CODE CIVIL ESPAGNOL

参考原資料

  • Code civil espagnol (promulgué le 24 juillet 1889) , 1890 [Google Books]

備考

TITRE PRÉLIMINAIRE — DES LOIS, DE LEURS EFFETS ET DES RÈGLES GÉNÉRALES DE LEUR APPLICATION. Art. 1. — Les lois sont exécutoires dans la Péninsule, les îles adjacentes, les Canaries et les territoires d'Afrique soumis à la législation péninsulaire, vingt jours après leur promulgation, si elles ne contiennent pas de disposition contraire. La loi est réputée promulguée le jour où elle a été complètement insérée dans la Gaceta. 2. — L'ignorance de la loi ne dispense pas de lui obéir. 3. — Les lois n'ont pas d'effet rétroactif, à moins de dispositions contraires. 4. — Sont nuls les actes faits contrairement aux dispositions de la loi, sauf le cas où la même loi ordonne de les valider. On peut renoncer aux droits qu'accorde la loi, à moins que cette renonciation ne soit contraire à l'intérêt ou à l'ordre public, ou qu'elle cause préjudice à un tiers. 5. — Les lois s'abrogent uniquement par d'autres lois postérieures; la désuétude, l'usage, la pratique contraire ne peuvent dispenser de les observer. 6. — Le Tribunal, qui refuse de juger sous prétexte de silence, d'obscurité ou d'insuffisance de la loi, encourt une responsabilité. Lorsque la loi n'est pas exactement applicable à l'espèce discutée, on appliquera la coutume du lieu et les règles générales du Droit. 7. — Si dans la loi on parle de mois, jours ou nuits, on entendra que les mois sont de trente jours, les jours de vingt-quatre heures, et que les nuits durent depuis le coucher jusqu'au lever du soleil. Si les mois sont désignés par leurs noms, on comptera le nombre de jours qu'ils ont réellement. 8. — Les lois pénales, de police et de sûreté publique obligent tous ceux qui habitent le territoire espagnol. 9. — Les lois qui règlent les droits et les devoirs de famille, l'état, la condition et la capacité légale des personnes obligent les Espagnols, même s'ils résident en pays étranger. 10. — Les biens meubles sont régis par la loi du pays de leur propriétaire; les biens immeubles par celle du pays où ils sont situés. Néanmoins les successions légales et testamentaires, comme tout ce qui touche à l'ordre de succession, à l'importance des droits successoraux et à la valeur intrinsèque de ces dispositions, se règlent d'après la loi du pays de la personne décédée, quelle que soit la nature de ses biens et le pays où ils se rencontrent. Les habitants de la Biscaye, même résidant dans les villes, seront soumis, à la loi 15, titre 20 du Fuero de Biscaye pour les biens qu'ils possèdent dans la campagne. 11. — Les formes et solennités des contrats, testaments et de tous les actes publics se règlent d'après les lois du pays où ils sont faits. Quand les actes susdits sont faits à l'étranger par des agents diplomatiques ou consulaires d'Espagne, on observera dans leur rédaction les solennités établies par les lois espagnoles. Malgré les dispositions de cet article et du précédent, les lois prohibitives concernant les personnes, leurs actes, leurs biens, celles qui ont pour objet l'ordre public et les bonnes mœurs ne perdront point leur effet quels que soient les lois, jugements, dispositions ou conventions accordées à l'étranger. 12. — En tant qu'elles déterminent les effets des lois et statuts et les règles de leur application, les dispositions de ce titre sont obligatoires dans toutes les provinces du royaume. Il en sera de même des dispositions du titre 4, livre I. Quant au surplus, les provinces et territoires où subsiste un droit local (fuero), le conserveront dans toute son intégrité, sans qu'il souffre aucune altération dans son régime juridique écrit, ou coutumier. par suite de la publication de ce Code, qui ne sera applicable que comme loi supplémentaire, à défaut de dispositions dans les lois spéciales. 13. — Malgré la disposition de l'article précédent, ce Code entrera en vigueur dans l'Aragon et les îles Baléares en même temps que dans les provinces qui n'ont pas de droit communal, dans toutes ses dispositions qui ne sont pas contraires aux statuts provinciaux et aux usages actuellement en vigueur. 14. — Conformément aux dispositions de l'article 12, les règles établies aux articles 9, 10 et 11 sur les personnes, les actes et les biens des Espagnols à l'étranger et des étrangers en Espagne, sont applicables aux personnes, aux actes et aux biens des Espagnols qui sont sur des territoires ou provinces ayant des législations civiles différentes. 15. — Les droits et devoirs de famille, ceux relatifs à l'état, à la condition, à la capacité légale des personnes, aux successions testamentaires ou ab intestat, reconnues par ce Code, sont applicables: 1° Aux personnes nées dans les provinces et territoires de droit commun, de pères soumis au droit provincial si ces derniers durant la minorité de leurs enfants, ou si les enfants, dans l'année qui suivra leur majorité ou leur émancipation, déclarent leur volonté de se soumettre au Droit civil. 2° Aux fils de père décédé ou inconnu, et de mère originaire d'une province ou d'un territoire soumis au droit commun, encore qu'ils soient nés dans une province ou un territoire où subsiste le droit communal. 3° A ceux qui, originaires de provinces ou territoires de droit provincial, auraient obtenu le droit de cité en d'autres de droit commun. Pour les effets de cet article, on obtiendra le droit de cité par la résidence de dix ans dans des provinces ou territoires de droit commun, à moins qu'avant l'expiration de cette période, l'intéressé ne déclare sa volonté contraire; ou par une résidence de deux ans, si l'intéressé déclare que telle est sa volonté. Ces déclarations devront être faites devant le juge municipal, pour être inscrites sur le registre civil. En tout cas, la femme suivra la condition de son mari, les enfants non émancipés celle de leur père, ou, à son défaut, de leur mère. Les dispositions de cet article sont également applicables aux provinces et territoires espagnols de législation civile différente. 16. — On suppléera par les dispositions de ce Code, aux lacunes des lois spéciales dans les matières qu'elles régissent. LIVRE PREMIER — DES PERSONNES. TITRE PREMIER. — DES ESPAGNOLS ET DES ÉTRANGERS. 17. — Sont Espagnols: 1° Les personnes nées en territoire espagnol; 2° Les enfants de père et mère espagnols bien que nés hors de l'Espagne; 3° Les étrangers qui ont obtenu des lettres de naturalisation; 4° Ceux qui sans être naturalisés ont conquis droit de cité en quelque commune de la Monarchie. 18. — Les enfants, tant qu'ils restent soumis à la puissance paternelle, ont la nationalité de leurs pères. Pour que les enfants, nés de pères étrangers en territoire espagnol, puissent profiter du bénéfice que leur accorde le numéro 1 de l'article 17, il est indispensable que, en la forme et devant les fonctionnaires désignés en l'article 19, les pères déclarent opter, au nom de leurs enfants, pour la nationalité espagnole et renoncer à toute autre. 19. — Les fils d'étrangers, nés sur les terres espagnoles, devront déclarer, dans l'année qui suivra leur majorité ou leur émancipation, qu'ils désirent profiter de la qualité d'Espagnols que leur accorde l'article 17. Ceux qui se trouvent dans ce royaume feront cette déclaration devant le fonctionnaire chargé du registre civil de la commune où ils résident; ceux qui résident à l'étranger, devant un des agents consulaires ou diplomatiques du Gouvernement espagnol; ceux qui se trouvent en un pays, où le Gouvernement n'a aucun agent, s'adresseront au Ministre d'État d'Espagne. 20. — La qualité d'Espagnol se perd par la naturalisation en pays étranger, par l'acceptation d'un emploi d'un autre Gouvernement, ou par une prise de service dans les armées d'une puissance étrangère, sans l'autorisation du Roi. 21. — L'Espagnol, qui a perdu sa qualité en se faisant naturaliser en pays étranger, pourra la recouvrer à son retour dans le Royaume, en déclarant que telle est sa volonté devant le fonctionnaire chargé du registre civil du domicile qu'il élit pour faire faire l'inscription ad hoc et en renonçant à la protection du pavillon du pays étranger. 22. — La femme mariée suit la condition et la nationalité de son mari. L'Espagnole qui se marie avec un étranger pourra recouvrer la nationalité espagnole, en accomplissant les formalités exigées par l'article précédent. 23. — L'Espagnol qui perd sa qualité en acceptant une fonction d'un autre Gouvernement, ou en prenant du service dans les armées d'une puissance étrangère sans l'autorisation du Roi, ne pourra recouvrer la nationalité espagnole sans en obtenir préalablement la permission du Roi. 24. — L'enfant, né de père et mère espagnols en pays étranger, et qui a perdu la nationalité espagnole parce que son père l'avait perdue, pourra la recouvrer en accomplissant les conditions de l'article 19. 25. — Pour que les étrangers, qui ont obtenu des lettres de naturalisation ou droit de cité en quelque commune de la Monarchie, jouissent de la nationalité espagnole, il leur faut renoncer préalablement à leur ancienne nationalité, jurer la constitution de la Monarchie et s'inscrire comme Espagnols sur le registre civil. 26. — Les Espagnols qui transfèrent leur domicile dans un pays étranger, où on est considéré comme naturalisé par le seul fait de la résidence, doivent, pour conserver leur nationalité espagnole, déclarer que telle est leur volonté à l'agent diplomatique ou consulaire espagnol, qui devra les inscrire sur le registre des Espagnols résidents, ainsi que leurs femmes s'ils sont mariés, et leurs enfants s'ils en ont. 27. — Les étrangers jouissent en Espagne des droits que les lois civiles accordent aux Espagnols, sauf ce qui est dit à l'article 2 de la constitution de l'État et dans les traités internationaux. 28. — Les corporations, fondations et associations, reconnues par la loi et domiciliées en Espagne, jouiront de la nationalité espagnole tant qu'elles conserveront la qualité de personnes juridiques, conformément aux règles du présent Code. Les associations domiciliées à l'étranger auront en Espagne la situation et les droits déterminés par les traités et les lois spéciales. TITRE II. — DE LA NAISSANCE ET DE L'EXTINCTION DE LA PERSONNALITÉ CIVILE. CHAPITRE PREMIER. — DES PERSONNES. 29. — La naissance détermine la personnalité. Pourtant l'enfant conçu est réputé né pour tous les effets qui lui sont favorables, à la condition qu'il naisse dans les conditions que précise l'article suivant. 30. — Pour les effets civils, on ne réputera né le fétus que s'il a forme humaine et s'il vit 24 heures complètement séparé du sein de sa mère. 31. — Dans le cas où une femme met au monde plusieurs jumeaux, la priorité de naissance donne au premierné les droits que la loi reconnaît à l'aîné. 32. — La personnalité civile s'éteint par la mort de la personne. La minorité, la folie, l'imbécillité, la surdité muette, la prodigalité, l'interdiction civile ne sont que des restrictions de la personnalité juridique. Ceux qui se trouvent dans ces états sont susceptibles d'avoir des droits et des obligations, qu'ils naissent de leurs actes, ou des rapports entre les biens de l'incapable et un tiers. 33. — Entre deux ou plusieurs personnes appelées à se succéder, s'il existe un doute sur le point de savoir quelle est celle qui est morte la première, et si on soutient que la mort de l'une est antérieure à celle de l'autre, on doit le prouver. A défaut de preuve, on les présume mortes en même temps, et on ne tient pas compte de la transmission de droits de l'une à l'autre. 34. — Quant à la présomption de mort de l'absent et à ses effets, on les réglera au titre 8 de ce livre. CHAPITRE II. — DES PERSONNES JURIDIQUES. 35. — Sont personnes juridiques: 1° Les corporations, associations et fondations d'intérêt public reconnues par la loi. La personnalité commence au moment même où elles ont été valablement constituées, conformément au droit. 2° Les associations d'intérêt particulier, civiles, commerciales ou industrielles, auxquelles la loi accorde une personnalité distincte de chacun des associés. 36. — Les associations auxquelles se réfère le n°2 de l'article précédent, se règlent d'après les dispositions du contrat de société, selon la nature de chacune d'elles. 37. — La capacité civile des corporations se réglera par les lois qui les ont créées ou reconnues, celles des associations par leurs statuts, celle des fondations par les règles de leur institution, dûment approuvées par l'autorité administrative quand elle est nécessaire. 38. — Les personnes juridiques peuvent acquérir et posséder des biens de toute sorte, contracter des obligations et exercer les actions civiles ou criminelles conformément aux lois et aux règles de leur constitution. L'Église sera régie en ce point par le concordat intervenu entre les deux puissances, et les établissements d'instruction et de bienfaisance par les dispositions des lois spéciales. 39. — Après l'expiration du temps pendant lequel elles fonctionnaient légalement, après la réalisation du but pour lequel elles s'étaient constituées, ou alors qu'il leur est impossible d'y employer leur activité et leurs ressources, si les corporations cessent de fonctionner, on donnera à leurs biens la destination que les lois, les statuts, les clauses fondamentales avaient indiquée dans cette prévision. Si aucune disposition n'a été prise, on emploiera les biens à la réalisation d'un but analogue dans l'intérêt de la région, province ou ville qui devait particulièrement profiter de l'entreprise éteinte. TITRE III. — DU DOMICILE. 40. — Pour l'exercice des droits et l'accomplissement des obligations civiles, le domicile des personnes est au lieu de leur résidence habituelle et, s'il y a lieu, celui que détermine la loi de procédure civile. Le domicile des agents diplomatiques, résidant à l'étranger à cause de leur charge, et qui jouissent du droit d'exterritorialité, sera le dernier qu'ils ont occupé sur le territoire espagnol. 41. — Lorsque ni la loi qui les a créées et reconnues, ni les statuts de leur fondation ne fixent le domicile des personnes juridiques, on décidera qu'il existe au lieu où est établi leur représentant légal et où s'exécutent les actes principaux de leur institution. TITRE IV. — DU MARIAGE. CHAPITRE PREMIER. — DISPOSITIONS GÉNÉRALES. SECTION PREMIÈRE. — De la forme du mariage. 42. — La loi reconnaît deux formes de mariage: le canonique que doivent contracter tous ceux qui professent la religion catholique, et le civil qui se célébrera en la forme déterminée par ce Code. SECTION II. — Dispositions communes aux deux formes de mariage. 43. — Les promesses de mariage n'entraînent pas l'obligation de contracter mariage. Nul tribunal n'admettra qu'on en réclame l'accomplissement 1. 44. — Si la promesse a été faite par acte public ou privé par un majeur, ou par un mineur assisté de la personne dont le consentement est nécessaire à la célébration du mariage, ou si les publications ont été faites, celui qui refuse de se marier, sans cause légitime, sera obligé d'indemniser l'autre partie du dommage résultant de la promesse de mariage. L'action pour obtenir la réparation du préjudice dont parle le paragraphe précédent, ne pourra s'exercer que dans l'année à dater du jour du refus de célébration du mariage. 45. — Le mariage est interdit: 1° Au mineur qui n'a pas obtenu l'autorisation, et au majeur qui n'a pas sollicité le consentement des personnes qui doivent l'accorder l'une ou l'autre, dans les cas fixés par la loi. 2° A la veuve durant les trois cent un jours suivant la mort de son mari, ou avant son accouchement si elle était enceinte; de même à la femme dont le mariage aurait été déclaré nul, pendant les mêmes délais à compter du jour de la séparation légale. 3° Au tuteur et à ses descendants avec les personnes qu'il a ou qu'il a eues sous sa garde, tant que, la tutelle finie, les comptes n'ont pas été rendus; excepté dans le cas où le père de la personne soumise à la tutelle a autorisé le mariage par testament ou acte public. 46. — L'autorisation dont parle le n°1 de l'article précédent doit être accordée aux enfants légitimes par leur père; en cas de décès ou d'empêchement on devra la solliciter dans cet ordre, celui de la mère, des ancêtres paternels et maternels, et, à leur défaut, du conseil de famille. S'il s'agit d'enfants naturels reconnus, ou légitimés par lettre royale, le consentement devra être demandé à ceux qui les ont reconnus ou légitimés, à leurs ascendants et au conseil de famille, d'après l'ordre établi au paragraphe précédent. S'il s'agit d'enfants adoptifs, on demandera son consentement au père adoptif et à son défaut aux membres de la famille naturelle à laquelle il appartient. Les autres enfants illégitimes obtiendront le consentement de leur mère quand elle est légalement connue, et de leurs ascendants maternels dans la même situation, et, à défaut des uns et des autres, celui du conseil de famille. Aux chefs des maisons d'enfants trouvés, il appartient de consentir au mariage des personnes élevées dans leur établissement. 47. — Les enfants majeurs sont obligés de demander le consentement de leur père et à son défaut celui de leur mère. S'ils n'obtiennent pas de réponse, ou si elle est défavorable, on ne pourra célébrer le mariage que trois mois après la demande. 48. — L'autorisation et le consentement à la célébration du mariage devront se prouver ainsi que leur demande par des actes dressés par un notaire civil ou ecclésiastique, ou par le juge municipal du domicile de celui qui les aura demandés. De cette manière, on prouvera que le délai, auquel l'article précédent fait allusion, est expiré, lorsque le consentement aura été demandé-en vain. 49. — Aucune des personnes appelées à donner leur autorisation, ou leur consentement, n'est obligée d'indiquer les motifs sur lesquels elle se base pour l'accorder ou le refuser. On n'accorde aucun recours contre son refus. 50. — Si malgré la prohibition de l'article 45, les personnes désignées se marient, leur union sera valable; pourtant les contractants seront soumis aux règles suivantes, sans préjudice des dispositions du Code pénal: 1° Le mariage sera réputé fait avec une absolue séparation des biens, chaque époux gardera la propriété et l'administration de tous les biens qui lui appartiennent, il percevra les fruits, niais à charge de contribuer pour sa part au besoin du ménage. 2° Aucun des époux ne pourra recevoir de l'autre quoi que ce soit par donation ou testament. Le texte des deux dispositions précédentes ne s'applique pas dans le cas du n°2 de l'article 45, si une autorisation a été obtenue. 3° Si un des conjoints est mineur non émancipé, il ne prendra l'administration de ses biens qu'après avoir atteint sa majorité. Jusque-là il n'aura droit qu'à des aliments qui ne pourront dépasser le revenu de ses biens. 4° Dans le cas du n°3 de l'article 45, le tuteur perdra l'administration des biens de son pupille durant sa minorité. 51. — Le mariage canonique, ou civil, ne produira aucun effet civil, si l'un des époux était déjà légitimement marié. 52. — Le mariage se dissout par la mort de l'un des conjoints. SECTION III. — De la preuve du mariage. 53. — Les mariages, célébrés avant la promulgation de ce Code, se prouveront par les modes établis par les lois antérieures. Ceux qui seront contractés depuis se prouveront seulement par l'attestation de l'acte du registre civil. Si les registres n'avaient pas été tenus, s'ils avaient disparu, s'il y avait discussion devant un tribunal, on admettrait toute espèce de preuve. 54. — Dans le cas prévu par le second paragraphe de l'article précédent, la constante possession d'état des parents, unie à l'acte de naissance des enfants les présentant comme nés d'une union légitime, sera un des moyens de preuve du mariage des parents, à moins qu'on n'établisse que l'un d'eux était lié par un mariage antérieur. 55. — Le mariage contracté en un pays étranger, où les actes ne sont pas recueillis sur un registre régulier et authentique, peut se prouver par un des moyens de preuve admis quel qu'il soit. SECTION IV. — Des droits et des obligations du mari et de la femme. 56. — Les époux sont obligés à vivre réunis, à se garder fidélité et à se secourir mutuellement. 57. — Le mari doit protéger sa femme, et celle-ci obéir à son mari. 58. — La femme est obligée à suivre son mari là où il veut fixer sa résidence. Les tribunaux néanmoins pourront la dispenser de cette obligation si le mari transporte sa résidence au delà des mers ou en pays étranger. 59. — Le mari est l'administrateur des biens de la société conjugale, sauf les stipulations contraires et les dispositions de l'article 1384. S'il est âgé de moins de dix-huit ans, il ne pourra administrer sans le consentement de son père, et à défaut sans celui de sa mère, et en l'absence des deux sans celui de son tuteur. Il ne pourra non plus comparaître en justice sans l'assistance de ces personnes. En aucun cas, avant d'être arrivé à sa majorité, le mari ne pourra, sans le consentement des personnes désignées au paragraphe précédent, emprunter de l'argent, grever ou aliéner ses biens immeubles. 60. — Le mari est le représentant de sa femme. Celle-ci ne peut, sans son autorisation, comparaître en justice, soit en personne soit par l'intermédiaire d'un procureur. Toutefois cette autorisation n'est pas nécessaire pour se défendre contre une action au criminel, ni pour demander ou défendre dans les procès contre son mari, ou lorsque la femme a obtenu la permission conformément aux prescriptions de la loi sur la procédure civile. 61. — De même, la femme ne peut, sans l'autorisation ou la procuration de son mari, acquérir à titre gratuit ou onéreux, ni s'obliger, sauf dans les cas et dans les limites établies par la loi. 62. — Sont nuls les actes faits par la femme contrairement aux dispositions des articles précédents, sauf dans le cas où il s'agit de choses qui, par leur nature, sont destinées à l'entretien ordinaire de la famille; dans ce cas, les achats faits par la femme sont valables. Les achats de joyaux, meubles et objets précieux, faits sans l'autorisation du mari, ne seront validés que si ce dernier a consenti à ce que sa femme se serve et profite de ces objets. 63. — La femme pourra, sans le consentement de son mari. 1° Disposer par testament; 2° Exercer les droits et remplir les devoirs qui lui incombent sur la personne et les biens des enfants légitimes et des enfants naturels reconnus qu'elle aurait eus d'un autre homme. 64. — La femme jouira des honneurs de son mari, excepté de ceux qui sont strictement et exclusivement personnels, et elle les conservera tant qu'elle n'aura pas contracté un nouveau mariage. 65. — Seuls le mari et ses héritiers pourront réclamer la nullité des actes passés par la femme sans autorisation, ou permission régulière. 66. — Les prescriptions de cette section s'appliquent sans préjudice des dispositions de ce Code sur l'absence, l'incapacité, la prodigalité et l'interdiction du mari. SECTION V. — Des effets de la nullité du mariage et de ceux de la séparation de corps. 67. — Les effets civils des demandes et jugements en nullité du mariage, et en séparation de corps, peuvent s'obtenir devant les tribunaux ordinaires. 68. — Après l'introduction et l'admission des demandes dont il est parlé en l'article précédent, on adoptera les dispositions suivantes pendant la durée de l'instance: 1° Séparer les époux en tout cas; 2° Assigner une résidence à la femme dans les cas et formes prévus par la loi de procédure civile; 3° Confier les enfants aux soins de l'un des époux, ou des deux selon les cas; 4° Assigner des aliments à la femme et aux enfants qui ne sont point en la puissance de leur père; 5° Prendre les mesures nécessaires pour éviter que le mari, qui est cause de la séparation, ou contre lequel est formée la demande en nullité de mariage, ne puisse causer préjudice à la femme dans l'administration de ses biens. 69. — Le mariage contracté de bonne foi produit des effets civils, même s'il est déclaré nul. Si la bonne foi n'a existé que du côté d'un seul époux, il ne produit d'effets civils que vis-à-vis de cet époux et des enfants. La bonne foi se présume, si la preuve du contraire n'est pas faite. Si le mariage a été contracté de mauvaise foi par les deux époux, il ne produira ses effets civils que vis-à-vis des enfants. 70. — Une fois la nullité du mariage prononcée, les enfants mâles de plus de trois ans seront confiés à la garde du père, les filles à la garde de la mère, si les deux époux avaient été de bonne foi. Si la bonne foi n'existait que chez un des époux, on remettra sous sa garde et en sa puissance les enfants des deux sexes. Si les deux époux étaient de mauvaise foi, le tribunal statuera sur le sort des enfants dans la forme prévue par le paragraphe second du n°2 de l'article 73. Les fils et filles mineurs de trois ans seront en tout cas, jusqu'à l'accomplissement de cet âge, confiés à leur mère, à moins que le jugement n'ait pris d'autres dispositions. 71. — Les prescriptions des paragraphes premier et second de l'article précédent ne seront point appliquées si les parents d'un commun accord ont assuré d'une autre façon les soins nécessaires. 72. — L'exécution du jugement de nullité produira, sur les biens des époux, les mêmes effets que la dissolution du mariage par la mort: toutefois le conjoint, qui aura agi de mauvaise foi, n'aura pas droit aux acquêts. Si la mauvaise foi existait chez les deux époux, ses effets s'annuleront. 73. — Le jugement de séparation produira les effets suivants: 1° La séparation des époux. 2° Le maintien ou la remise des enfants sous la puissance et la protection de l'époux innocent. Si les deux époux sont coupables, on donnera un tuteur à leurs enfants conformément aux prescriptions de ce Code. Néanmoins, si le jugement n'a pas de disposition contraire, la mère conservera toujours sous sa garde les enfants mineurs de trois ans. A la mort de l'époux innocent, le coupable recouvrera sa puissance paternelle et tous ses droits, lorsque la cause qui donna lieu à la séparation aura été l'adultère, les excès ou les injures graves. La privation de la puissance paternelle et de ses droite n'exempte pas l'époux coupable dé l'accomplissement des obligations que ce Code lui impose envers ses enfants. 3° L'époux coupable perdra tout ce qui lui a été promis ou donné par l'innocent, ou par un tiers à cause de lui; l'époux innocent conservera tout ce qu'il aura reçu du coupable, il pourra en outre réclamer incontinent ce qui lui aurait été promis. 4° Le partage des biens de la société conjugale et la perte de l'administration des biens de la femme, dans le cas où le mari l'avait et où c'est lui qui a fourni sa cause à la séparation. 5° La conservation de l'administration des biens de la femme au profit du mari innocent, la femme n'ayant plus droit qu'à des aliments. 74. — La réconciliation met fin à l'instance en séparation et laisse sans effet, pour l'avenir, le jugement intervenu; toutefois les conjoints doivent la porter à la connaissance du tribunal qui doit juger ou qui a jugé le procès. Sans préjudicier aux dispositions du paragraphe précédent, les effets du jugement de séparation subsisteront à l'égard des enfants s'il est fondé sur les efforts séparés ou réunis du mari ou de la femme pour corrompre leurs fils et prostituer leurs filles. En ce cas, si les uns et les autres restent soumis à la puissance paternelle, le tribunal prendra les mesures propres à les préserver de la corruption ou de la prostitution. CHAPITRE II. — DU MARIAGE CANONIQUE. 75. — Les conditions, formes et solennités de la célébration du mariage canonique sont régies par les constitutions de l'Église catholique et du Saint Concile de Trente, reçues comme lois du royaume. 76. — Le mariage canonique produira tous les effets civils quant aux personnes et aux biens des époux et de leurs descendants. 77. — A la célébration du mariage canonique sera présent le juge municipal ou un autre fonctionnaire de l'État, dans le seul but d'assurer son inscription immédiate sur le registre civil. A cet effet, les contractants sont tenus de faire connaître par écrit au tribunal municipal, au moins vingt-quatre heures avant, le jour, l'heure et le lieu où doit se célébrer le mariage, encourrant s'ils ne le font pas une amende de 5 à 80 pesetas. Le juge municipal donnera aux contractants récépissé de cet avis. S'il refuse de le donner, il sera passible d'une amende qui ne pourra être de moins de 20 pesetas, ni de plus de 100. On ne procédera pas à la célébration du mariage si le récépissé n'a pas été présenté au curé de la paroisse. Si le mariage se célèbre sans la présence du juge municipal ou de son délégué, quoique les contractants lui en aient donné avis, la transcription de l'acte du mariage canonique sur le registre civil se fera à ses frais et il paiera en outre une amende qui ne sera de moins de 20 pesetas, ni de plus de 100. En ce cas, le mariage produira tousses effets civils du moment de sa célébration. Si ce sont les contractants qui sont en faute pour n'avoir pas donné avis au juge municipal, ils pourront réparer leur faute en sollicitant l'inscription de leur mariage sur le registre civil. En ce cas le mariage ne produira ses effets civils que du jour de l'inscription. 78. — Ceux qui contracteront un mariage canonique in articula mords pourront en donner avis au fonctionnaire chargé du registre civil, à tout moment avant la célébration et donner, en quelque forme que ce soit, mandat à un tiers de remplir cette obligation. Les peines applicables à ceux qui omettent cette formalité ne sont pas applicables au cas de mariage in articulo mortis, s'il a été impossible de donner l'avis en temps opportun. En tout cas, pour que le mariage produise ses effets civils depuis la date de sa célébration, l'acte religieux devra être inscrit sur le registre dans les dix jours suivants. 79. — Le mariage secret, célébré devant l'Église, n'est assujetti à aucune formalité du droit civil; il ne produira d'effets civils qu'après sa publication au moyen de son inscription sur le registre. Ce mariage produira néanmoins ses effets civils depuis sa célébration si les deux contractants, d'un commun accord, sollicitent de l'évêque qui l'a autorisée une expédition de l'acte inscrit sur le registre secret de l'évêché, et la remettent directement avec les réserves voulues à la direction générale du registre civil en demandant leur inscription. A cet effet, la direction générale tiendra un registre spécial et secret et prendra les précautions nécessaires pour qu'on ne connaisse pas le contenu de ses mentions, jusqu'au jour où les parties demandent qu'on les rende publiques, en les translatant sur le registre municipal de leur domicile. 80. — La connaissance des procès en nullité et en séparation de corps, lorsque le mariage sera canonique, appartiendra aux tribunaux ecclésiastiques. 81. — Encore qu'une demande en séparation de corps ou en nullité de mariage ait été intentée devant un tribunal ecclésiastique, il appartient au tribunal civil de prescrire, sur la demande de la partie intéressée, les mesures indiquées dans l'article 68. 82. — La sentence définitive sur une instance en nullité de mariage, ou en séparation de corps, sera inscrite sur le registre civil, et on la présentera au tribunal ordinaire pour demander son exécution en ce qui concerne ses effets civils. CHAPITRE III. — DU MARIAGE CIVIL. SECTION PREMIÈRE. — De la capacité des contractants. 83. — Ne peuvent contracter mariage: 1° Les hommes mineurs de quatorze ans accomplis et les femmes mineures de douze ans accomplis. On considérera comme ratifié ipso facto, et sans qu'il soit besoin d'une déclaration expresse, le mariage contracté par des impubères si, un jour après avoir atteint l'âge de la puberté légale, ils continuent à vivre réunis sans réclamer en justice contre la validité de leur mariage, ou bien si la femme a conçu avant l'âge de la puberté légale et avant d'avoir formulé une réclamation. 2° Ceux qui ne seraient pas dans le plein exercice de leur raison au moment de contracter mariage. 3° Ceux qui sont atteints d'impuissance physique absolue ou relative, dès avant la célébration du mariage, si cet état est certain, permanent et incurable. 4° Ceux qui, ayant reçu les ordres sacrés, ou ayant fait profession dans un ordre religieux canoniquement approuvé, sont liés par le vœu solennel de chasteté, à moins que les uns ou les autres n'aient obtenu les dispenses canoniques nécessaires. 5° Ceux qui sont encore dans les liens du mariage. 84. — Ne peuvent non plus contracter mariage entre eux: 1° Les ascendants et les descendants légitimes ou naturels, ou les alliés du même degré. 2° Les collatéraux de la famille légitime jusqu'au quatrième degré. 3° Les collatéraux par alliance de la famille légitime jusqu'au quatrième degré. 4° Les collatéraux de la famille naturelle et leurs alliés jusqu'au second degré. 5° Le père et la mère adoptifs et l'adopté, l'époux de l'un de ces parents devenu veuf et l'adopté, l'un de ces parents et l'époux de l'adopté devenu veuf. 6° Les descendants légitimes de l'adoptant et l'adopté tant que subsiste l'adoption. 7° Les condamnés pour adultère constaté par sentence définitive. 8° Ceux qui auraient été condamnés comme auteurs, ou comme coauteurs et complices du meurtre du conjoint d'un des futurs époux. 85. — Le gouvernement peut, pour de justes motifs, accorder, sur la demande de la partie, des dispenses pour l'empêchement désigné dans le n°2 de l'article 45; les troisième et quatrième degrés de parentés dans la famille légitime; les empêchements nés de l'alliance légitime ou naturelle entre collatéraux et ceux qui frappent les descendants de l'adopté. SECTION II. — De la célébration du mariage. 86. — Ceux qui, conformément aux dispositions de l'article 42, voudront contracter mariage dans la forme prescrite par ce Code, présenteront au juge municipal une déclaration signée des deux parties et constatant: 1° Les nom, prénoms, état, profession, domicile ou résidence des parties; 2° Les nom, prénoms, profession, domicile ou résidence de leurs parents. On joindra à cette déclaration l'acte de naissance et d'état des parties, l'autorisation ou le consentement de leurs parents, selon qu'il échet, et la dispense quand elle est nécessaire. 87. — On ne pourra célébrer le mariage sans que la partie soit réellement présente, ou représentée par un mandataire porteur d'un pouvoir spécial. Mais il sera nécessaire d'avoir l'assistance du contractant domicilié ou résidant dans le district du juge qui doit célébrer le mariage. On indiquera dans le pouvoir le nom de la personne avec laquelle le mariage doit se célébrer et il sera valable si, avant la célébration du mariage, on n'a pas notifié au mandataire, en la forme authentique, la révocation de son pouvoir. 88. — Si le juge municipal, choisi pour la célébration du mariage, n'est pas celui des deux contractants, on présentera deux déclarations, une devant le juge municipal de chaque contractant, en désignant celui des deux juges qui est choisi pour célébrer le mariage, et dans les deux tribunaux s'accompliront les formalités établies par les articles suivants. 89. — Le juge municipal, de l'accord préalable des futurs, fera apposer des affiches ou publications pendant un espace de quinze jours, en annonçant le projet de mariage, avec toutes les indications mentionnées en l'article 86, et en requérant tous ceux qui auraient connaissance d'un empêchement de le dénoncer. Le juge enverra de semblables affiches aux juges municipaux des communes où les intéressés auraient eu leur domicile, ou leur résidence, dans les deux dernières années, en les chargeant de les faire afficher dans la salle de l'audience publique pendant quinze jours, et, ce délai passé, de les leur renvoyer avec l'attestation que la formalité a été remplie et qu'aucun empêchement n'a été signalé. 90. — Les militaires en activité de service, qui auraient l'intention de contracter mariage, seront dispensés de la publication des affiches hors du lieu de leur résidence, en présentant un certificat de leur liberté délivré par le chef du corps auquel ils appartiennent. 91. — Si les intéressés sont étrangers, et qu'ils n'aient pas deux ans de résidence en Espagne, ils prouveront par un certificat en forme, donné par l'autorité compétente, que, dans le lieu où ils ont eu leur domicile, ou leur résidence, durant les deux ans précédents, on a fait les publications du mariage qu'ils voulaient contracter, avec les solennités exigées. 92. — Dans tous les autres cas, le gouvernement pourra seul dispenser de la publication des affiches pour causes graves, dûment justifiées. 93. — Nonobstant les dispositions des articles précédents, le juge municipal autorisera le mariage de ceux qui se trouvent dans un imminent danger de mort, qu'ils soient domiciliés dans la localité, ou qu'ils y soient de passage. Ce mariage sera conditionnel tant que la preuve de la liberté des contractants n'aura pas été légalement faite. 94. — Les officiers des navires de guerre et les capitaines des navires marchands autorisent les mariages qui se célèbrent à leur bord en imminent danger de mort. Ces mariages sont également conditionnels. 95. — La disposition de l'article précédent est applicable aux chefs de corps militaires en campagne, à défaut de juge municipal, pour les individus de ces corps qui seraient in articulo mortis. 96. — Les quinze jours dont parle l'article 89 étant écoulés sans qu'aucun empêchement ait été signalé et, le juge municipal n'en connaissant pas lui-même, on procédera à la célébration du mariage de la façon déterminée par ce Code. S'il s'est écoulé une année depuis la publication des affiches sans que le mariage ait été célébré, on ne pourra le célébrer sans nouvelle publication. 97. — Si avant la célébration du mariage il se présente une personne s'y opposant, en alléguant un empêchement légal, ou si le juge municipal sait qu'il en existe un, il suspendra la célébration du mariage jusqu'à ce que l'inexistence ou la fausseté de l'empêchement ait été déclarée par jugement définitif. 98. — Tous ceux qui ont connaissance du projet de mariage sont tenus de dénoncer tous les empêchements qu'ils savent exister. La dénonciation sera transmise au Ministère fiscal qui, si elle a une base légale, formera opposition au mariage. Seuls les particuliers qui ont intérêt à empêcher le mariage pourront formuler par eux-mêmes leur opposition. Dans l'un et dans l'autre cas, elle devra être présentée conformément aux dispositions de la loi de procédure civile et jugée comme les incidents. 99. — Si une décision définitive déclare que les empêchements allégués sont faux ou que la preuve n'en a pas été suffisante pour admettre l'opposition au mariage, celui qui l'a faite est obligé d'indemniser du dommage et du préjudice souffert. 100. — Le mariage se célébrera, lorsque comparaîtront devant le juge municipal les deux contractants, ou l'un d'eux et la personne qui a obtenu de l'absent le pouvoir spécial de la représenter, ainsi que deux témoins majeurs et sans incapacité légale. Alors le juge municipal, après avoir lu les articles 56 et 59 de ce Code, demandera à chacun des contractants s'il persiste dans sa résolution de contracter mariage et si effectivement il le contracte. Sur la réponse affirmative de l'un et de l'autre, il dressera l'acte de mariage avec toutes les mentions nécessaires pour constater l'accomplissement des formalités exigées par cette section. Cet acte sera signé par le juge, les parties, les témoins et le secrétaire du tribunal. Les consuls et vice-consuls exerceront les fonctions de juges municipaux pour les mariages d'Espagnols contractés à l'étranger. SECTION III. — De la nullité du mariage. 101. — Sont nuls: 1° Les mariages célébrés entre les personnes auxquelles se réfèrent les articles 83 et 84, sauf les cas de dispense. 2° Celui contracté par erreur sur la personne, ou par force, ou par une crainte grave viciant le consentement. 3° Celui contracté par le ravisseur avec la personne enlevée, tandis qu'elle se trouve en son pouvoir. 4° Celui qui se célèbre sans l'intervention du juge municipal compétent, ou de celui qu'il doit autoriser à sa place ou sans la présence des témoins qu'exige l'article 100. 102. — L'action en nullité de mariage appartient aux époux, au Ministère fiscal, ou à toute autre personne qui y a intérêt. On excepte les cas de rapt, d'erreur, de violence, dans lesquels l'action appartient seulement à l'époux qui les a soufferts, ainsi que le cas d'impuissance, où l'action appartient à l'un ou à l'autre époux et aux personnes intéressées à la nullité. L'action devient caduque et les mariages valables dans ces différents cas, si les époux ont vécu ensemble durant six mois, depuis la découverte de l'erreur, ou depuis que la violence, ou la cause de crainte ont cessé, ou depuis que la personne enlevée a recouvré sa liberté, sans que la demande en nullité ait été intentée. 103. — Les tribunaux civils connaîtront des procès en nullité des mariages célébrés d'après les dispositions de ce chapitre; ils prendront les mesures indiquées en l'article 68 et statueront définitivement. SECTION IV. — De la séparation de corps. 104. — La séparation de corps n'a pour effet que de suspendre la vie commune des époux. 105. — Les causes légitimes de séparation sont: 1° L'adultère de la femme en tous cas, et celui du mari quand il y a eu scandale public ou mépris de la femme. 2° Les mauvais traitements et les injures graves. 3° La violence exercée par le mari sur la femme pour l'obliger à changer de religion. 4° La proposition que le mari fait à sa femme de se prostituer. 5° L'effort du mari, ou de la femme, pour corrompre les fils ou prostituer les filles, ainsi que leur connivence pour cette corruption et cette prostitution. 6° La condamnation d'un époux aux fers ou à la réclusion perpétuelle. 106. — La séparation ne peut être demandée que par l'époux innocent. 107. — La disposition de l'article 103 sera applicable aux procès de séparation et à leurs incidents. TITRE V. — DE LA PATERNITÉ ET DE LA FILIATION. CHAPITRE PREMIER. — DES ENFANTS LÉGITIMES. 108. — On présume légitimes les enfants nés plus de cent quatre-vingt jours après la célébration du mariage, et moins de trois cents après sa dissolution, ou la séparation des époux. Contre cette présomption on n'admettra d'autre preuve que celle de l'impossibilité matérielle où se trouverait le mari de se réunir à sa femme pendant les premiers cent vingt jours de la période des trois cents précédant la naissance. 109. — L'enfant sera présumé légitime encore que sa mère ait protesté contre sa légitimité, ou ait été condamnée pour adultère. 110. — On présumera légitime l'enfant né dans les cent quatre-vingts jours après la célébration du mariage, si on se trouve dans l'une des circonstances suivantes: 1° Si le mari a connu avant le mariage la grossesse de sa femme. 2° Si, présent, il a consenti à l'apposition de son nom dans l'acte de naissance de l'enfant auquel sa femme a donné le jour. 3° S'il l'a reconnu comme son enfant expressément ou tacitement. 111. — Le mari ou ses héritiers pourront désavouer la paternité de l'enfant né plus de trois cents jours après la dissolution du mariage, ou la séparation légale et effective des époux; mais l'enfant et sa mère auront le droit de prouver, dans ce cas, la paternité du mari. 112. — Les héritiers ne pourront attaquer la légitimité de l'enfant que dans les cas suivants: 1° Si le mari est décédé avant l'expiration du délai fixé pour introduire son action en justice. 2° S'il meurt après avoir introduit sa demande et sans s'en être désisté. 3° Si l'enfant naît après la mort du mari. 113. — L'action en désaveu de paternité devra être introduite dans les deux mois après l'inscription de la naissance sur le registre, si elle a lieu dans l'endroit où est le mari, ou quelqu'un de ses héritiers lorsque l'action leur est dévolue. Sont-ils absents ? le délai sera de trois mois s'ils résident en Espagne et de six s'ils sont au dehors. Ce délai commencera à courir du jour de la découverte de la fraude. 114. — Les enfants légitimes ont droit: 1° De porter les noms de leur père et de leur mère. 2° De recevoir d'eux des aliments ainsi que de leurs ascendants et même de leurs frères conformément à l'article 143. 3° A la réserve et à tous les droits successoraux que ce Code reconnaît. CHAPITRE II. — DES PREUVES DE LA FILIATION DES ENFANTS LÉGITIMES. 115. — La filiation des enfants légitimes se prouve par l'acte de naissance dressé sur le registre civil, ou par titre authentique, ou par jugement définitif dans les cas prévus par les articles 110 et 113 du chapitre précédent. 116. — A défaut des titres énumérés dans l'article précédent, la filiation se prouvera par la constante possession d'état d'enfant légitime. 117. — A défaut d'acte de naissance, de titre authentique, de jugement définitif ou de possession d'état la filiation légitime pourra se prouver par tout moyen, pourvu qu'il existe un commencement de preuve par écrit, émané des deux parents, qu'il résulte de deux actes séparés ou d'un seul. 118. — L'action en réclamation de légitimité appartient à l'enfant pendant toute sa vie; et elle passe aux héritiers s'il meurt en état de minorité ou de démence. Dans ces cas, ses héritiers auront cinq ans pour intenter l'action. L'action intentée par l'enfant se transmet par sa mort à ses héritiers, si elle n'a pas été périmée auparavant. CHAPITRE III. — DES ENFANTS LÉGITIMÉS. 119. — On ne peut légitimer que les enfants naturels. Sont enfants naturels ceux qui sont nés hors mariage de parents qui auraient pu se marier avec ou sans dispense. 120. — La légitimation aura lieu: 1° Par le mariage subséquent des parents; 2° Par lettre royale. 121. — Ne seront considérés comme légitimés par un mariage subséquent que les enfants reconnus par leurs parents avant, ou après la célébration du mariage. 122. — Les enfants légitimés par mariage subséquent jouiront des mêmes-droits que les enfants légitimes. 123. — Dans tous les cas la légitimation produira ses effets depuis le jour du mariage. 124. — La légitimation des enfants décédés avant la célébration du mariage profitera à leurs descendants. 125. — Pour obtenir la légitimation par lettre royale on devra réunir les conditions suivantes: 1° Que la légitimation par mariage subséquent soit impossible; 2° Qu'elle soit demandée par les parents ou par l'un d'eux; 3° Que le père ou la mère qui la demande n'ait pas d'enfants légitimes ou légitimés par mariage, ni de descendants d'eux; 4° Que le demandeur, s'il est marié, obtienne le consentement de son conjoint. 126. — La légitimation par lettre royale pourra encore être obtenue par l'enfant dont les père et mère prédécédés ont manifesté, dans leur testament ou dans un autre acte public, leur volonté de le légitimer; mais il faudra qu'ils remplissent la condition stipulée par le n°3 de l'article précédent. 127. — La légitimation par lettre royale donne au légitimé le droit: 1° De porter le nom de ses père et mère qui l'ont sollicitée; 2° De recevoir d'eux des aliments de la manière fixée par l'article 143; 3° De recueillir la part successorale fixée par ce Code. 128. — La légitimation pourra être attaquée par ceux qui pensent qu'elle préjudicie à leurs droits lorsqu'elle a été accordée à des enfants qui n'ont pas la condition légale d'enfants naturels, ou qui ne remplissent pas les conditions fixées par ce chapitre. CHAPITRE IV. — DES ENFANTS ILLÉGITIMES. SECTION PREMIÈRE. — De la reconnaissance des enfants naturels. 129. — L'enfant naturel peut être reconnu par son père et sa mère, ou par un des deux. 130. — Dans le cas où la reconnaissance n'a été faite que par l'un des parents, on présumera l'enfant naturel si celui qui le reconnaît avait, au temps de sa conception, la capacité voulue pour contracter mariage. 131. — La reconnaissance de l'enfant naturel se fera dans l'acte de naissance, dans un testament, ou dans un autre document public. 132. — Lorsque le père ou la mère reconnaît l'enfant par acte séparé, il ne peut révéler le nom de la personne avec laquelle il l'a eu, ni indiquer aucune circonstance permettant de la reconnaître. Les fonctionnaires publics ne recevront aucun acte manquant à cette prescription. Si malgré cette prohibition ils en recevaient, ils seraient passibles d'une amende de 125 à 500 pesetas. 133. — L'enfant majeur ne pourra être reconnu sans son consentement. Quand la reconnaissance ne sera pas faite dans l'acte de naissance ou dans un testament, elle devra être sanctionnée par jugement, le ministère public entendu. Le mineur pourra, dans tous les cas, attaquer sa reconnaissance dans les quatre ans qui suivront sa majorité. 134. — L'enfant naturel reconnu a droit: 1° De porter le nom de celui qui l'a reconnu; 2° De recevoir de lui des aliments conformément à l'article 143; 3° De percevoir, quand il y a lieu, la part héréditaire fixée par ce Code. 135. — Le père Sera tenu de reconnaître son enfant naturel dans les cas suivants: 1° Quand il existe un écrit émané certainement de lui et reconnaissant expressément sa paternité; 2° Quand l'enfant se trouve en possession continue d'état d'enfant naturel du père qu'il réclame, et qu'il la justifie par des actes émanés de ce père ou de sa famille. Dans les cas de viol, d'attentat et de rapt, on se conformera aux dispositions du Code pénal pour la reconnaissance de l'enfant. 136. — La mère sera obligée de reconnaître son enfant naturel: 1° Lorsque l'enfant se trouve, vis-à-vis de sa mère, dans un des cas prévus par l'article précédent; 2° Lorsqu'on prouve péremptoirement le fait de son accouchement et l'identité de l'enfant. 137. — Les actions en reconnaissance d'enfant naturel ne pourront s'exercer que pendant la vie des parents présumés, sauf dans les cas suivants: 1° Si le père et la mère sont décédés pendant la minorité de l'enfant: il pourra dans ce cas introduire son action jusqu'à l'expiration des quatre premières années qui suivront sa majorité; 2° Si, après le décès du père ou de la mère, on découvre un acte, dont on n'avait pas connaissance, et dans lequel ils reconnaissaient expressément leur enfant. Dans ce cas l'action devra s'introduire dans les six mois suivant la découverte du document. 138. — La reconnaissance faite en faveur d'un enfant, qui ne réunit pas les conditions du paragraphe second de l'article 119, ou celle pour laquelle on aura violé les prescriptions de cette section, pourra être attaquée par ceux qui en éprouvent un préjudice. SECTION II. — Des autres enfants illégitimes. 139. — Les enfants illégitimes, qui ne sont pas dans la condition légale des enfants naturels, ne peuvent exiger de leurs parents que des aliments, conformément à l'article 143. 140. — Le droit aux aliments dont parle l'article précédent s'exercera uniquement: 1° Si la paternité ou la maternité résulte d'un jugement définitif prononcé au civil ou au criminel; 2° Si la paternité ou la maternité résulte d'un document certain, émané du père ou de la mère, et dans lequel la filiation est expressément reconnue; 3° Quant à la mère toutes les fois qu'on prouvera péremptoirement le fait de l'accouchement et l'identité de l'enfant. 141. — Hors les cas mentionnés dans l'article précédent, sous les n°s 1 et 2, on ne recevra en justice aucune demande ayant pour objet de rechercher directement ou indirectement la paternité des enfants illégitimes, qui n'ont pas la situation d'enfants naturels. TITRE VI. — DES ALIMENTS ENTRE PARENTS. 142. — On entend par aliments tout ce qui est nécessaire pour la nourriture, l'habitation, le vêtement et les soins médicaux, selon la position sociale de la famille. Les aliments comprennent en outre l'éducation et l'instruction de celui qui les reçoit, s'il est mineur. 143. — Sont réciproquement obligés à se fournir des aliments dans l'entière généralité de l'article précédent: 1° Les époux; 2° Les ascendants et les descendants légitimes; 3° Les parents et les enfants légitimés par lettre royale et les descendants légitimes de ces derniers; 4° Les parents et les enfants naturels reconnus et les descendants légitimes de ces derniers. Les parents et les enfants illégitimes, qui ne se trouvent pas dans les conditions des enfants naturels, se doivent, à titre d'aliments, les secours nécessaires pour assurer leur existence. Les parents sont en outre obligés de procurer à leurs enfants l'instruction élémentaire et l'enseignement d'une profession, d'un art ou d'un métier. Les frères doivent aussi à leurs frères légitimes, même utérins ou consanguins, les secours nécessaires pour la vie, quand, par une infirmité physique ou morale, ou pour toute autre cause qu'on ne saurait leur reprocher, ils ne peuvent se procurer leur subsistance. Dans ces secours sont alors compris les frais nécessaires pour procurer l'instruction élémentaire et l'enseignement d'une profession, d'un art, ou d'un métier. 144. — La demande d'aliments, quand elle procède bien, et qu'il y a deux ou plusieurs personnes obligées à les fournir, s'intentera dans l'ordre suivant: 1° Contre le conjoint; 2° Contre les descendants du degré le plus proche; 3° Contre les ascendants également du degré le plus proche; 4° Contre les frères. Entre les ascendants et les descendants l'ordre se déterminera par le rang dans lequel ils sont appelés à la succession légitime de la personne qui a droit aux aliments. 145. — Quand l'obligation alimentaire incombe à deux ou à plusieurs personnes, la rente à payer se répartit entre elles dans la proportion de. leurs fortunes respectives. Néanmoins, en cas d'urgente nécessité, et à raison de circonstances spéciales, le juge pourra obliger une seule personne à fournir tous les aliments par provision, sans préjudice de son droit de réclamer des autres obligés la part qui leur incombe. Quand deux ou plusieurs ayants droit réclament des aliments à une même personne légalement obligée à les fournir, mais qui n'a pas une fortune suffisante pour en fournir à tous, on observera l'ordre établi dans l'article précédent, à moins que la concurrence ne soit entre l'époux et un enfant soumis à la puissance paternelle; dans ce cas ce dernier sera préféré au premier. 146. — La quantité des aliments, dans les cas compris aux quatre numéros de l'article 143, sera proportionnée à la fortune et aux moyens de celui qui les donne et aux besoins de celui qui les reçoit. 147. — Les aliments, dans les cas auxquels se réfère l'article précédent, se diminuent ou s'augmentent proportionnellement selon l'augmentation, ou la diminution des besoins de l'alimenté, et selon la fortune de celui qui doit les fournir. 148. — L'obligation de fournir des aliments sera exigible aussitôt qu'ils sembleront nécessaires pour assurer l'existence de la personne qui a droit de les recevoir, pourtant on ne les paiera que du jour où la demande sera formulée. Le paiement se fera par mois et d'avance, et, quand mourra l'ayant droit, ses héritiers ne seront pas tenus de rendre ce qui aurait été payé par avance. 149. — L'obligé à fournir des aliments pourra, à son choix, remplir son obligation, soit en payant la pension fixée, soit en recevant et en entretenant dans sa propre maison celui qui y a droit. 150. — L'obligation de fournir des aliments cesse au décès de l'obligé, alors même qu'on les fournissait en vertu d'un jugement définitif. 151. — On ne peut renoncer au droit de demander des aliments, ni le transmettre à un tiers, on ne peut davantage compenser les aliments avec ce que l'ayant droit doit à celui qui en est tenu. Toutefois on pourra compenser les termes arriérés, y renoncer, ainsi que transmettre à titre gratuit ou onéreux le droit de les réclamer. 152. — L'obligation de fournir des aliments cessera: 1° Par la mort de l'ayant droit; 2° Lorsque la fortune de l'obligé sera réduite au point qu'il lui soit impossible de les fournir sans négliger ses propres besoins et ceux de sa famille; 3° Lorsque l'ayant droit peut exercer une charge, une profession ou une industrie, ou s'il a fait fortune ou amélioré sa situation en sorte que la pension alimentaire ne soit plus nécessaire à sa subsistance; 4° Lorsque l'ayant droit, qu'il soit ou non héritier à réserve, a commis une de ces fautes qui donnent lieu à l'exhérédation; 5° Lorsque l'ayant droit est le descendant de celui qui est tenu de fournir les aliments, si la misère où il est réduit provient de sa mauvaise conduite, ou de son manque d'application au travail, tant que subsiste cette cause. 153. — Les dispositions qui précèdent sont applicables à tous les cas où existe le droit alimentaire en vertu soit de ce Code, soit d'un testament, soit d'une convention, sauf le cas où la convention, les prescriptions du testateur et les dispositions de la loi pour un cas spécial en auraient décidé autrement. TITRE VII. — DE LA PUISSANCE PATERNELLE. CHAPITRE PREMIER. — DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 154. — Le père, et à son défaut la mère, ont la puissance sur leurs enfants légitimes non émancipés, et les enfants sont obligés de leur obéir tant qu'ils restent sous leur puissance. Ils sont toujours obligés de les respecter et de les honorer. Les enfants naturels reconnus et les enfants adoptés mineurs sont sous la puissance du père ou de la mère qui les a adoptés, ou reconnus, et ils ont l'obligation dont parle le paragraphe précédent. CHAPITRE II — DES EFFETS DE LA PUISSANCE PATERNELLE SUR LA PERSONNE DES ENFANTS. 155. — Le père et, à son défaut, la mère ont envers leurs enfants non émancipés: 1° Le devoir de les nourrir, de les garder auprès d'eux, de leur donner l'éducation et l'instruction selon leur fortune, et de les représenter pour l'exercice de toutes les actions qui peuvent exister à leur profit; 2° La faculté de les corriger et de les châtier modérément; 156. — Le père et, s'il y a lieu, la mère pourront demander, pour appuyer leur propre autorité sur leurs enfants non émancipés, le secours de l'autorité gouvernementale qui devra l'accorder soit à l'intérieur du foyer domestique, soit pour enfermer les enfants et les retenir dans les établissements d'instruction, ou dans les institutions légalement autorisés pour les recevoir. De même, ils pourront réclamer l'intervention du juge municipal pour infliger à leurs enfants jusqu'à un mois de détention dans un établissement correctionnel, établi à cet effet. Il suffira de l'ordre du père ou de la mère, avec le visa du juge, pour que la détention ait lieu. La prescription des articles précédents s'applique aux enfants légitimes, légitimés, naturels reconnus ou adoptifs. 157. — Si le père ou la mère a convolé en secondes noces et que l'enfant soit du premier lit, on devra indiquer au juge les motifs sur lesquels il base la demande de correction; le juge les entendra alors que l'enfant comparaîtra en personne, et il accordera ou refusera l'incarcération, sans recours ultérieur. Ceci sera encore observé lorsque l'enfant non émancipé exercera une charge ou une fonction, alors même que les parents n'auraient pas contracté de second mariage. 158. — Le père et, s'il y a lieu, la mère fourniront des aliments à leur enfant détenu, toutefois ils n'auront aucun droit d'intervention dans le régime de l'établissement où on le détiendra; ils pourront seulement faire cesser la détention lorsqu'ils le jugeront à propos. CHAPITRE III. — DES EFFETS DE LA PUISSANCE PATERNELLE QUANT AUX BIENS DES ENFANTS. 159. — Le père et, à son défaut, la mère sont les administrateurs légaux des biens des enfants qui sont sous leur puissance. 160. — Les biens que l'enfant non émancipé a acquis par son travail, ou son industrie, ou à quelque titre gratuit, appartiennent à l'enfant en propriété et en usufruit au père, ou à la mère, qui l'a en sa puissance et dans sa maison; toutefois si l'enfant, du consentement de son père, vivait séparément, on le considérera comme émancipé pour tous les droits sur ces biens; il en aura la disposition, l'usufruit et l'administration. 161. — Appartient aux parents, en propriété et usufruit, ce que l'enfant acquiert avec leur fortune. Pourtant, si les parents lui donnent expressément tout ou partie des profits qu'il gagne, ces valeurs ne seront pas imputables sur sa part héréditaire. 162. — Appartiennent en propriété et en usufruit à l'enfant non émancipé les biens et rentes, donnés ou légués pour les frais de son éducation et de son instruction; toutefois le père ou la mère en aura l'administration si, dans les donation ou legs, ne se trouve une disposition contraire; dans ce cas, on accomplira strictement la volonté des donateurs. 163. — Relativement aux biens de leurs enfants dont ils sont usufruitiers et administrateurs, les pères ont les obligations de tout usufruitier ou administrateur, et les obligations spéciales, établies en la section troisième du titre V de la loi hypothécaire. On dressera inventaire, en présence du ministère public, de tous les biens des enfants soumis à l'administration des parents, et, sur la proposition du même fonctionnaire, le juge pourra ordonner le dépôt des valeurs mobilières propres à l'enfant. 164. — Le père ou la mère, à son défaut, ne pourra aliéner les biens immeubles de l'enfant dont ils ont l'usufruit ou l'administration, ni les grever sinon pour cause d'utilité ou de nécessité justifiée et avec l'autorisation préalable du juge du domicile, donnée en présence du ministère fiscal et sauf les dispositions de la loi hypothécaire sur les effets de la transmission. 165. — Toutes les fois que, dans une contestation, le père ou la mère ont un intérêt opposé à celui de leurs enfants, on donnera à ces derniers un défenseur qui les représentera en justice ou ailleurs. Le juge, à la demande du père ou de la mère, du ministère public, ou de toute personne capable de comparaître en justice, donnera la charge de défenseur au parent du mineur à qui appartiendrait éventuellement la tutelle légitime, à son défaut à un autre parent, ou à un étranger. 166. — Les pères, qui reconnaissent ou adoptent, n'acquièrent point l'usufruit des biens de leurs enfants reconnus ou adoptifs, ils n'en auront pas davantage l'administration s'ils n'en garantissent les résultats par une caution acceptée par le juge du domicile du mineur, ou par les personnes qui doivent concourir à l'adoption. CHAPITRE IV. — DES MODES D'EXTINCTION DE LA PUISSANCE PATERNELLE. 167. — La puissance paternelle s'éteint: 1° Par la mort des parents ou de l'enfant; 2° Par l'émancipation; 3° Par l'adoption de l'enfant. 168. — Lanière, qui contracte un second mariage, perd la puissance paternelle sur ses enfants, à moins que son mari défunt, leur père, n'ait dans son testament expressément prévu que sa veuve contracterait mariage, et ordonné qu'elle conserverait, dans ce cas, la puissance paternelle sur ses enfants. 169. — Le père et, s'il y a lieu, la mère perdent la puissance paternelle sur leurs enfants: 1° Quand un jugement définitif au criminel, a prononcé la privation de cette puissance à titre de peine; 2° Quand un jugement définitif, rendu en matière de séparation de corps, l'a prononcée, quoique les effets de cette puissance subsistent. 170. — Les effets de la puissance paternelle sont suspendus par l'incapacité ou l'absence judiciairement déclarée du père ou, s'il y a lieu, de la mère et aussi par leur interdiction civile. 171. — Les tribunaux pourront priver les parents de leur puissance paternelle ou suspendre son exercice, s'ils traitent leurs enfants avec une dureté excessive, ou s'ils leur donnent des ordres, conseils ou exemples pernicieux. En ces cas, on pourra priver les parents de tout ou partie de l'usufruit des biens de leur enfant, et prendre ou prescrire toutes les précautions convenables à leur intérêt. 172. — Si la mère veuve, qui a convolé en secondes noces, redevient veuve, elle recouvrera de ce moment sa puissance sur tous ses enfants non émancipés. CHAPITRE V. — DE L'ADOPTION. 173. — Peuvent adopter ceux qui jouissent du plein usage de leurs droits civils et qui ont accompli l'âge de quarante-cinq ans. L'adoptant doit avoir au moins quinze années de moins que l'adopté. 174. — L'adoption est défendue; 1° Aux ecclésiastiques; 2° A ceux qui ont des descendants légitimes ou légitimés; 3° Au tuteur vis-à-vis de son pupille, tant que ses comptes n'ont pas été définitivement approuvés; 4° A l'époux sans le consentement de son conjoint. Les époux peuvent adopter conjointement, et hors de ce cas, nul ne peut être adopté par plus d'une personne. 175. — L'adopté pourra se servir, comme nom de famille, de celui de l'adoptant, si l'acte d'adoption lui accorde ce droit. 176. — L'adoptant et l'adopté se doivent réciproquement des aliments. Cette obligation existe sans porter préjudice au droit préférable des enfants naturels reconnus et des ascendants de l'adoptant à recevoir de lui des aliments. 177. — L'adoptant n'acquiert aucun droit à la succession de l'adopté. L'adopté de son côté n'en acquiert aucun sur celle de l'adoptant, sauf le cas de testament, à moins que, par l'acte d'adoption, il ne se soit obligé à l'instituer son héritier. Cette obligation ne produira aucun effet, si l'adopté meurt avant l'adoptant. L'adopté conserve les droits qui lui appartiennent dans sa famille naturelle, sauf ceux relatifs à la puissance paternelle. 178. — L'adoption s'accomplira avec l'autorisation judiciaire; elle devra contenir nécessairement le consentement de l'adopté s'il est majeur; s'il est mineur, celui des personnes qui devraient le donner pour son mariage; s'il est frappé d'une incapacité, celui de son tuteur. On entendra sur la question le ministère fiscal, et le juge, après avoir fait les diligences nécessaires, approuvera l'adoption si les conditions légales sont remplies, et s'il la croit avantageuse pour l'adopté. 179. — Lorsque le juge aura définitivement approuvé l'adoption, on dressera l'acte en précisant les conditions dans lesquelles elle se fait et on l'inscrira sur le registre civil ad hoc. 180. — Le mineur ou l'incapable qui a été adopté pourra attaquer l'adoption dans les quatre ans suivant sa majorité, ou l'époque où aura disparu son incapacité. TITRE VIII. — DE L'ABSENCE. CHAPITRE PREMIER. — MESURES PROVISOIRES EN CAS D'ABSENCE. 181. — Lorsqu'une personne aura disparu de son domicile sans qu'on connaisse sa résidence et sans laisser de mandataire pour administrer ses biens, le juge pourra, sur la demande des intéressés, ou du ministère fiscal, nommer quelqu'un pour la représenter. Cette prescription sera observée lorsque dans les mêmes circonstances le pouvoir laissé par l'absent sera nul. 182. — Après avoir fait la nomination dont parle l'article précédent, le juge prendra les mesures nécessaires pour sauvegarder les droits et les intérêts de l'absent, il précisera les pouvoirs, les obligations et la rémunération du représentant, en les réglant d'après les circonstances, selon ce qui a été fixé pour les tuteurs. 183. — L'époux absent sera représenté par l'époux présent s'ils ne sont pas légalement séparés. S'il est mineur, on lui donnera un tuteur en la forme ordinaire. A défaut du conjoint, l'absent sera représenté par ses parents, ses enfants et ses ascendants, selon l'ordre qu'établit l'article 220. CHAPITRE II. — DE LA DÉCLARATION D'ABSENCE. 184. — Après deux ans sans nouvelles de l'absent, et cinq ans dans le cas où il a laissé quelqu'un chargé de l'administration de ses biens, on peut déclarer l'absence. 185. — Peuvent demander la déclaration d'absence: 1° L'époux présent; 2° Les héritiers institués par un testament dont ils présenteraient une copie authentique; 3° Les parents appelés à sa succession ab intestat; 4° Ceux qui auraient sur les biens de l'absent un droit subordonné à la condition de sa mort. 186. — La déclaration judiciaire de l'absent ne produira d'effets que six mois après sa publication dans les journaux officiels. CHAPITRE III. — DE L'ADMINISTRATION DES BIENS DE L'ABSENT. 187. — L'administration des biens de l'absent sera attribuée aux personnes désignées par l'article 220, dans l'ordre établi par ce texte. 188. — La femme de l'absent, si elle est majeure, pourra disposer librement de tous les biens qui lui appartiennent en propre, quelle que soit leur nature; mais elle ne pourra aliéner, échanger, ni hypothéquer les propres de son mari, ni ceux de la société conjugale sans l'autorisation de justice. 189. — Lorsque l'administration revient aux enfants de l'absent, et qu'ils sont mineurs, on leur nommera un tuteur qui aura la charge des biens, en remplissant les formalités légales. 190. — L'administration cesse dans chacun des cas suivants: 1° Lorsque l'absent comparaît en personne, ou par l'intermédiaire d'un mandataire; 2° Lorsque la mort de l'absent devient certaine et que se présentent ses héritiers testamentaires ou ab intestat; 3° Lorsque se présente un tiers prouvant, par actes pertinents, qu'il a acquis, par vente ou autrement, les biens de l'absent. Dans ces cas, l'administrateur cessera de remplir ses fonctions et les biens seront mis à la disposition de ceux qui y auront droit. CHAPITRE IV. — DE LA PRÉSOMPTION DE MORT DE L'ABSENT. 191. — Trente ans après que l'absent aura disparu, ou qu'on aura reçu ses dernières nouvelles, ou quatre-vingt dix ans après sa naissance, le juge, sur la demande des intéressés, déclarera la présomption de mort. 192. — La décision qui déclarera la présomption de mort d'un absent ne s'exécutera que six mois révolus après sa publication dans les journaux officiels. 193. — Le jugement de présomption de mort devenu définitif, on ouvrira la succession des biens de l'absent, et on procédera à leur répartition, selon les règles des successions testamentaires ou ab intestat selon le cas. 194. — Si l'absent se présente, ou si, sans se présenter, il prouve son existence, il reprendra ses biens dans l'état où ils se trouvent, le prix de ceux qui ont été aliénés, ou ceux qui ont été achetés avec; mais il ne pourra réclamer ni fruits, ni revenus. CHAPITRE V. — DES EFFETS DE L'ABSENCE SUR LES DROITS ÉVENTUELS DE L'ABSENT. 195. — Celui qui réclame un droit, appartenant à une personne dont l'existence n'a pas été reconnue, devra prouver qu'elle existait au moment où son existence était nécessaire pour l'acquérir. 196. — Sans préjudice des dispositions de l'article précédent, s'il s'ouvre une succession à laquelle soit appelé un absent, sa part accroîtra à ses cohéritiers, à moins qu'il n'y ait quelqu'un ayant un droit propre pour la réclamer. Les uns et les autres, en ce cas, devront faire inventaire de ces biens en présence du ministère fiscal. 197. — Les dispositions du précédent article s'appliquent sans préjudice des actions en pétition d'hérédité ou des autres droits qui peuvent appartenir à l'absent, à ses représentants ou à ses ayants cause. Ces droits ne s'éteindront que par le temps fixé pour la prescription. Dans l'inscription qui se fait sur le registre civil des biens qui accroissent aux cohéritiers, on mentionnera qu'ils sont soumis aux prescriptions de cet article. 198. — Ceux qui auront recueilli la succession de l'absent acquerront les fruits perçus de bonne foi, tant que l'absent ne comparaîtra pas, ou que ses droits ne seront pas exercés par ses représentants ou ayants cause. TITRE IX. — DE LA TUTELLE. CHAPITRE PREMIER. — DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 199. — L'objet de la tutelle est la garde de la personne et des biens, ou seulement des biens de ceux qui n'étant pas soumis à la puissance paternelle, sont incapables de se gouverner par eux-mêmes. 200. — Sont soumis à la tutelle: 1° Les mineurs non émancipés légalement; 2° Les insensés et les fous, même s'ils ont des intervalles lucides et les sourds-muets qui ne savent ni lire ni écrire; 3° Ceux qui ont été déclarés prodigues par jugement définitif; 4° Ceux qui ont été condamnés à l'interdiction civile. 201. — La tutelle s'exerce par un seul tuteur, sous la surveillance du subrogé tuteur et du conseil de famille. 202. — On ne peut refuser les charges de tuteur et de subrogé tuteur sans cause légitime, dûment justifiée. 203. — Les juges municipaux du lieu où résident les personnes soumises à la tutelle, pourvoiront à leur protection et à celle de leurs biens meubles jusqu à la nomination du tuteur, lorsque la loi n'aura pas confié cette charge à d'autres. S'ils ne le font pas, ils seront responsables du préjudice que les mineurs ou les incapables souffriront de ce chef. 204. — La tutelle se défère: 1° Par testament; 2° Par la loi; 3° Par le conseil de famille. 205. — Le tuteur ne commencera pas à exercer de ses fonctions sans que sa nomination ait été inscrite sur le registre des tutelles. CHAPITRE II. — DE LA TUTELLE TESTAMENTAIRE. 206. — Le père peut nommer un tuteur et un subrogé tuteur à ses enfants mineurs et aux majeurs incapables, qu'ils soient légitimes ou naturels reconnus, ou à ses enfants illégitimes auxquels il est obligé de fournir des aliments, aux termes de l'article 139. Semblable faculté appartient à la mère, toutefois, si elle a contracté un second mariage, la nomination qu'elle fait, pour les enfants de son premier mariage, ne produira pas d'effet, si elle n'est approuvée par le conseil de famille. 207. — Peut également nommer un tuteur aux mineurs et aux incapables celui qui leur laisse sa succession, ou un legs important. Toutefois la nomination ne produira pas d'effet avant que le conseil de famille ait accepté la succession ou le legs. 208. — Le père, comme la mère, peut nommer un tuteur à chacun de leurs enfants, et faire plusieurs nominations afin que les tuteurs nommés se remplacent les uns les autres. En cas de doute, on considérera qu'un seul tuteur a été nommé pour tous les enfants et on attribuera la charge au premier figurant sur la liste. 