601. Indépendamment des causes d'acquisition des droits, tant réels que personnels, déjà rencontrées dans les deux Parties du Livre précédent, les mêmes droits peuvent encore être acquis, soit à titre particulier ou singulier, soit à titre général ou universel, comme il est expliqué dans les deux Parties du présent Livre. Celui qui acquiert à titre universel succède à toutes les obligation de son auteur, en même temps qu'à tous ses droits, sauf les exceptions portées par la loi. PREMIÈRE PARTIE. DES MOYENS D'ACQUÉRIR A TITRE PARTICULIER. CHAPITRE PREMIER. DE L'OCCUPATION. Art. 602. L'occupation est un moyen d'acquérir la propriété des choses mobilières sans maître, par une prise de possession originaire, avec intention de se les approprier. [C. it., 711.] 603. Celui qui, sans autorisation, a pris du gibier dans une propriété close où le propriétaire a mis ou entretenu le gibier, doit le restituer en nature ou en équivalent. Il en est de même de celui qui a pris du poisson dans un étang, un lac ou un cours d'eau privés et clos. 604. Des lois spéciales règlent l'exercice des droits de chasse et de pêche ainsi que l'acquisition des épaves maritimes, fluviales et terrestres. Il en est de même des prises maritimes et du butin faits en temps de guerre. [C. fr., 715, 716.] 605. En cas de contestation sur l'occupation d'une chose prétendue abandonnée par l'ancien propriétaire, la preuve de l'abandon volontaire est à la charge de celui qui se prévaut de l'occupation. 606. La propriété du trésor découvert dans la chose d'autrui par le seul effet du hasard et dont le propriétaire est inconnu appartient pour moitié à l'inventeur. Les droits du propriétaire de la chose dans laquelle le trésor était enfoui ou caché sont réglés ci-après, au Chapitre de l'Accession. [716; C. it., 714.] 607. L'ancien propriétaire du trésor ne peut faire valoir son droit contrairement aux attributions qui précèdent que dans le délai de trois ans après la découverte. Ce délai est réduit pour celui qui est en même temps le propriétaire de la chose dans laquelle le trésor a été découvert, à un an après qu'il a eu connaissance de la découverte. Mais la prescription civile ordinaire reste applicable si les possesseurs du trésor sont de mauvaise foi. CHAPITRE II. DE L'ACCESSION. Art. 608. Le propriétaire d'une chose, soit immobilière, soit mobilière, acquiert tout ce qui y est uni accessoirement, sous les distinctions et sauf les indemnités déterminées ci-après. [C. fr., 546, 551.] SECTION PREMIÈRE. DE L'ACCESSION RELATIVE AUX IMMEUBLES. Art. 609. Toutes constructions, plantations et ouvrages quelconques, faits au-dessus et au-dessous du sol ou des bâtiments, sont présumés faits par le propriétaire desdits sol et bâtiments et à ses frais, si le contraire n'est prouvé. [553.] Dans tous les cas, la propriété desdits ouvrages et constructions lui appartient, s'il n'y a titre ou prescription au profit d'un tiers. [Ibid.] En ce qui concerne les plantations, le cas est réglé à l'article 611. 610. Si le propriétaire du sol ou des bâtiments a fait des constructions ou autres ouvrages avec des matériaux appartenant à autrui, il ne peut être forcé de détruire lesdits ouvrages et de rendre les matériaux, même s'il a été de mauvaise foi. Il ne peut non plus en imposer la reprise à celui auquel les matériaux appartenaient. Mais il sera condamné à indemniser ce dernier, conformément à l'article 405, sous les distinctions qui y sont portées. [C. fr. 554.] 611. A l'égard des plantations d'arbres, arbustes ou plantes appartenant à autrui, le propriétaire ou le possesseur du sol qui les a faites peut être contraint, dans l'année, de les arracher et de les restituer, avec indemnité, s'il y a lieu. Si le propriétaire desdits arbres ou arbustes préfère ne pas les reprendre, ou si l'année est écoulée depuis la plantation, il sera indemnisé en argent. 612. Le propriétaire ou le possesseur qui a vendu ou donné une construction pour être démolie, ou des arbres pour être arrachés ou abattus, peut toujours arrêter la démolition ou l'abattage, pour conserver les ouvrages ou plantations, en indemnisant l'acheteur ou le donataire. 613. Le possesseur de bonne foi d'un sol ou d'un bâtiment d'autrui qui a fait dans ledit sol ou bâtiment des constructions, ouvrages ou plantations avec ses propres matériaux, arbres ou arbustes, ne peut être tenu de les enlever lors de la revendication de l'immeuble par le vrai propriétaire: ce dernier lui payera, à son choix, soit le prix des matériaux et de la main-d'œuvre, soit la plus-value qui en résulte pour le fonds. Si le constructeur était possesseur de mauvaise foi, le propriétaire peut le contraindre à détruire les ouvrages et plantations, en remettant les lieux en l'état antérieur, avec indemnité, s'il y a lieu; il peut aussi conserver lesdits ouvrages et plantations, en indemnisant le possesseur, comme il est dit ci-dessus. [555.] 614. Les attérissements ou accroissements résultant de l'alluvion des cours d'eau navigables, flottables, ou non, appartiennent aux propriétaires riverains. Si l'alluvion s'est produite sur plusieurs fonds riverains, parallèlement au cours d'eau ou à peu près, chacun des propriétaires en profite pour toute la partie de son terrain qui est contigüe au cours d'eau, quelle que soit son étendue dans l'intérieur des terres. Si, au contraire, l'alluvion forme avec le cours d'eau des angles qui rendent difficile de déterminer la part revenant à chacun, en lui laissant la qualité de riverain, ils seront tous copropriétaires indivis de la partie de l'alluvion reconnue impartageable, en proportion de l'étendue de leur propriété confinant au cours d'eau dans son ancien état. Dans aucun cas, les riverains ne peuvent, sans autorisation administrative, modifier l'emplacement du chemin de halage ou du marche-pied préexistants, ni faire, sur le terrain d'alluvion intermédiaire, des constructions ou plantations qui pourraient gêner le halage des bateaux ou le service de la navigation. [556.] 615. Les riverains bénéficient, sous les mêmes distinctions et conditions, des relais ou portions du lit abandonné par un fleuve ou une rivière navigable, flottable, ou non. Toutefois, qu'il s'agisse de cours d'eau dont le lit appartient aux riverains ou au domaine public, l'accession des relais successifs ne pourra s'étendre au delà de la largeur totale de l'ancien lit et porter sur le terrain des riverains opposés. Ce droit d'accession n'a pas lieu à l'égard des lacs et étangs. Il n'a pas lieu non plus pour les lais et relais de la mer, lesquels appartiennent à l'Etat, conformément à l'article 26. [557 et 558.] Les riverains ne profitent pas des portions de rives des cours d'eau navigables ou flottables qui se trouvent mises à découvert par des travaux de canalisation ou d'endiguement exécutés par l'administration; sauf pour eux le droit de préemption, aux conditions fixées par les lois administratives. 616. Si la violence des eaux d'un fleuve ou d'une rivière arrache d'un fonds riverain une fraction du sol, chargée ou non de plantations, et la transporte sur un fonds riverain inférieur ou sur la rive opposée, sans qu'elle ait cessé d'être reconnaissable, le propriétaire dépossédé ne peut revendiquer ladite parcelle que dans l'année de l'accident, ou après l'année, si le riverain n'en a pas encore pris possession; il doit, en outre et à ses frais, faire enlever les terres et réparer les dommages causés par l'enlèvement. [559.] Il peut aussi, à toute époque, être sommé par le riverain d'avoir à opter entre la revendication et l'abandon pur et simple de la parcelle enlevée. La présente disposition s'applique, sous les mêmes conditions, aux arbres et aux récoltes déjà détachés du sol ou non et enlevés par la violence des eaux, ainsi qu'aux matériaux préparés pour une construction ou détachés de bâtiments, et à tous autres objets mobiliers, entraînés par les inondations, dans quelque direction que ce soit, et transportés sur le fonds d'autrui, pourvu qu'ils soient reconnaissables et n'aient pas le caractère d'épaves. 617. La propriété des îles et îlots formés dans le lit des fleuves et rivières navigables ou flottables appartient à l'Etat, au département ou à la commune, suivant le classement du cours d'eau comme voie de communication. [560.] Les îlots qui se forment dans les cours d'eau qui ne sont ni navigables ni flottables appartiennent aux riverains, comme le lit lui-même. Pour déterminer les droits des riverains de chaque côté, on tire une ligne longitudinale dans l'axe du cours d'eau, et chaque riverain acquiert l'ilot ou la portion de l'îlot qui se trouve de son côté. Si l'îlot se trouve en face de deux ou plusieurs propriétés du même côté, le 2e alinéa de l'article 614 est applicable. [561.] 618. Si la portion de terrain arrachée d'un fonds, comme il est dit à l'article 616, se fixe dans le cours d'eau en forme d'île ou îlot, le propriétaire peut l'occuper au lieu où elle se trouve. Mais, s'il s'agit d'un cours d'eau faisant partie du domaine public, l'Etat, le département ou la commune, suivant la distinction faite à l'article précédent, au sujet de la propriété des îles d'alluvion, peut en exiger la cession, moyennant une juste et préalable indemnité. [C. ital., 459.] 619. Si un cours d'eau navigable, flottable, ou non, se forme un nouveau bras et arrive ainsi à entourer tout ou partie d'un fonds riverain, en forme d'île, le propriétaire dudit fonds en conserve la propriété; sauf le droit d'expropriation, tel qu'il est établi à l'article précédent. [C. fr., 562; C. it., 460.] 620. Si un cours d'eau non navigable ni flottable, formant la ligne séparative entre deux fonds et appartenant aux riverains, vient à changer son cours, brusquement et en entier, la propriété du lit abandonné appartient aux riverains et se partage entre eux comme l'îlot réglé à l'article 617. S'il s'agit d'un cours d'eau navigable ou flottable, l'attribution du lit abandonné est réglée au Chapitre VIII. [563.] 621. Les poissons des étangs privés et les pigeons des colombiers qui passent dans un autre étang ou colombier, sans y avoir été attirés ou retenus par artifice, appartiennent au propriétaire chez lequel ils se sont établis, s'ils ne sont pas réclamés dans une semaine, avec justification de leur identité. [564.] A l'égard des abeilles qui se sont transportées en essaim sur un fonds voisin, elles peuvent y être suivies et réclamées pendant une semaine; toutefois, ce droit cesse après trois jours, si le voisin les a prises et retenues. [C. it., 713.] S'il s'agit d'animaux de nature sauvage, mais apprivoisés et fugitifs, la revendication peut en être exercée pendant un mois contre celui qui les a recueillis de bonne foi. SECTION II. DE L'ACCESSION RELATIVE AUX MEUBLES. Art. 622. Lorsque deux ou plusieurs choses mobilières appartenant à différents propriétaires ont été réunies par un tiers et sans leur volonté, et qu'elles peuvent être séparées facilement et sans détérioration ou dépréciation notable de l'une ou de l'autre, chacun des propriétaires peut en demander la séparation, avec indemnité, s'il y a lieu, à la charge de celui qui a fait l'adjonction. [Contrà, 566.] Peut être considérée comme détérioration la modification ou altération des choses préalable à leur adjonction. 623. Si les deux choses ne peuvent être séparées ou ne peuvent l'être qu'avec une notable détérioration ou dépréciation, ou avec trop de frais ou de lenteurs, aucun des propriétaires ne peut demander la séparation, et la chose toute entière reste au propriétaire de la chose principale, à charge par lui d'indemniser le propriétaire de la chose accessoire, dans la mesure où il est enrichi au préjudice de celui-ci. [568.] Est considérée comme chose accessoire celle qui est réunie pour l'utilité, l'agrément ou le complément de l'autre; si les deux choses sont de même caractère, à ce point de vue, la chose accessoire est celle qui a le moins de valeur. [567, 569.] Dans les autres cas, le caractère principal ou accessoire de chaque chose par rapport à l'autre est laissé à l'appréciation des tribunaux. 624. Si l'adjonction a eu lieu par la faute ou le dol du propriétaire de la chose principale et que la séparation ne doive pas avoir lieu, d'après les règles précédentes, l'indemnité du propriétaire de la chose accessoire se mesure sur le dommage qu'il éprouve, apprécié comme il est dit aux articles 390 et 405. Si ce dernier est l'auteur de l'adjonction, il ne sera indemnisé de sa perte que dans la mesure du profit de l'autre propriétaire. 625. Dans le même cas où les choses ne peuvent être séparées sans inconvénient, si aucune d'elles ne peut être considérée comme principale par rapport à l'autre, soit par sa nature, soit par sa qualité ou sa valeur, l'objet formé par l'adjonction sera commun entre les propriétaires par portions égales, sans préjudice de l'indemnité contre celui qui est en faute ou de mauvaise foi. [573, 575.] 626. Les mêmes règles s'appliquent, sous les mêmes distinctions, au mélange ou à la confusion de liquides, de solides, ou de métaux appartenant à différents propriétaires. Toutefois, lorsqu'il y aura lieu à copropriété entre les intéressés, parce que les matières inséparables seront de mêmes nature et qualité, les droits de chacun seront proportionnels à la quantité provenant de lui dans le mélange. 627. Dans le cas où, soit l'adjonction, soit le mélange, résulte du fait de l'un des propriétaires, l'autre n'est pas tenu d'accepter la propriété exclusive qui résulterait pour lui de la prééminence de sa chose, ni la copropriété indivise, fondée sur ce que l'importance et la valeur respective des choses sont égales: il peut alors exiger que l'auteur de l'accession lui fournisse en nature une chose de pareilles quantité et qualité ou sa valeur en argent. [576.] 628. Si quelqu'un, avec la matière d'autrui, a formé un objet d'une espèce ou d'une destination nouvelle, la propriété dudit objet peut être réclamée par le propriétaire de la matière, en payant le prix de la main-d'œuvre ou la plus-value qui en résulte pour la matière. Si pourtant la valeur de la main-d'œuvre excède notablement celle de la matière, la propriété de l'objet nouveau appartient au spécificateur, à la charge d'indemniser le propriétaire de la matière. Si le spécificateur a fourni, en même temps, une partie de la matière, la valeur de celle-ci sera jointe à celle de la main-d'œuvre, pour déterminer le droit de préférence. Le propriétaire de la matière employée sans son consentement peut toujours renoncer à la préférence qui lui appartiendrait et demander une matière pareille à la sienne, en quatité et quantité, ou sa valeur en argent. [570, 571, 572, 576.] 629. Si l'adjonction, le mélange ou la spécification ont eu lieu du consentement exprès ou tacite des propriétaires intéressés, la propriété sera déterminée d'après la convention: dans le doute, la séparation ne pourra être demandée, lors même qu'elle serait facile et sans inconvénients notables, et les dispositions précédentes relativement au droit de préférence ou à la copropriété seront applicables. 630. Dans les cas d'accession mobilière non prévus aux articles précédents, les tribunaux régleront les questions de propriété et d'indemnité, en s'aidant, s'il y a lieu, des analogies avec les cas ici prévus et en s'inspirant des principes de l'équité naturelle. [565.] 631. La portion du trésor qui n'est pas attribuée à l'inventeur, d'après l'article 606, appartient, par droit d'accession, au propriétaire de la chose mobilière ou immobilière dans laquelle le trésor était enfoui ou caché. [716.] Si la découverte fortuite est faite par le propriétaire même de cette chose, le trésor lui appartient en entier: savoir, pour une moitié, par occupation et, pour l'autre moitié, par accession. Le trésor découvert par l'effet de recherches faites à cet effet par le propriétaire ou par son ordre, ou même par un tiers sans son ordre, appartient pour le tout au propriétaire, par accession. La prescription établie par l'article 607, en faveur de l'inventeur du trésor contre la revendication de l'ancien propriétaire, est applicable ici. CHAPITRE III. DE LA PERCEPTION DES FRUITS PAR LE POSSESSEUR DE BONNE FOI. Art. 632. L'acquisition des fruits naturels et civils par le possesseur de bonne foi est réglée à l'article 206. CHAPITRE IV. DE LA TRADITION. Art. 633. La propriété des choses qui ne sont déterminées que par leur espèce et leur quantité, et non individuellement ou comme corps certains, se transfère par la tradition ou délivrance faite par celui auquel elles appartiennent ou en son nom, conformément aux articles 352 et 476. A défaut de tradition, il suffit qu'elles aient été déterminées contradictoirement entre les parties. CHAPITRE V. DE L'ACTE JUDICIAIRE OU ADMINISTRATIF PORTANT EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE. Art. 634. A défaut de cession amiable des biens sujets à expropriation pour cause d'utilité publique, l'acte judiciaire ou administratif qui prononce l'expropriation transfère la propriété desdits biens à l'Etat, au département, à la commune ou aux concessionnaires de leurs droits, aux charges et conditions portées audit acte; le tout conformément aux dispositions des articles 32 et 368-5° du présent Code et aux lois spéciales sur l'expropriation. CHAPITRE VI. DE L'ADJUDICATION EN VENTE PUBLIQUE. Art. 635. L'adjudication sur saisie mobilière ou immobilière prononcée en justice, conformément aux lois sur la Procédure civile extrajudiciaire, transfère à l'adjudicataire la propriété des biens adjugés, aux charges et conditions portées à l'acte d'adjudication. Il en est de même des autres adjudications en vente publique, dans les divers cas où elles sont prescrites ou autorisées par la loi. CHAPITRE VII. DE LA CONFISCATION SPÉCIALE. Art. 636. Le jugement portant confiscation spéciale, en vertu des dispositions du Code pénal, transfère la propriété des objets confisqués à l'Etat, au département, à la commune ou aux établissements publics désignés à cet effet par les lois et règlements administratifs. CHAPITRE VIII. DE L'ATTRIBUTION DIRECTE PAR LA LOI. Art. 637. Si un fleuve ou une rivière, navigable ou flottable, abandonne son lit et s'en forme un nouveau, les propriétaires des terrains nouvellement occupés, en tout ou en partie, acquierent, à titre d'indemnité, l'ancien lit abandonné, chacun dans la proportion de ce qu'il a perdu et lors même qu'il devrait y trouver une augmentation d'étendue. [C. fr., 563; C. ital., Contrà, 461.] 638. Les autres cas dans lesquels on acquiert, par l'effet direct de la loi, la propriété, l'usufruit, les servitudes, l'hypothèque et les autres droits, tant réels que personnels, sont réglés au sujet des matières auxquelles ils se rapportent. CHAPITRE IX. DU LEGS A TITRE PARTICULIER. Art. 639. Toute personne peut disposer gratuitement par legs ou disposition testamentaire, pour l'époque de son décès, des biens dont elle peut disposer par convention à titre gratuit. [893, 895.] 640. Les règles sur les formes du testament, sur la capacité requise pour tester, sur la portion de biens qui doit être réservée à certains héritiers, sur la révocation et la caducité des legs, sont établies au sujet des Dispositions testamentaires à titre universel formant l'objet du Chapitre v de la IIe Partie du présent Livre. 641. Tout legs pur et simple ou à terme ayant pour objet une ou plusieurs choses individuellement déterminées, mobilières ou immobilières, en transfère la propriété au légataire, même à son insu, dès le moment du décès du testateur: sauf son droit de refuser le legs. [1014.] Il en est de même pour le legs d'un droit de jouissance, d'usage ou de servitude. Si le legs est sous condition, soit suspensive, soit résolutoire, les effets en sont subordonnés à l'événement de la condition, tels qu'ils sont réglés au sujet des conventions, par les articles 428 et suivants. 642. Lorsque le legs a pour objet des choses de quantité, la propriété, n'est transférée que par la tradition ou autre détermination faite contradictoirement avec l'héritier, conformément aux articles 352 et 476. Les règles générales du payement sont applicables à l'acquittement de ce legs. [1022.] 643. Le testateur peut imposer à son héritier des obligations de faire ou de ne pas faire dont l'effet est le même que si l'héritier était obligé envers le légataire en vertu d'un enrichissement indû. [1017.] 644. Le testament peut avoir pour objet la renonciation à une servitude ou à tout autre droit réel que le testateur aurait sur la chose du légataire: audit cas, le droit est éteint comme par une renonciation entre-vifs. La disposition par laquelle le testateur a fait remise de la dette à son débiteur opère de plein droit la libération de celui-ci et fait cesser les intérêts dès le jour du décès. Il en est de même, si le testateur a légué au débiteur sa libération vis-à-vis de l'héritier. Les règles de la remise conventionnelle à titre gratuit s'appliquent, autant qu'il y a lieu, au legs de libération. 645. Si le testateur a légué une chose sur laquelle il n'avait qu'un droit indivis, le légataire acquerra le même droit, et le partage auquel il prendra part aura pour lui les effets qu'il aurait eus pour le testateur. Si la chose léguée fait partie d'une succession ou d'une autre universalité sur laquelle le testateur n'avait qu'un droit indivis, le légataire ne participera pas au partage, mais il recevra ou la chose en nature, si elle échoit au lot de l'héritier du testateur, ou sa valeur, si elle échoit au lot d'un des autres copropriétaires. 646. Le légataire n'a droit aux fruits et intérêts de la chose léguée qu'à partir de la demande en délivrance faite contre l'héritier et lorsque d'ailleurs le terme ou la condition sont accomplis. Néanmoins, il a droit aux fruits à partir du décès ou de l'échéance, et sans demande, dans les trois cas suivants: 1°  Lorsque le testateur l'a ainsi déclaré; 2°  Lorsque le legs a un caractère alimentaire: [1015.] 3°  Lorsque l'héritier a volontairement caché au légataire la disposition faite en sa faveur. 647. La chose léguée doit être délivrée au légataire avec ses accessoires naturels et dans l'état où elle se trouvait au décès du testateur, si le legs est pur et simple, et dans l'état où elle se trouve au jour où la délivrance est exigible, si le legs est à terme ou sous condition suspensive. [1018.] Les améliorations ou détériorations que lui a fait subir le testateur, ou qui résultent de cas fortuits ou de force majeure, profitent ou nuisent au légataire. [1019, 2e al.] Les mêmes modifications apportées à la chose par l'héritier donnent lieu à indemnité respective entre lui et le légataire. Si le legs a été fait sous condition résolutoire et que la condition s'accomplisse, le légataire ou son héritier restitue la chose en l'état où elle est; sauf les indemnités respectives entre les parties, pour les améliorations ou détériorations qui ne sont pas le résultat de cas fortuits ou de force majeure. 648. Le légataire d'un immeuble ne profite pas des acquisitions que le testateur a faites, postérieurement au testament, de terrains ou bâtiments, même contigus ou destinés à améliorer l'exploitation de l'immeuble, à moins d'une nouvelle disposision faite en sa faveur ou à moins que lesdites acquisitions n'aient été incorporées à la chose par le testateur, au moyen de nouvelles clôtures ou de la suppression des séparations. [1019, 1er al.] Les constructions et plantations faites par un tiers sur le terrain légué et acquises par le testateur sont toujours considérées comme incorporées par lui au legs. Il en est de même dans les autres cas d'accession ou incorporation tels qu'ils sont réglés ci-dessus, au Chapitre II. 649. Si le la chose léguée a été hypothéquée ou donnée en gage, avant ou depuis le testament. pour une dette du testateur ou d'un tiers, l'héritier n'est pas tenu de la dégrever avant la délivrance, à moins que le testateur ne l'y ait obligé; mais si le légataire est poursuivi hypothécairement et s'il est évincé ou obligé d'acquitter la dette, il a son recours en garantie contre l'héritier. [1020.] Les effets de l'aliénation de la chose léguée, en tant qu'opérant la révocation tacite du legs, sont réglés au Chapitre v de la IIe Partie du présent Livre. 650. Le legs d'une chose individuellement déterminée est nul si la propriété n'en appartient pas au testateur à l'époque de son décès. [1021.] Toutefois, si le testament porte la preuve que le testateur savait que la chose appartient à autrui et qu'il a entendu imposer à l'héritier l'obligation de l'acquérir pour le compte du légataire, l'héritier, à défaut de cette acquisition, devra l'estimation de la chose léguée. Cette intention du testateur est toujours présumée quand la chose léguée appartient à l'héritier et est désignée comme telle dans le testament. 651. Il y a lieu de faire la transcription de l'acte de cession passé par l'héritier au légataire, dans le cas où le legs d'un immeuble appartenant à un tiers ou à l'héritier lui-même est valable. L'article 370 est applicable pour le règlement de la priorité entre le légataire et les autres cessionnaires de droits réels sur l'immeuble. 652. S'il s'agit du legs d'un immeuble du testateur, le légataire doit en faire la transcription dans les quinze jours, depuis et y compris celui de la délivrance qui lui en été volontairement consentie par l'héritier. Si l'héritier conteste le legs, la demande en délivrance n'est recevable en justice qu'après avoir été inscrite par extraits sur le registre des transcriptions, et si le jugement est, plus tard, rendu contre l'héritier, il doit être transcrit sur les registres, avec mention en marge de la demande, dans la quinzaine, depuis et y compris le jour où le jugement n'est plus susceptible d'appel. 653. Dans les autres cas, le legs doit être transcrit dans l'année de l'ouverture de la succession, lors même qu'il serait encore suspendu par une condition. 654. A défaut de transcription dans les délais prescrits à l'article précédent, le legs d'immeuble n'est pas opposable aux tiers qui ont acquis des droits réels sur ledit immeuble et les ont publiés les premiers, conformément aux articles 368 et suivants et à ce qui est prescrit au sujet des Priviléges et Hypothèques. CHAPITRE X. DES CONVENTIONS ET CONTRATS INNOMMÉS. Art. 655. Indépendamment, des conventions et des contrats dont les règles et les effets sont déterminés par la loi aux Chapitres suivants, les particuliers peuvent faire telles conventions ou contrats qu'ils jugent à propos, pour créer ou transférer, modifier ou éteindre des droits réels ou personnels; pourvu qu'il ne soit dérogé, dans aucun cas, à l'ordre public ou aux bonnes mœurs. [6, 1134.] Ces conventions ou contrats dits “innommés” sont régis par les dispositions de la IIe Partie du Livre IIe et par celles des contrats nommés avec lesquels ils ont le plus d'analogie. [1107.] CHAPITRE XI. DE LA DONATION ENTRE-VIFS. Art. 656. La donation entre-vifs est une convention par laquelle le donateur confère gratuitement ou sans équivalent, au donataire qui accepte, un droit réel ou un droit personnel. [894.] Elle peut consister aussi dans la remise ou l'abandon gratuit d'un droit réel du donateur sur la chose du donataire ou d'un droit personnel contre lui. 657. La donation peut être pure et simple, à terme ou conditionnelle; mais la condition, soit suspensive, soit résolutoire, ne doit pas être purement potestative de la part du donateur, à peine de nullité. [944 et s.] La donation ne peut être révoquée, par le donateur ou par ses héritiers, que pour les causes déterminées par la loi. [953 et s.] 658. La donation entre-vifs est nulle si elle a pour objet une chose ou un droit appartenant à autrui ou même à l'héritier présomptif du donateur; sans qu'il y ait à distinguer si le donateur a exprimé ou non qu'il avait connaissance que la chose fût à autrui. Le donateur n'est pas garant de l'éviction subie par le donataire, à moins qu'elle ne résulte d'un fait personnel au donateur et postérieur à la donation, ou qu'il n'y ait eu dol dans le don de la chose d'autrui. 659. La donation entre-vifs de droits réels immobiliers est soumise à la transcription, d'après les dispositions des articles 368 et suivants. [939.] Les autres règles générales des conventions à titre onéreux s'appliquent aux donations, quand il n'y est pas dérogé, expressément ou tacitement, par la loi ou par l'acte de donation. 660. Les règles concernant la forme des donations entre-vifs, la capacité de donner et de recevoir, la portion de biens réservée aux héritiers et les causes de révocation des donations, sont établies, au sujet des Donations universelles, au Chapitre III de la IIe Partie du présent Livre. CHAPITRE XII. DE LA VENTE. SECTION PREMIÈRE. DES RÈGLES GÉNÉRALES DE LA VENTE. § Ier. DE LA NATURE ET DE LA FORMATION DE LA VENTE. Art. 661. La vente est un contrat par lequel une partie transfère ou s'oblige à transférer à l'autre la propriété ou un démembrement de la propriété d'une chose, moyennant un prix déterminé en argent que l'autre partie ou un tiers s'engage à lui payer. [1582, 1er al.] Le contrat de vente est soumis aux règles générales des contrats à titre onéreux et synallagmatique, pour tout ce qui n'est pas contraire aux dispositions ci-après. [1584.] 662. La vente est parfaite par le seul consentement des parties. [1583.] Celles-ci peuvent cependant la subordonner à la rédaction d'un acte, soit authentique, soit sous seing privé, en double original, destiné à servir de preuve à chaque partie. [1582, 2e al.] 663. La promesse unilatérale de vendre ou celle d'acheter, reçue et agréée, oblige le promettant à passer le contrat, aux prix et conditions déterminés dans la promesse, dès que le stipulant l'exigera, conformément à l'article 329. S'il n'a été fixé, expréssement ou tacitement, aucun délai pour l'acceptation, le promettant peut demander qu'il en soit fixé un par le tribunal, passé lequel la promesse sera non avenue, si le stipulant n'en a pas exigé l'exécution. 664. Si le promettant refuse de passer le contrat, le tribunal rendra un jugement qui tiendra la vente pour faite, avec les effets qu'elle comporte. Le jugement sera transcrit, lorsqu'il s'agira de vente de droits immobiliers. Si la promesse de vente a été transcrite comme telle, le jugement sera mentionné en marge de ladite transcription, laquelle produira rétroactivement ses effets contre les ayant-cause du vendeur. 665. S'il y a promesse réciproque de vendre et d'acheter, chaque partie peut contraindre l'autre à passer le contrat, comme il est dit à l'article précédent. Le tribunal peut aussi décider, dans ce cas, par interprétation de la volonté des parties, que la promesse de vente a valu vente actuelle et immédiate, et si un délai a été fixé, qu'il ne s'applique qu'à l'exécution. [1589.] 666. Dans le cas où, d'après les quatre articles précédents, les deux parties ou l'une d'elles se sont obligées à passer ultérieurement un contrat de vente et d'achat, ou seulement à le rédiger, et qu'il a été donné des arrhes comme garantie de la promesse, la partie qui refuse de passer le contrat ou de le rédiger perd les arrhes qu'elle a données ou rend au double celles qu'elle a reçues. [1590; comp. C. it.. 1217.] 667. Dans les ventes actuelles et immédiates, les arrhes ne sont un moyen de se départir du contrat que sous les distinctions suivantes: 1°  Au profit du vendeur, si c'est lui qui les a données, en quelque nature qu'elles consistent; 2°  Au profit de l'acheteur, si elles consistent en autre chose qu'en argent; 3°  Au profit des deux parties, lorsqu'elles se sont mutuellement donné des arrhes, en argent ou autrement, et leur ont formellement attribué le caractère d'un moyen de dédit. Dans aucun cas, ni d'aucun côté, le dédit n'est possible, lorsque le contrat a été exécuté, en tout ou en partie. 668. Si la vente a été faite “à l'essai,” elle peut être, suivant les circonstances, considérée comme faite sous la condition suspensive de l'agrément de l'acheteur ou sous la condition résolutoire de son refus. [1588.] Les ventes de denrées qu'il est d'usage de goûter sont présumées faites sous la condition suspensive qu'elles seront agréées. [1587.] 669. Dans les deux cas prévus à l'article précédent, l'acheteur, à défaut d'un délai fixé pour l'exercice de la faculté qui lui appartient, peut être sommé d'avoir à se prononcer à bref délai; faute de le faire, il est présumé avoir accepté, s'il a pris livraison de la chose ou des denrées vendues, et avoir refusé, dans le cas contraire. 670. Le prix de vente doit être déterminé par le contrat même, sinon dans sa totalité, au moins dans ses éléments. Il peut être aussi, soit référé au cours commercial, actuel ou prochain, de pareilles marchandises, soit laissé à l'estimation d'un tiers désigné par le contrat. [1591, 1592.] Dans ce dernier cas, l'estimation peut être contestée, si elle est manifestement erronée ou contraire à l'équité; mais la contestation doit être élevée par la partie qui se prétend lésée, aussitôt qu'elle a connaissance de l'estimation. S'il y a dol concerté entre le tiers et l'une des parties, les articles 333 et 566 sont applicables. Le prix fixé par les parties peut consister, soit en capital, soit en rente perpétuelle ou viagère; mais, s'il est fixé par un tiers, il ne peut consister qu'en capital, à moins que les parties n'aient expressément donné à l'arbitre des pouvoirs plus étendus. [530.] 671. Les frais de l'acte de vente sont à la charge des deux parties, par portions égales, si elles n'en ont décidé autrement. [Secùs, 1593.] § II. DES INCAPACITÉS DE VENDRE OU D'ACHETER. Art. 672. Le contrat de vente, de meubles ou d'immeubles, est interdit entre époux, respectivement. Les époux peuvent se faire une dation en payement, lorsqu'il s'agit pour l'un deux d'éteindre une dette sincère et légitime qu'il a envers l'autre. [1595.] Dans ce cas, la dation en payement ne sera valable et parfaite entre les parties que lorsqu'elle aura été homologuée par le tribunal civil, après due justification. Si elle a pour objet un droit réel immobilier, elle ne vaudra à l'égard des tiers que si l'homologation en a été mentionnée dans la transcription de l'acte. 673. L'action en nullité ou en rescision fondée sur l'article précédent n'appartient qu'à l'époux qui a fait la vente ou la dation en payement non autorisée et à ses héritiers ou ayant-cause; elle est d'ailleurs soumise aux dispositions générales des articles 566 et suivants. 674. Les mandataires ou administrateurs, légaux, judiciaires ou conventionnels, ne peuvent se rendre acquéreurs, soit à l'amiable, soit aux enchères publiques, directement et en leur nom personnel ou par personnes interposées, des biens qu'ils sont chargés de vendre. La même prohibition s'applique aux officiers publics chargés par la loi de procéder aux ventes publiques ou de les présider. [1596; C. pr.civ. 711.] 675. L'action en nullité de la vente faite contrairement au précédent article n'appartient qu'à l'ancien propriétaire, à ses héritiers et ayant-cause. 676. Les juges, les officiers du ministère public, les greffiers et commis-greffiers ne peuvent se rendre acquéreurs de droits réels ou personnels contestés ou de nature à être l'objet d'un procès devant le tribunal près duquel ils exercent leurs fonctions. La même prohibition s'applique aux avocats et aux notaires, pour les droits contestés pouvant être soumis au tribunal dans le ressort duquel ils remplissent leur ministère. [1597.] 677. L'action en nullité résultant de l'article précédent ne peut être exercée que par le cédant, par celui contre lequel les droits contestés ou litigieux ont été cédés, et par leurs héritiers ou ayant-cause. Celui contre lequel les droits contestés ont été cédés peut aussi exercer le retrait desdits droits, en remboursant au cessionnaire le prix réel de cession et les intérêts depuis le jour du payement. [1699.] Le tout, sans préjudice des peines disciplinaires contre les contrevenants. § III. DES CHOSES QUI NE PEUVENT ÊTRE VENDUES. Art. 678. La vente est nulle lorsqu'elle a pour objet une chose qui, par sa nature, est hors du commerce général ou dont la disposition est refusée aux particuliers par une loi spéciale. [1598.] La nullité de cette vente peut être invoquée par les deux parties, tant par voie d'exception que par voie d'action. Si la prohibition de la vente a été dissimulée par le dol de l'une des parties, celle-ci pourra être condamnée à des dommages-intérêts. 679. La vente de la chose d'autrui est nulle à l'égard des deux parties. [1599.] Toutefois, la nullité ne peut être invoquée par le vendeur que s'il ignorait, lors de la vente, que la chose était à autrui. Les règles concernant l'exercice des actions et exceptions respectives, la restitution du prix et les indemnités dues par le vendeur sont établies à la Section suivante, au sujet de la garantie d'éviction. 680. La vente est nulle, si, au moment du contrat, la chose est périe en totalité; sauf l'indemnité à l'acheteur de bonne foi, si le vendeur a connu cette perte ou a été en faute de l'ignorer. Si la chose n'est périe qu'en partie, l'acheteur, s'il l'ignorait, a le choix, ou de faire résilier la vente, en justifiant «pie ce qui reste ne suffit pas à ses besoins, ou de la maintenir avec diminution proportionnelle du prix; sans préjudice de dommages-intérêts, dans les deux cas, si le vendeur est en faute. [1601.] La demande en résiliation ne sera plus recevable après six mois, et celle en diminution du prix après deux ans, depuis que l'acheteur aura eu connaissance de la perte partielle; sans préjudice des autres cas de ratification expresse ou tacite. SECTION II. DES EFFETS DU CONTRAT DE VENTE. § Ier. DU TRANSFERT DE PROPRIÉTÉ ET DES RISQUES. Art. 681. Le contrat de vente est soumis, quant au transfert de propriété et aux risques de la chose vendue, aux règles du droit commun, telles qu'elles sont établies par les articles 351, 352, 355 et 439. [1584, 1624.] 682. Si l'objet de la vente est un immeuble, le contrat doit être transcrit, aux termes des articles 368 et suivants, pour être opposable aux ayant-cause particuliers et de bonne foi du vendeur. Les articles 366 et 367 sont applicables, dans le même but, aux ventes de meubles corporels et de créances. § II. DES OBLIGATIONS DU VENDEUR. Art. 683. Indépendamment de l'obligation de transférer la propriété, lorsqu'il s'agit de choses de quantité, le vendeur a l'obligation de délivrer la chose vendue, celle de la conserver jusqu'à la délivrance, enfin, celle de garantir l'acheteur contre les troubles et évictions fondées sur les causes ci-après déterminées. L'obligation de conserver la chose est régie par l'article 354. I. DE L'OBLIGATION DE DÉLIVRER. Art. 684. Le vendeur est tenu de délivrer la chose vendue, au temps et au lieu convenus, en l'état où elle se trouve, sauf l'indemnité due à l'acheteur, au cas de négligence dans la conservation. A défaut de convention sur le temps et le lieu de la délivrance, l'article 353, 6e et 7e alinéas, est applicable. [Comp. 1604 à 1611, 1614.] Toutefois, le vendeur peut retenir la possession jusqu'au payement du prix, si l'acheteur n'a pas obtenu un délai conventionnel à cet égard. Le vendeur peut encore retarder la délivrance, lors même qu'il a accordé un délai pour le paiement, si l'acheteur est tombé en faillite ou devenu insolvable depuis la vente, ou si même il a dissimulé son insolvabilité antérieure à la vente. [1612, 1613.] 685. Le vendeur doit, en général, délivrer toute la quantité promise au contrat et cette quantité seulement. Toutefois, il peut être tenu de céder et l'acheteur peut être tenu d'acquérir plus que cette quantité, dans les cas et sous les distinctions portées aux articles suivants. [1616.] 686. Si la chose vendue est un immeuble déterminé dont la contenance totale a été déclarée au contrat, avec indication du prix de chaque mesure, et que la contenance réelle soit moindre que celle annoncée, le vendeur doit subir une diminution proportionnelle du prix, lors même qu'il aurait déclaré vendre “sans garantie de la contenance.” Si la contenance réelle est supérieure à celle déclarée, l'acheteur doit payer un supplément proportionnel du prix. [Comp. 1617, 1618.] 687. Si l'immeuble a été vendu avec indication de la contenance totale, pour un prix unique, le vendeur, au cas de moindre contenance, ne subira de diminution du prix que s'il est de mauvaise foi ou, au cas de bonne foi, s'il a garanti la contenance, ou si ce qui manque est au moins d'un vingtième. [1619.] La mention que “ la contenance n'est pas garantie” ou qu'elle n'est qu'approximative” ne diminue pas la responsabilité du vendeur de mauvaise foi. En cas d'excédant, l'acheteur ne doit payer de supplément de prix que si l'excédant est d'un vingtième en sus. [1619.] 688. Si deux ou plusieurs fonds, bâtis ou non, ont été vendus par un seul et même contrat et pour un prix unique, avec indication de la contenance de chacun, et qu'il y ait une contenance plus grande dans l'un et moindre dans l'autre, il est fait compensation de ce qui manque à l'un avec ce qui excède dans l'autre, d'après la valeur respective des mesures et non d'après leur étendue; Après quoi, il y a lieu à augmentation ou à diminution proportionnelle du prix, si la compensation laisse, en plus ou en moins, une différence d'un vingtième du prix primitif. La présente disposition est applicable au cas où, les diverses parties d'un même fonds étant de natures différentes, la contenance de chaque partie aurait été annoncée. [1623.] 689. Dans les divers cas où l'acheteur a droit à une diminution du prix pour moindre contenance, il peut aussi demander des dommages-intérêts, et même la résolution du contrat, s'il prouve que la contenance promise était nécessaire à ses besoins et si d'ailleurs la vente n'a pas été faite “sans garantie de contenance.” Au cas d'excédant, si l'acheteur doit payer un supplément de prix d'un vingtième, il peut se désister purement et simplement du contrat. [1620, 1621.] 690. Les règles qui précèdent sont applicables aux ventes de denrées et de choses mobilières dont la quantité déclarée, en poids, nombre et mesure, ne peut être facilement et immédiatement vérifiée par l'acheteur. 691. Les actions en redressement du prix, en dommages-intérêts ou en résolution autorisées par les articles précédents doivent être exercées dans le délai d'un an, s'il s'agit d'immeubles, et d'un mois, s'il s'agit de meubles. Le délai court, pour le vendeur, du jour du contrat, et, pour l'acheteur, du jour de la délivrance, ou même du jour du payement total du prix convenu, s'il a eu lieu avant la délivrance. [Comp. 1622.] 692. Si, dans les ventes de meubles ou d'immeubles, l'erreur porte sur les qualités de la chose vendue, l'article 331 est applicable. II. OBLIGATION DE GARANTIE D'ÉVICTION. Art. 693. Lorsqu'il y a eu vente de la chose d'autrui et qu'il n'est intervenu aucune convention spéciale au sujet de la garantie, l'acheteur peut faire prononcer la nullité de la vente, avant même d'être menacé d'éviction et encore que, lors du contrat, il ait su que la chose n'appartenait pas au vendeur et que celui-ci l'ait ignoré. 694. Si l'acheteur a été de mauvaise foi, l'effet de la nullité de la vente et de la garantie est seulement de le libérer de l'obligation de payer le prix encore dû ou de l'autoriser à répéter ce qui en a déjà été payé. [1630-1°.] Il n'est pas tenu de subir une diminution dans ladite répétition, lors même que la chose aurait diminué de valeur, à moins que la diminution ne résulte de son dol ou n'ait tourné à son profit. [1631.] Dans tous les cas, lorsque l'acheteur recouvre le prix qu'il a payé, il doit restituer au vendeur la possession de la chose. 695. Si l'acheteur a été de bonne foi lors du contrat, il obtient, en outre, le remboursement: 1°  De la part des frais de contrat qu'il a payée; [1630-3°.] 2°  Des dépenses qu'il a pu faire sur la chose vendue et dont il n'est pas remboursé par le vrai propriétaire; [1634, 1635.] 3°  Du montant de la plus-value que la chose a pu acquérir, même par cas fortuit; [1633.] 4°  Des fruits perçus depuis la demande du propriétaire et qui ont dû être restitués à celui-ci. [1630-2°.] Toutefois, l'acheteur peut, s'il le préfère, demander, au lieu et place des fruits, les intérêts légaux de son prix, pendant la période correspondante. L'acheteur de bonne foi peut encore demander tous autres dommages-intérêts justifiés, conformément au droit commun, tels que les frais faits en défense à la revendication du propriétaire et ceux de la demande même en garantie. [1599, 1630-4°.] 696. Si le vendeur a été de bonne foi au moment du contrat, les indemnités prévues aux n°s 2 et 3 et au dernier alinéa de l'article précédent ne sont dues par lui que dans la mesure où il a pu raisonnablement les prévoir, conformément à l'article 405. 697. Si le vendeur de bonne foi a découvert depuis le contrat que la chose appartient à autrui, il peut, lorsqu'il est assigné en délivrance, opposer la nullité de la vente et faire statuer, par voie d'exception, sur le règlement de la garantie, lors même que l'acheteur offre de lui payer le prix, à moins que celui-ci ne déclare formellement renoncer à tout recours en cas d'éviction. 698. Si cette découverte n'a lieu qu'après la délivrance, le vendeur peut mettre l'acheteur en demeure d'exercer immédiatement l'action en garantie ou de faire constater contradictoirement avec lui le montant des indemnités actuellement dues, d'après l'article 695. Dans ce dernier cas, le vendeur, en consignant, après offres réelles, ladite valeur estimative, avec le prix qu'il a reçu, est à l'abri de toute autre responsabilité, à quelque époque qu'ait lieu l'action en garantie. Le vendeur qui, aux termes de l'article 500, a usé du droit de retirer les sommes consignées ne peut invoquer une seconde fois le bénéfice du présent article. 699. Si le vendeur de la chose d'autrui est devenu plus tard propriétaire de la chose vendue, il peut, à toute époque, faire sommation à l'acheteur d'avoir à opter entre l'action en garantie et la ratification de la vente, avec les indemnités justifiées. Le même droit appartient au vrai propriétaire devenu héritier du vendeur de la chose d'autrui et à celui qui aurait succédé à l'un et à l'autre. 700. Si la chose vendue appartient à un tiers pour une portion divise, en pleine ou en nue propriété, et que l'acheteur prouve que, par sa nature ou par son étendue, cette portion est d'une utilité telle qu'il n'aurait pas acheté s'il avait su ne pas l'acquérir, il peut obtenir la résiliation du contrat, avec dommages-intérêts, comme il est dit pour le cas d'éviction totale. [1636.] Si l'acheteur ne fait pas prononcer la résiliation du contrat, il sera indemnisé dans la mesure de la perte directe et actuelle qu'il éprouve. [1637.] 701. Si c'est une portion indivise qui appartient à un tiers, l'acheteur aura le droit de résiliation, avec dommages-intérêts, quelle que soit l'importance de cette portion. S'il ne fait pas résilier, il recouvrera toujours une partie correspondante de son prix d'acquisition et des frais de contrat, lors même que la chose aurait diminué de valeur, et avec dommages-intérêts, s'il y a plus-value. 702. Les dispositions de l'article 700 sont applicables lorsqu'il y a eu, soit éviction d'une servitude active déclarée au contrat comme appartenant au fonds vendu, soit réclamation par un tiers d'une servitude passive établie par le fait de l'homme et non déclarée par le contrat, d'un usufruit ou d'un droit de bail portant sur une portion des biens, ou même sur le tout, si le temps restant à courir n'excède pas un an pour les bâtiments et deux ans pour les terres. [1638.] S'il s'agit d'un usufruit total ou d'un droit de bail portant sur la totalité du bien vendu et dont la durée doive excéder un an pour les bâtiments et deux ans pour les terres, l'acheteur pourra faire résilier la vente, sans avoir à prouver l'insuffisance des droits qui lui restent, conformément à l'article 701. 703. Si le fonds vendu est grevé de priviléges on hypothèques, déclarées ou non par le contrat, et que l'acheteur, faute d'avoir rempli les formalités nécessaires pour le dégrever, avant ou avec le payement de son prix, soit exproprié par les créanciers du vendeur, il a contre celui-ci son recours en garantie, tel qu'il est réglé par les articles 695 et 696. 704. Si la vente a eu lieu par adjudication sur saisie, l'acheteur évincé peut recourir pour la restitution du prix contre le saisi, et, en cas d'insolvabilité de celui-ci, contre les créanciers auxquels le prix a été attribué. [2191.] L'acheteur ne peut réclamer de dommages-intérêts au saisissant que si celui-ci a su, lors de la saisie, que la chose n'appartenait pas au débiteur, et, à ce dernier, que s'il a frauduleusement nié ou dissimulé les droits des tiers sur la chose. Les officiers publics chargés de la rédaction du cahier des charges et de la procédure d'adjudication ne pourront être soumis à des dommages-intérêts que s'ils ont contribué à l'erreur de l'acheteur par un manquement grave aux devoirs de leur fonction. [1382, 1384.] 705. Le vendeur d'une créance est, de droit, garant de l'existence de la créance en sa faveur et de sa validité. Il n'est garant de la solvabilité du débiteur que s'il a promis expressément cette garantie. Dans ce cas même, il ne répond que de la solvabilité actuelle ou au jour de la cession, si la créance est déjà échue, et dans les limites du prix qu'il a reçu, à moins d'engagement formel plus étendu et sauf les règles particulières aux effets de commerce cessibles par endossement. S'il s'agit d'une créance non encore échue et que le cédant ait garanti, sans autre spécification, “la solvabilité future du débiteur,” la garantie cesse quand l'insolvabilité du cédé est survenue après un an depuis l'échéance, et s'il s'agit d'une rente perpétuelle, après dix ans depuis la cession. 706. Dans la cession d'un droit litigieux, soit réel, soit personnel, le cédant, en l'absence de convention spéciale et si le cessionnaire a eu connaissance du litige, n'est garant que de la réalité de sa prétention et non de l'existence véritable du droit cédé. Le droit n'est considéré comme litigieux, pour l'application de la présente disposition, que s'il est déjà l'objet d'une contestation formelle au fond, soit judiciaire, soit extrajudiciaire. [1100.] Lorsque la garantie est encourue, dans le cas du présent article, le cédant est tenu, outre la restitution du prix de cession, de l'indemnité des avantages que le cessionnaire a légitimement espérés. 707. Celui qui a vendu son droit indivis à tout ou partie d'une succession ouverte, comme héritier ou légataire à titre universel, est garant de l'existence de son droit à ladite succession, pour la part et portion qu'il a vendue. Il n'est garant d'un émolument déterminé que s'il l'a exprimé. [1696.] 708. S'il a vendu ses droits “tels qu'ils se comportent,” sans spécifier pour quelle portion il est héritier ou légataire, l'acheteur profitera de l'accroissement des parts devenues vacantes et subira le décroissement inverse, s'il y a lieu. 709. Dans tous les cas, le cessionnaire de l'hérédité doit garantir le vendeur contre toutes poursuites ultérieures à raison des dettes de la succession. Si le vendeur a déjà payé tout ou partie de ces dettes ou fait des dépenses pour la conservation des biens, ou s'il a lui-même des créances contre la succession, le cessionnaire doit lui en tenir compte. Réciproquement, le vendeur doit tenir compte au cessionnaire de ce qu'il doit lui-même à la succession, de ce qu'il a reçu des créances héréditaires et des autres profits qu'il a tirés de la succession. [1697, 1698.] 710. Dans tous les cas qui précèdent, s'il a été convenu que la vente était faite “ sans garantie, ou sans aucune garantie,” le vendeur reste tenu de restituer le prix, si l'acheteur est évincé, à moins qu'en même temps celui-ci n'ait connu le danger de l'éviction, auquel cas cette restitution même n'est pas due. Il en est de même, dans tous les cas, si la vente a été faite “ aux risques et périls de l'acheteur.” Mais, dans aucun cas et à la faveur d'aucune stipulation, le vendeur ne peut se soustraire à la garantie des troubles ou évictions résultant de droits par lui conférés avant ou depuis la vente. [1627, 1628, 1629.] 711. Lorsque le vendeur prétendra, à raison de la mauvaise foi de l'acheteur, se soustraire à tout ou partie de ses obligations résultant de l'éviction, les transcriptions d'actes affectant la chose vendue au prolit des tiers ne le dispenseront pas de fournir la preuve directe que l'acheteur avait eu, avant la vente, connaissance desdits actes, par des certificats du conservateur des registres ou autrement. 712. Les articles 419 et 420 sont applicables à l'appel du vendeur en garantie incidente et à la déchéance de l'acheteur évincé, faute d'avoir mis le garant en cause. [1640.] § III. DES OBLIGATIONS DE L'ACHETEUR. Art. 713. L'acheteur doit payer le prix au temps convenu et, à défaut de convention spéciale à ce sujet, au moment de la délivrance. [1650, 1651.] La convention qui retarde la délivrance est présumée retarder tacitement le payement du prix, d'après l'intention des parties. Si le vendeur a obtenu du tribunal un délai de grâce pour la délivrance, l'acheteur jouit du même délai pour le payement du prix. Réciproquement, le délai de grâce accordé pour le payement du prix s'étend à la délivrance. 714. A défaut de lieu convenu, le payement se fait au lieu où s'effectue la délivrance, s'il s'agit d'une chose mobilière corporelle, et au lieu de la remise des titres, s'il s'agit d'un immeuble, d'une créance, d'un droit litigieux ou d'un droit d'hérédité. Si le payement est exigible avant ou après la délivrance, il se fait au domicile de l'acheteur. [1247, 1651.] 715. L'acheteur doit, de plein droit, les intérêts du prix à partir de la délivrance, si la chose produit des fruits ou autres avantages périodiques appréciables en argent. Dans le cas contraire, les intérêts ne sont dus qu'en vertu d'une convention spéciale ou d'une sommation de payer. [1652.] 716. Si l'acheteur est troublé ou a juste sujet de craindre d'être troublé par une action réelle, il peut, suivant la gravité de l'action, refuser de payer tout ou partie du prix, jusqu'à ce que le vendeur ait fait cesser le trouble ou le danger, ou lui ait donné caution de restituer le prix, au cas d'éviction. [1653.] La présente disposition ne préjudicie pas au droit pour l'acheteur de faire prononcer la nullité de la vente et d'exercer l'action en garantie, s'il peut prouver directement que la chose appartient à autrui. 717. S'il existe sur l'immeuble vendu des inscriptions d'hypothèque ou de privilége, l'acheteur n'est tenu de payer le prix qu'après avoir accompli les formalités de la purge, pourvu qu'il y procède dans les délais légaux. 718. Dans les cas prévus aux deux articles précédents, si les formalités nécessaires à la conservation du privilége du vendeur et de son droit de résolution contre les tiers n'ont pas été observées, celui-ci peut exiger que le prix soit consigné sans délai par l'acheteur, au nom des deux parties, de manière à ne pouvoir être retiré qu'à la fin de la procédure, en vertu de leur consentement réciproque ou d'une décision du tribunal. 719. Si l'acheteur de choses mobilières, ayant ou non payé le prix, ne prend pas livraison, au moment où il a le droit de le faire, le vendeur peut procéder aux offres et à la consignation des choses vendues, conformément aux articles 495 à 500. Toutefois, s'il s'agit de denrées ou autres objets susceptibles d'une prompte détérioration, le vendeur doit les revendre pour le compte de l'acheteur, s'il en a la possibilité. [Secùs, 1657.] SECTION III. DE LA RÉSOLUTION ET DE LA RESCISION DE LA VENTE. § Ier. DE LA RÉSOLUTION POUR INEXÉCUTION DES OBLIGATIONS. Art. 720. Si l'une des parties manque à remplir tout ou partie de ses obligations, telles qu'elles sont déterminées ci-dessus ou de toutes autres obligations auxquelles elle se serait spécialement soumise, l'autre peut demander en justice la résolution du contrat, avec indemnité de ses pertes, s'il y a lieu, conformément aux articles 441 à 444. [1654.] Si la résolution a été expressément stipulée entre les parties, le tribunal ne peut la retarder par la concession d'un délai de grâce; mais elle ne produit son effet de plein droit que si la partie qui manque à exécuter a été inutilement mise en demeure. [1656.] 721. La résolution faute de payement ou d'exécution des autres obligations de l'acheteur ne peut être poursuivie par le vendeur contre les sous-acquéreurs que si l'acte de vente transcrit porte que tout ou partie du prix lui est encore dû ou exprime les autres charges et conditions imposées à l'acheteur. Toutefois, le vendeur peut toujours sauvegarder son droit de résolution contre les tiers, en publiant après coup lesdites charges et conditions ou sa demande en résolution, comme il est dit à l'article 372. [Loi fr. du 23 mars 1855, art. 7.] 722. Dans les ventes de meubles faites avec terme pour le payement, si la délivrance en a été effectuée, le vendeur ne peut exercer le droit de résolution faute de payement au préjudice des autres créanciers de l'acheteur. Si la vente a été faite sans terme, le vendeur peut faire résoudre la vente dans la huitaine de la délivrance, mais sans préjudicier aux droits réels déjà acquis aux tiers de bonne foi. [2102-4°; C. it., art. 1513.] § II. DE L'EXERCICE DE LA FACULTÉ DE RACHAT OU DU RÉMÉRÉ. Art. 723. Le vendeur peut, au moyen du pacte dit “de rachat ou de réméré” inséré dans l'acte de vente, stipuler que ladite vente sera résolue si, dans un délai déterminé, il restitue à l'acheteur le prix et la portion de frais que celui-ci a payée. [1659.] Le délai ne peut excéder cinq ans pour les immeubles et deux ans pour les meubles. [1660.] Si la stipulation a été faite pour un temps plus long, elle est, de droit, réduite à ce terme. [Ibid.] Le délai, une fois fixé, ne peut être prorogé, même dans la limite de deux ou cinq ans. [1661.] Toutefois, la prorogation peut être considérée comme promesse de revente par l'acheteur; elle est alors soumise aux dispositions des articles 663 et 664. Il en est de même de la stipulation de rachat faite après la vente ou dans un acte séparé. Le vendeur ne peut valablement stipuler la faculté de rachat, s'il donne un terme pour le payement de la moitié du prix ou davantage et si ce terme est égal ou supérieur à la moitié du délai fixé pour le rachat. 724. A l'égard des immeubles, l'exercice de la faculté de rachat, dans le délai et sous les conditions fixés par la loi, fait rentrer le bien vendu dans les mains du vendeur, libre de tous les droits réels conférés par l'acheteur ou acquis aux tiers de son chef, à l'exception des baux dont la durée restant à courir n'excède pas trois ans. [1664, 1673, 2e al.] S'il s'agit d'un objet mobilier, la faculté de rachat ne peut s'exercer contre les tiers qui ont, de bonne foi, acquis des droits réels sur la chose vendue. 725. Les créanciers du vendeur peuvent exercer la faculté de rachat en son lieu et place. Toutefois, l'acheteur peut exiger qu'ils établissent préalablement l'insolvabilité de leur débiteur et se fassent subroger judiciairement au vendeur pour l'exercice de cette faculté, conformément à l'article 359. [1666.] L'acheteur peut encore arrêter l'action des créanciers, en les désintéressant, déduction faite du montant des sommes que le vendeur aurait à lui restituer, pour frais de conservation de la chose. 726. Si la chose vendue à réméré a été ensuite hypothéquée ou grevée d'autres droits réels par le vendeur, l'effet de ces droits est subordonné à l'exercice du rachat par le vendeur lui-même ou par ses créanciers, dans le cas de l'article précédent. Si le vendeur a aliéné la propriété de la chose sujette à réméré, son acquéreur peut exercer le rachat en son propre nom, mais à charge de respecter les autres droits réels antérieurement consentis par le vendeur et révélés par la transcription, sauf son recours en garantie. 727. Le vendeur usant de la faculté de rachat doit, dans le délai fixé, rembourser à l'acheteur, outre le prix originaire de la vente et les frais de contrat, les dépenses faites pour la conservation de la chose. Si l'acheteur refuse de recevoir lesdites sommes, elles doivent être consignées sans délai. Le vendeur doit également rembourser les dépenses qui ont amélioré la chose; mais il peut, à cet égard, obtenir un délai du tribunal. L'acheteur jouit du droit de rétention de la chose jusqu'au parfait payement desdites sommes. [1673, 1er al.] 728. Si la vente à réméré a eu pour objet une part indivise dans un immeuble et que l'acheteur, sur une licitation provoquée contre lui, se soit rendu adjudicataire de la totalité du bien, le vendeur ne peut exercer le réméré que pour le tout, en ajoutant au prix qu'il a reçu le montant du prix de licitation. [1667.] L'acheteur ne peut non plus s'opposer au réméré total. Si la licitation a été provoquée par l'acheteur, le vendeur peut n'exercer le réméré que pour la part qu'il a vendue. L'acheteur peut aussi s'opposer au réméré total. 729. Si l'adjudication sur licitation, par quelque partie qu'elle ait été provoquée, a eu lieu en faveur d'un des autres copropriétaires ou d'un étranger, le vendeur conserve son droit au rachat contre l'adjudicataire, pour la portion seule qu'il a vendue, s'il n'a pas été appelé à la licitation; il le perd, dans le cas contraire. 730. Si le partage a été fait en nature et que le vendeur y ait été appelé, celui-ci ne peut élever aucune réclamation sur la part échue aux autres propriétaires, quelle que soit la partie qui a provoqué le partage; il peut seulement reprendre la part échue à son acheteur; sauf aux deux parties à se tenir compte respectivement de la soulte fournie ou reçue par l'acheteur. Si le vendeur n'a pas été appelé au partage, il peut, à son choix, ou ratifier ce qui a été fait et exercer contre son acheteur le droit sus-énoncé, ou rembourser à celui-ci le prix qu'il en a reçu et provoquer contre ses copropriétaires un nouveau partage. 731. Si les copropriétaires d'une chose indivise l'ont vendue à réméré par un seul même contrat et pour un prix unique, l'acheteur n'est pas tenu de subir le rachat pour partie. [1668.] Il peut aussi s'opposer au réméré total par un seul des vendeurs, à moins que celui-ci n'agisse en vertu d'un pouvoir des autres. [1670.] Il en est de même si le vendeur unique est décédé laissant plusieurs héritiers. [1669, 1er al.] Si, au contraire, les divers copropriétaires ont vendu leur portion par des contrats séparés, chacun peut en exercer le retrait séparément, sauf l'application des articles 728 et 730, s'il y a lieu. [1671.] 732. Si plusieurs acheteurs ont acquis un fonds à réméré, soit par un seul contrat, soit par des contrats distincts et séparés, et que le vendeur veuille exercer le réméré avant que le partage ait été fait entre eux, il peut l'exercer contre chaque acheteur pour sa part, soit conjointement, soit séparément. Si le partage a déjà eu lieu, le vendeur ne peut exercer le réméré contre chacun que pour la part qui lui est échue par le partage ou la licitation. Les mêmes règles sont applicables, si un acheteur unique est décédé laissant plusieurs héritiers. [1672.] § III. DE LA RESCISION POUR LÉSION. Art. 733. Si une vente d'immeuble a été faite pour un prix inférieur à la moitié de sa valeur réelle au jour du contrat, le vendeur peut demander la rescision pour lésion, lors même que, par le contrat, il y aurait expressément renoncé ou qu'il aurait déclaré abandonner la plus-value. [1674, 1675, 1683; C. it., 1529.] La rescision pour lésion n'est pas admise dans le cas où le prix a été fixé par un tiers convenu entre les parties, sauf l'application de l'article 670, 3e et 4e alinéas. 734. La rescision doit être demandée dans les deux ans à partir du contrat, lors même que la vente est conditionnelle. [1676, 1er al.] Ce délai ne peut être ni augmenté ni diminué par le contrat de vente. Si la faculté de rachat a été stipulée, les deux délais se confondent jusqu'à concurrence du plus court. [1676, 3e al.] 735. La preuve de la valeur du fonds au jour de la vente se fait tant par titres que par témoins ou par experts. Chaque partie peut toujours demander à nommer un expert. Dans tous les cas, le tribunal doit en nommer un d'office. Sont applicables, pour le surplus, les règles générales des expertises établies au Livre Ve ci-après et au Code de Procédure civile. [Secùs, 1677 à 1680.] 736. La rescision pour lésion ne peut être exercée contre les sous-acquéreurs de droits réels dont les titres ont été transcrits antérieurement à la publication de la demande, faite conformément à l'article 372, 1er alinéa. [C. it., 1308.] 737. Si l'acheteur veut user de la faculté à lui accordée par l'article 576, de parfaire le juste prix, il doit les intérêts du complément depuis la demande. [1681, 1682, 1er al.] S'il préfère rendre la chose, il recouvre le prix qu'il a payé, avec les intérêts depuis la demande, et il restitue les fruits perçus depuis la même époque. [1682, 2e al.] Dans ce dernier cas, il peut retenir la possession jusqu'à l'entier remboursement du prix. 738. Les règles établies par les articles 728 à 732 pour l'exercice divisible ou indivisible de la faculté de rachat sont applicables à la rescision pour lésion. [1685.] 739. La rescision pour lésion n'a pas lieu dans les ventes faites aux enchères publiques, même volontairement, pourvu que la publicité et les délais prescrits pour les ventes faites par autorité de justice aient été observés et qu'aucune entrave n'ait été apportée à la liberté des enchères. [1684.] 740. Ne sont pas rescindables pour lésion les ventes ayant un caractère aléatoire, par la nature soit du droit vendu, soit du prix à payer. § IV. DE L'ACTION RÉDHIBITOIRE POUR VICES CACHÉS. Art. 741. Lorsque la chose vendue, mobilière ou immobilière, avait, au moment de la vente, des vices ou défauts non apparents, irrémédiables et ignorés de l'acheteur, si ces vices la rendent impropre à l'usage auquel elle a été destinée, soit par sa nature, soit par l'accord des parties, ou diminuent tellement cet usage que l'acheteur n'aurait pas acheté s'il les avait connus, il peut en demander la reprise ou la rédhibition par le vendeur. [1641, 1642.] Dans ce cas, il recouvre le prix qu'il a payé et les frais du contrat; mais les intérêts du prix se compensent avec la jouissance ou l'usage de la chose, jusqu'au jour de la demande. [1646.] 742. Si l'acheteur ne peut justifier que les vices cachés soient assez graves pour fonder l'action rédhibitoire, ou s'il préfère garder la chose, il peut demander une diminution du prix à raison de la privation d'utilité qu'il éprouve. [1644.] 743. Dans les deux cas, soit que l'acheteur obtienne contre le vendeur la rédhibition de la chose ou la diminution du prix, il peut réclamer, en outre, si le vendeur a connu les vices de la chose, des dommages-intérêts pour le préjudice éprouvé ou pour le gain manqué. [1645.] 744. La stipulation de “ non garantie des vices cachés ” n'affranchit pas le vendeur de la responsabilité des vices qu'il connaissait et qu'il a dissimulés par dol. [1643.] 745. La preuve, tant de l'existence des vices de la chose au moment de la vente et du préjudice qui en résulte pour l'acheteur que de la connaissance qu'avait de ces vices l'acheteur ou le vendeur, se fait par témoignage, par expertise ou par tous autres moyens légaux de preuve. 746. L'action rédhibitoire et celles en diminution du prix et en dommages-intérêts doivent être intentées dans les délais suivants: De six mois pour les immeubles; De trois mois pour les objets mobiliers autres que les animaux; D'un mois pour ces derniers. [Secùs, 1648.] Ces délais se comptent à partir de la livraison. Toutefois, ils sont réduits à la moitié, à partir du jour où il est prouvé que l'acheteur a acquis la connaissance du vice. L'action peut être reçue après l'expiration du délai, si l'acheteur prouve que, par une circonstance fortuite ou majeure, le vice caché n'a pu se révéler dans ledit délai. 747. L'action en diminution du prix fondée sur les vices cachés n'est pas perdue pour l'acheteur par l'aliénation gratuite de la chose, ni même par l'aliénation à titre onéreux, si, à raison de ces vices, elle a été faite avec perte, ou si l'acheteur lui-même est actionné par son cessionnaire ou en danger de l'être. 748. Si la chose vendue vient à périr en entier ou pour plus de moitié, par cas fortuit ou par force majeure, l'action rédhibitoire n'est plus recevable. Quelle que soit la perte partielle, l'action en diminution du prix subsiste en proportion de ce qui reste de la chose. Dans tous les cas, le vendeur reste responsable de la perte totale ou partielle provenant du vice caché lui-même. [1647.] 749. Les ventes forcées, faites en bonne forme, ne donnent lieu ni à l'action rédhibitoire ni à celle en diminution du prix. [1649.] 750. Jusqu'à ce qu'il soit statué par des lois spéciales sur l'effet des vices non apparents dans les ventes de certains animaux et de certaines substances ou denrées, les présentes dispositions s'appliqueront aux ventes de tous objets indistinctement. [voy. Loi fr. du 2 août 1884.] APPENDICE. DE LA LICITATION. Art. 751. Lorsqu'il y a lieu au partage d'un bien indivis, si un seul des propriétaires refuse le partage en nature, il est procédé soit à la vente amiable, soit à la vente aux enchères ou licitation dudit bien, et le prix en est distribué aux ayant-droit dans la mesure de la part de chacun. [1686.] 752. Si les intéressés ne peuvent se mettre d'accord, soit pour vendre à l'amiable à un tiers ou à l'un d'eux, soit pour enchérir ou liciter entre eux, ou si parmi eux, se trouve un absent ou un incapable, la licitation se fait devant le tribunal ou devant un officier public désigné par lui, avec la publicité requise pour les autres ventes publiques et dans les formes déterminées au Code de Procédure civile. Chacun des colicitants peut toujours exiger l'admission des étrangers aux enchères, et elle est de droit et nécessaire lorsque l'un des copropriétaires est absent ou incapable. [1687, 1688.] 753. Lorsque la chose est acquise en entier par l'un des copropriétaires, la licitation ou la vente amiable est considérée comme une opération de partage entre eux et produit les effets qui sont déterminés au sujet du partage des sociétés et des successions respectivement. [883, 1872.] Si l'adjudication ou la vente amiable est faite à un tiers, la licitation produit entre lui et les anciens copropriétaires respectivement les effets d'une vente, tels qu'ils sont réglés au présent Chapitre. CHAPITRE XIII. DE L'ÉCHANGE. Art. 754. L'échange est un contrat par lequel une partie transfére ou s'engage à transférer à l'autre la propriété d'une chose ou tout autre droit considéré comme équivalent d'une chose ou d'un droit qu'elle acquiert ou qui lui est promis. [1702.] Si l'un des droits respectivement cédés est inférieur à l'autre en valeur, l'inégalité est compensée par une soulte en argent ou autrement. Le contrat est considéré comme une vente, si la soulte en argent excède la valeur conjointement fournie en contre-échange de la valeur reçue. 755. Les parties se doivent respectivement la garantie de tous troubles et évictions au sujet des choses ou des droits fournis ou promis en contre-échange. [1704.] Si l'une d'elles n'a pas acquis les droits qui lui ont été promis, elle peut, à son choix, ou en réclamer l'équivalent en argent, ou agir en résolution du contrat et reprendre ce qu'elle a donné; le tout, avec dommages-intérêts, s'il y a lieu. [1705.] La résolution, dans ce cas, ne s'exerce pas contre les tiers qui ont acquis des droits sur l'immeuble sujet au retour, si la transcription ou l'inscription de leur titre a eu lieu avant la publication de la demande, conformément à l'article 372, 1er alinéa. 756. Les règles de la vente s'appliquent à l'échange, sous les exceptions qui suivent: 1°  L'échange est permis entre époux; sauf l'application des règles prohibitives ou limitatives des donations, si l'inégalité des valeurs respectivement fournies constitue un avantage indirect; 2°  La résolution facultative de l'échange dans un délai fixe, stipulée au profit de l'une des parties ou de toutes deux, ne peut être opposée aux tiers que sous les conditions où peut l'être la promesse de vente, conformément à l'article 664; 3°  L'échange ne peut être rescindé pour lésion. [1706, 1707.] CHAPITRE XIV. DE LA TRANSACTION. Art. 757. La transaction est un contrat par lequel les parties, au moyen de concessions ou sacrifices réciproques, terminent une contestation déjà née ou préviennent une contestation qui peut naître. [2044, 1er al.] La transaction est soumise aux règles générales des conventions, pour sa formation, sa validité, ses effets et sa preuve, sous les modifications qui suivent. [Secùs, 2044, 2e al.] 758. Les conditions requises pour la validité des transactions concernant les incapables sont établies au Livre 1er du présent Code. Les transactions intéressant l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics sont régies par les lois administratives. [2045.] 759. La transaction ne peut être rescindée pour erreur de droit, à moins que celle-ci ne provienne du dol de l'autre partie. [2052, 2e al., 2053, 2e al.] 760. Elle ne peut être rescindée comme consentie en vertu de pièces fausses ou d'un titre ou acte nul que si le faux ou le fait auquel la loi attache la nullité de l'acte a été ignoré de la partie qui aurait pu en arguer. [Secùs, 2054, 2055.] 761. La transaction faite en vertu d'une ou plusieurs causes de contestations déterminées peut encore être rescindée ou annulée pour erreur de fait, s'il apparaît, par des titres nouvellement découverts, que l'une des parties n'avait aucun droit sur l'objet ou les objets de la contestation ou que l'autre partie y avait un droit entier et incontestable. [2054, 2057, 2e al.] Il en est de même si la contestation était déjà terminée par un jugement irrévocable ou par un contrat inattaquable, ignoré de la partie qui avait intérêt à le connaître. [2056.] Mais si la transaction a eu pour but de terminer ou de prévenir toutes les contestations quelconques que les parties pourraient avoir en vertu de causes antérieures, la découverte de titres décisifs, en faveur d'une partie ne donne lieu à rescision que s'ils ont été retenus par le fait de la partie adverse. [2057, 1er al.] 762. La transaction valable produit entre les parties l'effet purement déclaratif d'un jugement irrévocable, lorsque les droits ou avantages respectivement reconnus au profit de chacune d'elles étaient déjà en jeu, dans la contestation née ou prévue; dans ce cas, ils sont considérés comme retenus en vertu de leur cause antérieure, à moins que les parties n'aient entendu faire une novation. [2052.] Si, au contraire, les droits ou avantages respectivement fournis ou promis sont, en tout, ou en partie, étrangers à la contestation, la transaction est soumise, quant à ceux-ci, aux règles des conventions à titre onéreux qui produisent, transfèrent ou éteignent les droits réels ou les droits personnels. CHAPITRE XV. DE LA SOCIÉTÉ PARTICULIÈRE. SECTION PREMIÈRE. DE LA NATURE ET DE LA FORMATION DE LA SOCIÉTÉ. Art. 763. La société est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes mettent ou s'engagent à mettre des biens en commun, pour en tirer des bénéfices destinés à être partagés entre elles. [1832.] 764. Les sociétés sont universelles ou particulières. [1835.] Les règles propres au sociétés universelles sont établies au Chapitre II de la IIe Partie du présent Livre. [1836 à 1840.] La société particulière est celle dans laquelle chaque associé fait, ou promet un apport d'objets déterminés, soit pour les faire valoir en commun, soit pour accomplir une entreprise ou exercer une profession déterminée. [1841, 1842.] 765. Les apports des associés peuvent consister, soit en propriété ou en jouissance de meubles ou d'immeubles, soit en argent, en services ou en industrie. [1833, 2e al.] Ils peuvent être inégaux et de natures différentes. 766. Les sociétés civiles constituent des personnes morales ou juridiques, lorsque telle est la volonté des parties. Dans ce cas, elles doivent prendre un nom social et le contrat doit être publié par extrait, dans les formes prescrites par la loi pour la publication des sociétés commerciales. Le seul fait d'avoir donné un nom social à la société ou d'avoir publié l'acte de société fait présumer de la part des associés la volonté de lui donner une personnalité propre. 767. Les dispositions générales des conventions sont applicables aux sociétés: spécialement, en ce qui concerne le consentement et la capacité des parties, l'objet, la cause et la preuve. [1833, 1er al., 1834.] Les règles particulières aux sociétés commerciales sont exposées au Code de commerce ou dans des lois spéciales. [1873.] 768. Les sociétés dont l'objet n'est pas commercial peuvent, sans cesser d'être des sociétés civiles, recevoir la forme de sociétés en commandite ou anonymes, avec la division du capital en actions et la responsabilité limitée qui en résulte d'après les lois commerciales. [Comp. Loi fr. du 21 avril 1810, sur les Mines, art. 8, 4e al. et art. 32.] SECTION II. DES DROITS ET OBLIGATIONS DES ASSOCIÉS. Art. 769. La société commence au jour du contrat, si elle n'a été soumise expressément ou tatitement à un autre terme ou à une condition. [1843.] C'est au même jour et sous la même réserve que chaque associé doit effectuer l'apport qu'il a promis; faute de ce faire, il doit, de plein droit, les fruits et intérêts et tous les autres dommages-intérêts, s'il y a lieu, à raison du retard, même pour les sommes d'argent. [1845, 1er al., 1846.] 770. L'associé qui a promis à la société son industrie ou ses services et manque à les lui fournir, lui doit, au choix des autres associés, ou l'indemnité des dommages qu'elle a éprouvés à partir du moment où il a manqué à remplir son obligation, ou la communication des profits qu'il a réalisés, en employant au dehors son temps ou son industrie. [1847.] 771. L'associé qui a déclaré apporter à la société un corps certain, mobilier ou immobilier, en propriété, est garant envers la société, comme un vendeur, de l'éviction, du défaut de contenance ou de quantité et des vices cachés de la chose. [1845, 2e al.] S'il n'a promis à la société que la jouissance de la chose, il est tenu de la garantie comme un bailleur. 772. Si l'acte de société désigne un ou plusieurs administrateurs ou gérants parmi les associés, chacun doit se renfermer dans la limite des pouvoirs qui lui ont été conférés. [1856, 1er al.] Ceux dont les pouvoirs n'ont pas été déterminés se bornent à faire, ensemble ou séparément, les actes ordinaires d'administration. [1857.] Ils peuvent aussi, mais ensemble seulement, faire les actes d'une plus grande importance qui rentrent dans l'objet de la société: en cas de désaccord, il doit être sursis à l'acte contesté et il en est référé aux associés réunis qui décident à la majorité des voix. [Comp. 1858.] 773. Si l'administration n'a été conférée par le contrat à aucun associé et tant qu'il n'y est pas pourvu, à l'unanimité des voix, chacun d'eux à le pouvoir de faire les actes déterminés à l'article précédent, aux conditions qui y sont portées. [1859-1°.] 774. Les associés nommés administrateurs par l'acte de société ne peuvent être révoqués pendant la durée de leur mandat, si ce n'est pour cause légitime ou de l'accord de tous les associés, y compris le consentement des premiers. [1856, 2e al.] Ceux qui ont été nommés par acte postérieur peuvent être révoqués sans leur consentement, de la manière en laquelle ils ont été nommés. [Ib.] 775. Quelle que soit la manière dont les administrateurs, associés ou non, ont été nommés, s'il y a décès, démission ou révocation d'un ou plusieurs d'entre eux, et si cet événement ne dissout pas la société, leur remplacement se fait à la majorité des voix. 776. Toutes les autres mesures à prendre en exécution des statuts de la société sont prises également à la majorité absolue des voix. S'il s'agit de déroger auxdits statuts ou de faire des actes qui n'y sont pas prévus, l'unanimité des voix est nécessaire. Le tout, sauf les dispositions à ce contraires desdits statuts ou de la loi. 777. Lorsqu'un tiers est tenu de dettes de même nature envers la société et envers un des associés ayant pouvoir de gérer, s'il paye à l'associé une somme ou valeur qui ne suffise pas à éteindre les deux dettes, celui-ci ne peut imputer le payement sur sa propre créance que proportionnellement à sa valeur comparée à celle de la créance sociale; mais l'imputation faite par le débiteur doit être observée. [1848.] Toutefois, si le débiteur a fait l'imputation totale sur la créance de l'associé, sans avoir un intérêt légitime à le faire, celui-ci est tenu de communiquer à la société une part proportionnelle dans le payement. A défaut d'imputation valable par le débiteur ou par l'associé, les règles de l'imputation légale s'appliquent, conformément à l'article 493. 778. L'associé, administrateur ou non, qui a reçu d'un débiteur de la société une partie de la chose due à celle-ci doit, dans tous les cas, en faire profiter ses co-associés, lors même qu'il aurait donné la quittance “pour sa part.” [1849.] 779. Tout associé, administrateur ou non, est tenu de réparer les dommages qu'il a causés à la société par sa faute ou sa négligence. Ces dommages ne peuvent être compensés avec les profits ou avantages que l'associé aurait procurés à la société dans d'autres affaires, à moins qu'elles ne soient liées entre elles. [1850.] 780. Les associés qui gèrent, parce qu'il n'a pas été désigné d'administrateurs par le contrat, ne sont responsables de leurs fautes que s'ils n'ont pas apporté aux affaires de la société les mêmes soins qu'à leurs propres affaires. 781. Chaque associé est tenu de contribuer, dans la proportion de ses droits, aux dépenses nécessaires et d'entretien relatives aux choses appartenant à la société, s'il n'y a pas de sommes disponibles dans le fonds social. [1859-3°.] 782. Réciproquement, tout associé, gérant ou non, peut se faire restituer par la société les sommes qu'il a utilement déboursées pour elle au-delà de sa mise, ou lui faire ratifier les engagements qu'il a contractés de bonne foi dans son intérêt, enfin, se faire indemniser des dommages inévitables qu'il a éprouvés dans ses propres biens, à raison des affaires sociales. [1852.] 783. Les sommes déboursées par un associé pour les affaires de la société produisent intérêt de plein droit à son profit du jour de leur emploi. Réciproquement, tout associé doit à la société, de plein droit, les intérêts des sommes qu'il a tirées du fonds social pour ses affaires particulières; sans préjudice, dans ce cas, de plus amples dommages-intérêts, s'il y a lieu. [1846, 2e al.] 784. Les associés peuvent, à leur gré, sous les deux exceptions portées à l'article 786, déterminer, soit par l'acte de société, soit par un acte postérieur, leurs parts respectives dans le fonds social, tel qu'il se comportera à la dissolution de la société, augmenté des profits ou bénéfices réalisés, ou diminué des pertes éprouvées au cours de la société. 785. Les associés peuvent même convenir que les parts d'un ou plusieurs d'entre eux ne seront pas identiques dans les bénéfices et dans les pertes. Mais si les parts ont été fixées en prévision des bénéfices seulement, le même règlement est présumé convenu pour les pertes. Dans tous les cas, on ne considère comme bénéfices à partager que ce qui reste de l'actif social, déduction faite des pertes éprouvées, et comme pertes que ce qui reste dû après épuisement dudit actif. Le tout se calcule définitivement à la dissolution de la société, lors même qu'il aurait été fait pendant sa durée des répartitions partielles de bénéfices ou de pertes. 786. La clause qui attribuerait à l'un des associés la totalité du fonds social ou seulement celle des bénéfices réalisés est nulle. [1855, 1er al.] Il en est de même de celle qui affranchirait de toute contribution aux pertes un associé autre que celui qui n'a apporté que son industrie. [Arg. 1855, 2e al.] Si lesdites clauses ont été insérées dans l'acte de société, elles le rendent nul en entier; si elles ont été adoptées postérieurement, elles laissent subsister le contrat primitif, et la liquidation de la société se fait conformément à l'article 789. 787. Les associés peuvent convenir dans l'acte de société ou dans un acte postérieur que leurs parts respectives seront déterminées, lors de la dissolution, par un ou plusieurs arbitres, soit associés, soit étrangers, nommés ou à nommer par eux. Le règlement fait par les arbitres ne peut être attaqué que pour inobservation des formes ou conditions qui leur auraient été imposées par le compromis ou pour violation évidente de l'équité. La demande en nullité dudit règlement n'est plus recevable de la part de l'associé qui s'en prétend lésé, dès qu'il a concouru à son exécution, ou lorsque trois mois se sont écoulés depuis qu'il en a eu connaissance. [1854.] 788. Si les associés ne peuvent se mettre d'accord pour nommer les arbitres, à la majorité au moins, dans le cas où l'acte de société a réservé ce mode de règlement des parts, la nomination en est faite par le tribunal. Il en est de même si, les arbitres désignés ne voulant ou ne pouvant faire le règlement, les associés ne s'accordent pas pour les remplacer. 789. A défaut de règlement des parts par les associés eux-mêmes ou par des arbitres, ou si la décision arbitrale est annulée, le fonds social et les bénéfices ou pertes se répartissent en proportion de la valeur des apports respectifs. [1853, 1er al.] L'associé qui n'a apporté que son industrie, sans qu'elle ait été évaluée, est traité comme celui des autres associés qui a le moins apporté. [1853, 2e al.] Celui qui a apporté, en même temps, son industrie et d'autres biens prend ou supporte, outre la part déterminée au précédent alinéa, une autre part calculée d'après l'importance desdits biens. 790. Tout membre de la société peut s'associer un tiers pour sa part et même engager ou céder ladite part, mais sans que ces actes soient opposables à la société, à moins que l'acte primitif de la société ne lui ait reconnu ce droit ou que le capital ne soit divisé en actions. [1861.] Dans ces deux cas, si la société s'est réservé le droit de préemption sur les parts d'intérêts ou sur les actions que les associés voudraient céder, pour les supprimer, cette clause sera observée et l'associé devra mettre la société en demeure d'exercer son droit ou d'y renoncer. 791. Les engagements valablement contractés par les gérants, au nom de la société ou pour ses affaires, sont garantis par le fonds social, par préférence aux créanciers personnels de chaque associé, lorsque la société est constituée comme personne morale ou juridique. En cas d'insuffisance du fonds social, ou s'il n'est pas représenté aux créanciers poursuivants, tous les associés sont tenus solidairement des obligations de la société, sauf le cas où le capital est divisé en actions. [Secùs, 1862, 1863.] Il en est de même, si la société n'est pas une personne morale. Dans les deux cas, le règlement définitif a lieu entre les associés d'après la part de chacun dans l'actif et le passif, telle qu'elle est déterminée aux articles 784 à 789. [1213, 1214.] SECTION III. DE LA CESSATION DE LA SOCIÉTÉ. Art. 792. La société prend fin, de plein droit: 1°  Par l'expiration du temps pour lequel elle a été contractée ou par l'accomplissement de la condition résolutoire à laquelle elle a été soumise; [1844, 1865-1°.] 2°  Par l'achèvement de l'entreprise pour laquelle elle a été formée, ou par l'impossibilité dudit achèvement; [1865-2°.] 3°  Par la perte de la totalité ou de plus de la moitié du fonds social réalisé; [Ibid.] 4°  Par l'impossibilité pour un des associés d'effectuer son apport continu en services ou en jouissance; 5°  Par la mort, l'interdiction, la faillite déclarée ou l'insolvabilité notoire d'un des associés, sauf ce qui est dit à l'article 795. [1844, 1865-4°.] 793. La société peut être dissoute: 1°  Par la volonté unanime des associés, dans tous les cas; 2°  Par la volonté d'un seul des associés, lorsque la société n'a pas de durée fixée expressément ou tacitement et si, en outre, la demande n'est formée ni de mauvaise foi, ni en temps inopportun; [1865-5°, 1869, 1870.] 3°  Par l'action en résolution fondée sur l'inexécution des obligations d'un des associés, ou par la demande de dissolution fondée sur des motifs légitimes, même si la société a une durée fixée. [1871.] 794. Les parties peuvent proroger expressément ou tacitement la durée de la société avant qu'elle ne soit expirée. La prorogation tacite peut aussi être faite après l'expiration du temps fixé et résulter du fait que les opérations en ont été continuées sans opposition d'aucun associé; dans ce cas, la société prorogée peut être dissoute par la volonté d'un seul associé, conformément à l'article 793-2°. 795. La dissolution de la société par les causes indiquées au n° 5 de l'article 792 n'a pas lieu quand, le capital étant divisé en actions dont la cession est permise, l'une de ces causes se rencontre en la personne d'un des actionnaires. On peut convenir aussi, dans les autres sociétés, que ces causes n'opèreront pas la dissolution de la société et qu'elle continuera avec les autres associés, en réglant la part de celui qui cesse d'en être membre, ou même que la société continuera avec les héritiers de l'associé décédé ou avec l'associé devenu incapable ou insolvable mais dûment représenté. [1868.] SECTION IV. DE LA LIQUIDATION ET DU PARTAGE DE LA SOCIÉTÉ. Art. 796. Après la dissolution de la société, la liquidation peut en être demandée par chacun des associés ou par ses ayant-cause. La liquidation doit être préalable au partage, à moins que la majorité des associés ne requière la priorité pour le partage total ou partiel. Tout créancier de la société peut aussi s'opposer à ce qu'aucun partage ait lieu avant la liquidation. 797. La liquidation comprend: 1°  L'achèvement des affaires commencées; 2°  Le payement des dettes de la société et le recouvrement de ses créances vis-à-vis des tiers; 3°  Le règlement du compte particulier de chaque associé avec la société; 4°  La détermination de la part de chaque associé ou de ses représentants dans l'actif partageable ou dans le passif à supporter. 798. Les dispositions de l'acte de société sur le choix du liquidateur et sur l'étendue de ses pouvoirs doivent être observées, s'il n'y est pas survenu d'obstacle. A leur défaut, la liquidation est faite, soit par tous les associés conjointement, soit par un ou plusieurs d'entre eux que les autres en chargent, ou même par un tiers choisi par eux, à l'unanimité. S'ils ne peuvent se mettre d'accord sur le choix, le liquidateur est nommé par le tribunal. 799. Le liquidateur doit, dans tous les cas, aliéner les objets susceptibles d'une détérioration ou d'un dépérissement rapide. Il peut aliéner les autres objets mobiliers, si cela est nécessaire pour l'acquittement des dettes échues. A l'égard des immeubles, il ne peut les hypothéquer ou les aliéner qu'en vertu de pouvoirs spéciaux des associés. Dans ce dernier cas, l'aliénation n'aura lieu que par adjudication publique, à moins d'autorisation de traiter à l'amiable; le tout, à la majorité des voix. Il peut plaider, comme demandeur ou défendeur, au nom des associés. La transaction et le compromis qu'il aura consentis sur les dettes ou créances de la société ne pourront être attaqués que pour dol concerté avec les tiers. 800. Le compte général de liquidation est soumis à l'approbation des associés. La majorité des voix suffit pour l'approuver. Le vote peut porter sur tout le compte réuni ou, séparément, sur certaines parties du compte. Ceux des actes qui ne seront pas acceptés et qui pourront être refaits le seront, aux frais et par les soins du liquidateur; s'ils ne peuvent être refaits, de liquidateur sera responsable du préjudice causé par sa faute, conformément aux règles du mandat. Les actes faits par le liquidateur, en vertu des pouvoirs qui lui ont été confiés ou en conformité à l'article précédent, seront toujours maintenus en faveur des tiers de bonne foi. 801. Si la société civile est constituée par actions, la liquidation est faite conformément aux règles des sociétés commerciales par actions. 802. Après la liquidation de la société, le partage des biens restés indivis peut être demandé par chacun des anciens associés ou par ses ayantcanse; sauf le cas où les parties seraient convenues, depuis la dissolution, de rester dans l'indivision, conformément à l'article 40 du présent Code. 803. A défaut d'accord des intéressés sur la formation des lots et sur leur attribution à chacun d'eux, on observera les règles établies sur ce point dans le présent Code et au Code de Procédure civile, pour les partages des successions et des autres communautés de biens. [1872.] 804. Les droits de chaque associé sur les objets provenant du fonds social, à lui échus par le partage, remontent au jour de la dissolution de la société, et ceux conférés sur les mêmes objets par les autres associés se trouvent résolus. [883.] 805. Les copartageants sont respectivement garants, en raison de leur part et portion, des troubles et évictions qu'ils pourraient éprouver dans les droits qui leur ont été promis par le partage. [884.] Si l'un d'eux se trouve insolvable, la portion d'indemnité dont il est tenu est répartie entre les autres, y compris le garanti. [885.] 806. Le partage, même fait entre majeurs et lors même qu'il n'aurait pour objet que des valeurs mobilières, peut être rescindé au profit de celui qui a éprouvé une lésion de plus du quart de la portion qui devait lui revenir dans les biens indivis. [887 à 892.] Les conditions édictées par les articles 734 et suivants pour l'exercice de la rescision de la vente pour lésion seront observées à l'égard de la rescision pour lésion du partage de la société. CHAPITRE XVI. DES CONTRATS ALÉATOIRES. DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES. Art. 807. Le contrat aléatoire est une convention dont les effets, quant aux avantages ou quant aux pertes, soit pour les deux contractants, soit pour un seul, dépendent, en tout ou en partie, d'un événement futur et incertain. [1104, 1964.] 808. Les contrats sont aléatoires par leur nature ou par la volonté des parties. Sont aléatoires par leur nature: le jeu et le pari, la constitution de rente viagère ou d'autres droits viagers, les assurances terrestres et maritimes, le prêt à profit maritime ou à la grosse aventure. [1964.] Les autres contrats sont aléatoires par la volonté des parties, lorsque leur existence ou leurs effets sont subordonnés à une condition casuelle, soit suspensive, soit résolutoire. 809. Les assurances maritimes et le prêt à profit maritime sont régis par les lois sur le commerce de mer. [1964.] SECTION PREMIÈRE. DU JEU ET DU PARI. Art. 810. Il n'est admis d'action en justice pour l'exécution d'un engagement de jeu que si le jeu consiste dans un exercice physique de nature à développer le courage, la force ou l'adresse des joueurs. [1966, 1er al.] L'action fondée sur un pari n'est également admise qu'au profit d'une personne prenant part à un tel exercice, ou encore s'il s'agit du succès d'une entreprise intéressant l'agriculture, l'industrie ou le commerce et à laquelle les parieurs prennent une part directe. Si la somme ou valeur promise dans lesdits jeux ou paris parait excessive, eu égard aux circonstances, les tribunaux ne peuvent la réduire et doivent rejeter la demande en entier. [1966.] 811. Dans les autres cas, le jeu et le pari n'engendrent aucune obligation civile ou naturelle et la reconnaissance de dette, la novation ou le cautionnement qui en auraient été faits sont nuls et sans effets. [1965.] Toutefois, la répétition n'est pas admise à l'égard de ce qui aurait été payé volontairement et par une personne capable, en vertu desdits engagements, s'il n'y a eu d'ailleurs ni dol ni supercherie de la part du gagnant. [1967.] 812. Les loteries non autorisées sont assimilées aux jeux et paris dépourvus d'action. Il en est de même des spéculations à terme sur les effets publics ou les marchandises, lorsque le défendeur prouve que, dès l'origine, les parties n'ont pas eu l'intention d'effectuer la livraison et le payement des quantités ou valeurs promises, mais seulement de se tenir compte respectivement de la différence entre la hausse et la baisse des cours. [Loi fr. des 28 mars - 8 avril 1885.] 813. Si, dans le cas des deux articles précédents, l'exception de nullité n'est pas opposée par le défendeur, elle peut être suppléée d'office par les juges, lorsqu'il est exprimé dans l'engagement ou dans la demande que la dette a pour cause un jeu, une loterie ou un pari sur les différences de cours. § Ier. DE LA CONSTITUTION DE LA RENTE VIAGÈRE. Art. 814. La rente viagère peut être constituée à titre onéreux, en retour de l'aliénation d'un capital mobilier ou immobilier, ou comme prix de services rendus ou à rendre. [1968.] Elle peut aussi être constituée à titre gratuit, par donation ou par testament. [1969.] Dans ce dernier cas, elle est soumise aux règles particulières des actes à titre gratuit, pour les formes de la libéralité, pour la capacité de donner et de recevoir et pour la portion disponible des biens. [1969, 1970.] 815. La rente viagère peut être stipulée au profit d'une personne autre que celle qui en fournit la contre-valeur. Dans ce cas, elle suit les règles des contrats a titre onéreux entre le stipulant et le promettant, et celle des donations entre le stipulant et le bénéficiaire; mais elle n'est pas soumise aux formalités des donations. [1973.] La rente viagère peut aussi être retenue sur un capital aliéné à titre onéreux ou gratuit. 816. Elle peut reposer, soit sur la tête du créancier, soit sur celle du débiteur, soit même sur celle d'un tiers. [1971.] Dans ce dernier cas, le consentement de ce tiers est nécessaire à la formation du contrat, s'il est onéreux; mais les arrérages payés avant ce consentement ne peuvent être répétés. 817. Elle peut reposer sur plusieurs têtes, soit simultanément, soit successivement. [1972.] Dans ces cas, la disposition de l'article 103, au sujet de l'usufruit, lui est applicable. 818. Le contrat de rente viagère constituée à titre onéreux est nul, si la personne sur la tête de laquelle la rente a été créée était déjà morte au moment de la convention, même à l'insu des deux parties. [1974.] Il est résolu de plein droit, si cette personne est décédée, dans le délai de soixante jours, d'une maladie dont elle était déjà atteinte au moment de la convention. [1975.] 819. La rente viagère constituée à titre gratuit peut être déclarée incessible et insaisissable par le constituant. [1981; C. pr. civ., 581.] La clause n'est opposable aux tiers que si elle est insérée dans l'acte constitutif lui-même. Si la rente viagère a été établie gratuitement comme pension alimentaire, elle est de droit incessible et insaisissable, sans même que la donation ou le testament le déclarent. [Ibid., 582.] Les présentes dispositions ne s'appliquent pas à la rente viagère retenue au profit du donateur sur des biens donnés. 820. L'incessibilité et l'insaisissabilité de la rente viagère ont lieu cumulativement, lors même qu'une seule des prohibitions a été stipulée. Elles ne s'appliquent jamais aux arrérages échus. § II. DES EFFETS DU CONTRAT DE RENTE VIAGÈRE. Art. 821. Le débiteur doit payer les arrérages de la rente pendant toute la vie de la personne sur la tête de laquelle elle est constituée, sans pouvoir en exercer le rachat, s'il n'y a convention contraire. [1979.] 822. Les arrérages sont acquis au créancier, jour par jour, lors même que le payement ne doit s'en faire que par mois ou par périodes plus longues. Toutefois, s'ils sont payables d'avance, la période commencée est due tout entière. [1980.] 