209. — Si diverses personnes ont nommé un tuteur pour un même mineur, on attribuera la charge: 1° A celui qui a été choisi par le père ou par la mère; 2° A celui nommé par l'étranger qui a institué pour son héritier le mineur ou l'incapable, si la valeur de la succession est considérable; 3° A l'élu par une personne ayant laissé un legs important. S'il y a plus d'un tuteur dans les cas prévus par les n°s 2 et 3 de cet article, le conseil de famille décidera quel est celui qui doit être préféré. 210. — Si, alors qu'un tuteur est en exercice, il apparaît que le père en avait nommé un autre, on lui remettra immédiatement la tutelle; si le tuteur qui apparaît tout à coup a été nommé par un étranger désigné aux n°s 2 et 3 de l'article précédent, on limitera ses pouvoirs à l'administration des biens venant de celui qui l'a nommé, à moins que la charge du tuteur en soit vacante. CHAPITRE III. — DE LA TUTELLE LÉGITIME. SECTION Première. — De la tutelle des mineurs. 211. — La tutelle légitime des mineurs non émancipés appartient uniquement: 1° A l'ascendant paternel; 2° A l'ascendant maternel; 3° Aux ascendantes paternelles et maternelles, dans le même ordre, pourvu qu'elles restent veuves; 4° A l'aîné de frères germains et, à son défaut, à l'aîné des frères consanguins ou utérins. La tutelle dont parle cet article ne concerne pas les enfants illégitimes. 212. — Les chefs des maisons d'enfants trouvés sont les tuteurs de ceux qui y sont recueillis et élevés. La représentation en justice de ces fonctionnaires, en leur qualité de tuteurs, appartient au ministère fiscal. SECTION II. — De la tutelle des fous et des sourds-muets. 213. — On ne peut nommer de tuteur aux fous, aux insensés et aux sourds-muets majeurs, tant que leur incapacité d'administrer leurs biens n'a pas été déclarée. 214. — Peuvent provoquer cette déclaration le conjoint et les parents de l'incapable présumé qui ont droit de lui succéder ab intestat. 215. — Le ministère public devra la demander: 1° S'il s'agit d'un fou furieux; 2° S'il n'existe aucune des personnes désignées dans l'article précédent, ou si elles n'usent pas de la faculté qui leur est accordée; 3° Si l'époux et les héritiers de l'incapable présumé sont mineurs, ou manquent de la capacité nécessaire pour comparaître en justice. Dans tous ces cas, les tribunaux nommeront un défenseur au présumé incapable qui ne cherche à se défendre ou ne le peut. Dans les autres cas, le défenseur sera le ministère public. 216. — Avant de déclarer l'incapacité, les tribunaux entendront le conseil de famille et examineront par eux-mêmes celui qui est dénoncé comme incapable. 217. — Les parents, qui auront sollicité la déclaration d'incapacité, ne pourront renseigner le tribunal comme membres du conseil de famille; mais ils pourront être entendus par ce conseil, s'il le demande. 218. — La déclaration d'incapacité devra se faire sommairement. Celle qui s'appliquera à des sourds-muets fixera l'étendue et les limites de la tutelle; selon le degré de leur incapacité. 219. — Contre les décisions qui mettent fin aux procès d'incapacité, les intéressés pourront se pourvoir en la forme ordinaire. Le défenseur des incapables aura toutefois besoin de l'autorisation spéciale du conseil de famille. 220. — La tutelle des fous et des sourds-muets appartient: 1° A l'époux non séparé légalement; 2° Au père et, s'il y a lieu, à la mère; 3° Aux enfants; 4° Aux ascendants; 5° Aux frères et aux sœurs qui ne seraient pas mariées, en donnant la préférence au double lien de parenté dont parle l'article 211. S'il y a plusieurs enfants, ou frères et sœurs, on préférera les hommes aux femmes, et l'aîné au plus jeune. Si des ascendants paternels et maternels se trouvent en concours, on préférera les mâles et, dans le cas où ils sont de même sexe, ceux de la ligne paternelle. SECTION III. — De la tutelle des prodigues. 221. — La déclaration de prodigalité doit être faite en instance contradictoire. Le jugement précisera les actes qui seront interdits à l'incapable, et les droits que le tuteur exerce en son nom, et les cas où le conseil de famille devra être consulté par l'un ou par l'autre. 222. — Peuvent seuls demander la déclaration dont parle l'article précédent, l'époux et les héritiers réservataires du prodigue et, par exception, le ministère fiscal d'office ou à la demande d'un parent de ces personnes si elles sont mineures ou incapables. 223. — Lorsque le cité ne comparaîtra pas, le ministère fiscal le représentera, ou s'il est partie dans l'instance, un défenseur sera nommé par le juge, sans préjudice des dispositions de la loi de procédure civile, sur les instances par défaut. 224. — La déclaration de prodigalité ne prive pas de l'autorité paternelle et conjugale, et n'attribue au tuteur aucun droit sur la personne du prodigue. 225. — Le tuteur administrera les biens des enfants que le prodigue a eus d'un mariage antérieur. Sa femme administrera ses biens dotaux et paraphernaux, ceux des enfants communs et ceux de la société conjugale. Pour les aliéner, il faudra obtenir l'autorisation de justice. 226. — Les actes des prodigues, antérieurs à la demande d'interdiction, ne pourront être attaqués pour cause de prodigalité. 227. — La tutelle des prodigues appartient: 1° Au père, et à son défaut, à la mère; 2° Aux ascendants paternels et maternels; 3° A l'aîné des enfants mâles émancipés. SECTION IV. — De la tutelle des condamnés à la peine de l'interdiction. 228. — Lorsque sera définitive la décision qui a infligé la peine de l'interdiction, le ministère fiscal requerra l'exécution des articles 203 et 293. S'il ne le fait pas, il sera responsable des pertes et préjudices qui arriveront. Pourront adresser également cette demande, l'époux et les héritiers ab intestat du condamné. 229. — Cette tutelle se bornera à l'administration des biens du condamné, et à sa représentation en justice. Le tuteur du condamné sera en outre obligé de surveiller la personne et les biens des mineurs, ou incapables, qui seraient sous l'autorité de l'interdit, jusqu'à ce qu'on les ait pourvus d'un autre tuteur. La femme du condamné exercera la puissance paternelle sur les enfants communs, tant que durera l'interdiction. Si elle est mineure, elle agira sous la direction de son père et, à son défaut, de sa mère, de son tuteur, en l'absence de l'un et de l'autre. 230. — La tutelle de ceux qui subissent l'interdiction se défère dans l'ordre établi par l'article 220. CHAPITRE IV. — DE LA TUTELLE DATIVE. 231. — En l'absence de tuteur testamentaire, et des personnes appelées par la loi à exercer une tutelle vacante, l'élection du tuteur appartient au conseil de famille, dans tous les cas de l'article 200. 232. — Le juge municipal, qui néglige de réunir le conseil de famille, dans tous les cas où on doit pourvoir d'un tuteur des mineurs ou des incapables, sera responsable des dommages et préjudices qu'occasionnera sa négligence. CHAPITRE V. — DU SUBROGÉ TUTEUR. 233. — Il appartient au conseil de famille de nommer le subrogé tuteur, lorsqu'il n'a pas été nommé par ceux qui ont le droit de choisir un tuteur pour les mineurs. 234. — Le tuteur ne peut commencer les opérations de la tutelle avant que le subrogé tuteur ait été nommé. Celui qui omettrait de réclamer cette nomination serait écarté de la tutelle et répondrait du préjudice souffert par le mineur. 235. — La charge du subrogé tuteur ne peut être attribuée à un parent de la même ligne que le tuteur. 236. — Le subrogé tuteur est tenu: 1° D'assister à l'inventaire des biens du mineur et à la constitution de la caution du tuteur, quand elle doit être fournie; 2° De soutenir les droits du mineur en justice et ailleurs, toutes les fois qu'ils sont en contradiction avec ceux du tuteur; 3° D'appeler l'attention du conseil de famille sur la gestion du tuteur, quand elle paraît nuisible à la personne ou aux intérêts du mineur; 4° De provoquer la réunion du conseil de famille pour la nomination d'un nouveau tuteur, lorsque la tutelle est vacante ou abandonnée; 5° D'exercer toutes les actions que prescrivent les lois. Le subrogé tuteur sera responsable des dommages et préjudices survenus au mineur en omettant, ou négligeant l'accomplissement de ces devoirs. Le subrogé tuteur peut assister à une délibération du conseil de famille, y prendre part, mais il n'a pas droit d'y voter. CHAPITRE VI. — DES CAUSES D'INCAPACITÉ ET DE DESTITUTION DES TUTEURS ET SUBROGÉS TUTEURS. 237. — Ne peuvent être tuteurs, ni subrogés tuteurs: 1° Ceux qui sont soumis à la tutelle; 2° Ceux qui ont été condamnés pour délits de vol, larcins, escroquerie, faux, corruption de mineurs ou scandale public. 3° Les condamnés à une peine corporelle tant qu'ils ne l'ont pas purgée; 4° Ceux qui ont été légalement révoqués d'une tutelle précédente; 5° Les personnes de mauvaise vie; 6° Les faillis, et les cessionnaires de biens non réhabilités; 7° Les femmes, sauf les cas où la loi les nomme expressément; 8° Ceux qui au moment de la délation de la tutelle ont un procès pendant contre le mineur, sur son état civil; 9° Ceux qui contestent au mineur la propriété de ses biens, à moins que le père ou, s'il y a lieu, la mère n'en aient disposé autrement, en connaissance de cause; 10° Ceux qui doivent au mineur des sommes considérables, à moins que le père ou lanière ne les aient nommés, tout en ayant connaissance de la dette; 11° Les parents désignés au second paragraphe de l'article 293, et le tuteur testamentaire, qui n'auraient pas rempli les obligations que cet article leur impose; 12° Les religieux; 13° Les étrangers qui ne résident pas en Espagne. 238. — Seront destitués de la tutelle: 1° Ceux qui, depuis que cette charge leur a été conférée, sont tombés dans un des cas d'incapacité qu'énumèrent les n°s 1, 2, 3, 4, 5, 6, 8, 12 et 13 de l'article précédent; 2° Ceux qui s'immiscent dans l'administration de la tutelle sans avoir réuni le conseil de famille et sollicité la nomination du subrogé tuteur, ou sans avoir constitué une caution, quand il y a lieu de la fournir, ou inscrit la garantie hypothécaire; 3° Ceux qui ne dressent pas inventaire dans le délai et en la forme établie par la loi, ou qui ne le font pas fidèlement; 4° Ceux qui ne remplissent pas bien les charges de la tutelle. 239. — Le conseil de famille ne pourra déclarer l'incapacité du tuteur ou du subrogé tuteur, ni prononcer leur destitution, sans les appeler et les entendre s'ils se présentent. 240. — L'incapacité une fois déclarée, ou la révocation prononcée par le conseil de famille, on considérera la décision comme acceptée et on se mettra en mesure de pourvoir à la tutelle vacante, lorsque le tuteur ne formulera pas de protestation dans les quinze jours qui suivent celui où la décision lui aura été notifiée. 241. — Lorsque le tuteur soulèvera un débat judiciaire, le conseil plaidera aux frais du mineur; toutefois ses membres pourront être condamnés aux dépens s'ils ont agi avec une méchanceté évidente. 242. — Lorsque la décision du conseil est favorable au tuteur et qu'elle a été adoptée à l'unanimité, on n'acceptera aucun recours contre elle. 243. — Si, pour cause d'incapacité, le tuteur ne commence pas à exercer sa charge, le conseil de famille pourvoit aux intérêts de la tutelle, jusqu'à ce que la difficulté ait été définitivement jugée. Si le tuteur est déjà entré dans l'exercice de sa charge, et que le conseil de famille déclare son incapacité, ou prononce sa révocation, les résolutions qu'il adopte pour pourvoir aux intérêts de la tutelle, dans le cas où s'engage un procès, ne pourront être exécutées sans la préalable autorisation de justice. CHAPITRE VII. — DES EXCUSES DE LA TUTELLE ET SUBROGÉE TUTELLE. 244. — Peuvent s'excuser de la tutelle et subrogée tutelle: 1° Les ministres de la couronne; 2° Les présidents des Corps législatifs, du Conseil d'État, du Tribunal suprême, du Conseil suprême, de la guerre et de la marine et du Tribunal des comptes du royaume; 3° Les archevêques et les évêques; 4° Les magistrats, les juges et les fonctionnaires du ministère fiscal; 5° Ceux qui exercent l'autorité dépendant immédiatement du Gouvernement; 6° Les militaires en service actif; 7° Les ecclésiastiques qui ont charge d'âmes; 8° Ceux qui ont sous leur puissance cinq enfants légitimes; 9° Ceux qui sont si pauvres qu'ils ne peuvent s'occuper de la tutelle sans diminuer leurs ressources alimentaires; 10° Ceux qui ne peuvent remplir les devoirs de la charge à cause du mauvais état habituel de leur santé, ou parce qu'ils ne savent ni lire, ni écrire; 11° Ceux qui ont plus de soixante ans; 12° Ceux qui sont tuteurs ou subrogés tuteurs d'une autre personne. 245. — Ceux qui ne sont pas parents du mineur ou de l'incapable ne sont pas tenus d'accepter la tutelle si, dans le ressort du Tribunal où elle est ouverte, il existe des parents jusqu'au sixième degré qui peuvent remplir cette charge. 246. — Sur la demande du tuteur ou du subrogé tuteur, les excusés peuvent être appelés à accepter la tutelle lorsque leur cause d'excuse vient à cesser. 247. — Ne sera pas recevable l'excuse qu'on n'aurait pas invoquée devant le conseil de famille, dans la réunion appelée à constituer la tutelle. Si le tuteur n'a pas pris part à la réunion du conseil, ni protesté avant notification de sa nomination, il devra invoquer son excuse dans les dix jours qui suivront celui où la notification lui aura été faite. 248. — Si les causes d'exemption sont postérieures à l'acceptation de la tutelle, le délai pour les invoquer commencera à courir du jour où le tuteur les aura connues. 249. — Les décisions, par lesquelles le conseil de famille rejette les excuses, pourront être attaquées devant les tribunaux dans le délai de quinze jours. La résolution du conseil de famille sera défendue par lui aux frais du mineur; mais, si elle est confirmée, on devra condamner aux dépens celui qui a soulevé la contestation. 250. — Pendant le procès sur l'excuse, celui qui la propose sera tenu d'exercer sa charge. S'il ne le fait pas, le conseil de famille nommera une personne qui le suppléera; le suppléé restera responsable de la gestion de son suppléant si l'excuse est rejetée. 251. — Le tuteur testamentaire, qui s'excuse de la tutelle, perd ce que lui aura volontairement donné celui qui l'a nommé. CHAPITRE VIII. — DE LA GARANTIE DE LA TUTELLE. 252. — Le tuteur, avant d'entrer en charge, fournira une garantie pour assurer le bon résultat de sa gestion. 253. — La garantie doit être une hypothèque ou un gage. On n'admettra une garantie personnelle que s'il sera impossible de constituer une des précédentes. La garantie que fournissent les cautions n'empêchera pas l'adoption des mesures utiles pour la conservation des biens du mineur ou de l'incapable. 254. — Le cautionnement doit garantir: 1° L'importance des biens meubles qui sont à la disposition du tuteur; 2° Les rentes et produits que rendent dans un an les biens du mineur ou de l'incapable; 3° Les profits que, durant une année, le mineur peut toucher dans une entreprise commerciale ou industrielle. 255. — Contre les résolutions du conseil de famille fixant l'importance, ou déterminant la nature du cautionnement, le tuteur pourra se pourvoir devant les tribunaux; pourtant il n'entrera pas en possession de sa charge avant d'avoir fourni la garantie exigée. 256. — Pendant qu'on forme le cautionnement, le subrogé tuteur fait les actes d'administration que le conseil de famille croit indispensables pour la conservation des biens et la perception des produits. 257. — La garantie hypothécaire sera inscrite au registre de la propriété. Le gage s'établira par le dépôt des effets et valeurs dans les établissements à ce destinés. 258. — Devront réclamer l'inscription et le dépôt: 1° Le tuteur; 2° Le subrogé tuteur; 3° Tout membre du conseil de famille. Ceux qui omettent cette obligation sont responsables des dommages et préjudices. 259. — La caution pourra être augmentée, ou diminuée durant le cours de la tutelle, selon les vicissitudes que subissent les biens du mineur ou de l'incapable, et les valeurs sur lesquelles elle a été constituée. 260. — Sont exempts de cautionner leur tutelle: 1° Le père, la mère et les ascendants, dans les cas où ils sont appelés à la tutelle de leurs descendants; 2° Le tuteur testamentaire dispensé de cette obligation par le père ou à son défaut par la mère, cette exception cessera lorsque, postérieurement à la nomination, il surviendra des circonstances imprévues, inconnues du testateur, et rendant indispensable la garantie d'après l'avis du conseil de famille; 3° Le tuteur nommé avec dispense de garantie par les étrangers qui ont institué pour héritier le mineur ou l'incapable, ou lui ont fait un legs important. En ce cas, l'exemption sera limitée aux biens et revenus, composant l'hérédité ou le legs. CHAPITRE IX. — DE L'EXERCICE DE LA TUTELLE. 261. — Le conseil de famille mettra en possession les tuteurs et subrogés tuteurs. 262. — Le tuteur représente le mineur ou l'incapable dans tous les actes de la vie civile, sauf ceux qu'ils peuvent faire eux-mêmes, en vertu d'une disposition expresse. 263. — Les mineurs et les incapables soumis à la tutelle doivent le respect à leur tuteur, qui pourra les corriger modérément. 264. — Le tuteur est tenu: 1° De nourrir et d'élever le mineur ou l'incapable conformément à sa condition, et en se soumettant strictement aux prescriptions de ses parents et, à leur défaut, à celles qui auront été faites par le conseil de famille; 2° D'employer tous les moyens en rapport avec la fortune de l'insensé, du fou, ou du sourd-muet pour qu'il acquière ou recouvre sa capacité; 3° De faire inventaire de tous les biens sur lesquels s'étend la tutelle, dans le délai fixé à cet effet par le conseil de famille; 4° D'administrer le patrimoine des mineurs ou incapables avec la diligence d'un bon père de famille; 5° De solliciter en temps opportun l'autorisation du conseil de famille pour tout ce qu'il ne peut faire sans elle; 6° De faire intervenir le subrogé tuteur dans tous les cas où la loi le déclare nécessaire. 265. — L'inventaire se fera en présence du subrogé tuteur et avec l'assistance de deux témoins choisis par le conseil de famille. Il décidera en outre, d'après l'importance de la fortune, si on devra dresser un acte notarié. 266. — Les bijoux, les meubles précieux, les effets publics et les valeurs commerciales et industrielles qui d'après le jugement du conseil de famille ne doivent pas rester au pouvoir du tuteur, seront déposés dans un établissement à ce destiné. Les autres meubles morts ou vifs qui n'auraient pas été prisés, seront estimés par les experts que désigne le conseil de famille. 267. — Le tuteur qui, sur la réquisition du notaire, du subrogé tuteur ou des témoins, ne mentionne pas dans l'inventaire les créances qu'il a contre le mineur, est censé y renoncer. 268. — Lorsque le testament de la personne qui a nommé le tuteur, ne contient pas de disposition relative à la pension alimentaire du mineur ou de l'incapable, le conseil de famille, réuni pour l'inventaire, déterminera la part des rentes et revenus qui doit être affectée à cette destination. Cette décision peut se modifier si le patrimoine des mineurs ou des incapables s'augmente, ou se diminue, ou si leur situation vient à changer. 269. — L'autorisation du conseil de famille est nécessaire au tuteur: 1° Pour imposer au mineur la correction dont parle le n°2 de l'article 155 et l'article 156; 2° Pour donner au mineur une carrière ou une charge déterminée lorsque ce point n'aura point été décidé par les parents et pour modifier les dispositions qu'ils auraient prises; 3° Pour renfermer l'incapable dans une maison de santé, à moins que la tutelle ne soit gérée par le père, la mère ou un enfant; 4° Pour continuer le commerce ou l'industrie qu'exerçaient l'incapable ou ses ascendants, ou ceux du mineur; 5° Pour aliéner ou grever les biens qui constituent la fortune des mineurs ou des incapables, et pour faire des contrats ou actes sujets à inscription; 6° Pour placer les deniers restant chaque année après que l'on a fait face aux obligations de la tutelle; 7° Pour procéder au partage d'une succession ou de toute autre chose que le mineur posséderait en commun; 8° Pour retirer de l'endroit où il était placé un capital portant intérêts; 9° Pour emprunter; 10° Pour accepter sous bénéfice d'inventaire, ou pour répudier une succession ou des donations; 11° Pour faire des frais extraordinaires sur les biens dont la tutelle comprend l'administration; 12° Pour transiger et soumettre à des arbitres les questions dans lesquelles le mineur est intéressé; 13° Pour intenter des procès au nom de ceux qui sont en tutelle et pour soutenir, en appel et en cassation, les recours contre les jugements qui les auraient condamnés. Sont exceptées les demandes et recours devant les juridictions orales (Juicios verbales.) 270. — Le conseil de famille, ne peut autoriser le tuteur à aliéner, ou à grever les biens du mineur ou de l'incapable, sinon pour cause de nécessité ou d'utilité, que le tuteur fera dûment constater. L'autorisation se basera sur des causes déterminées. 271. — Le conseil de famille, avant d'accorder l'autorisation de grever les biens immeubles, ou de constituer des droits réels au profit de tiers, pourra entendre préalablement des avis d'experts sur les conditions de la charge, et la possibilité de les améliorer. 272. — Quand il s'agit de biens immeubles, de droits susceptibles d'inscription, de bijoux ou de meubles dont la valeur dépasse 4000 pesetas, la vente se fera en public en présence du tuteur et du subrogé tuteur. Les valeurs de bourse, comme les fonds d'État, les valeurs industrielles et commerciales, seront vendues par agent de change ou par courtier de commerce. 273. — Le tuteur répond des intérêts légaux du capital du mineur lorsque, par son omission ou sa négligence, il reste improductif ou sans emploi. 274. — L'autorisation pour transiger ou compromettre devant des arbitres devra être demandée par un acte écrit, dans lequel le tuteur indiquera toutes les conditions et les avantages de la transaction. 275. — Il est interdit au tuteur: 1° De donner les choses ou les droits appartenant au mineur ou à l'incapable, ou d'y renoncer; Les donations pour cause de mariage que feront les mineurs, avec l'approbation des personnes qui doivent fournir leur consentement au mariage, seront valables toutes les fois qu'elles n'excéderont pas les limites fixées par la loi. 2° De recevoir des débiteurs du mineur ou de l'incapable, sans l'intervention du subrogé tuteur, des sommes supérieures à 5000 pesetas, à moins qu'il ne s'agisse d'intérêts de rentes ou de fruits. Le paiement fait sans cette formalité ne profitera aux débiteurs, que s'ils prouvent que la somme reçue a été employée dans l'intérêt du mineur ou de l'incapable; 3° De se payer, sans l'intervention du subrogé tuteur, des créances qui lui appartiennent. 276. — Le tuteur a droit à une rétribution sur les biens des mineurs ou de l'incapable. Quand elle n'a pas été fixée par ceux qui ont nommé le tuteur testamentaire, ou quand il s'agit de tuteurs légitimes ou datifs, le conseil de famille en fixera l'importance. En aucun cas la rétribution ne sera au-dessous de quatre pour cent, ni au-dessus de dix pour cent des revenus nets des biens. Contre la délibération qui fixe la rétribution du tuteur, on pourra se pourvoir devant les tribunaux. 277. — Si le conseil de famille maintient sa délibération, il plaidera aux frais du mineur ou de l'incapable. 278. — La tutelle se termine: 1° Lorsque le mineur arrive à l'âge de vingt-trois ans, par l'anticipation de majorité et par l'adoption; 2° Lorsque cesse la cause qui la motivait s'il s'agit d'incapables soumis à l'interdiction, ou de prodigues. CHAPITRE X. — DES COMPTES DE TUTELLE. 279. — Le parent en ligne collatérale du mineur ou de l'incapable, ainsi que l'étranger tuteur à qui on n'aurait pas accordé les fruits des biens à titre d'aliments, doivent rendre au conseil de famille des comptes annuels de gestion. Ces comptes, vérifiés par le subrogé tuteur et discutés par le conseil de famille, seront déposés au greffe du Tribunal où la tutelle a été enregistrée. Si le tuteur n'accepte pas la décision du conseil, il pourra la déférer aux tribunaux devant lesquels les intérêts du mineur ou de l'incapable seront défendus par le subrogé tuteur. 280. — Le tuteur, remplacé par un autre, sera tenu, par lui-même ou par ses héritiers, de rendre à celui qui le remplace le compte général de la tutelle; ce compte sera vérifié et discuté en la forme édictée par l'article précédent. Le nouveau tuteur sera responsable envers le mineur s'il ne demande et ne vérifie pas les comptes de son prédécesseur. 281. — A la fin de la tutelle, le tuteur, ou ses héritiers, est tenu de rendre compte de son administration à celui qui y a été soumis, à ses représentants ou ayants cause. 282. — Les comptes généraux de la tutelle seront discutés et apurés par le conseil de famille, dans un délai qui n'excédera pas six mois. 283. — Les comptes devront être accompagnés des pièces justificatives. On ne pourra dispenser de justification que les menues dépenses pour lesquelles un père de famille vigilant n'a pas coutume d'exiger de reçus. 284. — Les frais de la reddition de compte sont à la charge du mineur ou de l'incapable. 285. — Avant l'expiration de quinze jours après la remise des comptes justifiés, les ayants cause du mineur, ou lui-même s'il est majeur, ne pourront faire avec le tuteur aucune convention relative à la gestion de la tutelle. Sans porter atteinte aux arrangements qui, passé ce délai, peuvent intervenir entre les intéressés, le conseil de famille devra dénoncer aux Tribunaux les infractions que le tuteur aurait commises au cours de la tutelle. 286. — Le solde du compte général, existant au profit du tuteur, ou contre lui, produira l'intérêt légal: Dans le premier cas, du moment où le mineur a été sommé de le payer de ses biens; Dans le second, de la reddition des comptes s'ils ont été remis dans ce délai légal, ou sinon de l'expiration de la tutelle. 287. — Les actions qui appartiennent réciproquement au tuteur et au mineur à raison de l'exercice de la tutelle se prescrivent par cinq ans depuis qu'elle a pris fin. CHAPITRE XI. — DU REGISTRE DES TUTELLES. 288. — Dans les Tribunaux de première instance, il y aura un ou plusieurs livres où on tiendra note des tutelles, constituées dans l'année sur le territoire de leur ressort. 289. — Ce livre sera sous la garde du greffier qui fera les mentions gratuitement. 290. — Le registre devra contenir pour chaque tutelle: 1° Le nom, le prénom, l'âge, le domicile du mineur ou de l'incapable, l'étendue et les limites de la tutelle, quand elle a été déclarée judiciairement; 2° Le nom, le prénom, la profession et le domicile du tuteur et la mention qu'il est testamentaire légitime ou datif; 3° Le jour où la tutelle a été déférée, et celui où l'on a fourni la garantie exigée du tuteur, en indiquant la nature des biens qui la constituent; 4° La pension alimentaire qui a été assignée au mineur ou à l'incapable, ou la déclaration que les fruits se compensent avec les aliments. 291. — Au pied de chaque inscription, on fera constater, au commencement de l'année judiciaire, que le tuteur a rendu compte de sa gestion dans les cas où il y est tenu. 292. — Les juges vérifieront annuellement ces registres, et prendront les mesures nécessaires dans chaque cas pour défendre les intérêts des personnes soumises à la tutelle. TITRE X. — DU CONSEIL DE FAMILLE. SECTION PREMIÈRE. — De la formation du conseil de famille. 293. — Si le ministère public ou le juge municipal apprennent qu'il existe, sur le territoire de leur juridiction, une des personnes dont parle l'article 200, le premier requerra, le second ordonnera d'office, ou sur réquisition selon les cas, la constitution du conseil de famille. Sont obligés de donner connaissance au juge municipal du fait qui donne lieu à la tutelle, au moment où elle s'ouvre: le tuteur testamentaire, les parents appelés à la tutelle légitime et ceux qui par la loi sont membres du conseil; ils sont responsables, s'ils ne le font, de l'indemnité due pour dommages et préjudices. Le juge citera les personnes qui doivent former le conseil de famille, en leur faisant connaître l'objet de la réunion, le jour, l'heure et le lieu où elle doit avoir lieu. 294. — Le conseil de famille se compose des personnes que le père ou, s'il y a lieu, la mère auront désignées par testament, et, à défaut de désignation, des ascendants et des descendants mâles, des frères, des maris des sœurs vivantes du mineur ou de l'incapable quel que soit leur nombre. S'il n'arrive pas à cinq, on complétera ce nombre par les parents les plus proches dans les deux lignes paternelle et maternelle; s'il n'y en a pas, ou s'ils ne sont pas obligés de faire partie du conseil, le juge municipal nommera à leur place des personnes honorables, préférablement des amis des père et mère du mineur ou de l'incapable. S'il n'y a ni ascendants, ni descendants de frères, de maris de sœurs vivantes, le juge municipal constituera le conseil avec les cinq parents mâles les plus proches du mineur ou de l'incapable, et lorsqu'il n'y aura pas assez de parents, ou s'ils manquent complètement, on les remplacera par des personnes honorables, en préférant toujours les amis des père et mère. 295. — A égal degré, on préférera pour le conseil de famille le parent le plus âgé. 296. — Les tribunaux pourront excuser la nullité résultant de l'inobservation des articles précédents, si elle n'est pas due à une fraude, et si elle n'a pas causé préjudice aux biens, ou à la personne de celui qui est soumis à la tutelle; ils répareront, toutefois, l'erreur commise dans la formation du conseil. 297. — Ne pourront être obligés à faire partie du conseil de famille, les parents du mineur ou de l'incapable, appelés par la loi, s'ils ne résident pas dans un rayon de 30 kilomètres du tribunal où la tutelle prend naissance. Pourtant ils seront membres de ce conseil, s'ils sont prêts à accepter volontairement la charge pour laquelle le juge municipal devait les assigner. 298. — Les causes qui excusent le tuteur ou le subrogé tuteur, celles qui les rendent incapables ou donnent lieu à leur révocation sont applicables aux membres du conseil de famille. Toutefois ne pourront être membres de ce conseil les personnes que le père ou la mère auraient par testament exclues de cette fonction. 299. — Le tuteur ni le subrogé tuteur ne pourront être membres du conseil de famille. 300. — L'assemblée pour la formation du conseil de famille sera présidée par le juge municipal. Les membres cités seront tenus de comparaître en personne, ou par un fondé de pouvoirs spécial, qui ne pourra jamais représenter plus d'une personne. S'ils ne comparaissent pas, le juge municipal pourra leur infliger une amende qui ne dépassera pas cinquante pesetas. 301. — Le conseil de famille, une fois formé par le juge municipal, prendra toutes les mesures nécessaires pour pourvoir à la personne et aux biens du mineur ou de l'incapable et constituer la tutelle. 302. — Le conseil de famille pour les enfants naturels se constituera d'après les mêmes règles que celui des enfants légitimes, en choisissant pour membres les parents du père ou de la mère qui les aurait reconnus. Celui des enfants illégitimes se formera avec le fiscal municipal qui en sera le président, et quatre voisins honorables. 303. — L'administration dé chaque établissement de bienfaisance aura, sur les orphelins mineurs qui y sont recueillis, tous les droits qui appartiennent aux tuteurs et au conseil de famille. SECTION II. — De la manière de procéder du conseil de famille. 304. — Sera président du conseil de famille le membre que les autres nommeront. Il appartient au président: 1° De réunir le conseil lorsque cela paraît utile ou lorsque le demandent les membres, ou le tuteur, ou le subrogé tuteur, et de présider les délibérations; 2° De rédiger et de motiver ses décisions en faisant connaître l'opinion de chacun des membres, ce que chacun approuve par sa signature; 3° D'exécuter ses décisions. 305. — Le conseil de famille ne peut prendre de résolution sur les points qui lui sont soumis, si au moins trois de ses membres ne sont présents. Les décisions se prennent toujours à la majorité des voix. La voix du président décidera en cas de partage. 306. — Les membres du conseil sont tenus d'assister aux réunions pour lesquelles ils sont convoqués. S'ils n'y assistent pas, et s'ils n'allèguent pas d'excuse légitime, le président du conseil portera le fait à la connaissance du juge municipal, qui pourra leur infliger une amende ne dépassant pas 50 pesetas. 307. — Aucun membre du conseil de famille n'assistera à la réunion où se traitera une affaire dans laquelle il serait intéressé par lui-même, ou par ses descendants, ses ascendants, ou son conjoint. Pourtant il pourra être entendu si le conseil le juge convenable. 308. — Le tuteur et le subrogé tuteur sont tenus d'assister aux réunions du conseil de famille, lorsqu'ils sont convoqués, mais ils ne votent pas. Ils pourront aussi y assister toutes les fois que le conseil se réunit sur leur demande. Le droit d'y assister et d'y être entendu appartient à celui qui est en tutelle, s'il a plus de quatorze ans. 309. — Le conseil de famille connaîtra des affaires qui sont de sa compétence, conformément aux dispositions de ce Code. 310. — Les décisions du conseil de famille peuvent être attaquées, devant le juge de première instance, par les membres, qui ne se sont pas trouvés d'accord avec la majorité, lors du vote de la décision; ainsi que par le tuteur, le subrogé tuteur, ou tout autre intéressé à la décision, sauf le cas de l'article 242. 311. — A la fin de la tutelle et, comme conséquence, le conseil se dissoudra et remettra à celui qui y avait été soumis, ou à celui qui le représente, les procès-verbaux de ses séances. 312. — Les membres du conseil de famille sont responsables du préjudice que la personne soumise à la tutelle aurait souffert par leur malice, ou leur négligence coupable. 313. — Sont exempts de cette responsabilité les membres qui auraient protesté contre la décision qui a causé le préjudice. TITRE XI. — DE L'ÉMANCIPATION ET DE LA MAJORITÉ. CHAPITRE PREMIER. — DE L'ÉMANCIPATION. 314. — L'émancipation a lieu: 1° Par le mariage du mineur; 2° Par la majorité; 3° Par l'octroi qu'en fait le père ou la mère qui exerce la puissance paternelle. 315. — Le mariage produit de droit l'émancipation avec les restrictions contenues dans l'article 59 et le paragraphe troisième de l'article 50. 316. — L'émancipation dont parle le troisième paragraphe de l'article 314 s'octroiera par un acte public, ou par une comparution devant le juge municipal qui devra la mentionner sur le registre civil; avant, elle ne produit pas d'effet contre les tiers. 317. — L'émancipation permet au mineur de gouverner sa personne et ses biens comme s'il était majeur; mais jusqu'à sa majorité, l'émancipé ne pourra emprunter, grever, ni vendre ses immeubles sans le consentement de son père, ou, à défaut de ce dernier, de sa mère ou, à défaut des deux, de son tuteur. Il ne pourra non plus comparaître en justice sans l'assistance de ces personnes. 318. — Pour qu'il y ait lieu à émancipation par l'octroi du père ou de la mère, il faut que le mineur ait au moins dix-huit ans accomplis et qu'il y consente. 319. — L'émancipation une fois accordée ne peut plus être révoquée. CHAPITRE II. — DE LA MAJORITÉ. 320. — La majorité commence à vingt-trois ans accomplis. Le majeur est capable de tous les actes de la vie civile, sauf les exceptions établies par ce Code. 321. — Malgré les dispositions de l'article précédent, les fils de famille majeurs, mais ayant moins de vingt-cinq ans, ne pourront abandonner la maison paternelle sans le consentement du père ou de la mère avec qui ils vivent, si ce n'est pour prendre état, à moins que leur père ou leur mère n'ait contracté un nouveau mariage. 322. — Le mineur, orphelin de père et de mère, peut obtenir le bénéfice de la majorité par une concession faite par le conseil de famille et approuvée par le président de l'Audiencia territorial du district, le fiscal entendu. 323. — Pour la concession et l'autorisation dont parle l'article précédent, il est nécessaire: 1° Que le mineur ait dix-huit ans accomplis; 2° Qu'il consente à cette extension de capacité; 3° Qu'elle paraisse avantageuse au mineur. Cette mesure devra être constatée sur le registre des tutelles et mentionnée sur le registre civil. 324. — Les dispositions de l'article 319 sont applicables à celui qui a obtenu le bénéfice de la majorité. TITRE XII. — DU REGISTRE DE L'ÉTAT CIVIL. 325. — Les actes concernant l'état civil des personnes seront dressés sur le registre destiné à cet effet. 326. — Le registre de l'état civil comprendra les inscriptions et les mentions de naissances, mariages, émancipations, reconnaissances d'enfants naturels, légitimations, décès, naturalisations et droits de cité, il sera en Espagne tenu par les juges municipaux et par les autres fonctionnaires civils; et à l'étranger par les agents consulaires ou diplomatiques. 327. — Les actes du registre seront la preuve de l'état civil, elle ne pourra être remplacée par d'autres que dans le cas où les actes n'auraient pas été dressés, où les livres du registre auraient disparu, où il y aurait procès devant les tribunaux. 328. — La présentation du nouveau-né au fonctionnaire chargé du registre ne sera pas nécessaire pour son inscription; la déclaration de la personne tenue de la faire suffira. Cette déclaration comprendra toutes les circonstances exigées par la loi, elle sera signée par son auteur, ou par deux témoins si elle ne peut signer. 329. — Dans les mariages canoniques, les contractants ont l'obligation de procurer au fonctionnaire qui, comme représentant de l'État, assiste à la célébration, tous les documents nécessaires pour l'inscription sur le registre. On excepte ceux relatifs aux publications, aux empêchements et aux dispenses qui ne doivent pas être constatés dans l'inscription. 330. — Les naturalisations n'auront aucun effet tant qu'elles ne sont pas publiées par l'inscription sur le registre, quelle que soit la preuve qui les établisse et la date où elles auraient été accordées. 331. — Les juges municipaux et de première instance, quand il y a lieu, pourront réprimer les infractions aux dispositions sur le registre civil qui ne constitueraient ni délit, ni contravention, par une amende de vingt à cent pesetas. 332. — La loi du 17 juin 1870 continuera d'être en vigueur en tant qu'elle n'est pas contraire aux articles précédents. LIVRE DEUXIÈME DES BIENS, DE LA PROPRIÉTÉ ET DE SES MODIFICATIONS. TITRE PREMIER. — DE LA CLASSIFICATION DES BIENS. DISPOSITIONS PRÉLIMINAIRES. 333. — Toutes les choses qui sont, ou peuvent être l'objet d'appropriation sont considérées comme des biens meubles ou immeubles. CHAPITRE PREMIER. — DES BIENS IMMEUBLES. 334. — Sont biens immeubles: 1° Les terres, les édifices, les chemins et les constructions de toute sorte adhérentes au sol; 2° Les arbres, les plantes, les fruits pendants, tant qu'ils sont attachés à la terre ou forment partie intégrante d'un immeuble; 3° Tout ce qui est réuni à un immeuble d'une manière fixe, en sorte qu'on ne puisse le séparer sans briser la matière, ou détériorer l'objet; 4° Les statues, bas-reliefs, peintures ou autres objets d'usage, ou d'ornementation placés dans les édifices ou héritages par le propriétaire de l'immeuble, de telle façon à révéler sa volonté de les attacher pour toujours au fonds; 5° Les machines, vases, instruments ou ustensiles destinés par le propriétaire du fonds à l'industrie, ou à l'entreprise qu'il exploite dans un édifice, ou un héritage, et qui répondent directement aux besoins de cette exploitation. 6° Les réunions d'animaux, comme celles des colombiers, des ruches d'abeilles, des réservoirs à poissons et autres analogues lorsque le propriétaire les a placés et les entretient dans l'intention de les conserver réunis à l'immeuble, pour qu'ils en fassent partie d'une façon permanente; 7° Les engrais, destinés à la culture d'un héritage, qui sont sur les terres où on doit les employer; 8° Les mines, carrières et gisements, pourvu que la matière reste unie au sol, ainsi que les eaux vives et celles qui sont retenues; 9° Les digues et les constructions qui, bien que flottantes, sont destinées à rester en un point fixe des rivières ou du rivage; 10° Les concessions administratives de travaux publics, les servitudes et les autres droits réels sur les immeubles. CHAPITRE II. — DES BIENS MEUBLES. 335. — On appelle biens meubles toutes les choses susceptibles d'appropriation qui ne sont pas comprises dans le chapitre précédent et, en général, tous ceux que l'on peut transporter d'un point à un autre sans détériorer l'immeuble auquel ils sont unis. 336. — Sont aussi considérés comme biens meubles les rentes et pensions viagères ou perpétuelles, appartenant à une personne ou à une famille, pourvu qu'elles ne grèvent pas d'une charge réelle une chose immeuble, les offices aliénables, les contrats sur les services publics et les titres et cédules représentant des prêts hypothécaires. 337. — Les biens meubles sont fongibles, ou non fongibles. A la première espèce appartiennent ceux dont on ne peut faire l'usage propre à leur nature sans les consommer, à la seconde appartiennent les autres. CHAPITRE III. — DES BIENS SELON LES PERSONNES QUI LES POSSÈDENT. 338. — Les biens sont du domaine public ou de propriété privée. 339. — Sont biens du domaine public: 1° Ceux qui sont destinés à l'usage public, comme les chemins, canaux, rivières, torrents, ports et ponts construits par l'État, les rivages, plages, rades et autres choses analogues; 2° Ce qui appartient privativement à l'État, sans être d'un usage commun, mais qui est destiné à quelque service public, ou au développement de la richesse nationale, comme les murailles et autres ouvrages pour la défense du territoire, ou les mines avant qu'on en ait accordé la concession. 340. — Tous les autres biens appartenant à l'État, et ne réunissant pas les conditions indiquées en l'article précédent, ont le caractère de propriété privée. 341. — Les biens du domaine public deviennent une partie de la propriété de l'État, lorsqu'ils cessent d'être destinés à l'usage général, ou aux besoins de la défense du territoire. 342. — Les biens du patrimoine royal sont régis par la loi spéciale, et, pour ce qu'elle n'a pas prévu, par les règles générales que ce Code établit sur la propriété privée. 343. — Les biens des provinces et des communes se divisent en biens d'usage public et en biens patrimoniaux. 344. — Sont biens d'usage public dans les provinces et communes, les chemins provinciaux et vicinaux, les rues, les fontaines et les eaux publiques, les promenades et les travaux publics pour le service général, payés par ces mêmes communes et provinces. Tous les autres biens, que les unes et les autres possèdent, sont patrimoniaux et régis par les dispositions de ce Code, sauf les prescriptions des lois spéciales. 345. — En plus des biens patrimoniaux de l'État, de la province et de la commune, sont biens de propriété privée ceux qui appartiennent à des particuliers individuellement ou collectivement. DISPOSITIONS COMMUNES AUX TROIS CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 346. — Quand dans une disposition de loi, ou dans une déclaration individuelle, on se sert de l'expression choses et biens immeubles, ou celle de choses et biens meubles, on entendra y comprendre tout ce qui est énuméré dans le chapitre premier, ou le chapitre second selon le cas. Quand on se sert du mot meuble, on n'entendra pas y comprendre l'argent, les créances, les effets de commerce, les valeurs, les bijoux, les collections scientifiques ou artistiques, les livres, les médailles, les armes, les vêtements, les chevaux, voitures et harnais, les grains, le vin, les marchandises, ni les autres choses qui n'ont pas pour principale destination de meubler et décorer les habitations, sauf le cas où le contraire résulte clairement du texte de la loi, ou de la disposition individuelle. 347. — Lorsque dans une vente, un legs, une donation ou tout autre acte de disposition relatif à des biens meubles et immeubles, on en transmet la possession ou propriété avec tout ce qui s'y trouve, on ne considérera pas comme compris dans la cession l'argent, les valeurs, les créances et les actions dont les titres sont dans la chose transmise, à moins que la volonté d'étendre la cession à ces droits et valeurs ne soit clairement établie. TITRE II. — De La Propriété. CHAPITRE PREMIER. — DE LA PROPRIÉTÉ EN GÉNÉRAL. 348. — La propriété est le droit de jouir et de disposer d'une chose, sans autres restrictions que celles établies par les lois. Le propriétaire peut agir contre le possesseur et le détenteur pour la revendiquer. 349. — Nul ne pourra être privé de sa propriété, si ce n'est par l'autorité compétente et pour cause d'utilité publique justifiée, et toujours moyennant une juste indemnité préalable. Si ce paiement n'a pas précédé, les juges maintiendront et s'il y a lieu réintégreront l'exproprié en possession. 350. — Le propriétaire d'un terrain est le maître de ce qui est au-dessus et de ce qui est au-dessous, il peut y faire les travaux, plantations, excavations qui lui conviennent, en respectant les servitudes, en se soumettant aux lois sur les mines et les eaux, et aux règlements de police. 351. — Le trésor caché appartient au maître du terrain où il se trouve. Nonobstant, lorsque la découverte sera faite dans la propriété d'autrui ou de l'État, et par hasard, la moitié appartiendra à l'inventeur. Si les objets découverts sont intéressants pour la science ou les arts, l'État pourra les acquérir à leur juste prix, qui sera partagé ainsi qu'il a été dit. 352. — On entend par trésor, pour les effets de cette loi, un dépôt secret et ignoré d'argent, de bijoux ou autres objets précieux dont la propriété légitime n'est pas établie. CHAPITRE II. — DU DROIT D'ACCESSION. DISPOSITION GÉNÉRALE. 353. — La propriété des biens donne droit par accession à tout ce qu'elles produisent, s'unit à elles, ou s'y incorpore naturellement ou artificiellement. SECTION PREMIÈRE. — Du droit d'accession relativement au produit des biens. 354. — Appartiennent au propriétaire: 1° Les fruits naturels; 2° Les fruits industriels; 3° Les fruits civils. 355. — Les fruits naturels sont les productions spontanées de la terre, les petits des animaux et leurs autres produits. Les fruits industriels sont ceux que produisent les fonds de terre de toute espèce par la culture, ou le travail. Les fruits civils sont le loyer des édifices, le prix du rendement de la terre et le revenu des rentes perpétuelles, viagères et autres analogues. 356. — Celui qui perçoit les fruits a l'obligation d'assurer le paiement des frais, faits par un tiers pour leur production, leur garde et leur conservation. 357. — On ne qualifie de fruits naturels ou industriels que ceux qui sont nés et apparents. Quant aux animaux, il suffit qu'ils soient dans le ventre de la mère, quoiqu'ils ne soient pas nés. SECTION II. — Du droit d'accession relativement aux immeubles. 358. — Les constructions, plantations, semailles faites, dans le terrain d'un étranger, ainsi que les améliorations et réparations qui y sont effectuées appartiennent au propriétaire du sol qui se soumettra aux dispositions des articles suivants. 359. — Tous les travaux, ensemencement et plantations sont présumés faits par le propriétaire et à ses frais, tant que le contraire n'est pas prouvé. 360. — Le propriétaire du sol, qui y fait par lui-même ou par un autre des plantations, constructions ou travaux avec les matériaux d'autrui, doit en payer la valeur, et s'il l'a fait de mauvaise foi, il sera en outre tenu de l'indemniser par des dommages-intérêts. Le propriétaire des matériaux n'aura.le droit de les enlever que s'il peut le faire sans détériorer l'œuvre construite, et sans détruire les plantations, les constructions ou les autres travaux effectués. 361. — Le propriétaire du terrain sur lequel on a bâti, semé, ou planté de bonne foi, a droit de s'approprier la construction, les semailles ou les plantations en payant préalablement l'indemnité fixée par les articles 453 et 454, ou d'obliger celui qui bâtit ou planta, à lui payer le prix du terrain, et celui qui sema, le loyer correspondant. 362. — Celui qui bâtit, planta ou sema de mauvaise foi sur le terrain d'autrui, perd sa construction, ses plantations ou ses semailles, sans avoir droit à une indemnité. 363. — Le propriétaire du terrain, où l'on a planté, construit, ou semé de mauvaise foi, peut exiger la destruction du travail, l'arrachage de la plantation ou des semailles, et la remise des choses dans leur état primitif, aux frais de celui qui a bâti, planté ou semé. 364. — Lorsque la mauvaise foi existe non seulement du côté de celui qui a bâti, semé, ou planté sur le terrain d'autrui, mais encore du côté du propriétaire, les droits de l'un et de l'autre seront les mêmes que s'ils avaient possédé l'un et l'autre de mauvaise foi. On décide qu'il y a mauvaise foi de la part du propriétaire, lorsque le fait est accompli à son vu et su, et qu'il le souffre sans s'y opposer. 365. — Si les matériaux, plantes ou semailles appartiennent à un tiers qui n'a pas agi de mauvaise foi, le propriétaire du terrain devra répondre de leur valeur subsidiairement, dans le cas où celui qui les employa n'a pas de quoi les payer. Il n'y a pas lieu d'appliquer cette disposition lorsque le propriétaire use du droit de l'article 363. 366. — Appartient aux propriétaires des héritages riverains d'un cours d'eau l'accroissement que les rives reçoivent par l'effet du courant d'eau. 367. — Les propriétaires des héritages bordant les étangs ou les lacs n'acquièrent pas le terrain découvert par la diminution naturelle des eaux et ne perdent pas celui que les eaux recouvrent dans les crues extraordinaires. 368. — Lorsque le courant d'un fleuve, d'un ruisseau, ou d'un torrent arrache des bords d'un héritage une portion de terrain certaine et la transporte à un autre héritage, le propriétaire de la partie séparée en conserve la propriété. 369. — Les arbres, arrachés et transportés par le courant des eaux, appartiennent au propriétaire du terrain où ils s'arrêtent, si leurs anciens propriétaires ne les réclament pas dans le délai d’un mois. S'ils les réclament, ils devront payer les dommages occasionnés en les recueillant et en les plaçant en lieu sûr. 370. — Les lits, que les cours d'eau peuvent abandonner pour varier naturellement leur cours, appartiennent aux propriétaires des terrains riverains, dans toute l'étendue leur revenant. Si le lit abandonné séparait deux héritages distincts, la nouvelle ligne de partage sera à une égale distance de l'un et de l'autre. 371. — Les îles, qui se forment dans les mers baignant les côtes d'Espagne et dans les cours d'eau navigables et flottables, appartiennent à l'État. 372. — Lorsqu'un fleuve navigable et flottable, changeant naturellement son cours, s'ouvre un nouveau lit sur un héritage privé, ce lit entrera dans le domaine public. Le propriétaire de l'héritage le recouvrera si les eaux viennent à se retirer soit naturellement, soit à la suite de travaux légalement autorisés et exécutés. 373. — Les îles, qui se forment dans les autres cours d'eau par l'accumulation successive des débris qu'ils charient, appartiennent au propriétaire des rives et bords les plus voisins, ou à ceux des deux rives, si l'île se trouve au milieu du cours d'eau. Elle se divisera alors par moitié dans sa longueur. Si une île ainsi formée est plus éloignée d'une rive que de l'autre, elle appartiendra entièrement au propriétaire de la rive la plus voisine. 374. — Lorsque le cours d'un fleuve se divise en bras, laissant complètement entourée la totalité, ou une partie d'un héritage, le propriétaire en garde la propriété. Il la conserve encore sur la portion de terrain qui viendrait à être séparée de son héritage par le courant. SECTION III. — Du droit d'accession relativement aux biens meubles. 375. — Lorsque deux meubles, appartenant à des propriétaires différents, s'unissent de telle façon qu'ils n'en forment plus qu'un seul, le propriétaire de la principale acquiert celle qui est accessoire s'il n'y a pas de mauvaise foi, en indemnisant de sa valeur le propriétaire précédent. 376. — Entre deux choses incorporées l'une à l'autre, on considère comme principale celle à laquelle l'autre a été unie pour l'orner ou pour assurer son usage, ou sa perfection. 377. — Si on ne peut déterminer par la règle de l'article précédent la principale des deux choses incorporées l'une à l'autre, on attribuera cette qualité à l'objet qui a le plus de valeur, et entre deux objets de même valeur à celui qui a le plus d'importance. Dans les œuvres de peinture, ou de sculpture, dans les compositions littéraires, impressions, gravures, lithographies, on considérera comme accessoires le bois, le métal, la pierre, la toile, le papier ou le parchemin. 378. — Lorsque ces choses réunies peuvent se séparer sans dommages, les deux propriétaires peuvent exiger la séparation. Néanmoins, lorsque la chose unie pour l'usage, l'embellissement ou le perfectionnement de l'autre est beaucoup plus précieuse que la chose principale, le propriétaire de cette dernière peut exiger sa séparation, encore bien que celle, à laquelle elle était incorporée, en souffre quelque dommage. 379. — Lorsque le propriétaire de la chose accessoire l'a incorporée de mauvaise foi, il perd la chose incorporée et a l'obligation d'indemniser le propriétaire de la chose principale du préjudice qu'il a souffert. Si celui qui a agi de mauvaise foi est propriétaire de la chose principale, le propriétaire de l'accessoire a le droit de demander, à son choix, qu'on lui en paie la valeur, ou qu'on sépare la chose lui appartenant, alors même qu'il serait pour cela nécessaire de détruire la chose principale. En outre, dans les deux cas, il y aura lieu de l'indemniser des dommages et préjudices. Si l'un des deux propriétaires a fait l'incorporation au vu, su, tolérance et sans opposition de l'autre, on déterminera leurs droits respectifs comme dans le cas où on a agi de bonne foi. 380. — Toutes les fois que le propriétaire de la matière a le droit d'être indemnisé, il peut exiger que cette indemnité consiste en la livraison d'une chose de même espèce et valeur, et possédant les mêmes qualités que celle employée, ou bien son prix d'après la fixation des experts. 381. — Si par la volonté de leurs propriétaires, des choses de valeur égale ou différente viennent à se mélanger, ou si le mélange s'opère par cas fortuit, et, dans ce dernier cas, si les choses ne peuvent se séparer sans dommage, chaque propriétaire acquerra un droit proportionnel à la partie qui lui appartient d'après la valeur des choses mélangées ou confondues. 382. — Si par la volonté d'un seul, agissant de bonne foi, se mêlent et se confondent des choses de valeur égale ou différente, les droits des propriétaires se règleront d'après les dispositions du précédent article. Si celui qui a fait le mélange ou la confusion a agi de mauvaise foi, il perdra la chose lui appartenant et qui se trouve mêlée ou confondue, et il sera, en outre, obligé de réparer le préjudice causé au propriétaire de la chose avec laquelle le mélange a été fait. 383. — Celui qui de bonne foi employa la matière d'autrui en tout ou en partie pour faire une œuvre d'une nouvelle espèce, en aura la propriété en indemnisant le propriétaire de sa valeur. Si cette matière est plus précieuse que l'œuvre à laquelle on l'a employée, si elle est de valeur supérieure, son propriétaire pourra, à son choix, la laisser sous sa nouvelle forme en en payant une indemnité pour la valeur de l'œuvre, ou demander le prix de la matière. Si la confection de cette chose nouvelle a été faite de mauvaise foi, le propriétaire de la matière a droit de conserver l'œuvre, sans rien payer à l'auteur, ou d'exiger qu'il l'indemnise de la valeur de la matière et des préjudices qui ont suivi. CHAPITRE III. — DU BORNAGE ET DE LA DÉLIMITATION. 384. — Tout propriétaire a le droit de borner sa propriété en assignant les propriétaires des fonds limitrophes. La même faculté appartient à ceux qui ont des droits réels. 385. — Le bornage se fait conformément aux titres des propriétaires et, à défaut de titres suffisants, d'après les résultats de la possession des voisins. 386. — Si les titres ne déterminent pas les limites et le terrain appartenant à chaque propriétaire, et si la question ne peut se trancher par la possession, le bornage se fera en partageant en parties égales le terrain objet de la contestation. 387. — Si les titres des voisins indiquent une superficie supérieure ou inférieure à celle de la totalité du terrain, l'augmentation ou la perte se répartira proportionnellement. CHAPITRE IV. — DU DROIT DE CLORE LES FONDS RURAUX. 388. — Tout propriétaire peut clore son héritage et l'entourer de murs, de fossés, de haies vives ou sèches, ou de toute autre clôture, sans préjudicier toutefois aux servitudes qui y sont établies. CHAPITRE V. — Des édifices en ruine et des arbres qui menacent de tomber. 389. — Si un édifice, une colonne ou toute autre construction menace ruine, leur propriétaire sera tenu de la démolir, ou d'exécuter les travaux nécessaires pour éviter sa chute. Si le propriétaire de la construction eu ruine ne prend les mesures nécessaires, l'autorité pourra la faire démolira ses frais. 390. — Lorsqu'un gros arbre menacera de tomber de manière à endommager une propriété voisine ou à blesser ceux qui passent sur un chemin public ou privé, le propriétaire de cet arbre sera tenu de l'arracher ou de l'enlever, sinon ce travail sera fait, à ses frais, par ordre de l'autorité. 391. — Dans le cas des articles précédents, si l'arbre ou l'édifice vient à tomber, il y a lieu d'appliquer les dispositions des articles 1907 et 1908. TITRE III. — DE LA COMMUNAUTÉ DES BIENS. 392. — Il y a communauté lorsque la propriété d'une chose ou d'un droit appartient par indivis à plusieurs personnes. A défaut de conventions ou de dispositions spéciales, la communauté se réglera par les dispositions de ce titre. 393. — La participation des copropriétaires aux bénéfices, comme aux charges, sera proportionnelle à leurs parts respectives. Toutes les fois que le contraire ne sera pas prouvé, on présumera égales les parts des différents membres de la communauté. 394. — Chaque ayant droit pourra se servir des choses communes, pourvu qu'il en use conformément à leur destination et de manière à ne pas préjudicier aux intérêts de la communauté et à ne pas empêcher les autres ayants droit d'en profiter selon leur droit. 395. — Tout propriétaire aura droit d'obliger ses copropriétaires à contribuer aux frais de conservation de la chose, ou du droit commun. Celui qui renonce à sa part de propriété pourra seul s'exempter de cette obligation. 396. — Lorsque les différents étages d'une maison appartiennent à des propriétaires distincts, si les titres de propriété n'établissent pas la part dans laquelle chacun doit contribuer aux travaux nécessaires, et s'il n'existe à cet égard aucune convention, on suivra les règles suivantes: 1° Les gros murs, les murs mitoyens, la toiture et toutes les autres choses d'un commun usage seront à la charge de tous les propriétaires, dans la proportion de la valeur de leur étage; 2° Chaque propriétaire fera à ses frais le plancher de son étage. Le pavage du portail, la porte d'entrée, la cour commune et les services de police, communs à tous les propriétaires, seront payés par eux au prorata; 3° L'escalier qui va du portail au premier étage sera au prorata aux frais de tous les propriétaires, sauf du propriétaire du rez-de-chaussée; celui qui conduit du premier au second étage sera, au prorata, aux frais de tous les propriétaires, sauf de ceux du rez-de-chaussée et du premier étage, et ainsi successivement. 397. — Aucun des copropriétaires ne pourra, sans le censentement des autres, apporter des modifications à la chose commune, alors même qu'il pourrait en résulter des avantages pour tous. 398. — Pour l'administration et la meilleure jouissance de la chose commune, les décisions de la majorité des ayants droit seront obligatoires. Il n'y aura majorité que si la décision est prise par les ayants droit représentant la plus forte somme d'intérêt dans l'objet commun. S'il n'y a pas de majorité, ou si la décision cause un grave préjudice aux intéressés à la chose commune, le juge, sur la demande d'une partie, ordonnera les mesures utiles et même nommera un administrateur. Lorsqu'une partie de la chose appartient privativement à un, ou à plusieurs ayants droit, et que l'autre est commune, la disposition de l'article précédent ne sera applicable qu'à cette dernière. 399. — Tout copropriétaire aura la pleine propriété de sa part, ainsi que des fruits et bénéfices y afférant; il pourra en conséquence l'aliéner, la céder, l'hypothéquer et même se substituer un tiers dans sa jouissance, à moins qu'il ne s'agisse de droits purement personnels. Toutefois l'effet de l'aliénation ou de l'hypothèque, dans les rapports avec les copropriétaires, restera limité à la portion attribuée lors du partage à la fin de la communauté. 400. — Aucun propriétaire ne sera obligé à demeurer dans l'indivision. Chacun d'eux pourra, à quelque époque que ce soit, demander le partage de la chose commune. Malgré cela, sera valable la convention de conserver la chose indivise pour un délai déterminé qui n'excède pas dix ans. Ce délai pourra être prorogé par une nouvelle convention. 401. — Malgré la disposition de l'article précédent, les copropriétaires ne peuvent exiger la division de la chose commune, lorsque la volonté de la laisser commune résulte de l'usage auquel elle est destinée. 402. — Le partage de la chose commune pourra se faire par les intéressés, par des arbitres ou amiables compositeurs, nommés par le choix des ayants droit. Dans le cas de partage par arbitres ou amiables compositeurs, on devra former des parts proportionnelles au droit de chacun en évitant, autant que possible, les soultes en argent. 403. — Les créanciers et les cessionnaires des ayants droit pourront concourir au partage de la chose commune, et s'opposer à ce qu'il soit fait hors de leur présence. Pourtant ils ne pourront attaquer le partage consommé, sauf le cas de fraude, et celui où on y aurait procédé nonobstant l'opposition formellement faite pour l'empêcher, et sauf les droits du débiteur et du cédant d'en soutenir la validité. 404. — Lorsque la chose est essentiellement indivisible, et que les copropriétaires ne conviennent pas de l'adjuger à l'un d'eux qui indemniserait les autres, on la vendra, et on en répartira le prix. 405. — Le partage d'une chose commune ne préjudiciera pas aux tiers qui conserveront leurs droits d'hypothèque, de servitude et les autres droits réels qui leur appartenaient avant la confection du partage. Les droits personnels, qu'un tiers avait contre la communauté, conserveront également leur puissance malgré le partage. 406. — Seront applicables au partage entre les ayants droit à une communauté, les règles concernant le partage des successions. TITRE IV. — DE CERTAINES PROPRIÉTÉS SPÉCIALES. CHAPITRE PREMIER. — DES EAUX. SECTION PREMIÈRE. — De la propriété des eaux. 407. — Sont du domaine public: 1° Les fleuves et leurs lits naturels; 2° Les eaux continues ou discontinues des rivières et cours d'eau coulant dans leurs lits naturels, ainsi que ces mêmes lits; 3° Les eaux qui sourdent d'une manière continue ou discontinue sur les terrains du domaine public; 4° Les lacs et étangs formés naturellement sur le terrain public ainsi que leurs lits; 5° Les eaux pluviales qui s'écoulent à travers les fondrières et les rochers par un lit appartenant également au domaine public; 6° Les eaux souterraines qui existent dans les terrains publics; 7° Les eaux trouvées dans la zone de travaux d'utilité publique, encore qu'ils s'exécutent par un concessionnaire; 8° Les eaux qui naissent d'une façon continue ou discontinue sur les terres des particuliers, de l'État, des provinces ou des communes, du moment où elles sortent de ces terres. 9° L'excédent des fontaines, citernes et établissements publics. 408. — Sont du domaine privé: 1° Les eaux continues ou discontinues qui sourdent dans les héritages du domaine privé, tant qu'elles courent sur ces héritages; 2° Les lacs, les étangs et leurs lits, formés naturellement dans ces héritages; 3° Les eaux souterraines qui s'y trouvent; 4° Les eaux pluviales qui y tombent tant qu'elles ne sont pas hors de leurs limites; 5° Les lits des eaux courantes continues ou discontinues, formées par les eaux pluviales, et ceux des ruisseaux qui traversent des héritages qui ne sont pas du domaine public. Dans tout canal ou aqueduc l'eau, le sol, les murs, les bords seront considérés comme des parties intégrantes de l'héritage ou de l'édifice auquel les eaux sont destinées. Les propriétaires des terrains, à travers lesquels, ou le long desquels passe l'aqueduc, ne pourront exercer sur lui ni propriété, ni droit aux avantages du canal ou des bords, s'ils ne se basent sur des titres accordant le droit, ou la propriété qu'ils réclament. SECTION II. — De l'usage des eaux publiques. 409. — L'usage des eaux publiques s'acquiert: 1° Par concession administrative; 2° Par la prescription de vingt ans. Les limites des droits et des obligations de ces usages seront celles qui résultent, dans le premier cas, des termes de la concession et, dans le second, de la possession et du mode d'usage des eaux. 410. — Toute concession d'usage d'eaux est faite sous réserve du préjudice causé aux tiers. 411. — Le droit à l'usage des eaux publiques s'éteint par la caducité de la concession et par le non usage durant vingt ans. SECTION III. — De l'usage des eaux du domaine privé. 412. — Le propriétaire d'un fonds, sur lequel naît un ruisseau ou une fontaine à courant continu ou discontinu, peut user des eaux tant qu'elles coulent sur lui, toutefois l'excédent entre dans le régime des eaux publiques, et son usage se règle par la loi spéciale sur les eaux. 413. — La propriété du lit, où coulent des eaux pluviales, n'autorise pas à faire des travaux ou des ouvrages qui changent leur cours au préjudice des tiers, ou dont la destruction, amenée par la force des crues, causerait un préjudice. 414. — Nul ne peut pénétrer dans une propriété privée pour prendre de l'eau, ou s'en servir, sans la permission du propriétaire. 415. — Le droit du propriétaire d'un fonds, sur les eaux qui y naissent, ne porte point préjudice aux droits d'usages que les propriétaires des fonds inférieurs ont pu légitimement acquérir. 416. — Tout propriétaire d'un fonds a la faculté d'établir, à l'intérieur de sa propriété, des réservoirs pour conserver les eaux pluviales, s'il ne cause ainsi de préjudice ni aux tiers, ni à l'intérêt public. SECTION IV. — Des eaux souterraines. 417. — Seul le propriétaire d'un fonds, ou toute autre personne ayant sa permission, peut rechercher les eaux souterraines. La recherche des eaux souterraines, dans un fonds du domaine public, ne peut se faire qu'avec l'autorisation administrative. 418. — Les eaux découvertes appartiennent à celui qui les a découvertes, conformément à la loi sur les eaux. 419. — Si le propriétaire des eaux découvertes les abandonne à leur cours naturel, elles seront du domaine public. 420. — Le propriétaire d'un fonds, sur lequel des travaux de protection ont été effectués pour contenir les eaux, est obligé, à son choix, s'il est nécessaire de les refaire à nouveau à cause de la variation du cours des eaux, ou de faire les réparations et constructions nécessaires, ou de souffrir que, sans lui causer de préjudice, elles soient faites par les propriétaires qui en ont éprouvé, ou qui sont manifestement exposés à en éprouver des pertes. 421. — La disposition du paragraphe précédent est applicable au cas où il est nécessaire de débarrasser un fonds des matériaux dont l'accumulation, ou la chute entrave le cours des eaux, et cause préjudice ou danger pour les tiers. 422. — Tous les propriétaires qui participent aux avantages des travaux dont parlent les articles précédents, sont obligés à contribuer, à leurs frais, à leur exécution dans la proportion de leur intérêt. Ceux qui, par leur faute, auront occasionné un dommage, seront responsables des frais. 423. — La propriété et l'usage des eaux, appartenant aux corporations ou aux particuliers, sont susceptibles d'expropriation pour utilité publique. 424. — Les dispositions de ce titre ne portent pas préjudice aux droits acquis antérieurement, ni au droit de propriété appartenant aux propriétaires d'eaux, de canaux, de fontaines, de sources, en vertu duquel ils peuvent les utiliser, les vendre, les échanger comme toute propriété particulière. 425. — Pour tout ce qui n'a pas été expressément prévu par les dispositions de ce chapitre, on se reportera à la loi spéciale des eaux. CHAPITRE II. — DES MINES. 426. — Tout Espagnol ou étranger pourra faire librement sur les fonds du domaine public des fouilles et tranchées qui ne dépassent pas dix mètres en longueur et en profondeur dans le but de découvrir des mines. Il devra toutefois donner un avis préalable à l'autorité locale. Dans les fonds de propriété privée, on ne pourra ouvrir de fouilles sans la permission du propriétaire, ou de celui qui le représente. 427. — Les limites du droit édicté par l'article précédent, les formalités préalables et les conditions de son exercice, la désignation des matières que l'on doit considérer comme minerai et la fixation des droits qui appartiennent au propriétaire du sol, et aux inventeurs des mines, en cas de concession, se règleront par la loi spéciale sur les mines. CHAPITRE III. — DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE. 428. — L'auteur d'une œuvre littéraire scientifique ou artistique a le droit de l'exploiter et d'en disposer à son gré. 429. — La loi sur la propriété intellectuelle détermine les personnes auxquelles appartient ce droit, la forme de son exercice et le temps de sa durée. Dans les cas qui ne sont ni prévus, ni résolus par la loi spéciale, on appliquera les règles générales établies par ce Code sur la propriété. TITRE V. — DE LA POSSESSION. CHAPITRE PREMIER. — DE LA POSSESSION ET DE SES ESPÈCES. 430. — La possession naturelle est la détention d'une chose, ou la jouissance d'un droit par une personne. La possession civile est cette même détention, ou cette même jouissance, unie à l'intention de considérer la chose, ou le droit, comme sa propriété. 431. — La possession s'exerce sur la chose ou le droit par la personne même qui les détient ou qui en jouit, ou bien par une autre en son nom. 432. — La possession des biens et droits peut exister de l'une de ces deux manières: soit par le propriétaire, soit par le détenteur qui se sert, ou jouit d'une chose ou d'un droit appartenant à une autre personne. 433. — On réputera possesseur de bonne foi celui qui ignore qu'il existe dans son titre, eu dans son mode d'acquisition, un vice qui l'invalide. On réputera possesseur de mauvaise foi celui qui se trouve dans le cas contraire. 434. — La bonne foi se présume toujours, et c'est à celui, qui affirme la mauvaise foi d'un possesseur, qu'il appartient de la prouver. 435. — La possession acquise de bonne foi ne perd son caractère que dans le cas, et à partir du moment où il existe des actes qui prouvent que le possesseur ne possède pas la chose d'une façon indiscutable. 436. — On présume que la possession se continue dans la même pensée que celle existant au moment où elle a été acquise, pourvu qu'on ne prouve le contraire. 437. — Ne peuvent être l'objet de possession que les choses et les droits susceptibles d'appropriation. CHAPITRE II. — DE L'ACQUISITION DE LA POSSESSION. 438. — La possession s'acquiert par l'occupation matérielle de la chose ou du droit possédé, ou par ce fait que ces biens sont abandonnés à l'action de notre volonté; enfin par les actes spéciaux et les formalités légales établies pour acquérir ce droit. 439. — La possession peut s'acquérir par la personne même qui doit en profiter, ou par son représentant légal, par son mandataire, ou par un tiers sans aucun mandat; toutefois, dans ce dernier cas, on ne considérera pas la possession comme acquise, tant que l'acte accompli ne sera pas ratifié par la personne au nom de laquelle il a été fait. 440. — La possession des biens héréditaires est réputée transmise à l'héritier sans interruption, du moment de la mort du de cujus, par le fait même qui ouvre la succession. Celui qui répudie valablement une succession est censé ne l'avoir possédée à aucun moment. 441. — Dans aucun cas on ne peut acquérir violemment la possession, tant qu'il existe un possesseur qui s'y oppose. Celui qui croit avoir droit ou action pour priver une autre personne de la détention d'une chose, dont le détenteur refuse la livraison, devra solliciter le secours de l'autorité compétente. 442. — Celui qui succède à titre héréditaire ne subira pas les conséquences de la possession vicieuse de son auteur, si on ne démontre pas qu'il avait connaissance des vices qui l'infestaient, mais il ne bénéficiera des effets de la possession de bonne foi, que du jour de la mort de son auteur. 443. — Les mineurs et les incapables peuvent acquérir la possession des biens, mais il leur faut l'assistance de leurs représentants légitimes pour exercer les droits que la possession engendre en leur faveur. 444. — Les actes de pure tolérance et ceux faits clandestinement, sans que le possesseur de la chose en ait connaissance, de même que ceux faits avec violence, ne portent point atteinte à la possession. 445. — La possession, comme fait, ne peut se reconnaître en deux personnes distinctes, hors le cas d'indivision. S'il surgit une contestation sur le fait de la possession, on préférera le possesseur actuel; s'il est établi qu'il y a deux possesseurs on préférera le plus ancien, et celui qui représente un titre: si les actes de possession sont les mêmes, et si toutes ces conditions sont égales, on remettra la chose à un dépositaire ou séquestre judiciaire, jusqu'à ce que la question de possession ou de propriété soit tranchée par les autorités compétentes. CHAPITRE III. — DES EFFETS DE LA POSSESSION. 446. — Tout propriétaire a le droit d'être respecté dans su possession, et s'il y est troublé, il devra être remis et rétabli en la dite possession par les moyens qu'établissent les lois de procédure. 447. — La possession qui s'acquiert et dont on jouit en se croyant maître de la chose est la seule qui puisse servir de titre pour acquérir la propriété. 448. — Celui qui possède à titre de propriétaire, a en sa faveur la présomption légale qu'il possède un juste titre, qu'on ne peut le forcer à produire. 449. — La possession d'une chose immobilière suppose celle de tous les meubles et objets mobiliers qui s'y trouvent, à moins qu'il ne soit établi, ou qu'on ne prouve qu'il y a lieu de les exclure. 450. — Chacun des ayants droit à une chose commune, possédée en commun, est censé avoir possédé exclusivement, pendant tout le temps de l'indivision, la part qui lui sera attribuée par le partage. L'interruption totale ou partielle de la possession d'une chose commune causera à tous un égal préjudice. 451. — Le possesseur de bonne foi fait siens tous les fruits perçus, tant que la possession n'a pas été légalement interrompue. On considère les fruits naturels comme perçus du jour où on les recueille et où on les détache du sol. Les fruits civils sont supposés produits par chaque jour, ils appartiennent au possesseur de bonne foi dans la même proportion. 452. — Si, au moment où cesse la bonne foi, il y a des fruits naturels ou industriels pendants par racine, le possesseur aura droit aux dépenses qu'il a faites pour leur production et, en outre, à la partie du produit net de la chose proportionnelle à sa possession. Les charges se répartiront de la même manière entre les deux possesseurs. Le propriétaire de la chose peut, s'il le veut, accorder au possesseur de bonne foi la faculté de terminer sa culture et de récolter les fruits pendants, comme indemnité des frais de culture et du produit net qui lui appartient. Le possesseur de bonne foi, qui, pour quelque motif, refuserait d'accepter cette concession, perdra le droit d'être indemnisé d'une autre manière. 453. — Les frais nécessaires sont dus à tout possesseur, mais le possesseur de bonne foi a seul le droit de retenir sa chose jusqu'à son paiement. Les frais utiles sont dus au possesseur de bonne foi avec le même droit de rétention, mais celui qui a triomphé de la possession peut opter entre le paiement des frais, ou celui de l'augmentation de valeur qu'ils ont conféré à la chose. 454. — Les dépenses de pur luxe ou d'agrément ne peuvent être comptées au possesseur de bonne foi, mais il peut enlever les ornements avec lesquels il a embelli la chose principale, si elle n'en souffre pas de détérioration et si celui, qui lui succède dans sa possession, ne préfère pas payer l'importance de la dépense. 455. — Le possesseur de mauvaise foi paiera les fruits perçus et ceux que le possesseur légitime aurait pu percevoir, il n'aura le droit d'être remboursé que des dépenses nécessaires faites pour la conservation de la chose. Les dépenses faites en améliorations de luxe ou d'agrément ne se paient pas au possesseur de mauvaise foi, toutefois il pourra emporter les objets qu'il a achetés, pourvu que la chose n'en souffre pas de dommage et que le possesseur légitime ne préfère pas les conserver, en payant la valeur qu'ils ont au moment de son entrée en possession. 456. — Les améliorations provenant de la nature ou du temps sont toujours au profit de celui qui a triomphé sur la possession. 457. — Le possesseur de bonne foi ne répond pas de la perte de la chose possédée, hors le cas où on prouve qu'il a agi frauduleusement. Le possesseur de mauvaise foi répond de la détérioriation ou de la perte dans toutes les circonstances, et même des cas de force majeure, lorsqu'il a différé de livrer la chose à son possesseur légitime. 458. — Celui qui obtient la possession n'est pas tenu de payer les améliorations qui ont cessé d'exister au moment où il acquiert la chose. 459. — Le possesseur actuel, qui démontre sa possession à une époque antérieure, est présumé avoir également possédé durant le temps intermédiaire, à moins qu'on ne prouve le contraire. 460. — Le possesseur peut perdre sa possession: 1° Par l'abandon de la chose; 2° Par la cession qu'il en fait à un autre, à titre onéreux ou gratuit; 3° Par la destruction, ou la perte totale de la chose, ou par sa mise hors du commerce; 4° Par la possession qu'en a une autre personne, même contre la volonté de l'ancien possesseur, si la nouvelle possession se continue pendant plus d'un an. 461. — La possession d'une chose mobilière n'est point censée perdue tant qu'elle se trouve au pouvoir du possesseur, alors même qu'il ignore momentanément ou elle se trouve. 462. — La possession des choses immobilières et des droits réels n'est censée perdue ni transmise par l'effet de la prescription au préjudice des tiers, si on ne s'est pas soumis aux dispositions de la loi hypothécaire. 463. — Les actes relatifs à la possession, exécutés ou consentis par celui qui possède en simple détenteur, pour en jouir et les conserver à un titre quelconque, n'obligent ni ne portent préjudice au propriétaire, à moins qu'il n'ait accordé expressément la faculté de les exécuter, ou ne les ait ratifiés ultérieurement. 464. — La possession des biens meubles, acquise de bonne foi, équivaut à un titre. Néanmoins celui qui a perdu une chose mobilière, ou qui en a été privé illégalement, peut la revendiquer contre celui qui la possède. Si le possesseur d'une chose mobilière, perdue ou volée, l'a acquise de bonne foi en vente publique, le propriétaire ne pourra en obtenir la restitution sans rembourser le prix payé. De même, le propriétaire de chose engagée dans les monts de piété, établis avec l'autorisation du Gouvernement, ne pourra en obtenir la restitution, quel que soit celui qui l'ait engagée, sans rembourser auparavant à l'établissement le montant du prêt et les intérêts échus. Quant aux choses acquises en Bourse, foire ou marché, ou d'un commerçant légalement établi et se livrant ordinairement au commerce d'objets analogues, on suivra les dispositions du Code de commerce. 465. — Les animaux sauvages ne se possèdent que pendant le temps qu'ils se trouvent en notre pouvoir: ceux qui sont dressés et apprivoisés s'assimilent aux animaux familiers et domestiques, tant qu'ils conservent l'habitude de retourner à la maison de leur possesseur. 466. — Celui qui recouvre, conformément à son droit, la possession qu'il avait incontestablement perdue, est censé, pour tous les effets qui peuvent lui profiter, en avoir joui sans interruption. TITRE VI. — DE L'USUFRUIT, DE L'USAGE ET DE L'HABITATION. CHAPITRE PREMIER. — DE L'USUFRUIT. SECTION PREMIÈRE. — De l'usufruit en général. 467. — L'usufruit donne le droit de jouir des biens d'autrui, mais avec l'obligation d'en conserver la forme et la substance, à moins que le titre constitutif ou la loi n'autorisent autre chose. 468. — L'usufruit est constitué soit par la loi, soit par la volonté des parties manifestée dans les actes entre-vifs ou de dernière volonté, soit par la prescription. 469. — L'usufruit peut être établi sur toutou partie des fruits de la chose, en faveur d'une ou de plusieurs personnes simultanément ou successivement, et dans tous les cas depuis un jour, ou jusqu'à un jour déterminé; purement et simplement ou sans condition. 470. — Les droits et les obligations de l'usufruitier seront ceux que détermine le titre constitutif de l'usufruit; s'il n'y en a pas, ou s'il est insuffisant, on observera les dispositions contenues dans les deux sections suivantes. SECTION II. — Des droits de l'usufruitier. 471. — L'usufruitier aura droit de percevoir tous les fruits naturels, industriels et civils des biens soumis à l'usufruit. Quant au trésor qui se trouverait dans le fonds, il y sera considéré comme étranger. 472. — Les fruits naturels ou industriels, pendants à l'ouverture de l'usufruit, appartiennent a l'usufruitier. Les fruits, pendants au moment de l'extinction de l'usufruit, appartiennent au propriétaire. Dans les cas précédents, l'usufruitier, au commencement de l'usufruit, n'est pas obligé de rembourser au propriétaire les frais qu'il a faits; mais le propriétaire est obligé de rembourser à la fin de l'usufruit, avec le produit des fruits pendants, les frais ordinaires de culture, semence et autres semblables faits par l'usufruitier. Les dispositions de cet article ne portent point préjudice aux droits acquis par les tiers, lors du commencement ou de l'extinction de l'usufruit. 473. — Si l'usufruitier avait loué les terres ou les héritages donnés en usufruit et s'il venait à mourir avant la fin du bail, ses héritiers ou successeurs ne toucheront que la part proportionnelle de la rente que devait payer le fermier. 474. — Les fruits civils sont censés perçus jour par jour, et ils appartiennent à l'usufruitier en proportion du temps que dure l'usufruit. 475. — Si l'usufruit est constitué sur le droit de percevoir une rente ou pension périodique, qu'il s'agisse d'argent, de fruits ou d'intérêts d'obligations, ou de titres au porteur, on considérera chaque échéance comme des produits ou des fruits de ce droit. Si l'usufruit consiste dans la jouissance des bénéfices que rapporte une participation dans une exploitation industrielle ou commerciale, dont les répartitions de bénéfices n'ont pas d'échéance fixe, on les assimilera aux précédents. Dans l'un et l'autre cas, on répartira ces produits comme des fruits civils et on les attribuera ainsi qu'il est dit en l'article précédent. 476. — N'appartiennent pas à l'usufruit d'un fonds de terre les produits des mines qui y existent, fussent-elles découvertes, concédées et exploitées au commencement de l'usufruit, à moins que le titre constitutif ne les accorde expressément, ou qu'il ne comprenne toute la fortune. Néanmoins l'usufruitier pourra extraire des carrières les pierres, la chaux et le plâtre pour les réparations ou les travaux auxquels il est tenu et qui sont nécessaires. 477. — Nonobstant les dispositions de l'article précédent, dans un usufruit légal, l'usufruitier peut jouir des mines découvertes, concédées ou en exploitation dans le fonds, il profitera de la moitié des produits restant après le prélèvement des frais, qu'il paiera par moitié avec le propriétaire. 478. — La qualité d'usufruitier ne prive pas du droit que la loi sur les mines accorde à tous de dénoncer, et d'obtenir la concession des mines existant dans les fonds soumis à l'usufruit, selon les formes et les conditions que cette loi établit. 479. — L'usufruitier aura le droit de jouir de l'augmentation que reçoit par accession la chose soumise à l'usufruit, ainsi que des servitudes existant en sa faveur et en général de tous les avantages qui lui sont propres. 480. — L'usufruitier pourra jouir par lui-même de la chose soumise à son usufruit, la louer à un autre ou aliéner son droit d'usufruit, même à titre gratuit. Toutefois, tous les contrats, qu'il conclut en sa qualité d'usufruitier, seront résolus à la fin de l'usufruit, sauf le bail des fonds ruraux qu'on considérera comme subsistant durant l'année agricole. 481. — Si l'usufruit comprend des choses qui, sans se consommer, se détériorent peu à peu par l'usage, l'usufruitier aura le droit de s'en servir et de les employer selon leur destination; il ne sera obligé de les rendre, à la fin de l'usufruit, que dans l'état où elles seront, toutefois il sera obligé d'indemniser le propriétaire des détériorations qu'elles auraient subies par son dol ou sa négligence. 482. — Si l'usufruit comprend des choses dont on ne peut se servir sans les consommer, l'usufruitier aura le droit de s'en servir, mais il aura l'obligation de payer l'importance de leur estimation à la fin de l'usufruit, si elles ont été estimées. Quand il n'y aura pas eu d'estimation, il aura le droit de les rendre en égale quantité et qualité, ou d'en payer la valeur au moment de la cessation de l'usufruit. 483. — L'usufruitier de vignes, d'oliviers ou d'autres arbres et arbustes pourra profiter des pieds morts et même de ceux qui auraient été abattus, ou arrachés par accident, mais il aura l'obligation de les remplacer par d'autres. 484. — Si par l'effet d'un sinistre ou d'une cause extraordinaire, les vignes, les oliviers ou autres arbres et arbustes avaient disparu en si grand nombre que la replantation en fût impossible, ou grandement préjudiciable pour l'usufruitier, ce dernier laissera les bois morts, arrachés ou brisés, à la disposition du propriétaire, et il exigera qu'il les enlève et en débarrasse le sol. 485. — L'usufruitier d'une montagne jouira de tous les produits qu'elle peut donner selon sa nature. Si la montagne a des taillis ou des bois de construction, l'usufruitier pourra y faire les tailles et coupes que le propriétaire avait coutume de faire, à défaut de cela, il se conformera aux usages des lieux pour le mode, l'étendue et l'époque des coupes. En tout cas, il fera les tailles et coupes de façon à ne point préjudicier à la conservation du fonds. Dans les pépinières d'arbres, l'usufruitier pourra faire les éclaircies nécessaires pour que les arbres restants puissent se développer convenablement. En dehors de ce qui est établi par les paragraphes précédents, l'usufruitier ne pourra couper les arbres par le pied, à moins que ce ne soit pour remplacer et améliorer quelqu'une des choses soumises à l'usufruit, et, dans ce cas, il fera connaître au propriétaire la nécessité du travail. 486. — L'usufruitier d'une action en revendication d'un héritage, d'un droit réel ou d'un bien meuble a droit de l'exercer, et de forcer le propriétaire de cette action de lui accorder le droit de le représenter dans ce but, et de lui procurer les éléments de preuve dont il dispose. Si par suite de l'exercice de cette action, on obtient la chose réclamée, l'usufruit se borne aux seuls fruits, la propriété reste au propriétaire. 487. — L'usufruitier pourra faire, sur les biens soumis à l'usufruit, les améliorations utiles ou d'agrément qu'il juge convenables, pourvu qu'il n'en altère pas la forme ou la substance, mais il n'aura pas de droit d'indemnité de ce chef. Il pourra néanmoins retirer les dites améliorations, si c'est possible, sans détériorer les biens. 488. — L'usufruitier pourra compenser les détériorations avec les améliorations qu'il aurait faites. 489. — Le propriétaire des biens, dont un autre a l'usufruit, pourra les aliéner, mais non altérer leur forme ou leur substance, ni y faire quelque chose qui porte préjudice à l'usufruitier. 490. — L'usufruitier de partie d'une chose possédée en commun exercera tous les droits appartenant au propriétaire pour l'administrer, et percevoir les fruits ou les intérêts. Si la communauté vient à cesser par le partage de la chose possédée en commun, l'usufruitier aura l'usufruit de la partie échue au propriétaire ou communiste. SECTION III. — Des obligations de l'usufruitier. 491. — L'usufruitier, avant d'entrer en jouissance des biens, est tenu: 1° De dresser inventaire de tous les biens, de faire estimer les meubles et décrire l'état des immeubles, après avoir cité le nu-propriétaire ou son représentant; 2° De fournir une garantie en s'engageant à remplir les obligations, qui lui incombent d'après cette section. 492. — La disposition contenue au n°2 de l'article précédent n'est pas applicable au vendeur, ou au donateur qui se seraient réservé l'usufruit des biens donnés ou vendus, elle ne l'est pas non plus aux père et mère usufruitiers des biens de leurs enfants, ni à l'époux survivant quant à la part héréditaire que lui accordent les articles 834, 836 et 837 à moins que les père, mère et époux ne contractent un second mariage. 493. — L'usufruitier, quel que soit le titre de son usufruit, pourra être dispensé de l'obligation défaire inventaire et de fournir caution, quand il n'en résulte de préjudice pour personne. 494. — Si l'usufruitier ne fournit pas de garantie dans le cas où il y est tenu, le propriétaire pourra exiger que les immeubles soient mis en séquestre, qu'on vende les meubles, que les effets publics, titres de crédits nominatifs ou au porteur soient convertis en inscriptions de rentes ou soient déposés dans une banque ou établissement public; que les capitaux ou sommes en argent, et le prix de l'aliénation des biens meubles soient employés en valeurs sûres. L'intérêt du prix des meubles et des effets publics et valeurs, et les produits des biens mis en séquestre appartiennent à l'usufruitier. Le propriétaire pourra encore s'il le préfère, tant que l'usufruitier ne fournit pas de garantie ou n'en est pas dispensé, conserver par devers lui les biens soumis à l'usufruit en qualité d'administrateur, mais avec l'obligation de remettre à l'usufruitier le produit net, défalcation de la somme convenue ou fixée judiciairement pour les soins de cette administration. 495. — Si l'usufruitier, qui n'a pas fourni de garantie, réclame, sous caution juratoire, la remise des meubles nécessaires à son usage, ou la délivrance d'une habitation pour lui et sa famille dans une maison comprise dans l'usufruit, le juge pourra accorder cette demande, après avoir consulté les circonstances de l'affaire. Il en sera de même des instruments, machines et autres biens meubles nécessaires à l'industrie qu'il exerce. Si le propriétaire ne demande pas la vente des meubles à cause de leur mérite artistique, ou bien parce qu'ils ont une valeur d'affection, il pourra exiger qu'on les lui délivre contre l'abandon garanti de l'intérêt légal de la valeur de leur estimation. 496. — Après avoir fourni la garantie, l'usufruitier aura droit à tous les produits, depuis le jour où il aurait dû commencer à les percevoir d'après le titre constitutif de l'usufruit. 497. — L'usufruitier devra prendre soin des choses soumises à l'usufruit comme un bon père de famille. 498. — L'usufruitier, qui aliène ou donne à bail son droit d'usufruit, sera responsable des dommages que subissent les choses soumises à l'usufruit, par la faute ou la négligence des personnes qu'il se substitue. 499. — Si l'usufruit est constitué sur un troupeau ou sur une réunion d'animaux, l'usufruitier sera tenu de remplacer, sur le croît, les bêtes qui meurent dans les années moyennes, ou qui manquent par la rapacité des animaux féroces. Si le troupeau, sur lequel l'usufruit est constitué, périt tout entier, sans que l'usufruitier soit en faute, par une maladie contagieuse ou par tout autre événement extraordinaire, l'usufruitier se libérera en rendant au propriétaire les peaux qu'il aura sauvées de ce malheur. Si le troupeau périt en partie, toujours par accident et sans que l'usufruitier soit en faute, l'usufruit continuera sur la partie subsistante. Si l'usufruit existe sur un troupeau stérile, on appréciera ses effets, comme s'il avait été établi sur une chose fongible. 500. — L'usufruitier est tenu défaire les réparations ordinaires dont ont besoin les choses soumises à l'usufruit. On considère comme ordinaires les réparations qu'exigent ces détériorations et ces dégâts qui viennent de l'usage naturel des choses, et celles qui sont indispensables pour leur conservation. S'il ne les fait pas après en avoir été requis par le propriétaire, ce dernier les fera faire lui-même, aux frais de l'usufruitier. 501. — Les réparations extraordinaires seront au compte du propriétaire. L'usufruitier est tenu de l'avertir quand il y a urgente nécessité de les faire. 502. — Si le propriétaire fait les réparations extraordinaires, il aura droit d'exiger de l'usufruitier, pendant la durée de l'usufruit, l'intérêt légal de la somme qui y aura été employée. S'il ne les a point faites quand elles étaient indispensables pour la conservation de la chose, l'usufruitier pourra les faire, mais il aura le droit d'exiger du propriétaire, à la fin de l'usufruit, l'augmentation de la valeur qu'aura acquise le fonds par l'exécution de ces travaux. Si le propriétaire refuse de payer cette amélioration, l'usufruitier aura droit de retenir la chose jusqu'à ce qu'il ait été indemnisé par les produits 1. 503. — Le propriétaire pourra faire les travaux et les améliorations convenables à l'immeuble soumis à l'usufruit, et des plantations s'il s'agit d'un immeuble rural, pourvu que la valeur de l'usufruit n'en soit pas diminuée et qu'il ne porte préjudice aux droits de l'usufruitier. 504. — Le paiement des charges et contributions annuelles et de celles qu'on considère comme grevant les fruits sera au compte de l'usufruitier pendant tout le temps que dure l'usufruit. 505. — Les contributions que, durant l'usufruit, on impose directement sur le capital, sont à la charge du propriétaire. S'il a satisfait à cette obligation, l'usufruitier devra payer les intérêts des sommes employées à ce payement, et si l'usufruitier les a avancées, il devra en recevoir le montant à la fin de l'usufruit. 506. — Si l'usufruit a été constitué sur la totalité d'un patrimoine, et que le propriétaire ait des dettes au moment de la constitution, on appliquera, tant en ce qui concerne la substance de l'usufruit, que l'obligation de l'usufruitier de les payer, ce qui est établi dans les articles 642 et 643 pour les donations. Cette même disposition est applicable au cas où le propriétaire est obligé, lors de la constitution de l'usufruit, au paiement de prestations périodiques encore qu'il n'y ait pas de capital connu. 507. — L'usufruitier pourra réclamer les créances échues qui font partie de l'usufruit, s'il a donné, ou s'il donne une garantie correspondante. S'il a été dispensé de fournir une garantie, ou s'il n'a pu la constituer, ou si celle qu'il a constituée est insuffisante, il lui faudra l'autorisation du nu-propriétaire ou, à son défaut, celle du juge pour toucher ces créances. L'usufruitier, après avoir fourni la garantie, pourra donner au capital qu'il reçoit la destination qu'il juge convenable. A défaut de garantie, il devra le placer à intérêt, d'accord avec le propriétaire, et, à défaut d'accord, solliciter l'autorisation judiciaire: dans tous les cas, en prenant toutes les sûretés utiles pour conserver l'intégralité du capital soumis à l'usufruit. 508. — L'usufruitier universel devra acquitter intégralement le legs d'une rente viagère ou de pension alimentaire. L'usufruitier d'une part aliquote de l'hérédité le paiera dans la proportion de sa part. L'usufruitier d'un ou de plusieurs objets particuliers paiera seul le legs, quand la rente ou pension est constituée sur lesdits objets. 509. — L'usufruitier d'un fonds hypothéqué ne sera pas obligé de payer les dettes à raison desquelles la garantie hypothécaire a été établie. Si le fonds est saisi ou vendu judiciairement pour le paiement de la dette, le propriétaire garantira l'usufruitier de ses pertes de ce chef. 510. — Si l'usufruit porte sur la totalité, ou sur une portion aliquotè de l'hérédité, l'usufruitier pourra avancer les sommes pour le paiement des dettes héréditaires correspondantes aux biens en usufruit, et il aura le droit d'exiger du propriétaire leur restitution, sans intérêt à la fin de l'usufruit. Si l'usufruitier refuse de faire cette avance, le propriétaire pourra demander qu'on vende la partie des biens soumis à l'usufruit qui est nécessaire pour payer lesdites sommes, ou les fournir de ses deniers avec le droit, dans ce dernier cas, d'exiger de l'usufruitier les intérêts qu'elles doivent produire. 511. — L'usufruitier sera obligé de porter à la connaissance du propriétaire tout acte d'un tiers, dont il a connaissance, qui peut léser les droits de la propriété et il répondra, s'il ne le fait pas, des dommages et préjudices, comme s'il les avait causés par sa faute. 512. — Seront à la charge de l'usufruitier les frais, coûts et condamnations des procès soutenus au sujet de l'usufruit. SECTION IV. — Des modes d'extinction de l'usufruit. 513. — L'usufruit s'éteint: 1° Par la mort de l'usufruitier; 2° Par l'expiration du délai pour lequel il a été constitué, ou par l'accomplissement de la condition mentionnée dans le titre constitutif; 3° Par la réunion de l'usufruit et de la nue-propriété dans la même personne; 4° Par la renonciation de l'usufruitier; 5° Par la perte totale de la chose qui fait l'objet de l'usufruit; 6° Par la résolution du droit du constituant: 7 Par la prescription. 514. — Si la chose, donnée en usufruit, ne périssait qu'en partie, on continuerait à exercer le droit sur la partie restante. 515. — On ne pourra constituer un usufruit en faveur d'une commune, d'une corporation ou d'une société pour plus de trente années. S'il a été constitué et qu'avant ce délai, la commune devienne déserte, la corporation ou la société à se dissoudre, l'usufruit s'éteindra par ce seul fait. 516. — L'usufruit, accordé pendant le temps qu'un tiers mettra pour arriver à un certain âge, subsistera pendant le nombre d'années fixé, encore que le tiers soit mort avant, sauf dans le cas où l'usufruit aurait été concédé en tenant compte de l'existence de cette personne. 517. — Si l'usufruit a été constitué sur un bien dont fait partie un édifice, qui se trouve détruit de quelque façon que ce soit, l'usufruitier continuera à jouir du sol et des matériaux. Il en sera de même lorsque l'usufruit aura été constitué seulement sur un édifice qui se trouve détruit. Mais dans ce cas, si le propriétaire veut bâtir un autre édifice, il aura droit d'occuper le sol et de se servir des matériaux, mais en restant obligé de payer à l'usufruitier, pendant la durée de l'usufruit, les intérêts de la somme représentant la valeur du sol et des matériaux. 518. — Si l'usufruitier participe avec le propriétaire à l'assurance d'un immeuble donné en usufruit, il continuera, en cas de sinistre, à jouir du nouvel édifice que l'on construirait ou bien il percevra les intérêts du prix de l'assurance si la reconstruction ne convient pas au propriétaire. Si le propriétaire refuse de contribuer à l'assurance de l'immeuble, et si l'usufruitier la contracte pour lui seul, il aura droit de recevoir en entier, en cas de sinistre, la prime d'assurance, mais avec l'obligation de l'employer à la reconstruction de l'immeuble. Si l'usufruitier a refusé de contribuer à l'assurance, et si le propriétaire l'a faite pour lui seul, il percevra intégralement la prime en cas de sinistre, sauf le droit accordé à l'usufruitier par l'article précédent. 519. — Si la chose soumise à l'usufruit a été expropriée pour cause d'utilité publique, le propriétaire sera obligé ou bien à lui substituer une autre chose de même valeur et de condition analogue, ou bien à tenir compte à l'usufruitier de l'intérêt légal de l'indemnité accordée pendant tout le temps que doit durer l'usufruit. Si le propriétaire opte pour ce dernier parti, il devra garantir le paiement de la rente. 520. — L'usufruit ne s'éteint pas par le mauvais usage de la chose qui y est soumise. Toutefois, si l'abus porte un préjudice considérable au propriétaire, il pourra demander la remise de la chose, en s'obligeant à payer annuellement à l'usufruitier le produit net de la chose, déduction faite des frais et des honoraires assignés pour son administration. 521. — L'usufruit, constitué au profit de plusieurs personnes existant au moment de sa constitution, ne s'éteint pas avant le décès du dernier mourant. 522. — L'usufruit terminé, le propriétaire rentrera en possession de la chose soumise à l'usufruit, sauf le droit de rétention appartenant à l'usufruitier ou à ses héritiers, à raison des avances qui doivent leur être remboursées. La prise de possession terminée, on annulera la garantie ou l'hypothèque. CHAPITRE II. — DE L'USAGE ET DE L'HABITATION. 523. — Les prérogatives et les obligations de l'usager et de celui qui a droit d'habitation se règlent par le titre qui a constitué ce droit et, à son défaut, par les dispositions suivantes. 524. — L'usage donne droit de percevoir, sur la chose d'autrui, les fruits qui suffisent aux besoins de l'usager et de la famille, encore qu'elle soit absente. L'habitation donne à celui qui y a droit la faculté d'occuper, dans la maison d'autrui, les pièces nécessaires pour lui et les personnes de sa famille. 525. — Les droits d'usage et d'habitation ne se peuvent affermer, ni transporter à autrui à quelque titre que ce soit. 526. — Celui qui aurait l'usage d'un troupeau ou d'une réunion d'animaux pourra s'approprier le croît, le lait, la laine, dans la mesure utile pour sa consommation et celle de sa famille, ainsi que le fumier nécessaire pour l'engrais des terres qu'il cultive. 527. — Si l'usager consomme tous les fruits de la chose d'autrui, ou si celui qui a le droit d'habitation occupe toute la maison, il sera obligé de faire les frais de culture, les réparations ordinaires, et de payer les impôts comme l'usufruitier. S'il ne perçoit que partie des fruits, ou s’il n’habite qu'une portion de la maison, il ne devra y contribuer en rien pourvu qu'il reste au propriétaire une part de fruits et profits suffisants pour couvrir ces frais et charges. Si cela ne suffit pas, il paiera ce qui manque. 528. — Les règles établies pour l'usufruit sont applicables aux droits d'usage et d'habitation, en tout ce qui n'est pas contraire aux dispositions du présent chapitre. 529. — Les droits d'usage et d'habitation s'éteignent par les mêmes causes que l'usufruit et, en outre, par l'abus grave de la chose et de l'habitation. TITRE VII. — DES SERVITUDES. CHAPITRE PREMIER. — DES SERVITUDES EN GÉNÉRAL. SECTION PREMIÈRE. — Des différentes classes de servitudes qui peuvent s'établir sur les immeubles. 530. — La servitude est une charge imposée sur un immeuble, au profit d'un autre immeuble appartenant à un autre propriétaire. L'immeuble, en faveur duquel est constituée la servitude, se nomme le fonds dominant, et celui qui la souffre, le fonds servant. 531. — On peut aussi établir des servitudes au profit de une ou de plusieurs personnes, ou d'une communauté à qui n'appartient pas le bien grevé. 532. — Les servitudes peuvent être continues ou discontinues, apparentes ou non apparentes. Les servitudes continues sont celles dont l'usage est, ou peut être incessant, sans l'intervention d'un fait de l'homme. Les servitudes discontinues sont celles dont on se sert à des intervalles plus ou moins éloignés, et qui dépendent de l'acte d'un homme. Les servitudes apparentes sont celles qui s'annoncent, et sont constamment dénoncées par des signes antérieurs qui révèlent leur usage, et le profit qu'on en tire. Les servitudes non apparentes sont celles qui ne présentent aucun signe extérieur de leur existence. 533. — Les servitudes sont, en outre, positives ou négatives. On nomme positive, la servitude qui impose au propriétaire du fonds servant l'obligation de faire, ou de laisser faire quelque chose; on nomme négative, celle qui défend au propriétaire du fonds servant de faire quelque chose, qui lui serait permis sans la servitude. 534. — Les servitudes sont inséparables du fonds auquel elles appartiennent activement ou passivement. 535. — Les servitudes sont indivisibles. Si le fonds servant est divisé entre deux ou plusieurs personnes, la servitude n'est pas modifiée et chaque propriétaire doit la supporter sur la partie qui lui appartient. Si c'est le fonds dominant, qui est divisé entre deux ou plusieurs personnes, chacune peut user complètement de la servitude, en ne changeant pas le lieu le son exercice et en ne l'aggravant en aucune manière. 536. — Les servitudes s'établissent par la loi, ou par la volonté-des propriétaires. Les premières sont dites légales, les autres volontaires. SECTION II. — Du mode d'acquisition des servitudes. 537. — Les servitudes continues et apparentes s'acquièrent par titre ou par la prescription de vingt ans. 538. — Pour acquérir par prescription les servitudes mentionnées en l'article précédent, le temps de la prescription se comptera: pour les positives, du jour où le propriétaire du fonds dominant, ou celui qui se sera servi de la servitude, aura commencé à l'exercer sur le fonds servant; et pour les négatives, du jour où le propriétaire du fonds dominant aura défendu, par un acte formel à celui du fonds servant, l'exécution de l'acte qui lui serait permis sans la servitude. 539. — Les servitudes continues non apparentes et les servitudes discontinues, apparentes ou non, ne peuvent s'acquérir que par titre. 540. — Le défaut de titre constitutif des servitudes, qui ne sont point de nature à s'acquérir par prescription, ne peut se remplacer que par un acte de reconnaissance émané du propriétaire du fonds servant, ou par un jugement définitif. 541. — L'existence d'un signe apparent de servitude entre deux fonds, établi par leur propriétaire commun, sera considéré, s'il vient à en aliéner un, comme un titre pour la servitude continue, active ou passive, à moins que, au moment de la séparation des fonds, on n'ait stipulé le contraire dans l'acte d'aliénation, ou qu'on ait fait disparaître le signe avant la passation de l'acte. 542. — En établissant une servitude, on est censé accorder tous les droits nécessaires à son exercice. SECTION III. — Droits et obligations des propriétaires des fonds dominant et servant. 543. — Le propriétaire du fonds dominant pourra faire, à ses frais, sur le fonds servant, les travaux nécessaires pour l'usage et la conservation de la servitude, mais sans la modifier et la rendre plus onéreuse. Il devra choisir pour cela le temps et le mode convenables, pour occasionner le moins de dommage possible au propriétaire du fonds servant. 544. — S'il y a plusieurs fonds dominants, tous les propriétaires seront tenus de contribuer aux frais, dont parle l'article précédent, en proportion du bénéfice que le travail procure à chacun d'eux. Celui, qui ne veut point y contribuer, pourra s'en exempter en renonçant à la servitude au profit des autres. Si le propriétaire du fonds servant utilise, en quelque manière que ce soit, la servitude, il sera obligé de contribuer aux frais dans la proportion indiquée plus haut, sauf convention contraire. 545. — Le propriétaire du fonds servant ne pourra entraver en aucune façon l'usage de la servitude établie. Néanmoins si, à raison de l'assiette qui lui a été assignée précédemment, ou de son mode d'exercice, la servitude devient plus gênante pour le propriétaire du fonds servant, si elle l'empoche d'y faire des travaux ou des améliorations importantes, il pourra la modifier à ses frais, mais en offrant une assiette et un mode d'exercice également commodes, en sorte qu'il n'en résulte aucun préjudice pour le propriétaire du fonds dominant et pour ceux qui ont droit d'user de la servitude. SECTION IV. — Du mode d'extinction des servitudes. 546. — Les servitudes s'éteignent: 1° Par la réunion, en une même main, de la propriété du fonds dominant et du fonds servant; 2° Par le non-usage pendant vingt ans. Ce délai commencera à compter du jour où on aura cessé d'user des servitudes discontinues, et du jour où on aura fait un acte contraire aux servitudes continues; 3° Lorsque les fonds arrivent à un état tel qu'on ne peut user de la servitude; mais elle revivra si, par la suite, l'état des fonds permet d'en user, à moins qu'à ce moment le délai suffisant pour la prescription ne soit acquis conformément aux dispositions du numéro précédent; 4° Par l'échéance du terme, ou l'accomplissement de la condition, si la servitude était à terme ou conditionnelle; 5° Par la renonciation du propriétaire du fonds dominant; 6° Par le rachat convenu entre le propriétaire du fonds dominant et celui du fonds servant. 547. — Le mode d'exercice de la servitude peut se prescrire comme la servitude elle-même, et de la même manière. 548. — Si le fonds dominant appartient indivisément à plusieurs personnes, l'usage de la servitude, fait par l'une d'elles, empêche la prescription à l'égard des autres. CHAPITRE II. — DES SERVITUDES LÉGALES. SECTION PREMIÈRE. — Dispositions générales. 549. — Les servitudes, imposées par la loi, ont pour objet l'utilité publique ou l'intérêt des particuliers. 550. — Tout ce qui concerne les servitudes, établies pour l'utilité publique ou communale, se réglera par les lois et règlements spéciaux à cette matière, et à leur défaut, par les dispositions du présent titre. 551. — Les servitudes que la loi impose dans l'intérêt des particuliers, ou pour cause d'utilité privée, se régleront par les dispositions du présent titre, sans préjudice des prescriptions des lois, règlements et ordonnances générales ou locales sur la police urbaine ou rurale. Ces servitudes pourront être modifiées par l'accord des intéressés, lorsque la loi ne le défend point, et qu'il n'en résulte pas de préjudice pour les tiers. SECTION II — Des servitudes en matière d'eaux. 552. — Les fonds inférieurs sont assujettis à recevoir les eaux qui naturellement, et sans le travail de l'homme, descendent des fonds supérieurs, ainsi que les terres et les pierres qu'elles entraînent dans leurs cours. Le propriétaire du fonds inférieur ne peut faire de travail pour empêcher cette servitude, et le propriétaire du fonds supérieur ne peut rien faire qui l'aggrave. 553. — Les rives des fleuves, même lorsqu'elles sont du domaine privé, sont soumises dans toute la longueur du bord, sur une zone de trois mètres, à la servitude d'usage public dans l'intérêt général de la navigation, du flottage, de la pêche et du sauvetage. Les fonds, contigus aux bords des fleuves navigables et flottables, sont soumis à la servitude de chemin de halage pour le service exclusif de la navigation et du flottage fluvial. S'il est nécessaire pour cela d'occuper des terrains appartenant à des particuliers, on paiera d'abord l'indemnité corrélative. 554. — Lorsque pour la dérivation ou la retenue des eaux d'un ruisseau ou d'un fleuve, ou pour l'utilisation d'autres cours d'eau continus ou discontinus, il est nécessaire d'établir une prise d'eau, et que celui qui doit la faire n'est pas propriétaire des deux rives ou des terrains sur lesquels il faut l'appuyer, on pourra établir l'appui de la prise d'eau moyennant le paiement préalable de l'indemnité correspondante. 555. — Les servitudes forcées de puisage et d'abreuvage ne pourront être imposées que pour utilité publique, moyennant indemnité préalable. 556. — Les servitudes de prise d'eau et d'abreuvoir entraînent avec elle, pour les fonds servants, l'obligation de donner passage aux personnes et aux troupeaux jusqu'à l'endroit où on doit en user: l'indemnité devra être étendue à raison de cette charge. 557. — Celui, qui veut se servir pour son fonds de l'eau dont il peut disposer, a le droit de la faire passer par les fonds intermédiaires, mais il a l'obligation d'indemniser leurs propriétaires, ainsi que ceux des fonds inférieurs sur lesquels les eaux tombent ou s'infiltrent. 558. — Celui qui prétend user du droit concédé par l'article précédent est obligé: 1° De justifier qu'il peut disposer de l'eau et qu'elle est suffisante pour l'usage auquel il la destine; 2° De démontrer que le passage qu'il sollicite est le plus convenable et le moins onéreux pour les tiers; 3° D'indemniser le propriétaire du fonds servant de la manière déterminée par les lois et les règlements. 559. — On ne peut imposer la servitude d'aqueduc dans un intérêt privé sur des constructions, ni sur leurs patios ou leurs dépendances, ni sur des jardins ou vergers déjà existants. 560. — La servitude d'aqueduc n'empêche pas que le propriétaire du fonds servant ne le puisse entourer et enclore, ou bâtir sur l'aqueduc, s'il n'y porte pas de préjudice et ne rend pas impossibles les réparations et curages nécessaires. 561. — Pour ses effets légaux, la servitude d'aqueduc sera considérée comme continue et apparente, encore que le passage de l'eau ne soit pas constant, soit que son usage dépende des besoins du fonds dominant, soit d'un roulement établi par jours et par heures. 562. — Celui qui, voulant irriguer sa propriété ou l'améliorer, est dans la nécessité, pour recevoir l'eau dont il a besoin, de construire une digue ou retenue d'eau dans le lit du cours d'eau, pourra exiger que les propriétaires des rives souffrent sa construction, moyennant qu'on leur tienne compte des dommages et préjudices, compris ceux que la nouvelle prise d'eau cause à ces propriétaires et aux autres fonds arrosés. 563. — L'établissement, l'extension, le mode et les conditions des servitudes d'eaux dont on parle dans cette section seront régis par la loi spéciale à la matière, pour tout ce qui n'a pas été prévu par ce Code. SECTION III. — De la servitude de passage. 564. — Le propriétaire d'un fonds ou héritage, enclavé au milieu d'autres appartenant à autrui, et sans issue sur un chemin public, a le droit d'exiger un passage sur les héritages voisins, moyennant l'indemnité préalable corrélative. Si cette servitude est constituée de manière que son usage puisse être continuel pour tous les besoins du fonds dominant, au moyen d'une voie permanente, l'indemnité sera la valeur du terrain occupé et du préjudice que le passage cause au fonds servant. Lorsque la servitude se borne au passage nécessaire pour la culture du fonds enclavé, et pour l'enlèvement des récoltes à travers le fonds servant, sans chemin permanent, l'indemnité comprendra la réparation du préjudice que cause cette charge. 565. — La servitude de passage doit s'exercer par l'endroit le moins préjudiciable pour le fonds servant, et par où la distance est la moins grande jusqu'à la voie publique, lorsque cette règle est conciliable avec la première. 566. — La largeur de la servitude de passage sera celle qui est nécessaire aux besoins du fonds dominant. 567. — Si un fonds, acquis par vente, échange ou partage, se trouve enclavé entre d'autres fonds de vendeurs, coéchangistes ou copartageants, ils seront obligés à donner un passage sans indemnité, à moins de stipulation contraire. 568. — Si le passage, accordé à un fonds enclave, cesse de lui être nécessaire parce que son propriétaire l'a réuni à un autre joignant une voie publique, le propriétaire du fonds servant pourra demander l'extinction de la servitude, en rendant ce qu'il avait reçu pour indemnité. Il en sera de même dans le cas où on ouvrirait un nouveau chemin donnant accès au fonds enclavé. 569. — S'il est indispensable, pour construire ou pour réparer un édifice, de passer des matériaux par le fonds d'autrui, ou d'y placer des échafaudages, ou d'autres objets pour le travail, le propriétaire de ce fonds sera tenu d'y consentir, en recevant l'indemnité correspondante au préjudice souffert. 570. — Les servitudes existant pour le passage des bestiaux, connues sous le nom de canada, cordel, vereda ou tout autre, et celles d'abreuvoir, de repos ou de bergerie seront réglées par les ordonnances et règlements et, à leur défaut, par l'usage et la coutume du lieu. Sans préjudice des droits légitimement acquis, le passage dit canada ne pourra en aucun cas excéder 75 mètres, le cordel 37 m. 50 et la vereda 20 mètres. S'il est nécessaire d'établir la servitude de passage forcé ou d'abreuvoir pour troupeaux, on observera les dispositions de cette section, et celles des articles 555 et 556. En ce cas, la largeur ne pourra excéder 10 mètres. SECTION IV. — De la servitude de mitoyenneté. 571. — La servitude de mitoyenneté se réglera par les dispositions de ce titre, et par les ordonnances et usages locaux, pour tout ce qui n'y est pas contraire et n'y aurait pas été prévu. 572. — La servitude de mitoyenneté se présume toutes les fois qu'il n'y a pas de titre, de signe extérieur ou de preuves contraires: 1° Dans les murs séparant des édifices contigus, jusqu'au point de leur commune hauteur; 2° Dans les murs séparant des jardins ou des cours, situés dans les villes ou campagnes; 3° Dans les clôtures, levées de terres, haies vives qui séparent les fonds ruraux. 573. — On considère qu'il y a signe extérieur contraire à la servitude de mitoyenneté: 1° Lorsque dans les murs séparant ces édifices il y a des fenêtres ou des ouvertures; 2° Lorsque le mur séparatif présente d'un côté un parement droit et uni, tandis que de l'autre, tout en ayant la partie supérieure semblable, il présente dans la partie inférieure des avances et saillies; 3° Lorsque le mur a été entièrement construit sur le sol d'un des fonds, et non par moitié, sur chacun des deux fonds voisins; 4° Lorsqu'il supporte le poids de poutres, étages ou toitures du côté de l'un des fonds, et non de l'autre; 5° Lorsque le mur séparant des cours, jardins ou héritages est construit de façon que le chaperon penche vers une des propriétés; 6° Lorsque le mur séparatif, construit en pierres brutes, présente, de distance en distance, des pierres dites pasadoras qui saillent hors de la surface du mur du côté d'un fonds et non de l'autre; 7° Lorsque les héritages, protégés par des palissades ou des haies vives, sont contigus à d'autres non enclos. Dans tous ces cas, on décidera que la propriété des murs, palissades, haies vives appartient exclusivement au propriétaire du fonds, qui a en sa faveur la présomption fondée sur l'un des signes précités. 574. — Les fossés et canaux, ouverts entre les héritages, sont également présumés mitoyens, s'il n'y a titre ou signe démontrant le contraire. Il y a signe contraire à la mitoyenneté lorsque la terre et les débris enlevés pour creuser le fossé, ou pour assurer la limpidité de l'eau, se trouvent d'un seul côté. En ce cas, la propriété du fossé appartiendra exclusivement au propriétaire de l'héritage qui a en sa faveur ce signe extérieur. 575. — La réparation et la construction des murs mitoyens, l'entretien des levées de terre, haies vives, fossés et canaux mitoyens sera à la charge de tous les propriétaires des fonds ayant droit à la mitoyenneté, dans la proportion du droit de chacun. Néanmoins tout propriétaire peut se dispenser de contribuer à cette charge en renonçant à la mitoyenneté, sauf dans le cas où le mur soutient un édifice lui appartenant. 576. — Si le propriétaire d'un édifice appuyé sur le mur mitoyen veut le détruire, il pourra également renoncer à la mitoyenneté; toutefois les réparations et les travaux nécessaires pour empêcher que la démolition ne cause des dégâts au mur, seront pour cette fois à sa charge. 577. — Tout propriétaire peut élever le mur mitoyen, en le faisant à ses frais, et en indemnisant du préjudice même temporaire que causent ces travaux. Seront également à sa charge les frais de consolidation du mur, s'il faut faire des fondations plus profondes et plus larges, ainsi que le remboursement des frais plus considérables de conservation du mur mitoyen, par suite de la hauteur et de l'épaisseur qu'il lui a données. Si le mur mitoyen ne peut supporter une surélévation, celui qui désire le surélever aura l'obligation de le reconstruire à ses frais, et s'il faut lui donner une plus grande épaisseur, il devra la fournir en prenant sur son terrain. 578. — Les autres propriétaires qui n'auront pas contribué à donner au mur plus d'élévation, d'épaisseur et de profondeur, pourront néanmoins acquérir sur cette partie le droit de mitoyenneté, en payant leur part proportionnelle du coût du travail, et la moitié de la valeur du terrain sur lequel on a donné l'épaisseur. 579. — Chaque propriétaire d'un mur mitoyen peut en user dans la mesure de son droit à la mitoyenneté, il pourra notamment construire, en appuyant son œuvre sur le mur mitoyen, et introduire des poutres jusqu'à moitié de son épaisseur, sans toutefois empêcher l'usage commun et respectif des autres propriétaires mitoyens. Pour user de ce droit, le propriétaire doit obtenir préalablement le consentement des autres intéressés à la mitoyenneté; et s'il ne l'obtient pas, des experts fixeront les conditions nécessaires pour que le nouvel œuvre ne porte préjudice à leurs droits. SECTION V. — Des servitudes de jour et de vue. 580. — Aucun propriétaire mitoyen ne peut, sans le consentement de l'autre, établir dans le mur mitoyen de fenêtre ni d'ouverture d'aucune sorte. 581. — Le propriétaire d'un mur non mitoyen, contigu au fonds d'autrui, peut y établir des fenêtres et des ouvertures pour recevoir la lumière à la hauteur des poutres et directement sous les toits, mais seulement de la grandeur de 30 centimètres de côté et avec des barreaux de fer et un grillage de métal. Néanmoins le propriétaire du fonds contigu au mur, dans lequel ont été établies les ouvertures, pourra les boucher, s'il en acquiert la mitoyenneté, sauf convention contraire. Il pourra également les boucher en construisant sur son fonds, ou en élevant un mur contigu à celui où existe l'ouverture ou la fenêtre. 582. — On ne peut ouvrir de fenêtres ni de balcons ou autres avances semblables, à vue droite sur le fonds du voisin, sinon à deux mètres de distance, entre le mur où on les contruit et la propriété. De même, on ne peut avoir de vues obliques ou de côté sur la même propriété, sinon à 60 centimètres de distance. 583. — La distance dont parle l'article précédent se compte, pour les vues droites, de la limite extérieure du mur pour les ouvertures qui n'ont pas de saillie; de leur limite extérieure pour celles qui en ont, ainsi que pour les vues obliques, jusqu'à la ligne séparative des deux propriétés. 584. — La disposition de l'article 582 n'est pas applicable aux fonds séparés par une voie publique. 585. — Lorsque, par quelque titre, on aura acquis le droit d'avoir des vues directes, balcons ou belvédères sur la propriété voisine, le propriétaire du fonds servant ne pourra bâtir à moins de trois mètres de distance, les mesures prises ainsi qu'il est dit en l'article 583. SECTION VI. — Du desséchement des édifices. 586. — Le propriétaire d'un édifice sera obligé de construire le toit et la couverture de façon que les eaux pluviales tombent sur son sol, ou sur les rues ou places publiques, et non sur le sol du voisin. Alors même qu'elles tombent sur son sol, le propriétaire sera obligé de recueillir les eaux, de façon à ce qu'elles ne causent point préjudice au fonds contigu. 587. — Le propriétaire du fonds, qui souffre la servitude d'égout des toits, pourra établir un récipient sur son propre toit, ou leur donner une autre issue conforme aux ordonnances et coutumes locales, de façon à ce qu'il n'en résulte aucune charge ni préjudice pour le fonds dominant. 588. — Lorsque la cour ou le patio d'une maison se trouve enclavé au milieu d'autres, et qu'il n'est pas possible de donner issue par la dite maison aux eaux pluviales qui s'y réunissent, on pourra exiger l'établissement de la servitude de desséchement en donnant passage aux eaux sur les fonds voisins, là où l'écoulement est le plus facile, et en établissant le conduit de desséchement de manière à ce qu'il occasionne le moins de préjudice au fonds servant, et moyennant l'indemnité préalable correspondante. SECTION VII. — Des distances et travaux devant séparer certaines constructions et plantations. 589. — On ne pourra bâtir, ni faire des plantations autour des places fortes ou forteresses, sans se soumettre aux conditions exigées par les lois, ordonnances et règlements particuliers de la matière. 590. — Nul ne pourra établir auprès d'un mur mitoyen, ou appartenant à autrui de puits, citernes, aqueducs, fours, forges, cheminées, étables, dépôts de matières corrosives machines à vapeur, fabriques qui, par elles-mêmes ou par leurs produits, sont dangereuses ou insalubres, sans observer les distances prescrites par les règlements et les usages locaux, sans exécuter les travaux de protection nécessaires, et sans se soumettre, pour leur exécution, aux conditions prescrites par ces mêmes règlements. A défaut de règlements on prendra les précautions jugées nécessaires, d'après l'avis des experts, afin d'éviter tout préjudice aux héritages et constructions voisines. 591. — On ne pourra planter d'arbres auprès de la propriété d'autrui, sinon à la distance autorisée par les ordonnances et coutumes locales, et, à leur défaut, à 2 mètres de la ligne séparant les héritages, si la plantation se fait en arbres de haut jet, et à 50 centimètres, si la plantation se fait en arbustes ou arbres de basse tige. Tout propriétaire a droit de demander l'enlèvement des arbres qui seraient plantés à moindre distance. 592. — Si les branches de certains arbres s'étendent sur les héritages, jardins ou cours voisins, le propriétaire aura le droit de demander l'élagage de tout ce qui empiète sur sa propriété, et si ce sont les racines qui s'étendent sur le fonds d'autrui, il aura le droit de les couper lui-même dans l'étendue de son héritage. 593. — Les arbres, qui se trouvent dans une haie vive mitoyenne, sont présumés également mitoyens. Chacun des copropriétaires a droit d'exiger leur abat age. Sont exceptés les arbres qui servent de bornes. On ne peut les arracher sans le commun consentement des deux voisins. CHAPITRE III. — DES SERVITUDES VOLONTAIRES. 594. — Tout propriétaire peut établir sur son fonds les servitudes qu'il juge convenables, et régler leur forme et mode d'exercice, pourvu qu'il ne contrevienne ni aux lois, ni à l'ordre public. 595. — Celui qui a la propriété d'un fonds, soumis à l'usufruit d'un tiers, pourra grever ce fonds, sans le consentement de l'usufruitier, des servitudes qui ne préjudicieront point à l'usufruit. 596. — Si une personne a sur un fonds le domaine direct, et une autre le domaine utile, on ne pourra y établir de servitude sans le consentement des deux propriétaires. 597. — Pour grever de servitude un fonds indivis, le consentement de tous les propriétaires est nécessaire. La concession, faite seulement par quelques-uns, restera en suspens jusqu'à ce qu'elle ait été ratifiée par le dernier des ayants droit ou des communistes. Toutefois, la concession accordée, même à titre particulier, par un des copropriétaires séparément, l'oblige lui et ses successeurs, à ne rien faire qui empêche l'exercice du droit accordé. 598. — Le titre et, s'il y a lieu, la possession de la servitude acquise par prescription, déterminent les droits du fonds dominant et les obligations du fonds servant. A leur défaut, on réglera la servitude d'après les dispositions du présent titre qui lui sont applicables. 599. — Si le propriétaire du fonds servant a été chargé, lors de la constitution de la servitude, de faire à ses frais les travaux nécessaires pour l'usage et la conservation de la servitude, il pourra s'exonérer de cette charge en abandonnant son fonds au propriétaire dû fonds dominant. 600. — La vaine pâture ne pourra s'établir à l'avenir que par une concession expresse des propriétaires, résultant d'un contrat ou d'un acte de dernière volonté, elle ne pourra être accordée en faveur d'une universalité d'individus sur une universalité de biens, mais seulement en faveur d'individus déterminés, et sur des biens également certains et déterminés. La servitude, établie conformément à cet article, sera régie par le titre de son institution. 601. — La vaine pâture sur des terrains publics, appartenant soit aux communes, soit à l'État, sera régie par les lois administratives. 602. — Si la vaine pâture existe entre les voisins d'une ou de plusieurs communes, le propriétaire, qui clora son fonds avec un mur ou une haie, le rendra libre de la servitude. Néanmoins subsisteront toutes les autres servitudes établies sur ce fonds. Le propriétaire, qui enclora son fonds, conservera son droit de vaine pâture sur les fonds non clos. 603. — Le propriétaire de terrains, grevés de la servitude de vaine pâture, pourra les racheter de cette charge en en payant la valeur aux ayants droit. A défaut d'accord, on fixera le prix du rachat d'après la valeur annuelle du pâturage, fixée par une expertise, comme représentant quatre pour cent du capital. 604. — La disposition de l'article précédent est applicable aux servitudes, établies pour profiter des bois de chauffage et des autres produits des montagnes, appartenant à des particuliers. TITRE VIII. DU REGISTRE DE LA PROPRIÉTÉ. CHAPITRE UNIQUE. 605. — Le registre de la propriété a pour objet la mention et l'inscription des actes et contrats relatifs à la propriété et aux autres droits réels sur les immeubles. 606. — Les titres de propriété, ou d'autres droits réels sur les immeubles, qui ne sont pas dûment mentionnés et transcrits sur le registre de la propriété, ne portent point préjudice aux tiers. 607. — Le registre de la propriété sera public pour ceux qui ont un intérêt reconnu à vérifier l'état des biens immeubles ou des droits réels mentionnés ou transcrits. 608. — Pour déterminer les titres soumis à la mention ou à l'inscription, leur forme, leurs effets et la cessation de ces effets, la manière de tenir le registre, et la valeur de ses mentions, on se reportera aux dispositions de la loi hypothécaire. LIVRE TROISIÈME — DES DIFFÉRENTES MANIÈRES D'ACQUÉRIR LA PROPRIÉTÉ. DISPOSITION PRÉLIMINAIRE. 609. — La propriété s'acquiert par l'occupation. La propriété et les autres droits sur les biens s'acquièrent et se transmettent par la loi, par donation, par succession testamentaire ou ab intestat et par l'effet de certains contrats, moyennant tradition. On peut aussi l'acquérir par le moyen de la prescription. TITRE PREMIER. — DE L'OCCUPATION. 610. — On acquiert par occupation les biens naturellement susceptibles d'appropriation et qui manquent de maitre, tels sont les animaux que l'on chasse ou que l'on pêche, le trésor caché, et les meubles abandonnés. 611. — Le droit de chasse et de pêche est réglé par les lois spéciales. 612. — Le propriétaire d'un essaim d'abeilles a droit de le poursuivre sur le fonds d'autrui, en indemnisant le propriétaire du préjudice causé. Si le fonds est enclos, il faudra pour y pénétrer le consentement du propriétaire. Si le propriétaire n'a pas poursuivi son essaim, ou s'il cesse de le poursuivre pendant deux jours consécutifs, le possesseur du fonds pourra s'en emparer par occupation et le conserver. Le propriétaire d'animaux apprivoisés pourra aussi les réclamer, pendant le délai de vingt jours, à partir du moment où un autre a exercé sur eux le droit d'occupation. Passé ce délai, ils appartiendront à celui qui les a rencontrés et conservés. 613. — Les pigeons, lapins de garennes et poissons, qui quittent le lieu où ils sont nés pour aller sur le fonds d'un tiers, appartiendront à ce dernier s'ils n'ont pas été attirés par quelque artifice ou quelque fraude. 614. — Celui, qui par hasard découvre un trésor caché dans la propriété d'autrui, aura le droit que lui accorde l'article 351 de ce Code. 615. — Celui qui trouve un meuble, qui n'est pas un trésor, doit le rendre à son ancien possesseur. S'il n'est pas connu, il devra le mettre à la disposition de l'alcade de la commune où la trouvaille a eu lieu. L'alcade la fera publier deux dimanches consécutifs en la forme ordinaire. Si le meuble ne peut se conserver sans détérioration, ou sans exiger des dépenses qui en diminuent notablement la valeur, on le vendra aux enchères publiques aussitôt que huit jours se seront écoulés après la seconde publication, sans que le propriétaire se soit présenté, et le prix sera déposé. Deux ans passés, depuis le jour de la seconde publication, sans que le propriétaire se soit présenté, on attribuera la chose trouvée, ou son prix, à celui qui l'avait trouvée. Ce dernier, de même que le propriétaire, sera tenu, chacun dans son cas, de payer les frais. 616. — Si le propriétaire se présente à temps, il sera tenu de donner à titre de récompense, à celui qui a fait la découverte, la dixième partie de la valeur ou du prix de la chose trouvée. Si la valeur de la trouvaille excède 2000 pesetas, la récompense se réduira au vingtième pour le surplus. 617. — Les droits sur les objets jetés à la mer, ou sur ceux que les flots rejettent sur le rivage, quelle que soit leur nature, et les droits sur les plantes et herbes qui croissent dans les rivières, sont fixés par les lois spéciales. TITRE II. — DE LA DONATION. CHAPITRE PREMIER. — DE LA NATURE DES DONATIONS. 618. — La donation est un acte de libéralité, par lequel une personne dispose gratuitement d'une chose, en faveur d'une autre qui accepte. 619. — Est encore une donation celle qui est faite à une personne en considération de ses mérites et des services qu'elle a rendus au donateur, lorsqu'ils ne constituent pas une dette exigible, et que la charge imposée au donataire n'est pas inférieure à la valeur de la chose donnée. 620. — Les donations, qui doivent produire leurs effets par la mort du donateur, sont de la nature des actes de dernière volonté et se régissent par les règles établies au chapitre de la succession testamentaire. 621. — Les donations, qui doivent produire leurs effets entre vifs, seront régies par les règles générales des contrats et obligations, pour tout ce qui n'est pas précisé dans ce titre. 622. — Les donations avec charge seront régies par les règles des contrats, et les donations rémunératoires par les dispositions du présent titre, pour ce qui concerne la portion excédant la valeur de la charge imposée. 623. — La donation est parfaite du moment où le donateur connaît l'acceptation du donataire. CHAPITRE II. — DES PERSONNES QUI PEUVENT FAIRE OU RECEVOIR DES DONATIONS. 624. — Pourront faire une donation tous ceux qui peuvent contracter et disposer de leurs biens. 625. — Pourront accepter des donations tous ceux que la loi n'a pas spécialement déclarés incapables de cet acte. 626. — Les personnes, qui ne peuvent contracter, ne pourront accepter de donation sous conditions ou avec charges, sans l'intervention de leurs représentants légitimes. 627. — Les donations, faites aux enfants conçus mais non encore nés, pourront être acceptées par les personnes qui les représenteront, si plus tard ils naissent viables. 628. — Les donations, faites aux personnes incapables, sont nulles, alors même qu'elles auraient été dissimulées sous l'apparence d'un autre contrat, ou par personne interposée. 629. — La donation n'oblige le donateur et ne produit d'effet que du moment de l'acceptation. 630. — Le donataire doit, sous peine de nullité, accepter la donation par lui-même ou par l'intermédiaire d'une personne fondée d'un pouvoir spécial, ou d'un pouvoir général suffisant. 631. — Les personnes, qui acceptent une donation en en représentant une autre qui ne peut le faire, seront tenues de faire faire la notification et la mention dont parle l'article 633. 632. — La donation d'un meuble peut se faire verbalement ou par écrit. Si elle est verbale, elle doit être accompagnée de la remise immédiate de la chose donnée. A défaut de cette condition, elle ne produira d'effet que si on la fait par écrit, et si l'acceptation est constatée de la même façon. 633. — Pour être valable, une donation d'un immeuble doit être faite par un acte public, où on désigne individuellement les biens donnés et l'importance des charges imposées au donataire. L'acceptation pourra se faire par l'acte même de donation, ou par un autre acte séparé, mais elle n'aura d'effet que si elle intervient du vivant du donateur. Faite par acte séparé, l'acceptation devra être notifiée en la forme authentique au donateur, et l'accomplissement de cette formalité sera mentionné sur les deux actes. CHAPITRE III. — DES EFFETS ET DES LIMITES DES DONATIONS. 634. — La donation pourra comprendre tout ou partie des biens présents du donateur, pourvu qu'il se réserve, en pleine propriété ou en usufruit, ce qui lui est nécessaire pour vivre dans une situation conforme à sa fortune. 635. — La donation ne pourra comprendre les biens futurs. Par biens futurs, on entend ceux dont le donataire ne peut disposer au moment de la donation. 636. — Malgré la disposition de l'article 634, nul ne pourra donner ni recevoir par donation, plus qu'il ne peut donner ou recevoir par testament. La donation sera inefficace pour tout ce qui excède cette quantité. 637. — La donation, faite à plusieurs personnes conjointement, sera censée faite par portions égales, et elle ne donnera pas naissance au droit d'accroissement, à moins que le donateur n'en ait disposé autrement. Sont exceptées de cette disposition les donations faites conjointement à un mari et à sa femme; ce droit existera entre eux à moins que le donateur n'ait prescrit le contraire. 638. — Le donataire est subrogé dans tous les droits et actions appartenant, en cas d'éviction, au donateur. Par contre, ce dernier n'est pas tenu à la garantie des biens donnés, à moins que la donation ne soit faite avec charges, dans ce cas le donateur répondra de l'éviction dans la mesure des charges. 639. — Le donateur pourra, à titre de charge, se réserver la faculté de disposer de quelques-uns des biens donnés, ou d'une certaine partie de ces biens; mais, s'il meurt sans avoir fait usage de ce droit, les biens ou la partie réservée appartiendront au donateur. 640. — On pourra encore donner la nue-propriété à une personne, et l'usufruit à une ou plusieurs autres, dans la mesure établie par l'article 781 de ce Code. 641. — On pourra stipuler valablement, dans certains cas et circonstances, la restitution des biens donnés, mais en faveur du seul donateur, et non en faveur d'autres personnes, sinon dans les cas et avec les restrictions que fixe ce Gode pour les substitutions testamentaires. La restitution stipulée par le donateur en faveur d'un tiers, contrairement aux dispositions du paragraphe précédent, est nulle; mais elle n'entraînera pas la nullité de la donation. 642. — Si la donation a été faite avec la charge de payer les dettes du donateur, on considérera qu'elle ne s'applique qu'aux dettes contractées auparavant, lorsque la clause ne contiendra pas d'autre mention. 643. — En l'absence d'une stipulation relative au paiement des dettes, le donataire n'en répondra que si la donation est faite en fraude des droits de créanciers. On présumera toujours la donation faite en fraude des créanciers, lorsqu'au moment de la faire, le donateur ne s'est pas réservé des biens suffisants pour payer ses dettes antérieures. CHAPITRE IV. — DE LA RÉVOCATION ET DE LA RÉDUCTION DES DONATIONS. 644. — Toute donation entre vifs, faite par une personne qui n'a ni enfants, ni descendants légitimes ou légitimés par mariage subséquent, sera révoquée par l'arrivée d'un des événements suivants: 1° Si le donateur a, depuis la donation, des enfants légitimes ou légitimés, ou naturels reconnus, fussent-ils posthumes; 2° Si l'enfant du donateur, qu'on croyait mort au moment de la donation, revient vivant. 645. — Après la résolution de la donation par la survenance d'enfants, on restituera au donateur les biens donnés ou leur valeur s'ils ont été aliénés. S'ils ont été hypothéqués, le donateur pourra les libérer de l'hypothèque, en payant la somme qu'ils garantissent et sauf son droit de la réclamer du donataire 1. Lorsque les biens ne peuvent être restitués, on appréciera leur valeur au moment de la donation. 646. — L'action en révocation pour survenance d'enfants se prescrit par cinq ans à dater de la naissance du dernier enfant, ou de sa légitimation ou reconnaissance, ou du moment où on a eu connaissance de l'existence de celui qu'on croyait mort. On ne peut renoncer à cette action qui se transmet par le décès du donateur à ses enfants et descendants légitimes. 647. — La donation sera révoquée à la demande du donateur, lorsque le donataire aura cessé de remplir quelqu'une des conditions qui lui étaient imposées. En ce cas, les biens donnés retourneront au donateur, on considérera comme nulles les aliénations faites par ce donataire ou les hypothèques qu'il aurait établies, sauf les restrictions établies, au profit des tiers, par la loi hypothécaire. 648. — La donation pourra encore être révoquée, sur la demande du donateur, pour cause d'ingratitude, dans les cas suivants: 1° Si le donataire commet un délit contre la personne, l'honneur ou les biens du donateur; 2° Si le donataire impute au donateur un de ces délits, qui donnent lieu à une poursuite d'office ou à une accusation publique, même s'il fait sa preuve; à moins que le délit n'ait été commis contre le donataire lui-même, sa femme ou les enfants soumis à son autorité; 3° S'il est certain qu'il lui ait refusé des aliments. 649. — La révocation de la donation pour ingratitude laissera subsister les aliénations et les hypothèques, antérieures à la mention de l'action en révocation sur le registre civil. Ces actes sont nuls s'ils sont postérieurs. 650. — Dans le cas prévu par le premier paragraphe de l'article précédent, le donateur aura droit d'exiger du donataire la valeur des biens aliénés qu'il ne peut exiger des tiers, ainsi que le montant des hypothèques dont il les a grevés. On se reportera au temps de la donation pour fixer la valeur des biens. 651. — Lorsque la donation est révoquée pour une des causes indiquées dans l'article 044, ou pour ingratitude, ou lorsqu'elle est réduite comme excessive, le donataire ne rendra les fruits que depuis l'introduction de la demande. Si la révocation est basée sur le non accomplissement de quelqu'une des conditions imposées dans la donation, le donataire rendra, outre les biens, les fruits perçus depuis qu'il a cessé d'accomplir la condition. 652. — On ne peut renoncer d'avance à l'action accordée au donateur pour ingratitude. Cette action se prescrit par le délai d'un an, à dater du jour où le donateur a eu connaissance du fait et de la possibilité d'intenter son action. 653. — Cette action ne passera pas aux héritiers du donateur qui, le pouvant, ne l'a point exercée. Elle ne pourra non plus être exercée contre l'héritier du donataire, à moins qu'à son décès la demande ne fut intentée. 654. — Les donations qui, conformément aux dispositions de l'article 636, sont exagérées d'après la valeur des biens laissés à sa mort par le donateur, devront être réduites de tout en ce qui est excessif; mais cette réduction n'empêchera pas qu'elles n'aient effet pendant la vie du donateur et que le donateur n'ait fait les fruits siens. Pour la réduction des donations, on se conformera aux dispositions de ce chapitre et des articles 820 et 821 du présent Code. 655. — Pourront seuls demander la réduction des donations ceux qui ont droit à la réserve, ou à une quote part de l'hérédité, ainsi que leurs héritiers ou ayants cause. Les personnes, comprises dans le paragraphe précédent, ne pourront renoncer à leur droit, pendant la vie du donateur, ni par une déclaration expresse, ni par leur consentement à la donation. Ni les donataires, ni les légataires qui n'ont pas une quote-part de la succession, ni les créanciers du défunt ne pourront demander la réduction, ni en profiter. 656. — S'il existe deux ou plusieurs donations qu'on ne peut remplir complètement avec la quotité disponible, on annulera ou on réduira les plus récentes, en tant qu'elles excèdent cette quotité. TITRE III. — DES SUCCESSIONS. DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 657. — Les droits à la succession d'une personne morte se transmettent au moment de sa mort. 658. — La succession est déférée par la volonté de l'homme, manifestée dans un testament, et à son défaut, par la disposition de la loi. La première se nomme testamentaire, la seconde légitime. La succession peut encore être déférée en partie par la volonté de l'homme, en partie par la disposition de la loi. 659. — La succession comprend tous les biens, droits et obligations d'une personne, qui ne se sont pas éteints par sa mort. 660. — On appelle héritier celui qui succède à titre universel, et légataire celui qui succède à titre particulier. 661. — Par le seul fait du décès, les héritiers succèdent aux droits et obligations du défunt. CHAPITRE PREMIER. — DES TESTAMENTS. SECTION PREMIÈRE. — De la capacité pour disposer par testament. 662. — Peut tester toute personne à qui la loi ne l'a pas défendu expressément. 663. — Sont incapables de tester: 1° Les mineurs de quatorze ans de l'un et de l'autre sexe; 2° Celui qui habituellement, ou accidentellement, n'est pas sain d'esprit. 664. — Le testament fait avant l'aliénation mentale est valable. 665. — Toutes les fois qu'un fou voudra faire un testament dans un intervalle lucide, le notaire désignera préalablement deux experts pour le constater, et il ne recevra l'acte que s'ils répondent de sa capacité. On attestera l'avis dans le testament que signeront les experts, ainsi que les témoins. 666. — Pour apprécier la capacité du testateur, on considérera uniquement l'état où il se trouve au moment de rédiger le testament. SECTION II — Des testaments en général. 667. — L'acte par lequel une personne dispose, pour après sa mort, det out ou partie de ses biens, se nomme testament. 668. — Le testateur peut disposer de ses biens à titre d'hérédité ou de legs. Dans le doute, alors même que le testateur n'a pas employé le mot héritier, s'il est clair et certain que telle était sa volonté, sa disposition vaudra comme si elle était faite à titre universel ou d'héritier. 