823. Le défaut de payement des arrérages n'autorise pas le créancier à demander la résolution du contrat, s'il ne s'est réservé ce droit: il peut seulement saisir et faire vendre une partie suffisante des biens du débiteur pour assurer le service des arrérages au moyen du capital à en provenir; sauf à subir le concours des autres créanciers, s'il y a lieu. [1978.] Il sera procédé de même quand la rente a été constituée à titre gratuit ou retenue sur un capital donné ou légué. 824. Le débiteur de la rente peut refuser le payement des arrérages, s'il ne lui est fourni la preuve que la personne sur la tête de laquelle porte la rente existait au jour de l'échéance des arrérages. [1983.] Le certificat de vie sera délivré par le maire de la commune ou par un notaire de la circonscription où cette personne a sa résidence actuelle. [Décr. fr. des 6-27 mars 1791, art. 11; Ord. du 6 juin 1839, art. 1er.] § III. DE L'EXTINCTION DE LA RENTE VIAGÈRE. Art. 825. Si le débiteur de la rente viagère constituée à titre onéreux manque à fournir les sûretés promises pour le service des arrérages ou s'il diminue celles qu'il a fournies, le créancier peut demander la résolution du contrat, sans toutefois être tenu de restituer aucune portion des arrérages déjà acquis. [1977.] Le même droit appartient au titulaire d'une rente viagère retenue sur un capital donné ou légué. La résolution n'est pas prononcée si la personne sur la tête de laquelle portait le droit de rente vient à mourir avant le jugement définitif. 826. Les causes de rescision ou nullité et de révocation autorisées par le droit commun sont applicables à la rente viagère. Le rente viagère s'éteint encore par le rachat stipulé, par la novation, par la remise conventionnelle, par la confusion et par la prescription. Toutefois, la rente viagère est imprescriptible lorsqu'elle est incessible ou insaisissable, en vertu des dispositions de la loi ou de l'homme, conformément aux articles 819 et 820. Dans tous les cas, les arrérages se prescrivent séparément par cinq ans depuis l'échéance. 827. La rente viagère s'éteint par la mort de la personne sur la tête de laquelle elle est constituée, sans préjudice de ce qui est dit à l'article 818. [1982.] Toutefois, au cas de décès du titulaire de la rente, par une cause illégitime imputable au débiteur, si la rente a été constituée à titre onéreux ou comme charge d'une donation ou d'un legs, le contrat ou la libéralité seront résolus et le débiteur restituera les biens acquis par lui, sans recouvrer aucune portion des arrérages payés. Si, dans le même cas de décès du titulaire par la faute du débiteur, la rente avait été directement donnée ou léguée, le service des arrérages sera continué au profit des intéressés pendant le délai que le tribunal fixera comme étant celui de la durée probable qu'aurait eue la vie du titulaire. SECTION III. DES ASSURANCES TERRESTRES. § Ier. DISPOSITIONS GÉNÉRALES. Art. 828. Les assurances terrestres peuvent être soit contre l'incendie, l'inondation, les pertes de récoltes ou d'animaux, soit contre tous autres dommages aux biens pouvant résulter d'accidents spécifiés dans les conventions, les risques de navigation exceptées. Sont encore considérées comme assurances terrestres celles dites " sur la vie " ou contre le décès, quelle que soit la cause prévue du décès ou l'époque de son arrivée. Les assurances contre les accidents de personnes, dans l'exercice des professions dangereuses, sont régies par des lois particulières et par les principes généraux de la présente Section. 829. Les assurances terrestres peuvent être mutuelles ou à prime. 830. L'assurance mutuelle a lieu par l'effet d'une association civile entre personnes qui se trouvent respectivement assureurs et assurés, au moyen de cotisations et d'un fonds commun destinés à réparer, proportionnellement à la mise de chacun, les dommages causés par les accidents spécifiés. 831. L'assurance à prime est faite moyennant une somme fixe ou prime que l'assuré paye ou s'engage à payer à l'assureur, comme équivalent et à raison de la durée du risque que celui-ci prend à sa charge. 832. Les sociétés formées pour les assurances à prime sont considérées comme commerciales; mais les conventions particulières avec les assurés sont purement civiles, lors même que l'assuré est commerçant ou industriel et que l'assurance concerne les objets de son commerce ou de son industrie. [Comp. C. comm., art. 632 et 633.] 833. Les associations civiles d'assurances mutuelles et les sociétés commerciales d'assurances à prime ne peuvent être valablement formées qu'avec autorisation administrative. [Comp. L. fr. des 24-29 juill. 1867, art. 66 et Décr. imp. des 22 janv.-18 fév. 1868.] § II. DES ASSURANCES CONTRE L'INCENDIE ET LES AUTRES DOMMAGES AUX BIENS. Art. 834. Les objets ne peuvent être assurés contre l'incendie et les autres dommages accidentels que par ceux qui ont intérêt à leur conservation. Toutefois, si l'acte d'assurance exprime à cet égard une qualité faussement prise par l'assuré, celui-ci n'est pas recevable à se prévaloir de la nullité de l'assurance, pour obtenir la restitution des primes ou cotisations par lui versées. 835. L'assurance cesse de plein droit pour l'avenir lorsque l'assuré lui-même cesse d'avoir intérêt à la conservation de la chose. Néanmoins, en cas d'aliénation de la chose assurée, les droits de l'assuré correspondant aux primes ou cotisations déjà versées passent à l'acquéreur, en l'absence de stipulation contraire: mais l'assurance cesse pour l'avenir, si l'assuré n'a pas fait prendre son lieu et place par l'acquéreur, sauf les dommages et intérêts de l'assureur. 836. L'assurance est valablement contractée par ceux qui n'ont que le pouvoir d'administrer leurs biens et par les mandataires conventionnels, légaux ou judiciaires des intéressés. L'assurance peut être faite aussi par un gérant d'affaires stipulant au nom et pour le compte de l'intéressé. 837. L'assurance faite par le nu-propriétaire profite à l'usufruitier et celle faite par l'usufruitier profite au nu-propriétaire, sous les conditions réglées à l'article 94. Toutefois, si l'usufruitier a fait assurer les bâtiments, sans spécifier s'il l'a fait pour son compte ou pour celui du nu-propriétaire, il est présumé l'avoir fait pour se couvrir d'abord envers celui-ci contre sa responsabilité de l'incendie, telle qu'elle est établie par l'article 88. 838. L'assurance de bâtiments loués, faite par le locataire, est présumée également faite pour le couvrir d'abord contre sa responsabilité vis-à-vis du propriétaire, telle qu'elle est établie par l'article 152. Elle ne s'applique au recours des voisins auxquels il a communiqué l'incendie, ou au préjudice qu'il éprouve de la cessation du bail par suite de l'incendie, que s'il l'a stipulé dans l'assurance; faute de quoi, elle profite au propriétaire. 839. L'assurance de bâtiments hypothéqués faite par le propriétaire profite de plein droit aux créanciers, suivant leur ordre de préférence. Il en est de même de l'assurance faite par un des créanciers hypothécaires, quel que soit son rang, ou même par un créancier chirographaire; sauf le prélèvement des primes ou cotisations sur l'indemnité, au profit de celui qui a fait l'assurance. [C. it., 1951.] 840. L'assurance faite par celui qui a un droit soumis à une condition suspensive ou résolutoire lui profite, si la condition suspensive s'accomplit ou si la condition résolutoire fait défaut. Dans le cas contraire, elle profite à celui qui a le droit inverse; sauf le remboursement des primes ou cotisations, tel qu'il est établi à l'article précédent. 841. L'assurance est nulle quand elle a pour objet une chose qui, au moment de la convention, était déjà périe, même à l'insu de l'assuré. [.Secùs, C. com., 365, 367.] Lorsque la chose n'était périe qu'en partie, l'assurance est encore nulle si la perte était de plus de moitié et si elle était ignorée des parties ou de l'une d'elles. L'assurance est nulle également, si elle a pour objet des profits éventuels autres que les fruits naturels ou civils des biens de l'assuré. [C. com., 347-2°.] 842. L'assurance ne peut jamais devenir une cause de bénéfices pour l'assuré: spécialement, les objets ne peuvent être assurés pour une somme supérieure à leur valeur réelle au moment de la convention; sauf l'assurance de la valeur supplémentaire que la chose aura pu acquérir. Si la chose n'a pas été assurée, à l'origine, pour toute sa valeur actuelle, elle peut l'être ultérieurement pour le surplus, soit par le même assureur, soit par un autre. 843. Dans le cas où l'assurance supplémentaire n'a pas eu lieu, l'assuré est considéré comme étant son propre assureur pour la valeur non assurée, et, en cas de perte partielle, il ne reçoit qu'une partie de l'indemnité proportionnelle à la valeur assurée par rapport au tout, l'autre partie du risque restant à sa charge. 844. L'assuré ne peut valablement faire assurer, par un nouvel assureur, la chose déjà assurée pour tout ou partie de sa valeur, sans déclarer préalablement à celui-ci la première assurance. Toutefois, la nullité de la seconde assurance est couverte, si la première est annulée en vertu de l'article suivant, ou pour toute autre cause. 845. L'assuré doit de même déclarer au premier assureur la nouvelle assurance qu'il se propose de contracter pour la même chose; faute de ce faire, il est déchu du bénéfice de la première assurance par la signature de la seconde, sans aucune répétition des primes ou cotisations payées, même par avance, et sans préjudice de plus amples dommages-intérêts, s'il y a lieu. Si les assurances sont contractées à la même date, sans que les déclarations respectives aient été dûment faites, elles sont également nulles, sans répétition. Si la déclaration est dûment faite, le premier assureur peut, à son choix, maintenir son assurance ou la résilier pour l'avenir, en restituant, dans ce dernier cas, la moitié de la prime ou cotisation reçue pour le temps qui restait à courir. 846. Lorsqu'il y a plusieurs assurances successives valablement faites par des assureurs différents, pour la même chose et pour la même nature de risque, les derniers assureurs sont considérés comme n'intervenant qu'en qualité de garants de la solvabilité des premiers, pour la valeur déjà couverte par l'assurance; pour le reste de la valeur, ils sont considérés comme assureurs ordinaires. Si les diverses assurances ont la même date, les assureurs sont tenus de l'indemnité, proportionnellement à la somme pour laquelle chacun a fait l'assurance. 847. Les dispositions qui précèdent ne font point obstacle à ce qu'un assureur puisse, à son tour, faire réassurer la même chose par un autre assureur, contre tout ou partie du risque qu'il a accepté. Dans ce cas, les clauses des deux assurances sont indépendantes l'une de l'autre; sauf que l'indemnité stipulée du second assureur ne peut être supérieure à celle que le premier a promise lui-même. 848. Indépendamment des cas où la responsabilité de l'assureur est formellement exclue par la convention, l'assureur ne répond pas, même en vertu d'une clause expresse, des sinistres causés: 1°  Par des actes de l'assuré ou des personnes dont il est responsable, lorsque ces actes sont prohibés par la convention, par la loi ou les règlements de police, ou lorsque les limites, les conditions ou précautions auxquelles ils sont soumis n'ont pas été observées; 2°  Par des actes des mêmes personnes, qui, bien que non prohibés, pouvaient manifestement, soit par leur nature, soit par les circonstances dans lesquelles ils ont été accomplis, entraîner le sinistre formant l'objet de l'assurance. 849. Dans l'assurance contre l'incendie, l'assureur n'est pas responsable, à moins d'engagement formel de sa part, des incendies provenant de guerre étrangère ou civile, de séditions ou d'émeutes, d'éruptions volcaniques ou de tremblements de terre. Est encore exclue de l'assurance, nonobstant toute stipulation contraire, la combustion spontanée de foins ou récoltes prématurément engrangés ou amassés. 850. L'assureur répond des édifices assurés, quoique non incendiés, s'ils ont été démolis pour arrêter les progrès du feu, pourvu que la démolition en ait été jugée nécessaire par l'autorité locale ou par ceux qui dirigeaient valablement le sauvetage. 851. L'assuré doit, au moment où il demande l'assurance, déclarer, aussi exactement que possible, les circonstances qui peuvent influer sur l'appréciation du risque auquel sera soumis l'assureur. Toute réticence ou inexactitude commise, à ce sujet, par erreur ou de mauvaise foi, et que l'assureur a découverte avant le sinistre, donne lieu, suivant les circonstances et la gravité du cas, soit à la nullité de l'assurance, sans restitution des primes versées ou échues, soit à une augmentation de celles-ci, pour le passé et pour l'avenir. Si l'inexactitude n'a été découverte qu'après le sinistre et que les causes ignorées des pertes aient influé sur le sinistre, l'assureur est affranchi, en tout ou en partie, du payement de l'indemnité. Si ces causes ont été sans influence, l'indemnité est diminuée de l'excédant de prime que l'assuré aurait dû payer. 852. Au cours de l'assurance, l'assuré ne peut, sous la même sanction, apporter aux choses assurées ou aux conditions dans lesquelles elles se trouvent, aucun changement pouvant aggraver les risques, à moins de se faire autoriser auxdits changements par l'assureur. S'il s'agit d'objets mobiliers assurés contre l'incendie, leur transport non autorisé hors des lieux où ils étaient lors de l'assurance, pour toute autre cause que le sauvetage, enlève à l'assuré tout droit à l'indemnité en cas de sinistre. La preuve qu'il a été apporté des changements aux conditions du risque incombe à l'assureur. 853. Lorsque l'assurance à prime est faite pour plusieurs années, les primes sont quérables au domicile de l'assuré, à moins d'indication, par la police d'assurance ou par acte subséquent, du domicile de l'assureur ou d'un autre lieu où elles soient portables. Si les primes sont quérables, la déchéance de l'assuré faute de payement ne peut avoir lieu que par une mise en demeure en bonne forme. Si la prime est portable, l'assuré est déchu de plein droit du bénéfice de l'assurance, à défaut de payement à l'échéance, à moins de disposition contraire dans la police d'assurance. Dans l'un et l'autre cas, l'assuré est relevé de la déchéance, si l'assureur a reçu la prime, bien que tardivement, et si, en même temps, il n'y a pas eu de sinistre dans l'intervalle. Quand la prime est quérable, l'assuré peut toujours payer au domicile de l'assureur, avant l'échéance, et même après, tant qu'il n'a pas encouru la déchéance. Dans les assurances mutuelles, la déchéance est réglée par les statuts de la société et, à leur défaut, par le droit commun des obligations de sommes d'argent. 854. L'assuré doit, au cas de sinistre imminent ou commencé, faire par lui-même ou faire exécuter par autrui tout ce qui est possible pour prévenir ou diminuer le dommage garanti par l'assurance; sauf à se faire rembourser comme il est dit aux articles 856 et 859. 855. Au cas de sinistre de la nature garantie par l'assurance, l'assuré doit en faire la déclaration à l'assureur dans le plus bref délai possible, avec l'indication des causes apparentes ou probables du sinistre et de l'étendue connue des dommages, en ce qui le concerne. La déclaration pourra toujours être faite en premier lieu à l'autorité locale, et c'est à elle qu'elle devra être faite d'abord, quand la police d'assurance l'exigera. 856. Si la valeur des objets assurés ou le montant de l'indemnité éventuelle n'ont pas été déterminés par le contrat d'assurance ou par acte ultérieur, l'assureur, au cas du sinistre prévu, doit à l'assuré l'indemnité entière des dommages matériels qui sont prouvés par celui-ci être une suite immédiate et directe dudit sinistre, ainsi que les frais légitimement faits et justifiés, soit pour prévenir ou arrêter le sinistre, soit pour sauver les objets assurés. 857. Si les objets ont été évalués, l'assureur, au cas de perte totale, ne doit rien au-delà du montant de l'évaluation, lors même que lesdits objets auraient augmenté de valeur. S'ils ont diminué de valeur, l'assureur ne doit que leur valeur au jour du sinistre. La preuve de la diminution de valeur est à la charge de l'assureur. 858. Au cas de perte partielle, l'assureur ne doit qu'une part proportionnelle de l'indemnité stipulée ou de la valeur actuelle, suivant la distinction qui précède. Si l'assuré est pour partie son propre assureur, comme il est dit à l'article 843, il supporte une même partie du risque. Toutefois, dans l'assurance de l'habitant d'une maison contre le recours du propriétaire ou des voisins, l'assuré ne supporte le risque que pour ce qui excède le total de l'indemnité stipulée. 859. Si, parmi les objets mobiliers assurés, il y en a de sauvés en entier, l'assureur peut, à son choix, les retenir, en payant toute l'indemnité, comme s'ils avaient péri en totalité, ou en déduire la valeur estimative du montant de l'indemnité, en les abandonnant à l'assuré; mais il garde ou fait vendre à son profit les objets seulement détériorés, et il en paye la valeur intégrale. S'il s'agit de bâtiments, l'assureur déduit toujours la valeur des corps de bâtiments qui sont restés intacts; à l'égard de ceux qui ont été seulement atteints par le feu, l'assureur a le choix, ou de les réparer à ses frais, ou d'en payer la valeur, en enlevant les matériaux. Dans l'un et l'autre cas, les frais de sauvetage desdits objets sont à la charge de l'assureur. 860. L'assurance de tout le mobilier garnissant une maison ne comprend pas, à moins de convention contraire, l'argent comptant, les bijoux, ni les titres de créances ou de propriété. Elle ne compred pas non plus les manuscrits et autres objets n'ayant pas une valeur vénale appréciable. 861. L'assureur qui a payé l'indemnité du sinistre est, de plein droit, subrogé aux droits et actions de l'assuré contre les locataires, voisins et autres personnes qui peuvent être responsables du sinistre. 862. L'assurance cesse pour l'avenir, lorsque les objets assurés ont péri en totalité ou pour plus de moitié de leur valeur actuelle, soit par le sinistre prévu, soit par une autre cause fortuite ou majeure, et lors même que les choses seraient rétablies dans leur état primitif. § III. DES ASSURANCES DITES “SUR LA VIE” OU CONTRE LE DÉCÈS. Art. 863. Toute personne peut, moyennant le payement d'un capital unique ou d'une prime annuelle, assurer au profit de ses héritiers ou d'autres personnes, en prévision et pour l'époque de son décès, un capital ou une rente perpétuelle ou viagère, considérés comme l'indemnité du dommage que leur causera ce décès. L'assurance faite au profit d'une personne qui n'est pas l'héritier de l'assuré et qui ne lui fournit pas une valeur équivalente est considérée comme une donation, quant au fond, de la part de l'assuré. 864. On peut aussi, en prévision du décès d'un tiers, stipuler une indemnité pour soi ou pour autrui. Dans l'un et l'autre cas, la stipulation est nulle si le bénéficiaire n'a pas un intérêt appréciable en argent à la vie de l'assuré et si celui-ci n'est pas intervenu à l'acte ou n'y a pas consenti séparément par écrit. 865. L'assuré peut toujours céder le droit à l'indemnité stipulée par lui sans bénéficiaire déterminé. Le bénéficiaire autre que l'assuré ne peut céder son droit à l'indemnité qu'avec le consentement de l'assuré et s'il est prouvé que le cessionnaire a un intérêt appréciable à la vie de celui-ci. 866. L'assuré ou quiconque stipule sous la condition du décès de celui-ci doit déclarer à l'assureur toutes les circonstances qui peuvent influer sur l'appréciation du risque et dont il avait connaissance. A défaut de cette déclaration, même sans qu'il y ait eu fraude, l'assureur peut, suivant la gravité du cas, demander soit l'annulation de l'assurance, soit l'augmentation de la prime, soit la réduction de l'indemnité, conformément à l'article 851. 867. Si, postérieurement au contrat, l'assuré est entré, volontairement ou par l'effet de la loi, dans le service actif de l'armée de terre ou de mer, ou s'il a entrepris un voyage au long cours, l'assureur peut demander un supplément de prime ou la résiliation de l'assurance, moyennant une indemnité proportionnelle au temps qu'a déjà duré l'assurance. La résolution a lieu de plein droit si, le supplément de prime n'ayant pas été réglé à cet égard, l'assuré est mort des suites directes du service militaire ou de la navigation. Sont considérés comme voyages au long cours, au point de vue de l'application du présent article, les voyages par mer autres que ceux de port en port du Japon. [v. C. com., 317; L. 14 juin 1854.] 868. Le défaut de payement de la prime annuelle entraîne la résolution de l'assurance, sous les conditions portées à l'article 853. Toutefois, si la prime a déjà été versée une ou plusieurs fois, l'assureur doit payer une indemnité proportionnelle à ces versements. 869. L'assureur est affranchi de toute indemnité, si la personne sur le décès de laquelle porte l'assurance est morte des suites directes d'un duel ou d'un attentat à sa propre vie. Si la mort est résultée d'une condamnation capitale, l'assureur doit payer aux ayant-cause de l'assuré une indemnité proportionnelle aux primes déjà versées. 870. Les articles 832, 833, 844, 845, 847, 855 et 861 ci-dessus sont applicables aux assurances contre le décès. Toutefois, si l'assuré est déchu du bénéfice du contrat, dans les cas des articles 844 et 845, il y a lieu à indemnité proportionnelle à raison des primes déjà payées. 871. Dans les cas où une indemnité proportionnelle est due, si les bases n'en ont pas été déterminées par la police d'assurance, le chiffre en est arbitré par le tribunal, en raison des primes versées et d'après l'âge de l'assuré et les autres circonstances de fait pouvant influer sur la durée de sa vie. 872. Les tontines et autres associations d'assurances mutuelles sur la vie ou contre le décès, dûment autorisées, conformément à l'article 833, sont régies par les principes généraux qui précèdent, en tant que leur nature propre et leurs statuts particuliers ne s'y opposent pas. CHAPITRE XVII. DU PRÊT DE CONSOMMATION ET DE LA RENTE PERPÉTUELLE. SECTION PREMIÈRE. DU PRÊT DE CONSOMMATION. Art. 873. Le prêt de consommation est un contrat par lequel l'une des parties transfère à l'autre la propriété de choses fongibles, à la charge par celle-ci de lui rendre, après un certain temps, des choses semblables, en pareilles quantité et qualité. [1874, 1892, 1894, 1897, 1902.] 874. Si l'époque du remboursement n'a pas été fixée par les parties, elle est déterminée par le tribunal, d'après l'intention probable de celles-ci et les circonstances. [1900, 1901.] A défaut de détermination d'un autre lieu, le remboursement est dû au domicile du prêteur, si le prêt a été fait sans intérêts; dans le cas contraire, il est dû au domicile de l'emprunteur. [1247, 2e al.] 875. Si, par force majeure, la restitution des choses prêtées est devenue impossible, l'emprunteur en doit la valeur estimative calculée au jour et au lieu où le prêt a été effectué. [Comp. 1903.] 876. Le prêt de choses n'appartenant pas au prêteur est nul et donne lieu à garantie s'il est à intérêts, et si l'emprunteur a été de bonne foi. Il ne devient valable que dans les cas suivants: 1°  Si l'emprunteur a consommé de bonne foi les choses prêtées; 2°  S'il a repoussé la revendication du vrai propriétaire par la prescription; 3°  S'il y a eu ratification du prêt par celui-ci. 877. Si les choses prêtées avaient des défauts non apparents, ignorés de l'emprunteur, mais connus du prêteur et de nature à causer des dommages aux personnes ou aux biens, et si ces défauts ont été effectivement nuisibles à l'emprunteur, le prêteur n'en est responsable, lorsque le prêt est gratuit, que s'il y a eu, de sa part, dol ou intention de nuire. [1891, 1898.] Si le prêt est à intérêts, le prêteur est responsable même des défauts cachés qu'il a ignorés, lorsqu'il pouvait les connaître. Les dispositions des articles 741 à 748, sur l'action rédhibitoire de la vente, s'appliquent d'ailleurs au prêt, autant qu'il y a lieu. 878. Les articles 484 à 487 sont applicables au prêt fait en monnaie métallique ou en papier-monnaie ayant cours forcé. Toutefois, le prêteur ne peut stipuler le remboursement d'une valeur énoncée en or ou en argent, ou payable en l'une de ces monnaies, comme il est permis par l'article 486, qu'autant qu'il a effectivement prêté la même valeur, soit dans des espèces de même nature, soit dans leur équivalent, en une autre monnaie ou en papier-monnaie. 879. Si le prêt a été fait en lingots, l'emprunteur doit rendre des lingots de même nature, poids et qualité, comme s'il s'agissait de toute autre marchandise. [1896, 1897.] 880. L'emprunteur de sommes d'argent, de denrées ou marchandises, peut s'engager à payer, sous le nom “ d'intérêts,” comme prix du service rendu, outre le capital, une certaine somme ou valeur proportionnelle aux valeurs prêtées. [1905.] 881. Les intérêts ne sont exigibles de l'emprunteur que s'ils ont été stipulés. S'il a été convenu que l'emprunteur payerait des intérêts, sans que le montant en ait été fixé, ils sont dus au taux légal. L'emprunteur ne peut ni répéter, ni imputer sur le capital, les intérêts non stipulés qu'il a volontairement payés dans les limites posées par la loi. [1906.] 882. Les intérêts conventionnels ne peuvent excéder les intérêts légaux que dans les cas où la loi ne le prohibe pas. [1907.] S'ils ont été ostensiblement fixés à un taux supérieur à celui que la loi permet, ils sont réductibles à ce taux et ce qui en a été payé au-delà est sujet à imputation sur le capital ou à répétition. Mais lesdits intérêts illégitimes ne sont dus pour aucune portion, et, s'ils ont été payés, ils sont sujets à répétition pour le tout, lorsque le créancier les a fait dissimuler, en tout ou en partie, soit par la reconnaissance d'un capital supérieur à celui qu'il a effectivement prêté, soit de toute autre manière. [Lois fr. des 3 sept. 1807; 19 déc. 1850; 14 janv. 1886.] 883. Si le prêteur reçoit, en tout ou en partie, le capital dû, sans faire de réserves au sujet des intérêts échus, il est présumé, jusqu'à preuve contraire, les avoir reçus ou en faire l'abandon. [1908.] 884. Si le prêt à intérêts a été fait pour un temps excédant dix ans, l'emprunteur a toujours la faculté de le rembourser après dix ans, nonobstant toute convention contraire. Toutefois, le remboursement anticipé n'est pas admis, si les annuités comprennent, outre les intérêts, un amortissement graduel du capital. [C. it., 1832.] 885. Les dispositions des articles 881 à 884 sont applicables à toute obligation de sommes d'argent ou de choses de quantité autre que celle née d'un prêt, et aux intérêts légaux comme aux intérêts conventionnels. SECTION II. DU CONTRAT DE RENTE PERPÉTUELLE. Art. 886. Le prêteur à intérêts peut s'interdire le droit d'exiger le capital à aucune époque; dans ce cas, le contrat prend le nom de “ constitution de rente perpétuelle.” [1909, 1910.] Cette interdiction doit être formelle ou résulter clairement des circonstances. 887. L'emprunteur à charge de rente perpétuelle peut toujours effectuer le remboursement du capital reçu, nonobstant toute convention contraire. [1911, 1er al.] Toutefois, il peut s'engager à ne pas effectuer ledit remboursement avant un certain temps qui ne peut excéder dix ans. Cet engagement peut toujours être renouvelé, mais sans jamais excéder dix ans; autrement, il est réduit à ce terme. Le remboursement doit être intégral, à moins de convention contraire. Le débiteur doit prévenir le créancier de son intention de rembourser, six mois à l'avance, si un autre délai n'a pas été fixé par les parties. [1911, 2e al.] A défaut de remboursement au temps par lui fixé, le débiteur est passible de dommages-intérêts; mais il ne peut être contraint au remboursement, à moins qu'il n'y ait eu novation. 888. Le débiteur peut être contraint au remboursement du capital, dans les trois premiers cas où l'article 425 déclare tout débiteur déchu du bénéfice du terme de droit, et, en outre, s'il manque au payement des arrérages pendant deux ans consécutifs, après une mise en demeure régulière; [1912, 1913.] Sauf, dans ce dernier cas, le droit pour les tribunaux de lui accorder un délai de grâce et la division du payement, conformément à l'article 426. 889. Les dispositions des deux articles précédents sont applicables à la rente perpétuelle établie comme prix ou comme condition de l'aliénation d'un immeuble et aussi à la rente perpétuelle constituée à titre gratuit. [Comp. 530.] Dans l'un et l'autre cas, le remboursement consiste dans le capital qui aura été évalué entre les parties, ou, à défaut de cette évaluation, dans le capital qui produirait les arrérages annuels calculés d'après le taux légal de l'intérêt. [Ibid.] Si les arrérages consistent en denrées, le remboursement du capital, en l'absence de convention spéciale, se fera en prenant pour base, comme intérêts, le prix moyen desdites denrées pendant les dix dernières années. [L. fr., 18-29 déc. 1790, tit. 3.] CHAPITRE XVIII. DU PRÊT A USAGE. SECTION PREMIÈRE. DE LA NATURE DU PRÊT A USAGE. Art. 890. Le prêt à usage ou commodat est un contrat par lequel l'une des parties remet à l'autre une chose mobilière ou immobilière, pour s'en servir, à charge de la rendre identiquement et en nature, après le temps expressément ou tacitement fixé. [1874, 1875, 1877, 1878.] Ce prêt est essentiellement gratuit. [1876.] 891. L'emprunteur n'acquiert pas le droit réel d'usage, mais seulement un droit personnel contre le prêteur et ses héritiers. Le droit de l'emprunteur ne passe pas à ses héritiers, à moins que ceux-ci ne prouvent que l'intention des parties a été différente, et sauf la possibilité pour les héritiers d'obtenir du tribunal un délai pour se procurer autrement l'usage d'une chose semblable. [1879.] SECTION II. DES OBLIGATIONS QUI NAISSENT DU PRÊT OU A SON OCCASION. Art. 892. L'emprunteur ne doit employer la chose prêtée qu'à l'usage auquel elle est destinée par sa nature ou par la convention, et pendant le temps pour lequel elle lui a été prêtée. [1880.] Il est responsable de la perte ou détérioration qui résulterait d'un autre emploi ou d'un usage trop prolongé, et même de la perte par cas fortuit dont cet usage ou emploi aurait été l'occasion. [1881.] 893. L'emprunteur est encore responsable de la perte résultant d'un cas fortuit ou d'une force majeure, s'il avait pu y soustraire la chose en employant la sienne propre ou si, dans un péril commun de sa chose et de la chose prêtée, il a préféré sauver la sienne. [1882.] 894. L'emprunteur est tenu des frais ordidinaires d'entretien de la chose prêtée, sans répétition contre le prêteur. [1886.] 895. L'emprunteur doit restituer la chose prêtée, au temps convenu, ou même auparavant, dès que l'usage autorisé est terminé, ou si le prêteur se trouve en avoir pour lui-même un besoin urgent et imprévu. [1888, 1889.] Si aucun temps n'a été convenu et que l'usage de la chose puisse être continu, le tribunal, sur la demande du prêteur, fixe un délai convenable pour la restitution. 896. La restitution doit être faite au prêteur ou à son représentant, lors même que l'emprunteur saurait que la chose appartient à un tiers, à moins qu'il n'y ait une opposition à la restitution, formée par celui-ci, en bonne et due forme. Hors ce dernier cas, la restitution se fait au domicile du prêteur ou à celui de son représentant. 897. Si plusieurs personnes ont emprunté une chose conjointement et pour un usage simultané ou alternatif, chacune d'elles est tenue solidairement avec les autres des obligations qui précèdent. [1887.] 898. Le prêteur est tenu de rembourser à l'emprunteur les dépenses nécessaires et urgentes qu'il a faites pour la conservation de la chose prêtée. [1890.] 899. Il est encore tenu d'indemniser l'emprunteur des dommages que la chose prêtée lui a causés par ses vices, lorsque ces vices, non apparents et connus de lui, étaient ignorés de l'emprunteur. 900. L'emprunteur peut exercer le droit de rétention sur la chose prêtée, jusqu'au remboursement de ce qui lui est dû en vertu des deux articles précédents. [Comp. 1885.] CHAPITRE XIX. DU DÉPÔT ET DU SÉQUESTRE. SECTION PREMIÈRE. DU DÉPÔT PROPREMENT DIT. Art. 901. Le dépôt proprement dit est un contrat par lequel une personne remet une chose mobilière à une autre personne, pour que celle-ci la garde et la lui restitue identiquement, à première demande. [1915, 1918, 1919.] Le dépôt est essentiellement gratuit. [1917.] Il est purement volontaire ou nécessaire. [1920.] § Ier. DU DÉPÔT VOLONTAIRE. Art. 902. Le dépôt volontaire est celui qui a lieu dans les circonstances où le déposant a pu librement choisir le temps et le lieu du dépôt et la personne du dépositaire. [1921.] 903. Le dépôt, peut être fait non seulement par le propriétaire, mais encore par toutes personnes ayant intérêt à la garde et à la conservation de la chose, ou par leurs mandataires. Il peut être fait également par les représentants légaux des incapables [1922.] 904. Le dépôt ne peut être reçu que par ceux qui ont la pleine capacité de contracter. [1925.] Toutefois, les incapables sont civilement tenus de restituer les choses déposées qui se trouvent encore dans leurs mains, ou la valeur de ce dont ils se trouvent enrichis par suite du dépôt; sans préjudice de l'action pénale, s'il y a lieu, au cas d'abus de confiance. [1926.] 905. Le dépositaire doit apporter à la garde et à la conservation de la chose déposée les mêmes soins que ceux qu'il apporte à ses propres biens. [1927, 1933.] Toutefois, il est tenu des soins d'un bon administrateur, s'il s'est offert lui-même à recevoir le dépôt, ou si le dépôt a été fait uniquement dans son intérêt et pour lui permettre d'user de la chose en cas de besoin. [1928.] 906. Dans le dernier cas prévu à l'article précédent, l'article 893 est applicable au dépositaire, lorsqu'il a usé de la chose. Dans tous les autres cas, si la chose déposée et la chose du dépositaire se trouvent exposées à un péril commun et que le dépositaire n'en puisse sauver qu'une seule, il doit sauver celle du déposant, si elle a notablement le plus de valeur; sauf à être indemnisé de la valeur de la sienne propre. 907. Le dépositaire mis en demeure de restituer est tenu de la perte fortuite ou par force majeure, conformément au droit commun. [1929.] 908. Le dépositaire ne doit pas chercher à connaître la nature des choses déposées, lorsqu'elle lui a été cachée, ni dans aucun cas, la faire connaître à d'autres, sous peine de dommages-intérêts, s'il y a lieu. [1931.] 909. Il ne doit pas se servir des choses déposées, ni en consommer les fruits, s'il n'en a la permission expresse ou tacite du déposant. [1930, 1936.] Cette permission ne suffit pas à donner au dépôt le caractère d'un prêt à usage. 910. Il doit restituer la chose identiquement, avec les fruits et produits qu'il en a perçus, ou leur valeur, s'il a dû les convertir en argent; sauf le cas prévu à l'article précédent. [1932, 1936.] S'il a reçu quelque indemnité ou acquis quelque droit ou profit au sujet de la chose, il doit les transférer au déposant. [1934.] S'il a consommé, aliéné ou détourné sciemment la chose déposée, il est, de plein droit et sans mise en demeure, tenu de tous les dommages-intérêts; sans préjudice de l'action publique pour abus de confiance. 911. Si l'héritier du dépositaire, ignorant le dépôt, a consommé ou aliéné la chose déposée, il est tenu jusqu'à concurrence du profit qu'il a ainsi tiré. [1935.] La même disposition s'appliquerait au dépositaire lui-même qui, par oubli ou par confusion, aurait disposé de la chose, la croyant sienne. 912. La restitution du dépôt ne doit être faite qu'au déposant ou à son héritier, ou à leur représentant légal ou conventionnel. [1937, 1939 à 1941.] 913. A défaut de fixation d'un lieu pour la restitution, elle se fait au lieu où se trouve la chose déposée, lors même que celle-ci aurait été déplacée par le dépositaire, pourvu que ce fût sans fraude. [1942, 1943.] 914. L'obligation pour le dépositaire de rendre la chose à la première réquisition du déposant cesse dans les cas suivants: 1°  S'il peut prouver que la chose lui appartient; 2°  S'il est dans le cas d'user du droit de rétention, conformément à l'article suivant; 3°  Si une saisie-arrêt ou une opposition à la restitution lui a été signifiée en bonne forme; 4°  S'il a découvert que la chose a été volée et s'il en connaît le. propriétaire, auquel cas il doit dénoncer le dépôt à celui-ci, avec sommation de réclamer la chose contradictoirement avec le déposant, dans un délai déterminé et suffisant, passé lequel, si le propriétaire ne se présente pas, il devra faire la restitution au déposant. [1938, 1944. 1946.] 915. Le déposant doit indemniser le dépositaire des dépenses nécessaires que celui-ci a faites pour la conservation de la chose et des dommages que la chose a pu lui causer. [1947.] Jusqu'au remboursement intégral desdites indemnités, le dépositaire peut exercer le droit de rétention sur la chose déposée. [1948.] § II. DU DÉPÔT NÉCESSAIRE ET DU DÉPÔT DANS LES HÔTELLERIES. Art. 916. Le dépôt est dit “nécessaire” lorsque le déposant y est contraint par un accident majeur et imprévu, tel qu'incendie, inondation, naufrage, tremblement de terre, sédition. [1949.] Le dépôt nécessaire peut être prouvé par tous les moyens possibles, même par présomption de fait résultant des circonstances. [1950.] Le dépôt nécessaire est d'ailleurs soumis aux règles du dépôt volontaire, sauf l'aggravation de peine portée par le Code pénal au cas d'abus de confiance. [1951.] 917. Les hôteliers, aubergistes, logeurs en garni, sont considérés comme dépositaires nécessaires, à l'égard des effets apportés par les voyageurs qui logent chez eux. [1952 à 1954.] Il en est de même des voituriers, bateliers et autres entrepreneurs de transport par terre ou par eau, à l'égard des effets qui leur sont confiés pour être transportes, et lorsque leur entreprise est commerciale. [1782 et s.; C. comm., 96 et s.] Toutefois, les dépositaires prévus au présent article sont soumis à la responsabilité ordinaire des contractants à titre onéreux. SECTION II. DU SÉQUESTRE. Art. 918. Le séquestre est le dépôt, fait entre les mains d'un tiers, d'une chose objet d'un litige ou de prétentions contraires de la part de deux ou plusieurs personnes. [1956.] Il peut avoir pour objet des meubles ou des immeubles. [1959.] Il est conventionnel ou judiciaire. [1955.] 919. Le séquestre conventionnel doit être consenti par tous les intéressés, tant pour le dépôt lui-même que pour le choix de celui qui sera séquestre-gardien. Le séquestre-gardien judiciaire ne sera choisi d'office par le tribunal que si les parties ne peuvent s'accorder sur le choix. [1963.] La justice peut nommer séquestre-gardien une des parties en cause. 920. Le séquestre-gardien, tant conventionnel que judiciaire, peut être salarié; il est alors tenu d'apporter à la chose les soins ordinaires d'un bon administrateur. [1958.] 921. Le séquestre-gardien judiciaire peut faire des baux, conformément à l'article 126; mais le séquestre-gardien conventionnel ne le peut qu'en vertu d'un pouvoir spécial des intéressés. Tous deux peuvent exercer les actions possessoires, pour conserver ou recouvrer leur possession. La possession du séquestre-gardien profite à celle des parties qui triomphe définitivement dans la contestation. 922. La chose mise en séquestre doit être rendue à celle des parties qui a triomphé. Toutefois, le séquestre-gardien peut exiger, pour couvrir sa responsabilité, une autorisation des parties en cause ou un ordre du tribunal. [1956, 1960, 1962.] 923. Les règles du dépôt proprement dit s'appliquent, pour le surplus, au séquestre conventionnel et au séquestre judiciaire. [1958, 1962.] 924. La garde judiciaire des objets saisis et le dépôt ou la consignation des sommes ou valeurs offertes en payement au créancier qui refuse de recevoir sont réglés au Code de Procédure civile. [1961.] CHAPITRE XX. DU MANDAT. SECTION PREMIÈRE. DE LA NATURE DU MANDAT. Art. 925. Le mandat est un contrat par lequel une partie charge l'autre de faire quelque chose en son nom et dans son intérêt ou pour son compte. [1984.] Si le mandataire doit agir en son propre nom, mais toujours dans l'intérêt ou pour le compte du mandant, le contrat prend le nom de “commission.” [C. comm. fr., 94.] La commission est réglée par le Code de Commerce. 926. Le mandat peut être donné et accepté tacitement. [1985.] 927. Le mandat est gratuit, s'il n'y a convention contraire, expresse ou tacite. [1986.] 928. Il est général, déterminé, ou spécial. [1987.] Le mandat général, ou sans désignation particulière des actes à faire, ne comprend que les actes d'administration du patrimoine du mandant. [1988.] Le mandant est déterminé lorsqu'il comprend un ensemble d'actes d'une nature particulière et limitée, soit d'administration, soit de disposition ou d'obligation; il peut comprendre aussi certaines actions à suivre en justice, soit en demandant, soit en défendant ou en intervenant. Le mandat est spécial lorsqu'il a pour objet un ou plusieurs actes à accomplir, de la nature ci-dessus désignée. 929. Tout mandat, général, déterminé ou spécial, comprend tacitement les suites nécessaires des actes formant son objet. [1989, 1er al.] Mais le pouvoir de contracter une obligation de capital ne comprend pas celui de l'acquitter. Celui de stipuler un capital ne permet pas d'en recevoir le payement. Le pouvoir de plaider ne permet pas de nommer des arbitres, ni d'acquiescer à la demande ou de se désister de l'action, ni même de transiger. Le pouvoir de transiger ne permet pas de déférer la contestation à des arbitres, ni même aux tribunaux. [1989, 2e al.] Réciproquement, le pouvoir de nommer des arbitres ne comprend pas celui de transiger, ni même de déférer la contestation aux tribunaux. 930. Le mandat peut être donné valablement à une personne incapable d'agir pour elle-même; mais le mandataire n'encourt vis-à-vis du mandant que la responsabilité limitée des incapables. [1990.] 931. Le mandataire peut se substituer quelqu'un pour tout ou partie des actes de sa gestion, si ce pouvoir ne lui a pas été refusé expressément, ou si la nature de l'affaire n'est pas telle qu'elle doive être considérée comme exclusivement confiée au mandataire: il est alors responsable de la gestion de son substitué comme de la sienne propre. [1994, 1er al.] S'il lui a été désigné une personne qu'il pourrait se substituer, il ne peut en choisir une autre, même en cas d'impossibilité de se conformer aux choix désigné: s'il s'y est conformé, il n'encourt de responsabilité pour l'incapacité ou l'infidélité du susbtitué que s'il a pu les connaître assez tôt pour en avertir le mandant ou pour révoquer le substitué. Au cas de substitution faite malgré la prohibition, ou d'un choix autre que celui qui était autorisé, le mandataire est responsable des dommages, même fortuits ou résultant d'une force majeure, s'ils n'avaient pas dû arriver sans cette substitution. 932. Dans les cas prévus aux deux premiers alinéas de l'article précédent, le mandant peut exercer directement contre le substitué les actions relatives à la gestion de celui-ci, et il est tenu directement envers lui au même titre. [1994, 2e al.] Dans les cas de substitution irrégulière prévus par le troisième alinéa du même article, le mandant a le choix entre ladite action directe et l'action indirecte du chef du mandataire; mais l'exercice de la première emporte ratification de la substitution. SECTION II. DES OBLIGATIONS DU MANDATAIRE. Art. 933. Tant que le mandat n'a pas pris fin par une des causes énoncées à la Section IV, le mandataire est tenu, sous peine de dommages-intérêts, de l'accomplir dans sa forme et teneur, en tenant compte aussi de l'intention du mandant connue de lui, quoique non exprimée. [1991, 1er al.] Si l'exécution totale est impossible, l'exécution partielle n'est obligatoire et permise qu'autant qu'elle est utile au mandant. 934. Si le mandataire chargé d'acheter pour un prix déterminé n'a pu obtenir la chose qu'à un prix supérieur, il peut, en renonçant à répéter l'excédant, exiger du mandant la ratification de l'achat; le mandant, de son côté, peut exiger la livraison de la chose au prix qui a été payé. S'il s'agit d'un mandat de vendre et que le mandataire ait vendu au-dessous du prix fixé, il peut faire ratifier la vente, en suppléant la différence. 935. Le mandataire est tenu d'apporter à l'accomplissement du mandat tous les soins d'un bon administrateur. [1992, 1er al.] Néanmoins, ses fautes seront appréciées avec moins de rigueur dans les cas suivants: 1°  S'il rend le service gratuitement; [Ib., 2e al.] 2°  S'il ne s'est pas offert au mandat; 3°  Si son inhabileté était connue ou soupçonnée du mandant; 4°  S'il a fait quelques autres actes de gestion produisant pour le mandant un profit inespéré. 936. le mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, avec les pièces l'appui, lorsque le mandat a pris fin, et même auparavant, s'il en est requis par le mandant. [1993.] 937. Il doit restituer au mandant toutes les sommes ou valeurs qu'il a reçues pour le compte de celui-ci ou par suite de sa gestion, lors même qu'elles n'auraient pas été légitimement dues ou qu'il n'aurait pas été autorisé à les recevoir. [1993.] Il y joint le montant des valeurs qu'il a négligé de percevoir ou qu'il a perdues par sa faute, ainsi que les dommages-intérêts dus en vertu des articles précédents; mais sous la déduction de ce qui lui est dû par le mandant, conformément à la Section suivante. 938. Le mandataire qui a, sans autorisation, employé à son profit les capitaux du mandant en doit les intérêts de plein droit, à dater de cet emploi, sans préjudice de plus amples dommages-intérêts, s'il y a lieu. A l'égard des sommes dont il est seulement reliquataire, il en doit les intérêts à compter de sa mise en demeure. [1996.] 939. Si plusieurs mandataires ont été constitués pour la même affaire, soit par un seul acte, soit par des actes séparés, chacun n'est responsable que de ses fautes personnelles et il n'y a solidarité entre eux que si elle a été stipulée, ou si les fautes ont été conjointes. [1995.] 940. Le mandataire n'est pas tenu vis-à-vis des tiers de l'exécution des actes qu'il a faits avec eux au nom et pour le compte du mandant, à moins qu'il ne s'y soit soumis expressément, ou qu'il ne se soit présenté à eux comme ayant des pouvoirs qu'il n'avait pas. [1997.] SECTION III. DES OBLIGATIONS DU MANDANT. Art. 941. Le mandant doit: 1°  Rembourser au mandataire les avances et frais légitimes que celui-ci a déboursés pour l'exécution du mandat, avec les intérêts légaux à partir du jour du déboursement; [1999, 2001.] 2°  Lui payer le salaire qui a pu être convenu; [1999.] 3°  L'indemniser des pertes ou dommages qu'il a éprouvés, sans sa faute, par suite ou à l'occasion de sa gestion, en exceptant toutefois les dommages qui ont pu être prévus et motiver, en tout ou en partie, la promesse d'un salaire; [2000.] 4°  Lui procurer la décharge ou l'indemnité des engagements personnels qu'il a pu prendre à raison de ladite gestion. [1998, 1er al.] 942. Le mandataire n'est pas tenu de faire les déboursés prévus à l'article précédent, s'il ne s'y est engagé; mais il ne peut, de ce chef, retarder l'exécution du mandat, sans avoir fait constater le refus ou le retard du mandant à fournir les provisions nécessaires. 943. Le salaire n'est dû qu'après que le mandat a été exécuté en entier, à moins qu'il n'ait été stipulé payable par fractions. Si l'exécution totale a été empêchée par une cause non imputable au mandataire, le salaire lui est dû en proportion de ce qu'il a fait. 944. Jusqu'à l'acquittement des obligations du mandant, le mandataire jouit du droit de rétention des choses qu'il détient en vertu du mandat et à raison desquelles il est créancier. 945. Si le mandat a été constitué par plusieurs personnes pour une affaire commune, soit par un seul et même acte, soit par des actes séparés, chacun des mandants est solidairement tenu des obligations qui précèdent, s'il n'y a stipulation contraire. [2002.] 946. Le mandant est tenu, envers les tiers avec lesquels le mandataire a traité, de tous les engagements pris en son nom conformément au mandat. [1998, 1er al.] Il est même tenu de ce qui a été fait au-delà des pouvoirs qu'il a donnés: 1°  S'il a ratifié les actes, expressément ou tacitement; [1998, 2e al.] 2°  S'il en a profité et dans la mesure dudit profit; 3°  Si les tiers ont été de bonne foi et ont eu de justes motifs de croire aux pouvoirs du mandataire. SECTION IV. DE LA CESSATION DU MANDAT. Art. 947. Indépendamment de l'exécution du mandat ou de l'impossibilité de l'exécuter et de l'accomplissement du terme ou de la condition auxquels il pourrait avoir été soumis, le mandat prend fin: 1°  Par la révocation qu'en fait le mandant; 2°  Par la renonciation du mandataire; 3°  Par la mort, la faillite, la déconfiture ou l'interdiction, soit du mandant, soit du mandataire; [2003.] 4°  Par la cessation, dans la personne du mandataire ou du mandant, de la qualité en vertu de laquelle le mandat a été donné ou accepté. 948. La révocation du mandat établi dans l'unique intérêt du mandant peut être faite par celui-ci à toute époque et à son gré, même s'il a promis un salaire. 949. La révocation n'a lieu que pour l'avenir et sans préjudicier à ce qui a été valablement fait jusque-là. 950. S'il y a plusieurs mandants, la révocation faite par l'un d'eux ne met pas fin au mandat des autres. 951. La révocation du mandat peut être tacite et résulter, soit de la constitution d'un nouveau mandataire pour la même affaire, soit de la reprise de la gestion par le mandant, ou de toute autre circonstance. [2006.] 952. La renonciation au mandat par le mandataire, hors le cas où elle est fondée sur une cause légitime ou nécessaire, donne lieu à indemnité en faveur du mandant, si elle lui est préjudiciable. [2007.] Elle peut aussi être faite tacitement. 