669. — Deux ou plusieurs personnes ne peuvent tester de concert, ou par un même acte, soit qu'elles testent en faveur les unes des autres, soit au bénéfice d'un tiers. 670. — Le testament est un acte personnel: on ne pourra abandonner sa rédaction, en tout ou en partie, à l'arbitrage d'un tiers, ni le faire par le moyen d'un intermédiaire ou d'un mandataire. On ne pourra non plus abandonner à l'arbitrage d'un tiers la nomination des héritiers ou légataires, et la désignation des parts dont ils devront hériter, quand ils seront institués nominativement. 671. — Le testateur pourra charger un tiers de distribuer les valeurs qu'il laisse d'une manière générale à des catégories déterminées, par exemple aux femmes en couches, aux pauvres, aux établissements de bienfaisance; il pourra également lui laisser le choix des personnes ou des établissements qui doivent en profiter. 672. — Toute disposition du testateur qui, pour instituer un héritier ou un légataire, se réfère à des titres, ou papiers privés qui, après sa mort, se trouveront dans son domicile ou ailleurs, sera nulle si les conditions requises pour le testament olographe ne se rencontrent pas dans les dits papiers et cédules. 673. — Sera nul le testament olographe dressé par dol, violence ou fraude. 674. — Celui qui par dol, fraude ou violence empêche une personne, dont il est l'héritier ab intestat d'exprimer librement sa dernière volonté, sera privé de son droit à sa succession, sans préjudice de la responsabilité criminelle qu'il a encourue. 675. — Toute disposition testamentaire devra s'entendre d'après le sens littéral de ses termes, à moins qu'il n'apparaisse clairement que la volonté du testateur était autre. En cas de doute, on exécutera ce qui semble le plus conforme à l'intention du testateur d'après la teneur même du testament. Le testateur ne peut défendre d'attaquer son testament dans le cas où il a une nullité prononcée par la loi. SECTION III. — De la forme des testaments. 676. — Le testament peut être ordinaire ou spécial. L'ordinaire peut être olographe, public ou mystique. 677. — On considère comme testaments spéciaux, ceux des militaires et ceux faits sur mer ou en pays étranger. 678. — On appelle testament olographe celui que le testateur écrit lui-même en observant la forme et les prescriptions imposées par l'article 688. 679. — Le testament est public lorsque le testateur manifeste sa dernière volonté en présence des personnes qui doivent régulariser l'acte et être instruites de ses dispositions. 680. — Le testament est mystique lorsque le testateur, sans révéler sa volonté dernière, déclare qu'elle est contenue dans le pli qu'il présente aux personnes qui doivent régulariser l'acte. 681. — Ne peuvent être témoins des testaments: 1° Les femmes, sauf la disposition de l'article 701; 2° Les mineurs, sauf la même exception; 3° Ceux qui ne sont ni voisins, ni domiciliés dans le lieu où se fait l'acte, sauf les cas exceptés par la loi; 4° Les aveugles et ceux qui sont complètement sourds ou muets; 5° Ceux qui ne comprennent pas la langue du testateur. 6° Ceux qui ne sont pas sains d'esprit; 7° Ceux qui ont été condamnés pour faux en écriture publique ou privée, ou pour faux témoignage, ou ceux qui subissent la peine de l'interdiction civile; 8° Les commis, les clercs, les domestiques et les parents du notaire instrumentant jusqu'au quatrième degré, et ses alliés jusqu'au second. 682. — Dans le testament public, ne peuvent être témoins les héritiers et les légataires qu'il institue, ni leurs parents jusqu'au quatrième degré, ni leurs alliés jusqu'au second. Ne sont pas compris dans cette prohibition les légataires et leurs parents, lorsque le legs a pour objet un meuble ou une valeur peu importante relativement aux forces de la succession. 683. — Pour qu'un témoin soit déclaré incapable, il est nécessaire que la cause de son incapacité existe au moment de la confection du testament. 684. — Pour tester en langue étrangère, il faut la présence de deux interprètes, choisis par le testateur, qui traduisent ses dispositions en langue espagnole. Le testament devra être écrit dans les deux langues. 685. — Le notaire et deux des témoins instrumentaires devront connaître le testateur, et s'ils ne le connaissent point, on établira son identité par deux témoins qui le connaissent et sont connus du même notaire et des témoins instrumentaires. Le notaire et les témoins devront en outre s'assurer qu'à leur avis, le testateur a la capacité légale pour tester. Les témoins, qui reçoivent un testament sans assistance de notaire, dans le cas des articles 700 et 701, ont la même obligation de connaître le testateur. 686. — Si on ne peut établir l'identité du testateur, en la forme indiquée en l'article précédent, cette circonstance sera déclarée par le notaire ou par les témoins, quand c'est à eux, en indiquant les documents présentés dans ce but par le testateur et le signalement de ce dernier. Si le testament est attaqué pour ce motif, il appartiendra à ceux, qui le prétendent valable, de prouver l'identité du testateur. 687. — Le testament sera nul si, pour sa rédaction on n'a pas observé les formalités établies en ce chapitre. SECTION IV. — Du testament olographe. 688. — Le testament olographe ne pourra être fait que par des personnes majeures 1. Pour que ce testament soit valable, il devra être écrit sur du papier portant le timbre correspondant à l'année de sa confection, et être, en entier, écrit et signé par le testateur avec l'indication de l'année, du mois et du jour où il est fait. S'il contient des mots rayés, surchargés ou en interligne, le testateur les approuvera sous sa signature. Les étrangers pourront faire un testament olographe en leur langue propre. 689. — Le testament olographe devra être revêtu de la formule exécutoire. Pour cela, on le présentera au juge de première instance du dernier domicile du testateur, ou du lieu de son décès, dans les cinq ans à dater de ce jour. Sans cette formalité, il ne sera point valable. 690. — La personne, qui a en sa possession un testament déposé, doit le présenter au tribunal du lieu où elle a connaissance de la mort du testateur, et si elle ne le fait dans les dix jours suivants, elle sera responsable des dommages et préjudices causés par son retard. Il pourra également être présenté par tout individu qui est intéressé au testament comme héritier, légataire, exécuteur testamentaire ou à tout autre titre. 691. — Après avoir reçu le testament olographe qui lui était présenté, et s'être assuré du décès du testateur, le juge l'ouvrira s'il est en un pli fermé, paraphera toutes les feuilles avec le notaire et établira son identité, au moyen de trois témoins connaissant l'écriture et la signature du testateur, qui déclareront que, sans aucun doute sérieux, le testament a été écrit et signé de sa main. A défaut de témoins convenables, ou s'ils doutent après avoir examiné, et toutes les fois que le juge l'estime convenable, il pourra recourir dans le même but à une comparaison faite par des experts en écriture. 692. — Pour l'accomplissement des formalités prescrites pas l'article précédent, on appellera aussi promptement que possible le conjoint survivant, s'il y en a, les descendants et les ascendants légitimes du testateur, et à leur défaut ses frères. Si ces personnes ne résident pas dans le district, ou si on ignore leur existence, ou si mineures ou incapables elles n'ont pas de représentant légal, on donnera citation au ministère fiscal. Les personnes appelées pourront assister à l'accomplissement de ces formalités, et faire sur le champ, de vive voix, leurs observations relatives à l'authenticité du testament. 693. — Si le juge estime que l'identité du testament est prouvée, il décidera d'en dresser acte, ainsi que des diligences faites, sur les registres du notaire compétent, par lequel deux copies ou attestations des formalités qui précèdent seront données aux intéressés. Dans tout autre cas, on refusera d'en dresser acte. Quelle que soit la décision du juge, elle aura son effet, nonobstant opposition, tout en laissant intact le droit des intéressés de l'exercer devant le juge compétent. SECTION V. — Du testament public. 694. — Le testament public devra être reçu par un notaire, autorisé à instrumenter dans le lieu de sa rédaction, en présence de trois témoins capables, voyant et entendant le testateur, et dont un au moins sache et puisse écrire. Ne sont exceptés de cette règle que les cas expressément déterminés en cette section. 695. — Le testateur déclarera sa dernière volonté au notaire et aux témoins. Le testament, rédigé conformément et avec mention du lieu, de l'année, du mois, du jour et de l'heure de sa réception, sera lu à haute voix pour que le testateur déclare s'il est conforme à sa volonté. S'il l'est, l'acte sera signé par le testateur et les témoins qui peuvent le faire. Si le testateur déclare qu'il ne sait ou ne peut signer, il sera signé à sa place, et sur sa demande, par un des témoins instrumentaires ou par une autre personne, le notaire attestera le fait. On fera la même chose, si un des témoins ne peut signer. Le notaire devra toujours constater qu'à son avis, le testateur jouit de la capacité légale nécessaire pour faire un testament. 696. — Lorsque le testateur, qui se propose de faire un testament public, présente par écrit ses dispositions testamentaires, le notaire rédigera le testament conforme et le lira à haute voix, en présence des témoins, pour que le testateur déclare si son contenu est l'expression de sa dernière volonté. 697. — Si le testateur est complètement sourd, il devra lire lui-même le testament, et s'il ne sait ou ne peut le faire, il désignera deux personnes qui le liront en son nom, toujours en présence des témoins et du notaire. 698. — Si le testateur est aveugle, on donnera deux fois lecture du testament, une lecture sera faite par le notaire conformément à l'article 695 et l'autre sera faite de la même manière par un des témoins, ou une autre personne désignée par le testateur. 699. — Toutes les formalités prescrites dans cette section seront accomplies dans un seul acte, sans qu'aucune interruption soit permise, sauf celle que peut motiver un accident passager. Le notaire attestera, à la fin du testament, qu'il a accompli toutes les formalités, et qu'il connaît le testateur et les témoins attestant l'idendité, s'il y a lieu. 700. — Si le testateur est en danger de mort imminent, le testament peut être fait en présence de cinq témoins capables, sans qu'un notaire soit nécessaire. 701. — En cas d'épidémie, on peut également faire un testament sans l'intervention d'un notaire devant trois témoins majeurs de seize ans, hommes ou femmes. 702. — Dans les cas des deux articles précédents, on écrira le testament si c'est possible; sinon le testament sera valable, alors même que les témoins ne sauraient pas écrire. 703. — Le testament, fait conformément aux trois articles précédents, sera sans effet s'il s'écoule deux mois après le moment où le testateur sera hors de danger de mort ou celui où cessera l'épidémie. Lorsque le testateur décédera dans ce délai, le testament restera encore sans effet, si dans les trois mois suivants le décès, on ne vient pas au tribunal en dresser acte public, qu'il ait été fait par écrit ou verbalement. 704. — Les testaments, dressés sans le concours d'un notaire, seront sans effet si on ne les transforme pas en actes publics, et si on ne les revêt pas de la formule exécutoire en la forme prévue par la loi de procédure civile. 705. — Si un testament public est déclaré nul à raison de l'inobservation des solennités prescrites dans ce cas, le notaire qui l'a reçu sera responsable des dommages et préjudices qui en résultent, si la faute vient de son dol, de sa négligence ou d'une ignorance inexcusable. SECTION VI. — Du testament mystique. 706. — Le testament mystique pourra être écrit sur papier ordinaire par le testateur, ou par une autre personne sur sa demande, avec mention des lieu, jour, mois et année de sa confection. Si le testateur l'écrit de sa main, il paraphera toutes les feuilles, et apposera à la fin sa signature, après avoir approuvé les surcharges, ratures et interlignes. Si une autre personne l'écrit sur sa demande, le testateur apposera sa signature sur chaque feuille et à la fin du testament. Lorsque le testateur ne sait ou ne peut signer, une autre personne de son choix le fera, et paraphera les feuilles en mentionnant la cause d'empêchement. 707. — Pour la réception du testament mystique, le notaire observera les formalités suivantes: 1° Le papier contenant le testament sera placé dans une enveloppe fermée et scellée, de manière qu'on ne puisse l'enlever sans la déchirer; 2° Le testateur comparaîtra avec son testament fermé et scellé, ou bien il le fermera immédiatement devant le notaire qui doit le recevoir et les cinq témoins capables, dont trois au moins puissent signer; 3° En présence du notaire et des témoins, le testateur déclarera que le pli qu'il présente contient son testament et il indiquera s'il l'a écrit, signé ou paraphé lui-même; ou bien si, après l'avoir fait écrire par une main étrangère, il l'a signé à la fin et sur toutes les pages; ou bien si faute de savoir ou de ne pouvoir signer, une autre personne l'a fait à sa demande; 4° Sur la couverture du testament, le notaire dressera l'acte de réception, en indiquant le nombre et la marque des scellés qui le ferment, en attestant qu'il a accompli les solennités prescrites, qu'il connaît le testateur, ou qu'il s'est assuré de son identité en la forme prévue par les articles 685 et 686, et que le testateur a, à son avis, la capacité légale nécessaire pour faire un testament. 5° Cet acte une fois dressé et lu, le testateur le signera avec les témoins qui savent le faire, et le notaire y apposera son cachet et sa signature. Si le testateur ne sait ou ne peut signer, un des témoins instrumentales, ou une autre personne qu'il désignera, le fera en son nom. 6° On indiquera encore dans l'acte cette circonstance, et en outre le lieu, le jour, le mois et l'année de sa confection. 708. — Les aveugles et ceux, qui ne savent ou ne peuvent lire, ne peuvent faire un testament mystique. 709. — Les sourds-muets, et ceux qui ne peuvent parler, mais qui peuvent écrire, pourront tester en la forme mystique en observant les dispositions suivantes: 1° Le testament devra être écrit en entier et signé par le testateur, avec mention des lieu, jour, mois et année; 2° Lors de la présentation, le testateur écrira, dans le haut de l'enveloppe, en présence du notaire et des cinq témoins, que ce pli contient son testament écrit et signé par lui-même; 3° A la suite de cette mention faite par le testateur, on dressera l'acte de réception, le notaire attestant l'accomplissement des formalités prescrites par le numéro précédent et de celles, édictées par l'article 707, qui sont applicables à ce cas. 710. — Le testament mystique ainsi régularisé, le notaire le remettra au testateur, après avoir écrit sur un registre spécial a copie authentique de l'acte de réception. 711. — Le testateur pourra conserver par devers lui le testament mystique, ou le remettre à la garde d'une personne de confiance, ou le déposer entre les mains du notaire instrumentaire qui le conserverait dans ses archives. Dans ce dernier cas, le notaire en donnera reçu et constatera sur le registre spécial en marge ou à la suite de la copie de l'acte, que le testament lui a été remis. Si le testateur le reprend par la suite, il en signera un reçu à la suite de cette note. 712. — Le notaire ou la personne, qui a la garde du testament mystique, devra le présenter au juge compétent aussitôt qu'il connaît le décès du testateur. S'il ne le fait pas dans les dix jours, il est responsable des dommages et préjudices causés par sa négligence. 713. — Celui qui, par fraude, omet de présenter, dans le délai fixé par le second paragraphe de l'article précédent, le testament mystique qu'il a en dépôt, indépendamment de la responsabilité qu'il détermine, perdra tout droit à succession, qu'il l'eût comme héritier ab intestat, ou en vertu du testament comme héritier ou légataire. Sera soumis à la même peine celui qui soustrairait un testament mystique dans le domicile du testateur ou de la personne qui en a la garde ou le dépôt. Il en est de même de celui qui le cache, le déchire ou l'annihile de toute autre façon sans préjudice des poursuites criminelles. 714. — Pour l'ouverture du testament mystique et la rédaction du procès-verbal, on observera les dispositions de la loi de procédure civile. 715. — Est nul le testament mystique, si on n'a pas observé les formalités établies par cette section pour son authenticité, et le notaire qui y a concouru est responsable des dommages et préjudices qui en résultent, si on prouve que la faute vient de son dol, de sa négligence ou d'une ignorance inexcusable. Toutefois il sera valable, comme testament olographe, s'il est tout entier écrit et signé par le testateur, et s'il remplit les autres conditions propres à ce testament. SECTION VII — Du testament militaire. 716. — En temps de guerre, les militaires en campagne, les volontaires, les otages, les prisonniers, et les autres individus, employés dans l'armée ou en faisant partie, pourront faire dresser leur testament par un officier ayant au moins le rang de capitaine. Cette disposition est applicable aux soldats d'une armée qui se trouve en pays étranger. Si le testateur est malade ou blessé, il pourra faire dresser son testament par l'aumônier ou le médecin qui l'assiste. S'il fait partie d'un détachement, il fera dresser son testament par l'officier qui le commande, même si c'est un subalterne. Dans tous les cas prévus par cet article, la présence de deux témoins capables sera toujours nécessaire. 717. — Les personnes, désignées en l'article précédent, pourront faire un testament mystique devant un commissaire de guerre, qui remplira, en ce cas, les fonctions de notaire, en se conformant aux dispositions des articles 706 et suivants. 718. — Les testaments, dressés conformément aux deux articles précédents, devront être remis, aussitôt que possible, au quartier général et par ce dernier au Ministre de la guerre. Si le testateur vient à mourir, le Ministre remettra le testament au juge du dernier domicile du défunt, et, s'il est inconnu, au doyen des juges de Madrid pour qu'il convoque d'office les héritiers et les autres intéressés à la succession. Ces personnes devront demander la rédaction d'un acte public, inscrit sur les registres en la forme prévue par la loi de procédure civile. Lorsque le testament est mystique, le juge procédera d'office à son ouverture, en la forme prévue par ladite loi, en présence du ministère fiscal dûment appelé, puis, après l'avoir ouvert, il le portera à la connaissance des héritiers et des autres intéressés. 719. — Les testaments, mentionnés en l'article 716, seront caducs quatre mois après que le testateur aura cessé d'être en campagne. 720. — Pendant une bataille, un assaut, un combat et généralement dans tout péril prochain par un acte de guerre, on pourra faire un testament de vive voix, devant deux témoins. Toutefois, ce testament sera sans valeur, si le testateur échappe au danger en vue duquel il a testé. Alors même qu'il n'y échapperait pas, le testament serait sans valeur s'il n'en était dressé acte devant l'auditeur de guerre ou l'officier de justice présent à l'armée, qui procédera comme il est dit en l'article 718. 721. — Si le testament militaire est mystique, on observera les prescriptions des articles 706 et 707, toutefois il se dressera devant l'officier et les deux témoins exigés par l'article 716 pour le testament public, qui devront, s'ils le peuvent, signer l'acte d'authenticité comme le testateur. SECTION VIII. — Du testament fait en mer. 722. — Les testaments publics ou mystiques de ceux qui sont à bord, pendant un voyage maritime, sont reçus de la façon suivante: S'il s'agit d'un navire de guerre, par l'officier d'administration ou celui qui en remplit les fonctions, en présence de deux témoins capables, qui voient et entendent le testateur. Le commandant du navire ou celui, qui en exerce les fonctions, appose en outre son visa. Sur les navires marchands, le capitaine ou celui qui en fait fonctions, assisté de deux témoins capables, recevra le testament. Dans l'un et l'autre cas, les deux témoins seront choisis parmi les passagers, s'il y en a; toutefois un d'eux au moins devra pouvoir signer; et il le fera pour lui et pour le testateur, si ce dernier ne sait ou ne peut le faire. Si le testament est public, on observera en outre les prescriptions de l'article 695, et, s'il est mystique, ce qui est prescrit en la section sixième de ce chapitre, sauf ce qui est relatif au nombre des témoins, et à la présence du notaire. 723. — Le testament de l'officier d'administration d'un navire de guerre, et celui du capitaine d'un vaisseau marchand seront reçus par celui qui doit les suppléer dans leur charge, en se conformant aux dispositions de l'article précédent. 724. — Les testaments publics faits en haute mer seront conservés par le commandant ou le capitaine, et on en fera mention sur le livre de bord. La même mention se fera pour les testaments olographes et mystiques. 725. — Si le navire aborde à un port étranger, où existe un agent diplomatique ou un consul d'Espagne, le commandant du navire de guerre, ou le capitaine du vaisseau marchand remettra à cet agent copie du testament public, ou de l'acte d'authenticité s'il est mystique, ainsi que de la mention inscrite au livre de bord. La copie du testament ou de l'acte devra porter les mêmes signatures que 1 original, si ceux qui l'ont signé vivent et sont à bord; en tout autre cas, elle sera authentiquée par l'officier d'administration ou par le capitaine, ou par leur remplaçant. Les personnes à bord, qui auraient pris part à la confection du testament, signeront également. L'agent diplomatique fera constater par écrit le fait de la remise de la copie du testament close et scellée ou de celle de l'acte d'authenticité si le testament est mystique, et il l'enverra, par le courrier prochain, avec la note du livre de bord, au ministre de la marine, qui en ordonnera le dépôt dans les archives du ministère. Le commandant ou le capitaine, qui fait la remise, exigera de l'agent diplomatique ou consulaire l'attestation de cette remise et il en fera mention sur le livre de bord. 726. — Lorsque le navire de guerre ou de commerce arrivera au premier port du Royaume, le commandant ou le capitaine remettra l'original du testament clos et scellé à l'autorité maritime du lieu, avec la copie de la mention du livre de bord, et un certificat de la mort, si le testateur est décédé. La remise se fera en la forme prévue par l'article précédent et l'autorité maritime remettra sans délai le testament au Ministre de la marine. 727. — Si le testateur est décédé, et que le testament soit public, le Ministre de la marine se conformera aux prescriptions de l'article 718. 728. — Si le testament a été fait par un étranger sur un navire espagnol, le Ministre de la marine remettra le testament au Ministre d'État pour que ce dernier lui donne, par voie diplomatique, la destination qui lui appartient. 729. — Si le testament est olographe, et que durant le voyage décède le testateur, le commandant ou le capitaine le prendra pour le garder, en en faisant mention sur le livre de bord, et il le remettra à l'autorité maritime locale en la forme et aux fins indiquées en l'article précédent, lors de l'arrivée du navire au premier port du royaume. On ferait la même chose, si le testament était mystique, et si le testateur l'avait à sa disposition au moment de sa mort. 730. — Les testaments publics et mystiques, faits conformément aux prescriptions de cette section, seront caducs quatre mois après le débarquement du testateur dans un lieu où on peut tester en la forme ordinaire. 731. — S'il y avait danger de naufrage, on appliquera à l'équipage et aux passagers des navires de guerre et de commerce les dispositions de l'article 720. SECTION IX. — Du testament fait en pays étranger. 732. — Les Espagnols pourront tester hors du territoire espagnol, en se soumettant aux lois du pays où ils se trouvent. Ils pourront également tester en pleine mer, au cours d'un voyage sur un navire étranger, en se soumettant aux lois du pays auquel ce navire appartient. Ils pourront encore faire un testament olographe conformément à l'article 688, sans l'obligation du papier timbré, encore que cette forme de testament ne soit pas reconnue par les lois de ce pays. 733. — Le testament réciproque, prohibé par l'article 669, ne sera pas valable en Espagne s'il est fait par des Espagnols, même à l'étranger et dans un pays où les lois le permettent. 734. — Les Espagnols, qui se trouvent en pays étranger, pourront encore faire authentiquement un testament public ou mystique devant l’agent diplomatique ou consulaire d'Espagne, résidant au lieu de sa rédaction. Dans ces cas, l'agent remplira les fonctions du notaire, et on observera les formalités établies dans les sections cinquième et sixième de ce chapitre. Néanmoins, la condition de domicile des témoins ne sera pas nécessaire. 735. — L'agent diplomatique ou consulaire remettra au Ministre d'État, pour être déposée dans ses archives, une copie, certifiée par sa signature et son sceau, du testament public, ou de l'acte authentiquant un testament mystique. 736. — L'agent diplomatique ou consulaire, entre les mains duquel un Espagnol aurait déposé son testament olographe ou mystique, l'enverra au Ministre d'État lorsque le testateur sera mort avec un certificat du décès. Le Ministre d'État fera publier, dans la Gaceta de Madrid, l'avis de la mort pour que les intéressés à la succession puissent recevoir le testament et faire dresser l'acte en la forme prescrite. SECTION X. — De la révocation et de la nullité des testaments. 737. — Toutes dispositions testamentaires sont essentiellement révocables, encore que le testateur ait exprimé dans le testament sa volonté ou sa résolution de ne pas les révoquer. On considérera comme non écrites les clauses empêchant des dispositions futures et celles par lesquelles il ordonne que la révocation ne soit pas valable, s'il n'emploie pas certaines formules ou certains termes. 738. — Le testament ne peut être révoqué en tout ou en partie qu'en observant les solennités nécessaires pour tester. 739. — Un premier testament demeure révoqué de droit par un second, si le testateur n'y exprime la volonté de le voir subsister en tout ou en partie. Néanmoins, le premier testament recouvre sa valeur si le testateur, après avoir révoqué le second, exprime sa volonté de valider le premier. 740. — La révocation produira son effet, encore que le second testament soit caduc par suite de l'incapacité de l'héritier ou des légataires qu'il nomme, ou de leur renonciation. 741. — La reconnaissance d'un enfant illégitime ne perd pas sa force légale, encore que le testament qui la contient ait été révoqué. 742. — On présume révoqué le testament mystique trouvé au domicile du testateur, avec l'enveloppe déchirée, ou les scellés rompus, ou les signatures qui l'authentiquent rayées, grattées ou annulées. Néanmoins, ce testament sera valable, si on prouve que ces irrégularités ont été commises sans que le testateur le veuille ou le sache, ou alors qu'il était en démence. Toutefois, si la couverture était rompue et les scellés brisés, il serait nécessaire de prouver l'authenticité du testament pour qu'il fût valable. Lorsque le testament se trouve au pouvoir d'une autre personne, on supposera que le vice vient d'elle, et il ne sera valable que si on prouve son authenticité dans le cas où l'enveloppe est déchirée et les scellés brisés; si les uns et les autres sont intacts, mais que les signatures soient rayées, grattées ou annulées, le testament sera valable à moins qu'on ne prouve que le pli a été remis en cet état par le testateur. 743. — Les testaments ne deviendront caducs et les dispositions testamentaires ne seront nulles, en tout ou en partie, que dans les cas expressément prévus par ce Code. CHAPITRE II. — DE L'HÉRÉDITÉ. SECTION PREMIÈRE. — De la capacité pour succéder par testament ou sans testament. 744. — Pourront succéder par testament ou ab intestat ceux qui n'ont pas été déclarés incapables par la loi. 745. — Sont incapables de succéder: 1° Les enfants mort-nés, en comprenant dans cette qualification les personnes désignées en l'article 30; 2° Les associations ou corporations que la loi ne permet pas. 746. — Les églises et les chapitres ecclésiastiques, les députations provinciales et les provinces, les conseils municipaux et les communes, les établissements hospitaliers, ceux de bienfaisance et d'instruction publique, les associations autorisées et reconnues par la loi et les autres personnes juridiques peuvent acquérir par testament, en se soumettant aux dispositions de l'article 38. 747. — Si le testateur a disposé de tout ou partie de ses biens pour des prières et œuvres pieuses en faveur de son âme, sans rien déterminer et sans spécifier d'application, les exécuteurs testamentaires vendront les biens et distribueront leur valeur, ils donneront la moitié à l'évêque, pour qu'il l'emploie aux prières indiquées et aux intentions et besoins de l'Église, et l'autre moitié au gouverneur civil du lieu, pour les établissements de bienfaisance du domicile du défunt et, à défaut, pour les établissements de la province. 748. — L'institution faite en faveur d'un établissement public, sous condition ou avec charge, ne sera valable que si elle est approuvée par le gouvernement. 749. — Les dispositions faites en faveur des pauvres en général, sans désignation de personnes ni de lieu, s’interprèteront comme limitées à ceux du domicile du testateur au moment de sa mort, s'il n'est pas évident que sa volonté ait été autre. La désignation des pauvres et la distribution des biens se fera par la personne désignée par le testateur et à défaut par les exécuteurs testamentaires, s'il n'y en a pas, par le curé, l'alcade et le juge municipal qui trancheront à la majorité des voix les questions qui se présenteront. Il en sera de même lorsque le testateur aura disposé de ses biens en faveur des pauvres d'une paroisse, ou d'une cité déterminée. 750. — Toute disposition en faveur d'une personne incertaine est nulle, à moins qu'un événement ne puisse la rendre certaine. 751. — La disposition, faite en faveur des parents du testateur, s'entend comme faite en faveur de ceux du plus proche degré. 752. — Ne produiront pas d'effet les dispositions testamentaires que fait le testateur pendant sa dernière maladie en faveur du prêtre qui l'a confessé, ou de ses parents jusqu'au quatrième degré, ou de son église, de son chapitre, de sa communauté ou de son institut. 753. — De même, ne produira pas d'effet la disposition testamentaire, faite par un pupille en faveur de son tuteur, avant l'approbation définitive du compte, encore que le testateur ne meure qu'après cette approbation. Seront néanmoins valables les dispositions faites par le pupille en faveur du tuteur qui est son ascendant, son frère, sa sœur ou son conjoint. 754. — Le testateur ne peut disposer de tout ou partie de sa succession en faveur du notaire qui reçoit son testament, ou de son épouse, de ses parents ou alliés jusqu'au quatrième degré, sauf l'exception établie en l'article 682. Cette prohibition est applicable aux témoins du testament public authentique, avec ou sans notaire. Ces dispositions sont aussi applicables aux témoins et aux personnes devant lesquelles se dressent les testaments spéciaux. 755. — Sera nulle la disposition testamentaire en faveur d'un incapable, qu'elle soit dissimulée sous l'apparence d'un contrat à titre onéreux ou qu'elle soit faite au nom d'une personne interposée. 756. — Sont incapables de succéder pour cause d'indignité: 1° Les parents qui abandonneraient leurs fils, prostitueraient leurs filles ou attenteraient à leur pudeur; 2° Celui qui aurait été condamné judiciairement pour attentat contre la vie du testateur, de son époux, de ses ascendants ou descendants. Si l'offenseur était héritier à réserve, il perdra son droit même à sa réserve; 3° Celui qui aurait accusé le testateur d'un délit que la loi punit d'une peine afflictive, si l'accusation est déclarée calomnieuse; 4° L'héritier majeur qui, sachant la mort violente du testateur, ne l'aurait pas dénoncée à la justice dans le délai d'un mois, lorsque des poursuites n'auront pas été exercées d'office. Cette défense cessera dans le cas où, d'après la loi, l'obligation d'accuser n'existe pas; 5° Le condamné judiciairement pour adultère avec la femme du testateur; 6° Celui qui, par menace, fraude ou violence, aurait obligé le testateur à faire ou à modifier son testament; 7° Celui qui par les mêmes moyens empêcherait une personne de faire un testament, de révoquer celui qu'elle a fait, ou qui falsifierait, cacherait ou altérerait un autre postérieur. 757. — Les causes d'indignité cessent de produire effet si le testateur les connaissait au moment où il a fait le testament, ou si, les ayant connues depuis, il les a pardonnées dans un acte public. 758. — Pour apprécier la capacité de l'héritier ou du légataire, on se reportera au moment de la mort de la personne dont on règle la succession. Dans les cas des numéros 2, 3 et 5 de l'article 756, on attendra que la sentence définitive ait été prononcée, et dans celui du numéro 4, l'achèvement du mois indiqué pour la dénonciation. Si l'institution ou le legs furent conditionnels, on attendra en outre le temps nécessaire à l'accomplissement de la condition. 759. — L'héritier ou le légataire, qui meurt avant que la condition s'accomplisse, ne transmet aucun droit à ses héritiers, alors même qu'il survit au testateur. 760. — L'incapable de succéder qui, malgré la prohibition des articles précédents, se serait mis en possession des biens héréditaires, serait tenu de les restituer ainsi que leurs accessoires, et les fruits et rentes qu'il aurait perçus. 761. — Si l'exclu de la succession pour incapacité est le fils, le descendant du testateur, et qu'il ait des enfants légitimes, ces derniers acquerront son droit à la réserve. L'exclu n'aura ni l'usufruit, ni l'administration des biens dont ses enfants héritent pour ce motif. 762. — On ne peut intenter d'action pour faire déclarer l'incapacité cinq ans après le moment où l'incapable est entré en pessession de la succession ou du legs. SECTION II. — De l'institution d'héritier. 763. — Celui, qui n'a pas d'héritiers à réserve, peut disposer par testament de tout ou partie de ses biens en faveur de toute personne ayant capacité de recevoir. Celui, qui a des héritiers à réserve, ne peut disposer de ses biens que de la manière et dans la mesure qu'établit la section cinquième de ce chapitre. 764. — Le testament sera valable, bien qu'il ne contienne pas d'institution d'héritier, ou qu'elle ne comprenne pas l'universalité des biens, et bien que l'institué n'accepte pas la succession, ou soit incapable d'hériter. Dans ce cas, on exécutera les dispositions testamentaires faites, conformément aux lois, et le reste des biens passera aux héritiers légitimes. 765. — Les héritiers, institués sans désignation de parts, hériteront par parts égales. 766. — L'héritier volontaire qui meurt avant le testateur, l'incapable d'hériter et celui qui renonce à la succession, ne transmettent aucun droit à leurs héritiers, sauf le cas des articles 701 et 857. 767. — La désignation d'une fausse cause d'institution d'héritier ou de choix d'un légataire sera considérée comme non écrite, à moins qu'il ne résulte du testament que le testateur n'aurait pas fait cette institution ou ce legs, s'il avait connu la fausseté de la cause. 768. — L'héritier, institué pour une chose certaine et déterminée, sera considéré comme légataire. 769. — Lorsque le testateur nomme certains héritiers individuellement et les autres collectivement, par exemple s'il dit: « J'institue pour mes héritiers N et N et les fils de N », ceux qui sont nommés collectivement seront considérés comme s'ils étaient nommés individuellement, à moins qu'il ne soit clairement établi que la volonté du testateur ait été autre. 770. — Si le testateur institue ses frères, et qu'il ait des frères germains, utérins et consanguins, la succession se partagera comme s'il était mort ab intestat. 771. — Lorsque le testateur appelle à sa succession une personne et ses enfants, on les considérera comme appelés simultanément et non successivement. 772. — Le testateur désignera l'héritier par ses nom et prénom, et, s'il y a deux personnes qui portent les mêmes, il devra indiquer quelque circonstance pour qu'on reconnaisse l'institué. Encore que le testateur ait omis le nom de l'héritier, s'il le désigne de façon qu'on ne puisse douter de son choix, l'institution vaudra. 773. — L'erreur sur le nom, le prénom ou les qualités de l'héritier ne vicie pas l'institution lorsqu'on peut savoir de façon certaine quelle est la personne nommée. Si entre plusieurs personnes de mêmes nom et prénom, les circonstances sont semblables et telles qu'on ne puisse distinguer l'institué, aucune n'héritera. SECTION III. — De la substitution. 774. — Le testateur peut substituer une ou plusieurs personnes à l'héritier ou aux héritiers institués, pour le cas où ils viendraient à mourir avant lui, ou ne pourraient ou ne voudraient accepter sa succession. La substitution simple, sans indication des événements comprend les trois cas énumérés au paragraphe précédent, à moins que le testateur n'en ait disposé autrement. 775. — Les pères et autres ascendants pourront nommer des substitués à leurs descendants, mineurs de quatorze ans de l'un et l'autre sexe, pour le cas où ils mourraient avant cet âge. 776. — L'ascendant pourra nommer un substitué à son descendant majeur de quatorze ans, qui a été juridiquement déclaré incapable pour aliénation mentale. La substitution, dont parle l'article précédent, restera sans effet par le testament que fait l'incapable dans un intervalle lucide, ou après avoir recouvré la raison. 777. — Lorsque le grevé a des héritiers à réserve, les substitutions, dont parlent les deux articles précédents, ne seront valables qu'autant qu'elles ne porteront pas préjudice à leur réserve. 778. — On peut substituer deux ou plusieurs personnes à une seule et aussi une seule à deux ou plusieurs héritiers. 779. — Si les héritiers institués pour des parts inégales sont réciproquement substitués les uns aux autres, ils auront, dans la substitution, les mêmes parts que dans l'institution, à moins qu'il n'apparaisse clairement que la volonté du testateur était contraire. 780. — Le grevé sera soumis aux charges et conditions imposées à l'institué, à moins que le testateur n'ait expressément décidé le contraire, ou que les charges et conditions soient purement personnelles à l'institué. 781. — Les substitutions fidéicommissaires *, en vertu desquelles on charge l'héritier de conserver et de transmettre à un tiers tout ou partie de la succession, seront valables et produiront leur effet, à moins qu'elles ne dépassent le second degré, et qu'elles ne soient faites en faveur de personnes vivantes au moment de la mort du testateur. 782. — Les substitutions fidéicommissaires ne pourront jamais grever la réserve. Si elles sont imposées à une personne destinée à en profiter, elles ne pourront se faire qu'en faveur de ses descendants. 783. — Pour être valables, les dispositions, en faveur des appelés à une substitution, devront être expresses. Le fiduciaire sera obligé de livrer l'hérédité au fidéicommissaire sans autre déduction que celle des dépenses légitimes, créances et améliorations, sauf le cas où le testateur en a disposé autrement. 784. — Le fidéicommissaire acquerra le droit à la succession dès le décès du testateur, bien qu'il meure avant le fiduciaire. Ce droit passera à ses héritiers. 785. — Ne produiront pas d'effet: 1° Les substitutions fidéicommissaires qui ne sont pas faites d'une manière expresse, soit en leur donnant leur nom, soit en imposant au grevé l'obligation finale de rendre ces biens à un second héritier; 2° Les dispositions qui contiennent une défense perpétuelle d'aliéner, ou même une défense temporaire, si elle dépasse le terme fixé par l'article 781; 3° Celles qui imposent à l'héritier la charge de payer une certaine rente ou pension à plusieurs personnes successivement, mais plus importante pour celles du second degré; 4° Celles qui ont pour objet de laisser à une personne tout ou partie des biens héréditaires, pour qu'elle les dépense et les emploie selon les instructions secrètes que lui aurait communiquées le testateur. 786. — La nullité de la substitution fidéicommissaire ne porte pas atteinte à la validité de l'institution et aux droits du premier institué; seulement la clause fidéicommissaire sera considérée comme non écrite. 787. — Est valable la disposition par laquelle le testateur lègue à une personne tout ou partie de la nue propriété de sa succession et à une autre l'usufruit. S'il appelle à l'usufruit plusieurs personnes, non simultanément, mais successivement, il y aura lieu d'appliquer l'article 781. 788. — Sera valable la disposition qui charge l'héritier d'employer périodiquement certaines sommes en œuvres de bienfaisance, par exemple pour les dots des jeunes filles pauvres, pour des pensions d'étudiants, ou bien en faveur des pauvres, ou de quelque établissement de bienfaisance ou d'instruction publique sous les conditions suivantes: Si la charge est temporaire et si elle grève des biens immeubles, l'héritier ou les héritiers pourront disposer des biens grevés, sans que la charge cesse tant que l'inscription ne sera pas rayée. Si la charge est perpétuelle, l'héritier pourra la capitaliser et placer le capital à intérêts avec première ou suffisante hypothèque. A l'acte de capitalisation et de garantie du capital interviendra le gouverneur de la province, et le ministère public y sera présent. En tout cas, lorsque le testateur n'aura pas réglé l'administration et la distribution du legs de bienfaisance, l'autorité administrative y suppléera comme il convient en se conformant aux lois. 789. — Les dispositions de ce chapitre, relatives aux héritiers, sont également applicables aux légataires. SECTION IV. — De l'institution d'héritier et des legs conditionnels et à terme. 790. — Les dispositions testamentaires, à titre universel ou particulier, peuvent se faire sous condition. 791. — Les conditions, imposées aux légataires et aux héritiers, seront régies par les règles établies pour les obligations conditionnelles, pour tout ce qui n'est pas prévu par cette section. 792. — Les conditions impossibles et contraires aux lois et aux bonnes mœurs seront considérées comme non écrites, et elles ne nuiront en rien à l'héritier, lorsque le testateur n'en a pas disposé autrement. 793. — La condition absolue de ne pas contracter un premier ou un second mariage sera considérée comme non écrite, à moins qu'elle n'ait été imposée à un veuf ou à une veuve par son époux défunt, ou par les ascendants ou descendants de ce dernier. Néanmoins, on pourra léguer à quelqu'un l'usufruit, l'usage ou l'habitation, ou une pension, ou un avantage personnel pour le temps pendant lequel il restera célibataire ou veuf. 794. — Sera nulle la disposition faite sous la condition que l'héritier ou le légataire fasse, dans son testament, une disposition en faveur du testateur ou d'une autre personne. 795. — La condition purement potestative, imposée à l'héritier ou au légataire, doit être accomplie par eux, dès qu'ils en sont instruits, après le décès du testateur. On excepte le cas où la condition déjà remplie ne peut se renouveler. 796. — Lorsque la condition est casuelle ou mixte, il suffit qu'elle se réalise à quelque moment pendant la vie du testateur ou après sa mort, s'il n'a pas fait d'autre disposition. Si le fait existait, ou si la condition était accomplie au moment de la confection du testament, et que le testateur l'ignorât, on considérera la condition comme accomplie. S'il en avait connaissance, on ne considérera la condition comme remplie, que si le fait ne peut se reproduire et la condition s'accomplir de nouveau. 797. — La désignation du but de l'institution et du legs, ou bien de l'emploi qu'on doit faire de la chose laissée par le testateur, ou de la charge qu'il impose, n'est pas considérée comme une condition, si telle ne paraît être sa volonté. Ce qui a été laissé de cette manière peut se réclamer immédiatement, et est transmissible aux héritiers qui garantissent l'exécution des volontés du testateur, et la restitution de ce qui aurait été reçu avec les fruits et les intérêts, si on manquait à cette obligation. 798. — Lorsque, sans la faute ou le fait propre de l'héritier ou du légataire, on ne peut exécuter l'institution ou le legs, dont parle l'article précédent, dans les conditions mêmes stipulées par le testateur, on devra en accomplir d'autres parmi les plus similaires et les plus conformes à sa volonté. Lorsque l'intéressé, en faveur duquel le legs s'accomplit, en empêche l'accomplissement sans la faute ou le fait propre de l'héritier ou du légataire, on considérera la condition comme accomplie. 799. — La condition suspensive n'empêche pas l'héritier ou le légataire d'acquérir leurs droits respectifs et de les transmettre à leurs héritiers, même avant que son accomplissement se produise. 800. — Si la condition potestative, imposée à l'héritier ou au légataire, est négative, comme de ne pas faire, de ne pas donner, on l'accomplira en donnant garantie de ne pas faire, de ne pas donner ce qui a été défendu par le testateur, et en cas de contravention, on rendra ce que l'on aurait reçu avec les fruits et les intérêts. 801. — Si l'héritier est institué sous condition suspensive, on fera administrer les biens de la succession jusqu'à ce que la condition se réalise, ou qu'il soit certain qu'elle né s'accomplira pas. Il en sera de même lorsque l'héritier ou le légataire ne fournira pas la garantie dont parle l'article précédent. 802. — L'administration, dont parle l'article précédent, sera confiée à l'héritier ou aux héritiers institués sans condition, lorsque le droit d'accroissement existera entre eux et l'héritier conditionnel. 11 en sera de même relativement aux légataires. 803. — Si l'héritier conditionnel n'a pas de cohéritiers ou que, s'il en a, il n'y ait pas entre eux de droit d'accroissement, il aura l'administration en donnant une garantie. S'il ne la donne, on conférera l'administration à l'héritier présumé, également avec garantie; si ni l'un, ni l'autre ne la fournissent, les tribunaux nommeront une tierce personne, qui prendra la charge et fournira également une garantie en présence de l'héritier. 804. — Les administrateurs auront les mêmes droits et obligations que ceux des biens d'un absent. 805. — Sera valable la désignation du jour et du temps où doit commencer ou finir l'effet d'une institution d'héritier ou d'un legs. Dans les deux cas, jusqu'à l'arrivée du terme prescrit, ou lorsque le délai est accompli, on considérera comme appelé l'héritier légitime; mais, dans le premier cas, il n'entrera en possession des biens qu'après avoir fourni caution suffisante, en présence de l'institué. SECTION V. — Des réserves. 806. — La réserve ou légitime est la portion de biens dont le testateur ne peut disposer, la loi la réservant pour des héritiers appelés pour cela héritiers forcés. 807. — Sont héritiers à réserve: 1° Les enfants et descendants légitimes par rapport à leurs parents et ascendants légitimes; 2° A défaut des précédents, les parents et ascendants par rapport à leurs enfants et descendants légitimes; 3° Le veuf ou la veuve, les enfants naturels légalement reconnus et leurs père et mère en la manière et mesure établies par les articles 834, 835, 836, 837, 840, 841, 842 et 843. 808. — Les deux tiers de l'avoir successoral du père et de la mère constituent la réserve des enfants et descendants légitimes. Néanmoins ils pourront disposer de l'un des deux tiers formant la réserve, pour la donner par préciput à leurs enfants et descendants légitimes. Le tiers restant sera de libre disposition. 809. — La moitié de l'avoir successoral des enfants et descendants constituera la réserve des parents et ascendants. Ils pourront disposer de l'autre moitié, sauf ce qui est édicté par l'article 836. 810. — La réserve attribuée aux parents se divisera entre eux, en deux parts égales: si un d'eux est mort, le survivant recevra le tout. Lorsque le testateur ne laisse ni père, ni mère, mais des ascendants d'un même degré dans les lignes paternelle et maternelle, la succession se divisera par moitié entre les deux lignes. Si les ascendants sont de degré différent, elle appartiendra en totalité aux ascendants les plus proches de l'une ou de l'autre ligne. 811. — L'ascendant, qui hérite de son descendant de biens, acquis à titre gratuit d'un autre ascendant ou d'un frère, est obligé de respecter les droits qui seraient acquis en vertu de la loi, au profit des parents jusqu'au troisième degré, appartenant à la ligne d'où viennent les biens. 812. — Les ascendants succèdent, par exclusion de toutes autres personnes, aux biens par eux donnés à leurs enfants et descendants, morts sans postérité, lorsque les objets donnés existent dans la succession. S'ils ont été aliénés, ils succèdent à toutes les actions que le donataire pouvait avoir de ce chef, au prix s'ils ont été vendus, et aux biens qui les remplacent, s'ils ont été permutés ou échangés. 813. — Le testateur ne peut priver ses héritiers de leur réserve, que dans les cas expressément fixés par la loi. De même, il ne pourra leur imposer ni charge, ni condition, ni substitution d'aucune espèce, sauf ce qui est dit pour l'usufruit du veuf. 814. — L'omission d'un ou de tous les héritiers à réserve en ligne directe, qu'ils fussent vivants lors de la rédaction du testament, ou qu'ils soient nés depuis sa mort, annulera l'institution d'héritier, mais les legs et les préciputs vaudront en tant qu'ils ne sont pas excessifs. L'omission du veuf ou de la veuve n'annulera pas l'institution, mais celui, qui aura été omis, conservera les droits que lui accordent les articles 834, 835, 836 et 837 de ce Code. Si les héritiers à réserve omis meurent avant le testateur, l'institution produira son effet. 815. — L'héritier réservataire à qui le testateur a laissé, pour quelque cause que ce soit, moins que la réserve qui lui appartient, pourra en demander le complément. 816. — Toute renonciation ou transaction au sujet de la réserve future, entre celui qui la doit et ses héritiers réservataires, est nulle, et ces derniers pourront la réclamer à son décès; mais ils devront tenir compte de ce qu'ils auront reçu pour la renonciation ou transaction. 817. — A la demande des héritiers à réserve, les dispositions testamentaires qui diminuent la réserve, seront réduites dans la mesure où elles sont sans valeur et excessives. 818. — Pour fixer la légitime, on considérera la valeur des biens laissés à sa mort par le testateur, en déduisant les dettes et charges, sans y comprendre celles qui ont été imposées par le testament. A la valeur nette des biens héréditaires, on ajoutera celle de toutes les donations rapportables du même testateur au moment où il les a faites. 819. — Les donations faites aux enfants, mais non à titre de préciput, s'imputeront sur la réserve. Les donations faites aux étrangers s'imputeront sur la portion, dont le testateur pouvait librement disposer par acte de dernière volonté. En tant qu'elles sont excessives et dépassent la quotité disponible, on les réduira d'après les règles des articles suivants. 820. — Après avoir fixé la réserve conformément aux deux articles précédents, on fera la réduction comme suit: 1° On maintiendra les donations, si on peut fournir la réserve en réduisant ou en annulant s'il est nécessaire les legs faits dans le testament. 2° Leur réduction se fera entre eux au prorata sans aucune distinction. Si le testateur a prescrit de payer certains legs préférablement aux autres, il ne subira de réduction qu'après avoir employé les autres à fournir la réserve. 3° Si le legs consiste en un usufruit ou une rente viagère dont la valeur paraît supérieure à la portion disponible, les héritiers réservataires auront à choisir entre l'accomplissement de la disposition testamentaire, et l'abandon au légataire de la partie de la succession dont le testateur pouvait disposer librement. 821. — Lorsque le legs sujet à réduction consiste en un fonds d'un partage difficile, ce fonds restera au légataire si la réduction ne dépasse pas la moitié de la valeur; et, en cas contraire, il sera attribué aux héritiers à réserve; les uns et les autres devront respectivement s'indemniser en argent. Le légataire, qui adroit à la réserve, pourra retenir tout le fonds, du moment où sa valeur n'est pas supérieure à l'importance de la portion disponible et de sa part dans la réserve. 822. — Si les héritiers et légataires ne veulent pas user du droit que leur accorde l'article précédent, celui qui n'en a pas la possession pourra en user; s'il refuse de même, on vendra le fonds en vente publique, à la diligence de l'un des intéressés. SECTION VI. — Des préciputs. 823. — Le père et la mère pourront disposer, en faveur d'un ou de quelques-uns de leurs enfants ou descendants, d'un des deux tiers formant la légitime. Cette portion se nomme préciput (mejora). 824. — On ne pourra grever le préciput de charges autres que celles établies en faveur des enfants légitimes et de leurs descendants. 825. — Aucune donation entre vifs, pure et simple ou avec charges en faveur d'enfants ou de descendants qui ont droit à la réserve, ne se qualifiera de préciput, si le donateur n'a pas manifesté expressément sa volonté de constituer un préciput. 826. — La promesse de constituer ou de ne pas constituer un préciput, faite par acte public dans un contrat de mariage, sera valable. La disposition du testament, contraire à cette promesse, ne produira point d'effet. 827. — Le préciput, bien qu'exécuté par la délivrance des biens, sera révocable, à moins qu'il n'ait été constitué par contrat de mariage ou en vertu d'un contrat à titre onéreux conclu avec un tiers. 828. — Le legs ou l'avantage, fait par le testateur à un de ses enfants ou descendants, ne sera considéré comme préciput que si le testateur a déclaré expressément sa volonté et s'il ne dépasse pas la portion libre. 829. — Le préciput pourra se composer d'un bien déterminé. Si sa valeur excède le tiers destiné au préciput et la portion de réserve revenant à l'avantagé, ce dernier devra indemniser en argent les intéressés. 830. — La faculté de faire un préciput ne peut se confier à autrui. 831. — Nonobstant la disposition de l'article précédent, on pourra valablement convenir dans un contrat de mariage que, si un des conjoints meurt intestat, le veuf ou la veuve, qui n'a pas convolé en secondes noces, peut distribuer selon sa prudence les biens du défunt et donner, sur eux, un préciput aux enfants communs, sans préjudice des réserves et des préciputs constitués pendant la vie du décédé. 832. — Lorsqu'un bien spécial n'aura pas été attribué pour constituer le préciput, on le fournira avec les biens héréditaires, en observant autant que possible les règles établies dans les articles 1061 et 1062, pour assurer l'égalité des partages entre héritiers. 833. — L'enfant ou le descendant légitime avantagé pourra renoncer à la succession et recueillir le préciput. SECTION VII. — Droits de l'époux veuf. 834. — Le veuf ou la veuve, qui à la mort de son conjoint n'était pas séparé de corps, ou qui l'était par la faute de l'époux défunt, aura droit à une part en usufruit, égale à celle que la réserve donne à chacun de ses enfants ou descendants légitimes non avantagés. Le veuf ou la veuve aura l'usufruit du tiers destiné au préciput, s'il n'y a qu'un seul enfant ou descendant; ce dernier aura la nue-propriété jusqu'à ce que, à la mort de l'époux survivant, il la réunisse à l'usufruit. Si, les époux étaient séparés à cause d'une instance en séparation de corps, on attendra le résultat du procès. Si, entre époux séparés, est intervenu le pardon et la réconciliation, le survivant conservera ses droits. 835. — La part héréditaire, assignée en usufruit à l'époux veuf, devra être prélevée sur le tiers des biens destinés au préciput. 836. — Si le testateur ne laisse pas de descendants, mais des ascendants, le conjoint survivant aura droit à l'usufruit du tiers de la succession. Ce tiers se prendra sur la moitié dont le testateur pouvait disposer en pleine propriété. 837. — Lorsque le testateur ne laisse ni descendants, ni ascendants légitimes, le conjoint survivant a droit à la moitié de la succession, toujours en usufruit. 838. — Les héritiers pourront fournir au conjoint sa part d'usufruit, en lui assignant une rente viagère et le produit de biens déterminés, ou un capital en argent si on y consent d'un accord mutuel et, à défaut, en obtenant une décision judiciaire. Si cela ne se réalise, tous les biens de la succession seront affectés au paiement de la part d'usufruit appartenant à l'époux veuf. 839. — Dans le cas où des enfants de deux ou plusieurs mariages sont en concurrence, l'usufruit, appartenant à l'époux veuf du second mariage, se prendra sur le tiers de libre disposition des parents. SECTION VIII. — Des droits des enfants illégitimes. 840. — Lorsque le testateur laisse des enfants ou des descendants légitimes et des enfants naturels légalement reconnus, chacun de ces derniers aura droit à la moitié de la quotité revenant à chacun des enfants légitimes n'ayant point de préciput; cette part se prendra toujours sur le tiers de libre disposition, après qu'on aura prélevé les frais d'enterrement et de funérailles. Les enfants légitimes pourront fournir la part revenant aux enfants naturels en argent, ou en d'autres biens d'après une juste estimation. 841. — Lorsque le testateur ne laisse ni enfants, ni descendants, mais des ascendants légitimes, les enfants naturels reconnus auront droit à la moitié de la portion disponible de la succession. Cette disposition ne porte pas préjudice à la réserve de l'époux survivant conformément à l'article 836, ainsi en cas de concours d'un veuf avec des enfants naturels reconnus, on adjugera à ces derniers, pour compléter leur réserve, des biens en nue-propriété pendant la vie du veuf. 842. — Lorsque le testateur ne laisse ni descendants ni ascendants légitimes, les enfants naturels reconnus auront droit au tiers de la succession. 843. — Les droits, reconnus aux enfants naturels dans les articles précédents, se transmettent à leur décès à leurs descendants légitimes. 844. — La part héréditaire des enfants légitimés par lettre du roi sera la même que celle accordée par la loi aux enfants naturels reconnus. 845. — Les enfants illégitimes, qui n'ont pas la qualité d'enfants naturels, n'auront droit qu'à des aliments. L'obligation de celui qui doit les fournir se transmettra à ses héritiers et subsistera jusqu'à la majorité des enfants illégitimes, et s'ils sont incapables, tant que persistera leur incapacité. 846. — Le droit de succession, que la loi accorde aux enfants naturels, appartient par réciprocité, dans les mêmes conditions, aux pères et mères naturels. 847. — Les donations, que l'enfant naturel a reçues de son père ou de sa mère pendant leur vie, s'imputent sur sa réserve. Si elles excèdent le tiers de libre disposition, on les réduira en la forme prévue par les articles 817 et suivants. SECTION IX. — De l'exhérédation. 848. — L'exhérédation ne pourra avoir lieu que pour une des causes expressément édictées par la loi. 849. — L'exhérédation ne pourra se faire que par testament, on y indiquera le motif sur lequel elle est fondée. 850. — La preuve du motif d'exhérédation sera à la charge des héritiers si l'exhérédé en nie l'existence. 851. — L'exhérédation sans indication de cause, ou pour une cause niée, et dont la preuve n'a pas été rapportée, ou pour une cause autre que celles indiquées dans les articles suivants, annulera l'institution d'héritier, en tant qu'elle nuit à l'exhérédé; toutefois les legs, préciputs et autres dispositions vaudront, en tant qu'ils ne porteront point atteinte à la réserve. 852. — Sont de justes causes d'exhérédation chacun des cas d'incapacité ou d'indignité de succéder énumérés dans l'article 756 n°s 1, 2, 3, 5 et 6. 853. — Sont également de justes causes d'exhérédation des enfants et descendants légitimes ou naturels, en outre de celles énumérées dans l'article 756 n°s 1, 2, 3, 5 et 6, les faits suivants: 1° Avoir refusé, sans motif légitime, des aliments au père ou à l'ascendant qui exhérède; 2° Avoir usé envers lui de mauvais traitements ou l'avoir verbalement injurié gravement; 3° Avoir livré sa fille ou sa petite fille à la prostitution; 4° Avoir été condamné pour un délit puni de la peine de l'interdiction civile. 854. — Les faits suivants seront de justes causes de déshériter les parents et les ascendants, aussi bien légitimes que naturels, indépendamment de ceux énumérés dans les n°s 1, 2, 3, 5 et 6 de l'article 756: 1° La perte de la puissance paternelle pour les causes indiquées dans l'article 169; 2° Le refus d'aliments à ses enfants ou descendants sans motif légitime; 3° L'attentat commis par le père ou la mère contre la vie de l'autre, s'il n'y a pas eu entre eux de réconciliation. 855. — Indépendamment de ceux désignés dans les n°s 2, 5 et 6 de l'article 756, sont de justes motifs d'exhérédation du conjoint: 1° Le fait d'avoir donné lieu à la séparation de corps conformément à l'article 105; 2° Les causes qui donnent lieu à la perte de la puissance paternelle, en vertu de l'article 169; 3° Le refus d'aliments aux enfants de l'autre conjoint; 4° L'attentat contre la vie de l'époux testateur, s'il n'est pas intervenu de réconciliation. Pour que les causes, qui donnent lieu à la séparation de corps permettent également l'exhérédation, il faut que les deux époux ne vivent pas sous le même toit. 856. — La réconciliation postérieure de l'offenseur et de l'offensé prive ce dernier du droit d'exhérédation, et laisse sans effet l'exhérédation déjà faite. 857. — Les enfants de l'exhérédé prennent sa place et conservent ses droits d'héritier forcé sur la réserve; mais le père exhérédé n'a droit ni à l'usufruit, ni à l'administration des biens qui la composent. SECTION X. — Des dispositions et des legs. 858. — Le testateur pourra charger de dispositions et de legs, non seulement ses héritiers, mais encore ses légataires. Ils ne seront obligés d'acquitter la charge que dans les limites de la valeur du legs. 859. — Lorsque le testateur impose un legs à un de ses héritiers, il est seul tenu de l'accomplir. S'il n'incombe spécialement à aucun, tous en sont tenus dans la proportion de leurs droits héréditaires. 860. — L'obligé à la délivrance du legs en répondra même en cas d'éviction, si la chose donnée est indéterminée, et désignée seulement par son espèce et sa nature. 861. — Le legs de la chose d'autrui est valable, si le testateur savait qu'elle ne lui appartenait pas. L'héritier sera tenu de l'acquérir pour la délivrer au légataire, et, si ce lui est impossible, à en payer la juste estimation. La preuve que le testateur savait que la chose appartenait à autrui, incombe au légataire. 862. — Si le testateur ignorait que la chose appartenait à autrui, le legs sera nul. Mais il sera valable si le testateur l'acquiert depuis la confection du testament. 863. — Sera valable le legs fait à un tiers d'une chose appartenant à l'héritier ou au légataire, ceux-ci devront, s'ils acceptent la succession, de livrer la chose léguée ou sa juste estimation, dans la mesure fixée par l'article suivant. La disposition du paragraphe précédent s'applique sans préjudice de la réserve des héritiers forcés. 864. — Lorsque le testateur, l'héritier ou le légataire n'ont qu'une part, ou qu'un droit à la chose léguée, on considérera le legs comme limité à cette part ou à ce droit, à moins que le testateur ne déclare expressément léguer la chose entière. 865. — Est nul le legs de choses hors de commerce. 866. — Ne produira pas d'effet le legs de la chose qui, au moment de la confection du testament, appartenait déjà en propre à l'héritier, alors même qu'une autre personne aurait un droit dessus. Si le testateur prescrit expressément la libération de la chose, on la libérera de ce droit ou de cette charge, et le legs produira effet dans cette mesure. 867. — Lorsque le testateur lègue une chose donnée en gage ou en hypothèque pour la sûreté d'une dette exigible, le paiement doit être fait par l'héritier. Si l'héritier n'effectuant pas le paiement, le légataire paie la dette, il sera subrogé aux droits et actions du créancier pour agir contre l'héritier. Si une autre charge quelle qu'elle soit, perpétuelle ou temporaire, grève la chose léguée, elle sera à la charge du légataire; toutefois, dans les deux cas, les intérêts et les rentes, dus à la mort du testateur, sont à la charge de l'héritier. 868. — Si la chose léguée est soumise à des droits d'usufruit, d'usage ou d'habitation, le légataire devra respecter ces droits jusqu'à leur extinction légale. 869. — Le legs demeurera sans effet: 1° Si le testateur transforme la chose léguée, de manière qu'elle ne conserve ni la forme, ni le nom qu'elle avait; 2° Si le testateur aliène, à quelque titre et pour quelque cause que ce soit, la chose léguée en tout ou en partie; dans ce dernier cas, on admettra que le legs ne perd son effet que pour la partie aliénée. Si, après l'aliénation, la chose fait retour au testateur, même à raison de la nullité du contrat, le legs sera dorénavant sans valeur, sauf le cas où l'acquisition serait le résultat d'une rétrocession; 3° Si la chose léguée périt en entier du vivant du testateur ou depuis sa mort, sans qu'il y ait faute de l'héritier. Néanmoins celui qui est tenu de payer le legs, répondra de l'éviction, si la chose léguée n'a pas été spécifiée selon les dispositions de l'article 860. 870. — Le legs d'une créance contre un tiers, ou d'une remise ou libération d'une dette du légataire, n'aura d'effet que pour la partie de la créance ou de la dette existant au décès du testateur. Dans le premier cas, l'héritier l'exécutera en cédant au légataire toutes les actions qu'il peut avoir contre le tiers. Dans le second, en remettant au légataire un certificat de libération s'il le demande. Dans les deux cas, le legs comprendra les intérêts dus à raison de la dette ou de la créance, au décès du testateur. 871. — Le legs, dont parle l'article précédent, serait caduc si le testateur, après l'avoir fait, demandait judiciairement au débiteur le paiement de sa dette, alors même qu'il ne l'eût pas obtenu au moment de son décès. Quant au legs fait au débiteur de la chose donnée en gage, il ne comprend que le droit de préférence. 872. — Le legs général de libération ou de remise de dettes comprend celles qui existaient lors du testament, et non les postérieures. 873. — Le legs fait à un créancier ne s'imputera pas sur le paiement de sa dette, à moins que le testateur ne l'ait expressément stipulé. Dans ce cas, le créancier aura droit de recevoir l'excédant de la créance ou du legs. 874. — Pour les legs alternatifs, on observera les règles des obligations de cette espèce, sauf les modifications résultant de la volonté expresse du testateur. 875. — Le legs d'un meuble, désigné par son espèce générique, sera valable, même s'il n'y arien de cette espèce dans l'hérédité. Le legs d'un immeuble non déterminé ne sera valable que s'il se trouve des biens de cette nature dans la succession. Le choix appartiendra à l'héritier qui devra délivrer une chose ni de dernière qualité, ni de première. 876. — Lorsque le testateur laisse formellement le choix à l'héritier ou au légataire, le premier pourra donner et le second choisir ce qui lui paraît le mieux. 877. — Si l'héritier ou le légataire ne peut faire le choix qui lui a été accordé, ce droit passera à leurs héritiers, mais le choix une fois fait sera irrévocable. 878. — Si la chose léguée était la propriété du légataire à la date du testament, le legs est sans valeur, même s'il l'aliène après. Si le légataire l'avait acquise à titre gratuit postérieurement à cette date, il ne pourrait rien réclamer de ce chef, mais si l'acquisition avait été faite à titre onéreux, il pourrait demander à l'héritier de l'indemniser de ce qu'il avait donné pour cette acquisition. 879. — Le legs d'éducation dure jusqu'à ce que le légataire ait atteint sa majorité. Celui d'aliments dure pendant toute la vie du légataire, si le testateur n'en n'a pas disposé autrement. Si le testateur n'a pas attribué de somme pour ces legs, on en fixera l'importance d'après l'état et la condition du légataire et les forces de la succession. Si le testateur avait l'habitude pendant sa vie de donner au légataire une certaine somme d'argent ou d'autre chose pour ses aliments, on considérera que la même valeur a été léguée, si elle n'est pas en trop notable disproportion avec l'importance de la succession. 880. — Lorsque le legs consiste en une pension périodique ou en une certaine valeur annuelle, mensuelle ou hebdomadaire, le légataire, peut exiger le premier terme dès le décès du testateur, et les suivants au commencement de chaque période, sans qu'il y ait lieu à restitution, si le légataire décède avant la fin de la période commencée. 881. — Le légataire acquiert son droit aux legs purs et simples du moment du décès du testateur, et le transmet à ses héritiers. 882. — Lorsque le legs consiste en une chose spécifiée et déterminée appartenant au testateur, le légataire en acquiert la propriété dès l'instant de sa mort et il fait siens les fruits pendants et les revenus en cours, mais non les revenus échus et non payés avant la mort. La chose léguée sera, dès le même instant, aux risques du légataire qui supportera, pour le tout, sa perte ou sa détérioration, comme il profitera de son augmentation et amélioration. 883. — La chose léguée devra être livrée avec tous ses accessoires, et dans l'état où elle se trouvait au décès du testateur. 884. — Si le legs consiste en une chose, qui n'est spécifiée et déterminée que par son genre et sa quantité, les fruits et les intérêts depuis la mort du testateur appartiendront au légataire lorsque le testateur l'aura expressément prescrit. 885. — Le légataire ne peut s'emparer de sa propre autorité de la chose léguée, mais il doit en demander la délivrance et la possession à l'héritier ou à l'exécuteur testamentaire s'il est autorisé à la donner. 886. — L'héritier doit donner la chose même qui a été léguée, il ne s'acquitte point en donnant son estimation. Les legs d'argent doivent être payés en argent, alors même qu'il n'y en a pas dans la succession. Les frais nécessaires pour la délivrance du legs sont à la charge de la succession, sans préjudice toutefois de la réserve. 887. — Si les biens de la succession ne sont pas suffisants pour couvrir tous les legs, le paiement se fera dans l'ordre suivant: 1° Les legs rémunératoires; 2° Les legs d'une chose certaine et déterminée faisant partie de l'avoir successoral; 3° Les legs que le testateur a déclaré préférer; 4° Les legs d'aliments; 5° Les legs d'éducation; 6° Les autres au prorata. 888. — Lorsque le légataire ne peut ou ne veut accepter le legs, ou que, pour toute autre cause, il ne produit pas d'effets, il retournera à la masse de la succession, sauf dans les cas de substitution et de droit d'accroissement. 889. — Le légataire ne peut accepter une partie du legs et répudier l'autre si elle est à titre onéreux. S'il meurt avant d'accepter le legs et s'il laisse plusieurs héritiers, chacun d'eux pourra l'accepter ou le répudier pour la part qui lui revient. 890. — Le légataire de deux legs, dont l'un est grevé de charges, ne pourra refuser ce dernier et accepter l'autre. Si les deux sont avec ou sans charges, il peut les accepter tous les deux, ou répudier celui qu'il voudra. L'héritier, qui est en même temps légataire, pourra renoncer à la succession et accepter le legs, ou renoncer à ce dernier et accepter la succession. 891. — Si la totalité de la succession est distribuée en legs, les dettes et charges seront supportées par les légataires au prorata de leurs avantages, à moins que le testateur n'en ait disposé autrement. SECTION XI. — Des exécuteurs et administrateurs testamentaires. 892. — Le testateur pourra nommer un ou plusieurs exécuteurs testamentaires. 893. — Ne pourra être exécuteur testamentaire celui qui n'a pas la capacité de s'obliger. La femme mariée pourra l'être avec l'autorisation de son mari; cette autorisation ne sera pas nécessaire si elle est légalement séparée de lui. Le mineur ne pourra l'être, même avec l'autorisation de son père ou de son tuteur. 894. — L'exécuteur testamentaire peut être universel ou particulier. En tout cas, les exécuteurs pourront être nommés conjointement, successivement et solidairement. 895. — Lorsqu'il y a ensemble plusieurs exécuteurs testamentaires, il n'y aura de valable que ce qu'ils feront de concert, ou ce que fera l'un d'eux autorisé par les autres, ou ce que, en cas de dissentiment, prescrira la majorité. 896. — Dans les cas d'extrême urgence, un seul des exécuteurs testamentaires conjoints pourra faire, sous sa responsabilité personnelle, les actes nécessaires en en rendant immédiatement compte aux autres. 897. — Si le testateur n'établit pas clairement la solidarité des exécuteurs et ne fixe pas l'ordre dans lequel ils doivent exercer leur charge, on les considérera comme nommés conjointement, et ils exerceront leur charge conformément aux articles précédents. 898. — La charge d'exécuteur est volontaire, et elle sera considérée comme acceptée par la personne désignée, si elle ne s'excuse pas dans les six jours suivant celui où elle a connaissance de sa nomination, ou, si elle la connaissait avant, dans les six jours suivant la mort du testateur. 899. — L'exécuteur, qui accepte la charge, prend l'obligation de la remplir, mais il pourra y renoncer en alléguant une cause déclarée juste par la prudente décision du juge. 900. — L'exécuteur qui n'accepte pas la charge, ou qui y renonce sans juste cause, perdra ce qui lui aurait été laissé par le testateur, sauf toujours le droit qu'il aurait à la réserve. 901. — Les exécuteurs testamentaires auront tous les pouvoirs que le testateur leuraura concédés et qui ne seront point contraires aux lois. 902. — Si le testateur n'a pas précisé les droits des exécuteurs testamentaires, ils auront les suivants: 1° Disposer et payer les prières et les funérailles du testateur, conformément aux dispositions du testament et à défaut selon les usages du lieu; 2° Acquitter les legs consistant en une somme d'argent, avec le consentement et l'agrément de l'héritier; 3° Veillera l'exécution de toutes les prescriptions du testament et soutenir, si c'est juste, sa validité en justice et ailleurs; 4° Prendre les précautions nécessaires pour la conservation et la garde des biens, en faisant intervenir les héritiers. 903. — S'il n'y avait pas dans l'hérédité assez d'argent monnayé pour payer les frais funéraires et les legs, et si les héritiers ne fournissaient pas les sommes nécessaires, les exécuteurs testamentaires provoqueraient la vente des biens meubles et, en cas d'insuffisance, celles des immeubles; les héritiers interviendraient. S'il se trouvait parmi les intéressés à la succession un mineur, un absent, une corporation ou établissement public, la vente se fera avec les formalités prévues par la loi en pareille matière. 904. — Si le testateur n'a pas fixé le délai dans lequel l'exécuteur testamentaire doit remplir ses fonctions, il sera d'une année à dater de son acceptation, ou de la fin des litiges soulevés à raison de la nullité ou de la validité du testament, ou de quelqu'une de ses dispositions. 905. — Si le testateur veut étendre le délai légal, il devra indiquer expressément celui de la prorogation. S'il ne l'a pas fixé, on présumera que la prorogation est d'une année. Si, à l'expiration de ce délai, on n'a pas complètement accompli la volonté du testateur, le juge pourra accorder une autre prorogation d'après les circonstances de la cause. 906. — Les héritiers et légataires pourront, d'un commun accord, proroger les pouvoirs de l'exécuteur testamentaire pendant le délai qu'ils croiront nécessaire, mais la prorogation ne sera que pour une année, si elle n'a été accordée qu'à la majorité. 907. — Les exécuteurs testamentaires devront rendre compte de leur administration aux héritiers. Si au lieu d'être nommés pour délivrer aux héritiers des biens déterminés, ils l'avaient été pour en faire l'emploi et la distribution prescrite par le testateur, dans les cas où la loi le permet, le compte sera rendu au juge. Toute disposition du testateur, contraire à cet article, est nulle. 908. — L'exécution testamentaire est une charge gratuite. Néanmoins le testateur pourra assigner aux exécuteurs testamentaires la rémunération qu'il juge convenable; le tout sans préjudice de leur droit de recouvrer ce qui leur appartient pour frais de partage ou autres qu'ils peuvent faire. Si le testateur lègue ou assigne conjointement aux exécuteurs une rétribution, la part de ceux qui refusent la charge accroîtra à ceux qui la remplissent. 909. — L'exécuteur testamentaire ne pourra déléguer sa charge sans l'autorisation expresse du testateur. 910. — L'exécution testamentaire prend fin par le décès, l'impossibilité, la renonciation, la destitution de l'exécuteur testamentaire et par l'échéance du terme fixé par le testateur, par la loi, ou, s'il y échet, par les intéressés. 911. — Dans les cas de l'article précédent, ou dans celui où l'exécuteur testamentaire n'a pas accepté sa charge, il appartiendra aux héritiers d'exécuter la volonté du testateur. CHAPITRE III. — DE LA SUCCESSION AB INTESTAT. SECTION PREMIÈRE. — Dispositions générales. 912. — Il y a lieu à succession légitime: 1° Lorsque le défunt meurt sans testament, ou en laissant un testament nul, ou qui a perdu sa valeur; 2° Lorsque le testament ne contient pas d'institution d'héritier pour tout ou partie des biens, ou ne dispose pas de la totalité de ceux appartenant au testateur. En ce cas, la succession est légitime seulement quant aux biens dont on n'a pas disposé; 3° Lorsque vient à défaillir la condition mise à l'institution d'héritier, ou lorsque ce dernier meurt avant le testateur ou refuse la succession sans avoir de substitué, et sans qu'il y ait lieu à droit d'accroissement; 4° Lorsque l'héritier institué est incapable de succéder. 913. — A défaut d'héritiers testamentaires, la loi défère la succession, selon les règles qu'on verra plus loin, aux parents légitimes et naturels du défunt, à son veuf ou à sa veuve, à l'État. 914. — La disposition relative à l'incapacité de succéder par testament est applicable à la succession ab intestat. SECTION II. — De la parenté. 915. — La proximité de la parenté se détermine par le nombre de générations, chaque génération forme un degré. 916. — La série des degrés forme la ligne qui peut être directe ou collatérale. On appelle ligne directe, celle qui est constituée par la série des degrés entre personnes descendant l'une de l'autre; Et collatérale celle qui constitue la série des degrés entre personnes qui ne descendent pas les unes des autres, mais ont une origine commune. 917. — On distingue la ligne directe en descendante et ascendante. La première unit le chef de famille à ceux qui descendent de lui. La seconde relie une personne à celles dont elle descend. 918. — Dans les lignes, on compte autant de degrés que de générations entre les personnes, on ne compte pas le père commun. En ligne directe on monte uniquement jusqu'à la souche, ainsi le fils est séparé du père par un degré, du grand-père par deux et par trois du bisaïeul. En ligne collatérale on monte à la souche et on descend ensuite jusqu'à la personne au respect de laquelle on fait le compte, ainsi le frère est à deux degrés du frère; de trois de l'oncle, frère du père ou de la mère; de quatre du cousin germain, et ainsi de suite. 919. — La computation, dont parle l'article précédent, fait loi en toute matière, sauf en celles relatives aux empêchements au mariage canonique. 920. — On appelle double lien, la parenté par le père et par la mère conjointement. 921. — Dans les successions, le parent plus proche exclut le plus éloigné, sauf le droit de représentation dans les cas où il doit avoir lieu. Les parents, qui sont du même degré, héritent par portions égales, sauf ce que dit l'article 949 sur le double lien. 922. — S'il y a plusieurs parents d'un même degré, et que un ou plusieurs d'entre eux ne veulent ou ne puissent hériter, leur part accroîtera aux autres du même degré, sauf le droit de représentation quand il doit avoir lieu. 923. — Si la succession est répudiée par le parent le plus proche s'il est seul, ou s'ils sont plusieurs, par tous les parents les plus proches appelés par la loi, ceux du degré suivant héritent en vertu de leur propre droit, alors même qu'ils ne pourraient représenter le renonçant. SECTION III. — De la représentation. 924. — On appelle droit de représentation celui qu'ont les parents d'une personne, de succéder aux droits qu'elle pourrait avoir si elle vivait, ou si elle pouvait hériter. 925. — Le droit de représentation aura toujours lieu en ligne descendante, mais jamais en ligne ascendante. En ligne collatérale, il n'aura lieu qu'en faveur des enfants des frères, qu'ils soient de double lien ou d'un seul côté. 926. — Toutes les fois qu'on hérite par représentation, le partage de la succession se fait par branches, de façon que le ou les représentants ne reçoivent pas plus de la succession que le représenté, s'il existait. 927. — S'il reste des enfants de un ou de plusieurs frères du défunt, ils hériteront par représentation s'ils sont en concours avec leurs oncles. Mais s'ils sont seuls, ils hériteront par portions égales. 928. — On ne perd pas le droit de représenter une personne parce qu'on a renoncé à sa succession. 929. — On ne peut représenter une personne vivante qu'en cas d'exhérédation ou d'incapacité. CHAPITRE IV. — DE L'ORDRE DE SUCCESSION DANS LES DIFFÉRENTES LIGNES. SECTION PREMIÈRE. — De la ligne directe descendante. 930. — La succession appartient, en premier lieu, à la ligne directe descendante. 931. — Les enfants et leurs descendants succèdent à leurs père et mère et autres ascendants, sans distinction de sexe ou d'âge, alors même qu'ils sont issus de différents mariages. 932. — Les enfants du défunt héritent en vertu de leur droit propre, ils se partagent la succession par portions égales. 933. — Les petits enfants et autres descendants héritent par droit de représentation, et si un d'eux était mort, laissant plusieurs héritiers, la part lui revenant se diviserait entre eux par portions égales. 934. — Si le défunt laisse des enfants, et des descendants d'autres enfants décédés, les premiers hériteront en vertu de leur droit propre, les autres par représentation. SECTION II. — De la ligne directe ascendante. 935. — A défaut d'enfants ou de descendants légitimes, les ascendants du défunt hériteront de lui et exclueront les collatéraux. 936. — Le père et la mère, s'ils survivent, héritent par parties égales. Si un seul survit, il recueillera toute la succession de leur enfant. 937. — A défaut du père et de la mère, la succession appartiendra aux ascendants du degré le plus proche. S'ils sont plusieurs d'égal degré, et de la même ligne, ils partageront la succession par tête, s'ils se trouvent de lignes différentes, mais d'égal degré, une moitié appartiendra aux ascendants paternels et l'autre aux ascendants maternels. Dans chaque ligne la division se fait par tête. 938. — La disposition des deux articles précédents ne porte point atteinte aux prescriptions des articles 811 et 812, qui sont applicables aux successions ab intestat comme aux successions testamentaires. SECTION III. — Des enfants naturels reconnus. 939. — A défaut de descendants et d'ascendants légitimes, la succession appartiendra en totalité aux enfants naturels reconnus et aux légitimés par lettre du Roi. 940. — Si les enfants naturels ou légitimés concourent avec les descendants d'un autre enfant naturel ou légitimé prédécédé, les premiers héritent en vertu de leur droit propre, les seconds par représentation. 941. — Les droits héréditaires, accordés à l'enfant naturel ou légitimé dans les deux articles précédents, se transmettent à sa mort à ses descendants, qui viennent par droit de représentation recueillir ses droits dans la succession de leur aïeul. 942. — Dans le cas où il existe des descendants et ascendants légitimes, les enfants naturels ou légitimés ne recueilleront dans la succession que la part accordée par les articles 840 et 841. 943. — L'enfant naturel et le légitimé n'ont pas le droit de succéder ab intestat aux enfants et aux ascendants légitimes du père ou de la mère qui l'a reconnu; ces derniers ne succèdent pas non plus à l'enfant naturel, ni au légitimé. 944. — Si l'enfant naturel ou légitimé meurt sans postérité légitime ou reconnue, le père ou la mère, qui l'aura reconnu, lui succédera pour le tout; s'ils l'ont reconnu l'un et l'autre et lui survivent, ils hériteront par parts égales. 945. — A défaut des ascendants naturels, la succession de l'enfant naturel ou légitimé appartiendra à ses frères et sœurs naturels, d'après les règles établies pour les frères et sœurs légitimes. SECTION IV. — De la succession des collatéraux et des conjoints. 946. — A défaut des personnes énumérées dans les trois sections précédentes, la succession sera dévolue aux parents collatéraux et au conjoint dans l'ordre établi par les articles suivants. 947. — S'il n'y a que des frères germains, ou de double lien, ils hériteront par portions égales. 948. — S'ils sont en concours avec des neveux, enfants de frères germains, les frères hériteront par tête, les neveux par souche. 949. — Si des frères ou sœurs de père et de mère sont en concours avec des utérins ou des consanguins, ils auront une double part dans la succession. 950. — Dans le cas où il n'existe que des frères utérins ou consanguins, tous héritent par égale part, sans distinction des biens. 951. — Les enfants de frères utérins ou consanguins succèdent par tête ou par souche, selon les règles établies pour les frères germains. 952. — A défaut de frères et de neveux, et de leurs descendants, qu'ils soient ou non de double lien, la totalité des biens du défunt appartiendra au conjoint survivant qui n'aura pas été séparé de corps par jugement définitif. 953. — Dans le cas où il y existe des frères, ou des enfants de frère, le veuf ou la veuve aura droit de recueillir, concurremment avec eux, l'usufruit de la part successorale fixée par l'article 837. 954. — En l'absence de frères, de descendants de frère et de conjoint survivant, les autres parents collatéraux recueilleront la succession du défunt. La succession leur appartiendra sans distinction de lignes, et sans préférence entre eux à raison du double lien. 955. — Le droit de succession ab intestat ne va pas au delà du sixième degré de parenté collatérale. SECTION V. — De la succession de l'État. 956. — A défaut des personnes qui ont droit d'héritier conformément aux dispositions des sections précédentes, l'État héritera, et il distribuera les biens à des établissements de bienfaisance et d'instruction dans l'ordre suivant. 1° Aux établissements de bienfaisance municipale et aux écoles gratuites du domicile du défunt; 2° Aux établissements de même nature de la province du défunt; 3° Aux établissements de bienfaisance et d'instruction ayant un intérêt général. 957. — Les droits et les obligations des établissements de bienfaisance ou d'instruction, dans le cas de l'article précédent, seront les mêmes que ceux des autres héritiers. 958. — Pour que l'État puisse s'emparer des biens héréditaires, il y aura judiciairement une déclaration d'héritier, lui adjugeant les biens à défaut d'héritiers légitimes. CHAPITRE V. — DISPOSITIONS COMMUNES AUX SUCCESSIONS TESTAMENTAIRES OU AUTRES. SECTION PREMIÈRE. — Des précautions à prendre lorsque la veuve est enceinte. 959. — Lorsque la veuve croit être enceinte, elle devra porter ce fait à la connaissance de ceux qui ont sur la succession un droit de telle nature que la naissance de l'enfant posthume le diminuera ou le fera disparaître. 960. — Les intéressés, dont parle l'article précédent, pourront demander au juge municipal ou au juge de première instance, là où il en existe, qu'on prenne les mesures nécessaires pour éviter une supposition de part, ou pour que l'enfant à naître ne passe pas pour viable, s'il ne l'est en réalité. Le juge veillera à ce que les mesures qu'il prescrit ne portent atteinte nia la pudeur, ni à la liberté de la veuve. 961. — Que la veuve ait ou n'ait pas donné l'avis dont parle l'article 959, elle devra avertir les mêmes intéressés lorsqu'approchera l'époque de sa délivrance. Les intéressés auront droit de nommer une personne de confiance qui s'assurera de la réalité de la grossesse. Si la personne désignée est récusée par la malade, le juge fera la nomination, mais il désignera toujours un médecin ou une femme. 962. — L'omission de ces formalités ne nuira pas à la légitimité de l'enfant, qui pourra s'établir, en cas de contestation, vis-à-vis de la mère et de l'enfant dûment représentés. L'action que les ayants droit ont pour l'attaquer se prescrira dans les délais fixés par l'article 113. 963. — Lorsque le mari a reconnu, dans un acte public ou privé, la certitude de la grossesse de son épouse, celle-ci sera dispensée de donner l'avis prévu par. l'article 959, mais elle devra se conformer aux prescriptions de l'article 961. 964. — La veuve qui est enceinte, même si elle est riche, devra être nourrie sur les biens de la succession, en tenant compte de la part que le posthume en recueillera s'il naît viable. 965. — Pendant le temps qui s'écoule avant l'accouchement ou avant qu'on acquiert la certitude qu'il n'aura pas lieu, soit qu'il y ait eu fausse couche, soit que le délai des plus longues grossesses soit expiré, on pourvoira à la conservation et à l'administration des biens en la forme établie pour l'exécution judiciaire d'un testament. 966. — Le partage de la succession sera suspendu jusqu'à l'accouchement ou l'avortement, ou jusqu'à ce que l'expiration du terme prouve que la veuve n'était pas enceinte. Néanmoins l'administrateur pourra payer les créanciers sur ordre judiciaire préalable. 967. — Après l'accouchement, l'avortement ou l'expiration des délais de gestation, l'administrateur des biens héréditaires cessera ses fonctions et rendra compte de son administration aux héritiers, ou à leurs représentants légitimes. SECTION II. — Des biens sujets mis en réserve. 968. — En outre de la réserve imposée en l'article 811, le veuf ou la veuve qui contracte un second mariage sera obligé de réserver aux enfants et descendants du premier la propriété de tous les biens qu'il a reçus de son époux défunt par testament, par succession ab intestat, donation ou tout autre titre gratuit, sauf toutefois sa moitié dans les acquêts. 969. — La disposition de l'article précédent s'applique aux biens que le veuf ou la veuve acquiert aux mêmes titres de l'un des enfants du premier lit et à ceux qu'il a reçus des parents du défunt, mais à cause de lui. 970. — Cette obligation de réserver cessera lorsque les enfants d'un mariage, majeurs et ayant droit à ces biens, y renonceront, ou lorsqu'il s'agira de choses données ou laissées à leurs père ou mère par des enfants qui les savaient mariés pour la seconde fois. 971. — Cette réserve cessera encore si, au décès du père ou de la mère qui a convolé en secondes noces, il n'existe pas d'enfants légitimes du premier mariage. 972. — Pour s'acquitter de cette obligation de réserve, le père ou la mère, marié en secondes noces, pourra donner, par préciput, les biens réservés à l'un des enfants ou descendants du premier mariage, conformément aux dispositions de l'article 823. 973. — Si le père ou la mère n'a pas usé du tout ou en partie de la faculté concédée par l'article précédent, les enfants et descendants légitimes du premier mariage succéderont aux biens, soumis à la réserve, conformément aux règles prescrites pour la succession en ligne descendante, alors même qu'en vertu d'un premier testament ils auraient eu des parts inégales dans la succession du premier décédé des époux, ou qu'ils auraient renoncé ou répudié sa succession. 974. — Les aliénations des biens immeubles, soumis à réserve, faites par le conjoint survivant avant la célébration du second mariage, seront valables, mais il aura l'obligation, dès la célébration, d'en garantir le prix aux enfants et descendants du premier mariage. 975. — L'aliénation des biens immeubles mis en réserve, faite par le veuf ou la veuve après la célébration du second mariage, ne subsistera que s'il ne laisse pas d'enfants ou de descendants légitimes du premier lit; le tout sans préjudice des dispositions de la loi hypothécaire. 976. — Les aliénations de biens meubles, faites avant ou après la célébration du second mariage, seront valables, mais toujours sauf l'obligation d'indemniser. 977. — Le veuf ou la veuve, au moment du nouveau mariage, fera inventorier tous les biens mis en réserve, et mentionner sur le registre de la propriété que les immeubles sont mis en réserve, conformément aux prescriptions de la loi hypothécaire; puis estimer les meubles. 978. — En outre, lors de sa seconde union, le veuf ou la veuve sera tenu de garantir par hypothèque: 1° La restitution en nature des meubles non aliénés au moment de son décès, s'il s'agit de paraphernaux ou de meubles dotaux non estimés; ou bien le paiement de leur valeur, si la dot était estimée; 2° Le paiement des dégradations occasionnées ou qu'occasionnerait sa faute ou sa négligence; 3° La restitution du prix reçu pour les meubles aliénés, ou la remise de la valeur qu'ils avaient au temps de leur aliénation, si elle avait été faite à titre gratuit. 4° La valeur des immeubles valablement aliénés. 979. — Les dispositions des articles précédents, en cas de second mariage, s'appliquent également aux troisièmes et subséquents. 980. — L'obligation de réserver, imposée par les articles précédents, est applicable au veuf et à la veuve qui, bien que ne contractant pas un nouveau mariage, a pendant son veuvage, un enfant naturel reconnu, ou judiciairement déclaré tel. Cette obligation aura son effet du jour de la naissance. SECTION III. — Du droit d'accroissement. 981. — Dans les successions légitimes, la part de celui qui répudie la succession accroît toujours à ses cohéritiers. 982. — Pour que, dans une succession testamentaire, il y ait lieu à accroissement, il faut: 1° Que deux ou plusieurs personnes soient appelées à une même succession, ou à une même portion de cette succession, sans désignation de parts; 2° Qu'un des appelés meure avant le testateur, ou qu'il renonce à la succession, ou qu'il soit incapable de la recueillir. 983. — On considérera la désignation comme faite par parts lorsque le testateur a fixé expressément la quote-part de chaque héritier. Les expressions par moitié, ou par portions égales ou autres; qui désignent une portion aliquote, mais ne fixent pas sa valeur en argent ou par des désignations qui rendent chacun propriétaire d'un ensemble de biens distincts, n'excluent pas le droit d'accroissement. 984. — Les héritiers, au profit desquels accroît la succession, succèdent à tous les droits et obligations qu'aurait eus celui qui n'a pu ou voulu la recevoir. 985. — Entre héritiers à réserve, le droit d'accroissement aura lieu seulement lorsque la partie de libre disposition est laissée à deux ou à plusieurs d'entre eux, et à un étranger. Si la partie refusée est la réserve, les cohéritiers succéderont en vertu de leur droit propre et non par droit d'accroissement. 986. — Dans une succession testamentaire, lorsqu'il n'y a pas lieu à droit d'accroissement, la part vacante d'un institué, à qui on n'a substitué personne, passera aux héritiers légitimes du testateur qui la recueilleront avec les mêmes charges et obligations. 987. — Le droit d'accroissement aura également lieu entre les légataires et les usufruitiers, dans les termes établis pour les héritiers. SECTION IV. — De l'acceptation et de la révocation des legs. 988. — L'acceptation et répudiation d'une succession sont des actes complètement volontaires et libres. 989. — Les effets de l'acceptation et de la répudiation rétroagissent toujours au jour de la mort de la personne dont on hérite. 990. — L'acceptation ou la répudiation d'une succession ne peut se faire pour partie, à terme ou sous condition. 991. — Nul ne pourra accepter ni répudier une succession, sans être certain de la mort du de cujus et de son droit héréditaire. 992. — Tous ceux, qui ont la libre disposition de leurs biens, peuvent accepter ou refuser une succession. La succession, dévolue à des mineurs ou à des incapables, sera acceptée dans les termes du n°10 de l'article 269. Si le tuteur l'accepte de lui-même, l'acceptation sera censée faite sous bénéfice d'inventaire. L'acceptation des valeurs laissées aux pauvres sera faite par les personnes, désignées par le testateur pour les partager et les distribuer, et à défaut, par celles qu'énumère l'article 749, et on la considérera également comme acceptée sous bénéfice d'inventaire. 993. — Les représentants légitimes des associations, corporations et fondations capables d'acquérir pourront accepter la succession qui leur est laissée, mais, pour y renoncer, l'autorisation du juge, obtenue en présence du ministère public, leur sera nécessaire. 994. — Les établissements publics officiels ne pourront accepter ou répudier une succession sans l'autorisation du gouvernement. 995. — La femme mariée ne pourra accepter ou refuser une succession sans le consentement de son mari, ou à son défaut, sans l'autorisation du juge. Dans ce dernier cas, les biens existant déjà dans la communauté conjugale ne répondront point des dettes héréditaires. 996. — Les sourds-muets, qui savent lire et écrire, accepteront ou répudieront une succession par eux-mêmes ou par l'intermédiaire d'un procureur. S'ils ne savent ni lire, ni écrire, leur tuteur l'acceptera sous bénéfice d'inventaire en se soumettant aux prescriptions de l'article 218. 997. — L'acceptation et la répudiation d'une succession, une fois faites, sont irrévocables et elles ne pourront être attaquées à moins qu'elles ne soient affectées d'un des vices du consentement, ou qu'il n'apparaisse un testament inconnu. 998. — Une succession peut être acceptée purement et simplement, ou sous bénéfice d'inventaire. 999. — L'acceptation pure et simple peut être expresse ou tacite. Est expresse, celle qui se fait dans un document public ou privé. Est tacite, celle qui se fait par des actes qui supposent nécessairement la volonté d'accepter, ou qu'on n'aurait pas le droit de faire sans la qualité d'héritier. Les actes conservatoires ou d'administration provisoire n'impliquent pas acceptation de la succession, si en les faisant on n'a pas pris le titre et la qualité d'héritier. 1000. — On considère la succession comme acceptée: 1° Lorsque l'héritier vend, donne ou cède son droit à un étranger ou à un ou à tous ses cohéritiers; 2° Lorsque l'héritier renonce, même gratuitement, au profit d'un ou de plusieurs cohéritiers; 3° Lorsqu'il renonce, moyennant paiement, au profit de tous ses cohéritiers indistinctement; toutefois, si la renonciation est gratuite et que les cohéritiers, au profit desquels elle est faite, soient ceux-là même qui doivent par accroissement profiter de la part, objet de la renonciation, on ne considérera pas la succession comme acceptée. 1001. — Si l'héritier refuse la succession au préjudice de ses créanciers, ceux-ci pourront demander au juge de les autoriser à accepter en son nom. Cette acceptation ne profitera qu'aux créanciers et dans la mesure nécessaire pour payer leurs créances. Le surplus, s'il s'en trouve, n'appartiendra en aucun cas au renonçant, mais il sera attribué aux ayants droit d'après les règles établies par ce Code. 1002. — Les héritiers, qui ont soustrait ou caché quelques valeurs successorales, perdent le droit de renonciation, et ont le caractère d'héritiers purs et simples sans préjudice des peines qu'ils ont pu encourir. 1003. — Par l'acceptation pure et simple ou sous bénéfice d'inventaire, l'héritier sera tenu de toutes les charges de la succession, non seulement sur les biens de la succession, mais encore sur ses biens propres. 1004. — Jusqu'à l'expiration du neuvième jour après la mort de celui dont la succession est ouverte, on ne pourra intenter d'action contre l'héritier pour le faire accepter ou renoncer. 1005. — Si un tiers, intéressé à ce que l'héritier accepte ou répudie la succession, intente une action, le juge devra assigner audit héritier un délai ne dépassant pas trente jours pour faire sa déclaration, en l'avertissant que, s'il ne le fait, on considérera la succession comme acceptée. 1006. — Par la mort de l'héritier sans que la succession ait été acceptée ou répudiée, son droit passe à ses héritiers. 1007. — Lorsque plusieurs héritiers seront appelés à la succession, les uns pourront l'accepter, les autres la répudier. Chacun des héritiers aura encore la liberté de l'accepter purement et simplement ou sous bénéfice d'inventaire. 1008. — La renonciation à une succession devra se faire par acte public et authentique, ou par un écrit présenté au juge compétent pour faire administrer la succession testamentaire ou ab intestat. 1009. — Si celui, qui est appelé à une même succession par un testament et comme héritier ab intestat, la répudie pour le premier titre, il sera censé la répudier pour les deux. S'il la refuse comme héritier ab intestat sans connaître son titre testamentaire, il pourra encore l'accepter de ce chef. SECTION V. — Du bénéfice d'inventaire et du droit de délibérer. 1010. — Tout héritier peut accepter une succession sous bénéfice d'inventaire, même si le testateur le lui a interdit. Il pourra aussi demander la confection d'un inventaire avant d'accepter ou de répudier la succession, pour délibérer à ce sujet. 1011. — L'acceptation de la succession sous bénéfice d'inventaire pourra se faire devant notaire ou par un acte dressé par l'un des juges compétents pour préparer le jugement de la succession testamentaire ou ab intestat. 1012. — Si l'héritier, dont parle l'article précédent, se trouve en pays étranger, il pourra faire cette déclaration devant l'agent diplomatique ou consulaire Espagnol, quia qualité pour exercer les fonctions de notaire, dans le lieu où on dresse acte de la déclaration. 1013. — La déclaration, dont parlent les articles précédents, ne produira aucun effet si elle n'est précédée ou suivie d'un inventaire fidèle et exact de tous les biens de la succession, dressé avec les formalités et dans les délais fixés par les articles suivants. 1014. — L'héritier, qui a en sa possession tout ou partie des biens de la succession, et qui veut profiter du bénéfice d'inventaire et du droit de délibérer, devra le déclarer au juge compétent pour pourvoir à l'administration de la succession testamentaire ou ab intestat, dans les dix jours suivant celui où il sait être héritier, s'il réside dans le lieu où mourut celui dont la succession est ouverte. S'il était ailleurs, le délai sera de trente jours. Dans l'un et dans l'autre cas, l'héritier devra demander à la fois la confection de l'inventaire et la citation des créanciers et des légataires pour qu'ils y assistent, s'ils le jugent convenable. 1015. — Lorsque l'héritier a la possession de tout ou partie des biens de la succession, et qu'il n'a fait aucun acte de gestion comme héritier, les délais indiqués dans l'article précédent se compteront à partir du jour où expire celui que le juge aura fixé pour l'acceptation ou la répudiation, conformément à l'article 1005, ou du jour où il aura accepté ou fait acte d'héritier. 1016. — Hors des cas prévus par les deux articles précédents, si aucune demande n'a été formée contre l'héritier, il pourra accepter sous bénéfice d'inventaire, ou avec droit de délibérer, tant que l'action en pétition d'hérédité n'est pas prescrite. 1017. — L'inventaire se commencera dans les trente jours suivant celui de la citation des créanciers et légataires, et se terminera dans soixante autres jours. Si à raison de l'éloignement des biens, ou de leur grande quantité, ou de toute autre juste cause, les soixante jours paraissent insuffisants, le juge pourra proroger ce délai pour le temps qu'il estimera nécessaire, sans qu'il puisse excéder une année. 1018. — Si, par la faute ou la négligence de l'héritier, on ne commençait l'inventaire, ou on ne le terminait pas dans les délais et avec les solennités prescrites par les articles précédents, on considérera la succession comme acceptée purement et simplement. 1019. — L'héritier, qui se serait réservé le droit de délibérer, devra déclarer au Tribunal, dans les trente jours suivant celui de la clôture de l'inventaire, s'il accepte ou répudie la succession. Ce délai passé sans que la déclaration ait été faite, on considérera la succession comme acceptée purement et simplement. 1020. — En tout cas, pendant la confection de l'inventaire et jusqu'à l'acceptation de la succession, le juge pourra, à la requête de la partie intéressée, pourvoir à l'administration et à la garde des biens héréditaires, conformément aux prescriptions de la loi de procédure civile pour les successions testamentaires. 1021. — Si celui qui réclame judiciairement une succession, qui est possédée par un autre depuis plus d'un an, triomphe dans son action, il n'aura pas besoin de faire inventaire pour jouir de ce bénéfice et il ne répondra des charges successorales que sur les biens qui lui seront remis. 1022. — L'inventaire, dressé par l'héritier qui renonce ensuite à la succession, profitera à ceux qui lui sont substitués et aux héritiers ab intestat; pour ces derniers, les trente jours pour délibérer et faire la déclaration prévue par l'article 1019, se compteront à partir du jour suivant celui où ils ont connu la renonciation. 1023. — Le bénéfice d'inventaire produit au profit de l'héritier les effets suivants: 1° L'héritier n'est obligé de payer les dettes et autres charges de la succession que jusqu'à concurrence des biens qui la composent; 2° Il conserve contre l'avoir héréditaire tous les droits qu'il avait contre le défunt; 3° 11 ne confond en aucun cas, à son préjudice, ses biens propres avec ceux de la succession. 1024. — L'héritier perdra le bénéfice d'inventaire: 1° S'il a sciemment omis de mentionner dans l'inventaire quelqu'un des biens, droits et actions de la succession; 2° Si, avant d'acquitter la charge des dettes et legs, il aliène des biens de la succession sans l'autorisation de justice, ou de tous les intéressés, ou s'il ne fait du prix l'emploi imposé lors de la concession de l'autorisation. 1025. — Pendant la confection de l'inventaire et les délais pour délibérer, les légataires ne pourront demander la délivrance de leurs legs. 1026. — Jusqu'au paiement de tous les créanciers connus et des légataires, on considérera la succession comme étant en administration. L'administrateur, que ce soit l'héritier lui-même ou tout autre personne, aura à ce titre le droit de représenter la succession, d'exercer les actions qui lui appartiennent et de la défendre contre les procès intentés contre elle. 1027. — L'administrateur ne pourra payer les legs qu'après avoir payé tous les créanciers. 1028. — S'il y a contestation judiciaire sur le droit de préférence appartenant aux diverses créances, elles seront payées dans l'ordre et selon la mesure que prescrit la sentence définitive d'attribution. En l'absence de contestation entre les créanciers, on paiera ceux qui se présenteront les premiers; toutefois, s'il est certain qu'une créance est préférable, le paiement ne se fera qu'après avoir fait une réserve préalable en faveur du créancier préférable. 1029. — Si, après le paiement des legs, on découvre de nouveaux créanciers, ils ne pourront agir que contre les légataires, s'il n'y a point dans la succession de biens suffisants pour les payer. 1030. — Lorsque, pour le paiement des créances et des legs, il est nécessaire de vendre les biens héréditaires, on les réalisera en la forme établie par la loi de procédure civile pour les successions testamentaires et ab intestat, sauf l'accord de tous les héritiers, créanciers et légataires. 1031. — Si les biens successoraux ne suffisent pas pour payer les dettes et les legs, l'administrateur rendra compte de son administration aux créanciers et aux légataires non intégralement payés, et sera responsable du préjudice causé à la succession par sa faute ou sa négligence. 1032. — Après le paiement des legs et des dettes, l'héritier aura la pleine jouissance du reste de la succession. Si la succession a été administrée par un tiers, il rendra compte à l'héritier de son administration et aura la responsabilité dont parle l'article précédent. 1033. — Le coût de l'inventaire, et les autres frais auxquels donnent lieu l'administration de la succession bénéficiaire et la défense de ses droits seront à la charge de cette succession; sauf les dépens auxquels l'héritier aurait été condamné personnellement à cause de son dol, ou de sa mauvaise foi. Il en sera de même si l'héritier renonce à la succession après avoir profité du délai pour délibérer. 1034. — Les créanciers particuliers de l'héritier ne pourront s'immiscer dans les opérations de la succession bénéficiaire jusqu'au paiement des créanciers et des légataires; mais ils pourront obtenir la conservation et la mise en séquestre de ce qui peut rester au profit de l'héritier. CHAPITRE VI. — DU RAPPORT ET DU PARTAGE. SECTION PREMIÈRE. — Du rapport. 1035. — L'héritier à réserve, appelé avec d'autres réservataires à une succession, devra rapporter à la masse héréditaire les biens ou valeurs qu'il aurait reçus du de cujus pendant sa vie, en dot, donation ou à tout autre titre gratuit, pour l'imputer dans le calcul de la réserve et de sa part. 1036. — Le rapport n'aura pas lieu entre héritiers à réserve, si le donateur l'a prescrit expressément, ou si le donataire refuse la succession, à moins que la donation ne soit réductible comme excessive. 1037. — Ce qui a été laissé par testament n'est pas sujet à rapport, à moins que le testateur n'en ait disposé autrement, et en laissant toujours la réserve intacte. 1038. — Lorsque les petits enfants succèdent à leur aïeul par représentation de leur père et qu'ils se trouvent concourir avec leurs oncles ou leurs cousins, ils rapportent tout ce que leur père, s'il vivait, aurait dû rapporter, même s'ils n'en ont pas hérité. Ils rapporteront également ce qu'ils auraient reçu du défunt pendant sa vie, à moins que le testateur n'ait prescrit le contraire; dans ce cas, on devra respecter sa volonté si elle ne porte pas atteinte à la réserve des cohéritiers. 1039. — Les père et mère ne seront pas obligés de rapporter à la succession de leurs ascendants ce qu'ils auraient donné à leurs enfants. 1040. — Les donations faites à l'époux de l'enfant ne seront pas non plus soumises à rapport; toutefois, si elles ont été faites conjointement aux deux époux, l'enfant sera obligé de rapporter la moitié de la chose donnée. 1041. — Ne seront pas sujettes à rapport les dépenses d'aliments, d'éducation, de soins de maladie, alors même qu'elles sont extraordinaires, d'apprentissage, d'habillement ordinaire, ni les cadeaux d'usage. 1042. — Ne sont pas soumises au rapport, à moins que le père ne le prescrive ou qu'elles ne portent atteinte à la réserve, les dépenses faites pour donner aux enfants une profession libérale ou artistique; toutefois en procédant au rapport, on retranchera ce que l'enfant aurait dépensé en vivant dans la maison et la compagnie de ses parents. 1043. — Seront rapportables les sommes employées par le père pour racheter ses enfants du service militaire, payer ses dettes, lui obtenir un titre honorifique et les autres dépenses analogues. 1044. — Les présents de noce consistant en joyaux, vêtements et trousseau ne seront pas réduits comme excessifs, à moins qu'ils n'excèdent le dixième ou plus de la quotité disponible par testament. 1045. — Il n'y a pas lieu de rapporter et de partager les choses données par donation ou dot, mais leur valeur au temps de la donation ou de la dot, alors même qu'on ne les aurait pas estimées. 1046. — La dot ou la donation faite par deux époux se rapportera par moitié à la succession de chacun d'eux. Celle faite par un seul se rapportera à sa succession. 1047. — Le donateur prendra en moins dans la masse héréditaire autant qu'il aura reçu; ses cohéritiers préléveront l'équivalent, autant que possible en biens de même nature, espèce et qualité. 1048. — Lorsque les prescriptions de l'article précédent ne peuvent se réaliser, et que les biens donnés sont des immeubles, les cohéritiers auront droit d'être indemnisés, en argent ou en valeurs mobilières, du montant de l'estimation; et s'il n'y a ni deniers, ni valeurs dans la succession, on vendra publiquement d'autres biens en quantité suffisante. Lorsque les biens donnés seront meubles, les cohéritiers auront droit seulement à être indemnisés en d'autres meubles de la succession, estimés à leur juste prix, et laissés à leur libre choix. 1049. — Les fruits et les intérêts des biens sujets à rapport ne sont dus à la masse héréditaire que du jour de l'ouverture de la succession. Pour les fixer, on les comparera aux rentes et produits des biens héréditaires de même nature que ceux qui sont rapportés. 1050. — Si un débat surgit entre les cohéritiers sur l'obligation de rapporter ou sur les objets soumis au rapport, cela n'empêchera pas de réclamer le partage, en fournissant la garantie correspondante. SECTION II. — Du partage. 1051. — Nul cohéritier ne pourra être tenu de rester dans l'indivision successorale, à moins que le testateur ne défende expressément le partage. Toutefois, malgré ses défenses, la division aura toujours lieu s'il survient une des causes d'extinction de société. 1052. — Tout cohéritier, qui a la libre administration et disposition de ses biens, pourra en tout temps demander le partage de la succession. Leurs représentants légitimes devront le demander pour les incapables et les absents. 1053. — La femme ne peut demander le partage des biens sans l'autorisation de son mari et du juge, s'il y échet. Si le mari le demande au nom de sa femme, il ne le fera qu'avec son consentement. Les cohéritiers de la femme ne pourront demander le partage sans intenter leur action contre elle et contre son mari. 1054. — Les héritiers conditionnels ne pourront demander le partage de la succession tant que la condition n'est pas accomplie. Mais les autres cohéritiers pourront le demander, en assurant complétement l'exercice du droit des premiers, au cas où elle se réaliserait; le partage sera considéré comme conditionnel jusqu'à ce qu'on sache que la condition est défaillie ou qu'elle ne peut s'accomplir. 1055. — Si, avant de procéder au partage, un des cohéritiers vient à mourir, laissant un ou plusieurs héritiers, il suffira que l'un d'eux le demande; mais tous devront dans cette hypothèse comparaître par un même représentant. 1056. — Lorsque le testateur aura fait, par acte entre vifs ou de dernière volonté, le partage des biens de sa succession, on l'acceptera en tant qu'il ne porte pas atteinte à la réserve des réservataires. Le père, qui dans l'intérêt de sa famille, désire conserver intacte une exploitation agricole, industrielle ou commerciale, pourra user de la faculté accordée par cet article, en prescrivant de fournir en argent la réserve de ses autres enfants. 1057. — Le testateur pourra confier par acte « inter vivos ou mortis causa », pour après son décès, son pouvoir de faire le partage à tout individu qui ne sera pas un de ses héritiers. La disposition de cet article et du précédent sera observée, même si parmi les cohéritiers il en a quelqu'un de mineur ou de sujet à tutelle; mais le commissaire devra, dans ce cas, faire l'inventaire les biens de la succession et y appeler les cohéritiers, les créanciers et les légataires. 1058. — Lorsque le testateur n'aura pas fait le partage, ni confié à d'autres cette faculté, les héritiers majeurs, ayant la libre disposition de leurs biens, pourront partager la succession de la façon qui leur semblera convenable. 1059. — Lorsque les héritiers majeurs ne s'entendront pas sur la manière de faire le partage, ils conserveront intégralement leur droit de l'exercer en la forme prévue par la loi de procédure civile. 1060. — Lorsque les mineurs sont soumis à la puissance paternelle et représentés au partage par leur père ou s'il y échet par leur mère, l'intervention et l'approbation du juge ne sera pas nécessaire. 1061. — Dans le partage d'une succession, on doit autant que possible assurer l'égalité, en faisant des lots, et en assignant à chacun des cohéritiers des choses de même valeur, qualité et espèce. 1062. — Lorsqu'une chose est indivisible ou qu'elle perdrait beaucoup à être partagée, on pourra l'adjuger à un seul héritier, sauf à lui tenir compte en argent de la différence. Mais il suffira qu'un seul des héritiers le demande pour qu'elle soit vendue en vente publique, avec admission d'adjudicataires étrangers. 1063. — Les cohéritiers se devront compte réciproquement des rentes et fruits de la succession qu'ils auraient perçus, des dépenses utiles et nécessaires qu'ils auraient faites, et des dommages qu'ils auraient causés par malice ou négligence. 1064. — Les frais de partage, faits dans l'intérêt commun de tous les héritiers, seront prélevés sur la succession; ceux faits dans l'intérêt particulier de l'un d'eux restera à sa charge. 1065. — Les titres d'acquisition ou de propriété seront remis à l'héritier adjudicataire du fonds ou des fonds auxquels ils se rapportent. 1066. — Lorsque le même titre s'applique à plusieurs fonds, adjugés à des cohéritiers différents, ou à un seul qui a été partagé entre deux ou plusieurs cohéritiers, le titre appartiendra à celui qui a le plus d'intérêts dans ce fonds ou ces fonds, et il fournira des copies aux autres cohéritiers aux frais de la succession. Si l'intérêt est égal, le titre sera remis au mâle, et, s'il y en a plusieurs, à l'aîné. Si le titre est original, celui à qui on le remettra devra le représenter aux intéressés lorsqu'ils le demanderont. 1067. — Si, avant le partage, un des héritiers vend à un étranger son droit héréditaire, tous les cohéritiers ou l'un d'eux pourront se faire subroger aux droits de l'acheteur, en lui remboursant le prix de la vente; mais cela aura lieu dans le délai d'un mois, à dater du jour où l'acheteur a fait savoir la vente. SECTION III. — Des effets du partage. 1068. — Le partage légalement fait confère à chaque héritier la propriété exclusive des biens qui lui ont été attribués. 1069. — Après le partage, les cohéritiers sont réciproquement tenus, en cas d'éviction, à la garantie des biens attribués. 1070. — L'obligation dont parle l'article précédent cessera dans les cas suivants: 1° Lorsque le testateur a fait lui-même le partage, à moins qu'il n'apparaisse ou qu'on ne puisse raisonnablement présumer qu'il a voulu le contraire, et toujours la réserve étant intacte; 2° Lorsqu'on l'a expressément stipulé lors du partage; 3° Lorsque l'éviction procède d'une cause postérieure au partage, ou lorsqu'elle a été occasionnée par la faute du copartageant. 1071. — L'obligation réciproque des cohéritiers en cas d'éviction est proportionnée à leur part dans la succession; mais, si l'un d'eux est insolvable, les autres en répondront sur leur part dans la même proportion, en déduisant la part proportionnelle de celui qui doit être indemnisé. Ceux, qui paieront pour l'insolvable, conserveront une action contre lui, s'il revient à meilleure fortune. 1072. — Si on attribue une créance comme recouvrable, les cohéritiers ne seront pas responsables de l'insolvabilité postérieure du débiteur de la succession, ils ne répondront que de sa solvabilité au moment du partage. Pour les créances classées comme irrecouvrables, il n'y a pas de responsabilité, mais, si on les recouvre en tout ou en partie, la somme reçue sera distribuée proportionnellement entre les cohéritiers. SECTION IV. — De la rescision du partage. 1073. — Les partages peuvent se rescinder pour les mêmes causes que les obligations. 1074. — On pourra encore rescinder les partages pour cause de lésion de plus du quart, en tenant compte de la valeur des choses au moment où elles furent attribuées. 1075. — Le partage fait par le défunt ne peut être attaqué pour lésion, à moins qu'il ne porte atteinte aux droits des héritiers réservataires, ou qu'il n'apparaisse ou qu'on ne puisse raisonnablement présumer que la volonté du testateur ait été autre. 1076. — L'action en rescision pour cause de lésion durera quatre ans à dater de la confection du partage. 1077. — L'héritier interpellé pourra, à son choix, indemniser du préjudice ou consentir à un nouveau partage. L'indemnité peut se payer en argent ou en biens de même nature que ceux d'où résulte le préjudice. Si on procède à un nouveau partage, il ne comprendra pas les biens de ceux qui ont subi un préjudice, ni les biens de ceux qui n'ont pas reçu plus que leur part. 1078. — L'héritier, qui aura aliéné la totalité ou une partie considérable des immeubles à lui attribués, ne pourra intenter l'action en rescision pour lésion. 1079. — L'omission d'un ou plusieurs objets ou valeurs de la succession ne donne pas lieu à rescision pour lésion, mais à un complément dans lequel on partage les valeurs et objets omis. 1080. — Le partage, fait en omettant un des héritiers, ne sera pas rescindé, à moins qu'on ne prouve qu'il y a eu mauvaise foi des autres intéressés; mais ils seront tenus de payer, à celui qui a été omis, la part proportionnelle qui lui appartient. 1081. — Le partage, fait avec une personne qu'on croyait héritière, mais qui ne l'était pas, est nul. SECTION V. — Du paiement des dettes héréditaires. 1082. — Les créanciers, dont les droits sont reconnus, pourront s'opposer au partage de la succession jusqu'à ce qu'on les paie ou qu'on leur garantisse l'importance de leurs créances. 1083. — Les créanciers d'un ou de plusieurs cohéritiers pourront intervenir à leurs frais au partage, pour éviter qu'il ne soit fait en fraude de leurs droits. 1084. — Après le partage, les créanciers pourront exiger le paiement intégral de leurs créances de l'un des cohéritiers n'ayant pas accepté la succession sous bénéfice d'inventaire. Dans le cas où le bénéfice a été admis, le créancier demandera son paiement jusqu'à concurrence de la part recueillie par l'héritier. Dans l'un et l'autre cas, l'héritier actionné aura le droit d'appeler en garantie ses cohéritiers et de leur demander leur part contributive, à moins qu'une disposition du testament ou une clause du partage ne l'ait seul chargé de la dette. 1085. — Le cohéritier, qui aura payé plus que sa part dans la succession pourra réclamer aux autres leur part proportionnelle. Il en sera de même lorsqu'il aura payé intégralement une dette hypothécaire ou consistant en un corps certain. L'héritier ne pourra réclamer de ses cohéritiers que leur part proportionnelle, alors même que le créancier lui aurait cédé son action, en le subrogeant dans ses droits. 1086. — Si un fonds successoral est grevé d'une rente ou charge perpétuelle, on ne procédera à son extinction, même si elle est rachetable, que si la majorité des héritiers y consent. A défaut de consentement, ou si la charge n'est pas rachetable, on diminuera sa valeur de l'estimation de l'immeuble, et il passera avec la charge dont il est grevé dans les lots et attributions. 1087. — Le cohéritier, créancier du défunt, peut réclamer de ses cohéritiers le paiement de sa créance, déduction faite de sa part contributive comme héritier, sans préjudice de ce qui est établi en la section cinquième du chapitre VI de ce titre. LIVRE QUATRIÈME DES OBLIGATIONS ET DES CONTRATS. TITRE PREMIER. — DES OBLIGATIONS. CHAPITRE PREMIER. — DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 1088. — Toute obligation consiste à donner, faire ou ne pas faire une chose. 1089. — Les obligations naissent de la loi, des contrats et quasi-contrats, des actes et des omissions illicites ou dans lesquels il y a quelque faute ou quelque négligence. 1090. — Les obligations dérivées de la loi ne se présument pas. On ne peut exiger que celles qui sont déterminées par le Code ou par les lois spéciales, elles sont régies d'après les prescriptions de la loi qui les a établies; et si elle n'a rien prévu, par les dispositions de ce Code. 1091. — Les obligations, qui naissent des contrats, ont force de loi entre les parties contractantes et doivent s'exécuter selon leurs termes. 1092. — Les obligations civiles, qui naissent des fautes et délits, sont régies par les dispositions du Code pénal. 1093. — Celles qui dérivent des actes ou omissions, mais où il n'y a pas faute ou négligence punie par la loi, restent soumises aux dispositions du chapitre II du titre XVI de ce livre. CHAPITRE II. — DE LA NATURE ET DE L'EFFET DES OBLIGATIONS. 1094. — Celui, qui est obligé à donner une chose, doit également la conserver avec le soin propre à un bon père de famille. 1095. — Le créancier a droit aux fruits de la chose du moment où naît l'obligation de la lui livrer. Néanmoins il n'acquiert pas de droit réel sur elle tant qu'elle ne lui a pas été livrée. 1096. — Lorsque la chose à livrer est déterminée, le créancier, indépendamment du droit que lui accorde l'article 1101, peut demander à son débiteur d'en effectuer la livraison. Si la chose est indéterminée, ou désignée par son genre, il pourra demander l'accomplissement de l'obligation aux frais du débiteur. Si l'obligé est mis en demeure, ou s'il a promis de livrer la même chose à deux personnes différentes, il sera responsable des cas fortuits jusqu'à ce qu'il effectue la délivrance. 1097. — L'obligation de donner une chose déterminée comprend celle de délivrer tous ses accessoires, alors même qu'on ne les aurait pas mentionnées dans le contrat. 1098. — Si celui qui est tenu de faire une chose ne la fait pas, on la fera exécuter à ses frais. Il en sera de même s'il l'a faite contrairement aux termes de son obligation. On pourra, en outre, ordonner la destruction de ce qui aura été mal fait. 1099. — La disposition de l'article précédent sera observée également lorsque l'obligation consiste à ne pas faire et que le débiteur a exécuté, ce qui lui était interdit. 1100. — Les personnes, obligées à délivrer ou à faire une chose, sont en demeure du moment où le créancier exige judiciairement ou extrajudiciairement l'accomplissement de leur obligation. Néanmoins, pour que la mise en demeure existe, il ne sera pas nécessaire d'une interpellation du créancier: 1° Lorsque le contrat ou la loi le disent expressément; 2° Lorsque il résulte de sa nature et des circonstances que l'époque de livrer la chose, ou de prester le service, a été un des motifs déterminants de l'obligation. Dans les obligations réciproques, un obligé n'est pas en demeure si l'autre n'exécute pas, ou ne se soumet pas à la complète exécution de ce qui lui incombe. Dès que l'un des obligés accomplit son obligation, commence la mise en demeure de l'autre. 1101. — Demeurent soumis à l'obligation de réparer les dommages et préjudices causés, ceux qui apportent à l'accomplissement de leurs obligations de la mauvaise foi, de la négligence ou des retards, et ceux qui, d'une façon quelconque, contreviennent aux clauses de leurs engagements. 1102. — La responsabilité provenant du dol peut s'exiger dans toute obligation. La renonciation au droit d'intenter cette action est nulle. 1103. — La responsabilité provenant de la négligence peut être demandée à propos de l'acccomplissement de toute sorte d'obligations; mais les Tribunaux pourront la modérer selon les cas. 1104. — La faute ou la négligence du débiteur consiste dans l'omission de ce soin qu'exige la nature de l'obligation, et s'étend d'après les circonstances de personne, de temps et de lieu. Lorsque l'obligation n'indique pas le soin qu'on doit apporter à son exécution, on exigera que le débiteur y apporte le soin d'un bon père de famille. 1105. — Hors des cas expressément indiqués par la loi, et de ceux où l'obligation le stipule ainsi, nul ne répondra des événements qu'il n'a pu prévoir, ou qui, bien que prévus, ont été inévitables. 1106. — L'indemnité pour dommage et préjudice comprend non seulement la valeur de la perte que la chose a subie, mais encore la valeur des profits que le créancier n'a pu réaliser, sauf les dispositions contenues aux articles suivants. 1107. — Les dommages et préjudices, dont répond le débiteur de bonne foi, sont ceux qu'on a prévus ou pu prévoir, au moment où l'obligation a été contractée, et qui sont la conséquence nécessaire de l'inaccomplissement de l'obligation. En cas de dol, le coupable répondra de tous les préjudices qui dérivent clairement de l'inaccomplissement de son obligation. 1108. — Si l'obligation consiste dans le paiement d'une somme d'argent, et que le débiteur soit en demeure, l'indemnité des dommages et préjudices, à moins de convention contraire, consistera dans le paiement de l'intérêt convenu et, à défaut de convention, de l'intérêt légal. Jusqu'à ce qu'un autre taux ait été fixé par le Gouvernement, on considérera comme légal celui de 6 0/0 l'an. 1109. — Les intérêts civils produisent l'intérêt légal du moment où ils sont judiciairement demandés, alors même que l'obligation serait muette sur ce point. Pour les affaires commerciales, on se réglera d'après les dispositions du Code de commerce. Les monts de piété et caisses d'épargne seront régis par leurs règlements spéciaux. 1110. — La réception d'un capital par le créancier, sans aucune réserve pour les intérêts, éteint l'obligation que le débiteur avait de les payer.— La réception du dernier terme d'une dette, lorsque le créancier n'a pas fait les mêmes réserves, éteint l'obligation pour les termes antérieurs. 1111. — Les créanciers, après avoir, pour obtenir paiement de ce qui leur est dû, exproprié les biens dont leur débiteur était en possession, peuvent dans le même but exercer tous ses droits et actions, en exceptant ceux qui sont attachés à sa personne; ils peuvent également attaquer les actes que le débiteur a faits en fraude de leurs droits. 1112. — Tous les droits, acquis en vertu d'une obligation, sont transmissibles en se conformant aux lois, si le contraire n'a pas été convenu. CHAPITRE III. — DES DIVERSES ESPÈCES D'OBLIGATIONS. SECTION PREMIÈRE. — Des obligations simples et conditionnelles. 1113. — Sera exigible immédiatement toute obligation dont l'accomplissement ne dépend pas d'un événement futur ou incertain, ou d'un événement que les intéressés ignorent. Sera également exigible toute obligation qui contient une condition résolutoire, sans préjudice des effets de la résolution. 1114. — Dans les obligations conditionnelles, l'acquisition des droits, comme la résolution et la perte de ceux qui ont été acquis, dépendra de l'événement qui constitue la condition. 1115. — Lorsque l'accomplissement de la condition dépend exclusivement de la volonté du débiteur, l'obligation conditionnelle sera nulle. S'il dépend du hasard ou de la volonté d'un tiers, l'obligation produira tous ses effets, conformément aux règles de ce Code. 1116. — Les conditions impossibles, celles contraires aux bonnes mœurs et celles prohibées par la oi, annulleront l'obligation qui en dépend. La condition de ne pas faire une chose impossible est considérée comme non écrite. 1117. — La condition qu'il arrivera un certain événement dans un temps déterminé annulera l'obligation dès que le temps sera passé, ou qu'il sera indubitable que l'événement n'aura pas lieu. 1118. — La condition qu'un événement ne se produira pas dans un temps déterminé, rendra efficace l'obligation dès que le temps fixé sera écoulé ou qu'il est évident que l'événement ne peut se présenter. S'il n'y a pas eu de temps fixé, la condition devra être réputée accomplie dans celui qu'on a vraisemblablement entendu fixer d'après la nature de l'obligation. 1119. — On considérera la condition comme accomplie, lorsque l'obligé en empêche volontairement l'accomplissement. 1120. — Les effets d'une obligation conditionnelle de donner rétroagissent, une fois la condition accomplie, au jour où elle a été contractée. Nonobstant, lorsque l'obligation impose des prestations réciproques aux intéressés, on considérera comme compensés les uns avec les autres, les fruits et les intérêts du temps pendant lequel la convention était en suspens. Si l'obligation était unilatérale, le débiteur fera siens les fruits et intérêts perçus, à moins que de la nature et des circonstances de l'affaire on ne doive inférer que la volonté des contractants avait été différente. Dans les obligations de faire ou de ne pas faire, les tribunaux détermineront, dans chaque espèce, l'effet rétroactif de la condition accomplie. 1121. — Le créancier peut, avant l'accomplissement des conditions, exercer les actions utiles à la conservation de son droit. — Le débiteur peut répéter ce qu'il aurait payé pendant ce temps. 1122. — Lorsque les conditions ont été imposées avec l'intention de suspendre la valeur de l'obligation de donner, on observera les règles suivantes si la chose s'améliore, se perd, ou se détériore pendant que la condition est en suspens: 1° Si la chose se perd sans la faute du débiteur, l'obligation restera éteinte. 2° Si la chose est perdue par la faute du débiteur, il sera obligé au paiement des dommages et préjudices. On dit que la chose est perdue lorsqu'elle périt, demeure hors du commerce ou disparaît de façon qu'on ignore son existence et qu'on ne puisse la retrouver. 3° Lorsque la chose se détériore sans la faute du débiteur, la perte est au compte du créancier. 4° Si la chose se détériore par la faute du débiteur, le créancier pourra opter entre la résolution de l'obligation et son accomplissement, avec indemnité dans les deux cas. 5° Si la chose s'améliore naturellement, ou par le temps, les améliorations profitent au créancier. 6° Si elle s'améliore par les dépenses faites par le débiteur, ce dernier n'aura d'autre droit que celui accordé à l'usufruitier. 1123. — Lorsque les conditions ont pour objet de résoudre l'obligation de donner, les intéressés devront, après leur accomplissement, se restituer ce qu'ils auraient reçu. En cas de perte, détérioration ou amélioration de la chose, on appliquera, à celui qui doit les restitutions, les dispositions que contient l'article précédent sur le débiteur. Quant aux obligations de faire ou de ne pas faire, on observera, quant aux effets de la résolution, la disposition du paragraphe second de l'article 1120. 1124. — La faculté de résoudre les obligations est considérée comme implicite dans les synallagmatiques, dans le cas où une des parties n'accomplit pas ce qui lui incombe. La partie lésée pourra choisir entre exiger l'exécution ou la résolution de l'obligation, avec dédommagement du préjudice et compte des intérêts dans les deux cas. Elle pourra en ce cas demander la résolution, après avoir demandé l'exécution, si elle est devenue impossible. Le Tribunal prononcera la résolution qui est demandée à moins qu'on ne justifie de motifs autorisant la fixation d'un délai. Cela s'entend sans préjudice des droits des tiers acquéreurs, conformément aux articles 1295 et 1298 et aux dispositions de la loi hypothécaire. SECTION II. — Des obligations à terme. 1125. — Les obligations, pour l'accomplissement desquelles on a indiqué un jour certain, ne seront exigibles que lorsque ce jour sera arrivé. On entend, par jour certain, un jour qui doit nécessairement venir, encore qu'on ignore à quelle époque. Si l'incertitude consiste à savoir si le jour arrivera ou non, l'obligation est conditionnelle et sera régie par les règles de la section précédente. 1126. — Ce qui aurait été payé par avance sur une obligation à terme ne pourra se répéter. Si celui qui a payé ignorait, au moment du paiement, l'existence du terme, il aura le droit de réclamer du créancier les intérêts et les fruits qu'il aurait perçus. 1127. — Toutes les fois qu'un terme est accordé dans une obligation, on le présume établi au profit du créancier et du débiteur, à moins qu'il ne résulte des circonstances qu'il a été établi dans l'intérêt de l'un ou de l'autre. 1128. — Si l'obligation ne fixe pas de terme, mais que de sa nature et des circonstances on infère que le créancier à dû en accorder un, les tribunaux en fixeront la durée. Les tribunaux fixeront encore la durée du terme lorsqu'elle a été laissée à la volonté du débiteur. 1129. — Le débiteur perdra tout droit à profiter du terme: 1° Lors qu’après avoir contracté l'obligation, il devient insolvable, à moins qu'il ne garantisse la dette; 2° Lorsqu'il ne délivre pas les garanties qu'il avait promises; 3° Lorsque, par son propre fait, il a diminué les garanties après les avoir constituées et lorsqu'elles disparaissent par cas fortuit, à moins qu'elles ne soient immédiatement remplacées par d'autres également sûres. 1130. — Si le terme de l'obligation est compté par jours à dater d'un jour fixé, ce jour sera exclu du compte qui commencera au jour suivant. SECTION III. — Des obligations alternatives. 1131. — L'obligé alternativement à diverses prestations doit, pour se libérer, accomplir l'une d'elles. Le créancier ne peut être forcé de recevoir partie de l'une et partie d'une autre. 1132. — Le choix appartient au débiteur, à moins qu'il n'ait été expressément accordé au créancier. Le débiteur n'aura pas le droit de choisir les prestations impossibles, illicites, ou qui n'auraient pu être l'objet de l'obligation. 1133. — Le choix ne produira son effet que du jour où il aura été notifié. 1134. — Le débiteur perdra son droit de choix, lorsque, parmi les prestations qui lui ont été imposées, une seule est réalisable. 1135. — Le créancier aura droit d'être indemnisé des dommages et préjudices, lorsque par la faute du débiteur, toutes les choses, formant l'objet de l'obligation alternative, auront été dégradées, ou que l'exécution de l'obligation sera devenue impossible. L'indemnité se fixera en prenant pour base la valeur de la dernière chose périe, ou de la prestation qui en dernier lieu a été rendue impossible. 1136. — Lorsque le choix aura été expressément attribué au créancier, l'obligation cessera d'être alternative à dater du jour où ce choix aura été notifié au débiteur. Jusque-là, la responsabilité du débiteur sera réglée d'après les règles suivantes: 1° Si une des choses périt par cas fortuit, il se libérera en délivrant au créancier celle qu'il choisira parmi celles qui restent, ou celle qui reste si une seule subsiste; 2° Si la perte d'une des choses est survenue par la faute du débiteur, le créancier pourra réclamer une de celles qui subsistent, ou le prix de celle qui a disparu par la faute du débiteur; 3° Si toutes ces choses ont péri par la faute du débiteur, le choix du créancier se portera sur le prix. Les mêmes règles s'appliqueront aux obligations de faire ou de ne pas faire, lorsque toutes ces prestations ou quelqu'une d'elles sont devenues impossibles. SECTION IV. — Des obligations conjointes et des obligations solidaires. 1137. — La concurrence de deux ou plusieurs créanciers, ou de deux ou plusieurs débiteurs dans une même obligation n'implique pas que chacun des premiers ait droit de demander, et que chacun des seconds soit tenu de prester intégralement tout l'objet de l'obligation. Il n'y aura lieu à cette conclusion que si la convention le décide expressément, la solidarité étant un de ses caractères constitutifs. 1138. — Si, du texte de l'obligation dont parle l'article précédent, il résulte autre chose, la créance et la dette se présumeront divisibles en autant de parties égales qu'il y a de créanciers ou de débiteurs; chacune de ces dettes ou de ces créances étant réputée distincte l'une de l'autre. 1139. — Si la division était impossible, les actes collectifs de tous les créanciers pourront seuls leur nuire, et la dette ne pourra être recouvrée que par une poursuite contre tous les débiteurs. Si l'un deux devient insolvable, les autres ne seront pas obligés de payer à sa place. 1140. — La solidarité pourra exister encore que les créanciers et les débiteurs ne soient pas obligés de la même façon et avec les mêmes délais et conditions. 1141. — Chacun des créanciers peut faire ce qui est utile aux autres, mais non ce qui leur est nuisible. Les actions exercées contre l'un des débiteurs solidaires nuiront à tous les autres. 1142. — Le débiteur peut payer la dette à l'un des créanciers solidaires, quel qu'il soit; mais s'il a été actionné en paiement par l'un d'eux, c'est à celui-ci qu'il doit payer. 1143. — La novation, la compensation, la confusion ou la remise de la dette, faite par l'un des créanciers solidaires, ou à l'un des débiteurs également solidaires, éteignent l'obligation, sans préjudice des dispositions de l'article 1146. Le créancier qui a fait l'un de ces actes, comme celui qui reçoit la chose due, rendra compte aux autres de la part de l'obligation qui leur revient. 1144. — Le créancier peut attaquer un seul des codébiteurs solidaires, ou tous simultanément. Les poursuites commencées contre un seul ne feront pas obstacle à celles qu'il dirigera ultérieurement contre les autres, tant qu'il n'aura pas reçu complètement ce qui lui est dû. 1145. — Le paiement fait par un des débiteurs solidaires éteint l'obligation. Celui qui fait le paiement peut réclamer de chacun de ses codébiteurs la part qui lui incombe, avec les intérêts de ses avances. Au défaut d'accomplissement de l'obligation par suite de l'insolvabilité d'un codébiteur solidaire, suppléeront ses codébiteurs, au prorata de la dette de chacun. 1146. — La quittance ou la remise de la part qui incombe à un codébiteur solidaire, accordée par le créancier, ne l'exempte pas de sa responsabilité, si la dette est payée intégralement par l'un des autres codébiteurs. 1147. — Si la chose avait péri ou si la prestation était devenue impossible sans la faute des codébiteurs solidaires, l'obligation serait éteinte. Si ces effets s'étaient produits par suite de la faute de l'un d'eux, ils seront tous responsables envers le créancier du prix, de la réparation du préjudice et du compte des intérêts, sans préjudice de l'action contre le coupable ou le négligent. 1148. — Le codébiteur solidaire pourra opposer aux demandes du créancier toutes les exceptions qui résultent de la nature de la créance ou qui lui sont personnelles. Quant aux exceptions personnelles à ses codébiteurs, il ne pourra les opposer que pour la portion de la dette dont ils sont responsables. SECTION V. — Des obligations avec clause pénale. — Des obligations divisibles et des obligations indivisibles. 1149. — La divisibilité ou l'indivisibilité des choses objet des obligations, où il n'y a qu'un seul débiteur et qu'un seul créancier, n'altérera ni ne modifiera les prescriptions du chapitre II de ce titre. 1150. — L'obligation conjointe et indivisible se résout, dans une indemnité du dommage et du préjudice causé, dès que l'un des débiteurs manque à son engagement. Les codébiteurs qui auraient été disposés à remplir les leurs ne contribueront pas à l'indemnité pour une part supérieure à la partie du prix ou de la prestation constituant leur obligation. 1151. — Pour les effets des articles précédents, on considérera comme indivisibles les obligations de livrer des corps certains et toutes les autres qui ne sont pas susceptibles d'un accomplissement partiel. Les obligations de faire seront divisibles lorsqu'elles auront pour objet la prestation d'un nombre de jours de travail, l'exécution de travaux par unités métriques ou toutes autres choses analogues qui, par leur nature, sont susceptibles d'un accomplissement partiel. Dans les obligations de ne pas faire, la divisibilité ou l'indivisibilité se décidera d'après le caractère de la prestation dans chaque cas particulier. SECTION VI. — Des obligations avec clause pénale. 1152. — Dans les obligations avec clause pénale, la peine remplacera la réparation du dommage et le compte des intérêts en cas d'inaccomplissement, à moins qu'on ne soit convenu d'autre chose. La peine ne pourra devenir effective que si l'obligation est exigible, conformément aux dispositions de ce Code. 1153. — Le débiteur ne pourra s'exempter d'accomplir l'obligation en payant la peine, sinon dans le cas où il se sera expressément réservé ce droit. De même le créancier ne pourra réclamer conjointement l'accomplissement de l'obligation et le paiement de la peine, si cette faculté ne lui a été clairement accordée. 1154. — Le juge modifiera équitablement la peine lorsque le débiteur n'aura rempli l'obligation principale qu'irrégulièrement ou pour partie. 1155. — La nullité de la clause pénale n'entraîne pas avec elle celle de l'obligation principale. La nullité de la clause principale entraîne avec elle celle de la clause pénale. CHAPITRE IV. — DE L'EXTINCTION DES OBLIGATIONS. DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 1156. — Les obligations s'éteignent: Par le paiement ou l'exécution; Par la perte de la chose due; Par la remise de la dette; Par la confusion des qualités de créancier et de débiteur; Par la compensation; Par la novation. SECTION PREMIÈRE. — Du paiement. 1157. — On ne considérera une dette comme payée qu'après que la chose, qui en fait l'objet, aura été complètement délivrée ou que la prestation aura été accomplie. 1158. — Toute personne peut faire un paiement, qu'elle ait ou non intérêt à l'accomplissement de l'obligation, et que le débiteur le sache, l'approuve ou l'ignore. Celui, qui paie pour le compte d'un autre, pourra réclamer au débiteur ce qu'il aura payé, à moins qu'il n'ait agi contre sa volonté expresse. Dans ce cas, il ne pourra réclamer du débiteur que les sommés versées utilement à sa décharge. 1159. — Celui qui paie au nom du débiteur, alors que ce dernier l'ignore, ne peut forcer le créancier à le subroger dans ses droits. 1160. — Dans les obligations de donner, le paiement ne sera pas valable s'il est fait par une personne n'ayant pas la libre disposition de la chose due et la capacité de l'aliéner. Néanmoins, si le paiement consistait en une somme d'argent ou une chose fongible, il n'y aurait pas de répétition contre le créancier qui l'aurait dépensée ou consommée de bonne foi. 1161. — Dans les obligations de faire, le créancier ne pourra être forcé de recevoir la prestation ou le service d'un tiers, lorsque le caractère et les qualités de la personne du débiteur ont été prises en considération lors de la formation du contrat. 