953. Les causes qui mettent fin au mandat, du chef du mandant ou du mandataire, ne sont opposables entre les parties respectivement qu'autant qu'elles leur ont été notifiées ou sont parvenues autrement à leur connaissance d'une manière certaine. [2005 à 2007.] En cas de décès d'une des parties, la notification doit être faite à ses héritiers ou par eux. [2010.] 954. Les mêmes causes de cessation du mandat ne sont pas opposables aux tiers qui, depuis lors, ont traité de bonne foi avec le mandataire, lors même que le mandant aurait retiré des mains de celui-ci sa procuration écrite. [2004, 2005, 2008, 2009.] 955. Lorsque le mandat a pris fin par l'une des causes ci-dessus désignées, le mandataire ou ses héritiers doivent pourvoir aux intérêts déjà engagés du mandant, jusqu'à ce que celui-ci ou ses héritiers puissent y pourvoir par eux-mêmes ou par un nouveau mandataire. [1991, 2010.] Cette disposition est applicable avec plus de rigueur si la cessation du mandat provient de la renonciation du mandataire que si elle provient de la révocation par le mandant. CHAPITRE XXI. DU LOUAGE DE SERVICES ET D'OUVRAGE OU D'INDUSTRIE. SECTION PREMIÈRE. DU LOUAGE DE SERVICES. Art. 956. Les employés, commis ou préposés, les serviteurs attachés à la personne ou à la maison du maître, les hommes de peine ou de journée et les ouvriers agricoles ou industriels peuvent louer leurs services pour un gage ou salaire fixé par année, par mois ou par jour. [1710, 1711, 4e al., 1779-1°.] Dans ce cas, le louage dure tant qu'il n'y a pas été mis fin par un congé donné d'avance, de part ou d'autre, aux époques établies par l'usage du lieu, ou, à défaut d'usage certain, à toute époque, pourvu que ce ne soit ni en temps inopportun, ni de mauvaise foi. 957. Le louage de services des mêmes personnes peut aussi être fait pour un temps fixe, lequel ne peut excéder cinq ans pour les employés et serviteurs, et un an pour les ouvriers et hommes de peine ou de journée; sauf ce qui est dit, ci-après, au sujet du contrat d'apprentissage. [1780.] En cas d'engagement plus long, il est réduit à ce terme, au gré de l'une ou de l'autre partie; sauf la faculté de renouvellement indéfini pour le même délai. 958. Lorsque le louage de services est fait pour un temps fixe, il peut prendre fin auparavant, soit par la résolution pour inexécution des obligations de l'une des parties, soit pour une cause reconnue légitime et impérieuse, provenant d'un côté ou de l'autre. Dans tous les cas, la mort du maître met fin de plein droit au louage de services envers la personne. 959. Si la cause légitime qui met fin au louage de services survient en la personne du maître ou du patron et arrive à une époque de l'année où, d'après l'usage du lieu, il soit difficile au bailleur de services de contracter un nouvel engagement, il lui sera alloué une indemnité fixée par le tribunal, d'après les circonstances. 960. Dans tous les cas, la mort de celui qui fournit les services met fin au contrat; sauf restitution, par ses héritiers, de ce qui aurait été payé du salaire ou des gages pour un temps non encore écoulé. 961. Les règles qui précèdent sont applicables au louage passé entre les acteurs, musiciens, danseurs, lutteurs ou prestidigitateurs et les entrepreneurs de théâtres, spectacles et autres divertissements publics. Elles s'appliquent aussi aux maîtres ou professeurs d'escrime, d'armes, de métiers ou d'arts industriels, et aux vétérinaires ou médecins d'animaux. 962. Les médecins, les avocats, les professeurs des sciences, des belles-lettres et des beaux-arts ou des arts libéraux, ne louent pas leurs services: ils ne sont pas civilement tenus de donner ou de continuer les soins qu'ils ont promis ou commencé de donner aux malades, aux plaideurs ou aux élèves, et ceux-ci ne sont pas tenus de recevoir leurs soins ou services après en avoir demandé et obtenu la promesse. Mais si les soins ou services ont été effectivement donnés ou fournis, en tout ou en partie, les honoraires ou la rémunération en peuvent être réclamés en justice, eu égard tant à la qualité respective des personnes qu'à l'usage et à la convention. La partie qui s'est fait promettre les soins ou services desdites personnes et qui, sans cause légitime, a refusé ensuite de les recevoir, peut être condamnée à une indemnité envers l'autre partie, s'il résulte de ce refus un préjudice pécuniaire pour celle-ci. Réciproquement, celui qui, ayant promis ses soins ou services, les refuse ensuite, sans cause légitime, peut être condamné à réparer le préjudice causé. SECTION II. DU CONTRAT D'APPRENTISSAGE. Art. 963. Un industriel, un artisan ou un commerçant, peut s'engager, par un contrat spécial dit “d'apprentissage,” à enseigner la connaissance et la pratique de son métier ou de sa profession à un apprenti de l'un ou de l'autre sexe, lequel, de son côté, s'engage à l'aider dans son travail. L'apprenti mineur ne peut faire le contrat d'apprentissage sans être assisté ou représenté par son père, son tuteur ou toute autre personne ayant autorité sur lui. 964. L'engagement d'apprentissage pris par un mineur dûment assisté, ou par son représentant, ne peut excéder le temps de sa minorité; sauf à être renouvelé ou prolongé par l'apprenti devenu majeur. 965. Le contrat d'apprentissage règle la nature et l'étendue des obligations respectives des parties. Ce qui y manque peut être suppléé d'après l'usage du lieu où s'exerce la profession du maître ou patron. 966. Le maître ou patron doit, en l'absence de stipulations ou d'usage local contraires, fournir à l'apprenti, le logement, la nourriture, l'entretien et les outils ou instruments de son métier. Il doit aussi lui donner le temps, les soins et toutes les facilités nécessaires pour le mettre en mesure d'apprendre le métier ou la profession formant l'objet de l'apprentissage. Si l'apprenti mineur ne sait pas encore lire, écrire et compter, le patron doit lui laisser, pour son instruction, nonobstant même toute convention contraire, une heure au moins par jour, en dehors du temps de repos. 967. L'apprenti, de son côté, doit au patron tout son temps et les services se rapportant au métier ou à la profession qu'il veut apprendre. 968. Si, par maladie ou par une autre cause majeure provenant de lui ou de son chef, l'apprenti a été empêché de fournir ses services pendant une ou plusieurs périodes continues d'un mois ou davantage, il doit prolonger d'autant son travail, sous les mêmes conditions respectives, après l'expiration du temps de l'apprentissage, même au-delà de sa majorité. 969. Le contrat d'apprentissage prend fin, de plein droit: 1°  Par la mort du patron ou de l'apprenti; 2°  Par l'entrée de l'un ou de l'autre au service militaire de terre ou de mer; 3°  Par la condamnation de l'un ou de l'autre pour crime, ou pour délit entraînant trois mois d'emprisonnement ou davantage; 4°  Par l'expiration du temps fixé par la convention ou par la loi. 970. La résolution du contrat peut être prononcée en justice, sur la demande de la partie intéressée: 1°  Pour inaccomplissement des obligations respectives, même par cause majeure; 2°  Pour mauvais traitements du patron envers l'apprenti; 3°  Pour inconduite habituelle de l'apprenti; 4°  Pour délit du patron ou de l'apprenti, hors le cas prévu à l'article précédent; 5°  Pour changement de résidence du patron, hors du fu ou du ken où devait s'exécuter la convention. La partie contre laquelle la résolution est prononcée en vertu du présent article peut, en outre, s'il y a faute de sa part, être condamnée à des dommages-intérêts envers l'autre partie; il en est de même au cas de la condamnation prévue à l'article précédent. [v. Loi fr. des 22 fév.-4 mars 1851.] SECTION III. DU LOUAGE DE TRANSPORT PAR TERRE ET PAR EAU Art. 971. Les compagnies de chemins de fer et de navigation tant fluviale que maritime, les voituriers, bateliers et propriétaires de navires entreprenant par profession le transport des personnes et des choses, sont considérés comme commerçants et soumis, en cette qualité, aux dispositions générales du Code de Commerce, aux règles spéciales de leur profession et, en outre, aux dispositions ci-après. Ils sont seuls considérés comme dépositaires nécessaires, d'après le 2e alinéa de l'article 917, à l'égard des objets qui leur sont confiés pour être transportés. [1782.] 972. Toute personne qui se charge d'effectuer un transport de choses moyennant un salaire, soit à prix fait ou à forfait, soit d'après la quantité du chargement et la distance à parcourir, est tenue d'apporter à la conservation desdites choses tous les soins d'un bon administrateur. Les pertes et détériorations sont à sa charge, à moins qu'il ne soit prouvé qu'elles proviennent, soit d'un vice propre de la chose, soit d'un cas fortuit ou d'une force majeure. [1784; C. com., 103.] 973. Ladite responsabilité commence du moment où les choses à transporter ont été remises à l'entrepreneur ou à son préposé, avant même le chargement ou l'embarquement, et même avant que le prix du transport ait été déterminé, lorsqu'il est subordonné au mesurage ou à une vérification quelconque. [1783.] Si le contrat de transport n'est pas encore formé, même conditionnellement, la remise anticipée des objets à transporter ne constitue qu'un dépôt volontaire. 974. Celui qui se charge du transport des personnes répond des accidents et dommages arrivés auxdites personnes, lorsqu'il est prouvé qu'ils ont été causés par sa faute ou sa négligence. Cette responsabilité ne commence que lorsque les personnes sont entrées dans les voitures, bateaux ou navires conduits par le voiturier, le batelier ou capitaine, ou par ses préposés. L'entrepreneur de transport est responsable des fautes ou négligences de ses employés ou préposés, comme des siennes propres. 975. Lorsque les objets transportés ont été reçus par le destinataire ou par son préposé, sans protestations ni réserves de ceux-ci, ils sont présumés, jusqu'à preuve contraire, avoir été reçus en totalité et en bon état. Toutefois, si le payement du prix de transport était à la charge du destinataire, ladite présomption n'a lieu que si ce prix a de même été payé sans réserves. [C. com., 105.] La preuve contraire n'est plus recevable, même lorsqu'il y a eu protestations ou réserves, si les caisses, ballots ou paquets ont été ouverts hors la présence du voiturier ou de son préposé, à moins, dans ce dernier cas, qu'il y ait preuve de fraude ou de détournement de ceux-ci. 976. En cas de contestation sur la nature ou les causes des avaries, si les parties ne s'accordent pas sur le choix d'un ou plusieurs experts, la nomination en est faite à bref délai par le tribunal. [C. com., 106.] 977. Si la valeur estimative des objets à transporter n'a pas été fixée d'un commun accord, au moment du contrat ou depuis, elle est déterminée, au cas de simple détérioration ou de perte partielle, par l'expertise, d'après ce qui reste, et, au cas de perte totale, par les moyens ordinaires de preuve, mais dans les limites de la valeur qui a pu être prévue par l'entrepreneur de transport, s'il est exempt de dol. [C. com., 106.] 978. En cas de simple retard dans l'arrivée des objets transportés, l'indemnité du dommage s'établit d'après les circonstances, en tenant compte de la simple faute ou du dol, conformément à l'article 405. La réception des objets, sans protestations ni réserves à raison du retard, purge la faute de l'entrepreneur ou du voiturier, si le délai a été stipulé par le destinataire ou par son représentant ou a été porté à la connaisance de ceux-ci par la lettre de voiture, par le connaissement ou par toute autre pièce ayant précédé ou accompagnant la remise des objets. [C. com., 104, 105.] 979. Celui qui s'est chargé d'un transport peut, soit à l'arrivée, soit même au départ, si le contrat est résilié, retenir les objets à lui confiés, jusqu'au payement de ce qui lui est dû pour prix du transport ou pour frais légitimes avancés à l'occasion desdits objets. [C. com., 306.] 980. Les obligations professionnelles des entrepreneurs de transport par chemins de fer, bateaux, navires ou voitures publiques sont déterminées par des Règlements administratifs spéciaux. [1785, 1786.] SECTION IV. DU LOUAGE D'OUVRAGE OU D'INDUSTRIE. Art. 981. Lorsqu'une personne se charge d'exécuter un travail déterminé, industriel ou manuel, moyennant un prix fixé d'avance ou à forfait, soit pour tout le travail, soit pour ses diverses parties ou mesures, la convention est un louage d'ouvrage ou d'industrie si la matière principale est fournie par celui qui demande le travail, et une vente sous condition de l'exécution du travail, lorsque la matière principale et le travail sont fournis par le fabricant ou l'ouvrier. [1787.] 982. Dans les deux cas spécifiés à l'article précédent, si la chose sur laquelle le travail est déjà exécuté, en tout ou en partie, vient à périr par cas fortuit ou par force majeure, la perte de la matière est supportée par celui auquel elle appartenait, et le prix du travail n'est pas dû à l'ouvrier, à moins que l'autre partie ne fût en demeure de vérifier et de recevoir le travail. [1788, 1790.] Si l'une des parties est cause de la perte ou est en demeure à à l'égard de la livraison ou de la vérification, elle supporte seule ladite perte, tant pour la matière que pour la main-d'œuvre, sans préjudice de plus amples dommages-intérêts, s'il y a lieu. [1789.] Lorsque la matière est fournie par l'ouvrier, la perte partielle ou la simple détérioration est assimilée à la perte totale, si elle enlève plus de la moitié de la valeur de la chose; si la dépréciation est inférieure à la moitié, les articles 158, 439, 3e alinéa et 440 sont applicables. Si la matière est fournie par le maître, il est tenu de payer le travail dans la mesure dont la portion de matière qui subsiste se trouve augmentée de valeur. 983. Dans le cas où la matière est fournie par le maître, il peut être convenu que l'ouvrage sera vérifié et reçu par parties, lors même que la livraison n'en devrait être effectuée qu'après l'achèvement complet du travail; dans ce cas, l'ouvrier est déchargé des risques du travail fait, si le maître l'a vérifié et reçu ou est en demeure de le vérifier. [1791, 1er al.] Les avances d'argent ou à-compte fournis par le maître au cours du travail n'impliquent pas par eux-mêmes la réception du travail déjà fait; mais si la chose périt avant la réception formelle ou avant la mise en demeure du maître, celui-ci ne peut répéter les avances ou à-comptes que pour ce qui excédait le travail effectué. [1791, 2e al.] 984. La réception de l'ouvrage, même sans réserves de la part du maître, n'enlève pas à celui-ci le droit de rétracter son acceptation et de demander une réduction ou une restitution partielle du prix, s'il découvre plus tard des défauts non apparents qui rendent la chose impropre à l'usage auquel elle est destinée. L'action en réclamation de ce chef est éteinte trois mois après la réception de l'ouvrage total, lorsqu'il s'agit d'un travail exécuté sur des objets mobiliers ou immobiliers appartenant au maître. S'il s'agit d'objets confectionnés dont l'ouvrier fournit la matière, l'article 746 est applicable. 985. S'il s'agit de la construction à forfait d'édifices, de voûtes, murs, terrasses, digues ou autres gros ouvrages analogues faits sur le sol, les architectes ou entrepreneurs qui les ont dirigés ou exécutés sont responsables de la perte totale ou partielle ou de la détérioration grave desdits ouvrages survenues par vice de construction ou par vice du sol; sans distinguer si l'entrepreneur a construit sur le terrain d'autrui ou sur le sien propre, ni s'il a fourni ou non les matériaux. La durée de ladite responsabilité est: De deux ans après la réception de l'ouvrage, pour les murs, terrasses et autres ouvrages en terre, avec emploi accessoire de bois, pierres ou tuiles; De cinq ans, pour les édifices ou bâtiments dont le bois est la matière principale; De dix ans, pour les édifices en pierres ou briques et pour les koura ou do-zô. [1792, 2270.] 986. L'action en indemnité à raison de ladite responsabilité se prescrit: Par un an, en cas de perte totale de la chose, à partir de ladite perte; Par six mois, en cas de perte partielle ou de détérioration, à partir de l'expiration des délais pendant lesquels l'entrepreneur est responsable. 987. L'architecte ou entrepreneur ne peut demander d'augmentation du prix convenu, ni le maitre en demander de diminution, sous prétexte de modification des plans primitifs, si ladite augmentation ou diminution du prix n'a été réglée par écrit. [1793.] La présente disposition ne s'applique pas s'il y a eu addition de constructions entièrement distinctes de celles comprises dans le forfait, ou suppression d'une portion distincte des travaux convenus: dans ce cas, à défaut d'accord entre les parties, l'augmentation ou la diminution du prix primitif est réglée par le tribunal. L'entrepreneur ne peut non plus se soustraire à la responsabilité établie par l'article 985, sous le prétexte que les plans primitifs ou modifiés lui ont été imposés par le maître, à moins qu'il n'ait obtenu, par écrit également, une décharge de responsabilité à cet égard. 988. Soit que l'entrepreneur fournisse seulement son travail, soit qu'il fournisse aussi la matière, le maître ou ses héritiers peuvent toujours résilier le contrat par leur seule volonté; mais à charge d'indemniser l'entrepreneur, tant du travail déjà fait que de la perte subie sur les matières déjà préparées et des autres dommages, et aussi en lui payant la totalité du gain légitime qu'il aurait tiré du contrat. [1794.] 989. Soit qu'il y ait résiliation du contrat ou exécution du travail à faire avec tout ou partie de la matière d'autrui, l'entrepreneur ou l'ouvrier peut retenir ladite matière jusqu'à parfait payement de ce qui lui est dû pour son travail ou pour l'indemnité de la résiliation. Ce droit de rétention ne s'applique qu'aux objets mobiliers. [570.] 990. Le contrat est résolu par la mort de l'entrepreneur ou par l'impossibilité où il se trouve d'exécuter le travail, lorsque la considération de son travail personnel a été déterminante pour le maître. [1795.] Dans ces deux cas, le maître n'est tenu de payer à l'entrepreneur ou à ses héritiers que la valeur des travaux ou des matériaux dont il profite, eu égard au but qu'il se proposait. [1796.] 991. Les sous-entrepreneurs qui se chargent de diverses parties du travail sont soumis aux règles qui précèdent, pour leurs rapports particuliers avec l'entrepreneur principal. [1799.] A défaut de payement de ce qui leur est dû par celui-ci, ils peuvent agir directement et en leur nom contre le maître, dans la mesure où il est encore débiteur envers l'entrepreneur. [1798.] Les simples ouvriers ont le même droit contre le maître, à défaut de payement de leur salaire par celui qui les a employés. [Ibid.] CHAPITRE XXII. DU LOUAGE DE BÉTAIL OU BAIL A CHEPTEL. SECTION PREMIÈRE. DU CHEPTEL SIMPLE. Art. 992. Le cheptel simple est un bail de gros ou petit bétail, de chevaux, ou d'animaux de basse-cour, par lequel le preneur ou cheptelier se charge de garder, nourrir et soigner un troupeau ou un certain nombre desdits animaux, moyennant une part de leurs produite. [1800, 1802.] A défaut de conventions pariculières, le preneur a la moitié du croit et du produit de la tonte, et la totalité du laitage, des œufs, du fumier et des services des animaux. [1804, 1811, 6e et 7e al.] 993. Le preneur ne supporte la perte totale ou partielle des animaux que si elle résulte de sa faute, directement ou indirectement. [1804, 1807, 1810.] Il ne peut se charger des cas fortuits ou des accidents de force majeure. [1811, 1er à 5e al.] L'estimation donnée au cheptel sert de base à la responsabilité du preneur, s'il ne justifie pas qu'il en est survenu postérieurement une dépréciation fortuite. [1805, 1808.] Dans le même cas, le bailleur ne peut, après la perte totale, alléguer une plus-value survenue au cheptel. [1817.] 994. Le preneur ne peut demander le partage du croît que pour ce qui en reste après le remplacement des animaux morts ou hors d'usage. Il ne peut tondre les bêtes qu'après en avoir prévenu le bailleur. [1814.] 995. Le bail à cheptel dont les parties n'ont pas fixé le terme dure un an. [1815.] S'il a été fixé à un plus long délai, le preneur peut y renoncer après un an, pourvu qu'il prévienne le bailleur assez longtemps à l'avance pour permettre à celui-ci de trouver un nouveau preneur. Soit qu'il ait été ou non fixé un terme à la durée du bail, si le preneur reste et est laissé en possession du cheptel après le temps où il pouvait régulièrement prendre fin, il s'opère une tacite réconduction pour une nouvelle durée d'un an. 996. Si le cheptelier est, en même temps, fermier d'un fond rural appartenant à un autre propriétaire, celui-ci peut saisir le cheptel pour le payement des fermages, s'il ignore que le cheptel n'appartient pas à son fermier. [1813.] SECTION II. DU CHEPTEL DONNÉ AU FERMIER OU AU COLON PARTIAIRE. Art. 997. Lorsque le bailleur d'un fonds rural, soit à ferme, soit à part de fruits ou à colonage, livre au fermier ou au colon partiaire des chevaux ou du bétail, comme faisant partie de l'exploitation, le bail à cheptel est l'accessoire du bail principal et a la même durée; mais il est soumis, pour le reste, aux règles de la Section précédente, sauf les exceptions ci-après. [1829.] 998. Le fermier a tous les produits desdits animaux, à charge toutefois de remplacer chaque année, par du croit, les bêtes mortes ou hors de service. [1821 et s.] Il peut, par convention expresse, prendre à sa charge les pertes fortuites. [1825.] 999. Le colon partiaire a tout le laitage, mais il n'a dans le croît et dans la laine que la même part qu'il a dans les fruits du fonds de terre; le tout, sauf convention différente. Il ne peut se charger des pertes fortuites du bétail. [1828, 4e al.] Dans tous les cas, les fumiers et le travail des animaux doivent être employés exclusivement sur le fonds loué. [1824.] SECTION III. DU CHEPTEL EN COMMUN OU EN SOCIÉTÉ. Art. 1000. Les propriétaires d'animaux de la nature mentionnée à l'article 992 peuvent, par des mises égales ou inégales, en former un fonds commun que l'un d'eux est chargé de nourrir, garder et soigner. [1818.] Le croît et la laine se partagent en proportion des mises. [1819, 2e al.] Le lait, le fumier et le travail des bêtes ne profitent qu'à celui qui a la charge de leur entretien. [1819, 1er al.] Les pertes fortuites ou par force majeure sont supportées par chacun dans la même proportion. [1818.] Les autres règles du cheptel simple s'appliquent d'ailleurs au cheptel en société. [1820.] LIVRE IV. DES SÛRETÉS OU GARANTIES DES CRÉANCES OU DROITS PERSONNELS. DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES. Art. 1001. Tous les biens d'un débiteur, tant meubles et immeubles que présents et à venir, sont le gage commun de ses créanciers, à l'exception des choses déclarées insaisissables par les dispositions de la loi ou de l'homme. [C. civ. fr., art. 2092.] En cas d'insuffisance des biens saisis, pour acquitter toutes les obligations du débiteur, la valeur en est attribuée aux divers créanciers, en proportion du montant de leurs créances, quels qu'en soient l'objet, la cause, la modalité ou la date respective, à moins qu'il n'existe entre eux des causes légitimes de préférence. [2093.] Les formes de la saisie et de la vente des biens et de la distribution du prix, par ordre ou contribution, sont réglées au Code de Procédure civile. [2218.] 1002. L'exécution des obligations peut être assurée par des garanties spéciales, soit personnelles, soit réelles. Les sûretés ou garanties personnelles sont: 1°  Le cautionnement, 2°  La solidarité entre les débiteurs ou entre les créanciers, 3°  L'indivisibilité volontaire. Elles sont l'objet de la Ire Partie du présent Livre. Les sûretés ou garanties réelles sont: 1°  Le droit de rétention, 2°  Le gage ou nantissement mobilier, 3°  Le nantissement immobilier, 4°  Les priviléges, 5°  Les hypothèques. Elles sont l'objet de la IIe Partie. PREMIÈRE PARTIE. DES SÛRETÉS OU GARANTIES PERSONNELLES. CHAPITRE PREMIER. DU CAUTIONNEMENT. Art. 1003. Le cautionnement est fourni volontairement au créancier par le débiteur, sauf les cas où il est ordonné par la loi ou par la justice. Les dispositions du présent Chapitre sont communes aux trois espèces de cautionnements. Les règles particulières au cautionnement légal et au cautionnement judiciaire sont portées à l'Appendice ci-après. SECTION PREMIÈRE. DE L'OBJET ET DE LA NATURE DU CAUTIONNEMENT. Art. 1004. Le cautionnement est un contrat par lequel une personne s'engage à acquitter l'obligation d'un tiers, à défaut d'exécution par celui-ci. Cet engagement implique celui d'indemniser le créancier de ladite inexécution, en tant qu'elle serait imputable à la faute du débiteur. [2011.] 1005. Le cautionnement est nul comme tel, s'il a un objet autre que celui de l'obligation principale. Cependant, la caution peut valablement promettre une somme d'argent considérée comme l'équivalent d'une chose ou d'un fait promis par le débiteur principal, et comme clause pénale, en prévision de l'inexécution. 1006. L'obligation de la caution ne peut être plus élevée ni être soumise à des conditions ou modalités plus onéreuses que l'obligation principale: si elle a été contractée avec plus d'étendue ou d'une façon plus onéreuse, elle est réductible aux limites et aux modalités de cette obligation. [2013.] 1007. La disposition prohibitive de l'article précédent ne fait pas obstacle à ce que la caution fournisse des garanties réelles de son obligation accessoire, quand le débiteur principal n'en a pas donné pour l'obligation principale, ni qu'elle se soumette à des voies d'exécution plus rigoureuses que celui-ci. La caution peut aussi être elle-même cautionnée par un tiers dit “certificateur de caution,” à l'égard duquel elle a le rôle d'un débiteur principal. [2014, 2e al.; C. proc. civ., 135-5°.] 1008. Le cautionnement limité à une somme ou à un objet déterminé ne s'étend pas aux intérêts, aux fruits, ni aux autres accessoires de la chose due. Mais le cautionnement indéfini d'une obligation principale s'étend aux intérêts, tant stipulés que moratoires, et aux autres accessoires naturels, légaux ou conventionnels de la dette; il s'étend aussi aux frais de la première demande faite contre le débiteur principal et à ceux faits contre celui-ci après que les poursuites ont été dénoncées à la caution. [2016.] 1009. Toute obligation valable peut être cautionnée. L'obligation annulable d'un incapable peut même être valablement cautionnée, et le cautionnement en conserve son effet, même après que l'obligation a été annulée en justice, pourvu que la caution ait connu l'incapacité du débiteur lors du cautionnement. [2012.] Les autres cas de cautionnement civil de l'obligation naturelle d'un tiers sont réglés par les articles 588 et suivants. 1010. On peut cautionner une dette future, même celle qui dépend d'une condition potestative de la part soit du créancier, soit du débiteur, pourvu que la nature et l'étendue en puissent être appréciées par la caution. 1011. On peut se porter caution d'un débiteur sur son mandat ou à son insu et même malgré lui. [2014, 1er al.] Le recours contre le débiteur, par la caution qui a payé, est réglé, pour ces divers cas, à la Section II, § 2. 1012. Pour se porter valablement caution d'un tiers, il faut avoir la capacité de s'obliger à titre gratuit, tant en général que relativement au débiteur. Toutefois, si le contrat principal est à titre onéreux, l'incapacité relative de la caution à l'égard du débiteur ne peut être opposée par elle au créancier que s'il l'a connue. 1013. L'intention de cautionner une dette, lorsqu'elle n'est pas formellement exprimée, doit résulter clairement des circonstances; mais elle ne peut s'induire du seul fait d'avoir recommandé l'un des contractants à l'autre ou d'avoir affirmé sa solvabilité présente ou future. [2015.] S'il y a doute sur le point de savoir si l'un des signataires d'un acte est codébiteur ou caution, il sera considéré comme simple caution. 1014. L'engagement de la caution passe à la charge de ses héritiers et au profit des héritiers du créancier, s'il n'y a stipulation contraire. [2017.] 1015. Lorsqu'un débiteur s'est obligé par convention à fournir une caution, il ne doit présenter en cette qualité, ou comme certificateur de caution, qu'une personne d'une solvabilité notoire ou facile à établir, eu égard d'ailleurs à la nature et à l'importance de la dette. Si la caution ainsi fournie ou son certificateur devient insolvable, le débiteur doit présenter une autre personne remplissant les mêmes conditions. [2020, 1er al.] La caution doit, en outre, avoir ou élire un domicile dans le ressort de la cour d'appel où le payement doit se faire. [2018, 2019.] Les conditions qui précèdent ne sont pas requises lorsque la caution stipulée a été individuellement désignée par le créancier. [2020, 2e al.] 1016. Si le débiteur ne peut fournir une caution ou un certificateur remplissant les conditions ci-dessus requises, il est admis à donner une sûreté réelle, mobilière ou immobilière, sous l'approbation du tribunal. [2041.] 1017. Les particularités de l'aval ou cautionnement des effets de commerce et la garantie promise par les commissionnaires à leurs commettants sont réglées au Code de Commerce. SECTION II. DES EFFETS DU CAUTIONNEMENT. § Ier. DE L'EFFET DU CAUTIONNEMENT ENTRE LA CAUTION ET LE CRÉANCIER. Art. 1018. Le créancier ne peut poursuivre la caution sans lui rapporter la preuve d'une sommation de payer ou d'exécuter faite au débiteur et restée sans effet. [2011.] Néanmoins, ladite sommation n'est pas nécessaire si le débiteur a disparu, ou s'il est en état de faillite déclarée ou d'insolvabilité notoire. 1019. La caution peut, en outre, sous les restrictions et conditions ci-après, exiger du créancier qu'il discute et fasse vendre préalablement les biens du débiteur. [2021.] 1020. La caution ne jouit pas du bénéfice de discussion lorsqu'elle y a renoncé expressément ou tacitement, ou lorsqu'elle s'est engagée solidairement avec le débiteur principal. [2021.] Dans tous les cas, elle en est déchue si elle ne l'a pas opposé au créancier avant de contester la dette principale au fond. [2022.] 1021. La caution qui requiert la discussion doit indiquer à la poursuite du créancier des immeubles du débiteur situés dans le ressort de la cour d'appel où le payement doit être fait. Elle ne peut indiquer pour la discussion des immeubles litigieux, ni des immeubles hypothéqués par préférence à d'autres créanciers, ou même hypothéqués au créancier poursuivant, s'ils se trouvent dans les mains d'un tiers détenteur. [2022.] A l'égard des choses ou valeurs mobilières appartenant au débiteur, la caution ne peut en exiger la discussion que si elles sont déjà affectées au créancier comme sûretés réelles. 1022. Si le créancier a négligé de discuter les biens du débiteur dont la discussion lui avait été opposée valablement et que le débiteur soit depuis devenu insolvable, la caution est déchargée jusqu'à concurrence des sommes que le créancier aurait pu obtenir de la discussion. [2024.] 1023. S'il y a plusieurs cautions d'un même débiteur, la dette se divise de plein droit entre elles, par portions viriles ou égales, à moins que les parts n'aient été autrement fixées ou que lesdites cautions ne se soient engagées solidairement, soit avec le débiteur, soit entre elles-mêmes, ou qu'elles n'aient autrement renoncé à la division. Ledit bénéfice a lieu, lors même que les engagements résultent d'actes séparés. [Comp. 2025 à 2027.] 1024. Soit que la caution ait usé ou non du bénéfice de discussion et qu'elle jouisse ou non du bénéfice de division, elle peut, lorsqu'elle est poursuivie en justice, avant toute défense au fond et suivant les formes et conditions prescrites au Code de Procédure civile, opposer au créancier une exception dilatoire pour mettre le débiteur en cause, aux fins exprimées à l'article 1029. [C. proc. civ., 175 et. s.] 1025. Lorsque la caution se défend au fond, elle peut opposer au créancier les exceptions ou fins de non-recevoir tirées de la dette principale ou de son extinction. Elle peut même opposer les moyens de nullité résultant de l'incapacité du débiteur ou des vices du consentement de celui-ci, lorsqu'elle les a ignorés en cautionnant la dette. [Comp. 2036.] 1026. Les jugements rendus sur lesdites exceptions entre le créancier et la caution ne peuvent nuire au débiteur, mais ils peuvent lui profiter. Toutefois, les chefs connexes desdits jugements ne peuvent être divisés en ce qu'ils ont de favorable et de défavorable au débiteur. 1027. Les actes qui interrompent directement la prescription contre le débiteur ou leconstituent en demeure produisent les mêmes effets contre la caution. [2250.] Les mêmes actes intervenus contre la caution n'ont d'effet contre le débiteur que si la caution s'est engagée sur le mandat de celui-ci ou solidairement avec lui. 1028. L'aveu ou la reconnaissance de la dette par le débiteur principal et la prestation ou le refus de serment extrajudiciaire intervenus entre lui et le créancier profitent ou nuisent à la caution. Les mêmes actes intervenus entre la caution et le créancier profitent au débiteur, mais ils ne peuvent lui nuire qu'au cas de mandat ou de solidarité. [Comp. 1365, 3e, 5e, et 6e al.] § II. DE L'EFFET DU CAUTIONNEMENT ENTRE LA CAUTION ET LE DÉBITEUR. Art. 1029. La caution poursuivie par le créancir peut, comme il est annoncé aux articles 419 et 1024, appeler le débiteur en cause, par une demande incidente en garantie, pour être par lui défendue, s'il y a lieu, contre la demende principale et, subsidiairement à sa condamnation, obtenir que la débiteur soit lui-même condamné envers elle aux indemnités déterminées à l'article suivant. Ladite demande en garantie incidente n'appartient qu'à la caution engagée sur un mandat du déditeur. 1030. La caution qui a volontairement payé la dette principale, ou autrement procuré au débiteur sa libération par un sacrifice personnel, a contre celui-ci une action en garantie pour se faire indemniser, sous les distinctions ci-après: 1°  Si elle s'est engagée en vertu d'un mandat du débiteur, elle se fait rembourser le montant du capital et des intérêts dont elle a libéré le débiteur ou qu'elle a payés en sou nom, des frais qu'elle a dû supporter, des intérêts de ses avances depuis qu'elle les a faites et de tous autres dommages-intérêts, s'il y a lieu; audit cas de mandat, la caution peut même agir pour être indemnisée, dès qu'elle a subi condamnation en cette qualité; 2°  Si elle s'est engagée à l'insu du débiteur et comme gérant d'affaires, elle obtient lesdites indemnités dans la mesure de l'utilité procurée au débiteur au jour de sa libération; 3°  Si elle s'est engagré malgré le débiteur, lesdites indemnités ne lui sont payées que dans la mesure de l'utilité restant au débiteur au jour de son recours. [Comp. 2028.] 1031. Dans le sas de mandat donné à la caution par plusieurs débiteurs tenus solidairement ou indivisiblement, tous sont garants solidaires envers elle, conformément à l'article 945. 1032. Le recours établi à l'article 1030 n'appartient pas à la caution qui a négligé d'appeler le débiteur en cause, lorsque celui-ci justifie qu'il avait des moyens péremptoires de défense à opposer à la demande. Si le débiteur n'avait que des exceptions dilatoires à opposer au créancier, il peut les opposer pareillement au recours de la caution négligente. 1033. La déchéance du recours a encore lieu contre la caution, quoiqu'elle valablement payé, si elle a négligé d'en informer utilement le débiteur et si celui-ci a, de bonne foi, payé de nouveau ou autrement obtenu sa libération il onéreux. [2031.] En sens inverse, le débiteur peut être, suivant les cas, déclaré responsable du payement fait par la caution après l'extinction de la dette par lui, lorsqu'il a négligé d'en avertir celle-ci. Dans ces divers cas, la partie intéressée a recours contre le créancier qui a reçu ce qui ne lui était pas dû. [Ibid.] 1034. La caution engagée sur un mandat peut, avant d'avoir payé, et même avant d'être poursuivie, agir contre le débiteur pour être par lui indemnisée par avance, ou garantie de ses pertes éventuelles, dans les trois cas suivants: 1°  Si le débiteur est tombé en faillite ou en déconfiture et si le créancir ne se fait pas colloquer dans la liquidation; [2032-2°.] 2°  Si l'échéance de la dette est arrivée; [2032-4°, 2039.] 3°  Si la dette a plus de dix ans de date, lorsque l'échéance est indéterminée, même dans son plus grand éloignement. [2032-5°.] 1035. Tant que le créancier n'a pas été pleinement désintéressé, les indemnités fournies d'avance à la caution, en vertu de l'article précédent et de l'article 1030, peuvent être consignées ou autrement mises en réserve par le débiteur, sous le nom du créancier pour assurer sa libération vis-à-vis de celui-ci. 1036. Indépendamment de l'action appartenant de son chef à la caution qui a payé la dette principale ou autrement désintéressé le créancier, et sous les restrictions établies aux articles 1032 et 1033, elle est subrogée, conformément à l'article 504-1°, à tous les droits qui appartenaient au créancier contre le débiteur ou contre des tiers. [2029.] Ledit bénéfice de subrogation appartient à toute caution, même à celle qui s'est engagée malgré le débiteur. Si le créancier a un privilége ou une hypothèque sur un immeuble du débiteur et en a pris inscription, la caution peut faire mentionner en marge de ladite inscription sa créance conditionnelle, en vue de la subrogation à laquelle elle est appelée, et en cas d'aliénation, le tiers débiteur doit la comprendre dans les offres à fin de purge. Si le créancier n'a pas pris d'inscription en temps utile, la caution peut demander sa décharge contre lui, confomément aux articles 534 et 1045. 1037. S'il y a plusieurs débiteurs solidaires ou d'une obligation indivisible, lors même que la caution a cautionné les uns et non les autres, elle peut, en vertu de ladite subrogation, recourir pour le tout contre chacun d'eux. [Comp. 2030.] § III. DE L'EFFET DU CAUTIONNEMENT ENTRE LES CO-FIDÉJUSSEURS. Art. 1038. Lorsqu'il y a plusieurs cautions ou co-fidéjusseurs d'une même dette et que l'une d'elle l'a acquittée pour le tout, volontairement ou non, elle peut recourir contre chacune des autres cautions pour une part virile, soit par l'action de gestion d'affaires, soit par l'action du créancier, sous les conditions, limites et distinctions apportées ci-dessus à son recours contre le débiteur principal. [2033] Si ladite caution, sans avoir acquitté toute la dette, en a payé plus que sa part et portion, son recours pour ledit excédant se divise également entre les autres co-fidéjusseurs. 1039. Si l'un des co-fidéjusseurs est insolvable, le recours de celui qui a payé a lieu contre ceux qui l'ont cautionné ou certifié; à défaut de certificateurs, sa part est répartie entre les autres co-fidéjusseurs solvables, y compris celui qui a acquitté la dette. [2032, 1er al] 1040. Le co-fidéjusseur actionné en vertu de l'article précédent peut demander la discussion préalable des biens du débiteur principal, si elle n'a pas déjà eu lieu et en observant les règles et conditions posées à ce sujet par les article 1020 et suivants. Le même droit appartient au certificateur de caution. 1041. Si les diverses cautions se sont engagées solidairement ou pour une dette indivisible, celle qui est actionnée pour l'exécution intégrale peut, incidemment, appeler en garantie ses co-fidéjusseurs, pour obtenir contre eux, par le même jugement, la condamnation autorisée par les articles précédents. 1042. Les actes interruptifs de la prescription et la mise en demeure intervenus contre l'une des cautions sont sans effet à l'égard des autres, à moins que leur engagement ne soit solidaire. Les jugements aveux, reconnaissances, prestations ou refus de serment extrajudiciaire intervenus au sujet de la dette principale entre ce créancier et l'une des cautions, profitent aux autres cautions, s'il y a lieu, mais ne peuvent leur nuire. 1043. Les articles 1068, 1069 et 1070 sont applicables, sous les distinctions qui y sont portées, aux cautions solidaires les unes avec les autres ou avec le débiteur, lorsqu'une ou plusieurs d'entre elles sont devenues insolvables. SECTION III. DE L'EXTINCTION DU CAUTIONNEMENT. Art. 1044. Le cautionnement s'éteint directement par les causes ordinaires d'extinction des obligations. [2034.] La novation, la remise conventionnelle, la compensation et la confusion du cautionnement sont réglées par les articles 524, 533, 543 et 560. [2035.] 1045. La caution peut demander sa décharge au créancier, lorsque celui-ci a diminué ou compromis, par un acte volontaire ou même par simple négligence, les sûretés qu'elle pouvait acquérir par la subrogation. [2037] Le même droit peut être invoqué pour toutes les cautions indistinctement et par les certificateurs de caution, du chef de celles-ci. 1046. Le cautionnement s'éteint indirectement par toutes les causes qui mettent fin à l'obligation principale. [2036] Les effets, par rapport à la caution, de la dation en payement, de la novation, de la remise conventionnelle, de la compensation et de la confusion intervenues entre le créancier et le débiteur principal sont réglés par les articles 482, 523, 528, 543 et 560. [Comp. 1281, 2e al., 1287, 1294, 1er al., 1301, 1er et 2e al., 2038.] APPENDICE. DU CAUTIONNEMENT LÉGAL ET DE CAUTIONNEMENT JUDICIAIRE Art. 1047. Celui qui, d'après les dispositions de la loi ou d'un jugement, est tenu de donner caution doit en présenter une qui remplisse les mêmes conditions que s'il s'était engagé lui-même à fournir caution et telles qu'elles sont prescrites aux articles 1015 et 1016. [2040.] La forme des réceptions de cautions légales et judiciaires est réglée au Code de Procédure civile. [C. pr. civ. fr., 517 et s.] 1048. Les tribunaux ne peuvent ordonner qu'il soit fourni caution pour l'exécution de leurs jugements que dans les cas où la loi leur en attribue la faculté. 1049. Ni les cautions judiciaires ni leurs certificateurs ne peuvent user du bénéfice de discussion. [2042, 2043.] 1050. La caution légale et la caution judiciaire sont toujours considérées comme mandataires du débiteur, au point de vue de leur recours en garantie contre celui-ci. CHAPITRE II. DE LA SOLIDARITÉ ENTRE DÉBITEURS ET ENTRE CRÉANCIERS. Art. 1051. L'obligation simple quant à son objet, mais multiple quant aux personnes qui y figurent comme parties principales, peut être solidaire passivement ou activement, comme il est annoncé à l'article 458 et expliqué aux deux Sections ci-après. Elle peut être aussi simplement intégrale entre débiteurs, comme il est dit à l'article 1074. SECTION PREMIÈRE. DE LA SOLIDARITÉ PASSIVE OU ENTRE DÉBITEURS. § Ier. DE LA NATURE ET DES CAUSES DE LA SOLIDARITÉ PASSIVE. Art. 1052. La solidarité passive ou entre les codébiteurs les constitue représentants les uns des autres, tant dans l'intérêt du créancier que dans leur intérêt commun. Elle peut résulter de la convention, d'un testament ou d'une disposition de la loi. Elle ne se présume pas: elle doit être établie expressément dans tous les cas, sauf ce qui est dit, au sujet de l'indivisibilité, à l'article 1091. [1202.] 1053. Il n'est pas nécessaire que l'obligation solidaire des divers débiteurs soit contractée par un même acte, ni en un même temps, ni au même lieu, pourvu que l'objet et la cause de l'obligation soient les mêmes. Les codébiteurs solidaires peuvent aussi être tenus sous des modalités ou avec des charges différentes et inégales. [1201.] § II. DES EFFETS DE LA SOLIDARITÉ PASSIVE. Art. 1054. Le créancier qui a plusieurs débiteurs solidaires peut réclamer l'exécution intégrale de l'obligation contre celui qu'il choisit de poursuivre, comme si celui-ci était seul débiteur, et sans que le bénéfice de discussion ni celui de division puissent lui être opposés. [1200, 1203.] Le créancier peut aussi poursuivre tous les débiteurs, simultanément ou successivement, jusqu'à parfait payement. [1204.] 1055. Chacun des débiteurs, qu'il soit ou non actionné, peut obliger le créancier à recevoir de lui le payement intégral de la dette solidaire. [1236, 1er al.] 1056. Le débiteur solidaire, actionné pour le tout ou pour plus que sa part dans la dette, peut demander le délai nécessaire pour appeler ses codébiteurs en cause et obtenir, par voie de garantie incidente, leur contribution à la défense commune ou au payement. [Comp. 1225] Ceux-ci peuvent aussi intervenir dans la cause, spontanément et à leurs frais, pour la sauvegarde de leurs intérêts. [C. pr. civ., 175 et s.] 1057. Chacun des débiturs, actionné pour l'exécution de l'obligation solidaire, peut opposer pour le tout au créancier, tant de son propre chef que du chef de son codébiteur, les exceptions ou moyens de défense qui proviennent du défaut de formation ou de l'extinction de l'obligation. [1208, 1er al., 1281.] Au surplus, s'il s'agit de novation, de remise de la dette, de compensation et de confusion, les articles 523, 528, 531, 543 et 557 seront observés. [1209, 1281, 1284, 1285, 1294-4°, 1301, 3e al.] 1058. Les moyens de défense tirés de l'incapacité ou du vice de consentement de l'un des débiteurs ne peuvent être invoqués que par lui personnellement; mais, une fois admis, ils profitent aux autres pour sa part dans la dette, chaque fois que ceux-ci ont pu, en contractant, compter sur sa contribution à l'exécution. [1208, 2e al.] 1059. Les jugements, aveux et prestations ou refus de serment extrajudiciaire intervenus entre le créancier et l'un des débiteurs sur les divers objets prévus aux deux articles précédents produisent leurs effets dans la même mesure et sous les mêmes distinctions, contre les autres débiteurs ou en leur faveur. [1365, 4e et 6e al.] 1060. Si le jugement, l'aveu et la prestation ou le refus de serment extra judiaire ne sont intervenus que sur l'existence même de la solidarité d'un débiteur à l'égard des autres, ceux-ci n'en souffrent ni n'en profitent. 1061. Les causes qui interrompent la prescription ou constituent une mise en demeure en faveur du créancier contre l'un des débiteurs solidaires ont le même effet contre les autres. [1206, 1207, 2249, 1er al.] Les causes de suspension de prescription existant en faveur du créancier relativement à l'un des débiteurs n'empêchent pas la prescription de courir en faveur des autres, pour leur part et portion. 1062. Si l'un des débiteurs solidaires est décédé laissant plusieurs héritiers pour des parts égales ou inégales, les actes de poursuite, les condamnations, aveux et prestations ou refus de serment concernant l'un des autres débiteurs ne produisent d'effet contre chacun desdits héritiers que pour sa part héréditaire dans la totalité de la dette. Chacun d'eux ne peut également être poursuivi et ne subit l'effet des actes précités que pour sa part héréditaire: auquel cas l'effet s'en produit aussi, et dans la même mesure, contre chacun des débiteurs originaires. [1220, 2249, 3e al.] Les mêmes actes intervenus entre le créancier et l'un desdits héritiers sont sans effet à l'égard des cohéritiers de celui-ci. [2249, 2e al.] 1063. Si la perte de la chose due ou toute autre impossibilité d'exécuter l'obligation survient par la faute ou après la mise en demeure de l'un des débiteurs solidaires, les autres sont tenus solidairement des dommages-intérêts ou de la clause pénale envers le créancier, sauf leur recours contre celui d'entre eux qui était en faute ou en demeure. [Comp. 1205.] Si l'un des débiteurs originaires est décédé, la responsabilité respective des autres et des héritiers du décédé se règle conformément à l'article précédent. 1064. Le débiteur solidaire qui a payé la dette ou procuré la libération commune, pour le tout ou pour partie, moyennant un sacrifice personnel, a, de son propre chef, un recours contre chacun des autres débiteurs pour la part réelle de celui-ci dans la dette ou dans ce qui en a été acquitté. [1213, 1214, 1er al] Le recours comprend, conformément aux règles de la société et du mandat, outre les déboursés du débiteur et l'indemnité de ses sacrifices nécessaires, les intérêts légaux depuis le déboursement et les frais qu'il n'a pu éviter. 1065. Le débiteur qui a payé la dette en tout ou en partie, peut aussi, mais seulement dans la mesure de ce qu'a effectivement reçu le créancier, exercer les droits et actions de celui-ci, par voie de subrogation légale, conformément à l'article 504-1°. [1251-3°.] Toutefois, il est tenu de diviser son action entre chacun de ses codébiteurs, comme il est dit à l'article précédent. 1066. La déchéance du recours édictée par les articles 1032 et 1033 contre la caution qui a imprudemment payé peut être, dans les mêmes cas, prononcée contre le débiteur solidaire qui a négligé d'avertir ses codébiteurs de la poursuite ou du payement. 1067. Si l'un des codébiteurs se trouve insolvable au momeut du recours exercé par l'une ou l'autre des voies sus-énoncées, sans qu'il y ait de néglifence à imputer au réclamant, la part de l'insolvable se répartit proportionnellement entre ceux qui sont solvables, y compris celui qui a payé. [1214, 9e al.] 1068. Si l'insolvabilité de l'un des débiteurs solidaires est survenue avant aucun payement, le créancier peut se faire comprendre dans la liquidation pour le montant intégral de sa créance. Ce qui ne lui est pas ainsi payé est dû par les autres débiteurs, sans que leur recours pour ce qu'ils auront payé au delà de leur part puisse nuire aux autres créanciers compris dans ladite liquidation. 1069. Si un ou plusieurs payements partiels ont été faits avant que l'un des débiteurs soit devenu insolvable, le créancier n'est compris dans la liquidation des biens de celui-ci que pour ce qui lui reste dû, et celui ou ceux qui ont fait les payements partiels concourent avec lui dans la liquidation pour le remboursement de ce qui leur est dû conformément à l'article 1064. [C. com. 544.] 1070. Dans le cas d'insolvabilité de tous les débiteurs solidaires ou de plusieurs d'entre eux, avant aucun payement, le créancier se fait inscrire dans chaque liquidation pour la totalité de sa créance. Mais lorsqu'il a reçu un premier dividende de l'une des liquidations, les nouveaux dividendes qui lui sont attribués dans les autres liquidations, d'après le montant intégral de sa créance, ne lui sont versés que dans la proportion de ce qui lui est encore dû. Le surplus forme une masse spéciale pour indemniser les diverses liquidations dans la proportion de ce qu'elles ont payé sur le montant de la dette nominale. [Comp. C. com., 542, 543.] § III. DE LA CESSATION DE LA SOLIDARITÉ PASSIVE. Art. 1071. La renonciation du créancier à l'égard de tous les débiteurs laisse subsister l'obligation comme simplement conjointe entre eux, telle qu'elle est réglée par l'article 458, 1er alinéa, sans en changer les autres caractères. 1072. Si la renonciation n'a eu lieu qu'à l'égard d'un ou de plusieurs des débiteurs, soit expressément soit tacitement, conformément à l'article 532, les autres débiteurs ne sont déchargés que de la part de ceux auxquels a été faite la remise de la solidarité. [1210.] Si parmi les débiteurs non déchargés de la solidarité il s'en trouve d'insolvables, le créancier supporte dans ladite insolvabilité la part de ceux auxquels il a fait la remise. [Comp. 1215.] 1073. Lorsque le créancier a détruit ou laissé périr tout ou partie des sûretés fournies par l'un des débiteurs solidaires et auxquelles les autres pouvaient être subrogés en payant, ceux-ci peuvent demander à être déchargés de la solidarité pour la part de celui à l'égard duquel le créancier a perdu ses sûretés. La décharge ainsi prononcée a les mêmes effets que la remise volontaire de la solidarité. APPENDICE. DE L'OBLIGATION SIMPLEMENT INTÉGRALE. Art. 1074. Dans le cas des articles 152, 398, 519, 2e alinéa, et tous autres où l'obligation de plusieurs débiteurs est déclarée par la loi “ intégrale ou pour le tout ” à l'égard de chacun d'eux, il n'y a pas lieu de leur appliquer ceux des effets de la solidarité qui sont attachés au mandat réciproque, même après qu'ils ont subi la condamnation intégrale. Mais le payement fait par un seul libère tous les autres vis-à-vis du créancier, et celui qui a payé a son recours contre les autres pour leur part et portion, tant par l'action de gestion d'affaires que par les actions du créancier auxquelles il est subrogé de plein droit. SECTION II. DE LA SOLIDARITE ACTIVE OU ENTRE CREANCIERS. § Ier. DE LA NATURE ET DES CAUSES DE LA SOLIDARITÉ ACTIVE. Art. 1075. La solidarité entre les créanciers d'un même débiteur les constitue représentants les uns des autres pour la conservation et l'exercice de leur droit. Elle ne peut résulter que de la disposition expresse d'une convention, d'un testament ou de la loi. 1076. Il n'est pas nécessaire que l'engagement du débiteur envers les divers créanciers solidaires soit contracté par un même acte, ni en un même temps, ni au même lieu, pourvu que l'objet et la cause de l'obligation soient les mêmes. Le débiteur peut aussi être tenu envers les divers créanciers sous des modalités ou avec des charges différentes et inégales. § II. DES EFFETS DE LA SOLIDARITÉ ACTIVE. Art. 1077. Chacun des créanciers solidaires peut réclamer du débiteur l'exécution intégrale de l'obligation, comme s'il était l'unique créancier. [1197.] Lorsque des poursuites ont été intentées par l'un des créanciers, chacun des autres peut intervenir dans la cause, pour la défense de l'intérêt commun et du sien propre. 1078. De son côté, le débiteur peut contraindre chacun des créanciers à recevoir le payement intégral de la dette, tant qu'il n'a pas été fait contre lui de poursuites ou de réclamation en forme par un autre créancier; au cas contraire, le payement ne peut être fait qu'au réclamant. [1198, 1er al.] S'il y a plusieurs réclamations simultanées, le débiteur ne peut payer qu'aux réclamants réunis. 1079. Le jugement intervenu sur les exceptions tirées du défaut de formation de l'obligation produit son effet pour toute la dette, contre tous les créanciers ou en leur faveur, même à l'égard de ceux qui n'ont pas été nominativement parties en cause. 1080. Si le jugement est intervenu sur des exceptions tirées de causes d'extinction de l'obligation, il n'a d'effet à l'égard des créanciers qui n'y ont pas été parties que sous les distinctions ci-après: 1°  Le payement fait à l'un des créanciers, dans les conditions prévues à l'article 1078, est opposable, pour le tout, à tous les créanciers; il en est de même de la compensation acquise au débiteur contre l'un des créanciers, comme il est dit à l'article 544 (3e al.) et lorsque les causes en sont nées à une époque où le débiteur pouvait valablement payer au même créancier, conformément audit article 1078; 2°  La novation, la remise conventionnelle et la confusion provenant du fait ou du chef d'un seul créancier n'opèrent l'extinction de la dette que pour la part de ce créancier, conformément aux articles 523 (3e al.), 537 (1er al.) et 557 (2e al.); le tout, sous la condition que lesdits actes ou faits soient intervenus avant aucune poursuite ou réclamation d'un autre créancier; il en est de même de la prestation ou du refus de serment extrajudiciaire et de la transaction sur les mêmes faits et aussi sur le payement ou la compensation. [1198, 2e al., 1365, 2e al.] 1081. Le jugement intervenu sur une exception appartenant au débiteur contre un créancier personnellement ne nuit ni ne profite aux autres; il en est de même de la prestation ou du refus de serment et de la transaction intervenus entre le débiteur et l'un des créanciers sur le droit de celui-ci à la solidarité. 1082. Les actes d'un créancier qui interrompent la prescription contre le débiteur, ou le mettent en demeure, profitent pour le tout aux autres créanciers. [1199.] La suspension de prescription établie par la loi en faveur de l'un des créanciers ne profite qu'à lui seul et seulement pour sa part dans la créance. 1083. Si l'un des créanciers solidaires est décédé laissant plusieurs héritiers, la division de la créance et des effets des actes précités a lieu activement, de la même manière que dans la solidarité passive, comme il est dit à l'article 1061. [1220.] 1084. Le créancier solidaire qui a obtenu l'exécution totale ou partielle de l'obligation doit en communiquer le profit aux autres, conformément à leurs rapports particuliers et à leurs parts respectives dans l'intérêt commun. § III. DE LA CESSATION DE LA SOLIDARITÉ ACTIVE. Art. 1085. La solidarité active cesse par la renonciation, laquelle ne peut être qu'expresse. 1086. La renonciation à la solidarité peut être faite par un ou plusieurs des créanciers ou par tous. La renonciation de tous les créanciers à la solidarité active produit entre eux le même effet que produit à l'égard des codébiteurs la renonciation à la solidarité passive, telle qu'elle est réglée à l'article 1072. Si la renonciation n'a été faite que par un ou plusieurs des créanciers, les autres ne sont privés du droit d'agir ou de recevoir le payement que pour la part de ceux qui ont fait la renonciation. 1087. La renonciation à la solidarité active est valable sans le consentement du débiteur. Toutefois, elle ne peut être invoquée contre les payements ou autres actes à lui permis par les dispositions précédentes que si elle lui avait été notifiée ou était parvenue à sa connaissance d'une manière certaine avant les dits actes. Le débiteur peut se prévaloir de la renonciation, lorsqu'il y a intérêt. Il peut aussi la critiquer, lorsqu'elle a été faite en fraude de ses droits. CHAPITRE III. DE L'INDIVISIBILITÉ VOLONTAIRE. Art. 1088. Indépendamment de l'indivisibilité résultant, soit de la nature de l'objet dû, soit du but que les contractants se sont proposé, soit de l'assignation de la dette, par le titre constitutif, à la charge d'un seul des débiteurs, telle qu'elle est prévue par les articles 462 et 463, la dette peut encore être indivisible, à la charge des divers débiteurs ou en faveur des divers créanciers, conjointement ou non à la solidarité passive ou active, comme sûreté ou garantie de l'exécution intégrale, ainsi qu'il est annoncé à l'article 464. Cette indivisibilité peut être établie par la convention ou par testament et est dite “volontaire.” Dans les deux cas, elle doit être expresse. 1089. Lorsque l'indivisibilité volontaire est établie seulement à la charge des débiteurs elle n'a pas lieu en faveur des créanciers, si la disposition ne porte pas expressément qu'elle sera en même temps active. Réciproquement, l'indivisibilité établie en faveur des créanciers n'a lieu à la charge des débiteurs que s'il est en même temps déclaré qu'elle sera passive. 1090. Lorsque l'indivisibilité volontaire, soit passive, soit active, a été établie expressément, la solidarité de la même nature est considérée comme établie tacitement, avec les effets déterminés au Chapitre précédent, si elle n'a pas été elle-même exclue expressément. En outre, si l'un des débiteurs ou des créanciers est décédé, laissant plusieurs héritiers, l'exécution continue à pouvoir être exigée intégralement contre ou par chaque héritier, mais sans solidarité entre eux. [2249, 2e al.] 1091. Les causes qui interrompent la prescription contre un des débiteurs originaires ou contre l'un des héritiers d'un débiteur décédé produisent également l'interruption, pour toute la dette, contre les autres débiteurs ou héritiers. De même, les causes, soit d'interruption, soit de suspension de la prescription, provenant du chef d'un des créanciers originaires ou des héritiers d'un créancier décédé profitent aux autres créanciers ou héritiers. 1092. Ni la mise en demeure, ni la faute d'un des héritiers ne nuisent aux autres héritiers. Il en est de même de la chose jugée, de l'aveu et du serment extrajudiciaire défavorables à l'un d'eux. [Comp. 1232, 1233.] 1093. Lorsque la créance est tout à la fois solidaire et indivisible, soit passivement, soit activement, la renonciation à la solidarité, soit expresse, soit tacite, suivant les distinctions portées aux articles 532 et 1085 entraîne aussi renonciation à l'indivisibilité volontaire. Dans le même cas de cumul des deux sûretés, la renonciation à l'indivisibilité laisse subsister la solidarité. 1094. Les dispositions des articles 465 à 470, 523 (4e al.), 528 (3e al.), 531, 535, 537 (2e al.), 543 (4e al.), 558 et 559 (2e al.), au sujet de l'indivisibilité naturelle, sont applicables, autant qu'il y a lieu, à l'indivisibilité volontaire. 1095. L'article 1073 peut être invoqué par les débiteurs tenus indivisiblement contre le créancier qui a laissé périr ou diminuer les sûretés qui pouvaient leur être transmises par la subrogation. DEUXIÈME PARTIE. DES SÛRETÉS RÉELLES. CHAPITRE PREMIER. DU DROIT DE RÉTENTION. Art. 1096. Indépendamment des cas où le droit de rétention est reconnu au créancier par des dispositions spéciales des Livres IIe et IIIe du présent Code, le même droit appartient à tout créancier, sur la chose mobilière ou immobilière de son débiteur, lorsqu'il la possède déjà en vertu d'une cause légitime, et lorsque sa créance est connexe à cette possession ou née à l'occasion de ladite chose, par l'effet soit de la cession qu'il en a faite, soit de dépenses faites pour sa conservation, soit de dommages par elle causés, lorsque le propriétaire en est responsable. [Comp. C. civ. fr., 545, 548, 555, 570, 867, 1612, 1673, 1749, 1948, 2082, 2087, 2280.] Celui qui a géré les affaires d'autrui, sans mandat ne jouit du droit de rétention, à l'égard des choses dont il a pris la gestion, que pour les dépenses nécessaires et pour celles de conservation. 1097. Si le créancier n'a retenu qu'une partie des choses qu'il avait le droit de retenir, la partie conservée garantit toute la dette, si elle y suffit. En sens inverse, le créancier ou ses héritiers peuvent conserver, jusqu'à parfait payement, tous les objets soumis à leur droit, bien qu'ils aient été payés en partie par le débiteur ou ses héritiers. [Comp. 2083] 1098. Le droit de rétention ne donne pas de privilége au créancier sur la valeur de la chose. Mais si chose retenue donne des fruits ou produits, naturels ou civils, le rétenteur peut les percevoir par préférence aux autres créanciers, à la charge de les imputer sur les intérêts de sa créance et subsidiairement sur le capital. Il est responsable des fruits et produits qu'il a négligé de percevoir. 1099. Le droit de rétention ne met pas obstacle à ce que le débiteur puisse aliéner la chose retenue, et même à ce que les autres créanciers puissent la saisir et la faire vendre, si elle n'est pas insaisissable. Mais, dans l'un et autre cas, l'acquéreur ne peut entrer en possession sans désintéresser entièrement le créancier rétenteur. 1100. Le rétenteur d'un meuble ou d'un immeuble est, au surplus, soumis à la même responsabilité que le créancier jouissant d'un nantissement conventionnel, mobilier ou immobilier, telle qu'elle est réglée aux Chapitres suivants. Les autres dispositions relatives au nantissement conventionnel sont applicables au droit de rétention pour tout ce qui n'est pas contraire à celle du présent Chapitre. En outre, le droit de rétention est perdu quand le créancier a volontairement négligé ou cessé de l'exercer effectivement. CHAPITRE II. DU GAGE OU NANTISSEMENT MOBILIER. SECTION PREMIÈRE. DE LA NATURE ET DE LA FORMATION DU CONTRAT DE GAGE. Art. 1101. Le gage est un contrat par lequel un débiteur affecte spécialement à la garantie de son obligation une ou plusieurs choses mobilières. [2071, 2072, 1er al.] 1102. Le contrat de gage peut aussi intervenir entre le créancier et un tiers fournissant la garantie pour le compte du débiteur, soit sur le mandat de celui-ci, soit spontanément. [2077.] Dans l'un et l'autre cas, le tiers qui a fourni le gage a son recours contre le débiteur, comme une caution, conformément aux articles 1030 et suivants. 1103. Soit que le gage ait été fourni par le débiteur ou par un tiers, si l'obligation ainsi garantie est purement naturelle, le cas est réglé par les articles 588 et 589. 1104. Le gage ne peut être valablement fourni que par celui qui a la capacité de disposer de l'objet donné en nantissement. Il en est de même pour les mandataires et administrateurs conventionnels, légaux et judiciaires, lesquels doivent, en outre, se renfermer dans les limites de leur mandat. Si le gage est fourni par un tiers non intéressé à la dette, il lui faut la capacité de disposer à titre gratuit, comme il est dit à l'article 1012. 1105. Le droit de gage n'est opposable aux tiers qui ont traité avec le débiteur, au sujet du même objet, ou à ses autres créanciers, que s'il y a eu rédaction d'un acte ayant reçu date certaine et portant expressément la désignation exacte de la créance en principal, et accessoires s'il y a lieu, et celle des objets donnés en gage. Lesdits objets doivent être décrits et, au besoin, estimés, de façon à ce que l'identité n'en puisse être changée. Si ce sont des choses de quantité, elles doivent être désignées par leur espèce, leur quantité et leur poids, nombre ou mesure. [2074, 1er al.] 1106. La rédaction d'un acte écrit n'est pas exigée dans les cas où, d'après la loi, la créance peut être prouvée par témoins; dans ce cas, le témoignage pourra établir, soit conjointement, soit disjointement, le montant de la créance et l'identité ou la nature et la valeur des objets donnés en gage. [2074, 2e al.] 1107. Le gage n'est également opposable aux tiers et aux autres créanciers que si le créancier gagiste a été mis et est resté en possession réelle et continue des objets corporels affectés au nantissement. [2076.] Le dépôt peut toutefois être remis aux mains d'un tiers choisi par les parties ou même par le créancier sous sa responsabilité. [Comp. ib.] La présente disposition s'applique aux titres de créances au porteur. 1108. Si le gage consiste dans une créance nominative, le créancier gagiste doit être mis en possession du titre authentique ou privé qui la constate. Il faut, en outre, que la constitution du gage soit notifiée au tiers débiteur, dans la forme ordinaire des notifications de transports-cessions, ou que celui-ci intervienne volontairement à l'acte de transfert en garantie. [2075.] L'article 367 est applicable audit transfert pour le surplus de ses dispositions. Le tout, sauf ce qui est dit au Code de Commerce, au sujet des marchandises et des effets négociables par endossement donnés en nantissement. 1109. S'il s'agit d'une action ou d'une obligation nominative dans une société civile ou commerciale, le transfert en garantie doit, indépendamment de la remise du titre, être notifié à la société et inscrit sur ses registres, en la forme établie par les statuts de ladite société ou par la loi, pour les cessions d'actions ou d'obligations. 1110. Le gage est indivisible, activement et passivement, d'après l'intention présumée des parties et sauf convention contraire expresse. Il subsiste, jusqu'à parfait payement du capital, des intérêts et des frais, sur la totalité et sur chacun des objets donnés en garantie, encore que la dette ait été acquittée en partie par le débiteur ou par l'un de ses héritiers. Si l'un des héritiers du créancier a été désintéressé pour sa part, le gage reste en entier affecté à la garantie des autres héritiers pour leur part dans la créance. [2083.] SECTION II. DES EFFETS DU CONTRAT DE GAGE. Art. 1111. Le créancier gagiste est tenu d'apporter à la garde et à la conservation de la chose, jusqu'à la restitution, tous les soins d'un bon administrateur. [2080, 1er al.] Il ne peut la louer sans y être autorisé par le débiteur, ni même l'employer à son usage personnel, à moins qu'il n'ait la même autorisation, ou que cet usage ne soit un mode naturel d'entretien et de conservation. Il peut être déclaré déchu de son droit, s'il en abuse. 1112. Il peut donner lui-même la chose en gage à un de ses propres créanciers, mais sous sa responsabilité, même au sujet des cas fortuits ou de force majeure qui ne se seraient pas produits autrement. 1113. Si la chose donne des fruits ou produits, le créancier gagiste a, à cet égard, les droits et obligations déterminés à l'article 1098, 2e alinéa, pour le créancier rétenteur. S'il s'agit d'une créance donnée en gage, il en perçoit de même les intérêts, avec imputation sur sa propre créance; mais il ne peut en recevoir le capital, sans l'autorisation spéciale de son débiteur, à moins qu'il ne s'agisse d'un effet négociable par endossement. [Comp. 2081.] 1114. Si le créancier gagiste a fait des dépenses nécessaires pour l'entretien ou la conservation de la chose, le remboursement lui en est garanti par le gage, par préférence à sa créance elle-même. [2080, 2e al.] Il en est de même de l'indemnité des dommages qu'il a pu éprouver par suite des vices non apparents de la chose. 1115. Le créancier gagiste peut retenir la possession du gage, à l'encontre du débiteur et de ses cessionnaires, jusqu'à parfait payement de la dette gagée, en principal et accessoires, ainsi que pour les sommes à lui dues d'après l'article précédent. [2082, 1er al.] Tant que sa créance n'est pas échue, il peut s'opposer à la saisie et à la vente du gage aux enchères par les autres créanciers du débiteur. 1116. A défaut d'exécution par le débiteur, lorsque la dette gagée est devenue exigible, la vente du gage aux enchères publiques peut être provoquée par le créancier gagiste ou par tout autre créancier, et le créancier gagiste est payé, par préférence aux autres, de tout ce qui lui est dû, tant en capital, intérêts et frais qu'à titre d'indemnité pour les causes exprimées à l'article 1114. 1117. Si la vente aux enchères n'est pas provoquée par les autres créanciers, ou si elle ne peut se réaliser, le créancier gagiste peut, à défaut d'accord avec le débiteur, demander au tribunal, par requête communiquée à celui-ci, que le gage lui soit attribué en payement, jusqu'à concurrence de sa valeur estimée par experts. [2078, 1er al.] En cas d'excédant de valeur de la chose sur la dette gagée, le créancier en doit le remboursement au débiteur. 1118. Est nulle de droit toute clause du contrat de gage ou toute convention antérieure à l'exigibilité de la dette qui autoriserait le créancier à garder le gage en payement, pour tout ou partie de sa créance, sans estimation judiciaire. [2078, 2e al.] Peuvent être déclarées nulles les ventes à réméré faites par un débiteur à son créancier, soit avec ou sans lésion, soit avec ou sans location au débiteur, ou toutes autres conventions faites en vue d'éluder la présente prohibition. Les nullités édictées par le présent article ne peuvent être invoquées par le créancier gagiste, mais seulement par le débiteur ou ses ayant-cause. 1119. Le seul fait que le gage est resté aux mains du créancier ne suspend pas en sa faveur l'accomplissement de la prescription libératoire du débiteur. 1120. La possession du gage est toujours précaire et la prescription acquisitive ne peut être invoquée par le créancier gagiste, quelle qu'ait été la durée de sa possession, même après que la dette a été éteinte par le payement ou autrement. [comp. 2079.] Toutefois, la précarité cesse dans les deux cas prévus à l'article 197. CHAPITRE III. DU NANTISSEMENT IMMOBILIER. SECTION PREMIÈRE. DE L'OBJET, DE LA NATURE ET DE LA FORMATION DU NANTISSEMENT IMMOBILIER. Art. 1121. Le nantissement immobilier donne au créancier nanti le droit de percevoir avant l'échéance de la dette les fruits et revenus d'un immeuble, par préférence à tous autres créanciers. [2085, 2e al.] A l'échéance, le créancier exerce les droits d'un créancier hypothécaire. L'échéance ne peut être retardée de plus de trente ans; en cas d'excédant, elle est de droit réduite à ce terme. Elle ne peut être prorogée au-delà du même terme. 1122. Le nantissement immobilier peut être constitué par un tiers pour le débiteur, et il produit entre celui-ci et le constituant les effets déterminés par l'article 1102 pour le gage constitué de la même manière. [2090.] 1123. Le nantissement immobilier ne peut être constitué que sur un bien susceptible d'hypothèque, conformément aux articles 1203 et 1204 et appartenant au constituant. Le constituant doit avoir, en outre, la jouissance de la chose ou du droit, et le nantissement ne peut, en aucun cas, excéder la durée de cette jouissance. La capacité requise pour constituer le nantissement immobilier est la même que pour constituer l'hypothèque, telle qu'elle est déterminée aux articles 1215 à 1218. 1124. Si le nantissement immobilier est conventionnel, il ne s'établit entre les parties que par un acte notarié, tel qu'il est prescrit à l'article 1211, pour l'hypothèque conventionnelle. [Secùs, 2085, 1er al.] Il peut aussi être établi par testament, dans les cas où l'hypothèque testamentaire est permise, conformément à l'article 1218. Il n'est opposable aux tiers qu'à partir du moment où il a été rendu public, conformément à l'article 368, par la transcription, soit de l'acte écrit qui le constate, soit du jugement déclarant son existence, lorsqu'elle a été contestée. [L. 23 mars 1855, art. 2-1°-2°-3°.] Ladite transcription vaut inscription pour fixer le rang de l'hypothèque. 1125. L'acte ou le jugement transcrit doit porter, outre la désignation précise de l'immeuble donné en nantissement, le montant de la créance, en capital et intérêts. En cas d'insuffisance desdites désignations, il y est suppléé par la mention d'une convention complémentaire en marge de la transcription déjà faite; mais ladite mention ne produit d'effet qu'à sa date. 1126. Si le droit réel donné en nantissement est un usufruit, un droit de bail ou d'emphytéose, il suffit que ledit nantissement soit mentionné en marge de la transcription de l'acte constitutif desdits droits. 1127. Le créancier doit, en outre, être mis et rester en possession réelle du droit immobilier garantissant sa créance, comme il est dit a l'article 1107, au sujet du gage. 1128. Le nantissement immobilier est indivisible, activement et passivement, comme il est dt du gage, l'article 1110. [2090.] SECTION II. DES EFFETS DU NANTISSEMENT IMMOBILIER. Art. 1129. Le créancier nanti peut, à moins de convention contraire, donner à bail le fonds ou le droit qu'il a reçu en garantie de sa créance, dans les limites réglées aux articles 126 à 129. Il peut aussi céder son nantissement, mais seulement pour la durée de son droit et sous sa responsabilité, comme il est dit a l'article 1112, pour le gage. 1130. Il est tenu d'acquitter les contributions et les autres charges annuelles des revenus. Il est également obligé, sous peine de dommages-intérêts, de faire les réparations d'entretien et les grosses réparations nécessaires et urgentes, sauf le remboursement immédiat de ces dernières. [2086.] 1131. Si le nantissement porte sur des biens urbains, le créancier, soit qu'il les occupe, qu'il les donne à loyer, ou non, doit en imputer la valeur locative sur les intérêts de sa créance et subsidiairement sur le capital, s'il y a excédant, ou pour le tout, si sa créance ne porte pas d'intérêts. [2085, 2e al.] Si le nantissement porte sur des biens ruraux, il n'est pas fait entre les parties de compte de fruits ni d'intérêts, lesquels sont considérés comme destinés à se compenser à forfait, s'il n'y a convention contraire et s'il n'y a pas fraude manifeste à l'égard des autres créanciers ou des limites légales de l'intérêt. L'imputation de la valeur locative sur les intérêts et celle des fruits, lorsqu'il, y a lieu, se fait de la valeur nette, déduction faite des charges annuelles, frais d'entretien, de gérance et de culture. 1132. Lorsque le nantissement porte sur un bien urbain, ou sur un bien rural avec stipulation qu'il sera fait un compte respectif des fruits du fonds et des intérêts de la créance, le créancier nanti peut, nonobstant même toute convention contraire, renoncer à la jouissance, pour l'avenir, et s'en tenir à l'hypothèque simple. Si, au contraire, les fruits et intérêts doivent se compenser à forfait, le créancier ne peut renoncer à la jouissance sans renoncer en même temps à son hypothèque. Dans les deux cas, la renonciation ne doit être faite qu'en temps opportun et après que le débiteur en a été dûment averti. 1133. Le créancier peut retenir la possession du fonds ou du droit soumis à son nantissement, jusqu'à parfait payement de ce qui lui est dû, en principal et accessoires. [2087, 1er al.] Il ne peut cependant s'opposer à la vente, soit à l'amiable, soit aux enchères, provoquée par le débiteur ou par ses autres créanciers, avant ou après l'échéance de sa créance. [2091, 1er al.] Il peut aussi provoquer lui-même la vente; le tout avec les effets différents indiqués ci-après. 1134. Au cas de vente provoquée contre lui par d'autres créanciers, le créancier nanti exerce son hypothèque à son rang, et s'il n'est primé par aucun créancier privilégié ou hypothécaire, ou si les autres créanciers colloqués avant lui ne doivent pas absorber tout le prix, l'acquéreur est averti qu'il sera tenu de respecter son droit de rétention pour ce qui lui reste dû, jusqu'à l'époque où devait finir le nantissement, conformément à l'article 1121. Il en est de même au cas d'aliénation volontaire faite par le débiteur et suivie de surenchère, à la requête d'un créancier privilégié ou hypothécaire ou du créancier nanti. Mais s'il a lui-même provoqué la vente aux enchères, son droit de jouissance et de rétention est éteint, à moins qu'il ne l'ait expressément réservé dans la mise en vente, et dans le cas seulement où il n'y a pas d'autres créanciers privilégiés ou hypothécaires, quel que soit leur rang. Sous ces deux conditions, le nantissement doit être respecté par l'acquéreur jusqu'à l'extinction de la dette. 1135. Les articles 1111, 1114 et 1118 à 1120 sont applicables au nantissement immobilier. CHAPITRE IV. DES PRIVILÉGES. DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES. Art. 1136. Le privilége est un droit de préférence attaché à la cause de certaines créances, en l'absence de nantissement conventionnel. [2095.] Les priviléges n'existent que pour les causes, sous les conditions et sur les objets limitativement déterminés par la loi. Les cas où les priviléges donnent un droit de suite contre les tiers détenteurs et les conditions de son exercice sont déterminés par la loi. 1137. Les priviléges sont indivisibles, activement et passivement, comme il est dit du gage et du nantissement immobilier, aux articles 1110 et 1128. 1138. Si les choses grevées de priviléges ont péri ou ont subi des détériorations de la part de tiers et qu'une indemnité soit due, de ce chef, au débiteur, les créanciers privilégiés peuvent exercer, par préférence aux autres créanciers, le droit du débiteur à ladite indemnité, pourvu qu'avant le payement ils y aient fait une opposition en bonne et due forme. Il en est de même s'il y a eu vente ou louage de la chose soumise à un privilége, et dans tous les cas où il y a lieu à payement d'une somme ou valeur au débiteur, à raison de l'exercice de droits légaux ou conventionnels au sujet de ladite chose; sans préjudice de ce qui est dit à l'article 839, à l'égard de l'indemnité due par les assureurs, au cas de sinistre. [v. C. it., 1951.] 1139. Les priviléges sont; 1°  Généraux, ou sur tous les meubles du débiteur et, subsidiairement, sur tous ses immeubles; [2099, 2100, 2101, 2104, 2105.] 2°  Spéciaux sur certains meubles; [2102.] 3°  Spéciaux sur certains immeubles. [2103.] 1140. Le rang respectif des créanciers ayant des priviléges généraux ou spéciaux est réglé dans chacune des trois Sections du présent Chapitre. Les créanciers privilégiés sur les immeubles priment les créanciers ayant hypothèque sur les mêmes immeubles, sauf les cas où la loi dispose autrement. [v. 2095.] Les créanciers privilégiés au même titre ou au même rang sont payés proportionnellement au montant de leur créance. [2097.] 1141. Les priviléges établis par le présent Code ne préjudicient pas à ceux qui sont ou seront établis par le Code de Commerce, en faveur des particuliers, ou par des lois spéciales, en faveur du Trésor public. [2098.] Lesdits priviléges sont d'ailleurs soumis aux règles générales ci-après édictées, sur tous les points à l'égard desquels ils ne seront pas autrement réglés. SECTION PREMIÈRE. DES PRIVILÉGES GÉNÉRAUX SUR LES MEUBLES ET LES IMMEUBLES. § Ier. DES CAUSES DES PRIVILÉGES GÉNÉRAUX. Art. 1142. Les créances privilégiées sur les meubles et les immeubles sont, dans les limites et sous les conditions ci-après déterminées: 1°  Les frais de justice, 2°  Les frais funéraires, 3°  Les frais de dernière maladie, 4°  Les salaires des gens de service, 5°  Les fournitures de subsistance. [2101, 2104.] I. PRIVILÉGE DES FRAIS DE JUSTICE. 1143. Le privilége des frais dits “de justice” appartient aux créanciers qui ont fait des avances d'argent ou auxquels il est dû un salaire ou des honoraires pour tous actes judiciaires ou extrajudiciaires légitimement faits dans l'intérêt commun des créanciers, soit pour assurer la conservation des biens du débiteur, soit pour arriver à les liquider, à les réaliser et à en distribuer le prix entre les ayant-droit. [2101-1°.] Si certains frais n'ont été faits que pour certains biens ou n'ont pas été utiles à tous les créanciers, le privilége reste spécial et n'est opposable qu'aux créanciers dans l'intérêt desquels les frais ont été faits. II. PRIVILÉGE DES FRAIS FUNÉRAIRES. 1144. Sont privilégiés les frais civils et religieux faits pour l'ensevelissement, l'inhumation ou la crémation du débiteur, eu égard à sa position sociale et dans la mesure d'usage. [2101-2°.] Le privilége s'applique aussi aux frais faits pour les funérailles des personnes de la famille du débiteur se trouvant à sa charge et habitant avec lui. Il ne s'étend pas aux dépenses, même d'usage, consécutives aux funérailles. III. PRIVILÉGE DES FRAIS DE DERNIÈRE MALADIE. 1145. Le privilége des frais de dernière maladie comprend les frais de médecins, chirurgiens, pharmaciens, gardes-malades et autres frais analogues, faits à l'occasion de la maladie qui a précédé soit le décès du débiteur ou des membres de sa famille désignés à l'article précédent, soit la faillite ou la déconfiture du débiteur. [2101-3°.] En cas de longue maladie, le privilége des frais faits à ce titre est limité à ceux de la dernière année. Le privilége n'a pas moins lieu, quoique le débiteur ou son parent soit mort par suite d'un accident ou d'une autre cause que la maladie pour laquelle les frais ont été faits. IV. PRIVILÉGE DES SALAIRES DES GENS DE SERVICE. 1146. Le privilége des gens de service appartient aux serviteurs attachés soit à la personne du débiteur ou à celle de ses parents habitant avec lui et étant à sa charge, soit à sa maison ou à ses propriétés urbaines ou rurales. Il ne garantit que les gages ou salaires de la dernière année écoulée. [2101-4°.] V. PRIVILÉGE DES FOURNITURES DE SUBSISTANCES. 1147. Le privilége des fournitures ne s'applique qu'aux denrées alimentaires fournies au débiteur ou à sa famille habitant avec lui et à leurs serviteurs. Il ne comprend que lesdites fournitures faites dans les six derniers mois. [2101-5°.] § II. DE L'EFFET ET DU RANG DES PRIVILÉGES GÉNÉRAUX. Art. 1148. Les priviléges généraux ne s'exercent sur les immeubles du débiteur que pour ce qui reste dû aux créanciers privilégiés, après leur collocation sur les meubles. Toutefois, si la distribution du prix des immeubles précède celle du prix des meubles, les créanciers peuvent se faire colloquer conditionnellement sur le prix des immeubles, sauf à ne toucher dans ladite collocation que ce qui restera impayé par le mobilier. Les créanciers qui ont négligé de se présenter en temps utile à la distribution du prix du mobilier sont déchus de leur droit de préférence sur les immeubles dans la mesure de ce qu'ils auraient pu toucher sur le mobilier. 1149. En cas de concours de tout ou partie des priviléges généraux les uns avec les autres, ils sont colloqués dans l'ordre respectif où ils sont énumérés aux articles 1143 à 1147. [2101.] Toutes les créances rentrant sous la même dénomination légale portée auxdits articles sont colloquées au même rang. S'ils concourent avec des priviléges spéciaux, sur les meubles, leur rang, respectivement à ces derniers, est réglé à la Section II ci-après. Les priviléges généraux sont primés par les priviléges spéciaux sur les immeubles et par les hypothèques spéciales, même constituées postérieurement, s'il n'y a eu fraude. [Secùs, 2105.] Mais ils priment les hypothèques générales, même acquises antérieurement à leur naissance. En cas de vente simultanée de tous les immeubles grevés d'hypothèques générales, les priviléges généraux sont colloqués sur tous, proportionnellement au prix de la vente de chacun. Si les ventes desdits immeubles sont successives, les priviléges généraux sont imputés en entier sur la première vente et subsidiairement sur les suivantes, et la répartition entre les immeubles se fait seulement par voie de recours au profit des créanciers qui ont les premiers supporté la charge desdits priviléges. 1150. Les priviléges généraux sont dispensés d'inscription sur les immeubles pour être opposés aux autres créanciers, tant que les immeubles appartiennent au débiteur. [2107.] SECTION II. DES PRIVILÉGES SPÉCIAUX SUR LES MEUBLES. § Ier. DE LA CAUSE ET DE L'OBJET DES PRIVILÉGES SPÉCIAUX SUR LES MEUBLES. Art. 1151. Indépendamment des créanciers nantis dont les priviléges sont établis aux Chapitres II et III ci-dessus, sont privilégiés pour les créances et sur les objets mobiliers ci-après désignés: 1°  Le bailleur d'immeubles, 2°  Les fournisseurs de semences et d'engrais, 3°  Les ouvriers agricoles et industriels, 4°  Celui qui a conservé un objet mobilier, 5°  Le vendeur d'objets mobiliers, 6°  L'aubergiste ou hôtelier, 7°  Le voiturier ou batelier, 8°  Le créancier, pour faits de charge, d'un officier public soumis au cautionnement, 9°  Celui qui a prêté les fonds dudit cautionnement. [2102.] I. DU PRIVILÉGE DU BAILLEUR D'IMMEUBLE. 1152. Le bailleur de bâtiments d'habitation, de magasins ou autres constructions, a privilége sur les objets mobiliers placés dans lesdits bâtiments pour l'usage, le commerce ou l'industrie du preneur. [2102-1°.] Le privilége a lieu, encore que lesdits objets n'appartiennent pas au preneur, si le bailleur a ignoré le fait et n'a pas eu de raison suffisante de le prévoir, au moment où il a connu l'introduction des objets dans les locaux loués. [Comp. Ibid-4°, 3° al.] Le privilége du bailleur ne s'exerce pas sur l'argent comptant, sur les bijoux et pierreries destinés à l'usage personnel du preneur ou de sa famille, ni sur les titres de créance, même au porteur. 1153. Le bailleur peut exiger que le preneur garnisse les locaux loués de meubles suffisants pour garantir le payement du terme courant du loyer et d'un terme à échoir, faute de quoi et à défaut du payement anticipé desdits termes ou d'autres sûretés équivalentes, il peut faire résilier le bail avec dommages-intérêts, s'il y a lieu. [1752.] Si les meubles qui garnissaient les locaux loués en ont été enlevés sans autorisation du bailleur, mais sans fraude, le bailleur ne peut les y faire réintégrer que si sa garantie est devenue insuffisante et dans la mesure des droits qui en appartiennent encore au preneur. Toutefois, au cas d'actes faits en fraude de ses droits, il peut les faire révoquer contre les tiers, sous les conditions et distinctions portées aux articles 361 et suivants. Le tout, sans préjudice du droit qui lui appartient en vertu de l'article 1138. [v. 2102-1°, 5e al.] 1154. Le bailleur d'un fonds rural, soit à ferme, soit à emphytéose, a privilége, dans la même mesure, sur les objets mobiliers placés dans les bâtiments d'habitation et d'exploitation et sur les animaux, ustensiles aratoires et autres instruments ou appareils d'exploitation du fonds loué. [2102-1°, 1er al.] Il a, en outre, privilége sur les récoltes et autres produits naturels du fonds loué, tant sur ceux se trouvant encore attachés au sol que sur ceux qui sont conservés sur ledit fonds. [ib.] S'il s'agit d'une mine, d'une minière ou carrière, le privilége porte sur le minerai, le charbon, les pierres et autres matériaux déjà extraits et se trouvant encore sur fonds loué. Le bailleur à part de fruits ou à colonage exerce son privilége sur la récolte et les autres produits du fonds loué, en se faisant attribuer, directement et par préférence aux autres créanciers, la part de produits à laquelle il a droit, tant qu'elle est encore dans les mains du colon. 1155. Le preneur à emphytéose, à ferme ou à colonage est tenu, pour la garantie du bailleur, de conserver sur le fonds les récoltes et autres produits de l'année courante, s'ils sont susceptibles de conservation et si les locaux sont convenables ou appropriés à cet effet. [1767.] Il ne peut, dans aucun cas, les déplacer ou en disposer sans autorisation du bailleur ou avant d'avoir satisfait à ses obligations pour l'année courante. Le droit de revendication des objets détournés et celui de résolution du bail établis au profit du bailleur par l'article 1153 sont applicables au bail d'un fonds rural ou de toute autre exploitation du sol. 1156. En cas de cession du bail ou de sous-location, le privilége du bailleur porte sur les meubles et autres objets garnissant les lieux loués, encore que le bailleur sache qu'ils appartiennent au cessionnaire ou au sous-locataire. Dans ce cas, le privilége porte aussi sur les sommes dues au preneur principal comme prix de cession ou sous-location, conformément à l'article 1138, sans que des payements anticipés puissent être opposés au bailleur. [C. pr. civ., 820.] 1157. En cas de liquidation générale des biens du preneur, le bailleur ne jouit du privilége établi aux articles précédents que pour la dernière année échue, pour l'année courante et pour une année à échoir, tant des loyers ou fermages que des autres charges annuelles. [2102-1°, 1er et 2e al.] Le privilége garantit, en outre, les autres obligations conventionnelles résultant du bail, les indemnités dues au bailleur pour les fautes ou négligences du preneur pendant l'année écoulée et l'année courante, et les dommages-intérêts accompagnant la résiliation qu'il peut faire prononcer pour l'avenir. [Ibid., 3e al.] 1158. Les autres créanciers peuvent empêcher la résiliation du bail et sous-louer ou céder le bail, à leur profit, nonobstant toute prohibition de sous-louer faite à l'origine, mais en garantissant au bailleur les loyers, fermages ou autres redevances, pour le temps du bail restant à courir. [C. civ., ib.; C. com., 550, Loi 12-20 fév. 1872.] II. PRIVILÉGE DES FOURNISSEURS DE SEMENCES ET ENGRAIS. 1159. Ceux qui ont fourni au propriétaire, à l'usufruitier, au fermier ou au possesseur, les semences et engrais employés sur le fonds, ont privilége sur les fruits de la récolte de l'année pour laquelle ils ont fait lesdites fournitures. [2102-1°, 4e al.] Il en est de même au profit de ceux qui ont fourni dans l'année les graines de vers-à-soie et les feuilles de mûriers destinés à la nourriture des vers. III. PRIVILÉGE DES OUVRIERS AGRICOLES ET INDUSTRIELS. 1160. Les ouvriers, autres que les serviteurs, qui ont travaillé à la culture et à la récolte des produits de l'année courante, ont privilége sur ces produits, pour le salaire à eux dû pour ladite année. [2102-1°, 4e al.] Le même privilége appartient aux ouvriers qui ont travaillé dans les exploitations de bois, mines, minières et carrières et dans les magnaneries, mais seulement pour les trois derniers mois de leur salaire de l'année courante. IV. PRIVILÉGE DU CONSERVATEUR D'OBJETS MOBILIERS. 1161. Celui qui est créancier pour frais de réparation ou de conservation d'un objet mobilier a privilége sur l'objet ainsi réparé ou conservé, lors même qu'il n'exerce pas le droit de rétention qui lui appartient d'après l'article 1096. [2102-3°.] Le même privilége s'applique aux frais d'actes judiciaires ou extrajudiciaires ayant fait reconnaître, conserver ou réaliser au profit du débiteur des droits réels ou personnels à des sommes d'argent, valeurs ou autres objets mobiliers quelconques. V. PRIVILÉGE DU VENDEUR D'OBJETS MOBILIERS. 1162. Le vendeur d'objets mobiliers a privilége sur l'objet vendu pour le prix de vente et les intérêts, s'il y a lieu, soit qu'il ait ou non donné terme pour le payement. [2102-4°.] S'il y a eu échange avec soulte et que la soulte soit de plus de moitié de la valeur de l'objet aliéné, le privilége a lieu pour ladite soulte. 1163. Le privilége subsiste tant que l'objet vendu est encore en la possession de l'acheteur et non transformé, lors même qu'il aurait été immobilisé par destination ou par incorporation à un fonds de l'acheteur, pourvu, dans ce dernier cas, qu'il puisse être détaché sans détérioration du fonds et, en tout cas, qu'il ne soit pas transformé. L'article 1138 est d'ailleurs applicable au cas d'aliénation par l'acheteur. 1164. Le privilége du vendeur ne préjudicie pas à ses droits de rétention et de résolution, tels qu'ils sont réglés aux articles 684 et 721. [2102-4°, 2e al.] VI. PRIVILÉGE DE L'AUBERGISTE ET L'HÔTELIER. 1165. L'aubergiste et l'hôtelier ont privilége sur les effets apportés par les voyageurs et restant encore dans leur auberge ou hôtellerie, pour leur créance de logement et de nourriture desdits voyageurs et de leurs serviteurs et des bêtes de somme ou de trait les accompagnant. [2102-5°.] VII. PRIVILÉGE DES VOITURIERS ET BATELIERS. 1166. Le privilége des voituriers et bateliers, commerçants ou non, s'exerce sur les objets par eux transportés, avec ou sans voyageurs, et se trouvant encore dans leurs mains, pour le prix du transport des bagages ou marchandises, des personnes, des bêtes de somme ou de trait et de leur nourriture, s'il y a lieu, et pour les droits de douane ou autres frais accessoires légitimes. [2102-6°] Le privilége subsiste même après la livraison des objets, si, dans les 48 heures de ladite livraison, le voiturier a sommé le débiteur ou celui qui a reçu les objets en son nom de lui restituer la possession ou de payer ce qui est dû et a formé, à bref délai, une demande en justice pour y donner suite. Dans aucun cas, la revendication ne peut avoir lieu contre les tiers acquéreurs, sauf le cas de fraude, comme il est prévu à l'article 1153, et sans préjudice de l'application de l'article 1138. VIII. PRIVILÉGE DES CRÉANCIERS POUR FAITES DE CHARGE. 1167. Les créances résultant de faits de charges, de fautes ou abus commis dans l'exercice de leur fonction par les officiers publics soumis à un cautionnement sont privilégiées sur ledit cautionnement. [2102-7°.] IX. PRIVILÉGE DES PRÊTEURS DE DENIERS DU CAUTIONNEMENT. 1168. Si les deniers déposés en cautionnement ont été prêtés par des tiers qui ont justifié de leur droit, conformément aux Règlements, soit au moment du prêt, soit avant aucune opposition, ceux-ci sont privilégiés sur ledit cautionnement en second ordre ou après le désintéressement de ceux qui ont souffert des faits de charge. [Lois fr. 15 janv. 1805, 25 févr. 1805, 28 août 1806, 22 déc. 1812.] § II. DU RANG DES PRIVILÉGES SPÉCIAUX SUR LES MEUBLES. Art. 1169. Lorsqu'il y a conflit entre les priviléges spéciaux sur les meubles et tout ou partie des priviléges généraux, la priorité est réglée comme il suit: 1°  Les frais de justice priment tous les créanciers auxquels ils ont été utiles, et dans la mesure ou la proportion dans laquelle ils l'ont été; 2°  Les quatre autres priviléges généraux priment également, en proportion de leur importance respective et dans l'ordre de l'article 1142, tous les priviléges spéciaux, mais seulement en cas d'insuffisance des meubles non soumis à d'autres priviléges. 1170. Si le conflit s'élève entre divers créanciers ayant un privilége spécial sur le même meuble, la préférence respective a lieu dans l'ordre et sous les distinctions ci-après: Au premier rang est celui qui a conservé l'objet du privilége. S'il y a plusieurs créanciers par suite d'actes successifs de conservation, la préférence appartient, respectivement, à ceux qui ont fait les actes de conservation les plus récents: Au second rang est le créancier nanti de l'objet, soit par gage exprès ou conventionnel, soit par gage tacite, comme le bailleur d'immeuble, l'aubergiste et le voiturier. Au troisième rang est le vendeur dudit objet. Toutefois, le créancier nanti obtient le premier rang, s'il a ignoré, lors de la constitution du gage, qu'il était dû des frais de conservation pour ledit objet. En sens inverse, le créancier nanti est primé par le vendeur, s'il a su que le prix de vente était encore dû. S'il s'agit de récoltes, le premier rang appartient aux ouvriers agricoles et le second aux fournisseurs de semences et d'engrais, le troisième au bailleur du fonds. Les ouvriers industriels priment de même le bailleur sur les produits des mines, carrières et autres exploitations extractives ou industrielles du sol. S'il s'agit du cautionnement d'un fonctionnaire public, ses créanciers pour faits de charge priment, ensemble et proportionnellement à leurs créances respectives, sans égard à leur date, tous les autres créanciers, même celui qui a prêté les deniers du cantionnement; celui-ci exerce le privilége dit “ de second ordre ” sur le reste du cantionnement. SECTION III. DES PRIVILÉGES SPÉCIAUX SUR LES IMMEUBLES. § Ier. DE LA CAUSE ET DE L'OBJET DES PRIVILÉGES SPÉCIAUX SUR LES IMMEUBLES. Art. 1171. Sont privilégiés sur les immeubles, pour les créances et sous les conditions ci-après déterminées: 1°  L'aliénateur d'un immeuble, par vente, échange ou autre acte onéreux, ou même gratuit avec charges, sur l'immeuble aliéné; 2°  Les copartageants, sur les immeubles compris dans le partage; Les architectes, ingénieurs et entrepreneurs, sur la plus-value résultant de leurs travaux sur les immeubles; [2103.] 4°  Les prêteurs de deniers qui ont payé, en tout ou en partie, l'aliénateur, le copartageant ou les entrepreneurs de travaux, au moment de l'acte qui donne naissance au privilége, sur les mêmes immeubles; 5°  Les créanciers et légataires d'une succession qui demandent la séparation des patrimoines du défunt d'avec celui de l'héritier, conformément au Chapitre des Successions, sur les immeubles du défunt. [878 à 880, 2111.] I. PRIVILÉGE DE L'ALIÉNATEUR. 1172. Le privilége de l'aliénateur appartient: 1°  Au vendeur, pour le prix de vente fixé, soit en capital, soit en rente perpétuelle ou viagère, pour les intérêts ou arrérages et pour les autres charges de la vente; [2103-1°.] 2°  Au co-échangiste, tant pour la soulte qui peut lui être due et pour les charges, que pour la garantie de l'éviction qu'il pourrait subir dans les objets reçus en contre-échange; 3°  Au donateur ou à son ayant-cause, pour les charges de la donation; Et, généralement, à tout aliénateur d'immeuble, à titre onéreux ou gratuit, pour la contre-valeur certaine ou éventuelle qui peut lui être due, et pour les charges imposées à l'acquéreur. 1173. Outre le prix de vente et la soulte de l'échange, les charges de ces aliénations, ainsi que celles de la donation et l'indemnité éventuelle de la garantie d'éviction dans les conventions à titre onéreux, doivent être fixées en argent, soit dans l'acte d'aliénation, soit dans un acte postérieur et séparé. Lesdits actes doivent, en outre, être publiés comme il est dit au § suivant. 1174. Le privilége pour la garantie d'éviction des immeubles reçus en contre-valeur d'un échange ou d'une autre aliénation d'immeuble ne subsiste que si l'éviction a eu lieu dans les dix ans à partir de l'aliénation et si, une fois l'éviction subie par jugement devenu irrévocable, la demande en garantie a été formée et publiée dans l'année. A l'égard des droits mobiliers reçus en contre-valeur, le privilége de la garantie ne subsiste que si l'éviction a eu lieu dans l'année et si la demande a été formée et publiée dans le mois du jugement devenu irrévocable. II. PRIVILÉGE DES COPARTAGEANTS. 