1162. — Le paiement devra se faire à la personne au profit de qui l'obligation a été constituée, ou à une autre autorisée à recevoir en son nom. 1163. — Le paiement, fait à une personne incapable d'administrer ses biens, sera valable en tant qu'il aura été réellement employé à son profit. Sera également valable le paiement fait à un tiers, en tant qu'il aura été utile au créancier. 1164. — Le paiement, fait de bonne foi à la personne qui a la possession de la créance, libère le débiteur. 1165. — Ne sera pas valable le paiement fait au créancier par le débiteur, après qu'on lui a judiciairement prescrit de conserver sa dette. 1166. — Le débiteur d'une chose ne peut obliger son créancier à en recevoir une autre, même si elle était de valeur égale ou même supérieure à celle qui est due. De même, dans les obligations de faire, on ne pourra substituer un fait à un autre contre la volonté du débiteur. 1167. — Lorsque l'obligation consiste à délivrer une chose indéterminée, désignée par son espèce, et dont la qualité et les conditions auront été précisées, le créancier ne pourra exiger une qualité supérieure, ni le débiteur en livrer une inférieure. 1168. — Les frais extra-judiciaires qu'occasionne le paiement sont à la charge du débiteur. Quant aux frais judiciaires, le Tribunal décidera en se conformant à la loi de procédure civile. 1169. — A moins que le contrat ne l'autorise expressément, le débiteur ne pourra forcer le créancier à recevoir par parties les prestations qui forment l'obligation. Néanmoins, si la dette était en partie liquide, en partie non liquide, le créancier pourra exiger, et le débiteur pourra effectuer le paiement de la première partie, sans attendre la liquidation de la seconde. 1170. — Le paiement des dettes d'argent devra se faire avec l'espèce de monnaie convenue, et s'il n'est pas possible d'en délivrer de cette espèce, avec de la monnaie d'argent ou d'or ayant cours légal en Espagne. La remise de billets à ordre, ou de lettres de change, ou d'autres effets de commerce ne produira les effets d'un paiement qu'autant qu'ils auront été payés ou que, par la faute du créancier, ils auront perdu leur valeur. Pendant ce laps de temps, l'action née de l'obligation primitive restera en suspens. 1171. — Le paiement devra s'effectuer dans le lieu désigné par la convention. Si rien n'a été stipulé, et s'il s'agit de délivrer une chose déterminée, le paiement devra se faire au lieu où elle était au moment de la formation du contrat. En tout autre cas, le lieu sera celui du domicile du débiteur. De l'imputation des paiements. 1172. — Celui qui aurait plusieurs dettes de même nature, au profit d'un seul créancier, pourra déclarer, au moment de faire un paiement, à laquelle il doit être appliqué. S'il accepte du créancier un reçu, dans lequel l'application est faite, il ne pourra réclamer contre cette imputation, à moins qu'il n'y ait une cause qui invalide le contrat. 1173. — Si la dette produit des intérêts, on ne pourra considérer le paiement du capital comme effectué, tant que les intérêts ne sont pas acquittés. 1174. — Lorsqu'on ne peut imputer le paiement conformément aux règles précédentes, on considérera comme acquittée parmi les dettes échues, celle qui était la plus onéreuse pour le débiteur. Si elles étaient de même nature, et imposaient une même charge, le paiement s'imputera sur toutes au prorata. Du paiement par cession de biens. 1175. — Le débiteur peut céder ses biens à ses créanciers en paiement de ses dettes. A moins de convention contraire, cette cession ne le libère de sa responsabilité que dans la mesure des biens cédés. Les accords, qui interviennent entre le débiteur et ses créanciers sur les effets de la cession, devront se conformer aux dispositions du titre XVII de ce livre et aux prescriptions de la loi de procédure civile. De l'offre de paiement et de la consignation. 1176. — Si le créancier, à qui on fait une offre de paiement, la refuse sans motif acceptable, le débiteur sera libéré de toute responsabilité par la consignation de la chose due. La consignation produira le même effet lorsque le créancier est absent, ou incapable de recevoir le paiement au moment où il doit se faire, ou lorsque plusieurs personnes prétendent avoir droit de recevoir, ou lorsque le titre de l'obligation est égaré. 1177. — Pour que la consignation de la chose due libère le débiteur, elle devra être préalablement notifiée aux personnes intéressées à l'accomplissement de l'obligation. La consignation sera sans valeur, si on ne se conforme pas expressément aux dispositions qui règlent le paiement. 1178. — La consignation se fera par le dépôt des choses dues, à la disposition de l'autorité judiciaire devant laquelle on fera valider les offres s'il y a lieu, ou la dénonciation de la consignation dans les autres cas; La consignation faite devra être notifiée aux intéressés. 1179. — Les frais de la consignation sont à la charge du créancier lorsqu'elle est faite régulièrement. 1180. — Après la consignation dûment faite, le débiteur pourra demander au juge une ordonnance annulant de l'obligation. Tant que le créancier n'a pas accepté la consignation, et qu'elle n'a été proclamée bien faite par décision judiciaire, le débiteur pourra retirer la chose ou la quantité consignée, l'obligation continuant de subsister. 1181. — Si, après la consignation faite, le créancier autorise le débiteur à la retirer, il perdra tous les droits de préférence qu'il avait sur la chose. Les codébiteurs et les garants seront libérés. SECTION II. — De la perte de la chose due. 1182. — L'obligation, qui consiste à délivrer une chose déterminée, sera éteinte lorsqu'elle aura péri pu sera détruite sans la faute du débiteur, et avant qu'il ait été mis en demeure. 1183. — Toutes les fois que la chose aura péri alors qu'elle était au pouvoir du débiteur, on présumera que la perte est arrivée par sa faute et non par cas fortuit, sauf la preuve contraire et sans préjudice des dispositions de l'article 1096. 1184. — De même, le débiteur sera libéré des obligations de faire, lorsque la prestation sera devenue légalement ou physiquement impossible. 1185. — Lorsque la dette d'une chose certaine et déterminée provenait d'un délit ou d'une faute, le débiteur ne sera pas exonéré du paiement de sa valeur quelle qu'ait été la cause de la perte, à moins que cette chose n'ait été offerte par le débiteur à celui qui devait le recevoir, et que ce dernier ait, sans motif, refusé de la recevoir. 1186. — L'obligation, une fois éteinte par la perte de la chose, toutes les actions que, à cause d'elle, le débiteur avait contre les tiers, appartiendront au créancier. SECTION III. — De la remue de la dette. 1187. — La remise pourra se faire expressément ou tacitement. L'une et l'autre seront soumises aux règles qui régissent les donations in officieuses ou excessives. La remise expresse devra, en outre, être faite dans la forme des donations. 1188. — La remise du titre privé prouvant une créance, faite volontairement par le créancier au débiteur, implique la renonciation à l'action que le premier a contre le second. Si pour attaquer cette renonciation, on prétend qu'elle contient une donation excessive, le débiteur ou ses héritiers pourront la défendre, en prouvant que la remise du titre a été faite comme conséquence du paiement de la dette. 1189. — Toutes les fois que le titre privé, d'où résulte la dette, se trouve au pouvoir du débiteur, on présumera que le créancier le lui a remis volontairement, à moins qu'on ne prouve le contraire. 1190. — La remise de la dette principale éteindra les obligations accessoires; mais la remise de ces dernières laissera subsister la principale. 1191. — On présumera remise l'obligation avec gage lorsque la chose donnée en gage, après avoir été délivrée au créancier, se trouve de nouveau au pouvoir du débiteur. SECTION IV. — De la confusion des droits. 1192. — Une obligation sera éteinte, dès que les qualités de créancier et de débiteur se réuniront en une même personne. On excepte le cas où cette confusion a lieu en vertu d'un titre héréditaire, si la succession a été acceptée sous bénéfice d'inventaire. 1193. — La confusion, qui se produit en la personne du débiteur et du créancier de l'obligation principale, profite aux garants. Celle qui se réalise en la personne d'un de ces derniers n'éteint pas l'obligation. 1194. — La confusion n'éteint pas la dette conjointe, sauf dans la portion propre au créancier ou au débiteur qui réunit les deux titres. SECTION V. — De la compensation. 1195. — 11 y aura lieu à compensation, lorsque deux personnes sont, en vertu de droits distincts, réciproquement créancières et débitrices l'une de l'autre. 1196. — Pour que la compensation ait lieu, il faut: 1° Que chacun des obligés soit tenu en vertu d'une obligation principale et soit en même temps créancier principal de l'autre; 2° Que les deux dettes consistent en une somme d'argent, ou que, s'il s'agit de choses fongibles, elles soient de la même espèce et aussi de la même qualité, si elle a été spécifiée; 3° Que les deux dettes soient échues; 4° Qu'elles soient liquides et exigibles; 5° Que sur aucune d'elles, il n'y ait de saisie ou d'opposition formée par des tiers et notifiée au débiteur. 1197. — Malgré les dispositions de l'article précédent, le garant pourra opposer la compensation de ce que le créancier doit à son débiteur principal. 1198. — Le débiteur qui a donné son consentement à une cession de droits, faite à un tiers par un créancier, ne pourra opposer au cessionnaire la compensation dont il pourrait se prévaloir vis-à-vis du cédant. Si le créancier lui fait connaître la cession, et que le débiteur n'y donne son consentement, il pourra opposer en compensation les dettes antérieures, mais non les postérieures. Si la cession est faite sans que le débiteur en ait connaissance, il pourra demander la compensation des dettes antérieures ainsi que des postérieures, jusqu'au moment où la cession lui est connue. 1199. — Les dettes payables en différents lieux peuvent se compenser, moyennant l'indemnité des frais de transport et de change d'un lieu sur un autre. 1200. — La compensation n'aura pas lieu lorsque l'une des dettes proviendra d'un dépôt, ou des obligations du dépositaire ou du commandataire. De même, on ne pourra l'opposer au créancier d'aliments à titre gratuit. 1201. — Si une personne avait plusieurs dettes compensables, on observera, pour l'ordre de la compensation, les dispositions relatives à l'imputation des paiements. 1202. — L'effet de la compensation est d'éteindre l'une et l'autre dette en semblable quantité, encore que le créancier et le débiteur n'en aient pas connaissance. SECTION VI. — De la novation. 1203. — Les obligations peuvent se modifier: 1° En changeant leur objet ou leurs conditions principales; 2° En substituant une autre personne au débiteur; 3° En subrogeant un tiers aux droits du créancier. 1204. — Pour qu'une obligation se trouve éteinte par une autre qui lui est substituée, il est nécessaire qu'on le déclare expressément, ou que l'ancienne et la nouvelle soient de tout point incompatibles. 1205. — La novation, qui consiste à substituer un nouveau débiteur au premier, peut se faire sans que ce dernier le sache, mais non sans le consentement du créancier. 1206. — L'insolvabilité du nouveau débiteur, qui a été accepté par le créancier, ne fera pas revivre l'action contre le débiteur primitif, à moins que cette insolvabilité n'ait existé antérieurement, qu'elle ait été publique et connue du débiteur au moment où il déléguait sa dette. 1207. — Lorsque l'obligation s'éteint par la novation, les obligations accessoires ne pourront subsister en tant qu'elles appartiennent à des tiers qui n'y ont pas consenti. 1208. — La novation est nulle si l'obligation primitive l'était également, à moins que la cause de nullité n'ait pu être invoquée que par le débiteur, ou que la ratification n'ait validé des actes nuls à l'origine. 1209. — La subrogation d'un tiers dans les droits du créancier ne peut se présumer, en dehors des cas indiqués dans ce Code. Dans lès autres, il sera nécessaire de la prouver clairement pour qu'elle produise son effet. 1210. — On présumera qu'il y a subrogation: 1° Lorsqu'un créancier paie un autre créancier qui lui est préférable; 2° Lorsqu'un tiers, non intéressé dans l'obligation, la paie avec l'approbation expresse ou tacite du débiteur; 3° Lorsque paie celui qui a intérêt à l'accomplissement de l'obligation, sauf les effets de la confusion pour le fait qui lui est propre. 1211. — Le débiteur pourra faire la subrogation sans le consentement du créancier lorsque, pour payer sa dette, il a emprunté de l'argent par acte public, en y faisant constater son projet et en mentionnant dans la quittance la provenance de la somme versée. 1212. — La subrogation transfère au subrogé la créance avec ses droits accessoires soit contre le débiteur, soit contre les tiers, qu'ils soient garants ou propriétaires d'immeubles hypothéqués. 1213. — Le créancier, à qui on a fait un paiement partiel, peut exercer son droit pour le reste, préférablement à celui qui a été subrogé en ses lieu et place, par suite du paiement partiel de la même créance. CHAPITRE V. — DE LA PREUVE DES OBLIGATIONS. DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 1214. — La preuve des obligations incombe à qui en réclame l'accomplissement; celle de leur exécution, à qui s'en prévaut. 1215. — Les preuves peuvent se faire par titre, par aveu, par examen personnel du juge, par experts, par témoins et par présomptions. SECTION PREMIÈRE. — Des actes publics. 1216. — Les actes publics sont ceux qui sont reçus par un notaire ou un officier public compétent, avec les formalités requises par la loi. 1217. — Les actes où intervient un notaire public seront régis par la législation notariale. 1218. — Les actes publics font preuve, même contre un tiers, du fait qui a motivé leur confection et de leur date. Ils font de même foi, contre les contractants et leurs ayants cause, des déclarations faites par les premiers. 1219. — L'acte, dressé pour en annuler un autre arrêté antérieurement entre les mêmes intéressés, ne produira d'effet contre les tiers qu'autant que son contenu aura été mentionné dans le registre public spécial ou en marge de la minute et de l'expédition ou copie en vertu de laquelle le tiers a agi. 1220. — Les copies des actes publics, dont il existe minute ou protocole, attaquées par ceux à qui ils nuisent, n'auront force probante, qu'autant qu'elles auront été dûment collationnées. S'il existe une variante entre la minute et la copie, on s'en tiendra au texte de la première. 1221. — Lorsque la minute, le protocole et les procédures originales auront disparu, feront preuve: 1° Les premières copies prises par le fonctionnaire public qui a reçu l'acte; 2° Les copies postérieures faites par ordre de justice, les intéressés dûment appelés; 3° Celles qui auraient été prises en présence des intéressés, avec mention de leur conformité, quoique sans ordre de justice. A défaut des copies sus-mentionnées, fera foi toute autre copie, vieille de trente ans ou plus, si toutefois elle a été prise sur l'original par celui qui l'a reçu ou par le fonctionnaire préposé à sa garde. Les copies moins anciennes, ou qui auraient été certifiées par un fonctionnaire public n'ayant pas les qualités indiquées au paragraphe précédent, ne serviront que de commencement de preuve par écrit. La force probante des copies de copies sera appréciée par les tribunaux selon les circonstances. 1222. — L'inscription sur les registres publics d'un acte qui a disparu, sera effectuée d'après les règles des deux derniers paragraphes de l'article précédent. 1223. — L'acte, nul pour incompétence du notaire ou pour autre défaut de forme, aura la valeur d'un acte privé s'il a été signé par les parties. 1224. — Les actes de reconnaissance d'un acte ou d'un contrat ne prouvent rien contre l'acte d'après lequel ils ont été dressés, s'ils s'en écartent par omission ou par addition, à moins que la novation de l'acte ancien ne soit expressément prouvée. Des titres privés. 1225. — Le titre privé, légalement reconnu, aura la même valeur que l'acte authentique, entre ceux qui l'ont souscrit et leurs ayants cause. 1226. — Celui, à qui on oppose en justice une obligation écrite qui paraît signée par lui, est obligé de déclarer si la signature est ou non la sienne. Les héritiers et ayants cause de l'obligé pourront se borner à déclarer s'ils savent que la signature de l'obligation émane ou n'émane pas de leur auteur. La résistance, sans juste motif, à faire la déclaration mentionnée aux paragraphes précédents, pourra être considérée par les tribunaux comme un aveu de l'authenticité de l'acte. 1227. — La date d'un acte privé ne se comptera, au respect des tiers, que du jour où il a été annexé ou copié sur un registre public, ou du jour du décès d'un des signataires, ou du jour où il aura été remis à un fonctionnaire public à cause de ses fonctions. 1228. — Les notes, registres et papiers privés ne font foi que contre celui qui les a écrits, pour tout ce qu'ils constatent avec clarté; mais celui qui voudra s'en servir devra les accepter dans la partie où ils lui nuisent. 1229. — La note écrite ou signée par le créancier à la suite, en marge ou au dos d'un acte qu'il a en son pouvoir, fait preuve de tout ce qui est favorable au débiteur. Il en sera de même de la mention écrite ou signée par le créancier au dos, en marge ou à la suite d'un duplicata d'un acte ou reçu qui se trouve au pouvoir du débiteur. Dans les deux cas, le débiteur qui voudra profiter de ce qui lui est favorable devra accepter ce qui lui est contraire. 1230. — Les actes privés, faits pour modifier les conventions constatées par actes publics, n'ont pas d'effet contre les tiers. SECTION II. — De l'aveu. 1231. — L'aveu peut se faire en justice ou extra-judiciairement. Dans l'un et l'autre cas, une condition est indispensable à la validité de l'aveu, c'est qu'il porte sur des faits personnels à celui qui fait l'aveu, et qu'il ait capacité pour le faire. 1232. — L'aveu fait foi contre son auteur. On excepte le cas où, par cet aveu, on peut se dispenser de l'accomplissement des lois. 1233. — L'aveu ne peut se diviser contre celui qui le fait, à moins qu'il ne porte sur des faits différents, ou lorsqu'une partie de l'aveu est prouvée par d'autres moyens, ou lorsque en quelque point il est contraire à la nature ou aux lois. 1234. — L'aveu ne perd sa force probante que si, en le faisant, on a commis une erreur de fait. 1235. — L'aveu judiciaire doit se faire devant le juge compétent, sous serment, et celui qui doit en profiter étant représenté à l'acte. 1236. — Lorsqu'on demande l'aveu judiciaire sous serment décisoire, la partie à laquelle il est déféré pourra référer le serment à son adversaire et, si celle-ci refuse de le prêter, on tiendra le fait pour avoué. 1237. — On ne peut déférer le serment décisoire sur des faits punissables, ni sur des questions à propos desquelles les parties ne peuvent transiger. 1238. — L'aveu, fait sous serment décisoire qu'il soit déféré ou référé, ne constitue une preuve que pour ou contre les parties qui s'y sont soumises, leurs héritiers ou ayants cause. On n'admettra pas la preuve de la fausseté de ce serment. 1239. — L'aveu extrajudiciaire sera considéré comme un fait soumis à l'appréciation des tribunaux selon les règles établies sur la preuve. SECTION III. — De l'examen personnel du juge. 1240. — La preuve par l'examen personnel du juge ne sera efficace qu'autant qu'elle permet clairement au Tribunal d'apprécier, par les circonstances extérieures de la chose examinée, le fait qu'il s'agit de vérifier. 1241. — L'examen fait par le juge pourra être apprécié dans un jugement qui statue sur une autre chose toutes les fois que le juge a consigné dans un procès-verbal parfaitement clair, les détails et la manière d'être de la chose examinée. SECTION IV. — De la preuve par experts. 1242. — On ne pourra se servir de ce mode de preuve qu'au cas où, pour apprécier sainement les faits, des connaissances scientifiques ou pratiques sont nécessaires. 1243. — La valeur de cette preuve et la forme en laquelle elle doit se produire sont l'objet de dispositions de la loi de procédure civile. SECTION V. — De la preuve par témoins. 1244. — La preuve par témoins sera admissible dans tous les cas où elle n'a pas été expressément prohibée. 1245. — Pourront être témoins toutes les personnes de l'un et de l'autre sexe, qui ne seront pas incapables par suite d'une infirmité naturelle, ou en vertu d'une disposition de loi. 1246. — Sont incapables par suite d'une infirmité naturelle: 1° Les fous et les aliénés; 2° Les aveugles et les sourds, pour les faits dont la connaissance s'acquiert par l'ouïe ou par la vue; 3° Les mineurs de quatorze ans. 1247. — Sont incapables en vertu de la disposition de la loi: 1° Ceux qui ont un intérêt direct dans le procès; 2° Les ascendants dans les procès de leurs descendants, et ces derniers dans les procès des premiers; 3° Le beau-père et la belle-mère dans les procès de leurs gendre et bru, et vice versa; 4° Le mari dans les procès de sa femme et la femme dans ceux du mari; 5° Ceux qui sont tenus de garder le secret à raison de leur état ou de leur profession, dans les matières relatives à leur état ou profession; 6° Ceux qui sont spécialement déclarés incapables d'être témoins dans certains actes. Les dispositions des numéros 2, 3 et 4 ne sont pas applicables aux procès qui tendent à prouver la naissance ou le décès des enfants, ou tout autre fait intime de la vie de famille qu'on ne peut établir autrement. 1248. — La force probante des dépositions des témoins sera appréciée par les tribunaux, conformément aux prescriptions de la loi de procédure civile. Ils s'attacheront à éviter que, par la simple coïncidence de quelques témoignages, à moins que leur véracité ne soit évidente, on n'arrive à établir des conventions à propos desquelles interviennent ordinairement des écrits, des actes privés, ou quelque commencement de preuve par écrit. SECTION VI. — Des présomptions. 1249. — Les présomptions ne sont admissibles qu'au cas où le fait, d'où on doit les déduire, est complètement établi. 1250. — Les présomptions que la loi établit, dispensent de toute preuve ceux en faveur desquels elles existent. 1251. — Les présomptions établies par la loi peuvent se détruire par la preuve contraire, sauf dans les cas où elle est expressément défendue. Contre la présomption de vérité de la chose jugée, il n'y aura d'efficace que la sentence obtenue après une instance en révision. 1252. — Pour que la présomption de chose jugée produise effet dans une autre instance, il est nécessaire que, entre le fait résultant de la décision judiciaire et l'instance dans laquelle il est invoqué, on rencontre la plus parfaite identité d'objet, de cause, de personnes plaidantes et de qualité d'agir. Dans les questions relatives à l'état civil et à la validité ou à la nullité des dispositions testamentaires, la présomption de chose jugée est opposable aux tiers, même s'ils n'étaient pas partie au débat. On considère qu'il y a identité de personnes, toutes les fois que les parties au second procès sont les ayants cause de ceux qui ont plaidé dans l'instance antérieure, ou qu'ils leur sont unis par les liens de la solidarité, ou par ceux qu'établit l'indivisibilité entre ceux qui ont droit d'exiger l'exécution des obligations ou qui sont tenus de les accomplir. 1253. — Pour que les présomptions, non établies par la loi, soient acceptées comme moyen de preuve, il est indispensable qu'entre le fait démontré et celui qu'on veut en déduire, il y ait un lien précis et direct selon les règles de la critique humaine. TITRE II. — DES CONTRATS. CHAPITRE PREMIER. — DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 1254. — Le contrat existe dès que une ou plusieurs personnes consentent à s'obliger vis-à-vis de une ou plusieurs autres, à donner une chose ou à accomplir une prestation. 1255. — Les contractants peuvent établir les conventions, clauses et conditions qu'ils jugent convenables, à moins toutefois qu'elles ne soient contraires aux lois, à la morale ou à l'ordre public. 1256. — La validité et l'accomplissement des contrats ne peuvent être abandonnés à la volonté d'un des contractants. 1257. — Les contrats ne produisent effet qu'entre les parties qui les forment et leurs héritiers, sauf, quanta ces derniers, le cas où les droits et obligations, qui dérivent des contrats, ne sont pas transmissibles soit par leur nature, soit par la convention, ou en vertu d'une disposition de loi. Si le contrat contient une stipulation en faveur d'un tiers, ce dernier peut en exiger l'accomplissement, du moment où il a fait connaître à l'obligé son acceptation avant qu'elle ait été révoquée. 1258. — Les contrats se forment par le seul consentement, et dès lors ils obligent non seulement à l'accomplissement de ce qui a été expressément convenu, mais encore à toutes les conséquences qui, d'après sa nature, sont conformes à la bonne foi, à l'usage et à la loi. 1259. — Nul ne peut contracter au nom d'un autre sans avoir reçu son autorisation, ou sans être considéré par la loi comme son représentant légal. Le contrat conclu au nom d'un autre, dont on n'a ni l'autorisation ni la représentation légale, sera nul à moins qu'il ne soit ratifié par la personne, au nom de qui on a agi, avant que l'autre partie ne l'ait révoqué. 1260. — On n'admettra pas de serment dans les contrats; s'il est prêté, on le considérera comme non avenu. CHAPITRE II. — DES CONDITIONS ESSENTIELLES À LA VALIDITÉ DES CONTRATS. DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 1261. — Il n'y a contrat que par le concours des conditions suivantes: 1° Le consentement des contractants; 2° Un objet certain qui forme la matière du contrat; 3° Une cause pour l'obligation qui s'établit. SECTION PREMIÈRE. — Du consentement. 1262. — Le consentement se manifeste par le concours de l'offre et de l'acceptation sur la chose et la cause qui doivent former le contrat. L'acceptation, faite par lettre, n'oblige celui qui a fait l'offre que du moment où il la connaît. Le contrat, dans ce cas, est présumé conclu au lieu où l'offre a été faite. 1263. — Ne peuvent donner un consentement: 1° Les mineurs non émancipés; 2° Les fous, les aliénés, et les sourds-muets qui ne savent écrire: 3° Les femmes mariées, dans les cas exprimés par la loi. 1264. — L'incapacité, déclarée par l'article précédent, est soumise aux modifications que fixe la loi et n'infirme en rien les incapacités spéciales que la loi établit également. 1265. — Sera nul le consentement donné par erreur, violence, intimidation ou dol. 1266. — Pour que l'erreur vicie le consentement, elle devra porter sur la substance de la chose qui forme l'objet du contrat, ou sur les conditions qui ont principalement donné lieu à sa formation. L'erreur sur la personne n'invalidera le contrat que s'il a eu cette personne pour objet principal. La simple erreur de compte ne donnera lieu qu'à sa correction. 1267. — Il y a violence lorsque, pour arracher le consentement, on emploie une force irrésistible. Il y a intimidation, lorsqu'on inspire à un des contractants la crainte raisonnable et fondée de souffrir un mal imminent et grave dans sa personne ou ses biens, ou dans la personne et les biens de son époux, de ses descendants, ou de ses ascendants. Pour qualifier l'intimidation, on doit tenir compte de l'âge, du sexe et de la condition de la personne. La crainte de déplaire aux personnes auxquelles on doit soumission et respect n'annulera pas le contrat. 1268. — La violence ou l'intimidation annuleront l'obligation, encore qu'elle ait été employée par un tiers qui n'est pas intervenu au contrat. 1269. — Il y a dol lorsque, par des paroles ou des manœuvres insidieuses, l'un des contractants est amené à conclure avec l'autre un contrat, qu'il n'eût pas consenti sans elles. 1270. — Pour que le dol produise la nullité des contrats, il devra être grave et n'avoir pas été employé par les deux parties contractantes. Il n'y a que le dol d'une seule partie qui oblige celle, qui l'a employé, à payer les dommages et préjudices. SECTION II. — De l'objet des contrats. 1271. — Peuvent être l'objet d'un contrat toutes les choses, même futures, qui ne sont pas hors du commerce des hommes. Néanmoins sur une succession non ouverte, on ne pourra conclure d'autres conventions que celle dont l'objet est de faire entre vifs le partage d'un héritage, conformément à l'article 1056. Peuvent également faire l'objet de conventions toutes les prestations qui ne sont pas contraires aux lois et aux bonnes mœurs. 1272. — Les choses et les prestations impossibles ne peuvent être l'objet d'un contrat. 1273. — L'objet de tout contrat doit être une chose déterminée par sa quantité et son espèce. Le silence sur la quantité ne sera pas un obstacle à l'existence du contrat, toutes les fois qu'il sera possible de la déterminer sans nouvel accord entre les parties. SECTION III. — De la cause des contrats. 1274. — Dans les contrats à titre onéreux, on qualifie de cause pour chaque partie contractante, la prestation, ou la promesse d'une chose ou d'un service faite par l'autre partie; dans les contrats rémunératoires, le service ou le bienfait qu'on récompense; et dans les contrats de pure bienfaisance, la simple libéralité du bienfaiteur. 1275. — Les contrats sans cause, ou avec une cause illicite, ne produisent aucun effet. La cause est illicite lorsqu'elle est contraire aux lois ou à la morale. 1276. — La mention d'une fausse cause, dans les contrats, entraîne leur nullité si on ne prouve pas qu'ils étaient fondés sur une autre vraie et licite. 1277. — Même si la cause n'est pas exprimée dans le contrat, on présume qu'elle existe et qu'elle est licite, tant que le débiteur ne prouve pas le contraire. CHAPITRE III. — DE L'EFFET DES CONTRATS. 1278. — Les contrats seront obligatoires, quelle que soit leur forme, du moment où ils réunissent toutes les conditions essentielles à leur validité. 1279. — Si la loi exige la rédaction d'un acte authentique ou toute autre formalité spéciale pour rendre exigibles les obligations d'un contrat, les contractants pourront réciproquement se forcera remplir cette formalité, du moment où le consentement s'est produit, ainsi que les autres conditions nécessaires à sa validité. 1280. — On devra constater par acte public: 1° Les actes et contrats qui ont pour objet la création, la transmission, la modification ou l'extinction des droits réels sur les immeubles; 2° Les locations de ces mêmes biens pour six années au plus, toutes les fois qu'elles doivent être opposées aux tiers; 3° Les conventions matrimoniales, les constitutions et augmentations de dot, toutes les fois qu'on doit les faire valoir contre des tiers; 4° La cession, la répudiation et la renonciation à des droits dans une succession ou une société conjugale; 5° La procuration pour contracter mariage, la procuration générale pour plaider, et les procurations spéciales qu'on doit présenter en justice, la procuration d'administrer des biens et toute autre qui a pour objet un acte rédigé, ou à rédiger en la forme authentique ou qui doit s'opposer à des tiers; 6° La cession d'actions ou de droits provenant d'un acte dressé en la forme authentique. De même, on devra constater par un écrit, au moins privé, les autres conventions dans lesquelles le total des prestations de l'un ou de l'autre des contractants excède 1500 pesetas. CHAPITRE IV. — DE L'INTERPRÉTATION DES CONTRATS. 1281. — Si les termes d'un contrat sont clairs et ne laissent aucun doute sur l'intention des contractants, on s'en tiendra au sens littéral des clauses. Si les termes paraissent contraires à l'intention évidente des contractants, cette intention prévaudra. 1282. — Pour juger l'intention des contractants, on devra s'attacher à leurs actes contemporains et postérieurs. 1283. — Quelle que soit la généralité des termes d'un contrat, on ne devra pas y considérer comme comprises, les choses distinctes et différentes de celles sur lesquelles les intéressés se sont proposé de contracter. 1284. — Si une clause des contrats a plusieurs significations, on devra admettre celle qui est la plus propre à lui faire produire effet. 1285. — Les clauses des contrats devront s'interpréter les unes par les autres, en attribuant aux douteuses la signification qui résulte de l'ensemble. 1286. — Les termes, qui peuvent avoir plusieurs acceptions, seront pris dans celle qui est la plus conforme à la nature et à l'objet du contrat. 1287. — On tiendra compte de l'usage et de la coutume pour interpréter les ambiguïtés des contrats, on y suppléra les clauses qu'on a l'habitude d'y mettre ordinairement. 1288. — L'interprétation des clauses obscures d'un contrat ne devra pas favoriser la partie qui a accasionné l'obscurité. 1289. — Lorsqu'il aura été absolument impossible de résoudre les doutes avec les règles établies dans les articles précédents, s'ils ont pour objet les circonstances accessoires d'un contrat à titre gratuit, on les résoudra dans le sens de la moindre transmission de droits et intérêts. Si le contrat est à titre onéreux, le doute se résoudra en faveur de la plus exacte réciprocité d'intérêt. Si le doute, dont cet article règle la solution, porte sur l'objet principal du contrat, en telle sorte qu'on ne puisse arriver à connaître quelle a été l'intention et la volonté des parties, le contrat sera nul. CHAPITRE V. — DE LA RESCISION DES CONTRATS. 1290. — Les contrats valablement conclus peuvent être rescindés dans les cas édictés par la loi. 1291. — Sont rescindables: 1° Les contrats que peuvent faire les tuteurs sans l'autorisation du conseil de famille, toutes les fois que les personnes qu'ils représentent ont souffert une lésion de plus du quart de la valeur des choses qui ont été l'objet desdits contrats; 2° Les contrats, conclus par les représentants des absents, toutes les fois qu'ils ont souffert la lésion dont parle l'article précédent; 3° Les contrats, conclus en fraude des créanciers, lorsqu'ils ne peuvent d'une autre manière recouvrer ce qui leur est dû; 4° Les contrats, relatifs à des choses litigieuses, lorsqu'ils ont été conclus par le défendeur, sans que les parties au procès et l'autorité judiciaire compétente le sachent et l'approuvent; 5° Tous autres que la loi désigne expressément. 1292. — Sont également rescindables les paiements, faits en état d'insolvabilité, sur des obligations ne pouvant être exigées du débiteur, au moment dudit paiement. 1293. — Aucun contrat ne sera rescindé pour lésion, hors des cas énumérés aux nos 1 et 2 de l'article 1291. 1294. — L'action en rescision est subsidiaire; on ne pourra l'exercer que dans le cas où la partie lésée n'aura pas d'autre moyen d'obtenir la réparation du préjudice éprouvé. 1295. — La rescision oblige à la restitution des choses qui furent l'objet du contrat avec leurs fruits, et du prix avec ses intérêts; en conséquence, elle ne peut produire effet que si celui, qui la réclame, rend à son adversaire ce qui avait formé sa part d'obligation. De même, il n'y aura lieu à rescision lorsque les choses, objet du contrat, se trouvent légalement entre les mains de tiers qui n'ont pas agi de mauvaise foi. Dans ce cas, on pourra réclamer l'indemnité du préjudice à celui qui a causé la lésion. 1296. — La rescision, dont parle le n°2 de l'article 1291, n'aura pas lieu pour les contrats conclus avec autorisation de justice. 1297. — On présume consentis en fraude des créanciers, tous les contrats en vertu desquels le débiteur aliène ses biens à titre gratuit. On présume également frauduleuses les aliénations, à titre onéreux, faites par des personnes contre lesquelles aurait été auparavant prononcé un jugement de condamnation, dans quelque procès que ce soit, ou délivré un mandat de saisir leurs biens. 1298. — Celui qui, de mauvaise foi, aurait acheté les biens, aliénés en fraude des créanciers, devra les indemniser des dommage et préjudice causés par l'aliénation, toutes les fois qu'il est impossible de les faire rendre pour quelque cause que ce soit. 1299. — L'action pour demander la rescision durera quatre ans. Pour les personnes soumises à la tutelle et pour les absents, les quatre ans ne commenceront à courir pas tant que l'incapacité des premiers n'aura pas cessé ou que le domicile des seconds ne sera pas connu. CHAPITRE VI. — DE LA NULLITÉ DES CONTRATS. 1300. — Les contrats, qui réunissent les conditions énumérées en l'article 1261, peuvent être annulés, même s'il n'y a pas lésion pour les contractants, toutes les fois qu'ils sont atteints d'un des vices qui les rendent sans valeur aux termes de la loi. 1301. — L'action en nullité ne durera que quatre ans. Ce délai commencera à courir: Dans les cas d'intimidation ou de violence, du jour où elle aura cessé; Dans ceux d'erreur, de dol, ou de fausse cause, du jour où le contrat a été conclu; Lorsque l'action a pour but d'invalider les contrats, faits par une femme mariée sans le consentement ou l'autorisation voulus, du jour de la dissolution du mariage; Et lorsqu'on attaque des contrats, conclus par des mineurs ou des incapables, du moment où ils sortent de tutelle. 1302. — Peuvent exercer l'action en nullité de contrat ceux qui sont obligés principalement ou subsidiairement à les exécuter. Les personnes capables ne pourront néanmoins invoquer l'incapacité de ceux avec qui elles auront contracté; ceux qui auront usé d'intimidation ou de violence, ou qui auront eu recours au dol, ou amené l'erreur, ne pourront fonder une action sur ces vices du contrat. 1303. — Lorsqu'une obligation a été déclarée nulle, les contractants doivent se restituer réciproquement les choses qui ont été l'objet du contrat, avec leurs fruits, et le prix avec ses intérêts, sauf les dispositions des articles suivants. 1304. — Lorsque la nullité provient de l'incapacité d'un des contractants, l'incapable n'est obligé de restituer qu'autant qu'il s'est enrichi avec la chose ou le prix qu'il a reçu. 1305. — Lorsque la nullité provient de ce que la cause ou l'objet du contrat est illicite, si le fait constitue un crime ou un délit commun aux deux contractants, ils n'auront aucune action l'un contre l'autre, et s'ils s'intentent un procès, ils feront appliquer aux choses, ou au prix formant la matière du contrat, les dispositions du Code pénal sur les instruments et les choses ayant servi à un crime ou à un délit. Cette disposition est applicable au cas où il n'y aurait eu crime ou délit que de la part d'un des contractants. Toutefois, le non coupable pourra réclamer ce qu'il avait donné, et il ne sera pas obligé à accomplir ce qu'il avait promis. 1306. — Si le fait, qui constitue la chose honteuse, n'est ni un délit, ni une contravention, on observera les règles suivantes: 1° Si la faute est commune aux deux contractants, aucun d'eux ne pourra répéter ce qu'il aurait donné en vertu du contrat, ni réclamer l'accomplissement de ce que l'autre avait promis; 2° Lorsque la faute n'existe que chez un seul contractant, il ne pourra répéter ce qu'il aurait donné en exécution du contrat, ni demander l'accomplissement de ce qui lui aurait été promis. Pour l’autre, qui est étranger à la cause honteuse, il pourra réclamer ce qu'il aurait donné, sans être obligé d'accomplir ce qu'il aurait promis. 1307. — Toutes les fois que l'obligé à la restitution de la chose, par suite de la déclaration de la nullité, ne pourra la restituer parce qu'elle aura péri, il devra restituer les fruits perçus et la valeur qu'avait la chose au moment de sa perte, avec les intérêts à dater de cette même époque. 1308. — Tant que l'un des contractants n'effectue pas la restitution de ce à quoi il est obligé, en vertu de la déclaration de nullité, l'autre ne peut être tenu d'accomplir celle qui lui incombe. 1309. — L'action en nullité demeure éteinte du moment où le contrat a été valablement ratifié. 1310. — On ne peut ratifier que les contrats qui remplissent les conditions requises par l'article 1261. 1311. — La ratification peut se faire expressément ou tacitement. On reconnaîtra qu'il y a ratification tacite lorsque, en connaissance de la cause de nullité, et alors qu'elle a cessé, celui qui avait droit de l'invoquer fera un acte qui impliquera nécessairement la volonté d'y renoncer. 1312. — La ratification ne nécessite le concours que de ceux des contractants à qui appartenait le droit d'exercer l'action en nullité. 1313. — La ratification purge le contrat de tous les défauts qui le viciaient, depuis l'époque où il avait été conclu. 1314. — De même, elle éteindra l'action en nullité des conventions, lorsque la chose, qui en faisait l'objet, avait été perdue par le dol ou la faute de celui qui aurait pu l'exercer. Si la cause de l'action a été l'incapacité de l'un des contractants, la perte de la chose ne sera pas un obstacle au succès de l'action, à moins qu'elle ne soit arrivée par le dol ou la faute du réclamant, depuis qu'il a acquis sa capacité. TITRE III. — DU CONTRAT SUR LES BIENS A L'OCCASION DU MARIAGE. CHAPITRE PREMIER. — DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 1315. — Ceux, qui s'unissent en mariage, pourront arrêter leurs conventions avant de le célébrer, en stipulant les conditions de la société conjugale relativement aux biens présents et futurs, sans autres entraves que celles indiquées dans ce Code. A défaut de contrat sur les biens, on considérera le mariage comme contracté sous le régime de la société légale d'acquêts. 1316. — Dans les contrats auxquels se réfère l'article précédent, les parties ne pourront rien stipuler de contraire aux lois et aux bonnes mœurs, ou qui diminue l'autorité qui appartient respectivement dans la famille à chacun des futurs époux. Toute stipulation, qui ne se conformera pas aux prescriptions de cet article, sera tenue pour nulle. 1317. — On considérera encore comme nulles et non écrites, dans les contrats dont parlent les deux articles précédents, les clauses par lesquelles les contractants disposent, d'une façon générale, que les biens des époux seront soumis aux fueros et coutumes du droit provincial et non aux dispositions de ce Code. 1318. — Le mineur, qui peut se marier en se conformant à la loi, pourra également arrêter ses conventions matrimoniales; mais elles ne seront valables que si les personnes, désignées par la même loi pour donner leur consentement au mineur afin qu'il contracte mariage, concourent à l'acte. Dans le cas où les conventions seraient nulles parce qu'elles manqueraient du concours et de la signature des personnes sus-rappelées, on considérera que le mineur a contracté sous le régime de la société d'acquêts. 1319. — Pour être valable, toute modification faite aux conventions matrimoniales devra avoir lieu avant la célébration du mariage et avec l'assistance et le concours des personnes qui y étaient intervenues comme parties. Le concours des mêmes témoins ne sera pas nécessaire. On ne pourra substituer une personne à une de celles qui avaient concouru à l'acte que si, pour cause de mort, ou pour autre cause légale existant au moment de dresser acte des nouvelles stipulations, sa comparution est devenue impossible ou a cessé d'être nécessaire en vertu d'une disposition de la loi. 1320. — Après la célébration du mariage, on ne pourra modifier les conventions arrêtées avant, qu'il s'agisse des biens présents ou des biens futurs. 1321. — Les conventions matrimoniales et leurs modifications devront être constatées par actes authentiques, dressés avant la célébration du mariage. Sont exceptés de cette règle les biens qui se trouvent dans les conditions dont parle l'article 1324. 1322. — Quelle que soit la modification faite aux conventions matrimoniales, elle n'aura d'effet vis-à-vis des tiers que si elle réunit les conditions suivantes: 1° que sur la minute, par une note marginale, on fasse mention de l'acte notarié ou authentique qui contient les modifications aux premières stipulations; 2° qu'au cas où le contrat primitif aurait dû être transcrit sur le registre de la propriété, on y inscrive également l'acte qui le modifie. Le notaire fera constater ces modifications dans les copies qu'il expédie pour attester les conventions primitives, sous peine, s'il ne le fait, d'indemniser les parties des dommages et préjudices. 1323. — Pour la validité des conventions, arrêtées par celui contre qui un jugement d'interdiction civile ou d'incapacité a été prononcé ou simplement demandé par une poursuite régulière, il sera nécessaire d'obtenir l'assistance et le concours du tuteur, qui lui sera désigné à cet effet par qui il appartiendra, conformément aux dispositions de ce Code et de la loi de procédure civile. 1324. — Toutes les fois que les biens, apportés par les époux, ne sont pas immeubles et que le total de l'apport du mari et de celui de la femme n'excède pas 2500 pesetas, et qu'il n'y a pas de notaire dans la commune de leur résidence, les conventions pourront être arrêtées devant le secrétaire de l'Ayuntamiento (conseil de la ville) et deux témoins qui constateront, sous leur responsabilité, s'il y a lieu, l'apport et la délivrance des biens indiqués. Le contrat ou les contrats originaux seront conservés dans un registre, dans les archives de la municipalité du lieu. Lorsque parmi les apports, quelle que soit leur valeur, il y a un ou plusieurs immeubles, ou si les contrats ont trait à des immeubles, ils seront toujours dressés devant notaire, par acte public, conformément aux prescriptions de l'article 13211. 1325. — Lorsque le mariage est contracté en pays étranger entre un Espagnol et une étrangère, ou entre un étranger et une Espagnole et que les contractants n'ont fait aucune déclaration ou stipulation relative à leurs biens, on considérera, lorsque le mari sera Espagnol, que les époux sont soumis au régime de la société d'acquêts; et lorsque ce sera l'épouse qui sera espagnole, qu'ils sont soumis au régime de droit commun dans le pays du mari: le tout sans préjudice de ce qu'établit ce Code relativement aux biens immeubles. 1326. — Tout ce qui est stipulé dans les conventions et contrats, auxquels se rapportent les articles précédents, dans la prévision d'un mariage futur, restera nul et de nul effet, dans le cas où il ne serait pas célébré. CHAPITRE II. — DES DONATIONS À CAUSE DE MARIAGE. 1327. — Sont donations à cause de mariage celles qui sont faites avant sa célébration, en vue dudit mariage, en faveur de l'un ou de l'autre des époux. 1328. — Ces donations seront régies par les règles établies au titre II du livre troisième, en tant qu'ils ne sont pas modifiés par les articles suivants. 1329. — Les mineurs peuvent faire et recevoir des donations par leur pacte nuptial, toutes les fois qu'ils y sont autorisés par les personnes qui doivent donner leur consentement au mariage. 1330. — L'acceptation n'est pas nécessaire pour la validité de ces donations. 1331. — Les époux peuvent se donner, par contrat de mariage, jusqu'au dixième de leurs biens présents, et quant aux futurs, ils n'en peuvent disposer qu'en cas de mort, et dans la mesure indiquée par les dispositions de ce Code, relatives à la succession testamentaire. 1332. — Le donateur à cause de mariage devra libérer les biens donnés des hypothèques, et des autres charges qui les grèvent, à l'exception des rentes et servitudes, à moins que les conventions et stipulations matrimoniales n'aient exprimé le contraire. 1333. — La donation, faite en vue d'un mariage, n'est révocable que dans les cas suivants: 1° Si elle était conditionnelle et si la condition ne s'accomplit pas. 2° Si le mariage n'arrive pas à se célébrer; 3° Si le mariage a lieu sans l'obtention du consentement, conformément à la règle 2 de l'article 50, ou si le mariage annulé avait été contracté de mauvaise foi par un des époux, conformément au n°3 de l'article 73 de ce Code. 1334. — Toute donation entre époux durant le mariage sera nulle. On ne comprend pas dans cette règle les cadeaux de peu d'importance, que les époux se font dans les occasions de réjouissance de la famille. 1335. — Sera nulle toute donation faite pendant le mariage, par l'un des conjoints aux enfants que l'autre conjoint a d'un précédent mariage, et aux personnes dont il était héritier présomptif à l'époque de la donation. CHAPITRE III. — DE LA DOT. SECTION PREMIÈRE. — De la constitution et de la garantie de la dot. 1336. — La dot se compose de tous les biens et droits que la femme apporte à ce titre en mariage, au moment de le contracter et de ceux qu'au cours de l'union, elle acquiert par donation, succession ou legs ayant un caractère dotal. 1337. — Seront également dotaux, les biens acquis au cours du mariage: 1° Par échange d'autres biens dotaux; 2° Par droit de retrait appartenant à la femme; 3° Par dation en paiement de la dot; 4° Par achat avec des fonds dépendants de la dot. 1338. — Peuvent constituer une dot en faveur de la femme, avant ou depuis la célébration du mariage, les père et mère, les parents des époux et les étrangers à la famille. L'époux peut également constituer une dot à son époux avant le mariage, mais non depuis. 1339. — La dot constituée avant, ou au moment de la célébration du mariage, sera régie, pour tout ce qui n'est pas réglé dans ce chapitre, par les mêmes règles que les donations faites en vue du mariage. La dot constituée postérieurement sera régie par les règles des donations ordinaires. 1340. — Le père ou la mère ou le survivant d'eux sera obligé de doter ses filles légitimes, sauf dans le cas où elles se seraient mariées sans avoir obtenu leur consentement, dans les cas où il était nécessaire d'après la loi. 1341. — La dot obligatoire, dont parle l'article précédent, sera de la moitié de la réserve rigoureusement présumée. Si la fille a des biens équivalents à la moitié de sa réserve, l'obligation cessera; et si la valeur des biens n'arrive pas à la moitié de la réserve, le dotant fournira ce qui est nécessaire pour la remplir. En tout cas, il est interdit de dresser l'inventaire de la fortune des père et mère pour fixer la quotité de la dot, et les tribunaux, par acte de juridiction volontaire, feront le réglement sans autres investigations que les déclarations des dotants et de deux proches parents de la fille, mâles et majeurs, l'un de la ligue paternelle, l'autre de la ligue maternelle, résidant dans la même localité, ou dans le ressort judiciaire. A défaut de parents majeurs, les tribunaux décideront dans leur sagesse, sur les déclarations des père et mère. 1342. — Les pères peuvent remplir l'obligation de doter leurs filles, soit en leur délivrant les biens formant la dot, soit eu leur faisant la rente annuelle des fruits et des intérêts des mêmes biens. 1343. — Lorsque le mari seul, ou les deux époux conjointement ont constitué une dot à leurs filles, elle se paiera sur les biens de la société conjugale; s'il n'y en a pas, elle se paiera par moitié, ou dans la proportion des obligations respectivement contractées, sur les biens propres à chaque époux. Lorsque la femme est seule à doter, on devra imputer ce qu'elle donne ou promet sur ses biens propres. 1344. — La dot reconnue par le mari, mais dont la délivrance n'est pas établie, ou résulte seulement d'un acte privé, ne produira pas d'autre effet que les obligations personnelles. 1345. — Malgré les dispositions de l'article précédent, la femme, dont la dot aurait été reconnue par son mari avant le mariage ou dans la première année de son existence, pourra exiger à toute époque que son mari la lui garantisse par une hypothèque, pourvu qu'elle ait fait constater judiciairement l'existence de ses biens dotaux et autres semblables ou équivalents, au moment de formuler sa demande. 1346. — La dot peut être estimée ou non estimée. Elle sera estimée, si les biens qui la composent ont été évalués lors de la constitution, avec translation de la propriété au mari, ce dernier demeurant obligé à restituer leur valeur. Elle sera non estimée, si la femme conserve la propriété de ses biens, qu'ils aient ou non été évalués, le mari restant obligé à restituer les mêmes biens. Si les conventions ne fixent pas la qualité de la dot, on la considérera comme non estimée. 1347. — L'augmentation ou la détérioration de la dot estimée est au compte du mari, qui n'est tenu de restituer que la valeur qu'il a reçue, et qu'à garantir les droits de la femme dans la forme édictée par les articles suivants. 1348. — Si le mari, qui a reçu une dot estimée, croit que l'évaluation faite lui est préjudiciable, il peut demander la rectification de l'erreur ou de l'exagération. 1349. — Le mari est obligé: 1° D'inscrire à son nom et d'hypothéquer en faveur de sa femme les biens immeubles et les droits réels qu'il a reçus à titre de dot estimée, ou d'autres suffisants pour garantir l'estimation; 2° A garantir, par une hypothèque spéciale suffisante, tous les autres biens qui lui ont été remis comme dot estimée. 1350. — La somme qu'on doit garantir par suite de l'estimation de la dot n'excèdera pas le montant de cette estimation; et si la dot vient à être diminuée, on réduira l'hypothèque dans la même proportion. 1351. — L'hypothèque, constituée par le mari en faveur de la femme, garantira la restitution des biens, ou de leur estimation, dans les cas où elle doit avoir lieu, d'après la loi et dans la mesure qu'elle détermine. Elle cessera de produire effet et pourra être rayée toutes les fois qu'une cause légitime dispensera le mari de restitution. 1352. — La femme mariée majeure peut exiger par elle-même la constitution de l'hypothèque et l'inscription sur les biens dont parle l'article 1349. Si le mariage n'a pas encore été célébré, ou si après sa célébration la femme est mineure, son père, sa mère, ou la personne qui a donné la dot, ou les biens qu'on doit garantir, devront exercer ce droit en son nom, et s'assurer que l'hypothèque constituée est suffisante. A défaut de ces personnes et tant que la femme est mineure ou non mariée, l'exercice de ces droits devra être réclamé par le tuteur, le subrogé tuteur, le conseil de famille ou quelqu'un de ses membres. 1353. — Si le tuteur, le subrogé tuteur ou le conseil de famille ne réclame pas la constitution de l'hypothèque, le fiscal requerra d'office ou à la demande d'une personne quelconque, que le mari soit forcé de la fournir. Les juges municipaux auront également l'obligation de provoquer l'action du ministère fiscal pour l'accomplissement des prescriptions du paragraphe précédent. 1354. — Si le mari n'a pas de biens propres pour constituer l'hypothèque dont parle l'article 1349, il sera obligé de la constituer sur les premiers immeubles ou droits réels qu'il acquerra. 1355. — Toutes les fois que tout ou partie des biens qui composent la dot estimée consiste en effets publics et en valeurs de bourse, et tant que leur importance ne sera pas garantie par l'hypothèque que le mari est tenu de fournir, les titres, inscriptions ou actes, qui les représentent, seront déposés, au nom de la femme, dans un établissement public destiné à cet effet. Le mari en aura connaissance. 1356. — Dans les cas où le mari est tenu de garantir par une hypothèque les biens meubles de la dot non estimée, on appliquera les dispositions contenues dans les articles 1349 et 1355, relativement aux dots estimées. SECTION II. — De l'administration et de l'usufruit de la dot. 1357. — Le mari est l'administrateur et l'usufruitier des biens qui constituent la dot non estimée, il a les droits et les obligations dérivant de l'administration et de l'usufruit, sauf les modifications indiquées dans les articles suivants. 1358. — Le mari n'est pas tenu de fournir la garantie des usufruitiers ordinaires; toutefois, il doit inscrire sur le registre, au nom de la femme, comme dot non estimée, tous les biens meubles et les droits réels qu'il a reçus à ce titre, s'ils ne le sont déjà, et constituer une hypothèque spéciale, suffisante pour garantir sa gestion, son usufruit et la restitution des biens meubles. 1359. — Nonobstant les dispositions des deux articles précédents, le mari qui reçoit à titre de dot estimée ou non estimée des effets publics, des valeurs de bourse, ou des biens fongibles, et qui ne les aura pas garantis par une hypothèque, pourra, néanmoins les échanger contre d'autres équivalents, avec le consentement de sa femme si elle est majeure, et avec celui des personnes désignées dans l'article 1352, si elle est mineure. Il pourra également les aliéner avec le consentement de sa femme ou, s'il y a lieu, des personnes désignées plus haut, à la condition de convertir leur prix en d'autres biens, valeurs, et droits également sûrs. 1360. — La femme conserve la propriété des biens qui constituent la dot non estimée, et par suite son accroissement ou sa perte sont entièrement à son compte. Le mari n'est responsable que des pertes que ces biens subissent par sa faute ou sa négligence. 1361. — La femme peut aliéner, grever et hypothéquer les biens formant sa dot non estimée avec la permission de son mari si elle est majeure, et, si elle est mineure, avec la permission du juge et l'intervention des personnes désignées en l'article 1352. Si elle les aliène, le mari aura l'obligation de fournir une hypothèque dans les mêmes formes et conditions que pour la dot estimée. 1362. — Les biens composant la dot non estimée répondent des dépenses journalières que la femme fait et fait l'aire pour les besoins ordinaires de la famille, et que tolère le mari: toutefois, dans ce cas, on devra discuter préalablement les biens acquêts, et les propres du mari. 1363. — Le mari ne pourra pas, sans le consentement de la femme, louer pour plus de six années les biens immeubles composant la dot inestimée. Dans tous les cas, on considérera comme nulle la perception anticipée des loyers et revenus, faite par le mari pour plus de trois ans. 1364. — Lorsque, conformément aux dispositions de l'article 1315, les époux auront stipulé qu'il n'existera pas entre eux de société d'acquêts; mais n'auront pas indiqué les règles auxquelles leurs biens doivent être soumis, ou bien, si la femme ou ses héritiers renoncent à cette société, on observera les dispositions de ce présent chapitre, et le mari, pour remplir les obligations qui y sont désignées, percevra tous les fruits qu'on considère comme acquêts, dans le cas où il existe une société d'acquêts. SECTION III. — De la restitution de la dot. 1365. — La dot est restituée à la femme ou à ses héritiers dans les cas suivants: 1° Lorsque le mariage est dissous ou déclaré nul; 2° Lorsque l'administration de la dot est transférée à la femme dans le cas prévu par l'article 225; 3° Lorsque les tribunaux le prescrivent conformément aux dispositions de ce Code. 1366. — La restitution de la dot estimée s'effectuera par la remise, que le mari ou ses héritiers feront à la femme ou à ses héritiers, du prix de l'estimation faite au moment de sa constitution. De ce prix on déduira: 1° La dot constituée en faveur des enfants, en tant qu'elle est à la charge des propres de la femme, conformément aux dispositions de l'article 1343. 2° Les dettes contractées par la femme avant le mariage et que le mari aurait payées. 1367. — Les immeubles de la dot non estimée seront rendus dans l'état où ils se trouvent, et s'ils ont été aliénés, on rendra le prix de la vente, à moins qu'il n'ait été employé à remplir une obligation personnelle de la femme. 1368. — Le compte des dépenses et améliorations, faites par le mari pour les biens dotaux non estimés, sera réglé d'après les dispositions relatives au possesseur de bonne foi. 1369. — Une fois le mariage dissous ou déclaré nul, on pourra réclamer immédiatement du mari ou de ses héritiers la restitution des meubles et des immeubles de la dot non estimée. 1370. — On ne pourra exiger du mari ou de ses héritiers, qu'un an après la dissolution du mariage, l'argent, les choses fongibles et les valeurs qui n'existaient pas en tout ou en partie à la dissolution de la société conjugale. 1371. — Le mari ou ses héritiers tiendront compte à la femme ou à ses héritiers de l'intérêt légal, depuis la dissolution du mariage jusqu'à la restitution de la dot, de tout ce qu'on doit payer en argent, de l'estimation des choses fongibles et des revenus que les valeurs de crédit et les effets publics produiront dans cet intervalle d'après leur nature et leurs conditions, sauf les dispositions de l'article 1379. 1372. — A défaut d'accord entre les intéressés et de stipulation expresse dans le contrat de mariage, on devra rendre et payer en argent la créance de dot non estimée, ou la partie de cette créance qui ne s'acquitte pas par la restitution des biens mêmes avec lesquels la dot a été constituée, ou de ceux acquis en remploi. On excepte de cette règle la restitution du prix des meubles dotaux qui n'existent plus. Le mari pourra acquitter cette obligation avec d'autres biens meubles de même sorte, s'il les avait pendant le mariage. La restitution des choses fongibles non estimées se fera avec une égale quantité de la même espèce. 1373. — On devra restituer, de la manière indiquée par l'article précédent, la partie de la créance dotale qui se compose: 1° Des donations légalement faites, pour après sa mort, par le mari à sa femme, sauf les dispositions contre l'époux qui a agi de mauvaise foi, au cas de nullité de mariage et dans le cas de l'article 1440; 2° Des indemnités que le mari doit à sa femme conformément à ce Code. 1374. — On délivrera à la femme, sans l'imputer sur la dot, son lit ordinaire, avec tout ce qui le constitue, et les linges et hardes à son usage ordinaire. 1375. — On délivrera les créances et droits apportés en dot sans estimation, dans l'état où ils se trouvent à la dissolution du mariage, à moins que, le mari ayant négligé de les recouvrer, ils ne soient devenus irrecouvrables; dans ce cas, la femme et ses héritiers auront le droit d'exiger leur valeur. 1376. — Lorsqu'il y a lieu de faire à une même époque la restitution de deux ou de plusieurs dots, on remboursera chacune avec les biens qui en ont fait partie et qui existent encore, et à défaut de ces biens, si la fortune inventoriée ne possède pas de valeurs suffisantes pour acquitter ces dots, on considérera pour le paiement la priorité des dates. 1377. — Pour la liquidation et la restitution de la dot non estimée, on déduira si cela a été payé par le mari: 1° Le montant des frais et dépenses faits pour défendre la dot et la recevoir; 2° Les dettes et charges propres à la dot ou la grevant, et qui ne sont pas au compte de la société d'acquêts, en vertu du contrat de mariage ou des dispositions de ce Code; 3° Les dettes qui sont personnellement dues par la femme en vertu des dispositions de ce Code. 1378. — Au moment de la restitution de la dot, on tiendra compte au mari des donations matrimoniales que sa femme lui aurait faites légalement, sauf la disposition de ce Code au cas de séparation de biens, ou de nullité de mariage, si l'un des époux l'a contracté de mauvaise foi. 1379. — Si le mariage se dissout par le décès de la femme, les intérêts et les fruits de la dot à restituer courront, au profit des héritiers, du jour de la dissolution du mariage. Si le mariage est dissous par la mort du mari, la femme pourra à son choix, soit exiger pendant un an les intérêts et fruits de sa dot, soit demander des aliments qui lui seraient fournis sur la valeur de la succession du mari. Dans tous les cas, la succession fournira à la veuve ses vêtements de deuil. 1380. — A la dissolution du mariage, les fruits et revenus en cours seront répartis entre l'époux survivant et les héritiers du prédécédé, conformément aux règles établies pour la cessation d'un usufruit. CHAPITRE IV. — DES BIENS PARAPHERNAUX. 1381. — Sont paraphernaux les biens que la femme apporte en mariage sans les comprendre dans sa dot, et ceux qu'elle acquiert, depuis sa constitution, sans les y réunir. 1382. — La femme conserve la jouissance des biens paraphernaux. 1383. — Le mari ne pourra exercer les actions relatives aux biens paraphernaux, quelle que soit leur nature, sans l'intervention et le consentement de la femme. 1384. — La femme aura l'administration des biens paraphernaux à moins que, par acte notarié, elle ne les ait délivrés à son mari pour qu'il les administre. Dans ce cas le mari est obligé de fournir hypothèque pour la valeur des meubles qu'il reçoit et de les garantir en la forme établie pour les biens dotaux. 1385. — Les fruits des biens paraphernaux font partie de l'avoir de la société conjugale et sont employés à l'accomplissement des charges du mariage. Ces mêmes biens garantissent cet accomplissement dans le cas de l'article 1362, du moment où les propres du mari et les biens dotaux sont insuffisants pour acquitter cette charge. 1386. — Les obligations personnelles du mari ne pourront être exécutées sur les fruits des biens paraphernaux, à moins qu'on ne prouve que la famille en a profité. 1387. — La femme ne peut, sans l'autorisation de son mari, aliéner, engager ou hypothéquer ses biens paraphernaux, ni comparaître en justice à propos de ces biens, à moins qu'elle n'y ait été autorisée par justice. 1388. — Lorsque les paraphernaux, dont la femme s'est réservée l'administration, consistent en argent, effets publics ou meubles précieux, le mari aura le droit d'exiger leur dépôt, ou leur emploi, de façon à ce que leur aliénation ou leur mise en gage soit impossible sans son consentement. 1389. — Le mari, à qui des biens paraphernaux auront été délivrés, sera soumis, à raison de son administration, aux règles établies pour les biens dotaux non estimés. 1390. — L'aliénation des biens paraphernanx donne à la femme le droit d'exiger la constitution d'une hypothèque, pour la valeur du prix que le mari a reçu. La femme, s'il y a lieu, pourra, comme le mari, exercer sur le prix de vente le droit qu'accordent les articles 1384 et 1388. 1391. — La reddition des biens paraphernaux, dont l'administration aurait été confiée au mari, aura lieu dans les mêmes cas et dans la forme édictée pour les biens dotaux non estimés. CHAPITRE V. — DE LA SOCIÉTÉ D'ACQUÊTS. SECTION PREMIÈRE. — Dispositions générales. 1392. — Au moyen d'une société d'acquêts, le mari et la femme acquerront, chacun par moitié, à la dissolution du mariage, les profits et les avantages obtenus indistinctement par les époux durant le mariage. 1393. — La société d'acquêts commencera au jour de la célébration du mariage. Toute stipulation contraire sera considérée comme nulle. 1394. — La renonciation à cette société ne peut se faire durant le mariage, sinon dans le cas de séparation judiciaire. Lorsque la renonciation aura lieu après une séparation ou après la dissolution ou l'annulation du mariage, on la fera constater par acte public, et les créanciers auront le droit qui leur est reconnu par l'article 1001. 1395. — La société d'acquêts sera régie par les règles du contrat de société, pour tout ce qui n'est pas contraire aux dispositions expresses de ce chapitre. SECTION II. — Des biens propres de chacun des époux. 1396. — Sont biens propres de chacun des époux: 1° Ceux qu'il apporte en mariage comme étant sa propriété; 2° Ceux qu'il acquiert pendant le mariage à titre gratuit; 3° Ceux acquis par droit de retrait ou d'échange avec d'autres biens appartenant à un seul des époux. 4° Ceux achetés avec des fonds appartenant exclusivement à la femme ou au mari. 1397. — Celui qui aurait donné ou promis un capital au mari ne sera pas soumis à la garantie pour éviction, sinon en cas de fraude. 1398. — Les biens donnés ou laissés par testament aux époux, conjointement et avec désignation de parts, appartiendront à la femme comme dot, au mari comme capital dans la proportion déterminée par le testateur, et à défaut de désignation, par moitié, sauf les dispositions de l'article 637. 1399. — Si les donations sont faites avec charge, on déduira de la dot ou du capital de l'époux donataire, l'importance des charges, toutes les fois qu'elles auront été acquittées par la société d'acquitté. 1400. — Dans le cas ou dans les propres d'un des époux se trouve une créance payable en un certain nombre d'années, ou une pension viagère, on observera les dispositions des articles 1402 et 1403 pour déterminer ce qui constitue la dot et forme le capital du mari. SECTION III. — Des biens acquêts. 1401. — Sont acquêts: 1° Les biens acquis à titre onéreux pendant le mariage avec l'avoir commun, que l'acquisition ait été faite au nom de la communauté ou d'un seul des époux. 2° Les biens gagnés par l'industrie, le travail ou les efforts des deux époux ou de l'un deux; 3° Les fruits, rentes et intérêts perçus ou échus au cours du mariage et provenant des biens communs ou des propres de chacun des époux. 1402. — Toutes les fois qu'un des époux est propriétaire d'une valeur ou créance, payable en un certain nombre d'années, on ne considérera pas comme acquêts les sommes échues pendant le mariage, mais on les considérera comme propres du mari ou de la femme, selon qu'elles appartiendront à l'un ou à l'autre. 1403. — Le droit d'usufruit ou de jouissance, appartenant à l'un des époux perpétuellement ou à vie, fera partie de ses propres; mais les fruits, arrérages et intérêts perçus au cours du mariage seront acquêts. On comprend dans cette disposition l'usufruit, que les époux ont sur les biens de leurs enfants, même d'un autre lit. 1404. — Les dépenses utiles, faites au moyen des avances de la société d'acquêts, sur les biens propres de l'un des époux, ou pour l'industrie du mari ou de la femme, sont des acquêts. Il en sera de même des constructions élevées pendant le mariage sur l'immeuble propre à l'un des conjoints en tenant compte de la valeur du sol à l'époux qui en est propriétaire. 1405. — Lorsque la dot ou l'avoir du mari se composent en tout ou en partie de troupeaux qui existent encore à la dissolution du mariage, on considérera comme acquêts les têtes de bétail qui dépassent le nombre de celles apportées en mariage. 1406. — Les gains de jeu du mari ou de la femme et ceux, venus d'autres causes dispensant de restitution, appartiendront à la société d'acquêts sans préjudice, s'il y a lieu, des dispositions du Code pénal. 1407. — On considére comme acquêts tous les biens du ménage, du moment où on ne prouve pas qu'ils sont des propres du mari ou de la femme. SECTION IV. — Des charges et obligations de la société d'acquêts. 1408. — Sont à la charge de la société d'acquêts: 1° Toutes les dettes et obligations, contractées par le mari pendant le mariage, et celles que contracte la femme, dans les cas où elle peut légalement obliger la société conjugale; 2° Les redevances et les intérêts dus, pendant le mariage, à raison des obligations qui sont garanties par les propres des époux et par les acquêts; 3° Les petites réparations et celles de pure conservation faites sur les propres du mari et de la femme. Les grosses réparations ne seront pas à la charge de la société; 4° Les grosses et petites réparations des biens acquêts; 5° L'entretien de la famille, l'éducation des enfants communs et des enfants légitimes de chacun des époux. 1409. — Seront également à la charge de la société d'acquêts les valeurs, données ou promises par le mari aux enfants communs, pour sa part et portion, soit par les deux époux d'un commun accord, lorsqu'il n'a pas été stipulé que cette dette serait acquittée en tout ou en partie, avec les biens propres de l'un des conjoints. 1410. — Le paiement des dettes, contractées par le mari ou la femme avant le mariage, ne sera pas à la charge de la société d'acquêts. Il en sera de même des amendes et condamnations pécuniaires qui pourraient leur être infligées. Néanmoins le paiement des dettes, contractées par le mari ou la femme antérieurement au mariage et des amendes ou condamnations qui leur sont infligées, pourra être poursuivi sur les acquêts après le paiement des créances énumérées dans l'article 1408, si l'époux débiteur n'a pas de propres ou s'ils sont insuffisants; toutefois, à l'époque de la liquidation de la société, les dettes acquittées seront à la charge de celui qui les devait. 1411. — Ce qui a été perdu et payé pendant le mariage par l'un des conjoints à cause d'un jeu, quel qu'il soit, ne diminuera pas sa part des acquêts. La perte non payée qu'un des époux fait à un jeu permis, sera à la charge de la société d'acquêts. SECTION V. — De l'administration de la société d'acquêts. 1412. — Le mari est l'administrateur de la société d'acquêts, sauf ce que dispose l'article 59. 1413. — En outre des pouvoirs qu'il a comme administrateur, le mari pourra aliéner et engager à titre onéreux les biens de la société d'acquêts, sans le consentement de la femme. Néanmoins, toute aliénation ou convention sur les biens, faite par le mari contrairement aux dispositions de ce Code ou en fraude des droits de la femme, ne nuira ni à elle, ni à ses héritiers. 1414. — Le mari ne pourra disposer par testament que de sa moitié des acquêts. 1415. — Le mari pourra disposer des biens de la société d'acquêts pour les causes indiquées dans l'article 1409. Il pourra également faire des dons modérés pour œuvres de piété et de charité, sans toutefois s'en réserver l'usufruit. 1416. — La femme ne pourra obliger les biens de la société d'acquêts sans le consentement de son mari. On excepte de cette règle les cas prévus par l'article 1362 et par les articles 1441 et 1442. SECTION VI. — De la dissolution de la société d'acquêts. 