1175. Les cohéritiers, associés ou autres copropriétaires indivis ont privilége, respectivement, sur les immeubles obtenus par chacun d'eux dans le partage, soit par la voie du sort, soit par assignation conventionnelle, soit par licitation, pour les créances nées dudit partage, savoir: 1°  Pour les soultes ou retours de lots, sur les immeubles échus aux copartageants chargés desdites soultes; [2103-3°, 2109.] 2°  Pour le prix de licitation, sur l'immeuble licité; [2109.] 3°  Pour la garantie d'éviction soufferte par un des copartageants dans son lot, sur tous les immeubles échus ou assignés aux autres, mais seulement pour la part de chacun d'eux dans l'obligation. [ibid. et 884, 885.] 1176. Ladite garantie s'applique à l'éviction que souffre un copartageant, tant dans les meubles que dans les immeubles à lui échus par le partage. Elle s'applique aussi: 1°  A l'insolvabilité du cohéritier ou du coassocié chargé envers un autre d'une soulte ou du prix de licitation; 2°  A l'insolvabitité d'un débiteur de la succession ou de la société en liquidation, qu'il soit copartageant ou étranger, lorsque la créance a été mise dans un seul lot ou dans quelques-uns d'eux et que ledit débiteur était déjà insolvable au moment du partage. [886.] 1177. L'article 1174 est applicable entre copartageants au privilége de la garantie d'éviction. S'il s'agit de l'insolvabilité d'un débiteur, copartageant ou non, la garantie n'en est due, tant entre les parties qu'à l'égard des tiers, que si la demande est formée et publiée dans l'année du défaut de payement de tout ou partie du capital devenu exigible. Si la dette consiste dans une rente perpétuelle ou viagère, la garantie cesse d'être due lorsque l'insolvabilité du débiteur ne survient qu'après dix ans de la date du partage. Il en est de même si la dette est d'un capital portant intérêts et dont l'échéance est éloignée de plus de dix ans après le partage. III. PRIVILÉGE DES ARCHITECTES, INGÉNIEURS ET ENTREPRENEURS DE TRAVAUX. 1178. Les architectes, ingénieurs et entrepreneurs ont privilége pour leurs créances résultant de travaux par eux dirigés ou exécutés pour la construction ou la réparation de bâtiments, terrasses, digues ou canaux, pour les dessèchements, irrigations, défrichements, remblais et autres travaux analogues faits sur le sol. [2103-4°.] Le même privilége appartient aux ingénieurs et entrepreneurs pour les travaux, souterrains ou extérieurs, relatifs soit à l'ouverture ou à l'exploitation, soit à la fermeture ou à la suppression des mines, minières et carrières. 1179. Le privilége résultant des travaux sus-énoncés ne porte que sur la plus-value donnée par lesdits travaux au sol ou aux bâtiments et subsistant encore au moment de l'exercice du privilége. [ibid, 2e al.] Ladite plus-value doit être constatée au moyen de trois procès-verbaux dressés par un expert nommé par le tribunal. Le 1er procès-verbal doit être dressé avant le commencement des travaux, constater l'état actuel des lieux et porter l'indication générale des travaux projetés. Le 2e doit être dressé dans les trois mois de l'achèvement des travaux ou de leur cessation par quelque cause que ce soit, lors même que la réception en serait contestée ou retardée, et constater le montant de la plus-value résultant actuellement desdits travaux; [2103-4°, 1er al, et 2110.] Le 3e est dressé au moment de la demande en collocation et constate ce qui subsiste de ladite plus-value. IV. PRIVILÉGE DES PRÊTEURS DE DENIERS. 1180. Les priviléges énoncés aux articles précédents appartiennent, directement et en vertu de la loi, à ceux qui, au moment de l'aliénation, du partage ou du contrat avec les entrepreneurs de travaux, ont prêté les deniers pour le payement du prix de vente ou de licitation, des soultes d'échange ou de partage, ou des sommes versées à-compte pour les travaux; le tout, lorsque le prêt et son emploi ont été mentionnés dans l'acte auquel ils se rapportent. [2103-2°-5°] Si les deniers n'ont été fournis qu'après la naissance du privilége au profit des aliénateurs, copartageants ou entrepreneurs, le privilége n'est acquis aux prêteurs qu'autant qu'ils ont obtenu du créancier ou du débiteur la subrogation conventionnelle, sous les conditions et dans la forme déterminées aux articles 502 et 503 [Ibid.] Dans l'un et l'autre cas, si le prêteur de deniers n'a payé la dette qu'en partie, il concourt avec le créancier principal ou primitif dans l'exercice du privilége, proportionnellement à ce dont il l'a désintéressé, conformément à l'article 508. [Secùs 1252.] V. PRIVILÉGE DE LA SEPARATION DES PATRIMOINES. 1181. Les conditions auxquelles est soumis le droit pour les créanciers et légataires d'une succession de demander la séparation du patrimoine du défunt d'avec celui de l'héritier sont réglées au Chapitre des Successions. [878 à 880, 2111.] DISPOSITION COMMUNE. Art. 1182. Les priviléges de l'aliénateur, des copartageants et des créanciers et légataires qui ont demandé la séparation des partimoines ne s'étendent pas aux augmentations et améliorations apportées aux immeubles par le fait ou du chef du débiteur et à ses frais. § II. DE L'EFFET ET DU RANG ENTRE LES CRÉANCIERS DES PRIVILÉGES SPÉCIAUX SUR LES IMMEUBLES. Art. 1183. Les priviléges énoncés au § précédent ne peuvent être opposés aux autres créanciers qu'autant qu'ils ont été rendus publics et conservés par les moyens, sous les conditions et dans les délais ci-après déterminés. [2106.] 1184. Le privilége du vendeur et celui du co-échangiste, pour le prix de vente et pour la soulte, se conservent par la transcription du titre translatif de propriété portant que le prix ou la soulte est encore dû, en tout ou en partie. [2108.] La transcription du titre conserve également le privilége pour la garantie d'éviction dans l'échange et pour les charges accessoires de la vente, de l'échange et des autres contrats translatifs de propriété, si la garantie et les charges ont été estimées en argent dans l'acte même. 1185. Le privilége des copartageants se conserve par la transcription de l'acte déclaratif de propriété constituant le partage judiciaire ou extrajudiciaire et portant le montant, soit du prix de licitation, soit des soultes ou retours de lots, et l'estimation de la garantie d'éviction, ainsi que des autres charges certaines ou éventuelles attachées à chaque lot. [2109.] 1186. Tant que lesdits actes d'aliénation ou de partage n'ont pas été transcrits, aucune sûreté réelle consentie par l'acquéreur ou par le copartageant, ou procédant de son chef, à l'exception des créances privilégiées résultant de travaux, ne peut être opposée au créancier privilégié ou à ses ayant-cause généraux ou particuliers, même si elle est publiée; mais les intéressés peuvent toujours faire procéder à ladite transcription, sans le consentement des contractants originaires. [Secùs Loi fr. du 23 mars 1855, art. 3; Sic C. ital., 1942, 2e al.] 1187. Si l'acte d'aliénation ou de partage ne porte pas que la contre-valeur en est encore due, en tout ou en partie, ou que des charges y sont attachées, cette omission peut être réparée par un acte postérieur, tant que la dette existe, et ledit acte peut être publié conjointement avec celui d'aliénation, par les soins du créancier. Si ledit acte n'a pas été publié avec la transcription, l'aliénateur peut toujours le révéler par une inscription substantielle, prise en la forme déterminée au Chapitre des Hypothèques; mais le privilége se trouve alors dégénéré en une simple hypothèque légale. Ladite hypothèque ne peut être opposée aux tiers qui, dans l'intervalle des deux publications, auraient acquis du chef du débiteur et dûment publié des droits réels sur l'immeuble à lui transféré. [2113.] Il en est de même si les charges portées à l'acte d'aliénation ou de partage ou la créance éventuelle de garantie n'ont été estimées que ans un acte postérieur à l'acte principal : l'inscription hypothécaire dudit acte ne donne rang au créancier qu'à la date où elle est faite. 1188. Lorsque le privilége du vendeur et des autres aliénateurs ou des copartageants est dégénéré en hypothèque légale, l'action résolutoire pour inexécution des obligations ne peut être exercée au préjudice des tiers qui ont acquis du chef du débiteur et dûment conservé avant l'inscription de ladite hypothèque des droits réels sur l'immeuble objet de l'aliénation ou du partage. [L. 23 mars 1855, art. 7.] 1189. Le privilége des architectes, ingénieurs ou entrepreneurs de travaux se conserve par l'inscription des deux premiers procès-verbaux prescrits à l'article 1179. Le premier, constatant l'état actuel des lieux et annonçant les travaux à exécuter, doit être inscrit avant le commencement des travaux; Le second, constatant la plus-value résultant desdits travaux terminés ou cessés, doit être inscrit dans le mois de sa rédaction faite dans le délai fixé audit article. L'effet de l'inscription du second procès-verbal remonte à la date de l'inscription du premier, et assure au créancier privilégié la priorité sur la plus-value, contre tous ceux qui ont contracté avec le débiteur, soit avant les travaux, soit depuis. [2110.] L'inscription desdits procès-verbaux prise par l'un des intéressés profite aux autres, même sans mandat de leur part, et assure à tous le même rang pour être payés proportionnellement à leur créance, pourvu qu'ils aient fait en temps utile les justifications nécessaires. 1190. Si l'inscription de l'un ou de l'autre procès-verbal n'a pas été prise dans le délai qui lui est assigné par l'article précédent, le privilége dégénère en une hypothèque légale dont le rang se fixe sur la plus-value, comme il suit: 1°  A la date de l'inscription tardive du premier procès-verbal, si le second a été dressé dans les trois mois de l'achèvement ou de la cessation des travaux et inscrit dans le mois suivant; 2°  A la date de l'inscription du second procès-verbal, s'il n'a pas été dressé dans lesdits trois mois, ou si, même ayant été dressé dans les trois mois, il n'a pas été inscrit dans le mois de sa date. [v. 2113.] 1191. Le privilége appartenant, aux termes du 1er alinéa de l'article 1180, à ceux qui ont prêté les deniers, à l'origine, pour l'acquisition, le partage ou les travaux, se conserve de la même manière que pour les créanciers dont ils ont la place. S'ils leur ont succédé postérieurement, par subrogation, et que la publication du privilége n'ait pas encore eu lieu, ils la feront opérer par la transcription ou l'inscription de l'acte principal et de l'acte de subrogation. [2108, 2110.] Si la publication a précédé la subrogation, ils requerront la mention de l'acte subrogatif en marge de l'acte transcrit. La même publicité sera donnée par les cessionnaires des créances privilégiées. [v. 2112.] Dans ces deux derniers cas, le subrogé ou le cessionnaire qui aura tardé à faire opérer la mention prescrite ne pourra critiquer les payements ou autres actes libératoires intervenus, antérieurement et de bonne foi, entre le débiteur ou ses ayant-cause et le créancier originaire. 1192. Les créances privilégiées ou hypothécaires portant des intérêts ou des arrérages, et conservées comme il est dit ci-dessus, peuvent être colloquées au même rang que le capital, pour deux ans seulement d'intérêts ou d'arrérages; sauf le droit pour le créancier de prendre des incriptions hypothécaires spéciales au fur et à mesure, pour les échéances plus anciennes. [v. 2151.] 1192 bis. Les créanciers et légataires qui demandent la séparation des patrimoines, à l'égard des immeubles du défunt, doivent inscrire leur créance ou leur legs sur les biens qu'ils veulent retenir pour leur sûreté, dans les six mois de l'ouverture de la succession. L'inscription doit mentionner le montant de la créance ou du legs et le but dans lequel elle est prise. Les inscriptions ou transcriptions faites dans ledit délai, du chef de l'héritier, ne peuvent préjudicier aux séparatistes, sauf ce qui est dit à l'article suivant, au sujet du privilége des entrepreneurs. [2111.] 1193. Entre les créanciers privilégiés sur les immeubles la priorité respective a lieu dans l'ordre suivant: 1°  Les architectes, ingénieurs et entrepreneurs de travaux, lors même que leur créance serait née la dernière; En cas d'insuffisance de la plus-value résultant de leurs travaux, pour leur payement intégral, ils sont tous colloqués au même rang, proportionnellement à leurs créances; 2°  L'aliénateur ou le copartageant; En cas d'aliénations ou de partages successifs, la priorité appartient aux plus anciens créanciers respectivement. [2103-1°.] Les prêteurs de deniers ont le rang du créancier que leurs deniers ont servi à désintéresser, en tout ou en partie, soit à l'origine, soit par suite d'une subrogation conventionnelle. Les créanciers et légataires qui demandent la séparation des patrimoines ne sont primés sur les biens du défunt que par les architectes, ingénieurs et entrepreneurs qui ont donné une plus-value aux biens héréditaires depuis qu'ils sont échus à l'héritier. La séparation des patrimoines ne modifie pas les droits des créanciers et légataires du défunt respectivement. 1194. Les règles concernant le mode d'inscription des priviléges, leur renouvellement et la radiation ou réduction des inscriptions, lorsqu'il y a lieu, sont communes aux Priviléges et aux Hypothèques et exposées, au sujet de ces dernières, au Chapitre suivant. § III. DE L'EFFET DES PRIVILÉGES SUR LES IMMEUBLES CONTRE LES TIERS DÉTENTEURS. Art. 1195. Les priviléges dûment publiés et conservés, comme il est dit au § précédent, suivent l'immeuble qui en est grevé dans les mains des tiers détenteurs. Faute par ceux-ci de satisfaire les créanciers privilégiés par l'un des moyens qui seront ultérieurement déterminés, l'immeuble peut être saisi sur eux et vendu aux enchères, pour le prix en être distribué aux créanciers privilégiés et hypothécaires, suivant l'ordre de préférence existant entre eux. [2166, 2169.] 1196. Les priviléges généraux ne donnent le droit de suite sur les immeubles passés aux mains de tiers détenteurs que s'ils ont été inscrits avant la transcription du titre d'acquisition de ceux-ci. 1197. Les créanciers privilégiés par l'effet d'une aliénation ou d'un partage dont la transcription n'a pas été faite avant celle du titre du sous-acquéreur qui en procède originairement, ne sont déchus du droit de suite qu'après avoir été sommés par lui d'avoir à faire transcrire le titre d'où procède leur privilége, et si ladite sommation est restée sans effet pendant un mois augmenté du délai légal des distances. Toutefois, le nouvel acquéreur n'est pas tenu de faire ladite sommation et est autorisé à se considérer comme à l'abri de tout privilége des anciens propriétaires, lorsque son cédant était en possession civile de l'immeuble depuis plus de dix ans. [Secùs L. fr. du 23 mars 1855, art. 6.] 1198. Les créanciers ayant privilége à raison de travaux sur les immeubles peuvent exercer le droit de suite en vertu de l'inscription du premier procès-verbal, si la transcription du titre d'aliénation a eu lieu avant l'achèvement ou la cessation des travaux. Si les travaux sont terminés ou ont cessé et si le double délai de la réception et de l'inscription du second procès-verbal n'est pas encore écoulé, lesdits créanciers ne sont déchus de leur privilége qu'après l'expiration dudit délai ou après avoir été inutilement sommés de faire inscrire le second procès-verbal dans le mois. 1199. Les créanciers privilégiés qui n'ont pas donné à leur privilége la publicité nécessaire pour conserver et exercer le droit de suite ne sont pas déchus du droit d'être payés sur le prix de cession dû par le tiers détenteur, s'ils se sont fait connaître et ont justifié de leur créance avant le payement du prix ou avant la clôture de l'ordre, dans le cas où un ordre a été ouvert. 1200. Les règles communes aux Priviléges et aux Hypothèques sur le droit de suite, sur ses conditions et ses effets, et sur les moyens pour le tiers détenteur d'éviter l'expropriation, ainsi que les causes d'extinction des Priviléges sont déterminées, au sujet des Hypothèques, comme il est dit à l'Appendice du Chapitre suivant. CHAPITRE V. DES HYPOTHÈQUES. SECTION PREMIÈRE. DE LA NATURE ET DES OBJETS DE L'HYPOTHÈQUE. Art. 1201. L'hypothèque est un droit réel sur les immeubles affectés, par la loi ou la volonté de l'homme, à l'acquittement de certaines obligations par préférence aux autres, sans qu'il y ait besoin de nantissement. [2114, 1er al.] 1202. L'hypothèque est indivisible, activement et passivement, s'il n'y a convention contraire, comme il est dit du gage et du nantissement immobilier. [2114, 2e al.] 1203. L'hypothèque peut être constituée non seulement sur la pleine propriété des immeubles, mais encore sur l'usufruit, autre quo l'usufruit légal des père et mère, et sur les droits de bail, d'emphytéose et de superficie, et aussi sur la nue propriété ou sur le fonds démembré de ces droits. [v. 2118.] Toutefois, le plein propriétaire ne peut hypothéquer séparément, soit la nue propriété, soit l'usufruit, ni pareillement le sol sans les constructions ou plantations, ou celles-ci sans le sol. Il peut, au contraire, hypothéquer une part divise ou indivise de son fonds. Les servitudes foncières ne peuvent être hypothéquées séparément du fonds dominant, ni les immeubles par destination séparément du fonds auquel ils sont attachés. Dans le cas où l'exploitation d'une mine est concédée, l'hypothèque peut porter séparément sur la mine et sur la surface, en faveur soit du même créancier, soit de créanciers différents, et soit qu'elles appartiennent ou non au même propriétaire. [L. fr. 21 avril 1810, art. 7, 17 à 21.] 1204. Ne peuvent être hypothéqués: Les droits d'usage et d'habitation, ni les autres biens inaliénables ou insaisissables; Les créances immobilières prévues aux n°s 2 et 3 de l'article 11; Les rentes sur l'Etat et autres créances immobilisées, comme il est prévu au n° 4 dudit article 11, si la loi qui en autorise l'immobilisation n'en permet pas l'hypothèque. Les meubles, sauf ce qui est dit des navires et bateaux dans les lois spéciales portées à ce sujet. [2119, 2120; L. fr. des 10-22 déc. 1874.] 1205. Les dispositions du présent Code sont applicable aux hypothèques établies par le Code de Commerce et par les lois spéciales, sur tous les points qui ne sont pas réglés autrement par lesdites lois. 1206. L'hypothèque s'étend, de plein droit, aux augmentations ou améliorations qui peuvent survenir au fonds, soit par des causes fortuites et gratuites, comme l'alluvion, soit par le fait et aux frais du débiteur, comme par des constructions, plantations ou autres ouvrages, pourvu qu'il n'y ait pas fraude à l'égard des autres créanciers et sauf le privilége des architectes et entrepreneurs de travaux, sur la plus-value, tel qu'il est réglé au Chapitre précédent. [2133.] Elle ne s'étend pas aux fonds contigus que le débiteur aurait acquis, même gratuitement, encore qu'il les ait incorporés au fonds hypothéqué, au moyen de nouvelles clôtures ou par la suppression des anciennes. 1207. Les pertes, diminutions ou détériorations des biens hypothéqués, provenant de causes fortuites ou majeures, ou du fait d'un tiers, sont au détriment du créancier, sauf son droit sur l'indemnité, s'il y a lieu, comme il est dit à l'article 1138, au sujet des priviléges. Si les biens hypothéqués ont subi des diminutions ou détériorations par le fait du débiteur ou par défaut d'entretien, de telle sorte que la garantie du créancier soit devenue insuffisante, le débiteur est tenu de donner au créancier un supplément d'hypothèque. [v. 2131.] En cas d'impossibilité de le faire, il est tenu de rembourser la dette, même avant l'échéance, dans la mesure où la garantie du créancier est devenue insuffisante. [1188.] 1208. Tant que les biens hypothéqués ne sont pas saisis, le débiteur conserve le droit de les donner à bail pour la durée déterminée aux articles 126 et 127, d'en aliéner les fruits et produits, même sur pied, et, généralement, de faire tous les actes d'administration. [v. C. proc. civ. fr., 681 à 685.] SECTION II. DES DIVERSES ESPÈCES D'HYPOTHÈQUES. Art. 1209. L'hypothèque est légale, conventionnelle ou testamentaire. [2116, 2117.] § Ier. DE L'HYPOTHÈQUE LÉGALE. Art. 1210. L'hypothèque existe, de plein droit et indépendamment de toute stipulation: 1°  Au profit des femmes mariées, pour toutes les créances qu'elles peuvent avoir contre leur mari, sur tous les immeubles du mari, même mineur, tant sur ceux qui lui appartiennent au jour du mariage que sur ceux qu'il acquiert ou qui lui adviennent postérieurement, à quelque titre que ce soit; [2121, 1er al., 2135-2°.] 2°  Au profit des mineurs non émancipés et des interdits, soit judiciairement pour démence, soit légalement, par l'effet de condamnations criminelles, pour toutes leurs créances contre leur tuteur, sur tous les biens présents et à venir du tuteur; [2121, 2e al., 2135-1°.] 3°  Au profit de l'Etat, des départements, des communes et des établissements publics, sur les biens de leurs comptables, à raison de leur gestion, dans la mesure et sous les conditions déterminées par les lois administratives. [2121, 3e al.] Est encore considérée comme légale l'hypothèque qui naît d'un privilége dégénéré, aux termes des articles 1187 et 1190. § II. DE L'HYPOTHÈQUE CONVENTIONNELLE. Art. 1211. L'hypothèque conventionnelle ne peut résulter que d'une convention passée devant notaire, en la forme ordinaire des actes authentiques, à peine de nullité absolue. [2117, 3e al., 2127.] La procuration pour consentir une hypothèque sur les biens du mandant doit être spéciale et donnée également devant notaire; elle doit être relatée en substance dans la convention d'hypothèque. 1212. Les conventions d'hypothèque passées en pays étranger, au sujet de biens situés au Japon, peuvent produire leur effet lorsqu'elles ont été passées dans la forme usitée dans le pays étranger, entre les nationaux, pour cette sorte d'acte; mais l'inscription ne peut être prise au Japon, en vertu desdites conventions, qu'en observant les conditions prescrites aux articles 1219, 1224 et suivants. [Secùs 2128.] 1213. L'acte constitutif d'hypothèque doit désigner spécialement par leur nature et leur situation les immeubles affectés à la garantie de l'obligation. [2129, 1er al.] Si la constitution d'hypothèque comprend tout ou partie des immeubles présents du débiteur, sans désignation spéciale de chacun d'eux, elle peut être réduite sur la demande du débiteur, à ce qui est nécessaire à la garantie de la créance. [Secùs, ib.] La constitution d'une hypothèque générale ou spéciale sur les biens à venir du débiteur est nulle pour le tout. [v. 2129, 2e al. et 2130.] 1214. L'acte constitutif d'hypothèque conventionnelle doit encore désigner clairement la cause, la modalité et l'objet de l'obligation, tant en principal qu'en accessoires. L'objet en sera évalué en argent, s'il ne consiste pas directement en cette valeur; toutefois, cette dernière condition pourra n'être remplie que dans l'inscription, comme il est dit à l'article 1226. [2132.] 1215. L'hypothèque ne peut être consentie que par celui qui a le droit de propriété ou de jouissance qu'il entend soumettre à l'hypothèque et s'il a la capacité d'en disposer à titre onéreux ou gratuit, suivant la cause de la dette; sans préjudice de ce qui est dit, à l'article 1217, de la constitution d'hypothèque par un tiers. [v. 2124.] S'il s'agit d'un droit réel temporaire, l'hypothèque ne peut produire d'effet au-delà du temps assigné au droit principal. Toutefois, si avant l'expiration de ce temps, le droit hypothéqué se trouve transporté par l'effet de quelque événement sur une indemnité représentant la valeur de la chose, le créancier exerce son droit de préférence sur la dite indemnité. [2125.] 1216. Les biens des mineurs, des interdits et des absents ne peuvent être hypothéqués par leurs représentants que pour les causes et dans les formes déterminées au Livre 1er. [2126.] La capacité d'hypothéquer pour les femmes mariées et les mineurs émancipés autorisés à faire le commerce est réglée au Code de Commerce. [C. com., 6, 7.]. 1217. L'hypothèque conventionnelle peut être donnée pour garantir la dette d'un tiers, comme il est dit du gage et du nantissement immobilier par les articles 1102 et 1122. Elle constitue une libéralité vis-à-vis du débiteur, lorsque celui-ci n'a fait aucun sacrifice pour l'obtenir, elle en constitue une vis-à-vis du créancier, lorsque la créance a une cause gratuite, ou lorsqu'elle est constituée postérieurement à la convention principale, même onéreuse, et sans avoir été promise. § III. DE L'HYPOTHÈQUE TESTAMENTAIRE. Art. 1218. L'hypothèque ne peut être conférée par testament, sur un ou plusieurs immeubles du testateur, que pour la garantie de tous ou de quelques-uns de ses legs ou de la dette d'un tiers. [v. L. belge du 16 déc. 1851, art. 43, 44.] Dans ce dernier cas, pour que l'hypothèque testamentaire soit valablement constituée, il doit y avoir respectivement capacité de donner et de recevoir par testament, du constituant au débiteur et au créancier. SECTION III. DE LA PUBLICITÉ DES HYPOTHÈQUES. § Ier. DES CONDITIONS, DE LA FORME ET DE LA DURÉE DE L'INSCRIPTION. Art. 1219. Aucune hypothèque, légale, conventionnelle ou testamentaire, ne peut être opposée aux tiers si elle n'est inscrite au bureau des transcriptions du lieu où sont situés les immeubles hypothéqués, sous les conditions et dans les formes ci-après déterminées. [2134, 2146.] Si le bien dépend, par son étendue, de deux ou plusieurs bureaux et a été hypothéqué en entier, l'inscription est prise au bureau dans la circonscription duquel se trouve la partie principale du domaine; dans les autres bureaux il n'est fait qu'une mention de ladite inscription et de sa date. 1220. Les hypothèques ne peuvent être valablement inscrites sur le débiteur dans les deux cas suivants: 1°  Lorsque, postérieurement à leur naissance, l'insolvabilité du débiteur a été régulièrement déclarée ou est devenue notoire par la saisie de tout ou de la majeure partie de ses biens, sans préjudice des autres limites qui pourraient être apportées par le Code de Commerce au droit d'inscription, en cas de faillite; [v. C. com., 448.] 2°  Lorsque le débiteur est décédé et que sa succession n'est pas acceptée purement et simplement par tous les héritiers appelés à la recueillir. [v. 2146.] Si le bien grevé d'hypothèque a été aliéné, les limites au droit du créancier de s'inscrire sur le tiers détenteur sont établies à la Section v. 1221. Si le créancier n'a pas l'administration de ses biens, l'inscription est prise par son représentant légal ou judiciaire. L'inscription d'hypothèque rentre également dans les droits et devoirs du mandataire général et dans ceux du mandataire spécial chargé de passer l'acte auquel est attachée l'hypothèque légale ou conventionnelle. L'inscription peut être prise aussi, sans mandat du créancier, par un gérant d'affaires agissant pour lui. 1222. L'hypothèque légale de la femme mariée peut être inscrite sur sa demande, sans autorisation de son mari ou de justice, dès l'instant où celui-ci est son débiteur, même conditionnellement, par contrat ou autrement; l'inscription peut être prise sur tout ou partie des immeubles, comme la femme le juge à propos; sauf le droit du mari à la réduction, comme il est dit à l'article 1241. A défaut d'inscription par la femme, le mari doit lui-même, audit cas où il est débiteur, prendre inscription pour elle sur des immeubles libres, s'il se peut, ou incomplètement grevés, et suffisants pour sa garantie. Faute d'avoir été prise par la femme ou par le mari, l'inscription peut l'être par un des parents ou alliés de la femme, même sans mandat, pourvu qu'il n'y ait pas opposition ou renonciation de celle-ci. [Comp. 2135 à 2139.] 1223. L'hypothèque légale du mineur doit être inscrite aux soins et diligence du tuteur, dans les mêmes cas et sous les mêmes conditions que celle de la femme de la part du mari. A défaut d'inscription par les soins du tuteur, elle doit être inscrite à la requête du subrogé-tuteur ou de tout membre du conseil de famille, sous peine de condamnation solidaire aux dommages-intérêts envers le mineur. [Comp. ibid.] L'hypothèque peut aussi être inscrite sur la demande du mineur lui-même, après qu'il a été émancipé. 1224. Les dispositions des deux premiers alinéas de l'article précédent sont applicables à l'hypothèque légale des interdits, soit pour démence, soit par suite de condamnation criminelle. Dans ce dernier cas, l'inscription peut même être requise par un mandataire spécial de l'interdit. 1225. Celui qui requiert l'inscription d'une hypothèque doit justifier comme il suit, près du conservateur, de l'existence de l'hypothèque à son profit ou au profit du créancier qu'il représente: S'il s'agit d'une hypothèque légale de femme mariée, de mineur ou d'interdit, par la preuve du mariage ou de la tutelle d'où résulte l'hypothèque en vertu de la loi; S'il s'agit d'une hypothèque conventionnelle par une expédition de l'acte authentique constitutif de l'hypothèque; [2148, 1er al.] S'il s'agit d'une hypothèque testamentaire, par l'original ou par une copie authentique du testament. Dans tous les cas, si le conservateur conteste les preuves qui lui sont fournies de l'existence de l'hypothèque, ou s'il ne lui est pas justifié suffisamment de l'identité du débiteur avec le propriétaire de l'immeuble sur lequel l'inscription est requise, tel qu'il est porté aux registres, il peut, sous sa reponsabilité, refuser de faire l'inscription, en se conformant aux prescriptions de l'article 1304, pour être statué comme il est dit au même article. 1226. Le requérant présente, en outre, un bordereau en double original portant la désignation précise: 1°  Du créancier, par ses nom, prénom, profession et domicile ou résidence; 2°  Du débiteur, par les même moyens, autant qu'il est possible; 3°  De la cause de l'hypothèque et, s'il s'agit d'une hypothèque autre que l'hypothèque légale, par la nature et par la date du titre constitutif; 4°  De la créance, par la nature du titre, par sa date, par le montant de la somme due, telle qu'elle est portée audit titre, ou présentement évaluée en argent, s'il s'agit d'une créance de valeur indéterminée, et par l'exigibilité de la dette; 5°  Du bien soumis à l'hypothèque, par sa nature et par sa situation. [2148.] Au cas de cession ou de subrogation conventionnelle ou légale, à mentionner en marge d'une inscription antérieure, il suffira de porter sur le bordereau la désignation du nouveau créancier et de son titre. 1227. Si la créance garantie par l'hypothèque légale de la femme mariée, du mineur ou de l'interdit ne résulte pas d'un titre, les bordereaux indiquent, en substance, le fait allégué par le requérant comme cause de la créance et l'évaluation en argent du droit prétendu. 1228. Si le domicile réel du créancier n'est pas dans l'arrondissement où est prise l'inscription, il doit être fait pour lui, dans ladite inscription, élection d'un domicile spécial pour les significations à lui faire à raison de l'hypothèque. Ce domicile peut toujours être changé, sous les mêmes conditions de lieu et de publicité. [2148-1°, 2152.] 1229. Le conservateur, en recevant les pièces sus-énoncées, en donne au requérant un récépissé détaché en sa présence d'un registre à souche et portant le jour de la remise, avec un numéro d'ordre des remises de la même journée, pour assurer l'application de la disposition de l'article 1253. 1230. Si le requérant agit comme héritier, cessionnaire ou subrogé d'un créancier originaire, il peut prendre l'inscription, soit au nom de celui-ci seul, soit en son propre nom et au nom de l'ancien créancier réunis. Si l'inscription est requise par un mandataire ou un gérant d'affaires du créancier, il est fait mention spéciale de ses nom et qualité, conjointement avec ceux du mandant ou du maître. 1231. Si le débiteur est décédé, l'inscription peut être prise sur lui ou sur tous ses héritiers cumulativement, au choix de l'inscrivant. [2149.] Dans le cas où, par le partage de la succession, l'immeuble grevé est échu à un seul héritier, l'inscription peut être prise sur celui-là seul. Si l'hypothèque a été constituée pour la dette d'un tiers, l'inscription est prise sur le constituant. 1232. Lorsque le conservateur a porté sur le registre des inscriptions le contenu des bordereaux, il certifie sur chacun le fait, le lieu et la date de l'inscription, avec l'indication du volume et du folio où elle se trouve, ainsi que du numéro d'ordre de la présentation porté sur le registre des récépissés; puis, il frappe les deux bordereaux conjointement d'un même timbre sur chaque feuillet. L'un des bordereaux est rendu au requérant avec le titre justificatif de l'hypothèque; l'autre est gardé par le conservateur pour sa garantie. Un Règlement pourra décider que les bordereaux ainsi visés et timbrés et réunis par année, constitueront les originaux des inscriptions et qu'un registre en contiendra seulement le répertoire. 1233. La nullité de l'inscription peut être prononcée pour omissions, insuffisances ou inexactitudes dans les bordereaux, des mentions ci-dessus prescrites, sur la demande des tiers qui justifient d'un préjudice résultant pour eux de ce que l'inscription incomplète leur a laissé ignorer quelque élément substantiel de l'hypothèque qu'ils avaient intérêt à connaître. 1234. Les inscriptions d'hypothèques, légales, conventionnelles ou testamentaires, ne conservent leur effet que pendant trente ans, après lesquels elles sont périmées, lors même que la prescription de la créance a été interrompue ou suspendue. Ce délai court contre les incapables, sauf leur recours contre leur représentant. Toutefois, si l'inscription est renouvelée avant l'expiration des trente ans, avec relation précise à la date de la précédente, elle conserve à l'hypothèque son rang à la même date. Le renouvellement après la péremption ne vaut qu'à sa date comme une inscription ordinaire. [v. 2154; C. it., 2001.] 1235. Le renouvellement de l'inscription dans le délai de trente ans est permis, nonobstant la faillite, la déconfiture ou le décès du débiteur survenus depuis l'inscription primitive; mais les mêmes événements empêchent le renouvellement de l'inscription périmée, comme il est dit à l'article 1220. 1236. Le conservateur opère le renouvellement sur la production d'une réquisition en double original se référant à la précédente inscription; l'un des originaux est rendu au requérant avec le timbre et la déclaration du renouvellement fait et de sa date. 1237. Les frais d'inscription sont, par moitié, à la charge du débiteur et du créancier, si la créance a été acquise à titre onéreux et s'il n'y a convention contraire. Les frais du renouvellement sont à la charge du créancier seul. [S'ecùs 2155.] 1238. Les contestations relatives aux inscriptions sont portées au tribunal de la situation du bien hypothéqué et les citations ou notifications au créancier sont faites au domicile élu dans l'inscription. [2156, 2159.] § II. DE LA RADIATION, DE LA RÉDUCTION ET DE LA RECTIFICATION DES INSCRIPTIONS. Art. 1239. Il y a lieu à radiation de l'inscription: 1°  Lorsque la créance à laquelle elle se rapporte est nulle ou annulable ou lorsqu'elle se trouve éteinte en totalité; 2°  Lorsque l'hypothèque en vertu de laquelle ladite inscription a été prise n'a pas été valablement constituée ou n'existe pas d'après la loi; [2160.] 3°  Lorsque l'inscription elle-même est annulable, en vertu de l'article 1233. Le tout, sans préjudice de la radiation de l'inscription sur certains immeubles, comme il est dit à l'article 1245. 1240. La radiation de l'inscription doit être prononcée en justice, sur la demande du débiteur ou de ses ayant-cause, à moins qu'elle ne soit autorisée par le créancier en la forme réglée ci-après. [2157.] 1241. Lorsque l'hypothèque légale de la femme mariée n'a pas été limitée à certains immeubles, ou lorsque la créance n'a pas été évaluée à une somme fixée, soit par le contrat de mariage, soit par une convention spéciale entre les époux, et qu'il a été pris des inscriptions sur plus d'immeubles qu'il n'est nécessaire à la garantie éventuelle de la femme, ou pour une somme plus forte que la juste évaluation de la créance, le mari ou ses ayant-cause peuvent demander en justice la réduction desdites inscriptions, soit quant aux immeubles, soit quant à la somme évaluée. [2144.] 1242. Pareillement, le tuteur ou ses ayant-cause peuvent demander la réduction des inscriptions prises au-delà de ce qui est nécessaire à la garantie du mineur ou de l'interdit, lorsque la limitation de l'hypothèque à certains immeubles ou l'évaluation de la créance à une somme fixe n'a pas été faite par délibération du conseil de tutelle, soit au moment de l'entrée en fonctions du tuteur, soit postérieurement. [2143.] 1243. Lorsque l'hypothèque est conventionnelle, le débiteur ne peut en demender la réduction en justice que si, étant générale sur les biens présents, elle est excessive, comme il est prévu à l'article 1213. Le débiteur peut, dans tous les cas, demander la réduction de l'évaluation de la créance faite par le créancier dans l'inscription, à défaut d'évaluation dans le titre constitutif ou par acte séparé. [Secùs 2160, in fine; comp. 2163, 2164.] 1244. L'hypothèque testamentaire peut être également réduite, sur la demande de l'héritier, lorsqu'elle a été constituée par le testateur sans limitation quant aux immeubles de la succession ou sans évaluation quant à la créance. [Comp. 2161.] 1244 bis. Il y a encore lieu à la réduction de l'inscription des trois sortes d'hypothèques, mais seulement quant à la somme inscrite, si la dette est éteinte pour plus de moitié. Le débiteur peut toujours faire mentionner à ses frais, en marge de l'inscription, les payements partiels quelconques qu'il a faits. 1245. Le jugement ou la convention qui fait droit, en tout ou en partie, à la demande du débiteur, indique les immeubles qui sont affranchis de l'hypothèque, s'il y a lieu, ou la somme à laquelle l'évaluation est ramenée. Au premier cas, l'inscription prise sur les immeubles dégrevés est radiée; au second cas, elle est réduite. [1245, 2e al.] (v. Additions.) 1246. Dans le cas de réduction de l'inscription à certains immeubles, d'après les articles précédents, si lesdits immeubles deviennent, même par cause fortuite ou par force majeure, insuffisants à la garantie du créancier, celui-ci peut demander un supplément d'hypothèque. [Comp. 2131.] 1247. La radiation et la réduction de l'inscription ne peuvent être consenties par le créancier que dans un acte en forme authentique. 1248. Si la radiation ou la réduction volontaire est fondée sur l'extinction totale ou partielle de la dette, il suffit pour la consentir que le créancier ait la capacité d'en recevoir ou d'en reconnaître le payement; Si elle est fondée sur une des autres causes portées à l'article 1239, il faut au créancier la capacité de transiger; Si elle a le caractère d'une renonciation gratuite à l'hypothèque ou d'une remise conventionnelle, il est nécessaire que le créancier ait la capacité de disposer gratuitement de la créance. [2157.] 1249. La procuration à l'effet de consentir la radiation ou la réduction de l'inscription doit également être donnée par un acte authentique. Toutefois, si la radiation ou la réduction est fondée sur l'extinction totale ou partielle de la dette, elle peut être consentie par tout mandataire qui avait le pouvoir d'intervenir à la libération du débiteur. S'il y a transaction ou renonciation gratuite, la procuration doit être expresse. 1250. La radiation et la réduction sont effectuées par la mention en marge de l'incription, soit de la convention qui les a autorisées, soit du jugement qui les a ordonnées. Le conservateur n'opère ladite mention que sur la production d'une expédition authentique de l'acte notarié ou du jugement; dans ce dernier cas, il faut qu'il ait été certifié par le greffier, sur l'expédition, que le jugement est devenu inattaquable. [2158.] Les articles 1225, dernier alinéa et 1304, sont applicables au refus du conservateur et à sa responsabilité. 1251. Si la radiation ou la réduction est annulée ou résolue ultérieurement, par une convention ou un jugement, ladite convention ou ledit jugement sont mentionnés à leur tour, en marge de l'inscription, laquelle reprend son effet à l'égard des anciens créanciers, mais sans pouvoir être opposée aux tiers qui ont acquis dans l'intervalle des droits sur l'immeuble et les ont inscrits avant la seconde publication. 1252. Si l'inscription première ou renouvelée, la radiation ou la réduction, présente des inexactitudes ou des omissions insuffisantes pour la faire annuler, elle est rectifiée par jugement, à défaut d'accord des parties. Ledit jugement ou l'acte portant ledit accord est mentionné en marge de l'inscription ou de la mention rectifiée, sans effet rétroactif au préjudice des tiers. SECTION IV. DE L'EFFET ET DU RANG DES HYPOTHÈQUES ENTRE LES CRÉANCIERS. Art. 1253. Tout créancier hypothécaire valablement inscrit sur un immeuble est préférable aux créanciers chirographaires, en tant qu'il peut être utilement colloqué sur le prix dudit immeuble. Entre les créanciers ayant hypothèque, légale, conventionnelle ou testamentaire, le rang de collocation se détermine par l'antériorité respective des inscriptions, lors même que deux ou plusieurs inscriptions intéressant des créanciers différents sont prises le même jour; sauf l'action en responsabilité contre le conservateur, s'il n'a pas observé l'ordre numérique des remises, conformément à l'article 1229. [Secùs 2147; comp. C. it., 2008, 2009.] 1254. L'inscription assure aux intérêts de la créance et aux autres accessoires périodiques qui y sont portés, le même rang que pour le principal mais seulement pour les deux dernières années échues; sauf le droit pour le créancier de prendre des inscriptions postérieures pour les intérêts plus anciens, mais pour ne valoir qu'à la date desdites inscriptions. [v. 2151.] 1255. Le rang de l'hypothèque est également déterminé par l'inscription, quoique la créance soit conditionnelle ou naisse de versements successifs, comme dans l'ouverture de crédit. [C. it. 2007.] 1256. Lorsqu'un créancier a hypothèque sur plusieurs immeubles dont les divers prix sont liquidés en même temps, sa créance doit être répartie sur tous proportionnellement à leur importance. En cas de liquidations successives, si ledit créancier est payé en entier sur le prix de l'un d'eux et qu'il en résulte une perte pour un ou plusieurs autres créanciers n'ayant hypothèque qu'après lui sur ledit immeuble, ceux-ci sont subrogés de droit à l'hypothèque du créancier désintéressé, pour leur propre créance et à leur rang respectif, sur les autres immeubles, pour la portion contributoire afférente auxdits immeubles dans la créance qui les a primés. [C. it. 2011.] 1257. Ladite subrogation produit son effet contre les créanciers qui sont inscrits sur lesdits immeubles à la suite de celui dont les droits sont ainsi transmis. Si les subrogés font mentionner leur subrogation en marge des inscriptions prises, ils doivent être nominativement compris dans la procédure d'ordre, et aucune radiation ou réduction de l'inscription ne peut avoir lieu sans leur consentement. Si l'hypothèque du créancier désintéressé n'a pas été inscrite sur les autres immeubles qui lui sont affectés, l'inscription peut être prise et la susdite mention faite aux mêmes fins par les subrogés. [Ibid.] 1258. Tout créancier hypothécaire capable de disposer de sa créance ou dûment représenté ou autorisé à cet effet, peut renoncer à son hypothèque ou seulement à son rang, en faveur d'un autre créancier, soit hypothécaire, soit chirographaire, du même débiteur, sans préjudice de ce qui est dit, au sujet de la novation, par les articles 522 et 525. Si une créance hypothécaire a été successivement l'objet de cessions, renonciations ou subrogations, la priorité appartient à celui des ayant-droit qui a le premier publié son acquisition par la mention de l'acte constitutif de son droit en marge de l'inscription déjà faite, ou par l'inscription elle-même, si elle n'avait pas encore été prise. [comp. L. 23 mars 1855, art. 9.] 1259. L'article 1191, dernier alinéa, est applicable aux cas des deux articles précédents. 1260. La connaissance, même avouée, qu'aurait un créancier hypothécaire ou chirographaire d'une hypothèque non inscrite, ne le prive pas du droit de se prévaloir du défaut d'inscription. 1261. Les créanciers hypothécaires qui ne sont pas désintéressés en entier par le produit de la vente des immeubles demeurent créanciers chirographaires pour ce qui leur reste dû. Si la distribution de tout ou partie des valeurs mobilières précède la vente des immeubles, les créanciers hypothécaires y figurent provisoirement, comme créanciers chirographaires, pour le montant intégral de leur créance. Lorsqu'ensuite a lieu la distribution du prix des immeubles hypothéqués, les mêmes créanciers y sont colloqués comme s'ils n'avaient rien reçu des valeurs mobilières; mais ceux qui doivent ainsi être payés entièrement ne touchent le montant de leur collocation hypothécaire que sous la déduction des sommes qu'ils ont reçues comme créanciers chirographires, lesquelles sommes sont restituées à la masse mobilière. A l'égard de ceux qui ne peuvent être payés hypothécairement qu'en partie, leur droit sur la masse mobilière est réglé définitivement d'après la somme pour laquelle ils ne viennent pas utilement à l'ordre, et ce qu'ils ont touché au-delà de cette proportion est retenu sur leur collocation hypothécaire et restitué à la masse mobilière. Les sommes ainsi restituées sont l'objet d'une nouvelle répartition entre les créanciers purement chirographaires et ceux des créanciers hypothécaires qui n'ont pu être colloqués à l'ordre ou ne l'ont été que pour une partie de leur créance. [comp. c. com. fr., art. 552 à 556.] SECTION V. DE L'EFFET DES HYPOTHÈQUES CONTRE LES TIERS DÉTENTEURS, OU DU DROIT DE SUITE. DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES. Art. 1262. Lorsqu'un immeuble hypothéqué a été, soit aliéné en tout ou en partie, soit grevé d'usufruit ou d'un autre droit réel, tout créancier hypothécaire inscrit sur l'immeuble avant la transcription de l'acte constitutif de l'aliénation ou du démembrement de la propriété conserve, à l'encontre du tiers acquéreur, le droit de demander le payement de ce qui lui est dû et, subsidiairement, celui de poursuivre l'expropriation dudit immeuble, comme s'il n'était pas aliéné ou démembré, pour être payé sur le prix, à son rang d'hypothèque. [2166 et 2167.] Toutefois, les baux faits ou renouvelés pour la durée mentionnée aux articles 126 et 127 doivent être respectés par les créanciers déjà inscrits. 1263. Si l'hypothèque porte sur un démembrement de la propriété et que le débiteur ait renoncé à son droit, le créancier inscrit avant que la renonciation ait été transcrite conserve le droit de suite nonobstant ladite renonciation. 1264. Les hypothèques ne sont opposables aux créanciers chirographaires qui ont saisi et fait vendre l'immeuble hypothéqué que si l'inscription en a été prise avant la transcription de l'adjudication; sans préjudice de la nullité des inscriptions prises dans les deux cas prévus à l'article 1220. [L. du 23 mars 1855, art. 1er-4°, art. 3 et 6.] 1265. La faillite, la déconfiture ou le décès du tiers détenteur ne mettent pas obstacle à l'inscription de l'hypothèque jusqu'à la transcription de son titre d'acquisition. 1266. Le tiers détenteur peut, suivant les cas: 1°  Payer toutes les dettes hypothécaires, 2°  Purger, 3°  Opposer l'exception de discussion, 4°  Délaisser, 5°  Subir l'expropriation. § Ier. DU PAYEMENT DES DETTES HYPOTHÉCAIRES. Art. 1267. Le tiers détenteur ne peut être exproprié, ni troublé, s'il paye les dettes hypothécaires au fur et à mesure de leur échéance. [2167.] 1268. Soit qu'il ait payé les dettes, en tout ou en partie, il est subrogé aux autres hypothèques, sûretés et avantages des créanciers qu'il a désintéressés, conformément aux articles 504-1°, et 505-3° et 4°. Il acquiert même la subrogation éventuelle aux hypothèques grevant l'immeuble qu'il détient, pour le cas où l'expropriation serait poursuivie par des créanciers qu'il n'a pas désintéressés. [1251-2°.] § II. DE LA PURGE. Art. 1269. Le tiers détenteur peut, sans payer toutes les dettes hypothécaires inscrites, en affranchir l'immeuble, en payant aux créanciers dans l'ordre où ils sont inscrits, ou en consignant en leur faveur le prix de son acquisition ou la valeur estimative de l'immeuble ou une somme supérieure, le tout accepté par eux, expressément ou tacitement, après les offres et la procédure dite “de purge, ” telles qu'elles sont réglées ci-après. 1270. L'acquéreur sous condition suspensive ne peut purger, tant que son droit n'est pas consolidé par l'accomplissement de la condition. L'acquéreur sous condition résolutoire peut purger, même avant que son droit soit consolidé par la défaillance de la condition. Dans ce cas, si les offres du tiers détenteur ont été acceptées et si, après la radiation des hypothèques sur lesquelles les fonds ont manqué, l'acquisition du tiers détenteur est résolue, les inscriptions radiées sont rétablies conformément à l'article 1251. Si, dans le même cas, les offres n'ayant pas été acceptées, l'immeuble est vendu aux enchères, comme il est réglé ci-après, l'adjudication prononcée, soit au profit du tiers détenteur, soit profit d'un autre, demeure désormais à l'abri de l'action résolutoire. 1271. Le droit de purger les hypothèques n'appartient pas au tiers détenteur tenu personnellement de la dette hypothécaire, soit principalement, soit comme caution. Il n'appartient pas non plus à un codébiteur conjoint du constituant, à moins qu'il n'ait payé sa part dans la dette, avant les premières poursuites hypothécaires; Ni, dans aucun cas, à l'un héritiers du débiteur, lors même qu'il a payé sa part héréditaire de la dette; Ni à celui ou à l'héritier de celui qui a constitué hypothèque sur son bien pour la dette d'autrui. 1272. Ne donnent pas lieu à la purge les adjudications publiques sur saisie immobilière, sur surenchère ou sur poursuites hypothécaires, ou autres auxquelles les créanciers hypothécaires sont appelés à intervenir. [C. proc. civ., 692, 708, 717-7e al., 965, 973-6e al., 988.] Il en est de même des expropriations pour cause d'utilité publique; [L. 3 mai 1841, art. 17] Sans préjudice du droit des créanciers hypothécaires d'être colloqués à leur rang sur le prix d'adjudication ou sur l'indemnité d'expropriation. [Ibid.] 1273. Il n'y a pas lieu à la purge des droits d'usage, d'habitation et de servitudes foncières: les créanciers ayant hypothèque sur les immeubles grevés de ces droits par le débiteur peuvent en poursuivre la vente contre celui-ci, sans avoir égard aux droits ainsi conférés. Il en est de même des baux faits par le débiteur au-delà des limites mentionnées à l'article 1262. 1274. Le tiers détenteur peut purger à toute époque, tant qu'il n'est pas poursuivi par les créanciers et, au plus tard, dans le mois après la sommation de payer ou de délaisser, à peine de déchéance. Toutefois, la déchéance n'a pas lieu de plein droit: elle doit être demandée au tribunal qui peut ne pas la prononcer et accorder un délai supplémentaire au tiers détenteur, s'il justifie d'empêchements légitimes et si les créanciers ne doivent pas éprouver un préjudice sérieux du retard. La déchéance ne peut non plus être prononcée si, des offres à fin de purge ayant été faites tardivement, les créanciers y ont répondu ou ont laisse s'écouler, sans demander ladite déchéance, le délai d'un mois qui leur est accordé par l'article 1278-2° pour répondre aux offres [2183, 1er al.] 1275. Comme préliminaire de la purge, le tiers détenteur doit faire transcrire son titre, pour consolider son droit à l'égard des tiers et pour révéler le privilége de son aliénateur ou copartageant, conformément aux articles 1184 et 1185. [2181.] Après quoi, il se fait délivrer par le conservateur un état des priviléges et des hypothèques qui grèvent son immeuble. 1276. Dans le susdit délai d'un mois, le tiers détenteur doit notifier à tous les créanciers inscrits et à ceux à l'égard desquels la transcription vaut inscription, conformément aux articles 1124, 1184 et 1185: 1°  Un exposé de son titre d'acquisition, indiquant sa nature, sa date et celle de la transcription, la désignation précise de l'aliénateur et celle de l'acquéreur, celle de l'immeuble sur lequel le droit est cédé, le prix et les charges de la cession ou l'évaluation du droit, s'il a été acquis par échange, donation ou legs; [2183.] 2°  Un tableau des inscriptions, présentant, pour chacune, sa date et le folio du registre où elle est portée, le nom et le domicile élu du créancier et le montant de la somme inscrite en principal; [ibid.] 3°  Une élection de domicile pour le tiers détenteur, dans l'arrondissement du tribunal civil de la situation de l'immeuble; 4°  Une déclaration que le tiers détenteur est prêt, à défaut de surenchère par lesdits créanciers, faite conformément à la loi et dans le délai d'un mois augmenté du délai des distances, soit à leur payer, dans l'ordre de leur inscription, le prix ou l'évaluation de l'immeuble ou même une somme supérieure fixée par lui, soit à consigner lesdites sommes à leur nom, sans distinction des créances échues, à terme ou conditionnelles; sauf ce qui est dit à l'article 1134 à l'égard du créancier nanti. [2184.] 1276 bis. Si parmi les créanciers inscrits se trouve un aliénateur ou un copartageant ayant un privilége, même dégénéré en hypothèque légale, aux termes des articles 1187 et 1188, la déclaration prescrite au n° 4 de l'article précédent doit être accompagnée d'une sommation audit créancier d'avoir à déclarer, à son tour, dans le même délai, s'il entend user du droit de résolution qui lui appartient. 1277. Si l'acte d'aliénation comprend plusieurs immeubles dont quelques-uns non hypothéqués, ou des meubles non immobilisés, l'acquéreur ne doit faire d'offres que pour l'immeuble hypothéqué et la surenchère ne doit porter que sur ladite offre. [2192.] 1278. Tout créancier inscrit qui n'accepte pas l'offre ci-dessus prescrite doit requérir la mise aux enchères de l'immeuble ou du droit cédé, dans les formes, dans les délais, et sous les conditions ci-après: 1°  La réquisition doit, à peine de nullité, être accompagnée d'une surenchère d'un dixième en sus de la somme offerte, avec déclaration que le requérant est prêt à donner caution ou garantie suffisante pour le prix total ainsi augmenté et pour les frais; le tout est signé, sur l'original, par le requérant ou son fondé de pouvoir spécial; 2°  Ladite réquisition doit, à peine de nullité également, être signifiée au tiers détenteur, au domicile par lui élu, dans le mois de la notification des offres, plus autant de jours qu'il y a de fois dix ris, pour l'aller et le retour des pièces, entre le domicile élu par le créancier et son domicile réel au Japon; 3°  Pareille signification doit être faite au précédent propriétaire, débiteur principal, dans le même délai, augmenté de même à raison de la distance de son domicile réel; [2185; c. pr. civ., 892 et s.] 4°  Si l'hypothèque sur le fonds aliéné a été constituée par un autre que le débiteur, la signification doit être faite aussi à ce dernier, dans le même délai. Lesdits délais se confondent, jusqu'à concurrence du plus court. 1278 bis. L'aliénateur ou le copartageant qui a surenchéri, comme il est prévu à l'article précédent, sans réserver l'exercice de son action résolutoire est considéré comme y ayant renoncé. S'il veut conserver ladite action, il doit, à peine de nullité, le notifier au tiers détenteur dans le délai même qui lui est accordé pour surenchérir; sans préjudice d'une pareille notification à faire au précédent propriétaire, comme débiteur principal. 1279. Lorsqu'une surenchère valable a été signifiée dans les formes et le délai prescrits, le surenchérisseur ne peut la rétracter sans le consentement des autres créanciers inscrits, lesquels peuvent poursuivre la vente publique sur ladite surenchère. [2190]. S'il y a vente publique, les articles 1290 et suivants ci-après sont applicables. 1280. Si aucun créancier n'a requis valablement la mise aux enchères, l'immeuble demeure purgé par le payement du prix, dans l'ordre amiable ou judiciaire ouvert entre les créanciers, ou par la consignation au nom des ayant-droit, sans offres réelles préalables. [2186; c. pr. civ., 751, 1er al., 752 et 777, 5e al.] Dans ce cas, toutes les hypothèques sont radiées, même celles sur lesquelles les fonds ont manqué. [Ib., 751, 5e al., 769, 771.] 1281. Après la purge ainsi effectuée, le tiers détenteur a son recours en garantie contre son cédant, suivant les distinctions ci-après: Au cas de vente, pour tout ce qu'il a offert et payé au-delà de son prix d'acquisition; Au cas d'échange ou autre contrat onéreux, pour tout ce qu'il a payé au-delà de ses engagements envers le cédant, s'il ne se fait pas restituer la contre-valeur par lui fournie; Au cas de donation, entre-vifs ou testamentaire, pour tout ce qu'il a payé à la décharge du donateur; Et, dans tous les cas, pour les frais de la procédure par lui supportés. [v. 2178.] § III. DE L'EXCEPTION DE DISCUSSION. Art. 1282. Le tiers détenteur qui n'est pas tenu de la dette hypothécaire, personnellement et principalement, peut requérir le créancier poursuivant de discuter et faire vendre préalablement les autres immeubles hypothéqués à la même dette, pourvu: 1°  Qu'ils soient situés dans le ressort de la cour d'appel du lieu où le payement doit se faire; 2°  Qu'ils appartiennent encore au débiteur principal; 3°  Qu'ils ne soient pas litigieux; [2170.] 4°  Qu'ils ne soient pas manifestement insuffisants à procurer au créancier un payement intégral, eu égard à son rang d'inscription et à leur valeur. 1283. Le tiers détenteur qui aurait renoncé au bénéfice de discussion qui lui appartenait en qualité de caution, d'après les articles 1020 à 1023, n'est pas privé de l'exception de discussion hypothécaire. [comp. 2170.] 1284. Celui qui a hypothéqué son immeuble à la dette d'autrui et son héritier peuvent opposer l'exception de discussion. Il en est de même de celui des débiteurs conjoints ou des héritiers du débiteur principal qui a payé sa part de la dette avant les premières poursuites. § IV. DU DÉLAISSEMENT. Art. 1285. Le tiers détenteur peut, à toute époque de la procédure d'expropriation, délaisser l'immeuble objet de la poursuite. Par le délaissement, le tiers détenteur abandonne seulement la détention aux créanciers poursuivants: il conserve la propriété et la possession civile de l'immeuble, lequel demeure à ses risques. 1286. Le délaissement ne peut être fait que par le tiers détenteur qui n'est pas personnellement obligé à la dette, soit principalement, soit comme caution. [2172.] Il peut être fait par la caution réelle et par ceux des codébiteurs conjoints ou héritiers du débiteur qui ont payé leur part dans la dette, même au cours des poursuites. 1287. Pour délaisser valablement, il suffit d'avoir la capacité de figurer comme défendeur à la poursuite en expropriation, soit en son propre nom, soit comme représentant légal, judiciaire ou conventionnel du tiers détenteur. [Secùs 2172.] 1288. Le délaissement se fait au greffe du tribunal de la situation du bien hypothéqué, par une déclaration signée du délaissant ou de son mandataire spécial et notifiée au créancier poursuivant. A la diligence soit de celui-ci, soit du tiers détenteur ou de tout autre intéressé, le tribunal nomme un curateur au délaissement, sur lequel l'expropriation est poursuivie. [2174.] 1289. Le tiers détenteur ou son représentant peut toujours, jusqu'à l'adjudication, rétracter le délaissement, en la forme dans laquelle il a été fait, à charge de payer ou de consigner, dans le mois, le montant de toutes les dettes des créanciers poursuivants et les frais faits jusque-là; sans préjudice du droit de poursuite des autres créanciers, et sauf le droit de purger à leur égard, si les délais de la purge ne sont pas écoulés. [v. 2173.] § V. DE LA VENTE AUX ENCHÈRES ET DE L'EXPROPRIATION. Art. 1290. Si le tiers détenteur n'a ni payé, ni délaissé, ni proposé la purge, dans les délais ci-dessus fixés, les créanciers hypothécaires peuvent poursuivre son expropriation de l'immeuble par la vente aux enchères, dans les formes et avec la publicité réglées par le Code de Procédure civile. [2213, 2217.] Il en est de même si, les offres à fin de purge n'ayant pas été acceptées, il y a eu surenchère d'un dixième. [2187.] 1290 bis. Si un aliénateur précédent ou un copartageant a déclaré vouloir, aux termes de l'article 1278 bis, exercer son action résolutoire, de préférence à son privilége ou à son hythèque légale, il doit poursuivre le jugement de ladite action avant la mise aux enchères, dans le délai qui sera fixé à cet effet par le tribunal, à la requête du tiers détenteur. [v. C. pr. civ. fr., 692-1° et 717 2e à 5e al.] 1291. Dans tous les cas, si la résolution n'a pas été demandée ou n'est pas admise, le tiers détenteur peut, lors de la mise aux enchères, se porter enchérisseur. Si l'adjudication est prononcée en sa faveur, le jugement d'adjudication est seulement mentionné en marge de la transcription de son titre originaire, comme confirmatif du même titre. [2189.] 1292. Si l'adjudication est prononcée en faveur d'un autre que le tiers détenteur, le jugement est transcrit principalement, comme acte translatif de propriété, et il en est fait, en outre, mention en marge de la précédente transcription. [L. du 23 mars 1855, art. 1er-4°.] 1293. Dans le même cas ou l'adjudication est prononcée au profit d'un autre que le tiers détenteur, les droits de servitude qui existaient entre le fonds adjugé et un autre fonds appartenant au tiers détenteur renaissent, activement et passivement, nonobstant la confusion antérieure, laquelle se trouve résolue. [2177, 1er al.] Il en est de même des droits d'usufruit, de bail et autres démembrements de la propriété qui appartenaient au tiers détenteur avant son acquisition. 1294. Dans l'un et l'autre cas d'adjudication, si le tiers détenteur avait lui-même une hypothèque inscrite sur l'immeuble adjugé, il est colloqué à son rang. 1295. Une fois le prix d'adjudication payé aux créanciers, suivant l'ordre des inscriptions, s'il reste un excédant libre, il appartient au tiers détenteur, adjudicataire en non. Si, avant l'adjudication, il avait été pris par ses propres créanciers des inscriptions hypothécaires sur l'immeuble, lesdits créanciers sont colloqués à la suite de ceux inscrits sur les précédents propriétaires. [2177, 2e al.] 1296. Si le fonds hypothéqué a subi des détériorations du fait du tiers détenteur, pendant sa possession, ou si celui-ci a fait sur le fonds des dépenses nécessaires ou utiles, il en est fait raison, entre lui et les créanciers hypothécaires. [2175.] 1297. A l'égard des fruits, le tiers détenteur n'en doit compte aux créanciers qu'à partir de la sommation de délaisser ou de payer qui lui a été faite. [2176.] 1298. Dans tous les cas, après le payement ou la consignation du prix, toutes les hypothèques inscrites, même celles sur lesquelles les fonds ont manqué, sont radiées et l'immeuble en demeure purgé. [C. pr. civ., 777, 1er al.] 1299. Après l'adjudication, le tiers détenteur a son recours en garantie contre son cédant, comme il suit: S'il s'est rendu adjudicataire, il est indemnisé comme au cas où ses offres à fin de purge sont acceptées, ainsi qu'il est dit à l'article 1281; Si l'adjudication a été prononcée en faveur d'un étranger, il a droit à la garantie d'éviction, d'après le droit commun, suivant que le contrat était onéreux ou gratuit: 1°  S'il y avait eu vente ou autre acquisition à titre onéreux et que le prix d'adjudication ait dépassé le prix primitif ou la contre-valeur de l'acquisition, cette différence figure comme plus-value dans les dommages-intérêts auxquels il a droit; 2°  Au cas de donation entre-vifs ou testamentaire, il n'est indemnisé par le donateur ou son héritier que dans la mesure où l'adjudication a libéré celui-ci de ses dettes hypothécaires. Les frais de la procédure lui sont remboursés par l'adjudicataire. [v. 2191.] SECTION VI. DE LA RESPONSABILITÉ DES CONSERVATEURS. Art. 1300. Indépendamment de ce qui est dit du registre à souche prescrit à l'article 1226, un Règlement spécial détermine le nombre, la nature et le mode de tenue des registres de transcriptions et d'inscriptions, ainsi que les amendes auxquelles sont soumis les conservateurs, au cas de contravention à leurs obligations. 1301. L'article 375, sur la responsablité civile des conservateurs des registres de transcriptions, est applicable à leurs omissions ou inexactitudes en matière d'inscription d'hypothèque. [2196, 2197.] 1302. Si le conservateur a omis une ou plusieurs inscriptions dans le certificat ou état des inscriptions délivré au tiers détenteur depuis la transcription de son titre, et si, par suite de cette omission, les créanciers inscrits n'ont pas été compris dans les offres de purge ou dans la procédure d'adjudication, l'immeuble n'en demeure pas moins purgé desdites hypothèques. [2198.] 1303. Tant que les délais fixés par l'article 1278 pour surenchérir aux offres de purge ne sont pas expirés, les créanciers omis peuvent dénoncer au tiers détenteur l'omission dont ils sont l'objet, lui demander communication des offres et surenchérir, ou même se faire comprendre dans la procédure d'expropriation, si elle n'est pas terminée, mais sans pouvoir la retarder. Dans tous les cas, ils peuvent se faire comprendre dans l'ordre ouvert à l'amiable ou judiciairement, tant qu'il n'a pas été clos [2198.] Le tout, sans préjudice de leur recours contre le conservateur, pour le dommage qu'ils justifient résulter pour eux de son omission. Le conservateur a lui-même recours contre le débiteur principal ou ses cautions, pour ce qu'il a ainsi payé à leur décharge. 1304. Le conservateur ne peut refuser de faire une transcription, une inscription ou une mention en marge, à moins qu'il n'en soit irrégulièrement requis ou que les pièces justificatives exigées par la loi ne lui soient pas présentées, avec le montant des frais de rédaction et autres qu'il est autorisé à percevoir. En cas de refus, le conservateur est tenu de délivrer, même d'office, une reconnaissance de la demande et une déclaration des motifs de son refus. La partie intéressée peut, sur la présentation de cette pièce, se pourvoir devant le tribunal civil du lieu, lequel doit statuer à bref délai, tant sur la validité du refus que sur la responsabilité du conservateur [v. 2199.] SECTION VII. DE L'EXTINCTION DES HYPOTHÈQUES. Art. 1305. L'hypothèque s'éteint: 1°  Par l'extinction totale et définitive de l'obligation principale, sauf ce qui est dit, au cas de novation, par l'article 525; 2°  Par la renonciation du créancier à l'hypothèque; 3°  Par la prescription; 4°  Par la purge résultant des offres, acceptées par le créancier et suivies du payement ou de la consignation des sommes offertes, comme il est dit à l'article 1280; 5°  Par l'adjudication suivie du payement ou de la consignation, conformément aux articles 1272 et 1298; 6°  Par la perte totale de l'immeuble hypothéqué, sauf le transfert du droit du créancier sur l'indemnité à laquelle la perte peut donner lieu, conformément à l'article 1207; [1280.] 7°  Par l'expropriation pour cause d'utilité publique, sauf le payement de l'indemnité aux créanciers hypothécaires. [L. 3. mai 1841, art. 17.] 1306. Si l'extinction de l'obligation a été annulée, résolue ou révoquée par une cause légale et reconnue en justice, l'hypothèque est rétablie à son rang primitif, quoique l'inscription en ait été radiée; Toutefois, elle ne sera pas exercée au préjudice des créanciers qui ont pris inscription postérieurement à la radiation et antérieurement à une nouvelle inscription ou à la mention du jugement qui l'a rétablie, en marge de l'inscription précédente. 1307. La renonciation à l'hypothèque ne peut être faite par le créancier que s'il a la capacité de disposer de la créance elle-même, à titre onéreux ou gratuit, suivant les cas. Il en est de même si le créancier ne renonce qu'à son rang d'hypothèque. Lorsque le créancier est intervenu à l'aliénation de l'immeuble hypothéqué, conjointement avec le cédant, il n'est considéré comme ayant renoncé à son hypothèque que par rapport au droit de suite, et seulement lorsque son intervention n'était pas requise par la loi à un titre spécial quelconque. 1308. La prescription de l'hypothèque ne s'accomplit qu'avec la prescription de la créance elle-même, lorsque l'immeuble est resté dans les biens du débiteur. [2180.] Dans le même cas, les actes qui interrompent et les causes qui suspendent le cours de la prescription à l'égard de la créance produisent le même effet à l'égard de l'hypothèque. 1309. Si l'immeuble hypothéqué a été aliéné par le débiteur, en même temps propriétaire, et est possédé par l'acquéreur ou ses ayant-cause, l'hypothèque inscrite ne s'éteint que par la prescription de trente ans, sans trouble résultant des actions hypothécaires, à compter du jour où l'acquéreur a transcrit son titre; sans préjudice du cas où la créance elle-même s'éteindrait auparavant par la prescription libératoire. 1310. Si l'immeuble a été cédé par un autre que le vrai propriétaire, le possesseur prescrit contre les créanciers hypothécaires inscrits, par le laps de temps qui lui est nécessaire pour prescrire contre le propriétaire, suivant qu'il est de bonne ou de mauvaise foi à l'égard de l'hypothèque. Il en est de même pour celui qui est possesseur de l'immeuble sans titre. [ibid.] 1311. La prescription extinctive de l'hypothèque pour le tiers détenteur n'est pas interrompue par le renouvellement de l'inscription, mais seulement par la reconnaissance volontaire de l'hypothèque par le possesseur, par la sommation à lui faite de délaisser ou de payer, telle qu'elle est réglée à l'article 1274, et par tous autres actes judiciaires ou extrajudiciaires ou tendant à donner effet au droit d'hypothèque, tels qu'ils sont réglés, en général, par les articles 1446 et suivants. [ibid.] 1312. La prescription contre l'hypothèque par le tiers détenteur n'est pas suspendue par le terme ou la condition qui affecte la créance; sauf au créancier à conserver son droit comme il est prévu à l'article 1464. Les autres causes de suspension prévues aux articles 1467 à 1472 sont applicables aux hypothèques. APPENDICE. DISPOSITIONS DES HYPOTHÈQUES APPLICABLES AUX PRIVILÉGES SUR LES IMMEUBLES. Art. 1313. Les dispositions des Sections III, V, VI et VII du présent Chapitre sont applicables aux priviléges sur les immeubles, en ce qui n'est pas contraire aux règles propres à ces derniers, telles qu'elles sont établies au Chapitre précédent. LIVRE V. DES PREUVES ET DE LA PRESCRIPTION. PREMIÈRE PARTIE. DES PREUVES. DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES. Art. 1314. Celui qui allègue en justice un fait, positif ou négatif, pour en tirer avantage, doit le prouver ou en démontrer la vérité au juge. L'adversaire doit, à son tour, soit justifier la contradiction qu'il oppose au fait établi contre lui, soit prouver les faits qu'il allègue comme détruisant les effets du premier. [C. civ. fr., 1315.] 1315. Le demandeur ou le défendeur qui manque à justifier, conformément à la loi, tout ou partie de ses allégations, ou qui n'en a pas produit la conviction chez le juge, dans les cas où le pouvoir de celui-ci d'apprécier les preuves est libre, doit succomber dans sa demande ou dans son exception, sur les points non justifiés. 1316. Une partie peut demander en justice, principalement et sans qu'il y ait encore de procédure commencée, à fournir la preuve de faits dont la constatation lui importe pour l'avenir, en justifiant dudit intérêt et du danger de la perte des moyens de preuve. 1317. Les règles établies ci-après sont communes à la preuve des droits réels et des droits personnels. Elles ne préjudicient pas aux dispositions spéciales portées aux trois Livres précédents, en matière de preuve. Elles s'appliquent aussi aux questions d'état des personnes, sauf ce qui est spécialement prescrit, à ce sujet, au Livre premier. 1318. Les preuves consistent: 1°  Dans l'Expérience personnelle du tribunal, 2°  Dans le Témoignage de l'homme formant preuve directe, 3°  Dans les Présomptions ou preuves indirectes. [1316.] CHAPITRE PREMIER. DE L'EXPÉRIENCE PERSONNELLE DU TRIBUNAL. Art. 1319. Le tribunal peut décider le litige par expérience personnelle, lorsqu'il acquiert la certitude des faits allégués: 1°  Par l'audition des dires des parties ou de leurs représentants, par l'examen des objets litigieux et des documents de la cause, 2°  Par une visite des lieux du litige, 3°  Par un rapport d'experts. SECTION PREMIÈRE. DE L'AUDITION DES PARTIES, DE L'EXAMEN DES OBJETS LA CAUSE, ET DE L'INTERPRÉTATION DE LA LOI. Art. 1320. Indépendamment des cas où il y a aveu de la partie, s'il résulte des dires et explications des parties ou de leurs représentants devant le tribunal que la demande ou l'exception, soit principale, soit incidente, n'est pas justifiée ou qu'elle est prématurée, le tribunal la rejette ou surseoit à statuer au fond. [Comp. c. pr. civ. fr., 324 et s.] Il en est de même si cette conviction du tribunal résulte de l'examen des objets litigieux ou des documents de la cause autres que des preuves écrites. 1321. Si le litige ne porte que sur une évaluation à faire d'un dommage éprouvé, d'un gain manqué ou d'une autre valeur à fournir pour une cause non contestée, et si le tribunal, après avoir entendu les parties ou leurs représentants, a les éléments nécessaires à ladite évaluation, il peut la faire par lui-même. [ibid.] 1322. Si le litige porte seulement sur un point de droit, au sujet de faits non contestés, le tribunal, après avoir entendu les parties ou leurs conseils, tire sa conviction des dispositions de la loi interprétée dans son esprit autant que dans ses termes. En cas de silence ou d'insuffisance de la loi, il doit décider le litige d'après les principes généraux du droit positif, de l'équité et de la raison naturelle. [C. civ. fr., 4.] SECTION II. DES VISITES DE LIEUX. Art. 1323. Dans les litiges relatifs aux limites des propriétés, aux servitudes foncières, à la possession, aux dommages aux biens, à l'exécution de travaux sur les fonds ou autres litiges analogues, et même lorsqu'il s'agit de constater l'état d'objets mobiliers qui ne peuvent être facilement déplacés, si le juge croit nécessaire ou utile à l'éclaircissement de la cause de prendre directement et par lui-même connaissance des faits allégués, il peut, soit d'office, soit sur la demande d'une des parties se transporter à cet effet sur les lieux où se trouvent les objets ou les éléments de décision du litige. [C. pr. civ. fr., art. 41, 295.] Si le tribunal siége à plusieurs juges, il nomme un de ses membres comme juge-commissaire, pour ledit transport et pour lui en faire un rapport. [ib., 296.] 1324. Les parties doivent être sommées à l'avance, par le juge, d'être présentes à la visite en personne ou par mandataire, au lieu, au jour et à l'heure par lui fixés; mais leur défaut de se présenter n'empêche pas la validité de la visite. [297.] 1325. Le juge peut s'adjoindre, pour la visite de lieux, un expert compétent, suivant la nature du litige. Si l'expert est nommé par le jugement qui a ordonné la visite, les règles de l'expertise sont observées telles qu'elles sont établies à la Section suivante. [I bid. 24, 43.] Si l'expert est appelé au moment de la visite même, pour assister le juge dans son examen, il ne prête pas serment et ne fait pas de rapport au tribunal; mais sa présence et son avis sont relatés dans le rapport du juge. SECTION III. DES EXPERTISES. Art. 1326. Indépendamment des cas où la loi prescrit aux tribunaux de recourir a l'expertise, le tribunal peut toujours, lorsque le jugement du litige exige des connaissances spéciales, ordonner, soit d'office, soit sur la demande de l'une des parties, qu'il soit fait un rapport d'experts pour aider à son expérience personnelle. Le jugement qui ordonne l'expertise détermine les faits sur lesquels elle aura lieu. [c. pr. civ. fr., 302.] 1327. Le jugement nomme un ou trois experts, suivant l'importance ou la difficulté du litige. [ib., 303.] Les parties peuvent cependant, après avoir été averties de leur droit par le tribunal, s'entendre sur un ou trois experts, pour ceux-ci être nommés par le tribunal. [ib., 304, 305, 1er al., 306.] Si elles ne s'entendent que pour en proposer chacune un seul, le troisième expert est choisi par le tribunal. 1328. Nul ne peut être nommé expert par le tribunal s'il n'est sujet japonais et s'il n'a l'exercice des droits civiques, à moins que les parties ne s'entendent autrement. Toutefois, si le jugement du litige exige l'examen de documents ou de produits étrangers, ou s'il est impossible de trouver dans la localité des sujets japonais ayant les aptitudes nécessaires, le tribunal peut nommer un ou plusieurs experts étrangers, après avoir entendu les dires des parties, à ce sujet, et en constatant dans le jugement ladite impossibilité et l'audition des parties. 1329. Les experts prêtent serment, dans la forme prescrite au Code de Procédure civile, “de remplir leur mandat avec soin et fidélité.” La prestation se fait devant le tribunal qui a ordonné l'expertise, ou devant le tribunal du lieu où l'exertise doit se faire. [ib., 305, 2e al., 307.] 1330. L'expertise est faite en présence des parties ou elles dûment appelées. [ib., 135.] Les causes de récusation des experts et les formes dans lesquelles le rapport est rédigé et présenté au tribunal sont réglées par le Code de Procédure civile. [ib., 308 et s.] 1330 bis. Les dispositions qui précèdent sont applicables autant qu'il y a lieu, lorsque le tribunal croit utile à l'éclaircissement de la cause de recourir, au sujet des faits allégués de part ou d'autre, à l'avis de personnes compétentes dans les questions scientifiques, techniques ou artistiques. 1331. Le tribunal n'est pas tenu de se conformer à l'opinion, même unanime, des experts. [ib., 323.] Il peut aussi ordonner une nouvelle expertise, totale ou partielle, pour laquelle, s'il le croit préférable, il nommera lui-même de nouveaux experts. [322.] Dans tous les cas, il doit mentionner dans le jugement du fond qu'il a pris connaissance des rapports des experts. CHAPITRE II. DU TÉMOIGNAGE DE L'HOMME OU DE LA PREUVE DIRECTE. Art. 1332. Il y a preuve directe résultant du témoignage de l'homme: 1°  Dans les écritures privées, 2°  Dans les reconaissances ou aveux verbaux faits en justice, 3°  Dans le serment extrajudiciaire prêté ou refusé, 4°  Dans l'acte authentique ou témoignage d'un officier public, 5°  Dans le témoignage en justice des particuliers. SECTION PREMIÈRE. DES ÉCRITURES PRIVÉES. Art. 1333. La force probante des écritures privées est plus ou moins étendue, suivant qu'elles sont ou non, signées ou scellées par celui auquel elles sont opposées. Art. 1334. L'acte privé portant déclaration ou reconnaissance d'un fait défavorable à celui contre lequel il est invoqué et revêtu de sa signature écrite et de son sceau ou cachet usuel, ou de l'un ou de l'autre de ces signes constitue, de la part du signataire, un aveu ou témoignage extrajudiciaire contre lui-même. Les lettres missives ayant le même objet et signées de même ont la même force probante que les actes dressés en forme. 1335. Celui en faveur duquel existe un acte sous seing privé peut, à toute époque et même avant tout litige, demander en justice à celui qu'il prétend ou croit signataire la reconnaissance de l'écriture, de la signature et du sceau ou cachet. Le prétendu signataire ne peut que reconnaître ou dénier formellement la réalité de son écriture, de sa signature ou de son sceau, soit conjointement, soit disjointement. [1323, 1er al.] Si, après avertissement par le tribunal de cette disposition de la loi, il refuse de dénier tout ou partie de l'acte, le tribunal peut déclarer que l'acte est tenu pour reconnu à l'égard de ce qui n'en est pas formellement dénié. 1336. S'il s'agit du sceau, celui auquel on le représente peut, tout en reconnaissant l'identité de son sceau, nier que l'apposition en ait été faite par lui-même ou avec son autorisation, à charge d'en fournir la preuve par tous les moyens possibles. S'il n'a pas fait cette réserve avant qu'il soit donné acte de sa reconnaissance, il ne peut plus se prévaloir ultérieurement de ladite exception. Pareillement, lorsqu'il a reconnu sa signature ou son sceau, il n'est plus recevable à alléguer la violence, l'erreur ou le dol au moyen desquels sa signature ou son sceau auraient été obtenus, si la violence avait déjà cessé ou si l'erreur ou le dol avaient été découverts par lui et s'il n'a fait aucunes réserves à ce sujet. Ces réserves, s'il y a lieu, sont mentionnées dans l'acte judiciaire constatant la reconnaissance d'écriture. 1337. Si la demande en reconnaissance est formée contre la veuve, l'héritier, l'ayant cause ou le représentant du prétendu signataire, le défendeur peut se borner à déclarer, soit qu'il ne connaît pas, en général, la signature ou le sceau de celui qu'il représente, soit qu'il est incertain sur la réalité de leur emploi dans le cas présent. [1323, 2e al.] Ledit héritier, la veuve, l'ayant-cause ou représentant ne perd pas le droit de se prévaloir des moyens de nullité résultant de l'apposition illégitime du sceau ou des vices du consentement, bien qu'ayant négligé de faire des protestations ou réserves à ce sujet. 1338. La reconnaissance de la signature ou du sceau, même sans réserves, ne prive pas le défendeur du droit de prouver ultérieurement qu'il y a eu contrefaçon de la signature ou du sceau ou abus de blanc-seing. [c. pr. civ., 214.] Mais l'abus de blanc-seing, s'il n'a pas été l'objet de réserves, ne peut être opposé comme moyen de nullité du titre, aux tiers qui ont traité de bonne foi à raison dudit titre, le sachant reconnu sans réserves. 1339. Si l'acte sous seing privé a été contre-signé ou contre-scellé par un ou plusieurs témoins, ceux-ci sont appelés, s'il est possible, à la vérification d'écritures. 1340. Les formes et délais relatifs à la demande en vérification d'écritures, sceaux ou signatures et les cas où, faute de comparution du défendeur ou de ses représentants, les sceaux ou signatures peuvent être tenus pour reconnus par eux, sont déterminés par le Code de Procédure civile. Sont établies au même Code les règles de la procédure de vérification d'écritures, au cas de dénégation formelle par le prétendu signataire ou de défaut de reconnaissance par sa veuve, son héritier ou ayant-cause. [1324; c. proc. civ., 193 à 213.] 1341. L'acte sous seing privé destiné à constater un contrat synallagmatique ou bilatéral doit être rédigé et signé en autant d'originaux qu'il y a de parties principales ayant des intérêts opposés. [1325, 1er et 2e al.] Il doit, en outre, être fait mention sur chaque original du nombre des originaux dressés. [1325, 3e al.] Toutefois, les parties peuvent ne dresser qu'un original, en convenant qu'il restera déposé aux mains d'un tiers désigné par elles audit acte; auquel cas, celui-ci devra le communiquer à chaque partie, à toute réquisition, mais ne pourra s'en dessaisir sans le consentement de toutes. 1342. La rédaction de l'acte en plusieurs originaux et la mention du nombre qui en a été dressé ou le dépôt qui en tient lieu sont considérés comme une condition à laquelle les parties ont tacitement subordonné la formation même de la convention. Néanmoins, la partie qui a exécuté, en tout ou en partie, le contrat dont la preuve n'a pas été dressée en conformité à l'article précédent n'est pas recevable à se prévaloir de l'inaccomplissement de la condition. [1325, 4e al.] 1343. Lorsque l'acte sous seing privé constatant un contrat unilatéral contient promesse de donner, de payer ou de rendre une somme d'argent ou d'autres choses de quantité, si le corps de l'acte n'a pas été rédigé par le débiteur ou par son représentant, celui-ci doit, outre sa signature ou son sceau, mentionner de sa main un bon ou approuvé pour ladite somme ou quantité. Toutefois, le bon ou appronvé peut être remplacé par le contre-seing de deux témoins. S'il y a plusieurs débiteurs, solidaires ou non, le bon ou approuvé d'un seul suffit. Si l'acte est rédigé en caractères étrangers, la somme ou quantité doit être portée dans l'acte ou dans le bon ou approuvé en toutes lettres et non en chiffres. [1326, 1er al.] 1344. S'il y a une différence de somme ou quantité entre le corps de l'acte et le bon ou approuvé, l'obligation est réputée n'être que de la somme ou quantité moindre, lors même que le corps de l'acte et le bon ou approuvé seraient tous deux de la main du débiteur; sauf le cas où il serait prouvé, par écrit ou autrement, de quel côté est l'erreur. [1327.] 1345. L'acte portant seulement la signature ou le sceau du débiteur et non revêtu du bon ou approuvé ou du contre-seing de deux témoins, comme il est prescrit ci-dessus, ne laisse pas cependant de valoir comme commencement de preuve par écrit, pour l'admission de la preuve testimoniale, mais seulement jusqu'à concurrence des sommes ou quantités qui y sont portées. Il en est de même de l'acte qui ne porte pas les sommes en toutes lettres, dans les cas où cette condition est prescrite. Le débiteur qui a exécuté, en tout ou en partie, l'obligation portée audit acte ne peut plus la contester dans la mesure où l'exécution a eu lieu. 1346. La formalité du double original et du bon ou approuvé n'est requise de la part des commerçants que lorsqu'elle est spécialement prescrite par la loi commerciale. [v. 1326, 2e al.] 1347. L'acte sous seing privé rédigé en conformité aux articles précédents et reconnu ou tenu en justice pour reconnu par celui auquel on l'oppose fait pleine foi contre lui de son dispositif et des énonciations qui y ont un rapport direct ou le complètent. Les autres énonciations ne peuvent servir que de commencement de preuve par écrit. [1320.] Le principe de l'indivisibilité de l'aveu, tel qu'il est posé à l'article 1365, s'applique d'ailleurs aux diverses parties de l'acte, sous la même distinction. 1348. Si l'acte est attaqué pour abus de blanc-seing ou comme faux, ainsi qu'il est prévu à l'article 1338, sa force probante est suspendue de plein droit par le renvoi de l'inculpé devant le tribunal de répression, et il est sursis au jugement civil jusqu'à ce que la décision dudit tribunal soit devenue irrévocable. S'il n'y a pas d'instruction ouverte, par suite du décès de la personne soupçonnée ou par une autre cause, le tribunal civil apprécie à quel moment il convient de surseoir au jugement du fond, jusqu'à ce qu'il ait statué sur la fin de non-recevoir tirée de la prétendue infraction. [v. 1319, 2e al.; c. instr. crim., 460, 2e et 3e al.] Le tribunal civil peut aussi, lorsqu'il y a une instruction pendante, surseoir à son jugement, soit à la requête d'une des parties, soit d'office. 1349. Les actes sous seing privé font la même foi qu'entre les parties en faveur et à l'encontre de leurs ayant-cause particuliers, lorsque ceux-ci ont traité avec elles postérieurement auxdits actes; mais leur date ne peut être invoquée, pour distinguer les tiers des ayant-cause, que si elle est certaine. [1328.] 1350. Les actes sous seing privé acquièrent date certaine: 1°  Par l'enregistrement officiel, 2°  Par leur mention dans un procès-verbal de scellés ou d'inventaire, ou dans un autre acte authentique ou même sous seing privé ayant date certaine, 3°  Par le décès de l'une des parties ou d'un des témoins signataires, ou par la déclaration judiciaire de leur absence. [Ibid.] Dans ces cas, l'acte prend date du jour de l'acte où il est mentionné, du jour du décès ou des dernières nouvelles. 1351. Au cas de mention d'un acte dans un autre, si les droits constitués par les deux actes sont incompatibles, la priorité appartient à l'acte qui est mentionné comme préexistant. Dans les autres cas où deux actes acquièrent simultanément date certaine, la préférence appartient à celui qui est soutenu de la possession, et, à défaut de possession, à celui qui est le premier invoqué en justice. Si aucun acte n'a date certaine, la préférence se règle par les mêmes distinctions. Toutefois, la préférence est perdue, dans tous les cas, pour la partie contre laquelle il est prouvé, par son aveu, qu'elle avait, au moment où elle a traité, connaissance d'un acte incompatible avec le sien propre, quoique n'ayant pas date certaine. 1352. Les quittances ou décharges et les causes de compensation, quoique n'ayant pas date certaine, peuvent être opposées aux cessionnaires de créances, aux subrogés et aux créanciers saisissants, lorsqu'il n'y a pas lieu de les croire antidatées. En matière de commerce, la sincérité de la date des actes sous seing privé est présumée, sauf la preuve d'erreur ou de fraude. § II. DES ÉCRITURES NON SIGNÉES. Art. 1353. Les registres des marchands font foi contre eux, à l'égard de toutes personnes, même non marchandes; mais l'aveu qui en résulte ne peut être divisé par celui qui les invoque. [1330.] Ils ne font pas foi en leur faveur contre les personnes non marchandes. [1329.] 1354. La foi due aux mêmes registres entre marchands est réglée au Code de Commerce. 1355. Les registres des non marchands, les notes et papiers domestiques ne font jamais foi en faveur de celui qui les tient. Ils font foi contre lui sous les distinctions ci-après. 1356. Les écritures du créancier font foi contre lui: 1°  Si elles énoncent formellement un payement reçu ou une autre mention libératoire en faveur du débiteur, à moins que le créancier ne prouve qu'il s'agissait d'une quittance préparée pour être remise au débiteur contre payement. [1331-1°, 1332, 1er al.] 2°  Si une note libératoire a été écrite sur le titre du débiteur ou sur une quittance antérieure, et si ladite pièce est entre les mains de celui-ci. [1332, 2e al.] 1357. Les écritures du débiteur font foi contre lui, si, énonçant une obligation à sa charge, elles portent, en outre, la mention qu'elles ont pour but de servir de titre au créancier. [1331-2°.] 1358. Dans le cas des deux articles précédents, il n'est pas tenu compte des écritures barrées ou cancellées, à moins qu'il ne soit prouvé que la cancellation a été faite frauduleusement ou par erreur. 1359. Les personnes non marchandes ne sont pas tenues de produire en justice leurs registres et papiers domestiques; mais si elles les ont produits volontairement, elles ne peuvent les retirer avant qu'il en ait été extrait, en leur présence ou elles dûment appelées, ce qui est relatif à la contestation. SECTION II. DES AVEUX VERBAUX. Art. 1360. L'aveu verbal, par une partie, d'un fait pouvant produire contre elle des conséquences juridiques, peut être soit judiciaire ou fait dans une instance, soit extrajudiciaire. [1354, 1356, 1er al.] § Ier. DE L'AVEU JUDICIAIRE. Art. 1361. L'aveu judiciaire peut être spontané ou provoqué par un interrogatoire sur faits et articles, dans les formes réglées au Code de Procédure civile. [C. pr. civ. fr., 324 et s.] 1362. L'aveu ne peut être valablement fait que par une partie ayant la capacité de disposer du droit qui en dépend et lorsque les faits reconnus sont de ceux dont la loi ne défend pas cette preuve. L'aveu fait par un mandataire n'est valable que s'il est fait en vertu d'un pouvoir spécial, à moins qu'il ne s'agisse d'un fait de sa gestion; sans préjudice de ce qui est dit au Code de Procédure civile, au sujet de l'aveu des représentants judiciaires des parties et des formes et conditions du désaveu dont leurs déclarations peuvent être l'objet. [C. pr. civ., 336, 352 et s.] 1363. L'aveu fait en conformité à l'article précédent, et lorsqu'il a été accepté par l'adversaire ou lorsqu'il en a été donné acte par le tribunal, fait pleine foi contre celui de qui il émane. [1356, 2e al.] Néanmoins, il peut être rétracté pour erreur de fait. [1356, 4e al.] 1364. Il ne peut être rétracté pour erreur droit ou sur les conséquences légales du fait reconnu. [Ibid.] Mais la reconnaissance directe ou indirecte d'un droit de l'adversaire ne prive pas celui qui l'a faite de la faculté de contester la cause originaire ou la persistance de ce prétendu droit. 1365. Celui qui veut se prévaloir d'un aveu complexe ou modifié ne peut le diviser quant aux circonstances ou aux divers faits déclarés: il ne peut écarter les déclarations qui limitent les effets de l'aveu, ni même celles qui les détruisent entièrement, pourvu, s'il s'agit de faits antérieurs ou postérieurs au fait principal, qu'ils lui soient connexes. [1356, 3e al.] Toutefois, les allégations qui modifient le fait principal peuvent être combattues par les moyens ordinaires de preuve. 1366. Les effets de l'aveu judiciaire ne sont pas infirmés par l'incompétence du tribunal, lorsque cette incompétence n'est pas d'ordre public. Dans le cas contraire, l'aveu ne vaut que comme extrajudiciaire. 1367. Le Code de Procédure civile détermine, au sujet des Enquêtes et de l'Interrogatoire sur faits et articles, les cas dans lesquels une partie, requise de se prononcer sur l'existence de certains faits de la cause, est réputée les reconnaître, faute de les dénier. [C. pr. civ., 252, 330.] 1367 bis. Si une partie, par infirmité ou autre cause constatée, ne peut parler, mais si elle peut répondre au tribunal par écrit ou par signes, d'une manière jugée lui par certaine, les règles de l'aveu judiciaire lui seront applicables. § II. DE L'AVEU EXTRAJUDICIAIRE. Art. 1368. L'aveu extrajudiciaire n'a d'effet que s'il a été fait, soit verbalement, en présence de l'adversaire ou de son représentant, soit dans une lettre missive ou dans un document écrit adressé ou remis à l'un ou à l'autre. Hors ce dernier cas, et si l'aveu verbal n'a pas été reproduit devant une autorité ayant qualité pour le recevoir et le constater, il ne peut être prouvé par témoins que dans les cas où l'objet du litige comporte lui-même la preuve testimoniale. [1355.] 1369. Les dispositions des articles précédents concernant la capacité requise pour la validité de l'aveu judiciaire, sa force probante, sa rétractation et son indivisibilité sont applicables à l'aveu extrajudiciaire. Toutefois, les juges devant lesquels il est invoqué ne doivent tenir compte que d'un aveu assez précis et assez formel pour ne pouvoir être attribué à une surprise ou à une inadvertance. 1370. Les dispositions qui précèdent ne préjudicient pas aux cas dans lesquels l'exécution totale ou partielle est considérée par la loi comme aveu tacite d'une obligation. 1371. L'aveu extrajudiciaire, quoique valablement rétracté, produit interruption de la prescription en faveur de l'adversaire; mais la prescription reprend son cours à partir du jour de la rétractation, pour ce qui en restait à courir au jour de l'aveu. SECTION III. DU SERMENT EXTRAJUDICIAIRE. Art. 1372. Le juge ne peut, dans aucun cas, déférer le serment à une partie demanderesse ou défenderesse, principale ou intervenante, sur sa demande ou sur son exception, ni sur le montant de l'intérêt en litige. Les parties ne peuvent non plus se déférer le serment l'une à l'autre en justice sur les mêmes objets. La délation de serment ne peut être qu'extrajudiciaire, et sous les conditions ci-après déterminées. [Contrà 1357.] 1373. Les parties peuvent convenir de se déférer le serment extrajudiciaire, pour prévenir ou faire cesser une contestation d'intérêt purement privé, encore qu'il n'existe aucun commencement de preuve ou qu'il en ait été fourni une déjà complète en faveur de l'une ou de l'autre. [1360.] Cette convention a le caractère d'une transaction et elle est, comme telle régie par les dispositions des articles 757 à 762, sous les modifications ci-après. 1374. Les parties, en convenant que leur différend sera réglé, en tout ou partie, par le serment de l'une d'elles, doivent déterminer: 1°  A quelle partie le serment est déféré; 2°  Sur quels faits, positifs ou négatifs, il est déféré; 3°  En quel lieu et à quel moment le serment sera prêté; 4°  En présence de quelles personnes la prestation sera faite, à moins qu'on ne convienne qu'elle sera faite par écrit remis à l'adversaire; 5°  Si la partie jurera en prenant à témoin de sa sincérité la Divinité de son culte, ou si elle affirmera seulement “sur son honneur ou sa conscience.” 1375. Ladite convention ne peut être prouvée par témoins que dans les cas où la nature et l'importance du litige comportent cette preuve, conformément à la Section VIII ci-après. Dans tous les cas, la prestation elle-même du serment ou l'affirmation solennelle et leur conformité à la convention peuvent être prouvées par le témoignage des personnes appelées par les parties pour y être présentes. 1376. La partie à laquelle le serment est déféré peut le référer à l'autre, pour être prêté en la même forme et sous les mêmes conditions. Toutefois, celui qui a référé le serment ne pourra exiger qu'un serment “sur l'honneur et la conscience.” 1377. Le serment ne peut être déféré ou référé que sur des faits personnels à l'adversaire ou sur la connaissance personnelle qu'il a de faits à lui étrangers, et si, dans les deux cas, ils sont de nature à influer sur la décision du litige. [voy. 1359, 1362.] 1378. La partie qui a proposé la délation du serment extrajudiciaire, sous forme de transaction, ou qui, ayant accepté ladite transaction, a référé le serment, est considérée comme reconnaissant les faits positifs ou négatifs sur lesquels elle a déféré ou référé le serment, sous la condition qu'ils seront affirmés en forme. Elle ne peut retirer sa proposition lorsqu'elle a été acceptée, à moins que le délai accordé pour le serment ne soit expiré sans qu'il ait été donné suite à la transaction, comme il est dit à l'article suivant. [1364.] Réciproquement, la partie qui a accepté la proposition et qui refuse de prêter le serment et de le référer à son adversaire est considérée comme reconnaissant tacitement la réalité des mêmes faits. [voy. 1361.] 1379. Si la proposition n'a pas été retirée, le serment peut encore être fait après l'expiration du délai fixé, si l'adversaire y assiste en personne ou par un représentant spécial. Mais l'absence de l'adversaire n'empêche pas la validité du serment prêté au temps et au lieu fixés. 1380. Le serment, une fois prêté conformément à la transaction, ne peut être argué de faux, à fins civiles, par la partie qui l'a déféré ou référé. [1363.] 1381. L'effet du serment extrajudiciaire entre les divers intéressés, au cas de cautionnement, de solidarité et d'indivisibilité conventionnelle, est réglé aux articles 1028, 1059, 1060, 1062 et 1092. SECTION IV. DE L'ACTE AUTHENTIQUE. Art. 1382. L'acte authentique est le témoignage d'un officier public, au sujet des faits qu'il a été appelé par les parties à constater. Est encore authentique l'acte dressé par un fonctionnaire public, agissant comme représentant de l'Etat ou d'une administration publique. L'acte n'est authentique que si l'officier public qui l'a reçu est compétent à raison du lieu, de la nature de l'acte et des personnes qui y figurent comme parties, s'il n'est pas en état d'incapacité temporaire et s'il a suivi les formes prescrites par la loi. [1317.] Des Lois spéciales et des Règlements déterminent la compétence des notaires et des autres officiers publics appelés à prêter leur ministère aux parties ainsi que les formes de leurs actes. [L. fr. 25 ventôse an XI; 21 juin 1843.] 