1417. — La société d'acquêts se termine par la dissolution du mariage ou par la déclaration de sa nullité. L'époux, qui par sa mauvaise foi, aura été cause de cette nullité, n'aura pas sa part dans les acquêts. La société se terminera encore dans les cas prévus par l'article 1433. SECTION VII. — De la liquidation de la société d'acquêts. 1418. — La société une fois dissoute, on procédera immédiatement à l'inventaire, mais il n'y aura pas lieu à liquidation: 1° Lors-qu’après la dissolution de la société, un des conjoints ou ses ayants cause a renoncé, en temps utile, à ses effets et conséquences; 2° Lorsque la dissolution de la société a été précédée de la séparation de biens; 3° Dans le cas que prévoit le second paragraphe de l'article précédent. En cas de renonciation, le droit accordé aux créanciers par l'article 1001 restera intact. 1419. — Dans l'inventaire, on comprendra, pour les faire entrer en compte, les sommes qui auraient été payées par la société d'acquêts et qui doivent s'imputer sur la dot ou l'avoir du mari, conformément aux articles 1366,1377 et 1427. On fera également rapporter l'importance des donations et aliénations qu'on doit considérer comme illégales ou frauduleuses, en vertu de l'article 1413. 1420. — On ne comprendra pas dans l'inventaire les objets qui constituent le coucher ordinaire des époux; ces objets, comme les linges et hardes à son usage ordinaire, seront remis au survivant. 1421. — L'inventaire terminé, on liquidera et paiera la dot de la femme, selon les règles établies pour sa restitution par la section troisième du chapitre III de ce titre et en se soumettant aux articles suivants. 1422. — Après le paiement de la dot et des biens paraphernaux, on paiera les dettes, charges et obligations de la société. Lorsque l'actif inventorié sera insuffisant pour remplir les prescriptions de cet article et du précédent, on se conformera aux prescriptions du titre XVII du livre. 1423. — Après le paiement des dettes, charges et obligations de la société, on liquidera et paiera le capital du mari, autant que le permet l'actif inventorié, et en faisant les réductions qui s'imposent, d'après les règles que l'article 1366 fixe pour la dot. 1424. — Après avoir déduit de l'actif inventorié ce que fixent les articles précédents, le surplus de cet actif constituera l'avoir de la société d'acquêts. 1425. — Les pertes et détériorations, subies par les meubles propres à chacun des époux, même par cas fortuit, seront payées par la société d'acquêts lorsqu'elle en avait la jouissance. Quant à celles subies par les immeubles, on n'en tiendra compte en aucun cas, sauf de celles causées aux biens dotaux par la faute du mari; elles donneront lieu à une indemnité, conformément aux dispositions des articles 1360 et 1373. 1426. — Le surplus des acquêts sera divisé par moitié entre le mari et la femme, ou leurs héritiers respectifs. 1427. — Sur l'actif de la succession du mari, on prélévera le vêtement de deuil de la veuve, conformément aux dispositions de l'article 1379. Les héritiers du mari le fourniront conformément à leur position et à leur fortune. 1428. — Pour la confection de l'inventaire, l'estimation et la vente des meubles de la société d'acquêts, la garantie et le cautionnement des dots, et pour les autres choses qui ne sont pas expressément fixées par le présent chapitre, on observera les prescriptions de la section cinquième du chapitre Y, titre III, du livre III, et de la seconde section du chapitre III de ce titre. 1429. — Lorsque la société d'acquêts est dissoute par l'annulation du mariage, on observera les prescriptions des articles 1373, 1378, 1417 et 1440, et si elle est dissoute par la séparation de biens, on accomplira les dispositions du chapitre VI de ce titre. 1430. — Sur la masse des biens communs, on fournira des aliments à l'époux survivant et à ses enfants, pendant que se fait la liquidation des valeurs inventoriées et jusqu'à ce qu'il reçoive sa part. Toutefois, on doit les réduire dans la portion qui excèderait sa part dans les fruits et revenus. 1431. — Toutes les fois qu'il y aura à liquider simultanément les sociétés d'acquêts de deux ou de plusieurs mariages contractés par une même personne, à défaut d'inventaire, on admettra toute sorte de preuve pour fixer l'avoir de chaque société; et en cas de doute, on partagera les acquêts entre les différentes sociétés, proportionnellement à leur durée et aux propres des époux. CHAPITRE VI. — DE LA SÉPARATION DE BIENS DES ÉPOUX ET DE SON ADMINISTRATION PAR LA FEMME DURANT LE MARIAGE. 1432. — A défaut de déclaration expresse dans les conventions matrimoniales, la séparation de biens entre époux n'aura lieu pendant le mariage que par mesure judiciaire, sauf le cas prévu par l'article 50. 1433. — Le mari et la femme pourront solliciter la séparation de biens et on devra la prononcer lorsque le conjoint du demandeur aura été condamné à une peine qui entraîne avec elle l'interdiction civile; ou lorsqu'il aura été déclaré absent, ou lorsqu'il aura donné lieu à la séparation de corps. Pour que la séparation soit prononcée, il suffira de présenter le jugement définitif, rendu contre l'époux coupable ou absent dans chacun des trois cas énumérés. 1434. — Lorsque la séparation de biens aura été accordée, la société d'acquêts sera dissoute et sa liquidation se fera conformément à ce qui est établi dans ce Code. Néanmoins le mari et la femme devront veiller réciproquement à leur entretien et à celui de leurs enfants, ainsi qu'à leur éducation; le tout conformément à l'importance de leurs biens. 1435. — La faculté d'administrer les biens du mariage, accordée par le Code au mari, subsistera lorsque la séparation a été prononcée à sa demande; mais dans ce cas, la femme n'aura pas droit aux acquêts postérieurs, et les droits et obligations du mari seront réglés par les dispositions des sections deuxième et troisième du chapitre III de ce titre. 1436. — Si la séparation de biens a été accordée sur la demande de la femme, à cause de l'interdiction civile du mari, elle lui transférera l'administration de tous les biens du mariage et le droit à tous les acquêts à venir, dont le mari sera privé. Si la séparation de biens est prononcée parce que le mari a été déclaré absent, ou parce qu'il a été la cause de la séparation de corps, la femme reprendra l'administration de sa dot et des autres biens qui lui appartiennent par suite de la liquidation. 1437. — La demande de séparation de biens et le jugement définitif qui la prononce devront être mentionnés et inscrits l'un et l'autre sur les registres de la propriété à ce destinés, si elle a effet sur des immeubles. 1438. — La séparation de biens ne nuira pas aux droits acquis antérieurement par les créanciers. 1439. — Lorsque cesse la séparation de biens par la réconciliation des époux séparés de corps, ou parce que la cause de cette séparation aura disparu, les biens du mariage seront soumis aux mêmes règles qu'avant la séparation, sans préjudice de ce qui aurait été légalement fait pendant sa durée. Au moment de leur réunion, les époux feront constater, par acte public, les biens qu'ils apportent à nouveau, et qui constitueront les propres de chacun d'eux. Dans le cas de cet article, on considérera tous les biens comme formant un nouvel apport, alors que les mêmes existaient, en tout ou en partie, avant la liquidation faite après la séparation. 1440. — La séparation de biens n'autorisera pas les époux à exercer les droits stipulés en cas de décès de l'un d'eux, ni ceux que leur accordent les articles 1374 et 1420; mais elle ne nuira pas à leur exercice lorsque l'événement arrivera, sauf ce que dispose l'article 73. 1441. — L'administration des biens du mariage sera transférée à la femme: 1° Toutes les fois qu'elle sera tutrice de son mari conformément à l'article 220; 2° Lorsqu'elle réclame la déclaration d'absence de son mari, conformément aux articles 183 et 185; 3° Dans le cas du paragraphe premier de l'article 1436. Les tribunaux conféreront encore à la femme l'administration, avec les limitations qu'ils estimeront utiles, si le mari est fugitif, ou déclaré contumace en matière criminelle, ou si, se trouvant absolument empêché d'exercer son administration, il n'a pas pris les mesures nécessaires. 1442. — La femme, sur qui retombe l'administration de tous les biens du mariage, aura sur eux le même pouvoir et la même responsabilité que le mari lorsqu'il les administre, toutefois elle sera toujours soumise aux dispositions du dernier paragraphe de l'article précédent et de l'article 1444. 1443. — L'administration de sa dot sera rendue à la femme, dans le cas prévu par l'article 225 et lorsque les tribunaux l'ordonneront en vertu de l'article 1441; toutefois elle restera soumise aux prescriptions du second paragraphe de l'article 1434. DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 1444. — La femme ne pourra aliéner, ni engager pendant le mariage, sans autorisation judiciaire, les immeubles qui lui sont attribués par suite de la séparation, ni ceux dont l'administration lui est remise. L'autorisation sera accordée toutes les fois qu'on démontrera l'avantage ou la nécessité de l'aliénation. Lorsqu'il s'agira de fonds publics, d'intérêts dans des entreprises ou sociétés commerciales, dont on ne peut retarder la vente sans un préjudice grave et imminent pour la fortune administrée, la femme pourra les vendre par le ministère d'un agent de change ou d'un courtier, en consignant judiciairement le prix, jusqu'à ce qu'on ait obtenu l'approbation du juge ou du tribunal compétent. L'agent de change ou le courtier répondra de la consignation ou dépôt dont parle le paragraphe précédent. TITRE IV. — DU CONTRAT D'ACHAT ET DE VENTE. CHAPITRE PREMIER. — DE LA NATURE ET DE LA FORME DE CE CONTRAT. 1445. — Par le contrat d'achat et de vente, une partie s'oblige à livrer une chose déterminée, et l'autre à payer le prix fixé en argent, ou en valeur fiduciaire le représentant. 1446. — Si le prix de vente consiste en une somme d'argent pour une partie, et en autre chose pour un autre, le contrat sera qualifié d'après l'intention manifestée par les parties contractantes. Si cette intention n'est pas certaine, on considérera le contrat intervenu comme un échange quand la valeur de la chose donnée en paiement excède la somme payée en argent, et comme une vente dans le cas contraire. 1447. — Pour que le prix soit considéré comme fixé, il suffira qu'il le soit par rapport à une autre chose certaine, ou que sa fixation soit abandonnée à l'arbitrage d'une personne désignée. Si elle ne peut ou ne veut fixer ce prix, le contrat demeurera sans valeur. 1448. — On considérera également comme certain le prix de vente de valeurs, grains, liquides et autres choses fongibles lorsqu'on désigne celui que la chose vendue aura un jour fixe, dans une bourse, un marché; ou si on fixe un prix supérieur ou inférieur de tant au prix au cours du jour de la bourse ou du marché, de façon qu'ainsi il soit certain. 1449. — La fixation du prix ne pourra jamais être laissée à l'arbitrage d'un seul des contractants. 1450. — La vente sera parfaite entre l'acheteur et le vendeur, et sera obligatoire pour les deux, lorsqu'on sera convenu de la chose objet du contrat et de son prix, encore que ni l'un ni l'autre n'ait été livré. 1451. — La promesse de vendre ou d'acheter, avec accord sur la chose et sur le prix, donnera aux contractants le droit réciproque de réclamer l'exécution du contrat. Toutes les fois qu'il est impossible d'accomplir la promesse d'achat et de vente, le vendeur et l'acheteur seront soumis aux dispositions édictées dans ce livre sur les contrats et obligations. 1452. — La perte et les profits de la chose vendue, depuis que le contrat est parfait, seront réglés par les dispositions des articles 1096 et 1182. Cette règle s'appliquera à la vente de choses fongibles faite en bloc et par un prix unique ou sans considération de leur poids, nombre ou mesure. Si les choses fongibles sont vendues pour un prix fixé par rapport à leur poids, nombre ou mesure, les risques ne seront pas pour l'acheteur jusqu'au pesage, compte ou mesurage, à moins qu'il n'ait été mis en demeure. 1453. — La vente faite avec réserves d'essayer ou d'éprouver la chose vendue, et la vente des choses qu'on a l'usage de goûter et d'éprouver avant de les recevoir, sont toujours présumées faites sous condition suspensive. 1454. — Si la vente a été faite avec arrhes ou avance de marché, l'acheteur pourra rescinder le contrat en les abandonnant et le vendeur en rendant le double. 1455. — Les frais de rédaction de l'acte sont à la charge du vendeur, ceux de première expédition et autres postérieurs à la vente sont à la charge de l'acheteur sauf convention contraire. 1456. — L'aliénation forcée pour cause d'utilité publique sera régie par les dispositions des lois spéciales. CHAPITRE II. — DE LA CAPACITÉ POUR ACHETER OU VENDRE. 1457. — Pourront former le contrat d'achat et de vente toutes les personnes que le Code autorise à s'obliger, sauf les modifications des articles suivants. 1458. — Le mari et la femme ne pourront réciproquement se vendre leurs biens, à moins qu'ils n'aient adopté le régime de la séparation de biens dans leur contrat de mariage, ou que la séparation de biens judiciaire n'ait été prononcée conformément au chapitre VI du titre III de ce livre. 1459. — Ne pourront acheter, même aux enchères publiques ou judiciaires, ni par eux-mêmes, ni par personne interposée: 1° Le tuteur ou le subrogé tuteur, les biens de la personne ou des personnes dont ils ont la tutelle; 2° Les mandataires, les biens dont l'administration ou l'aliénation leur a été confiée; 3° Les exécuteurs testamentaires, les biens qui leur sont confiés par leur charge; 4° Les fonctionnaires publics, les biens de l'État, des municipalités, des communes et des établissements publics qu'ils ont la charge d'administrer. Cette disposition s'appliquera aux juges et aux experts qui interviendraient dans la vente de quelque façon que ce soit. 5° Les magistrats, juges, membres du Ministère fiscal, greffiers des cours, tribunaux, offices de justice, les biens et droits litigieux devant leur Tribunal ou leur juridiction ou dans le ressort où ils exercent leurs fonctions; cette prohibition s'étendant à l'acquisition par cession. Sont exceptés de cette règle les cas où il s'agit d'actions héréditaires entre cohéritiers, de cession en paiement de créances ou de garantie des biens qu'ils possèdent. La prohibition comprise au numéro 5 s'étend aux avocats et procureurs, pour les biens et droits qui furent l'objet d'un litige, où ils sont intervenus en vertu de leur profession ou de leur charge. CHAPITRE III. — DES EFFETS DU CONTRAT D'ACHAT ET VENTE LORSQUE LA CHOSE VENDUE EST PERDUE. 1460. — Si, au moment de contracter la vente, la chose qui en est l'objet avait péri en totalité ou en partie, le contrat demeurera sans effet. Toutefois, si elle n'avait péri qu'en partie, l'acheteur pourra opter et se désister du contrat, ou réclamer la portion restante en tenant compte de sa valeur proportionnellement au prix convenu pour le tout. CHAPITRE IV. — DES OBLIGATIONS DU VENDEUR. SECTION PREMIÈRE. — Dispositions générales. 1461. — Le vendeur est obligé de délivrer et de garantir la chose, objet de la vente. SECTION II. — De la délivrance de la chose vendue. 1462. — On considérera la chose vendue comme délivrée lorsqu'elle sera mise en la puissance de l'acheteur. Lorsque la vente se fait par acte public, la confection de l'acte équivaudra à la délivrance de la chose objet de la vente, si le contraire ne résulte pas, ou ne se déduit pas clairement de l'acte lui-même. 1463. — Hors des cas énumérés dans l'article précédent, la délivrance des meubles se fera par la délivrance des clés du lieu ou du local où ils sont emmagasinés ou gardés, et par le seul consentement des contractants, si la chose vendue ne peut être mise à la disposition de l'acheteur à l'instant de la vente, ou s'il l'avait déjà à sa disposition pour un autre motif. 1464. — Quant aux biens incorporels, on se conformera aux dispositions du second paragraphe de l'article 1462. En tout autre cas où il ne serait pas applicable, on considérera comme délivrance la remise à l'acheteur des titres de propriété, ou l'usage que l'acheteur fait de son droit du consentement du vendeur. 1465. — Les frais de délivrance de la chose vendue seront à la charge du vendeur, ceux de son enlèvement et de son transport à la charge de l'acheteur, sauf le cas de stipulations spéciales. 1466. — Le vendeur ne sera pas tenu de délivrer la chose vendue si l'acheteur n'a pas payé le prix, ou si un délai de paiement ne lui a pas été imparti dans l'acte de vente. 1467. — De même le vendeur ne sera pas tenu de délivrer la chose vendue, lorsqu'on sera convenu d'un atermoiement ou délai de paiement si, depuis la vente, on découvre que l'acheteur est insolvable au point que le vendeur courre le risque imminent de perdre son prix. On excepte de cette règle le cas où l'acheteur donne une garantie de paiement au terme convenu. 1468. — Le vendeur devra délivrer la chose vendue dans l'état où elle se trouvait au moment de la conclusion du contrat. Tous les fruits appartiennent à l'acheteur du moment où le contrat est parfait. 1469. — L'obligation de délivrer la chose vendue comprend celle de mettre à la disposition de l'acheteur tout ce qui est indiqué au contrat d'après les règles suivantes: Si la vente de biens immeubles a été faite avec désignation de leur contenance, moyennant un prix par unité de nombre ou de mesure, le vendeur aura l'obligation de délivrer à l'acheteur, s'il l'exige, tout ce qui aura été indiqué au contrat; mais si ce n'est possible, l'acheteur pourra opter entre une réduction proportionnelle du prix, ou la rescision du contrat, toutes les fois que, dans ce dernier cas, la perte de mesure n'est pas supérieure au dixième de la contenance attribuée à l'immeuble. Il en sera de même alors que la contenance serait exacte, si une partie de l'immeuble n'est pas de la qualité désignée au contrat. La rescision, dans ce cas, sera abandonnée à la volonté de l'acheteur, lorsque la moins-value de la chose vendue excède le dixième du prix convenu. 1470. — Si, dans le cas de l'article précédent, la mesure ou l'étendue de l'immeuble est supérieure à celle indiquée au contrat, l'acheteur est obligé de payer le supplément du prix, si l'excès de mesure ou de quantité ne dépasse pas le vingtième de la contenance indiquée au contrat; mais s'il dépasse le vingtième, l'acheteur pourra opter entre le paiement du surplus de la valeur de l'immeuble et l'abandon du contrat. 1471. — Dans la vente d'un immeuble dont le prix n'a pas été fixé à raison de tant par unité de mesure ou de quantité, il n'y aura pas lieu à augmentation ou à diminution, même si la mesure est supérieure ou inférieure à celle indiquée au contrat. Il en sera de même lorsque deux ou plusieurs héritages sont vendus par un seul prix: toutefois si on désignait, en plus des limites indispensables à préciser dans toute aliénation d'immeubles, son étendue et contenance, le vendeur sera obligé de délivrer tout ce qui se trouve dans les limites, même si la contenance et la quantité indiquées au contrat sont dépassées. Si le vendeur ne peut faire cette délivrance, il subira une diminution du prix proportionnelle à ce qui manque de la contenance ou de la quantité, à moins que le contrat ne soit annulé parce que l'acheteur ne se contente pas de ce qui lui est délivré. 1472. — Les actions, qui naissent des trois articles précédents, se prescriront par six mois à dater de la délivrance. 1473. — Si une même chose a été vendue à différents acheteurs, la propriété sera transmise à la personne qui aura été de bonne foi mise en possession de la chose, si c'est un meuble. Si c'est un immeuble, la propriété appartiendra à l'acquéreur qui le premier aura inscrit son acte sur le registre. Lorsque l'inscription n'aura pas été faite, la propriété appartiendra à celui qui le premier aura été de bonne foi mis en possession, et à défaut de cela, à celui qui présente le titre le plus ancien, toujours s'il a acquis de bonne foi. SECTION III. — De la garantie. 1474. — En vertu de la garantie à laquelle l'article 1461 fait allusion, le vendeur sera responsable vis-à-vis de l'acheteur: 1° De la possession légale et pacifique de la chose vendue; 2° De ses vices et défauts cachés. § 1er. — De la garantie en cas d'éviction. 1475. — Il y aura éviction lorsque l'acheteur est privé par un jugement définitif, et en vertu d'un droit antérieur à la vente, de tout ou partie de la chose achetée. Le vendeur répondra de l'éviction, même si rien n'a été dit à cet égard dans le contrat. Les contractants peuvent néanmoins augmenter, diminuer ou supprimer cette obligation légale du vendeur. 1476. — Sera nulle toute convention qui exempte le vendeur de répondre de l'éviction, s'il y a mauvaise foi de sa part. 1477. — Lorsque l'acheteur aura renoncé au droit de garantie en cas d'éviction, et que cette éviction aura lieu, le vendeur ne devra rendre au vendeur que la valeur de la chose au moment de l'éviction, à moins que l'acheteur n'ait connu les risques d'éviction et n'en ait accepté les conséquences. 1478. — Lorsque la garantie a été stipulée, ou lorsque rien n'a été convenu sur ce point, l'acheteur aura droit d'exiger du vendeur si l'éviction se produit: 1° La restitution de la valeur de la chose vendue au moment de l'éviction, qu'elle soit supérieure ou inférieure au prix de vente; 2° Les fruits et revenus, si l'acheteur a été condamné à en rendre à celui qui a triomphé dans sa revendication; 3° Les frais du procès qui a amené l'éviction et, s'il y a lieu, ceux du procès en garantie poursuivi contre le vendeur; 4° Les frais du contrat, si l'acheteur les a payés; 5° Les dommages-intérêts et les dépenses volontaires ou de pur agrément ou ornement, si la vente a été faite de mauvaise foi. 1479. — Si l'acheteur perd, par l'effet de l'éviction, une portion de la chose vendue, si importante par rapport à la totalité qu'il n'eut pas acheté sans elle, il pourra exiger la rescision du contrat, mais sera obligé de rendre la chose sans plus de charges qu'elle n'en avait lors du contrat. Il en sera de même lorsque deux ou plusieurs choses auront été vendues conjointement, par un prix unique et spécial pour chacune d'elles, s'il est clairement établi que l'acheteur n'aurait pas acheté l'une sans l'autre. 1480. — La garantie ne pourra être exigée tant que n'aura pas été rendue une décision définitive condamnant l'acheteur à perdre la chose ou une de ses parties. 1481. — Le vendeur sera tenu de la garantie qui lui incombe, s'il est prouvé que la demande d'éviction lui a été notifiée à la requête de l'acheteur. A défaut de cette notification, le vendeur ne sera pas tenu de la garantie. 1482. — L'acheteur actionné demandera, dans le délai fixé par la loi de procédure civile pour répondre à la demande, que cette demande soit notifiée au vendeur ou aux vendeurs, dans le plus bref délai possible. La notification se fera dans la forme prescrite par la même loi pour intenter une action. Le délai de contestation pour l'acheteur restera en suspens tant que ne seront pas expirés ceux qui sont accordés à l'acheteur ou aux vendeurs pour comparaître et contester la demande; ces délais seront ceux-là mêmes que la susdite loi de Procédure civile accorde à tous les défendeurs et on les comptera à partir de la notification édictée par le paragraphe premier de cet article. Si les défendeurs à l'éviction ne comparaissent pas dans le temps et la forme voulue, le délai pour contredire la demande continuera au respect de l'acheteur. 1483. — Si le fonds vendu était grevé, sans que l'acte le mentionnât, de quelque charge ou servitude non apparente, de telle nature qu'on doive présumer que l'acquéreur ne l'eût pas acheté s'il l'avait connue, il pourra demander la rescision du contrat, à moins qu'il ne préfère une indemnité correspondante. Pendant une année, à dater de la confection de l'acte, l'acheteur pourra exercer son action en rescision et demander une indemnité. L'année écoulée, il ne pourra réclamer que l'indemnité dans un même délai à dater du jour où il aura découvert la charge ou servitude. § 2. — De la garantie pour les défauts et les charges cachés de la chose vendue. 1484. — Le vendeur sera tenu à la garantie des défauts cachés de la chose vendue, s'ils la rendent impropre à l'usage auquel elle était destinée; ou s'ils diminuent cet usage de telle façon que, s'il les avait connus, l'acheteur n'aurait pas acheté, ou n'aurait donné qu'un prix moindre. Toutefois l'acheteur ne sera pas responsable des défauts manifestes qui apparaissent au regard, ni même de ceux qui n'apparaissent pas, si l'acheteur est un expert qui, à raison de sa charge ou de sa profession, devait facilement les reconnaître. 1485. — Le vendeur répond des vices et défauts cachés de la chose vendue, même s'il les ignorait. Cette disposition ne sera pas applicable lorsque le contraire aura été stipulé et que le vendeur ignorera les vices et défauts cachés de la chose vendue. 1486. — Dans le cas des deux articles précédents, l'acheteur pourra, à son choix, se désister du contrat en se faisant rembourser les frais payés, ou bien faire réduire du prix une part proportionnelle au préjudice, d'après le jugement des experts. Si le vendeur connaissait les vices et les défauts cachés de la chose vendue, et ne les avait pas déclarés à l'acheteur, ce dernier aura la même option et, en outre, sera indemnisé de ses pertes et préjudices, s'il opte pour la rescision. 1487. — Si la chose vendue périt par suite de ses défauts cachés, connus du vendeur, ce dernier supportera la perte et devra restituer le prix et payer les frais de contrat, ainsi que le dommage et le préjudice. Si le vendeur ne les connaissait pas, il ne devra restituer que le prix et ne payer que les frais du contrat payés par l'acheteur. 1488. — Si la chose vendue avait un vice caché au temps de la vente, et qu'elle périsse depuis par cas fortuit, ou par la faute de l'acheteur, ce dernier pourra réclamer au vendeur le prix payé, avec déduction de la valeur que la chose avait au moment de sa perte. Si le vendeur avait été de mauvaise foi, il devra donner à l'acheteur des dommages et intérêts. 1489. — Dans les ventes publiques, il n'y aura jamais lieu à la responsabilité des dommages et préjudices, mais pour tout le surplus, on appliquera les articles antérieurs. 1490. — Les actions, qui naissent des dispositions des cinq articles précédents, seront éteintes six mois après la délivrance de la chose vendue. 1491. — En vendant deux ou plusieurs animaux conjointement, soit par un prix unique, soit en assignant un prix à chacun d'eux, le vice rédhibitoire d'un de ces animaux ne donnera lieu à l'annulation du contrat que relativement à lui, à moins qu'il n'apparaisse que l'acheteur n'aurait pas acheté l'animal ou les animaux sains sans le malade. Cette dernière hypothèse est présumée se réaliser lorsqu'on achète un attelage, un couple, une paire, un assortiment, même si on a fixé un prix séparé pour chacun d'eux. 1492. — La disposition de l'article précédent sur la vente des animaux est applicable aux autres choses. 1493. — La garantie des vices cachés des animaux et roupeaux n'aura pas lieu dans les ventes aux enchères publiques, ni dans celles des chevaux vendus après réforme, sauf le cas prévu par l'article suivant. 1494. — Ne seront pas l'objet d'un contrat de vente les troupeaux et animaux qui sont atteints de maladies contagieuses. Tout contrat dont ils feraient l'objet sera nul. Sera également nul le contrat de vente de troupeaux et d'animaux, s'ils sont impropres au service ou à l'usage pour lequel ils ont été achetés et qui est indiqué au contrat. 1495. — Même s'il a été procédé à l'examen des animaux, leur vice caché sera considéré comme rédhibitoire, lorsqu'il sera de telle nature que, pour le découvrir, il faudra les connaissances d'un expert. Toutefois si l'expert par ignorance ou mauvaise foi ne le découvre pas ou ne le déclare pas, il sera responsable du dommage et du préjudice. 1496. — L'action rédhibitoire, qui se fonde sur les vices et les défauts des animaux, devra s'intenter dans les quarante jours, à compter de celui de la délivrance à l'acheteur, à moins que des délais plus ou moins longs n'aient été établis par l'usage en chaque localité. Dans les ventes d'animaux, cette action ne pourra s'exercer que pour les vices et défauts fixés par la loi ou par les usages locaux. 1497. — Si l'animal mourait dans les trois jours de l'achat, le vendeur sera responsable, toutes les fois que la maladie, qui a amené la mort, existait avant le contrat d'après la déclaration des experts. 1498. — La vente une fois résolue, l'animal devra être rendu dans l'état où il fut vendu et livré, et l'acheteur sera responsable de toute dépréciation due à sa négligence et ne procédant pas du vice ou défaut rédhibitoire. 1499. — Dans les ventes d'animaux et de troupeaux atteints de vices rédhibitoires, l'acheteur jouira de la faculté accordée par l'article 1486; mais il devra en user dans le délai accordé pour l'exercice de l'action rédhibitoire. CHAPITRE V. — DES OBLIGATIONS DE L'ACHETEUR. 1500. — L'acheteur sera tenu de payer le prix de la chose vendue aux temps et lieu fixés par le contrat. Si rien n'a été fixé, le paiement devra se faire aux temps et lieu de la délivrance de la chose vendue. 1501. — L'acheteur devra les intérêts pour le temps écoulé entre la délivrance de la chose et le paiement du prix dans les trois cas suivants; 1° Si on en est convenu; 2° Si la chose vendue et délivrée produit des fruits et revenus; 3° Si l'acheteur a été mis en demeure conformément à l'article 1100. 1502. — Si l'acheteur est troublé dans sa possession à titre de propriétaire de la chose achetée* ou s'il a une crainte légitime de l'être par une action en revendication ou hypothécaire, il pourra suspendre le paiement du prix, jusqu'à ce que le vendeur ait fait cesser le trouble ou le danger, à moins qu'il ne fournisse une garantie de restitution du prix en ce cas, ou qu'il n'ait été stipulé que, malgré tout événement de ce genre, l’acheteur serait tenu d'effectuer son paiement. 1503. — Si le vendeur a un sérieux motif de craindre de perdre l'immeuble vendu et le prix, il pourra provoquer immédiatement la résolution de la vente. Si ce motif n'existe pas, on observera les dispositions de l'article 1124. 1504. — Dans la vente d'immeubles, même s'il a été stipulé que la résolution aurait lieu de plein droit à défaut de paiement du prix, l'acheteur pourra payer, après l'expiration du terme, tant qu'il n'en aura pas été sommé judiciairement ou par acte notarié. Après cette sommation, le juge ne pourra accorder de nouveau délai. 1505. — Quant aux meubles, la résolution de la vente aura lieu de plein droit dans l'intérêt du vendeur, lorsque l'acheteur, avant l'échéance du délai fixé pour la délivrance de la chose, ne s'est pas présenté pour la recevoir, ou si, s'étant présenté, il n'a pas offert en même temps le prix, à moins qu'un plus long délai n'ait été accordé pour le paiement. CHAPITRE VI. — DE LA RÉSOLUTION DELÀ VENTE. 1506. — La vente se résout par les mêmes causes que toute autre obligation et, en outre, par celles énumérées dans les chapitres précédents, ainsi que par le retrait conventionnel ou légal. SECTION PREMIÈRE. — Du retrait conventionnel. 1507. — Il y aura lieu à retrait conventionnel lorsque le vendeur se réserve le droit de racheter la chose vendue, en s'obligeant à accomplir ce que prescrit l'article 1518 et les autres prestations convenues. 1508. — A défaut de convention expresse, le droit dont parle l'article précédent durera quatre ans à partir de la date du contrat. En cas de stipulation, le délai ne pourra excéder dix ans. 1509. — Si le vendeur n'accomplit pas la prescription de l'article 1518, l'acheteur acquerra définitivement la propriété de la chose vendue. 1510. — Le vendeur pourra exercer son droit contre tout possesseur qui tient son droit de l'acheteur, même si dans le second contrat on n'a pas fait mention du retrait conventionnel, sauf les dispositions de la loi hypothécaire vis-à-vis des tiers. 1511. — L'acheteur est substitué à tous les droits et actions du vendeur. 1512. — Les créanciers du vendeur ne peuvent exercer le retrait conventionnel contre l'acheteur qu'après la discussion des biens du vendeur. 1513. — L'acheteur à pacte de rachat d'une part d'un immeuble indivis, qui en acquiert la totalité dans le cas de l'article 404, pourra obliger le vendeur à racheter le tout s'il veut exercer le retrait. 1514. — Lorsque plusieurs vendent conjointement et par un seul contrat un fonds indivis, avec pacte de rachat, aucun d'eux ne pourra exercer ce droit pour plus que sa part respective. On observera la même règle, si celui qui seul a vendu un domaine laisse plusieurs héritiers; en ce cas chacun d'eux ne pourra que racheter la portion qui lui reviendrait. 1515. — Dans les cas de l'article précédent, l'acheteur pourra exiger que tous les vendeurs ou cohéritiers se mettent d'accord sur le rachat de la totalité de la chose vendue; s'ils n'y parviennent, on ne pourra exiger de l'acheteur un retrait partiel. 1516. — Chacun des co-propriétaires d'un domaine indivis, qui ont vendu séparément leur part, pourra de même exercer séparément le droit de retrait, pour sa part respective, l'acheteur ne pourra le forcer à racheter la totalité du domaine. 1517. — Si l'acheteur laisse plusieurs héritiers, l'action en retrait ne pourra s'exercer contre chacun d'eux que pour sa part respective, que la chose soit indivise ou qu'elle ait été partagée. Si la succession a été partagée et que la chose vendue ait été adjugée à un des héritiers, l'action en retrait pourra être intentée contre lui pour le tout. 1518. — Le vendeur ne pourra faire usage de son droit de retrait sans rembourser à l'acheteur le prix de la vente et en outre: 1° Les frais de contrat et toute autre dépense légitime occasionnée par la vente; 2° Les frais nécessaires et utiles faits sur la chose vendue. 1519. — Lorsqu'au moment du contrat de vente il y a sur la terre des fruits manifestement formés, il n'y aura pas lieu d'en tenir compte, ni même de les répartir au prorata de leur valeur au temps de la vente. S'il n'existait pas de fruits au moment de la vente et qu'il y en ait lors du retrait, on les répartira entre le retrayant et l'acheteur, en attribuant à ce dernier la part correspondante au temps pendant lequel il a possédé le fonds durant la dernière année à dater de la vente. 1520. — Le vendeur, qui recouvre la chose vendue, la recevra libre de toute charge ou hypothèque du chef de l'acheteur, mais il sera obligé de supporter les baux faits de bonne foi et conformément aux usages du lieu. SECTION II. — Du retrait légal. 1521. — Le retrait légal est le droit de se subroger aux lieu et place de celui qui acquiert une chose par achat, ou dation en paiement, en se soumettant aux conditions qui ont été stipulées dans son contrat. 1522. — Le propriétaire d'une chose commune pourra user du droit de retrait, dans le cas d'aliénation au profit d'un étranger, de la part de tous les autres copropriétaires ou de l'un d'eux. Lorsque deux ou plusieurs copropriétaires voudront user du droit de retrait, ils ne pourront le faire qu'au prorata de leur part dans la chose commune. 1523. — De même les propriétaires de fonds limitrophes auront le droit de les retrayer, lorsqu'il s'agira de la vente d'un fonds rural dont la contenance n'excède pas un hectare. Le droit dont parle l'article précédent n'est pas applicable aux terres voisines, mais séparées par des ruisseaux, fossés, fondrières, chemins et autres servitudes apparentes au profit d'autres fonds. Si deux ou plusieurs voisins usent en même temps du droit de retrait, on préférera celui qui est propriétaire du fonds de moindre contenance, et si les fonds sont égaux, celui qui a le premier demandé le retrait. 1524. — On ne pourra exercer le droit de retrait que dans les neuf jours à dater de l'inscription sur le registre, et à son défaut, du moment où le retrayant a eu connaissance de la vente. Le retrait de communauté exclut le retrait de voisinage. 1525. — Dans le retrait légal, il y a lieu d'appliquer les dispositions des articles 1511 et 1518. CHAPITRE VII. — DE LA TRANSMISSION DES CRÉANCES ET AUTRES DROITS INCORPORELS. 1526. — La cession d'un crédit, droit ou action n'aura d'effet contre les tiers que du jour où sa date doit être considérée comme certaine, conformément aux articles 1218 et 1227. Si ces droits sont relatifs à un immeuble, de la date de l'inscription sur le registre. 1527. — Le débiteur qui, avant de connaître la cession, s'acquitte envers le créancier, est libéré de toute obligation. 1528. — La vente ou cession d'une créance comprend tous ses droits accessoires comme les cautions, hypothèques, gages et privilèges. 1529. — Le vendeur de bonne foi répondra de l'existence et de la légitimité de la créance au temps de la vente, à moins qu'il ne l'ait vendue comme une chose douteuse; toutefois il ne répondra pas de la solvabilité du débiteur, à moins qu'on ne l'ait expressément stipulé ou que l'insolvabilité ne soit antérieure et publique. Même dans ces cas, il ne répondra que du prix reçu et des frais mentionnés au n°1 de l'article 1518. Le vendeur de mauvaise foi répondra toujours du paiement de tous les frais, des dommages et préjudices. 1530. — Lorsque le cédant de bonne foi se sera rendu garant de la solvabilité de débiteur et que les contractants n'auront rien stipulé quant à la durée de la garantie, elle ne durera qu'un an à dater de la cession, si l'échéance était arrivée. Si la créance était payable à un terme ou délai non encore arrivé, la garantie cessera un an après l'échéance. Si la créance consistait en une rente perpétuelle, la garantie cessera dix ans après la cession. 1531. — Celui qui vend une succession, sans énumérer les choses qui la composent, ne sera obligé à garantir que sa qualité d'héritier. 1532. — Celui qui vend en bloc et dans leur ensemble la généralité de droits certains, rentes et produits, accomplit son obligation en répondant de la légitimité de son droit en général, mais il ne sera pas tenu de garantir chacune des parties objet du marché, sauf en cas d'une éviction totale ou de la majeure partie. 1533. — Si le vendeur a profité de quelques fruits, ou touché quelque chose de la succession vendue, il devra en tenir compte à l'acheteur à moins de convention contraire. 1534. — L'acheteur devra, de son côté, rembourser au vendeur tout ce qu'il aura payé des dettes et charges de la succession, ainsi que les créances qu'il a contre elle, sauf convention contraire. 1535. — Après la vente d'une créance litigieuse, le débiteur aura droit de l'éteindre en remboursant au cessionnaire le prix qu'il a payé, les dépenses que la vente lui a occasionnées et les intérêts du prix depuis qu'il l'a versé. On considérera une créance comme litigieuse, dès que la demande en paiement en est contestée. Le débiteur pourra user de ce droit dans les neuf jour à dater de celui où le cessionnaire réclame le paiement. 1536. — On excepte de la disposition de l'article précédent la vente ou cession faite: 1° A un cohéritier ou copropriétaire du droit cédé; 2° A un créancier en paiement de sa créance; 3° Au possesseur d'un fonds sujet au droit litigieux cédé. CHAPITRE VIII. — DISPOSITION GÉNÉRALE. 1537. — Toutes les dispositions de ce titre sont soumises aux prescriptions de la loi hypothécaire sur les immeubles. TITRE V. — DE L'ÉCHANGE. 1538. — L'échange est un contrat par lequel chacun des contractants s'oblige à donner une chose, pour en recevoir une autre. 1539. — Si l'un des contractants avait reçu la chose promise en échange, et s'il était établi que cette chose n'était pas la propriété de celui qui l'avait donnée, il ne pourra être obligé de délivrer ce qu'il avait offert en contre échange et accomplira son obligation en remettant ce qu'il avait reçu. 1540. — Celui, qui perd par éviction la chose reçue en échange, aura l'option entre recevoir ce qu'il a donné, et réclamer l'indemnité des dommages et préjudices; mais il ne pourra user du droit de réclamer la chose délivrée qu'autant qu'elle est restée au pouvoir du co-échangiste, et sans porter préjudice aux droits que les tiers auraient acquis sur elle de bonne foi. 1541. — Pour tout ce qui n'est pas spécialement fixé dans ce titre, l'échange sera régi par les dispositions propres à la vente. TITRE VI. — DU CONTRAT DE LOUAGE. CHAPITRE PREMIER. — DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 1542. — Le louage peut avoir pour objet des choses, des travaux, ou des services. 1543. — Dans le louage de choses, une partie s'oblige à donner à l'autre la jouissance ou l'usage d'une chose, pendant un temps déterminé, moyennant un prix certain. 1544. — Dans le louage de travaux ou de services, une partie s'oblige à exécuter un travail, ou à rendre à l'autre un service, moyennant un prix certain. 1545. — Les choses fongibles, qui se consomment par l'usage, ne peuvent être l'objet de ce contrat. CHAPITRE II. — DU LOUAGE DES HÉRITAGES RURAUX ET URBAINS. SECTION PREMIÈRE. — Dispositions générales. 1546. — On appelle bailleur celui qui s'oblige à céder l'usage d'une chose, à exécuter un travail, ou à rendre un service; et preneur celui qui acquiert l'usage de la chose, le droit au travail, ou au service et s'oblige à le payer. 1547. — Lorsque l'exécution d'un contrat de bail verbal sera commencée, et qu'on ne pourra faire la preuve du prix convenu, le preneur rendra au bailleur la chose louée, en tenant compte du prix à fixer pour le temps de sa jouissance. 1548. — Le mari ne pourra donner à bail pour plus de six ans les biens de sa femme, il en sera de même du père ou du tuteur pour les biens de son enfant ou de son pupille, et de l'administrateur pour les biens à raison desquels il n'a pas un pouvoir spécial. 1549. — Au respect des tiers, les locations d'immeubles n'auront d'effet que si elles sont dûment inscrites sur le registre de la propriété. 1550. — Lorsque le contrat de louage de choses ne le défend pas expressément, le preneur pourra sous-louer en tout ou en partie la chose louée, sans préjudice de sa responsabilité de l'exécution de son contrat avec le bailleur. 1551. — En dehors de ses obligations vis-à-vis du sous-bailleur, le sous-locataire sera obligé vis-à-vis du bailleur, à tous les actes relatifs à l'usage et à la conservation de la chose louée, en la forme convenue entre le bailleur et le preneur. 1552. — Le sous-locataire est également obligé vis-à-vis du bailleur, à concurrence du prix de la sous-location dont il serait débiteur au temps de la demande. On considérera comme nuls les paiements anticipés et ceux qui n'auront pas été effectués conformément à l'usage. 1553. — Sont applicables au contrat de louage, les dispositions sur la garantie, contenues au titre de la vente. Dans les cas où on doit procéder à la restitution du prix, on fera une réduction proportionnelle au temps pendant lequel le preneur aura joui de la chose. SECTION II. — Des droits et obligations du bailleur et du preneur. 1554. — Le bailleur est obligé: 1° De délivrer au preneur la chose objet du contrat; 2° De faire au cours du bail toutes les réparations nécessaires pour conserver la chose en état de servir à l'usage auquel elle est destinée; 3° De maintenir au preneur la jouissance paisible de la chose louée pour tout le temps du contrat. 1555. — Le preneur est obligé: 1° De payer le prix du bail, aux termes convenus; 2° D'user de la chose louée en bon père de famille, de l'employer à l'usage convenu, et à défaut de convention, à l'usage qui résulte de la nature de la chose louée selon la coutume du lieu; 3° De payer les frais occasionnés par la rédaction du contrat. 1556. — Si le bailleur ou le preneur n'accomplissent pas les obligations énumérées dans les articles précédents, on pourra demander la rescision du contrat, et la réparation des dommages et préjudices, ou cette seule réparation, en laissant subsister le contrat. 1557. — Le preneur ne peut changer la forme de la chose louée. 1558. — Si, au cours du bail, il est nécessaire de faire à la chose louée une réparation si urgente qu'on ne puisse la différer jusqu'à la fin du bail, le preneur est obligé de la supporter bien qu'elle le gêne et qu'il soit privé, pendant le travail, d'une partie du bien. Si la réparation dure plus de quarante jours, on doit diminuer le prix du bail, proportionnellement à la durée du travail et à la partie du fonds dont le preneur est privé. Si le travail est de telle nature qu'il rende inhabitable la partie de la chose louée, nécessaire à l'habitation du preneur et de sa famille, il pourra résilier le contrat. 1559. — Le preneur est obligé de porter à la connaissance du propriétaire, dans le plus bref délai possible, toute usurpation ou nouvel œuvre nuisible qu'un tiers aurait pratiqué ou ouvertement préparé sur la chose louée. Il sera de même obligé de porter à la connaissance du propriétaire, avec la même diligence, la nécessité des réparations comprises dans le numéro 2 de l'article 1554. Dans ces deux cas, le preneur sera responsable des dommages et préjudices que sa négligence causerait au propriétaire. 1560. — Le bailleur ne sera pas obligé de garantir le preneur contre les simples actes des tiers pouvant troubler en fait sa jouissance; mais le preneur aura une action directe contre le perturbateur. Il n'y a plus simple trouble de fait lorsque le tiers, que ce soit l'Administration, ou un particulier, a agi en vertu d'un droit qui lui appartient. 1561. — Le preneur doit rendre le bien à la fin du bail, tel qu'il l'a reçu, sauf ce qui aurait péri, ou aurait été détérioré par le temps, ou par une cause inévitable. 1562. — A défaut des mentions d'un état des lieux au moment du bail, la loi présume que le preneur les a reçus en bon état, sauf la preuve contraire. 1563. — Le preneur est responsable des détériorations et des pertes de la chose louée, à moins qu'il ne prouve qu'elles se sont produites sans sa faute. 1564. — Le preneur est responsable des détériorations faites par les personnes de sa maison. 1565. — Si le louage est fait pour un temps déterminé, il se termine au jour fixé, sans qu'il soit besoin de congé. 1566. — Si à l'expiration du contrat, le preneur continue, pendant quinze jours, du consentement du bailleur, à jouir de la chose louée, on considérera qu'il y a tacite reconduction pour le temps fixé par les articles 1577 et 1581, à moins qu'il n'y ait eu congé préalable. 1567. — En cas de tacite reconduction, les obligations, prises par un tiers pour la garantie, du contrat principal, cessent de plein droit. 1568. — Si la chose louée vient à périr, ou si une des parties manque d'accomplir des stipulations, on se conformera aux diverses dispositions des articles 1182 et 1183. 1569. — Le bailleur pourra donner judiciairement congé au preneur dans les cas suivants: 1° A l'expiration du terme conventionnel ou de celui que les articles 1577 et 1581 assignent à la durée des baux; 2° A défaut de paiement du prix convenu; 3° Pour inaccomplissement d'une des conditions stipulées au contrat; 4° S'il destine la chose louée à un usage ou à un service non convenu et qui la déprécie; ou s'il ne soumet pas son usage aux prescriptions du numéro 2 de l'article 1555. 1570. — Hors des cas énumérés dans l'article précédent, le preneur aura droit de profiter des délais établis par les articles 1577 et 1581. 1571. — L'acheteur d'un fonds loué a droit d'exiger que le bail prenne fin au moment où se conclut la vente, sauf toute convention contraire et les dispositions de la loi hypothécaire. Si l'acheteur use de son droit, le preneur pourra exiger qu'on lui laisse recueillir les fruits de la récolte de l'année courante et que le vendeur l'indemnise du dommage et du préjudice qui lui est causé. 1572. — L'acheteur à pacte de retrait, ne peut user de la faculté de congédier le fermier, tant que le délai pour exercer le retrait n'est pas arrivé. 1573. — Le preneur aura, sur les améliorations utiles et volontaires, le droit qui est accordé à l'usufruitier. 1574. — Si rien n'a été convenu sur le lieu et l'époque du paiement du prix du bail, on se conformera pour le lieu à la disposition de l'article 1171 et pour le temps à l'usage des lieux. SECTION III. — Dispositions spéciales au louage de fonds ruraux. 1575. — Le preneur n'aura pas droit à diminution de son fermage parce que la terre louée serait stérile, ou parce qu'il aurait perdu ses récoltes par des cas fortuits ordinaires; mais il y aura droit en cas de perte de plus de la moitié des fruits par des cas fortuits extraordinaires et imprévus, sauf toute convention spéciale contraire. On entend par cas fortuits extraordinaires: l'incendie, la guerre, la peste, l'inondation inusitée, les sauterelles, le tremblement de terre ou tout autre événement inaccoutumé et que les contractants n'ont pu raisonnablement prévoir. 1576. — De même, le preneur n'a pas droit à une diminution de fermages, lorsque les fruits ont péri après avoir été détachés des arbres ou racines. 1577. — Le louage d'un fonds rural, dont la durée n'est pas fixée, est censé conclu pour tout le temps nécessaire à.la récolte des fruits que tout le fonds loué produit en une année, ou peut donner en une fois, même s'il faut deux ou plusieurs années pour les obtenir. Pour les terres labourables, divisées en deux ou plusieurs assolements, le bail est censé fait pour autant d'années qu'il y a d'assolements. 1578. — Le fermier sortant doit permettre au fermier entrant l'usage d'un appartement et des autres choses nécessaires pour les travaux préparatoires de l'année suivante; et réciproquement, le fermier entrant doit permettre au fermier sortant l'usage de ce qui est nécessaire pour ramasser et ses fruits et en profiter, conformément à la coutume de la commune. 1579. — Le bail, caractérisé par la mise en société de terres de labour, de troupeaux (cheptel) ou d'établissements de travail et d'industrie, sera régi par les dispositions propres au contrat de société, par les stipulations des parties, et à leur défaut par l'usage des lieux. SECTION IV. — Dispositions spéciales au louage des fonds urbains. 1580. — A défaut de convention spéciale, on se conformera à la coutume de la commune pour les réparations des fonds urbains, qui doivent être au compte du propriétaire. En cas de doute, on les mettra à sa charge. 1581. — S'il n'y a pas de terme fixé, le louage est censé fait pour quatre ans, si on a fixé le loyer à l'année; pour un mois, quand il est au mois, pour un jour quand il est au jour. En tout cas, le bail cesse à l'expiration du terme sans qu'un congé spécial soit nécessaire. 1582. — Lorsque le bailleur d'une maison ou d'un appartement destiné à l'habitation d'une famille, à une boutique, à un magasin, à un établissement industriel, loue également les meubles; ils seront censés loués pour le même temps que l'immeuble. CHAPITRE III. — DU LOUAGE DE TRAVAUX ET SERVICES. SECTION PREMIÈRE. — Du service des domestiques et travailleurs salariés. 1583. — On ne peut s'engager dans cette sorte de service que pour un temps fixé, pour un temps précisé ou pour une œuvre déterminée. L'engagement fait pour toute la vie est nul. 1584. — Le domestique, employé au service de son maître ou de sa famille pour un temps déterminé, peut donner ou recevoir congé avant l'expiration du terme; toutefois, si le maître le congédie sans cause légitime, il devra lui payer les gages acquis et en outre ceux de quinze jours. Le maître sera cru jusqu'à preuve contraire: 1° Pour la quotité des gages de son domestique; 2° Pour le paiement des gages échus de l'année courante. 1585. — En outre des prescriptions des articles précédents, on observera entre les maîtres et les domestiques ce que prescrivent les lois et règlements spéciaux. 1586. — Les garçons de ferme, les artisans, les ouvriers et les autres travailleurs engagés pour un travail déterminé, ne peuvent, sans un juste motif, donner, ni recevoir congé avant l'accomplissement du contrat. 1587. — Le congé donné par les ouvriers, les artisans et autres travailleurs salariés, dont parlent les articles précédents, donne le droit de leur ôter la possession des outils et des appartements qu'ils occupaient à raison de leurs fonctions. SECTION II. — Des travaux sur devis et à prix fixé. 1588. — On peut traiter de l'exécution d'un travail en stipulant que l'ouvrier fournira seulement son travail ou son industrie, ou bien qu'il fournira en outre la matière. 1589. — Si celui qui promet de faire le travail, s'est obligé à fournir la matière, il en subira la perte si elle a lieu avant la livraison du travail, à moins qu'il n'y ait eu mise en demeure de recevoir. 1590. — Celui qui ne s'est obligé qu'à fournir son travail ou son industrie, ne peut réclamer aucun salaire si son œuvre est détruite avant sa livraison, à moins qu'il n'y ait mise en demeure de le recevoir, ou que la destruction n'ait été occasionnée par la mauvaise qualité des matériaux et que l'ouvrier ait, en temps opportun, averti le maître de cette circonstance. 1591. — L'entrepreneur d'un bâtiment, qui s'écroule par suite des vices de la construction, répond de la perte et du préjudice si l'accident se produit dans les dix ans à dater de la fin de la construction. La même responsabilité frappera, pendant le même temps, l'architecte quia dirigé les travaux si la ruine est due à un vice du sol ou de sa direction. Si la cause de la ruine est l'inexécution des conditions du contrat par l'entrepreneur, l'action en indemnité durera quinze ans. 1592. — Celui qui s'oblige à faire un travail par parties et par mesures, peut exiger du maître la réception par parties et le paiement proportionnel. On présume approuvée et reçue la partie payée. 1593. — L'architecte ou l'entrepreneur, qui se charge à forfait de la construction d'un édifice ou d'un autre travail, d'après un plan convenu avec le propriétaire du sol, ne peut demander d'augmentation de prix, même si le prix des ouvriers ou des matériaux est venu à s'élever; mais il pourra le faire lorsqu'on aura fait au plan un changement augmentant le travail, si toutefois le propriétaire y a donné son autorisation. 1594. — Le propriétaire peut abandonner, par sa seule volonté, la construction même commencée, en indemnisant l'entrepreneur de ses frais, de ses travaux et du gain qu'il aurait pu faire. 1595. — Lorsqu'on a confié un travail déterminé à une personne à cause de ses qualités personnelles, le contrat est résolu par le décès de cette personne. Dans ce cas, le propriétaire doit tenir compte aux héritiers de l'entrepreneur, proportionnellement au prix convenu, de la valeur du travail exécuté, et des matériaux préparés s'il en peut tirer profit. Il en est de même toutes les fois que celui qui, a entrepris un travail, ne peut l'achever par une cause indépendante de sa volonté. 1596. — L'entrepreneur répond du travail exécuté par les personnes qu'il occupe à son entreprise. 1597. — Ceux qui apportent leur travail ou leurs matériaux à une entreprise faite à forfait, n'ont d'action contre le propriétaire que dans la mesure de ce qu'il doit encore a l'entrepreneur lors de la réclamation. 1598. — Lorsqu'on convient que le travail sera fait à la satisfaction du propriétaire, on considère qu'à défaut d'entente, l'approbation sera réservée au jugement d'un expert compétent. Si la personne qui doit recevoir le travail est un tiers, on s'en rapportera à sa décision. 1599. — S'il n'y a convention ou coutume contraire, le paiement du prix de l'œuvre devra se faire au lieu où elle a été délivrée. 1600. — Celui qui a fait un travail sur un meuble a droit de le retenir jusqu'à ce qu'on le paie. SECTION III. — Des transports par eau et par terre des personnes et des choses. 1601. — Les voituriers par terre et par eau sont soumis, quant à la garde et à la conservation des choses qui leur sont confiées, aux mêmes obligations que celles imposées aux aubergistes par les articles 1783 et 1784. La disposition de cet article s'applique sans préjudice des prescriptions du Code de commerce pour les transports par mer et par terre. 1602. — Les voituriers répondent également de la perte et des avaries des choses qu'ils reçoivent, à moins qu'ils ne prouvent que la perte ou l'avarie a été produite par un cas fortuit ou de force majeure. 1603. — Les dispositions de ces articles ne portent point atteinte aux prescriptions des lois et règlements spéciaux. TITRE VII. — DES CENS (RENTES FONCIÈRES). CHAPITRE PREMIER. — DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 1604. — On constitue un cens lorsqu'on assujettit certains immeubles au paiement d'un canon, ou rente annuelle en échange d'un capital reçu en argent, ou de la propriété des mêmes immeubles transmise plus ou moins complètement. 1605. — Le cens est emphytéotique, lorsqu'une personne cède à une autre le domaine utile d'un fonds, en s'en réservant le domaine direct et le droit de recevoir de l'emphytéote une rente annuelle comme prix de cette propriété. 1606. — Le cens est délégué (consignativo) lorsque le censitaire (débiteur) grève un immeuble dont il est propriétaire, d'un canon ou rente qu'il s'oblige à payer au censier (créancier) pour prix d'un capital reçu en argent. 1607. — Le cens est réservé lorsqu'une personne cède à une autre la pleine propriété d'un immeuble, en se réservant le droit de percevoir sur ce même immeuble une rente annuelle que doit payer le censitaire. 1608. — Il est de la nature du cens que la cession du capital ou de l'immeuble soit faite à perpétuité, ou pour un temps indéfini; néanmoins le censitaire pourra à son gré racheter le cens, malgré tout pacte contraire: cette disposition sera applicable aux cens qui existent actuellement. Néanmoins, on peut convenir que le rachat du cens n'aura pas lieu durant la vie du censier ou d'une personne déterminée, ou bien qu'on ne pourra le racheter pendant un certain nombre d'années, qui n'excédera pas vingt ans pour le cens délégué, ni soixante pour les cens emphytéotique et réservé. 1609. — Pour arriver au rachat, le censitaire devra avertir le censier un an auparavant, ou lui payer par avance une année de sa rente annuelle. 1610. — Les cens ne peuvent se racheter partiellement, sinon en vertu de convention expresse. De même, on ne pourra racheter contre la volonté du censier si le paiement des rentes est en retard. 1611. — Pour le rachat des cens établis avant la promulgation de ce Code, si le capital n'est pas connu, on le fixera en calculant la rente au taux de 3 0/ 0. Si la rente se fait en fruits, on les estimera pour déterminer le capital d'après leur prix moyen pendant les cinq dernières années. Les dispositions de cet article ne seront pas applicables aux foros, subforos, droits de superficie et autres charges analogues: le principe de leur rachat sera réglé par une loi spéciale. 1612. — Les frais occasionnés par le rachat et la libération du cens seront à la charge du censitaire, sauf ceux occasionnés par une résistance jugée téméraire par les tribunaux. 1613. — Le canon ou rente des cens sera fixé par les parties lors de la rédaction du contrat. Il pourra consister en argent ou en fruits. 1614. — Les rentes seront payées aux termes convenus; à défaut de convention, si elles consistent en une somme d'argent, à l'expiration de chaque année à dater du contrat; si elles consistent en fruits, à la fin de chaque récolte. 1615. — Si on n'a pas désigné dans le contrat le lieu de paiement des rentes, on accomplira cette obligation dans le lieu où le fonds est situé, si le censier ou son mandataire a son domicile dans les limites de la même commune. S'il ne l'a pas, au domicile du censitaire s'il est dans cette commune. 1616. — Le censier peut, au moment de délivrer une portion de sa rente, obliger le censitaire à lui remettre un reçu constatant le paiement fait. 1617. — On peut transmettre à titre onéreux ou gratuit le fonds grevé de cens, ainsi que le droit de percevoir la rente. 1618. — On ne peut, sans le consentement formel du censier, diviser les héritages grevés de cens, même lorsqu'on les acquiert par succession. Lorsque le censier autorise la division, on désignera, de son consentement, les parties qui resteront grevées de chaque portion de rente, en constituant autant de cens spéciaux qu'on a fait de parts de l'immeuble. 1619. — Lorsqu'il s'agit d'attribuer à divers héritiers un fonds grevé de cens, et que le censier ne consent pas à la division, il y a lieu de le liciter entre les dits héritiers. A défaut d'accord, ou bien si aucun d'eux n'offre le prix de l'estimation, on vendra le fonds avec la charge, et on partagera le prix entre les héritiers. 1620. — Le capital, ainsi que les rentes des cens, sont prescriptibles conformément au titre VIII de ce livre. 1621. — Malgré la disposition de l'article 1110, le paiement de deux termes est nécessaire pour faire supposer le paiement des termes précédents. 1622. — Le censitaire est obligé de payer les contributions et autres impôts grevant l'immeuble chargé du cens. Lors du paiement de la rente, on pourra défalquer la part des impôts incombant au censier. 1623. — Les cens donnent lieu à une action sur l'immeuble grevé. En outre de cette action réelle, le censier pourra exercer l'action personnelle pour avoir paiement des termes arriérés et des dommages-intérêts, quand il y aura lieu. 1624. — Le censitaire ne pourra demander la remise ou la réduction de sa rente, à raison de la stérilité accidentelle du fonds ou de la perte de ses fruits. 1625. — Si le fonds grevé de cens périt par cas fortuit, ou devient complétement sans valeur, le cens sera éteint et il n'y aura plus lieu au paiement de la rente. Si la perte n'est que partielle, le censitaire ne sera pas dispensé de payer la rente, à moins qu'il ne préfère abandonner l'immeuble au censier. Si les pertes ont été amenées par le fait du censitaire, il sera, dans ce cas, tenu de réparer dommage et préjudice. 1626. — Dans le cas du paragraphe de l'article précédent, si l'immeuble était assuré, la prime d'assurance sera employée au paiement du capital du cens et des termes échus, à moins que le censitaire ne préfère l'employer à la reconstruction de l'immeuble. Dans ce cas, le cens revivra avec tous ses effets, notamment pour le paiement des termes non acquittés. Le censier pourra exiger que le censitaire garantisse l'emploi de la prime d'assurance à la reconstruction du fonds. 1627. — Si l'immeuble grevé de cens est exproprié pour utilité publique, l'indemnité sera employée au paiement du capital et des termes échus du cens qui demeure éteint. La disposition précédente s'applique également, alors même que l'expropriation forcée ne frappe qu'une portion de l'immeuble, si l'indemnité suffit pour rembourser le capital du cens. Si l'indemnité est insuffisante, le cens continuera de grever le reste de l'immeuble, du moment où sa valeur est suffisante pour garantir le capital du cens majoré de 25 0/0. En outre, le censitaire sera obligé de remplacer par une autre garantie la portion expropriée, ou de racheter le cens à son choix, sauf la disposition de l'article 1631 sur le bail emphytéotique. CHAPITRE II. — DU CENS EMPHYTÉOTIQUE 1. SECTION PREMIÈRE. — Dispositions relatives à l'emphytéose. 1628. — Le cens emphytéotique ne peut s'établir que sur des immeubles et par acte public. 1629. — Lors de la constitution du cens emphytéotique, le contrat déterminera, à peine de nullité, la valeur de l'immeuble et la rente annuelle à payer. 1630. — Lorsque la rente consiste en une quantité déterminée de fruits, le contrat indiquera leur espèce et leur qualité. Si elle consiste dans une certaine portion des produits de l'immeuble, l'emphytéote devra, à défaut de convention expresse sur l'intervention du propriétaire, l'avertir, lui ou son représentant, du jour où il se propose de commencer la récolte de chaque sorte de fruits, afin qu'il puisse, par lui même ou par l'intermédiaire de son représentant, assister à toutes les opérations, jusqu'au moment où il touchera la part lui revenant. L'avis une fois donné, l'emphytéote pourra faire sa récolte sans le concours du propriétaire, de son représentant ou de tout autre intervenant. 1631. — En cas d'expropriation forcée, on se conformera à la disposition du premier paragraphe de l'article 1627, lorsque la totalité de l'immeuble sera expropriée. S'il n'y en a qu'une partie, on répartira l'indemnité entre le propriétaire du domaine direct et celui du domaine utile; ce dernier recevant la portion du capital du cens proportionnelle à la partie expropriée, d'après la valeur attribuée à tout l'immeuble lors de la constitution du cens, ou qui doit servir de base au rachat. Le reste appartiendra à l'emphytéote. Dans ce cas, le cens subsistera sur le reste de l'immeuble avec une réduction correspondante du capital et de la rente, à moins que l'emphytéote n'opte pour le rachat total ou pour l'abandon au profit du propriétaire du domaine direct. Lorsque, conformément aux conventions, on devra payer l'indemnité, le propriétaire du domaine direct ne percevra qu'à ce titre, la portion de l'indemnité qui appartient à l'emphytéote. 1632. — L'emphytéote fait siens les produits du fonds et de ses accessoires. Il a le même droit que le propriétaire sur les trésors et les mines du fonds emphytéotique. 1633. — L'emphytéote peut disposer du fonds emphytéotique et de ses accroissements, par actes entre-vifs ou de dernière volonté, en laissant intacts les droits du propriétaire du domaine direct, et en se soumettant aux dispositions des articles suivants. 1634. — Lorsque la rente consiste dans une certaine portion des fruits du fonds emphytéotique, on ne pourra le grever de servitudes, ou d'autres charges en diminuant les produits, sans le consentement du propriétaire du domaine direct. 1635. — L'emphytéote pourra donner ou échanger librement l'immeuble, en portant ce fait à la connaissance du propriétaire direct. 1636. — Les propriétaires des domaines direct et utile ont réciproquement le droit de. préférence et de retrait, lorsque l'un d'eux vend, ou donne en paiement son droit sur l'immeuble emphytéotique. Cette disposition n'est pas applicable aux aliénations forcées pour cause d'utilité publique. 1637. — Pour l'exécution de l'article précédent, celui, qui est en marché pour l'aliénation de son droit dans un immeuble donné en emphytéose, devra en aviser l'autre propriétaire et lui déclarer le prix qui lui est définitivement offert, ou celui qu'il demande pour consentir l'aliénation. Dans les vingt jours suivant l'avis, le copropriétaire pourra user du droit de préférence, en payant le prix indiqué. S'il ne le fait, il perdra son droit et l'aliénation produira son effet. 1638. — Lorsque le propriétaire direct ou l'emphytéote n'a pas usé du droit de préférence dont parle l'article précédent, il pourra user du droit de retrait pour acquérir le fonds au prix de l'aliénation. Dans ce cas, il devra exercer le retrait dans les neuf jours suivant la rédaction de l'acte de vente. Si cet acte a été dissimulé, on comptera le délai à dater de la transcription sur le registre de la propriété. On présume que la vente est dissimulée, lorsque l'acte n'est pas présenté à la transcription dans les neuf jours de sa rédaction. Indépendamment de cette présomption, la dissimulation peut se prouver par tous moyens légaux. 1639. — Si l'aliénation a été faite sans l'avis préalable prescrit par l'article 1637, le propriétaire du domaine direct, ou celui du domaine utile, selon le cas, pourra exercer l'action en retrait à tout moment, avant l'expiration de l'année qui suivra la transcription sur le registre de propriété. 1640. — Dans les ventes judiciaires d'immeubles emphytéotiques, les propriétaires des domaines direct et utile peuvent respectivement user du droit de préférence, dans les délais fixés par les affiches pour l'adjudication, en payant la mise à prix servant de base aux enchères; et du droit de retrait dans les neuf jours utiles suivant la rédaction de l'acte. Dans ce cas, l'avis préalable, exigé par l'article 1637, cessera d'être nécessaire. 1641. — Lors de l'aliénation de plusieurs immeubles garantissant une même rente, on ne pourra exercer les droits de préférence ou de retrait sur l'un d'eux séparément. 1642. — Lorsque le domaine direct ou le domaine utile appartient indivisément à plusieurs personnes, chacune d'elles peut exercer le droit de retrait en se soumettant aux règles établies pour les communistes; on donnera la préférence au maître du domaine direct, si une partie du domaine utile est aliénée, et à l'emphytéote si l'aliénation est d'une part du domaine direct. 1643. — Si l'emphytéote a été troublé dans son droit par un tiers, qui revendique le domaine direct ou attaque la validité de l'emphytéose, il ne pourra réclamer d'indemnité au propriétaire direct s'il ne lui dénonce l'éviction, conformément aux prescriptions de l'article 1481. 1644. — A l'occasion des aliénations à titre onéreux de fonds emphytéotiques, on ne paiera d'indemnité au propriétaire direct, qu'en cas de stipulation formelle du contrat d'emphytéose. Si, dans la convention, on n'a pas fixé la somme, elle sera de 2 0/0 du prix d'aliénation. Dans les emphytéoses antérieures à la promulgation de ce Code, soumises au paiement d'une indemnité en dehors de toute convention, on continuera cette prestation en la forme accoutumée, mais elle ne dépassera pas 2 0/0 du prix de l'aliénation lorsqu'une indemnité plus forte n'aura pas été expressément convenue. 1645. — L'obligation de payer l'indemnité incombe à l'acquéreur, sauf convention contraire. 1646. — Lorsque l'emphytéote aura obtenu du propriétaire direct l'autorisation d'aliéner, ou lui aura donné l'avis préalable prévu par l'article 1639, le propriétaire direct ne pourra réclamer d'indemnité, si elle est due, que dans l'année suivant la transcription de l'acte sur le registre de la propriété. Hors de ces cas, l'action sera soumise à la prescription ordinaire. 1647. — Tous les vingt-neuf ans, le propriétaire du domaine direct pourra exiger la reconnaissance de son droit par le possesseur de l'immeuble emphytéotique. Les frais de cette reconnaissance seront aux frais de l'emphytéote sans qu'on puisse exiger aucune autre prestation à ce titre. 1648. — Le fonds sera soumis à restitution et le propriétaire direct pourra en réclamer la remise: 1° A défaut de paiement de la rente pendant trois années consécutives; 2° Si l'emphytéote ne remplit pas la condition stipulée au contrat ou détériore gravement le fonds. 1649. — Dans la première hypothèse de l'article précédent, le propriétaire direct, pour pouvoir demander la restitution, devra réclamer son paiement à l'emphytéote judiciairement ou par l'intermédiaire d'un notaire. A défaut de paiement dans les trente jours suivant la réquisition, le droit sera acquis. 1650. — L'emphytéote pourra, dans tous les cas, se dispenser de la restitution en rachetant le cens et en payant les termes échus, dans les trente jours suivant la réquisition de paiement ou l'assignation en restitution. Les créanciers de l'emphytéote peuvent user de ce même droit, dans les trente jours suivant celui où le propriétaire direct en a recouvré la pleine propriété. 1651. — Le rachat du cens emphytéotique consistera à remettre en argent, en une seule fois, au propriétaire du domaine direct le capital fixé, comme valeur du fonds, lors de la constitution du cens; on ne pourra exiger d'autre prestation à moins qu'elle n'ait été stipulée. 1652. — Dans le cas de restitution ou de rescision pour une cause quelconque du contrat d'emphytéose, le propriétaire direct devra tenir compte des améliorations qui ont augmenté la valeur de l'immeuble, du moment où cette augmentation subsiste lors de la reddition de l'immeuble. S'il y avait des détériorations causées par la faute ou la négligence de l'emphytéote, on les compensera avec les améliorations, et si ces dernières ne suffisent pas, l'emphytéote sera personnellement obligé de les payer, ainsi que les termes échus et non prescrits. 1653. — A défaut d'héritiers testamentaires, de descendants, d'ascendants, de conjoint survivant et de parents jusqu'au sixième degré du dernier emphytéote, le fonds emphytéotique retournera au propriétaire du domaine direct dans l'état où il se trouve, à moins que l'emphytéote n'en ait disposé autrement. 1654. — Le contrat de sous-emphytéose sera supprimé à l'avenir. SECTION II. — Des foros et des autres contrats analogues à l'emphytéose. 1655. — Les foros et toute autre charge de même nature, qui s'établiront depuis la promulgation de ce Code, seront régis par les règles posées pour le cens emphytéotique dans la section précédente, lorsqu'ils seront constitués pour un temps indéfini. Lorsqu'ils sont temporaires ou pour une période déterminée, on les considérera comme des locations, et ils seront régis par les dispositions du contrat de louage. 