1383. L'acte dressé en conformité à l'article précédent fait foi jusqu'à inscription de faux de toutes les déclarations de l'officier public au sujet des faits et dires relatifs audit acte, accomplis par lui-même ou en sa présence. [1319, 1er al.] Il fait la même foi de sa date telle qu'elle y est portée. L'acte rédigé sous le nom d'un officier public et revêtu de sa signature et de son sceau est présumé, jusqu'à plainte ou inscription en faux, émaner de lui. La procédure d'inscription en faux est réglée au Code de Procédure civile. [C. pr. civ. fr., 214 et s.] 1384. Les dispositions de l'article 1348 sur la suspension par la procédure de faux de la force probante de l'acte sous seing privé reconnu sont applicables à l'acte authentique. [1319, 2e al.] Il en est de même de l'article 1347, au sujet des diverses énonciations ayant un rapport direct ou indirect avec les dispositions principales. [1320.] La suspension de la force exécutoire de l'acte aura lieu dans les mêmes cas et aux mêmes conditions que celle de la force probante. 1385. Si l'acte manque à l'une des conditions ci-dessus prescrites pour valoir comme acte authentique, mais porte effectivement la signature ou le sceau de toutes les parties qui y font un sacrifice, il vaut comme acte sous seing privé, encore qu'il ne remplisse pas les conditions du double original ou du bon ou approuvé requises par les articles 1341 et 1343. [1318.] SECTION V. DES CONTRE-LETTRES. Art. 1386. Les parties peuvent, par des contre-lettres ou déclarations écrites destinées à rester temporairement secrètes, modifier ou détruire, en tout ou partiellement, les effets d'un acte ostensible, authentique ou sous seing privé; mais lesdites contre-lettres, même lorsqu'elles ont été faites par acte authentique ou sous seing privé ayant date certaine, n'ont d'effet que contre les signataires et leurs héritiers. [1321.] Toutefois, elles peuvent être opposées aux ayant-cause à titre particulier de chaque partie; lorsqu'il est prouvé, conformément au droit commun, qu'ils en ont eu connaissance en traitant avec elles. 1387. Les contre-lettres relatives aux droits immobiliers acquièrent l'effet ordinaire d'un acte ostensible lorsqu'elles ont été rendues publiques, soit par la transcription ou par l'inscription hypothécaire, quand l'acte la comporte, soit par la mention en marge de l'une ou de l'autre, lorsque lesdites contre-lettres modifient un acte transcrit ou inscrit; le tout, sans rétroactivité. 1388. Dans tous les cas, les contre-lettres peuvent être opposées à chaque partie et à ses héritiers par les ayant-cause généraux et particuliers de l'autre. SECTION VI. DES ACTES RÉCOGNITIFS. Art. 1389. L'acte récognitif est celui par lequel une partie reconnaît, en forme authentique ou privée, l'existence contre elle d'un titre antérieur, qui peut lui-même être soit authentique, soit sous seing privé. Il ne dispense pas le demandeur de représenter le titre primordial, sauf dans les deux cas exceptés ci-après, et ce qu'il contient de plus, de moins ou de différent est sans effet; le tout, à moins qu'il ne soit déclaré dans l'acte récognitif qu'il est destiné à remplacer l'acte primordial. [1337, 1er, 2e al.] 1390. Le titre récognitif remplace le titre primordial dont la perte est prouvée, dans les deux cas suivants: 1°  S'il porte qu'il reproduit la teneur du titre primordial; [1337, 1er al.] 2°  S'il a vingt ans date et a déjà servi seul à l'exercice du droit de celui qui l'invoque. [v. 1337, 3e al.] 1391. Si, hors les cas qui précèdent, le demandeur ne peut représenter le titre primordial, l'acte récognitif ne vaut en sa faveur que comme commencement de preuve par écrit. Dans tous les cas, il interrompt la prescription. SECTION VII. DES COPIES DE TITRES. Art. 1392. Les copies de titres ne dispensent pas celui qui les invoque de représenter l'original, s'il en est requis par le tribunal ou par la partie, à moins qu'il ne prouve la perte dudit original. [1334.] Toutefois, si l'original authentique, ou sous-seing privé reconnu en justice, est déposé dans les minutes d'un officier public, la production en justice ne s'en fait que sur l'ordre du tribunal, dans les formes et sous les conditions déterminées par lui, conformément au Code de Procédure civile et aux Règlements des offices publics. 1393. Au cas de perte prouvée de l'original, la copie en a la même force probante, dans les quatre cas ci-après: 1°  S'il s'agit de la première copie ou expédition d'un acte authentique dressée par l'officier public qui a reçu ledit acte; [1335-1°.] 2°  Si la copie d'un acte authentique, ou d'un acte sous seing privé reconnu en justice et déposé dans les minutes d'un officier public, a été dressée par celui-ci, à la demande et en présence des parties intéressées; [ibid.] 3°  Si la copie a été dressée, sur l'ordre du tribunal, par un officier légalement dépositaire de l'original, même temporairement, les parties étant présentes ou ayant été dûment appelées; [ibid.] 4°  Si la copie dressée par l'officier légalement dépositaire de l'original, hors les trois premiers cas, a vingt ans de date et a déjà été invoquée, soit en justice, soit extrajudiciairement, au sujet du droit prétendu, entre les parties ou ceux qu'elles représentent, sans avoir donné lieu à réclamations. [v. 1335-2°.] La copie doit mentionner: Au premier cas, qu'elle est la première expédition; Au deuxième cas, que les parties étaient présentes; Au troisième cas, qu'elles ont été convoquées par ordre du tribunal et qu'elles ont été présentes ou non; Dans tous les cas, la copie devra mentionner qu'elle a été collationnée avec l'original ou qu'elle y est conforme. 1394. Hors les quatre cas mentionnés à l'article précédent, les copies de titres dressées par un officier public ne servent que de commencement de preuve par écrit. [1335-3°.] 1395. Les copies de copies dressées par un officier public ne peuvent servir que de simples renseignements ou de présomption de fait, et dans les cas seulement où la preuve testimoniale est admissible. [1334-4°.] Toutefois, il y a commencement de preuve par écrit dans la copie intégrale de l'expédition d'un acte authentique sur le registre public des transcriptions. [1336.] La même copie d'un original sous seing privé reconnu en justice aura pareillement la valeur d'un commencement de preuve par écrit. Mais, si ladite copie a vingt ans de date et s'il en a été fait usage sans réclamations, elle fait preuve complète, conformément à l'article 1393-4°. SECTION VIII. DU TÉMOIGNAGE DES PARTICULIERS OU DE L'ENQUÊTE. Art. 1396. Il doit être dressé acte, authentique ou sous seing privé, de tout fait de nature à créer ou transférer, modifier ou éteindre un droit réel ou personnel, lorsque l'intérêt qui en résulte pour chaque partie ou pour l'une d'elles excède la valeur de 50 yens au moment où le fait s'accomplit. [1341, 1er al.] La preuve par témoins n'est reçue devant les tribunaux, lorsque ladite valeur est excédée, que dans les cas exceptés par la loi, explicitement ou implicitement, et sauf ce qui est statué à ce sujet par le Code de Commerce. [1341, 2e al.] 1397. Dans les contrats synallagmatiques, on ne considère, au sujet de la nécessité d'un acte écrit, que le montant du droit ou intérêt le plus élevé. Toutefois, s'il s'agit d'une société ayant le caractère de personne juridique, aux termes de l'article 766, l'évaluation de l'intérêt engagé se fait sur le montant total du fonds social, au moment de sa formation. [1834.] 1398. Lorsque la demande ou l'exception n'a pas pour objet une somme d'argent, si l'adversaire s'oppose à la preuve testimoniale, en alléguant que la valeur du litige excède 50 yens, le tribunal en fait, au préalable, l'évaluation provisoire, d'après les éléments de la cause ou d'après une expertise. 1399. Lorsqu'un écrit a été dressé, la preuve testimoniale ne peut être reçue pour prouver contre ni outre ledit écrit, ou pour établir ce qui aurait été dit ou fait avant, pendant ou après sa rédaction, de manière à en modifier la portée, encore qu'il s'agisse d'un intérêt inférieur à 50 yens; [1341, 1er al.] La présente prohibition n'exclut pas la preuve testimoniale, dans la mesure ci-dessus fixée, pour établir soit le payement, la remise, la novation ou toute autre cause d'extinction de l'obligation, soit l'extinction ou une modification postérieure du droit réel constaté par écrit. Dans tous les cas, l'omission de la date et du lieu du fait allégué, ou de l'époque et du lieu fixés verbalement pour l'exécution, peut être suppléée par la preuve testimoniale, s'il ne s'y rattache pas un intérêt qui, joint au principal, porte la valeur au-dessus de 50 yens. 1400. Lorsque l'intérêt du litige excède 50 yens, le demandeur ou le défendeur ne peut faire la preuve par témoins, même en restreignant sa demande ou son exception à une somme ou à une partie de la chose n'excédant pas le taux fixé. [1343.] Il en est de même si la demande d'une somme ou valeur n'excédant pas 50 yens est le reste ou une partie d'une somme ou valeur supérieure à ce chiffre. [1344.] 1401. Dans les deux cas prévus à l'article précédent, si l'enquête a pour effet de révéler un intérêt originairement supérieur à 50 yens, elle doit être annulée par le tribunal même qui l'a reçue. Il en est de même dans tous les autres cas où l'enquête elle-même révèle des faits ou des circonstances à raison desquels elle n'était pas autorisée par la loi. 1402. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à ce que, si le taux de 50 yens n'est excédé que par l'effet d'intérêts compensatoires, d'une clause pénale, ou d'un compte de fruits à restituer d'après la convention, le demandeur puisse renoncer à ces accessoires, pour prouver le principal par témoins. [Voy. 1342.] Si même l'excès ne provient que d'intérêts moratoires ou de dommages-intérêts non stipulés pour retard ou inexécution, ou de fruits dus depuis la demande, la preuve testimoniale en reste permise pour le tout, soit avec le principal, soit séparément. 1403. Celui qui peut faire contre la même partie plusieurs demandes non entièrement justifiées par écrit et pour lesquelles, séparément, la preuve testimoniale est admissible, doit les réunir dans une seule et même instance, quelles que soient leur cause et leur origine, si elles sont toutes échues et de la compétence du même tribunal. Faute de ce faire, il ne sera plus reçu à prouver par témoins les demandes ainsi omises. [v. 1346.] La même disposition s'applique à celui qui prétend opposer plusieurs exceptions ou moyens de défense contre une même demande. 1404. Si divers chefs de demandes ou d'exceptions, réunis comme il est dit à l'article précédent, excèdent la valeur de 50 yens, la preuve par témoins n'en sera recevable que si les droits ou exceptions prétendus procèdent de causes différentes, soit en la personne de celui qui les invoque, soit en celle de ses auteurs. [v. 1345.] 1405. La peuve testimoniale est permise, quelle que soit la valeur du litige, dans les cas ci-après: 1°  S'il existe un commencement de preuve par écrit, authentique ou sous-seing privé, émanant soit de celui auquel il est opposé, soit de celui qu'il représente ou par lequel il a été valablement représenté, et rendant vraisemblable le fait allégué; [1347.] La preuve testimoniale est permise également outre ou contre un écrit, s'il y a commencement de preuve par écrit des dires ou faits allégués; 2°  Si la partie demanderesse ou défenderesse prouve préalablement, par témoins ou autrement, qu'elle a perdu son titre par un événement de force majeure, ou par un cas fortuit qui n'est pas imputable à sa faute ou à sa négligence; [1348-4°] 3°  Lorsqu'il n'a pas été possible à la partie intéressée de se procurer une preuve écrite, au moment où a eu lieu le fait allégué. [1348-1er al.] 1406. La troisième exception portée à l'article précédent s'applique notamment: Aux cas de dépôt nécessaire prévus aux articles 916 et 917, 1er alinéa; Aux obligations contractées en cas d'accidents, de danger imprévu ou de nécessité urgente; Aux obligations ayant une cause autre que la convention. [1348-1°, 2°, 3°.] Toutefois, dans ces derniers cas, si l'obligation prétendue née d'un enrichissement indu, d'un dommage injuste ou de la loi, présuppose un acte juridique de nature à devoir être prouvé par écrit, cette preuve devra être préalablement fournie. 1407. Si, hors les cas où la preuve testimoniale est admise par la loi, la partie intéressée à la contester consent à ce qu'il y soit procédé, le tribunal peut, soit la refuser, soit, si l'affaire lui paraît simple, l'autoriser, mais seulement en la forme des enquêtes sommaires faites à l'audience. 1408. Les témoins, avant de déposer, prêtent serment, en la forme prescrite, “de dire la vérité et toute la vérité.” Le Code de Procédure civile établit les règles concernant les formes et les délais des enquêtes et des contre-enquêtes, les caractères requis dans les faits à prouver par témoins et les causes de récusation ou de reproche des témoins. [C. pr. civ. fr., 252 et s.] 1409. Lorsque l'enquête est terminée, soit qu'il ait été, ou non, produit des témoins en faveur de la partie adverse, par voie de contre-enquête, et quels que soient le nombre et la qualité des témoins produits de part et d'autre, s'ils n'ont pas d'ailleurs été valablement récusés ou reprochés, le tribunal n'est pas lié par les témoignages et il statue suivant son intime conviction. SECTION IX. DE LA COMMUNE RENOMMÉE. Art. 1410. Indépendamment des cas où la loi autorise spécialement la preuve par commune renommée, cette preuve est recevable chaque fois que la loi déclare ses dispositions applicables à certains faits, s'ils sont notoires. Dans la preuve par commune renommée, les témoins peuvent déposer de la connaissance qu'ils ont des faits, non directement et personnellement, mais seulement par les dires d'autres personnes ou par la notoriété publique. CHAPITRE III. DES PRÉSOMPTIONS OU PREUVES INDIRECTES. Art. 1411. Les présomptions sont des inductions ou conjectures que la loi, en l'absence de témoignages de l'homme, tire elle-même de faits connus à des faits inconnus, ou qu'elle confie aux lumières et à la prudence des magistrats. [1349.] Les premières sont dites “présomptions légales,” les autres, “présomptions de fait ou de l'homme.” SECTION PREMIÈRE. DES PRÉSOMPTIONS LÉGALES. Art. 1412. Les présomptions légales sont, suivant le degré de leur force probante et leur cause: 1°  Absolues, d'intérêt public, 2°  Absolues, d'intérêt privé, 3°  Simples. Ier. DES PRÉSOMPTIONS LÉGALES ABSOLUES D'INTÉRÊT PUBLIC. Art. 1413. Les présomptions légales absolues, d'intérêt public, n'admettent la preuve contraire que dans les cas et par les moyens expressément déterminés par la loi; ce sont; 1°  L'autorité de la chose jugée; [1350-2°.] 2°  La prescription acquisitive ou libératoire dont il est traité dans la IIe Partie du présent Livre. [1350-3°.] 1414. La chose jugée est présumée la vérité. Toutefois les jugements qui ne sont pas devenus irrévocables peuvent être attaqués, par les personnes, dans les formes et dans les délais déterminés pour les recours au Code de Procédure civile. 1415. Lorsqu'un jugement est devenu irrévocable, si la même contestation est de nouveau portée en justice, soit par voie d'action, soit par voie d'exception, elle doit être écartée en vertu de l'autorité de la chose jugée, sous la distinction énoncée ci-après. 1416. Lorsque le jugement rendu intéresse l'ordre public, en tout ou en partie, la fin de non-recevoir tirée de la chose jugée doit être suppléée d'office par le tribunal. Dans les autres cas, elle doit être opposée par la partie intéressée. Mais celle-ci perd le bénéfice de la chose jugée si, tout en l'invoquant, elle reconnaît qu'il y a eu mal jugé à son profit. 1417. Pour que l'exception de la chose jugée soit opposable à la nouvelle demande ou défense, il faut que celle-ci présente, comparée à la première: 1°  Identité de l'objet de la contestation, soit du droit réclamé, soit du fait allégué, 2°  Identité de la cause de la prétention, 3°  Identité juridique des parties, demanderesse ou défenderesse. [1351.] 1418. Lorsque l'objet de la nouvelle demande ou exception ne diffère de l'objet de la première que par l'étendue ou la quantité, il est considéré comme ayant été compris dans la première, toutes les fois que, d'après les conclusions prises, les juges de celle-ci avaient eu le pouvoir d'admettre ladite étendue ou quantité, s'ils l'eussent trouvée juste. 1419. Lorsque la première contestation a eu pour objet la rescision, la révocation ou la résolution d'une convention ou d'un testament, les diverses causes de même nature de l'action ou de l'exception qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, quoiqu'alors existantes et connues de la partie, sont présumées abandonnées par elle et ne peuvent lui servir pour une nouvelle contestation. Il en est de même des vices de forme qui ont été négligés dans une première demande ou exception tendant à faire déclarer un acte nul, soit quant à la preuve, soit quant à la solennité. Dans l'application du présent article, sont considérées comme causes de même nature, pour l'action en rescision ou en nullité, les divers vices de consentement et les diverses incapacités, et pour l'action en résolution, les divers cas d'inexécution de la convention. 1420. Il y a identité juridique des parties, soit lorsqu'elles ont déjà figuré en personne et en la même qualité dans la première instance, soit lorsqu'elles y ont été représentées par leur auteur ou par un mandataire conventionnel, légal ou judiciaire, soit enfin lorsque l'association des divers intéressés implique le mandat tacite de représentation mutuelle. 1421. L'autorité de la chose jugée est attachée non seulement au dispositif du jugement, mais encore à ses motifs pour tout ce qu'ils reconnaissent et déclarent quant aux points de fait et de droit pertinents et concluants, relativement à l'objet, à la cause, aux qualités des parties et aux preuves du litige. 1422. Indépendamment des cas où les tribunaux de répression ont statué sur les réparations civiles réclamées à raison des faits délictueux qui leur ont été soumis, les jugements rendus en matière criminelle, correctionnelle ou de police ont l'autorité de la chose jugée, quant aux intérêts civils se rattachant à l'infraction, mais seulement pour ce qui concerne leur décision sur la réalité du fait même incriminé, sur son caractère délictueux et sur la culpabilité de l'inculpé, lesquels ne peuvent plus être débattus dans une autre instance. § II. DES PRÉSOMPTIONS LÉGALES ABSOLUES D'INTÉRÊT PRIVÉ. Art. 1423. La présomption légale est absolue d'intérêt privé: 1°  Lorsque la loi attribue ou dénie aux personnes certaines qualités relatives à leur état civil; 2°  Lorsqu'elle annule certains actes comme présumés faits en fraude de ses dispositions; 3°  Lorsqu'elle refuse l'exercice de certains droits comme présumés ignorés des tiers par le défaut de la publication requise. [312, 911, 1110, 1350-1°, 1690, 1691; L. de 1855, sur la Transcription, art. 3.] Ces présomptions légales n'admettent la preuve contraire que dans les cas et par les moyens expressément déterminés par la loi. Toutefois, lorsque le litige permet la transaction, elles peuvent encore être renversées par l'aveu et par le refus ou la délation de serment extrajudiciaire, tels qu'ils sont réglés aux Sections II et III du Chapitre précédent. [1352.] § III. DES PRÉSOMPTIONS LÉGALES SIMPLES. Art. 1424. Les autres présomptions légales sont dites “simples” et admettent toutes preuves contraires, lors même que la loi ne les a pas expressément réservées. Au surplus, chaque preuve contraire ne peut être produite que sous les conditions et en la forme qui lui sont propres, telles qu'elles sont réglées aux deux Chapitres précédents et au Code de Procédure civile. Les présomptions légales simples peuvent aussi être combattues par les présomptions de fait ou de l'homme, dans les cas où cette preuve est recevable, conformément à la Section II ci-après. SECTION II. DES PRÉSOMPTIONS DE FAIT OU DE L'HOMME. Art. 1425. Indépendamment des cas particuliers où la loi autorise les tribunaux à puiser les éléments de leurs décisions dans les circonstances de la cause, ils peuvent encore, dans tous les cas où la preuve testimoniale est admissible, et lors même qu'il ne serait produit aucun témoignage ou aucune autre preuve directe, décider les contestations qui leur sont soumises d'après leur conviction résultant des circonstances du fait; mais ils devront énoncer, dans les motifs du jugement, les circonstances qui ont déterminé leur conviction. [1353.] DEUXIÈME PARTIE. DE LA PRESCRIPTION. CHAPITRE PREMIER. DE LA NATURE ET DES APPLICATIONS DE LA PRESCRIPTION. Art. 1426. La prescription est une présomption légale d'acquisition d'un droit réel ou de libération d'une obligation, par l'effet d'un temps déterminé et sous les autres conditions fixées par la loi; sans préjudice de ce qui est statué aux articles 1481 et suivants, sur la prescription instantanée des effets mobiliers. [voy. 712, 1234, 1350-2°, 2219.] 1427. La présomption d'acquisition ou de libération légitime est absolue et d'ordre public: elle n'admet la preuve contraire que dans les cas et par les moyens déterminés par la loi, tels qu'ils sont réglés aux articles 1433 et 1498. [1352.] 1428. L'effet de la prescription acquisitive remonte au jour où la possession a commencé utilement. Celui de la prescription libératoire remonte au jour où le créancier a pu exercer le droit qu'il a négligé, sous les distinctions portées aux articles 1461 et suivants. 1429. Les délais déterminés par la loi pour l'exercice de certaines actions en justice sont régis par les règles générales de la prescription acquisitive ou libératoire, suivant la nature de ces actions; sauf les cas où il y est dérogé par la loi, explicitement ou implicitement. [2264.] 1430. La prescription peut être invoquée par toutes personnes publiques ou privées. [2227.] Elle court de même contre toutes personnes, sauf contre celles en faveur desquelles la loi la déclare suspendue. [Ibid., 2251.] 1431. Toutes les choses qui sont dans le commerce sont susceptibles de prescription, sauf celles à l'égard desquelles la loi en dispose autrement. [2226.] Il suffit que la loi déclare une chose inaliénable pour qu'elle soit imprescriptible. Les choses qui sont hors du commerce sont imprescriptibles; il en est ainsi des biens même mobiliers, du domaine public. 1432. Les simples facultés légales qu'on peut exercer sur ses propres biens ou sur ceux d'autrui ne se perdent pas pour n'avoir pas été exercées pendant un temps quelconque; sauf les cas où il est disposé autrement par loi, par les conventions ou par testament. [Voy. 2232.] 1433. Les juges ne peuvent suppléer d'office le moyen d'action ou d'exception résultant de la prescription: il doit être invoqué par celui en faveur duquel les conditions en sont accomplies. [2223.] Celui même qui, au moment où il invoque la prescription, reconnaît qu'il n'est pas dans un cas d'acquisition ou de libération légitime est considéré comme renonçant à la prescription. 1434. Les ayant-cause, généraux ou particuliers, de la partie intéressée à invoquer la prescription peuvent l'invoquer de son chef et à son défaut, soit en demandant, soit en défendant. Les créanciers ont le même droit, conformément à l'article 359. [2225.] 1435. La prescription peut être invoquée en justice, en tout état de cause, en première instance ou en appel; mais elle ne peut l'être pour la première fois devant la Cour de cassation. [2224.] 1436. La prescription qui doit s'accomplir par années ou par mois se calcule d'après le calendrier légal. Celle qui doit s'accomplir par un certain nombre de jours se compose d'autant de fois vingt-quatre heures, comptées de minuit à minuit. Le jour ou la prescription a commencé à courir ou celui où elle a repris son cours, après interruption ou suspension, n'est pas compté. Le dernier jour n'est compté que s'il est écoulé en entier. [2260, 2261.] CHAPITRE II. DE LA RENONCIATION A LA PRESCRIPTION. Art. 1437. On ne peut renoncer d'avance à la prescription; sans préjudice du droit pour un possesseur de reconnaître pour l'avenir la précarité de sa possession, comme il est dit à l'article 1456, 2e alinéa. On peut renoncer à la prescription accomplie et, même pendant son cours, au bénéfice du temps déjà écoulé; [2220.] La prescription est alors interrompue, comme au cas de reconnaissance du droit de l'adversaire prévu aux articles 1454 et suivants. 1438. La renonciation peut être tacite; mais elle doit résulter clairement des circonstances. [2221, 2224.] 1439. Pour renoncer valablement à la prescription accomplie, il faut la capacité d'aliéner à titre gratuit le droit présumé acquis ou de contracter gratuitement l'obligation présumée éteinte. [2222.] 1440. Les créanciers peuvent attaquer, en leur propre nom, la renonciation à la prescription faite par leur débiteur en fraude de leurs droits, sous les conditions et par les moyens déterminés aux articles 360 et suivants. [Voy. 2225.] CHAPITRE III. DE L'INTERRUPTION DE LA PRESCRIPTION. Art. 1441. La prescription est interrompue lorsque le bénéfice du temps écoulé est détruit par une des causes ci-après énoncées. Le cours de la prescription interrompue recommence dès que la cause d'interruption a cessé. 1442. L'interruption de la prescription est naturelle ou civile. [2242.] L'interruption naturelle n'a lieu qu'à l'égard de la prescription acquisitive. L'interruption civile est commune aux deux sortes de prescription. 1443. Il y a interruption naturelle lorsque le possesseur d'un immeuble, d'une universalité de meubles ou d'un meuble particulier a été privé de la possession pendant plus d'un an, par le fait du vrai propriétaire ou d'un tiers. [2243.] Une nouvelle prescription recommence à courir dès que la possession est recouvrée. Il n'y a pas interruption naturelle si la privation temporaire de la possession résulte d'une force majeure. 1444. L'interruption naturelle produit son effet en faveur de toute personne intéressée. 1445. Si le possesseur a cessé volontairement de posséder pendant un certain temps, soit matériellement, soit intellectuellement, la possession est dite “discontinue:” l'effet de la discontinuité est réglé à l'article 1475. 1446. L'interruption civile résulte: 1°  D'une demande en justice, 2°  D'une citation ou d'une comparution volontaire en conciliation, 3°  D'un commandement ou d'une sommation, 4°  D'une saisie, 5°  D'une reconnaissance volontaire. Le tout, pourvu que lesdits actes de procédure ou de reconnaissance concernent clairement le droit contre lequel court la prescription et celui en faveur duquel elle est commencée. [2244.] 1446 bis. L'interruption civile ne produit son effet qu'au profit de celui par les soins ou au nom duquel l'acte interruptif a été fait et au profit de ses ayant-cause. 1447. La demande en justice, principale, incidente, ou reconventionnelle, interrompt la prescription, encore qu'elle soit nulle en la forme ou formée devant un tribunal incompétent. [Voy. 2246.] Toutefois, dans ces deux cas de nullité, l'interruption est réputée non avenue si une nouvelle citation régulière n'est pas donnée dans les deux mois du jugement qui a rejeté la première demande. 1448. L'interruption est encore réputée non avenue: 1°  Si la demande a été rejetée au fond, 2°  Si le demandeur s'en est désisté, 3°  Si l'instance a été déclarée périmée pour discontinuité des poursuites pendant le temps fixé par le Code de Procédure civile pour la péremption d'instance. [2247.] 1449. L'interruption résultant de la demande en justice dure autant que l'instance engagée, jusqu'à ce que le jugement soit devenu irrévocable. 1450. L'interruption de la prescription par la citation ou la comparution volontaire en conciliation a lieu, même dans les cas qui ne comportent pas ce préliminaire. Elle résulte des demandes reconventionnelles qui y sont formées, autant que de la demande principale. La nullité de la citation pour vice de forme ou pour incompétence n'empêche pas l'interruption, pourvu qu'une nouvelle citation régulière soit donnée dans le mois du rejet de la première. Dans le cas de non conciliation et dans celui de non comparution du défendeur, sur citation régulière, l'interruption est réputée non avenue si la demande en justice n'est pas formée dans le mois. [Voy. 2245; c. pr. civ., 57.] 1451. L'interruption résultant d'un commandement d'exécuter soit un jugement, soit une convention passée en forme exécutoire, est réputée non avenue s'il n'est fait dans l'année une saisie-exécution. [Comp. C. pr. civ., 674.] La nullité du commandement pour vice de forme n'empêche pas qu'il interrompe la prescription, pourvu qu'il remplisse les conditions prescrites ci-après pour l'interruption par sommation. 1452. La sommation d'exécuter une obligation n'interrompt la prescription que dans les cas où elle énonce clairement l'objet et la cause de l'obligation ainsi que la personne du débiteur, et si elle est suivie dans les six mois d'une demande en justice ou en conciliation. L'interruption de la prescription extinctive de l'hypothèque, par la sommation faite au tiers détenteur de délaisser l'immeuble ou de payer la dette est réglée à l'article 1311. 1453. L'interruption résultant de la saisie-exécution et de la saisie-arrêt ne conserve son effet que si la procédure de la saisie est continuée régulièrement jusqu'à sa terminaison; auquel cas, l'interruption est elle-même continue. La saisie conservatoire n'interrompt la prescription que si elle est suivie, dans les six mois, soit d'un commandement ou d'une saisie-exécution, soit d'une demande en justice ou en conciliation. Quand la saisie n'est pas pratiquée contre celui qui prescrit, elle n'a d'effet interruptif contre lui qu'à partir du moment où elle lui est notifiée. 1454. L'interruption de la prescription par la reconnaissance ou l'aveu du droit de celui contre lequel on prescrit peut avoir lieu en justice ou par acte extrajudiciaire, verbalement ou par écriture authentique ou privée. [2248.] La reconnaissance faite en justice peut être spontanée ou provoquée par un interrogatoire du juge. L'effet, par rapport à l'interruption, de la rétractation de l'aveu pour erreur de fait est réglé à l'article 1371. 1455. La reconnaissance peut être expresse ou tacite. Il y a reconnaissance tacite contre la prescription acquisitive, notamment, lorsque le possesseur acquiesce à une réclamation de fruits ou d'indemnité pour profits ou dégradations relatifs à la chose possédée, ou, en sens inverse, lorsqu'il réclame lui-même le remboursement de dépenses nécessaires ou utiles faites sur la chose. Il y a reconnaissance tacite contre la prescription libératoire, notamment, lorsque le débiteur acquiesce à une demande d'intérêts ou de payement total ou partiel de la dette, ou, en sens inverse, lorsqu'il fait lui-même des offres, même non réelles, ou une demande de délai de grâce. 1456. Le possesseur qui reconnaît le droit du véritable propriétaire n'est pas déchu, en général, du droit de recommencer aussitôt, contre lui et ses ayant-cause, une prescription nouvelle; mais il ne peut plus invoquer, à son égard, le bénéfice de sa bonne foi antérieure. Il est déchu de la prescription pour l'avenir, à l'égard de tous, s'il est constitué possesseur précaire, sauf l'application des deux cas de l'article 197, dans lesquels le vice de précarité de la possession est lui-même purgé. 1457. La prescription libératoire interrompue par la reconnaissance reprend son cours immédiatement; mais elle est soumise pour l'avenir au délai des longues prescriptions, quoique, primitivement, la prescription pût être plus courte. [2274, 2e al.] 1458. La reconnaissance interruptive de la prescription est valable lorsqu'elle est faite par ceux qui ont la capacité ou le pouvoir d'administrer, soit pour eux-mêmes, soit pour autrui, les biens que concerne la prescription. Toutefois, la reconnaissance faite par le mari, par le tuteur d'un incapable ou par un mandataire, à l'effet d'interrompre la prescription acquisitive d'un immeuble par la femme, par l'incapable ou par le mandant, n'est valable que sous les conditions auxquelles l'acquiescement à une demande immobilière rentre dans leurs pouvoirs généraux ou spéciaux. 1459. Si le fait de la reconnaissance interruptive de la prescription est contesté, il peut être prouvé par les modes ordinaires de preuve, en observant pour chacune les conditions auxquelles elle est soumise. 1460. Les effets de l'interruption de la prescription, par la reconnaissance ou autrement, à l'égard des divers intéressés, aux cas de cautionnement, de solidarité et l'indivisibilité active ou passive, sont réglés aux articles 1027, 1061, 1082 et 1091. [2249, 2250.] CHAPITRE IV. DE LA SUSPENSION DE LA PRESCRIPTION. Art. 1461. Les droits dont l'exercice est soumis à un terme certain ou incertain, de droit ou de grâce, ou dont la naissance est subordonnée à une condition suspensive ne se prescrivent qu'à partir de l'accomplissement du terme ou de la condition. [2257.] 1462. La prescription ne commence à courir contre les droits réels ou personnels dont l'existence, l'étendue ou l'exercice sont subordonnés à l'ouverture d'une succession qu'à partir de ladite ouverture. 1463. La prescription de l'action ou de l'exception de nullité appartenant à l'héritier contre le testament ou contre une convention de son auteur, d'où résulte une action contre lui, ne commence à courir qu'à partir du moment où soit le testament, soit la convention ont été invoqués contre lui ou ont servi de base à l'exercice d'un droit qui lui nuit. 1464. Dans les cas qui précèdent, la prescription n'est pas suspendue contre les tiers détenteurs; sauf à la partie intéressée qui veut interrompre la prescription acquisitive de la propriété ou la prescription extinctive de l'hypothèque, à demander un titre récognitif de son droit éventuel, ou à le faire reconnaître en justice, sans prendre d'autres conclusions actuelles. 1465. Lorsque la prescription est suspendue ou arrêtée pendant son cours, le temps déjà écoulé est compté au moment où elle recommence à courir. 1466. La prescription n'est suspendue qu'en faveur des personnes que la loi détermine. [2251.] 1467. Les prescriptions dont la durée est de cinq ans ou au-dessous courent contre les mineurs et les interdits, comme à l'égard des majeurs sains d'esprit; sauf leur recours contre leur tuteur, si celui-ci a négligé d'exercer leur droit ou l'a ignoré sans en être excusable. [Contrà 2252.] A l'égard des prescriptions de plus de cinq ans, le délai en est suspendu pendant la dernière année, de telle sorte que le mineur devenu majeur et l'interdit redevenu sain d'esprit aient toujours une année pour faire valoir leur droit. 1468. La prescription court, en général, en faveur des tiers contre la femme mariée; sauf son recours contre le mari, en cas de négligence de la part de celui-ci, à l'égard des biens qu'il administre pour elle. [2254.] Toutefois, la prescription est suspendue en faveur de la femme pendant la dernière année, dans les deux cas suivants: 1°  S'il s'agit de droits dont l'exercice par la femme est subordonné à une option retardée par l'effet de ses conventions matrimoniales ou par la loi; 2°  Si l'action de la femme contre les tiers avait dû réfléchir contre le mari, par voie de garantie ou autrement. [Voy. 2256.] 1469. Les dispositions des deux articles précédents ne préjudicient pas à ce qui est statué par les articles 567 et 568, au sujet de la suspension de la prescription de l'action en nullité des actes faits par les incapables eux mêmes. 1470. La prescription court entre époux pendant le mariage, à l'égard des droits qu'ils ont à exercer l'un contre l'autre. [Contrà 2253.] Toutefois, elle est suspendue pendant la dernière année, et s'il s'agit d'une prescription d'un an ou moins, elle est suspendue pour la dernière moitié de sa durée. Le délai pour la revendication d'un meuble est de trois mois, au cas de l'article 1481. Le tout, sans préjudice de la suspension portée à l'article suivant, à l'égard du mari administrateur des biens de sa femme et à l'article 1471 bis en faveur de la femme commune en biens. 1471. La prescription ne court pas en faveur de l'administrateur légal, judiciaire ou conventionnel des biens d'autrui, dans ses rapports avec celui pour lequel il administre et au sujet des droits qu'il est chargé de conserver. [Voy. 2258.] Elle ne recommence à courir que quand l'administration a cessé, et, s'il s'agit de la prescription d'un meuble, au cas de l'article 1481, elle ne s'accomplit que par trois mois. 1471 bis. La prescription est suspendue au profit de la succession pendant les délais donnés aux héritiers pour faire inventaire et délibérer sur leur acceptation ou leur répudiation. La femme commune en biens bénéficie de la même suspension pendant les délais qui lui sont accordés pour faire inventaire et délibérer sur son acceptation ou sa répudiation de la communauté; mais ces délais se confondent avec celui qui lui appartient d'après l'article 1468. [Contrà 2259.] 1472. Dans les cas non prévus ci-dessus, si, à l'époque où le délai de la prescription est expiré, l'ayant-droit était dans une impossibilité absolue d'agir, soit pour faire valoir son droit, soit pour interrompre la prescription, par suite de l'arrêt des communications ou parce que le cours de la justice locale se trouvait suspendu, il peut être relevé de la déchéance, s'il a formé sa demande aussitôt que l'obstacle a cessé. La même disposition est applicable en faveur des militaires et des marins, lorsqu'ils ont été empêchés d'exercer leurs droits en temps de guerre intérieure ou extérieure ou par suite d'un service extraordinaire et imprévu. 1473. La suspension de la prescription résultant du cautionnement, de la solidarité et de l'indivisibilité des droits réels ou personnels est réglée aux articles 311, 467, 1027, 1061, 1082 et 1092. CHAPITRE V. DE LA PRESCRIPTION ACQUISITIVE DES IMMEUBLES. Art. 1474. Pour la prescription acquisitive d'un immeuble, il faut une possession à titre de propriétaire, continue, non interrompue, paisible, publique et ayant la durée fixée ci-après. [2219.] La possession précaire, violente ou clandestine, telle qu'elle est déterminée aux articles 196 et 197 ne peut servir à la prescription. [2233, 2236 et s.] 1475. La possession est discontinue et ne peut servir à la prescription, quand le possesseur a volontairement cessé de faire, pendant un temps plus ou moins long, sur la chose qu'il était en voie de prescrire, les actes de maître que la chose comportait. Lorsque le possesseur reprend les actes de possession, le temps de sa possession antérieure ne lui est pas compté. 1476-1477. Si la possession, indépendamment des conditions ci-dessus exigées, est fondée sur un juste titre, tel qu'il est défini à l'article 194, et si elle est de bonne foi, conformément à l'article 195, le possesseur prescrit par quinze ans, sans distinguer la distance respective de la situation de l'immeuble au domicile ou à la résidence de celui contre qui a lieu la prescription. [Contrà 2265, 2266.] Si le possesseur ne peut justifier d'un juste titre ou même s'il en justifie et que sa mauvaise foi soit prouvée, comme il est prévu à l'article 199, le délai de la prescription acquisitive est de trente ans. [2262.] 1478. La prescription fondée sur un juste titre soumis par sa nature à la transcription ne se compte qu'à partir du jour où le titre a été transcrit. [voy. 2180.] 1479. Le titre nul en la forme ou annulé en justice est sans utilité pour la prescription. [2267.] 1480. La jonction ou continuation de possession de l'auteur à ses successeurs ou ayant-cause universels ou particuliers est réglée à l'article 204. CHAPITRE VI. DE LA PRESCRIPTION ACQUISITIVE DES MEUBLES. Art. 1481. Le bénéfice de la prescription appartient instantanément à celui qui a acquis par juste titre et de bonne foi la possession d'un objet mobilier corporel; sans préjudice de ce qui est dit aux articles 1470 et 1471. [v. 2279, 1er al.] Dans ce cas, le possesseur est présumé posséder à juste titre et de bonne foi, si le contraire n'est prouvé. 1482. Dans le cas même où le possesseur d'un objet mobilier a juste titre et bonne foi, si l'objet a été antérieurement volé au propriétaire ou perdu par lui, celui-ci peut le revendiquer contre le possesseur, pendant un an à partir de la perte ou du vol, lorsque le possesseur a reçu la chose, directement, du voleur même, de son complice, de l'inventeur ou de leur représentant; sauf le recours du possesseur contre celui de qui il tient la possession, s'il l'a reçue à titre onéreux. [Comp. 2279, 2e al.] Le présent article ne s'applique pas aux objets détournés par abus de confiance ou obtenus par escroquerie, lesquels sont régis par l'article précédent. 1483. Si la chose perdue ou volée a été achetée de bonne foi dans une vente aux enchères, dans un marché public, ou d'un marchand de choses pareilles ou d'objets de rencontre, la revendication ne peut être exercée par le propriétaire. [Secùs 2280.] 1483 bis. Dans le cas où le propriétaire ne peut revendiquer la chose contre le possesseur, par application des deux articles précédents, il peut agir par action personnelle pour la valeur de la chose contre celui qui avait traité directement avec le voleur, son complice, l'inventeur ou leur représentant. Ladite action reste limitée à un an, depuis la perte ou le vol, si l'acquisition a eu lieu de bonne foi. 1484. Des Règlements spéciaux déterminent la durée et les conditions de la revendication des titres de créances payables au porteur ou cessibles par la simple tradition du titre, lorsqu'ils ont été perdus ou volés. [L. 15 juin 1872; Décr. 10 avril 1873.] 1485. Dans les cas qui précèdent, si la possession est prouvée, par le revendiquant, être sans titre ou de mauvaise foi, la prescription ne s'accomplit que par trente ans. 1486. Les dispositions précédentes s'appliquent aux meubles immobilisés par destination, lorsqu'ils sont séparés de l'immeuble auquel ils étaient attachés. Elles ne s'appliquent pas aux objets qui ne sont meubles que par destination, d'après l'article 13, à moins qu'ils n'aient été séparés du sol. Elles ne s'appliquent pas non plus aux universalités de meubles, à l'égard desquelles la durée de la prescription est la même que pour les immeubles, sous les distinctions portées aux articles 1473 à 1475. 1486 bis. La prescription acquisitive des créances nominatives et des droits de propriété littéraire, artistique ou industrielle s'accomplit par dix ans si le possesseur a juste titre et bonne foi, et par trente ans si l'une de ces deux conditions lui manque. CHAPITRE VII. DE LA PRESCRIPTION LIBÉRATOIRE. Art. 1487. La prescription libératoire des obligations en général s'accomplit par trente ans d'inaction du créancier, à partir du moment où il avait le droit d'agir, lorsque la loi ne fixe pas un délai plus court ou ne déclare pas la créance imprescriptible. [2262, 2264.] 1488. Lorsque le capital d'une dette est payable par annuités ou fractions annuelles, comprenant ou non des intérêts, la prescription se compte séparément pour chaque annuité, à partir de son exigibilité. 1489. Quoique la créance soit une rente perpétuelle ou viagère dont le capital est inexigible, la prescription s'en accomplit par trente ans à partir de la date du titre. Mais, après vingt-huit ans de la même date, le créancier peut demander au débiteur un titre récognitif de son droit, à frais communs, pour interrompre la prescription. [2263.] Si le débiteur le refuse et que le créancier soit dans la nécessité de faire reconnaître son droit en justice, les frais sont, pour le tout, à la charge du débiteur. 1490 L'action personnelle en restitution du nantissement mobilier ou immobilier ne se prescrit qu'à partir de l'extinction de la dette par l'un des modes légaux ou par la prescription libératoire elle-même, laquelle n'est pas suspendue par le seul fait que le créancier est resté nanti, comme il est dit à l'article 1119. CHAPITRE VIII. DE QUELQUES PRESCRIPTIONS PARTICULIÈRES. Art. 1491. Les droits et actions relatifs à l'état civil des personnes ne sont prescriptibles que dans les cas où la loi en subordonne l'exercice à un délai particulier. [181, 183, 185, 328.] 1492. L'action en pétition d'hérédité, pour faire valoir la qualité d'héritier légitime ou de légataire ou donataire à titre universel ne se prescrit que par trente ans, à partir de l'ouverture de la succession, contre ceux qui possèdent, à l'un des mêmes titres, tout ou partie des biens du défunt. [133, 137.] 1493. La prescription libératoire est de cinq ans contre l'action en payement: 1°  Des intérêts, compensatoires ou moratoires, de sommes d'argent liquides; 2°  Des arrérages de rentes perpétuelles ou viagères; 3°  Des arrérages ou termes de pensions alimentaires ou de retraite; 4°  Des loyers ou fermages; 5°  Des prestations périodiques de fruits ou denrées; 6°  Des honoraires ou salaires des professeurs, secrétaires, commis, employés, domestiques, nourrices, lorsque lesdites rétributions sont fixées par année; Et, généralement, des dettes de sommes ou valeurs fixées par année, lors même que le payement doit en être effectué par périodes plus courtes. [2277.] Les débiteurs ne perdent pas le bénéfice de ladite prescription, lors même qu'en l'invoquant ils avouent n'avoir pas payé les sommes ou valeurs que le créancier a laissées s'accumuler. 1494. La prescription est de trois ans contre l'action: 1°  Des médecins, chirurgiens, sages-femmes et pharmaciens, au sujet de leurs soins, opérations et médicaments; [V. 2272, 1er al.] 2°  Des professeurs, employés et autres personnes désignées au n° 6 de l'article précédent, lorsque leur rétribution est fixée par périodes de moins d'un an et de plus d'un mois; 3°  Des ingénieurs, architectes, géomètres, dessinateurs, pour leurs plans, conseils et travaux professionnels; 4°  Des entrepreneurs de constructions, terrassements et autres ouvrages relatifs aux immeubles. 1495. La prescription est de deux ans contre l'action des notaires, avocats, huissiers et autres officiers publics, représentants ou assistants des parties contractantes ou des plaideurs, pour ce qui leur est dû à l'occasion de leur fonction. Dans ce cas, la prescription ne commence à courir qu'après la conclusion de l'acte ou la terminaison du procès qui a donné occasion à leur créance. Néanmoins, à l'égard des affaires non terminées, ils ne peuvent réclamer d'honoraires pour des actes remontant à plus de cinq ans. Les mêmes dispositions s'appliquent aux avances de fonds et aux déboursés faits par lesdits officiers à raison de leur fonction. [Voy. 2272, 2e al., 2273.] 1496. La prescription est d'un an contre l'action: 1°  Des marchands et fournisseurs, en gros ou en détail, de denrées, vêtements et autres objets mobiliers quelconques, à raison de leurs fournitures à des personnes non marchandes, ou même à des marchands ou à des industriels, lorsque lesdites fournitures ne sont pas relatives au commerce ou à l'industrie de ceux-ci; [2272, 3e al.] 2°  Des ouvriers ou fabricants travaillant à façon sur les matières ou les objets mobiliers de leurs clients, marchands, industriels ou non, sous la distinction qui précède; 3°  Des chefs d'institutions, maîtres d'école ou d'apprentissage, pour le prix de l'instruction, de la nourriture, de l'entretien et du logement de leurs élèves ou apprentis. [2272, 4e al.] 1497. La prescription est de six mois contre l'action: 1°  Des professeurs, employés, domestiques et autres personnes désignées aux articles 1493-6° et 1494-2°, lorsque leur rétribution est fixée par mois ou par périodes plus courtes; [2271, 1er al.] 2°  Des hôteliers, aubergistes, restaurateurs, pour le logement, la nourriture et les consommations par eux fournis; [2271, 2e al.] 3°  Des ouvriers, gens de travail ou hommes de peine, engagés à la journée, à la semaine, à la quinzaine ou au mois, pour leur salaire et les menues fournitures par eux faites à l'occasion de leur travail. [2271, 3e al.] 1498. La présomption de payement résultant de l'inaction du créancier pendant le délai des prescriptions réglées aux quatre articles précédents ne peut être invoquée par le débiteur qui avoue spontanément n'avoir pas effectivement payé ou qui, sur interrogation en justice, ne déclare pas qu'il estime de bonne foi ne plus rien devoir. S'il s'agit de l'héritier, de la veuve, ou d'un autre ayant-cause général du débiteur invoquant la prescription du chef de celui-ci, dans un des cas dont il s'agit, ils pourront être requis de déclarer de bonne foi qu'ils ne savent pas qu'il soit encore dû quelque chose, à ce titre, par leur auteur au demandeur. [Voy. 2275; c. com. 189.] 1499. Les juges, greffiers et avocats sont déchargés après trois ans depuis le jugement de la responsabilité des pièces qui leur ont été remises relativement aux affaires dans lesquelles ils sont intervenus, et dispensés de représenter la preuve de la restitution desdites pièces; [2276.] Les notaires sont déchargés des pièces à eux confiées après deux ans depuis la rédaction de leurs actes. Les huissiers sont déchargés de même après un an depuis l'exécution de leur commission. Mais ils peuvent être requis de faire procéder, dans le mois, à partir du jour où ils ont opposé la prescription, à des recherches dans leurs archives ou dépôts, moyennant le payement préalable d'un “droit de recherche” déterminé par les Règlements. 1500. Les prescriptions réglées au présent Chapitre cessent d'être applicables et font place à celle de trente ans, lorsqu'il y a eu entre les parties compte arrêté et liquidé ou reconnaissance de la dette pour un chiffre déterminé, ou jugement contre le débiteur. [2274, 2e al.] DISPOSITION TRANSITOIRE. Art. 1501. Les prescriptions se trouvant en cours au moment de la promulgation du présent Code seront soumises aux règles générales, conditions, prohibitions, interruptions et suspensions ci-dessus établies. En ce qui concerne leur durée, si l'ancienne prescription exigeait un plus long délai que la nouvelle, le possesseur ou le débiteur continuera à bénéficier de l'ancienne prescription, lorsque ce qui en restera à courir sera moins long que ne le serait le délai de la nouvelle prescription, compté depuis la promulgation du présent Code. A l'égard des anciennes prescriptions d'une durée plus courte que les nouvelles, le délai se prolongera de façon à atteindre une durée égale à celle fixée par le présent Code. [Secùs 2281.]