1656. — Sera réglé par les règles suivantes le contrat en vertu duquel le propriétaire du sol en cède l'usage, pour y planter des vignes, pendant le temps que vivent les premiers ceps, moyennant le paiement par le cessionnaire d'une rente annuelle en fruits ou deniers: 1° Il sera terminé après 50 ans de concession lorsqu'un autre terme n'aura pas été fixé; 2° Il sera encore terminé si les premiers ceps meurent; ou si les deux tiers de la plantation ne donnent pas de fruits; 3° Le cessionnaire ou colon peut faire des pépinières et des provins pendant la durée de son contrat; 4° Le contrat ne perd pas son caractère parce qu'il aurait accordé le droit de faire d'autres plantations dans le terrain concédé, du moment où la plantation de la vigne est son principal objet; 5° Le cessionnaire peut transmettre librement son droit à titre gratuit ou onéreux; mais il ne pourra diviser le fonds sans le consentement formel du propriétaire; 6° Dans les aliénations à titre onéreux, le cédant et le cessionnaire auront réciproquement les droits de préférence et de retrait, conformément à ce qui a été décidé pour l’emphythéose et l'obligation de se donner l'avis préalable prescrit par l'article 1637; 7° Le colon ou cessionnaire pourra, si cela lui convient, remettre et délaisser le fonds au cédant en lui tenant compte des dégâts arrivés par sa faute; 8° Le cessionnaire n'aura pas droit aux améliorations de l'immeuble existant à l'extinction du contrat si elles étaient nécessaires et faites en exécution des conventions. Quant aux améliorations utiles et volontaires, il n'aura droit à récompense que s'il les a faites du consentement écrit du propriétaire du sol s'obligeant à les récompenser. Dans ce cas, on donnera la récompense d'après la valeur des travaux lors de la restitution du fonds; 9° Le cédant pourra user du droit de congédier le cessionnaire pour inaccomplissement de la convention; 10° Lors-qu'après l'expiration du délai de cinquante années, ou de celui fixé expressément par les intéressés, le cessionnaire continue à profiter des fruits du consentement tacite du cédant, il ne pourra être congédié sans un avis préalable, qui sera donné un an avant l'expiration de la jouissance. CHAPITRE III. — DU CENS DÉLÉGUÉ. 1657. — Lorsqu'on convient de payer en fruits la rente du cens délégué, on devra en fixer l'espèce, la quantité et la qualité, mais ce cens ne pourra consister en une part aliquote des fruits de l'immeuble engagé. 1658. — Le rachat du cens délégué consiste à remettre au censier (créancier de la rente), en une fois et en argent, le capital qui lui a été remis pour prix de la constitution du cens. 1659. — Lorsqu'on exerce l'action réelle sur l'immeuble assujetti pour avoir paiement de la rente, le censier peut obliger le censitaire, au choix de ce dernier, à racheter le cens, à compléter la garantie ou à lui abandonner le reste de l'immeuble, si sa valeur ne reste pas suffisante pour couvrir le capital et 25 0/0 en plus. 1660. — Le censier pourra également faire usage du droit établi par l'article précédent toutes les fois que la valeur du fonds sera insuffisante pour couvrir le capital du cens, et en outre 25 0/0 s'il se rencontre une des circonstances suivantes: 1° Lorsque l'immeuble a diminué de valeur par la faute ou la négligence du censitaire. Dans ce cas, il sera en outre responsable du dommage et du préjudice; 2° S'il a cessé de payer la rente pendant deux années consécutives; 3° Lorsque le censitaire a été déclaré en état de faillite, de déconfiture ou d'insolvabilité. CHAPITRE IV. — DU CENS RÉSERVÉ. 1661. — On ne peut constituer valablement un cens réservé sans fixer préalablement la valeur de l'immeuble, soit par l'évaluation conforme des parties, soit par une expertise. 1662. — Le rachat de ce cens se fera par le paiement que le censitaire (débiteur de la rente) fera au censier, en argent et en une fois, du capital fixé conformément à l'article précédent. 1663. — La disposition de l'article 1657 est applicable au cens réservé. 1664. — Dans les cas prévus par les articles 1659 et 1660. le débiteur du cens réservé ne pourra être obligé qu'à le racheter ou à abandonner le fonds au censier. TITRE VIII. — DE LA SOCIÉTÉ. CHAPITRE PREMIER. — DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 1665. — La société est un contrat en vertu duquel deux ou plusieurs personnes s'obligent à mettre en commun de l'argent, des biens, ou leur industrie, dans l'intention de partager entre elles le bénéfice. 1666. — La société doit avoir un objet licite et être établie dans l'intérêt commun des associés. Lorsque la dissolution d'une société illicite est prononcée, les bénéfices sont attribués aux établissements de bienfaisance du domicile de la société, et, s'il n'y en a pas, à ceux de la province. 1667. — Une société civile peut être constituée en quelque forme que ce soit, à moins que dans ses apports il n'y ait des immeubles ou des droits réels; dans ce cas un acte public est nécessaire. 1668. — Le contrat de société sera nul, s'il y a des immeubles dans les apports, à moins qu'on n'en ait fait une description signée par les parties, et qui sera annexée à l'acte. 1669. — N'auront pas la personnalité juridique les sociétés dont les conventions sont tenues secrètes entre les associés, et dont chaque associé agit en son propre nom vis-à-vis des tiers. Cette sorte de société sera régie par les dispositions relatives aux biens communs. 1670. — Les sociétés civiles par l'objet auquel elles se consacrent, peuvent revêtir les formes reconnues par le Code de commerce. Alors les dispositions de ce Code leur sont applicables, en tant qu'elles ne sont pas contraires à celles du présent Code. 1671. — La société est universelle ou particulière. 1672. — La société universelle peut comprendre tous les biens présents ou tous les profits. 1673. — La société de tous biens présents est celle par laquelle les parties mettent en commun tous les biens qui leur appartiennent actuellement, dans l'intention de les partager ainsi que les bénéfices qu'ils leur feront réaliser. 1674. — Dans la société universelle de tous les biens présents, les biens qui appartenaient à chacun des associés deviennent la propriété de la société, ainsi que tous les bénéfices réalisés avec eux. On peut encore convenir de mettre en commun toute autre espèce de profits; mais on ne peut comprendre dans la société les biens que les associés acquerront à l'avenir par succession, legs ou donation, même s'il ne s'agissait que des fruits. 1675. — La société universelle de gains comprend tout ce qu'acquièrent les associés par leur travail ou leur industrie, pendant la durée de la société. Les biens meubles et immeubles, que possède chaque associé au moment de la formation du contrat, continuent à être sa propriété propre, la société n'en acquérant que l'usufruit. 1676. — Le contrat de société universelle, formé sans objet déterminé, constitue uniquement une société de bénéfices. 1677. — Une société universelle ne peut être formée entre les personnes auxquelles la donation et la vente sont réciproquement défendues. 1678. — La société particulière a pour unique objet des choses déterminées, leur usage, leurs fruits, ou une entreprise indiquée ou l'exercice d'un art ou d'une profession. CHAPITRE II — DES OBLIGATIONS DES ASSOCIÉS. SECTION PREMIÈRE. — Des obligations des associés entre eux. 1679. — La société commence au moment de la formation du contrat, à moins qu'on ne soit convenu d'une autre époque. 1680. — La société dure pendant tout le temps convenu; à défaut dé convention, pendant le temps que dure l'affaire qui constitue l'objet exclusif de la société, si par sa nature il a une durée limitée; dans tout autre cas, pendant la vie des associés, sauf la faculté réservée par l'article 1700 et la disposition de l'article 1704. 1681. — Chaque associé est débiteur envers la société de ce qu'il a promis d'y apporter. Il est garant de l'éviction des corps certains et déterminés formant son apport social, dans les mêmes cas et de la même manière que le vendeur vis-à-vis de l'acheteur. 1682. — L'associé, qui s'est obligé à verser une somme d'argent et qui ne l'a pas fait, est de droit débiteur des intérêts depuis le jour où le versement devait être effectué, sans préjudice de l'indemnité due pour le dommage causé. Il en est de même pour les sommes que l'associé aurait prises dans la caisse sociale; on commencera à compter les intérêts du jour où il a pris l'argent dans son intérêt particulier. 1683. — Celui qui est associé à raison de son industrie, doit à la société tous les gains, que pendant sa durée, il a obtenus dans la branche d'industrie qui fait l'objet de la société. 1684. — Lorsqu'un associé, autorisé à administrer la société, se fait payer une valeur qui lui était due, en son nom personnel, par un débiteur qui en devait à la société une semblable, également exigible, le paiement doit s'imputer sur les deux créances proportionnellement à leur importance, alors même que l'associé n'aurait donné quittance que pour sa créance personnelle; si la quittance était donnée pour le compte de la société, le paiement conservera cette imputation. La disposition de cet article ne porte pas atteinte à la faculté dont le débiteur peut user, en vertu de l'article 1172, dans le seul cas où la créance personnelle de l'associé est la plus onéreuse. 1685. — L'associé, qui a reçu entièrement sa part dans une créance sociale, sans que les autres associés aient reçu la leur, sera obligé, si le débiteur devient par la suite insolvable, de restituer à la masse sociale ce qu'il a reçu, alors même qu'il n'aurait donné quittance que pour sa part. 1686. — Tout associé doit être obligé de payer à la société le dommage et le préjudice qu'il lui a causés par sa faute, et il peut les compenser avec les bénéfices auxquels il a droit pour son industrie. 1687. — Le risque des choses certaines et déterminées, non fongibles, apportées à la société pour que leur usage et leurs fruits soient communs, est à la charge de l'associé qui en est propriétaire. Si les choses apportées sont fongibles, ou si elles ne peuvent se garder sans détérioration, ou si elles sont apportées pour être vendues, le risque en appartient à la société. Il en sera de même, à défaut de conventions spéciales, des apports figurant dans l'inventaire avec estimation, et, dans ce cas, la réclamation sera bornée au taux de l'estimation. 1688. — La société garantit à tout associé les valeurs qu'il a payées pour elle et dans son intérêt; elle garantit également les obligations qu'il a contractées de bonne foi pour les affaires sociales et les risques inséparables de sa gestion. 1689. — Les pertes et gains se partagent conformément aux conventions. Si la convention ne porte que sur la part de chacun dans les bénéfices, la part dans les pertes sera égale. A défaut de convention, la part de chaque associé dans les profits et pertes sera proportionnée à ce qu'il aura apporté. L'associé, qui n'aura apporté que son industrie, aura une part égale à celle de l'associé ayant apporté le moins. Si, en plus de son industrie, il a apporté un capital, il recevra également la part proportionnelle qui lui appartient. 1690. — Si les associés sont convenus de confier à un tiers la désignation de la part de chacun dans les profits et les pertes, cette désignation ne pourra être attaquée que si elle est évidemment contraire à l'équité. En aucun cas elle ne pourra être attaquée par l'associé qui aura commencé à exécuter la décision du tiers, ou qui aura laissé passer, sans protester, le délai de trois mois depuis qu'il en a eu connaissance. La désignation des parts dans les gains et pertes ne peut être laissée à un associé. 1691. — Est nulle la convention qui exclut un ou plusieurs associés de toute participation aux profits ou aux pertes. Seul l'associé, qui apporte son industrie, peut être exempté de toute responsabilité dans les pertes. 1692. — L'associé, nommé administrateur par l'acte de société, peut faire tous les actes d'administration, malgré l'opposition de ces co-associés, à moins qu'il n'agisse de mauvaise foi. Son pouvoir ne peut être révoqué sans cause légitime. Le pouvoir conféré après la confection de l'acte, et sans qu'une promesse de nomination y ait été faite, peut être révoqué en tout temps. 1693. — Lorsque deux ou plusieurs associés ont été chargés de l'administration de la société, sans que leurs fonctions aient été déterminées et sans qu'on ait stipulé que les uns ne pourraient agir sans le consentement des autres, chacun d'eux peut séparément exercer tous les actes d'administration, mais chacun peut s'opposer aux opérations de l'autre, tant qu'elles n'ont pas produit d'effet légal. 1694. — Dans le cas où il a été stipulé que les associés administrateurs ne peuvent agir sans le consentement les uns des autres, il faut le concours de tous pour la validité de leurs actes, et on ne peut alléguer l'absence, l'empêchement absolu de quelques-uns, à moins qu'il n'y ait danger imminent d'une perte grave ou irréparable pour la société. 1695. — Lorsqu'on n'a pas réglé le mode d'administration on observera les règles suivantes: 1° Tous les associés sont considérés comme fondés de pouvoirs, et ce que chacun d'eux fait seul oblige la société, mais chacun pourra s'opposer aux opérations des autres tant qu'elles n'auront pas produit leur effet légal. 2° Chaque associé peut se servir des choses qui composent le fonds social selon la coutume du lieu, pourvu qu'il ne le fasse pas contre l'intérêt de la société, ou de manière à empêcher l'usage auquel ses associés ont droit. 3° Tout associé peut obliger les autres à payer les frais nécessaires à la conservation de la chose commune. 4° Aucun des associés ne peut, sans le consentement des autres, faire d'innovations sur les immeubles de la société, alors même qu'il allègue qu'elles seraient utiles. 1696. — Chaque associé peut, par sa seule volonté, associer un tiers à sa part; mais ce tiers ne s'immiscera pas dans la société sans le consentement unanime des associés, même si le cédant est un administrateur. SECTION II. — Des obligations des associés vis-à-vis des tiers. 1697. — Pour que la société soit obligée vis-à-vis des tiers par les actes d'un associé, il faut: 1° Que l'associé ait agi en sa qualité et pour le compte de la société; 2° Qu'il ait pouvoir d'obliger la société, en vertu d'un mandat exprès ou tacite; 3° Qu'il ait agi dans la mesure fixée par ce pouvoir ou ce mandat. 1698. — Les associés ne sont pas tenus solidairement des dettes de la société, et aucun d'eux ne peut obliger les autres par un acte personnel, si un pouvoir ne lui a été conféré. La société n'est pas obligée vis-à-vis des tiers par les actes qu'un de ses membres a faits en son nom propre et sans pouvoir suffisant de la société: mais elle est obligée avec cet associé lorsque ces actes lui ont procuré un profit. La disposition de cet article doit être entendue sans préjudice de la règle de l'article 1695, § 1. 1699. — Les créanciers de la société sont payés sur les biens sociaux par préférence aux créanciers de chaque associé. Sans préjudice de ce droit, les créanciers personnels de chaque associé peuvent demander la saisie et la vente de sa part dans l'actif social. CHAPITRE III. — DES MODES D'EXTINCTION DE LA SOCIÉTÉ. 1700. — La société finit: 1° Lorsqu'expire le temps pour lequel elle a été constituée; 2° Lorsque la chose formant son objet périt, ou que la négociation est terminée; 3° Par la mort naturelle, l'interdiction civile ou l'insolvabilité de l'un des associés, dans le cas prévu par l'article 1699; 4° Par la volonté de l'un des associés, en se conformant aux articles 1705 et 1707. Ou excepte des dispositions des numéros 3 et 4 de cet article, les sociétés auxquelles se réfère l'article 1670, dans les cas où elles doivent subsister conformément au Code de commerce. 1701. — Lorsque la chose déterminée, qu'un associé avait promis d'apporter à la société, périt avant d'être délivrée, sa perte entraîne la dissolution de la société. De même, la société se dissout en tout cas par la perte de la chose, lorsque l'associé l'apporte en s'en réservant la propriété et en n'en transférant que l'usage et la jouissance. Toutefois, la société ne se dissout pas par la perte de la chose, lorsqu'elle arrive depuis que la société en a acquis la propriété. 1702. — La société, constituée pour un temps déterminé, peut être prorogée par le consentement des associés. Ce consentement peut être exprès ou tacite; on le prouvera par les moyens ordinaires. 1703. — Si la société est prorogée après l'expiration du terme, on considère qu'il y a une nouvelle constitution de société. Si on la proroge avant l'expiration du terme, on considère que l'ancienne société est continuée. 1704. — Est valable la convention d'après laquelle, en cas de mort d'un associé, la société continue entre les survivants. Dans ce cas, l'héritier du décédé aura seulement le droit de faire faire le partage au jour du décès de son auteur; il ne participera pas aux droits et obligations ultérieurs, à moins qu'ils ne soient la conséquence de ce qui était fait auparavant. S'il a été convenu que la société continuerait avec l'héritier, cette convention sera observée sans préjudice de ce que prescrit le numéro 4 de l'article 1700. 1705. — La dissolution de la société, par la volonté ou par la seule renonciation d'un des associés, a lieu lorsqu'on n'a pas assigné de terme à sa durée, ou lorsqu'il ne résulte pas de la nature de la chose. Pour que la renonciation produise effet, elle doit être faite de bonne foi, en temps opportun: elle doit, en outre, être portée à la connaissance des autres associés. 1706. — La renonciation est de mauvaise foi, lorsque celui qui la fait se propose de s'approprier à lui seul tout le profit qui doit être commun. Dans ce cas, le renonçant ne se dégage pas vis-à-vis de ses associés, mais ceux-ci ont la faculté de l'exclure de la société. La renonciation est réputée faite en temps inopportun, lorsque les choses ne sont pas entières et que la société est intéressée à ce que sa dissolution soit différée. Dans ce cas, la société continuera jusqu'au règlement des affaires pendantes. 1707. — La dissolution de la société ne peut être réclamée par un associé si, par une disposition du contrat ou par la nature de l'affaire, elle a été constituée pour un temps déterminé, à moins qu'il n'existe un juste motif, par exemple si un des associés manque à ses obligations, s'il devient incapable de gérer les affaires sociales, ou pour autre cause semblable, laissée à l'appréciation des tribunaux. 1708. — Le partage entre les associés est réglé par les règles du partage des successions, pour sa forme et pour les obligations qui en résultent. L'associé, qui n'a apporté que son industrie, ne peut obtenir aucune portion des biens apportés, mais seulement les fruits et les bénéfices conformément aux dispositions de l'article 1689, à moins que le contraire n'ait été expressément convenu. TITRE IX. — DU MANDAT. CHAPITRE PREMIER. — DE LA NATURE, DE LA FORME ET DES ESPÈCES DE MANDAT. 1709. — Par le contrat de mandat, une personne s'oblige à accomplir un service, ou à faire une chose pour le compte ou à la décharge d'une autre. 1710. — Le mandat peut être exprès ou tacite. Le mandat exprès peut être donné par acte public ou privé, ou même verbalement. L'acceptation peut être expresse ou tacite, cette dernière se déduit des actes du mandataire. 1711. — A défaut de convention contraire, on suppose que le mandat est gratuit. Nonobstant, si le mandataire a pour occupation de rendre des services de l'espèce à laquelle le mandat se rapporte, l'obligation de le payer est présumée. 1712. — Le mandat est général ou spécial. Le premier s'applique à toutes les affaires du mandant. Le second à une ou à plusieurs affaires déterminées. 1713. — Le mandat conçu en termes généraux ne comprend que les actes d'administration. Pour transiger, aliéner, hypothéquer ou accomplir un acte de plein propriétaire, il est nécessaire d'avoir un mandat spécial. Le pouvoir de transiger n'autorise pas à compromettre devant des arbitres ou amiables compositeurs. 1714. — Le mandataire ne peut outrepasser les termes du mandat. 1715. — On ne considère pas les termes du mandat comme dépassés, lorsque la chose a été accomplie d'une manière plus avantageuse pour le mandant que celle qu'il avait indiquée. 1716. — Le mineur émancipé peut être mandataire, mais le mandant n'aura d'action contre lui que conformément aux dispositions sur les obligations des mineurs. La femme mariée ne peut accepter un mandat sans l'autorisation de son mari. 1717. — Lorsque le mandataire agit en son propre nom, le mandant n'a pas d'action contre les personnes avec lesquelles le mandataire a contracté, ni ces personnes contre lui. Dans ce cas, le mandataire est personnellement obligé au profit de la personne avec laquelle il a contracté, comme si l'affaire lui était personnelle. On excepte le cas où il s'agit de choses propres au mandant. La disposition de cet article ne préjudicie pas aux actions entre le mandant et le mandataire. CHAPITRE II. — DES OBLIGATIONS DU MANDATAIRE. 1718. — Le mandataire est obligé par son acceptation à remplir le mandat, et il répond du dommage et du préjudice causé au mandant par son inexécution. Il doit même terminer l'affaire qu'il avait commencée au décès du mandant, s'il y a danger à la différer. 1719. — Dans l'exécution de son mandat, le mandataire doit se conformer aux instructions de son mandant. Si elles font défaut, il fera tout ce que ferait un bon père de famille, d'après la nature de l'affaire. 1720. — Tout mandataire est obligé de rendre compte de ses opérations et de tenir compte au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu du mandat, même si les valeurs reçues n'appartenaient pas au mandant. 1721. — Le mandataire pourra se substituer un autre mandataire, si le mandant ne le lui a pas défendu; mais il répondra de la gestion du substitué: 1° Lorsqu'on ne lui aura pas donné la faculté de le nommer; 2° Lorsqu'on lui aura donné cette faculté sans désigner la personne, et que celui qui a été nommé était notoirement incapable ou insolvable. Ce qu'aurait fait un mandataire substitué, malgré la défense du mandant, sera nul. 1722. — Dans les cas compris dans les deux numéros de l'article précédent, le mandant peut en outre agir contre le substitué. 1723. — La responsabilité de deux ou de plusieurs mandataires, simultanément institués, n'est pas solidaire à moins qu'on ne l'ait ainsi stipulé. 1724. — Le mandataire doit les intérêts des sommes qu'il a employées à son propre usage du jour de cet usage, et de celles qu'il reste devoir après l'expiration de son mandat, du jour où il a été mis en demeure. 1725. — Le mandataire, qui agit en cette qualité, n'est pas responsable vis-à-vis de la personne avec laquelle il contracte, sinon quand il en prend l'engagement formel, ou lorsqu'il dépasse les termes de son mandat sans donner une connaissance suffisante de son pouvoir. 1726. — Le mandataire est responsable, non-seulement de son dol, mais même de sa faute, qui sera appréciée par les tribunaux, avec plus ou moins de rigueur selon que le mandat sera gratuit ou salarié. CHAPITRE III. — DES OBLIGATIONS DU MANDANT. 1727. — Le mandant doit accomplir toutes les obligations que le mandataire a prises dans les limites de son mandat. En tant qu'il l'a dépassé, le mandataire n'oblige pas son mandant, à moins qu'il n'ait été ratifié expressément ou tacitement. 1728. — Le mandant doit verser par avance, au mandataire qui les demande, les sommes nécessaires à l'exécution du mandat. Si le mandataire avait fait les avances, le mandant doit les lui rembourser, même si l'entreprise n'a pas bien tourné, pourvu que le mandataire soit exempt de faute. Le remboursement comprendra les intérêts de la somme avancée, du jour où l'avance a été faite. 1729. — Le mandant doit encore indemniser le mandataire de tous les dommages et préjudices, éprouvés dans l'exécution du mandat, sans sa faute ou son imprudence. 1730. — Le mandataire pourra retenir en gage les choses, qui font l'objet du mandat, jusqu'à ce que le mandant lui paie l'indemnité et le remboursement dont parlent les deux articles précédents. 1731. — Si deux ou plusieurs personnes ont nommé un mandataire pour une affaire commune, elles sont obligées solidairement pour tous les effets du mandat. CHAPITRE IV. — DES MANIÈRES DONT LE MANDAT FINIT. 1732. — Le mandat finit: 1° Par sa révocation; 2° Par la renonciation du mandataire; 3° Par la mort, l'interdiction, la faillite ou la déconfiture du mandant ou du mandataire. 1733. — Le mandant peut révoquer le mandat à son gré, et réclamer au mandataire la restitution de l'acte constatant le mandat. 1734. — Lorsque le mandat a été donné pour contracter avec des personnes déterminées, sa révocation ne peut leur porter préjudice, à moins qu'on ne la leur ait fait connaître. 1735. — La nomination d'un nouveau mandataire pour une même affaire entraîne la révocation du mandat précédent, du jour où on l'a fait connaître à celui qui avait reçu le premier mandat, sauf ce qui est dit en l'article précédent. 1736. — Le mandataire peut renoncer au mandat en en avertissant son mandant. Si ce dernier éprouve un préjudice par suite de cette renonciation, il devra en être indemnisé par le mandataire, à moins qu'il ne fonde sa renonciation sur l'impossibilité de continuer le mandat sans éprouver un grave préjudice personnel. 1737. — Même lorsqu'il renonce au mandat pour un juste motif, le mandataire doit continuer sa gestion jusqu'à ce que le mandant ait pris les dispositions nécessaires pour suppléer à son défaut. 1738. — Ce que fait le mandataire dans l'ignorance de la mort de son mandant, ou de toute autre cause mettant fin au mandat, est valable et produira tous ses effets vis-à-vis des tiers qui ont contracté avec lui de bonne foi. 1739. — En cas de mort du mandataire, ses héritiers devront porter le fait à la connaissance du mandant et pourvoir provisoirement à ce qu'exigent ses intérêts. TITRE X. — DU PRÊT. DISPOSITION GÉNÉRALE. 1740. — Par le contrat de prêt, une des parties délivre à l'autre soit une chose non fongible, pour qu'elle en use pendant un certain temps et la lui rende: en ce cas on l'appelle commodat; soit de l'argent ou toute autre chose fongible, à condition de lui en remettre autant de même espèce et qualité: dans ce cas il conserve le nom de prêt simple. Le commodat est essentiellement gratuit. Le prêt simple peut être gratuit ou avec convention de payer les intérêts. CHAPITRE PREMIER. — DU COMMODAT. SECTION PREMIÈRE. — De la nature du commodat. 1741. — Le prêteur conserve la propriété de la chose prêtée. L'emprunteur en acquiert l'usage, mais non les fruits; si celui, qui a acquis l'usage de la chose, doit payer quelque rétribution, la convention cesse d'être un commodat. 1742. — Les obligations et les droits, qui naissent du commodat, passent aux héritiers des contractants, à moins que le prêt ait été fait en vue de la personne de l'emprunteur. Dans ce cas, ses héritiers n'ont pas le droit de conserver l'usage de la chose prêtée. SECTION II. — Des obligations de l'emprunteur. 1743. — L'emprunteur est obligé de payer les dépenses ordinaires qui sont nécessitées par l'usage et la conservation de la chose prêtée. 1744. — Si l'emprunteur destine la chose à un usage différent de celui pour lequel elle a été prêtée, ou la conserve à sa disposition plus de temps qu'il n'a été convenu, il sera responsable de sa perte, même si elle arrive par cas fortuit. 1745. — Si la chose a été livrée avec estimation et qu'elle vienne à périr, même par cas fortuit, l'emprunteur répondra du prix, à moins qu'il n'existe une convention l'exonérant expressément de toute responsabilité. 1746. — L'emprunteur ne répond pas des détériorations qui arrivent à la chose prêtée par le seul effet de l'usage et sans sa faute. 1747. — L'emprunteur ne peut retenir la chose prêtée sous prétexte que le prêteur lui doit quelque chose, même pour débours. 1748. — Tous les emprunteurs, à qui on prête conjointement une chose, répondent d'elle solidairement, conformément aux dispositions de cette section. SECTION III. — Des obligations du prêteur. 1749. — Le prêteur ne peut réclamer la chose prêtée qu'alors que l'usage, pour lequel elle a été prêtée, est terminé. Néanmoins, si, avant ce délai, le prêteur en avait un besoin urgent, il pourra en réclamer la restitution. 1750. — Si on n'a pas déterminé la durée du commodat, ni l'usage auquel la chose prêtée était destinée, et si cet usage n'est pas fixé par la coutume locale, le prêteur peut la réclamer à son gré. En cas de doute, la preuve incombe à l'emprunteur. 1751. — Le prêteur doit rembourser les frais extraordinaires occasionnés pendant le prêt par la conservation de la chose prêtée, si l'emprunteur a prévenu le prêteur avant de les faire, à moins que ces frais ne fussent si urgents qu'on ne pût, sans péril, attendre la réception de l'avis. 1752. — Le prêteur qui, connaissant les défauts de la chose prêtée, ne les aurait pas dénoncés à l'emprunteur, répondra du préjudice souffert de ce chef. CHAPITRE II. — DU SIMPLE PRÊT. 1753. — Celui qui reçoit à titre de prêt de l'argent ou une autre chose fongible en acquiert la propriété, et est obligé de rendre au créancier autant de choses de même espèce et qualité. 1754. — L'obligation de celui qui emprunte de l'argent sera régie par la disposition de l'article 1170 de ce Code. Si le prêt a pour objet une autre chose fongible, ou une quantité de métal non monnayé, le débiteur doit rendre une quantité égale à celle reçue, de même espèce et qualité, alors même que le prix en aurait changé. 1755. — Il ne sera pas dû d'intérêts à moins qu'ils n'aient été expressément convenus. 1756. — L'emprunteur qui a payé des intérêts non stipulés ne peut les répéter, ni les imputer sur le capital. 1757. — Les établissements de prêt sur gages restent soumis aux règlements qui les concernent. TITRE XI. — DU DÉPOT. CHAPITRE PREMIER. — DU DÉPÔT EN GÉNÉRAL ET DE SES DIVERSES ESPÈCES. 1758. — Le dépôt est constitué lorsqu'une personne a reçu la chose d'autrui avec l'obligation de la conserver et de la rendre. 1759. — Le dépôt peut se constituer judiciairement ou extra-judiciairement. CHAPITRE II. — DU DÉPÔT PROPREMENT DIT. SECTION PREMIÈRE. — De la nature et de l'essence du contrat de dépôt. 1760. — Le dépôt est un contrat gratuit, sauf convention contraire. 1761. — Le dépôt ne peut avoir pour objet que des objets mobiliers. 1762. — Le dépôt extra-judiciaire est volontaire ou nécessaire. SECTION II. — Du dépôt volontaire. 1763. — Le dépôt volontaire est celui dans lequel la remise est faite par la volonté du déposant. Le dépôt peut encore être fait par deux ou plusieurs personnes, qui se croient des droits sur la chose déposée, entre les mains d'un tiers, qui la délivrera en temps utile à celui à qui elle appartient. 1764. — Si une personne capable de contracter accepte le dépôt fait par un incapable, elle reste soumise à toutes les obligations du dépositaire et peut être obligée à le restituer par le tuteur, le curateur ou l'administrateur de la personne qui a fait le dépôt, ou par elle-même si elle devient capable. 1765. — Si le dépôt a été fait par une personne capable aune autre qui ne l'est pas, le déposant n'aura d'action en revendication de la chose déposée que si elle est encore entre les mains du dépositaire; il ne pourra en réclamer la valeur que dans la mesure où l'incapable aura profité du prix. SECTION III. — Des obligations du dépositaire. 1766. — Le dépositaire est obligé de garder la chose et de la restituer, lorsqu'elle sera réclamée, au déposant, ou à ses ayants cause, ou à la personne désignée au contrat. Sa responsabilité, quant à la garde et à la perte de la chose, sera régie par la disposition du titre Ier de ce livre. 1767. — Le dépositaire ne peut se servir de la chose déposée sans la permission formelle du déposant. En cas contraire, il répondra du dommage et du préjudice. 1768. — Lorsque le dépositaire a la permission d'user et de se servir de la chose déposée, le contrat perd son caractère de dépôt et se change en prêt ou en commodat. La permission ne se présume pas, on devra prouver son existence. 1769. — Lorsque la chose déposée a été remise close et scellée, le dépositaire doit la remettre en même état, et il répondra des dommages et préjudices, si la fermeture ou les scellés ont été brisés par sa faute. La faute du dépositaire est présumée, sauf preuve contraire. Quant à la valeur du dépôt, lorsque l'acte de violence sera imputable au dépositaire, on s'en tiendra à la déclaration du déposant, sauf le résultat de la preuve contraire. 1770. — La chose déposée sera rendue avec tous ses produits et accessions. Si le dépôt consiste en une somme d'argent, on appliquera au dépositaire la disposition de l'article 1724 sur le mandat. 1771. — Le dépositaire ne peut exiger que le déposant prouve qu'il a la propriété de la chose déposée. Néanmoins s'il arrive à savoir que la chose a été volée, et qui en est véritablement propriétaire, il doit faire connaître le dépôt à ce dernier. Si dans le délai d'un mois, malgré cet avis, le propriétaire ne réclame pas, le dépositaire sera affranchi de toute responsabilité, en rendant la chose à celui de qui il l'a reçue. 1772. — Lorsqu'il y aura deux ou plusieurs déposants non solidaires, et que la chose sera susceptible de division, chacun d'eux ne pourra réclamer que sa part. Lorsqu'il y a solidarité, ou si la chose n'admet pas de division, les articles 1141 et 1142 de ce Code régiront le dépôt. 1773. — Lorsque le déposant perd sa capacité de contracter après avoir fait le dépôt, le dépôt ne peut être rendu qu'à ceux qui ont l'administration de ses biens et actions. 1774. — Lorsqu'au moment du dépôt on a désigné l'endroit où il serait rendu, le dépositaire doit y transporter la chose déposée, mais les frais occasionnés par le transport sont à la charge du déposant. A défaut de lieu désigné pour la remise, le dépositaire doit la faire là où se trouve la chose déposée, encore que le dépôt ait été effectué ailleurs, pourvu que le déplacement n'ait pas été fait méchamment par le dépositaire. 1775. — Le dépôt doit être rendu au déposant lorsqu'il le réclame, alors même qu'on aurait, lors de la formation du contrat, fixé un délai de restitution. Cette disposition ne sera pas applicable lorsque le dépôt aura été mis judiciairement entre les mains du dépositaire ou qu'une opposition à la restitution ou à la reddition de la chose déposée, aura été notifiée par un tiers. 1776. — Le dépositaire, qui a de justes raisons de ne pas conserver le dépôt, pourra le rendre avant l'expiration du terme fixé et, si le déposant refuse de le recevoir, il pourra obtenir du juge l'autorisation de le consigner. 1777. — Le dépositaire qui, par un événement de force majeure, a perdu la chose déposée, et a reçu une autre à sa place, sera obligé de remettre cette autre au déposant. 1778. — L'héritier du dépositaire, qui de bonne foi a vendu la chose qu'il ne savait pas déposée, ne sera obligé qu'à rendre le prix qu'il en a reçu, ou à céder ses actions contre l'acheteur, dans le cas où ce prix n'aurait pas été payé. SECTION IV. — Des obligations du déposant. 1779. — Le déposant sera tenu de rembourser au dépositaire les frais qu'il a faits pour la conservation de la chose déposée, et de l'indemniser de tous les préjudices qui ont été occasionnés par le dépôt. 1780. — Le dépositaire peut conserver en gage la chose déposée jusqu'au complet paiement de ce qui est dû à raison du dépôt. SECTION V. — Du dépôt nécessaire. 1781. — Le dépôt est nécessaire: 1° Lorsqu'il est fait en accomplissement d'une obligation légale; 2° Lorsqu'il a lieu à l'occasion d'une calamité, telle qu'un incendie, une ruine, un pillage, un naufrage ou autre circonstance analogue. 1782. — Le dépôt compris sous le numéro 1 de l'article précédent sera régi par les dispositions de la loi qui l'a établi, et à leur défaut par celles sur le dépôt volontaire. Celui compris sous le numéro 2 sera régi par les règles du dépôt volontaire. 1783. — On considère encore comme nécessaire, le dépôt des effets que les voyageurs apportent dans les hôtels et auberges. Les hôteliers et aubergistes en répondent comme des dépositaires, du moment où eux, ou leurs employés ont été avertis, et que les voyageurs, de leur côté, ont observé les précautions qui leur ont été indiquées par les patrons ou leurs employés, pour la garde et conservation de ces effets. 1784. — La responsabilité, dont parle l'article précédent, comprend les dommages causés aux effets des voyageurs par les domestiques et les employés des auberges et hôtels, ainsi que ceux causés par les étrangers, sauf toutefois ceux qui viennent d'un vol à main armée ou de tout autre événement de force majeure. CHAPITRE III. — DU SÉQUESTRE. 1785. — Le dépôt judiciaire ou séquestre a lieu lorsqu'on ordonne la saisie, ou la mise en sûreté de biens litigieux. 1786. — Le séquestre peut avoir pour objet des immeubles aussi bien que des meubles. 1787. — Le dépositaire de biens ou d'objets séquestrés ne peut se délivrer de sa charge tant que le débat, qui a motivé le dépôt n'est pas terminé à moins que le juge ne l'ordonne par suite du consentement de tous les intéressés ou pour toute autre cause légitime. 1788. — Le dépositaire de biens séquestrés est obligé à remplir vis-à-vis d'eux toutes les obligations d'un bon père de famille. 1789. — Pour tout ce qui n'est pas réglé dans ce Code, le séquestre judiciaire est régi par les dispositions de la loi de procédure civile. TITRE XII. — DES CONTRATS ALÉATOIRES OU DE HASARD. CHAPITRE PREMIER. — DISPOSITION GÉNÉRALE. 1790. — Par le contrat aléatoire une des parties, ou les deux réciproquement s'obligent à donner, ou à faire une chose, comme équivalent de ce que l'autre partie a à faire, ou à donner, dans le cas d'un événement incertain, ou qui doit se produire dans un délai indéterminé. CHAPITRE II. — DU CONTRAT D'ASSURANCE'. 1791. — Le contrat d'assurance est celui par lequel l'assureur répond du dommage fortuit qu'éprouvent des biens meubles ou immeubles assurés, moyennant un prix qui peut être fixé librement par les parties. 1792. — Deux ou plusieurs propriétaires peuvent mutuellement assurer le dommage fortuit qu'éprouvent leurs biens respectifs, ce contrat porte le nom d'assurance mutuelle, et lorsqu'on n'a pas stipulé autre chose, il comprend le dommage qui doit être indemnisé par tous les contractants proportionnellement à la valeur des biens de chacun des assurés. 1793. — La convention d'assurance doit être constatée par un acte public ou par un acte privé signé des contractants. 1794. — L'acte devra mentionner: 1° La désignation et la situation des objets assurés et leur valeur; 2° La nature des risques pour lesquels une indemnité est stipulée; 3° Le jour et l'heure où commencent et se terminent les effets du contrat; 4° Les autres conditions convenues entre ces parties. 1795. — Le contrat est sans valeur pour la portion de l'assurance qui dépasse la valeur de la chose assurée, de même, on ne pourra contracter qu'une assurance pour toute la valeur de la chose. Dans le cas où il existe deux ou plusieurs contrats d'assurance pour un même objet, chaque assureur répondra du dommage en proportion de la somme assurée, de façon à ce que la totalité de l'objet de l'assurance soit payé par tous. 1796. — Lorsque le dommage est arrivé, l'assuré doit avertir l'assureur et les autres intéressés dans le délai fixé, et à défaut, dans les vingt-quatre heures à dater du moment où l'assuré a eu connaissance du sinistre. S'il ne le fait, il n'aura plus d'action contre eux. 1797. — Le contrat est nul si, au moment de le conclure, l'assuré savait que l'objet de l'assurance avait éprouvé un dommage, ou si l'assureur savait que les biens avaient été préservés. CHAPITRE III. — DU JEU ET DU PARI. 1798. — La loi n'accorde pas d'action pour réclamer ce que l'on gagne dans un jeu de fortune, de chance ou de hasard; toutefois le perdant ne peut répéter ce qu'il a volontairement payé, à moins qu'il n'y ait eu fraude, ou qu'il ne soit mineur ou incapable d'administrer ses biens. 1799. — La disposition de l'article précédent sur le jeu est applicable au pari. On considère comme prohibés les paris qui sont analogues aux jeux prohibés. 1800. — On ne considère pas comme prohibés les jeux qui contribuent à exercer le corps, comme ceux qui ont pour objet de se former au maniement des armes, les courses à pied, à cheval, en voiture, le jeu de balle et autres de même nature. 1801. — Celui, qui perd dans un jeu ou pari non défendu, est obligé civilement. L'autorité judiciaire peut néanmoins ne pas accueillir la demande, lorsque la somme engagée au jeu ou au pari est excessive, ou bien réduire l'obligation pour tout ce qui excède les habitudes d'un bon père de famille. CHAPITRE IV. — DE LA RENTE VIAGÈRE. 1802. — Le contrat aléatoire de rente viagère oblige le débiteur à payer une pension, ou rente annuelle, pendant la vie d'une ou de plusieurs personnes déterminées, moyennant une valeur en biens meubles ou immeubles dont la propriété est transférée du moment où nait la charge de la rente. 1803. — La rente peut se constituer sur la vie de celui qui donne le capital, sur la vie d'un tiers ou sur celle de plusieurs personnes. On peut de même la constituer au profit de la personne ou des personnes sur la vie desquelles le contrat se base, ou au profit d'une ou de plusieurs autres personnes. 1804. — Est nulle la rente constituée sur la vie d'une personne décédée à la date de l'acte, ou qui, à cette époque, est atteinte d'une maladie qui occasionne son décès dans les vingt jours suivant cette date. 1805. — Le défaut de paiement des termes échus n'autorise pas le créancier de la rente viagère à exiger le remboursement du capital, nia rentrer en possession des biens aliénés; il aura seulement le droit de demander judiciairement le paiement des termes échus et la garantie des termes à venir. 1806. — La rente de l'année du décès de celui qui en jouit sera payée en proportion du nombre des jours de sa vie; si le paiement devait se faire par termes anticipés, on paiera complètement le terme qui a commencé de courir durant la vie du crédit rentier. 1807. — Celui qui constitue à titre gratuit une rente viagère sur ses biens, peut stipuler, au moment de la concession, qu'elle ne pourra être saisie pour les dettes du crédit rentier. 1808. — On ne peut réclamer la rente sans justifier de l'existence de la personne, sur la vie de laquelle elle a été constituée. TITRE XIII. — DES TRANSACTIONS ET COMPROMIS. CHAPITRE PREMIER. — DES TRANSACTIONS. 1809. — La transaction est un contrat par lequel les parties donnant, promettant ou retenant chacune quelque chose, évitent un procès à naître ou éteignent un procès commencé. 1810. — Le tuteur ne peut transiger sur les droits de la personne dont il a la garde qu'en la forme prescrite par le numéro 12 de l'article 269, et par l'article 274 de ce Code. Le père et, à son défaut, la mère peuvent transiger sur les biens de l'enfant qui est sous sa puissance; mais, si la valeur de l'objet de la transaction excède 2000 pesetas, elle n'aura d'effet qu'après avoir été judiciairement approuvée. 1811. — Ni le mari, ni la femme ne peuvent transiger sur les biens et droits dotaux, sinon dans les cas et suivant les formes établies pour les aliéner ou les engager. 1812. — Les corporations, qui ont la personnalité juridique, ne pourront transiger qu'en la forme et dans les conditions requises pour l'aliénation de leurs biens. 1813. — On peut transiger sur l'action civile provenant d'un délit; toutefois l'action publique ne s'éteindra que par l'application de la peine légale. 1814. — On ne peut transiger sur l'état civil des personnes, ni sur les questions matrimoniales, ni sur les aliments futurs. 1815. — La transaction ne comprend que les objets qu'elle indique expressément ou que, par une induction nécessaire de ces termes, on doit y réputer compris. Une renonciation générale à tous ses droits ne s'entend que de ceux qui ont une relation avec la difficulté sur laquelle porte la transaction. 1816. — La transaction a entre les parties l'autorité de la chose jugée, toutefois elle ne sera exécutoire que s'il s'agit d'une transaction judiciaire. 1817. — La transaction conclue par dol, erreur, violence ou fausseté de documents est soumise à la disposition de l'article 1265 de ce Code. Néanmoins une partie ne pourra opposer à l'autre l'erreur de fait, toutes les fois qu'elle aura abandonné un procès commencé. 1818. — La découverte de nouveaux documents n'est pas une cause de nullité ou de rescision de la transaction, s'il n'y a eu mauvaise foi. 1819. — Si, après qu'un procès a été résolu par une décision définitive, on transige sur la difficulté par ce qu'une partie ignore l'existence de cette décision définitive, cette partie pourra demander la rescision de la transaction. L'ignorance d'une décision qui peut être attaquée n'est pas une cause de nullité de la transaction. CHAPITRE II. — DES COMPROMIS. 1820. — Les personnes qui peuvent transiger peuvent remettre à un tiers la décision de leurs contestations. 1821. — La disposition du chapitre précédent sur les transactions est applicable aux compromis. Quant au mode de procéder dans les compromis, à leur étendue, à leurs effets, on se conformera aux dispositions de la loi de Procédure civile. TITRE XIV. — DU CAUTIONNEMENT. CHAPITRE PREMIER. — DE LA NATURE ET DE L'ÉTENDUE DU CAUTIONNEMENT. 1822. — Par le cautionnement, une personne s'oblige à payer ou à faire pour un tiers, dans le cas où ce tiers ne le fait pas. Si la caution s'oblige solidairement avec le débiteur principal, on observera la disposition de la section IV du chapitre III du titre I de ce livre. 1823. — Le cautionnement peut être conventionnel, légal ou judiciaire; gratuit ou à titre onéreux. On peut le constituer non seulement en faveur du débiteur principal, mais encore en faveur d'une autre caution, qu'elle y consente, l'ignore ou s'y oppose. 1824. — Le cautionnement ne peut exister sans une obligation valable. Il peut néanmoins porter sur une obligation, dont la nullité peut être demandée à cause d'une exception personnelle de l'obligé, comme celle de minorité. On excepte de la disposition du précédent paragraphe le cas d'un prêt fait à un fils de famille. 1825. — On peut également fournir un cautionnement en garantie de dettes futures, dont l'importance n'est pas encore connue, mais on ne peut agir contre la caution tant que la dette n'est pas liquide. 1826. — La caution peut prendre des engagements moins étendus que ceux du débiteur principal; mais elle n'en peut prendre de plus onéreux, qu'il s'agisse du principal de la dette ou des conditions. Si l'obligation qu'elle a contractée est plus onéreuse, on la réduira dans les termes de celle du débiteur. 1827. — Le cautionnement ne se présume pas; il doit être formel et ne peut s'étendre au delà des termes de l'acte. S'il est simple ou indéfini, il comprendra non seulement l'obligation principale, mais encore tous ses accessoires, y compris les frais judiciaires, en remarquant toutefois à ce sujet qu'il ne s'étendra qu'aux frais exposés depuis que la caution a été sommée de payer. 1828. — Celui qui est obligé de fournir une caution, doit présenter une personne ayant la capacité de s'obliger et des biens suffisants pour répondre de l'obligation qu'il garantit. La caution sera censée soumise à la juridiction du juge du lieu où l'obligation doit s'accomplir. 1829. — Si la caution devient insolvable, le créancier peut en demander une autre qui réunisse les conditions exigées par l'article précédent. On excepte le cas où le créancier a exigé et stipulé que le cautionnement serait fourni par une personne déterminée. CHAPITRE II. — DES EFFETS DU CONSENTEMENT. SECTION PREMIÈRE. — Des effets du cautionnement entre la caution et le créancier. 1830. — La caution ne peut être tenue de payer le créancier sans qu'on ait auparavant discuté les biens du débiteur. 1831. — Il n'y a pas lieu à discussion: 1° Lorsque la caution y a expressément rénoncé; 2° Lorsqu'elle s'est obligée solidairement avec le débiteur; 3° Lorsque le débiteur est en faillite ou en déconfiture. 4° Lorsque la discussion ne peut se faire dans l'intérieur du royaume. 1832. — Pour que la caution puisse profiter du bénéfice de discussion, elle doit l'opposer au créancier dès qu'elle est sommée de payer et indiquer les biens du débiteur, situés sur le territoire espagnol, qu'on peut réaliser et qui sont suffisants pour couvrir l'importance de la dette. 1833. — Lorsque la caution a rempli toutes les conditions de l'article précédent, le créancier, qui néglige la discussion des biens indiqués, est responsable, dans la mesure de la valeur qu'ils perdent, de l'insolvabilité du débiteur résultant de cette négligence. 1834. — Le créancier pourra assigner la caution lorsqu'il somme le débiteur principal, toutefois le bénéfice de discussion restera entier, même si la condamnation est prononcée contre les deux. 1835. — La transaction, intervenue entre la caution et le créancier, ne produit pas d'effet vis-a-vis du débiteur principal. Celle faite par ce dernier produit effet vis-à-vis de la caution, même malgré sa volonté. 1836. — La caution d'une caution jouit du bénéfice de discussion vis-à-vis de la caution et vis-à-vis du débiteur principal. 1837. — Lorsqu'il y a plusieurs cautions pour garantir la même dette d'un seul débiteur, l'obligation de répondre se divise entre toutes. Le créancier ne peut réclamer à chaque caution que la part qu'elle doit acquitter, à moins que la solidarité n'ait été expressément stipulée. Le bénéfice de division entre les cautions cesse pour les mêmes causes et dans les mêmes conditions que le bénéfice de discussion du débiteur principal. SECTION II. — Des effets du cautionnement entre le débiteur et la caution. 1838. — La caution, qui paie pour le débiteur, doit être indemnisée par lui. L'indemnité comprend: 1° Le capital de la dette; 2° Ses intérêts légaux du jour où le paiement a été connu du débiteur, même si elle n'en produisait pas au profit du créancier; 3° Les frais occasionnés à la caution depuis qu'elle a fait savoir au débiteur que le paiement lui était réclamé. 4° Le dommage et le préjudice lorsqu'il y en a. La disposition de cet article s'applique alors même que le cautionnement a été constitué à l'insu du débiteur. 1839. — La caution est subrogée, par le fait du paiement, à tous les droits que le créancier avait contre le débiteur. Si la caution a transigé avec le créancier, elle ne peut demander au débiteur plus que ce qu'elle a réellement payé. 1840. — Si la caution paie sans en avertir le débiteur, ce dernier pourra invoquer contre elle toutes les exceptions qu'il aurait pu opposer au créancier, au moment où le paiement a été fait. 1841. — Si la dette était à terme et que la caution ait payé avant son échéance, elle ne pourra exiger le remboursement du débiteur avant que le terme ne soit arrivé. 1842. — Si la caution a payé sans en donner avis au débiteur, et que ce dernier, ignorant ce paiement, paie de son côté, la caution n'aura pas de recours contre le débiteur, mais contre le créancier. 1843. — La caution, même avant d'avoir payé, peut agir, contre le débiteur principal: 1° Lorsqu'elle est judiciairement assignée en paiement; 2° En cas de faillite, de déconfiture ou d'insolvabilité; 3° Lorsque le débiteur s'est obligé à le décharger de son cautionnement dans un délai déterminé et que le terme est arrivé; 4° Lorsque la dette est devenue exigible par l'arrivée du terme où elle devait être payée; 5° Au bout de dix ans, lorsque l'obligation principale n'a pas de terme fixé pour son échéance, à moins qu'elle ne soit de telle nature qu'on ne puisse l'exiger que dans un délai de plus de dix ans. Dans tous ces cas, la caution a une action pour se faire relever de son cautionnement, ou pour obtenir une garantie qui la mette à couvert contre les poursuites du créancier et le danger de l'insolvabilité du débiteur. SECTION III. — Des effets du cautionnement entre les différentes cautions. 1844. — Lorsqu'il a deux ou plusieurs cautions pour un même débiteur et une même dette, celle d'entre elles, qui a payé, pourra réclamer de chacune des autres la part proportionnelle qu'elle doit payer. Si l'une d'elles devient insolvable, sa part retombera à la charge des autres dans la même proportion. Pour qu'il puisse y avoir lieu à appliquer cet article, il faut que le paiement ait été fait en vertu d'une demande judiciaire, ou que le débiteur soit en faillite ou en déconfiture. 1845. — Dans le cas de l'article précédent, les diverses cautions pourront opposer au paiement les mêmes exceptions que le débiteur principal aurait opposées au créancier, à moins qu'elles ne soient purement personnelles au débiteur. 1846. — La caution de la caution, en cas d'insolvabilité de la caution pour laquelle elle s'est obligée, demeure responsable vis-à-vis des codébiteurs dans les mêmes termes que la caution. CHAPITRE III. — DE L'EXTINCTION DU CAUTIONNEMENT. 1847. — L'obligation de la caution s'éteint en même temps que celle du débiteur et par les mêmes causes que les autres obligations. 1848. — La confusion qui s'accomplit entre la personne du débiteur et celle de la caution, lorsque l'une hérite de l'autre, n'éteint pas l'obligation de la caution de la caution. 1849. — Si le créancier accepte volontairement un immeuble ou toute autre valeur en paiement de la dette, la caution est déchargée, même si postérieurement il le perd par éviction. 1850. — La libération, accordée par le créancier à l'une des cautions, sans le consentement des autres, profite à toutes dans la mesure de la part incombant à la caution à laquelle on l'a octroyée. 1851. — La prorogation, accordée au débiteur par le créancier sans le consentement de la caution, éteint le cautionnement. 1852. — Les cautions, même solidaires, demeurent libres de leurs obligations toutes les fois que, par un acte du créancier, elles ne peuvent être subrogées à ses droits, hypothèques et privilèges. 1853. — La caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et sont inhérentes à la dette, mais non celles qui sont purement personnelles au débiteur. CHAPITRE IV. — DU CAUTIONNEMENT LÉGAL ET JUDICIAIRE. 1854. — La caution, qu'on est tenu de donner en vertu d'une disposition de la loi ou d'une ordonnance de justice, doit avoir les qualités prescrites par l'article 1828. 1855. — Si l'obligé à fournir un cautionnement ne le trouve pas, on acceptera à la place un gage ou une hypothèque suffisante pour couvrir son obligation. 1856. — La caution judiciaire ne peut demander la discussion des biens du débiteur principal. La caution de cette caution ne peut demander ni la discussion du débiteur, ni celle de la caution. TITRE XV. — DES CONTRATS DE GAGE, D'HYPOTHÈQUE ET D'ANTICHRÈSE. CHAPITRE PREMIER. — DISPOSITIONS COMMUNES AU GAGE ET À L'HYPOTHÈQUE. 1857. — Sont des conditions essentielles des contrats de gage et d'hypothèque: 1° Qu'on les constitue pour assurer l'accomplissement d'une obligation principale; 2° Que la chose, donnée en gage ou en hypothèque, appartienne en propriété à celui qui constitue le gage ou l'hypothèque. 3° Que les personnes, qui constituent le gage ou l'hypothèque, aient la libre disposition de leurs biens, ou, si elles ne l'ont pas, qu'elles soient légalement autorisées à cet effet. Les tiers, étrangers à l'obligation principale, peuvent en garantir l'exécution en hypothéquant ou en donnant en gage leurs biens propres. 1858. — Il est également de l'essence de ces contrats que l'échéance de l'obligation principale une fois arrivée, les choses formant le gage ou l'hypothèque puissent être aliénées pour payer le créancier. 1859. — Le créancier ne peut s'approprier ni disposer des choses données en gage ou en hypothèque. 1860. — Le gage et l'hypothèque sont indivisibles, même si la dette est divisible entre les ayants cause du débiteur ou du créancier. Par suite, l'héritier du débiteur, après avoir payé sa part de la dette, ne pourra demander la réduction proportionnelle du gage ou de l'hypothèque, tant que la dette n'a pas été complètement acquittée. De même l'héritier du créancier, qui a reçu sa part de la dette, ne pourra rendre le gage, ni faire rayer l'hypothèque au préjudice des autres héritiers qui n'ont pas été payés. On excepte de ces dispositions le cas où, plusieurs choses étant données en gage ou en hypothèque, chacune d'elles ne garantit qu'une part déterminée du crédit. Le débiteur, dans ce cas, aura droit d'obtenir l'extinction du gage ou de l'hypothèque à mesure du paiement de la partie de la dette correspondante. 1861. — Les contrats de gage ou d'hypothèque peuvent assurer toute espèce d'obligations, qu'elles soient pures et simples, ou soumises à une condition suspensive ou résolutoire. 1862. — La promesse de constituer un gage ou une hypothèque ne donne lieu qu'à une action personnelle entre les contractants, sans préjudice de la responsabilité criminelle qu'encourent ceux qui ont trompé en offrant comme libres, à titre de gage ou d'hypothèque, des biens grevés, ou en feignant d'être propriétaires de biens qui ne leur appartiennent pas. CHAPITRE II. — DU GAGE. 1863. — En outre des conditions exigées par l'article 1857, il faut, pour constituer un contrat de gage, que ce gage soit mis en la possession du créancier ou d'un tiers choisi de commun accord. 1864. — On ne peut donner en gage que des meubles qui sont dans le commerce et sont ainsi susceptibles de possession. 1865. — Le gage n'aura pas d'effet contre les tiers, si sa date n'est pas établie par un acte public. 1866. — Le contrat de gage confère au créancier le droit de retenir la chose en son pouvoir, ou en celui du tiers auquel elle a été délivrée jusqu'au paiement de la créance. Pendant que le créancier retient le gage, si le débiteur contracte vis-à-vis de lui une autre dette exigible avant le paiement de la première, le créancier pourra proroger sa rétention jusqu'après le paiement des deux créances, même si on n'a pas stipulé de gage pour la sûreté de la seconde dette. 1867. — Le créancier doit veiller sur la chose donnée en gage avec le soin d'un bon père de famille. Il a droit d'être remboursé des frais faits pour sa conservation, et répond de sa perte ou de sa détérioration, conformément aux dispositions de ce Code. 1868. — Si le gage produit des intérêts, le créancier les compensera avec ceux qui lui sont dus; si on ne lui en doit, où s'ils excèdent ceux qui sont légitimement dus, il les imputera sur le capital. 1869. — Tant que l'expropriation de la chose donnée en gage n'est pas réalisée, le débiteur en demeure propriétaire. Néanmoins, le créancier peut exercer les actions du propriétaire sur la chose mise en gage pour la revendiquer ou la défendre contre des tiers. 1870. — Le créancier ne pourra se servir de la chose donnée en gage sans l'autorisation du propriétaire; et s'il le fait, ou s'il en abuse en quelque manière, le propriétaire peut demander qu'elle soit mise en dépôt. 1871. — Le débiteur ne peut demander la restitution du gage contre la volonté du créancier, tant qu'il n'a pas payé la dette avec les intérêts, et les frais s'il y en a. 1872. — Le créancier, qui n'a pas été payé de sa créance en temps utile, peut faire procéder par un notaire à l'aliénation du gage. Cette aliénation devra se faire en vente publique et on y appellera le débiteur et le propriétaire du gage, s'il est autre. Si le gage n'est pas vendu dans la première adjudication, on procédera à une seconde dans les mêmes formes, et, si elle ne donne pas de résultat, le créancier pourra s'approprier le gage. Dans ce cas, il sera obligé de donner quittance de la totalité de la créance. Si le gage consiste en valeurs de bourse, on les vendra en la forme prévue par le Code de commerce. 1873. — Quant aux Monts de Piété et aux autres établissements publics, qui ont pour but et raison d'être de prêter sur gage, on observera les lois et les règlements spéciaux qui les concernent et subsidiairement les dispositions de ce titre. CHAPITRE III. — DE L'HYPOTHÈQUE. 1874. — Peuvent seuls être l'objet d'un contrat d'hypothèque: 1° Les biens immeubles; 2° Les droits réels que la loi permet d'aliéner et qui grèvent des immeubles. 1875. — En outre des conditions imposées par l'article 1837, il est indispensable, pour que l'hypothèque soit valablement constituée, que l'acte, qui la constitue, soit transcrit sur le registre de propriété. Les personnes, en faveur desquelles la loi établit une hypothèque, n'ont d'autre droit que d'exiger un acte la leur accordant et son inscription, sauf les dispositions de la loi hypothécaire en faveur de l'État, des provinces et des communes pour la valeur de la dernière annuité des impôts, et en faveur des assureurs pour la dernière prime d'assurance. 1876. — L'hypothèque assujettit directement et immédiatement les biens, sur lesquels elle est établie, à l'accomplissement de l'obligation pour laquelle elle a été constituée, quel que soit le possesseur de ces biens. 1877. — L'hypothèque s'étend aux accessoires naturels, aux améliorations, aux fruits pendants et aux moissons non récoltées à l'échéance de l'obligation, ainsi qu'à l'importance des indemnités concédées, ou dues au propriétaire par les assureurs des biens hypothéqués, ou en vertu d'une expropriation pour utilité publique, dans les limites et l'étendue fixées par loi, que le fonds soit resté au pouvoir de celui qui l'a hypothéqué, ou qu'il soit passé aux mains d'un tiers. 1878. — La créance hypothécaire peut être aliénée ou cédée à un tiers en tout ou en partie, avec les formalités légales. 1879. — Le créancier pourra réclamer du tiers possesseur des biens hypothéqués le paiement de la portion de la créance pour laquelle le précédent possesseur les a engagés, du moment où il se conformera aux délais et formalités établis par la loi. 1880. — La forme, l'étendue et les effets de l'hypothèque, ainsi que sa constitution, sa modification, son extinction, et tout ce qui n'a pas été compris dans ce chapitre, restent soumis aux prescriptions de la loi hypothécaire, qui continue d'être en vigueur. CHAPITRE IV. — DE L'ANTICHRÈSE. 1881. — Par l'antichrèse, le créancier acquiert le droit de percevoir les fruits de l'immeuble de son débiteur, qui est obligé de les imputer sur le paiement des intérêts à lui dus et ensuite sur le capital de la créance. 1882. — Sauf convention contraire, le créancier est obligé de payer les contributions et les charges qui grèvent l'immeuble. Il est encore obligé de faire les dépenses nécessaires à sa conservation et à sa réparation. On déduit des fruits les sommes employées à l'un et à l'autre de ces objets. 1883. — Le débiteur ne peut recouvrer la jouissance de son immeuble avant d'avoir entièrement payé ce qu'il doit au créancier. Mais ce dernier, pour se libérer des obligations que lui impose l'article précédent, peut toujours obliger le débiteur à reprendre la jouissance de l'immeuble, sauf pacte contraire. 1884. — Le créancier n'acquiert point la propriété de l'immeuble à défaut de paiement de la dette dans le délai convenu. Tout pacte contraire sera nul. Mais, dans ce cas, le créancier pourra demander, en la forme édictée par la loi de procédure civile, le paiement de la dette ou la vente de l'immeuble. 1885. — Les contractants peuvent stipuler que les intérêts de la dette se compenseront avec les fruits de l'immeuble. 1886. — Sont applicables à ce contrat le dernier paragraphe de l'article 1857, le paragraphe second de l'article 1866 et les articles 1860 et 1861. TITRE XVI. — DES OBLIGATIONS QUI SE CONTRACTENT SANS CONVENTION. CHAPITRE PREMIER. — DES QUASI-CONTRATS. 1887. — Sont des quasi-contrats, les faits permis et purement volontaires d'où résulte pour leur auteur une obligation Vis-à-vis d'un tiers, et parfois une obligation réciproque des deux intéressés. SECTION PREMIÈRE. — De la gestion des affaires d'autrui. 1888. — Celui qui se charge volontairement de gérer et d'administrer les affaires d'autrui, sans mandat, est tenu de continuer sa gestion jusqu'à la fin de l'affaire entreprise et de ses suites, ou bien de sommer l'intéressé de substituer quelqu'un à cette gestion, s'il n'est pas en état de pouvoir la continuer lui-même. 1889. — Le gérant officieux doit s'acquitter de sa charge avec toute la diligence d'un bon père de famille, et indemniser le propriétaire des biens ou des choses administrées, du préjudice qu'il éprouve par sa faute ou sa négligence. Les tribunaux pourront néanmoins modérer le taux de l'indemnité d'après les circonstances de la cause. 1890. — Si le gérant d'affaires délègue à une autre personne tout ou partie des obligations de sa charge, il répondra des actes de son délégué, sans préjudice de l'action que le propriétaire de la chose a directement contre lui. S'il y a deux ou plusieurs gérants, leur responsabilité sera solidaire. 1891. — Le gérant d'affaires répondra du cas fortuit, lorsqu'il entreprendra des opérations hasardeuses que le propriétaire n'avait pas coutume de faire, ou lorsqu'il préférera son propre intérêt à celui du propriétaire de l'affaire gérée. 1892. — La ratification de la gestion par le propriétaire de la chose produit les effets du mandat formel. 1893. — Alors même qu'il n'a pas expressément ratifié la gestion d'autrui, le propriétaire des biens et affaires, qui profite des avantages, sera responsable des obligations contractées dans son intérêt, et indemnisera le gérant des frais nécessaires et utiles qu'il a faits et des pertes qu'il a éprouvées dans l'accomplissement de sa charge. La même obligation lui incombera lorsque la gestion aura eu pour objet d'éviter un préjudice imminent et manifeste, alors même qu'elle n'aurait procuré aucun profit. 1894. — Lorsqu'ignorant qu'une personne était tenue de fournir des aliments, un étranger en aura donné, il aura droit de les réclamer, à moins qu'il ne soit constant qu'il les a donnés par charité et sans intention de les réclamer. Les frais funéraires, proportionnés à la qualité du défunt et aux usages du lieu, devront être payés, même si le défunt n'a pas laissé de biens, par ceux qui, pendant la vie, étaient tenus de l'obligation alimentaire. SECTION II. — De la répétition de l'indu. 1895. — Lorsqu'on reçoit une chose qu'on n'a pas le droit de recevoir, et que cette chose a été remise par erreur, naît l'obligation de la restituer. 1896. — Celui qui accepte un paiement indu, doit, s'il a agi de mauvaise foi, payer l'intérêt légal s'il s'agit de capitaux, ou les fruits perçus, ou les fruits dus, si la chose reçue en produit. Il répondra, en outre, des dépréciations que la chose a subies, quelle que soit leur nature, et du préjudice causé à celui qui l'a livrée jusqu'au moment où il la recouvre. Il ne répondra pas du cas fortuit, s'il eût pu affecter la chose de la même manière, dans le cas où elle serait restée au pouvoir de celui qui l'a délivrée. 1897. — Celui qui, de bonne foi, a accepté le paiement indu d'une chose certaine et déterminée, ne répondra des dépréciations et des pertes de la chose ou de ses accessoires que dans la mesure où il en a profité. S'il a aliéné la chose, il rendra le prix ou cédera son action pour l'obtenir. 1898. — Quant à la récompense pour les améliorations et les frais. faits par celui qui a reçu la chose, on se conformera à la disposition du titre V du second livre. 1899. — Demeure exempt de l'obligation de restituer celui qui, croyant le paiement fait pour acquitter une dette légitime et subsistante, a annulé son titre, ou laissé acquérir la prescription, ou abandonné ses gages, ou annulé les garanties de son droit. Celui, qui a indûment payé, devra agir contre le véritable débiteur ou les cautions au respect desquels l'action serait encore utile. 1900. — La preuve du paiement incombe à celui qui prétend l'avoir fait. Il devra, en outre, prouver l'erreur qu'il a commise, à moins que l'assigné ne nie avoir reçu ce qu'on lui réclame. Dans ce cas, après avoir prouvé le paiement, le demandeur sera déchargé de toute autre preuve. Cela ne restreint pas le droit de l'assigné de justifier que ce qu'on suppose qu'il a reçu, lui était réellement dû. pour les impôts qui les grèvent. 1901. — On présume qu'il y a eu erreur dans ce paiement, lorsqu'on délivre une chose qui n'a jamais été due, ou qui avait été payée, mais celui à qui la restitution est demandée peut prouver que la remise a été faite à titre de libéralité, ou pour toute autre juste cause. CHAPITRE II. — Des obligations quinaissent de la faute ou de la négligence. 1902. — Celui qui, par action ou par omission, cause à autrui un dommage, est obligé de le réparer, s'il y a de sa part négligence ou faute. 1903. — L'obligation qu'impose l'article précédent est exigible non seulement à raison de ses propres actes ou omissions, mais encore à raison de ceux des personnes dont on doit répondre. Le. père ou, s'il est décédé ou incapable, la mère, est responsable du préjudice causé par leurs enfants mineurs vivant avec eux. Les tuteurs le sont du préjudice causé par les mineurs et incapables soumis à leur autorité et vivant avec eux. Les propriétaires et directeurs d'établissements ou d'entreprises sont également responsables des préjudices causés par leurs subordonnés dans l'exercice des travaux auxquels ils sont employés, ou à l'occasion de leurs fonctions. L'État est responsable à ce titre, lorsqu'il fait faire quelque chose par l'intermédiaire d'un agent spécial. Mais il ne l'est plus lorsque le dommage a été causé par le fonctionnaire qui doit naturellement effectuer l'acte accompli, dans ce cas, la disposition de l'article précédent sera applicable. Sont enfin responsables les maîtres et chefs d'atelier du préjudice, causé par leurs élèves et apprentis, pendant qu'ils sont sous leur autorité. La responsabilité, dont parle cet article, cessera lorsque les personnes, qui y sont mentionnées, prouveront qu'elles ont employé, pour prévenir le dommage, le soin d'un bon père de famille. 1904. — Celui, qui paie le dommage causé par ses subordonnés, peut leur réclamer ce qu'il a payé. 1905. — Le possesseur d'un animal, ou celui qui s'en sert, est responsable du préjudice qu'il a causé, même alors qu'il est échappé ou égaré. Sa responsabilité ne cessera que dans le cas où le dommage proviendra de force majeure, ou de la faute de celui qui l'a souffert. 1906. — Le propriétaire d'une chasse répondra du préjudice causé par le gibier aux fonds voisins, lorsqu'il n'aura pas fait le nécessaire pour empêcher sa multiplication, ou lorsqu'il aura empêché les propriétaires de ces fonds de le chasser comme ils voulaient. 1907. — Le propriétaire d'un édifice est responsable des dommages qui résultent de sa ruine totale ou partielle, si elle a été occasionnée par le manque de réparations nécessaires. 1908. — Les propriétaires répondront également du préjudice causé: 1° Par l'explosion des machines qui n'ont pas été dirigées avec le soin convenable, et par l'inflammation des matières explosibles qui n'auraient pas été placées en lieu sûr et approprié; 2° Par les fumées excessives, qui seraient nuisibles aux personnes ou aux propriétés; 3° Par la chute des arbres placés dans des lieux de passage, lorsqu'elle n'a pas été occasionnée par la force majeure; 4° Par les émanations de cloaques ou dépôts de matières insalubres, établis sans les précautions nécessitées par le lieu où ils se trouvent. 1909. — Si le préjudice, dont parlent les deux articles précédents, résulte d'un défaut de construction, le tiers qui en souffre, pourra agir contre l'architecte ou, s'il y a lieu, contre le constructeur dans le délai légal. 1910. — Le chef de famille, qui habite tout ou partie d'une maison, est responsable du dommage causé par les choses jetées ou tombées de son habitation. TITRE XVII. — DE LA CONCURRENCE DES CRÉANCES ET DES CAUSES DE PRÉFÉRENCE. CHAPITRE PREMIER. — DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 1911. — Le débiteur répond de l'accomplissement de ses obligations sur ses biens présents et futurs. 1912. — Le débiteur peut solliciter judiciairement de ses créanciers une remise partielle de ses dettes et un atermoiement, ou une seule de ces choses; mais l'exercice de ce droit ne produira d'effets que dans les cas et de la manière prévue par la loi de procédure civile. 1913. — Le débiteur, dont le passif est supérieur à l'actif et qui a cessé de payer ses obligations courantes, devra se présenter, pour faire déclarer sa déconfiture, devant le tribunal compétent pour le lieu où il a connu sa situation. 1914. — La déclaration de déconfiture du débiteur enlève au débiteur l'administration de ses biens et celle de tous autres qui lui appartiendrait légalement. Il sera réintégré dans ses droits à la fin de la liquidation, si, par son caractère, elle ne constitue pas une cause d'empêchement. 1915. — Par la déclaration de déconfiture toutes dettes deviennent exigibles à la date du jugement. Si on les paie, avant le temps fixé dans l'acte d'obligation, elles seront diminuées du montant de l'intérêt légal de l'argent. 1916. — A dater de la déclaration de déconfiture, les dettes du débiteur cesseront de produire des intérêts, sauf les créances avec hypothèque ou gage, jusqu'à concurrence de la valeur de la garantie. Après le paiement du capital des dettes, s'il reste des sommes disponibles, on paiera les intérêts, réduits au taux légal, à moins qu'on n'en ait stipulé un inférieur. 1917. — Les conventions entre le débiteur et ses créanciers, consenties judiciairement avec les formalités légales, au sujet des remises partielles de dettes et des atermoiements, ou dans le cas de déconfiture, seront obligatoires pour tous ceux qui y auront concouru, et même pour ceux qui, ayant reçu une assignation et une notification en forme, n'auront pas protesté en temps. On excepte les créanciers qui, ayant le droit de s'abstenir, en ont légitimement usé. Ont le droit de s'abstenir les créanciers énumérés dans les articles 1922, 1923 et 1924. 1918. — Lorsque la convention de remise partielle et d'atermoiement est conclue entre créanciers de même espèce, elle sera obligatoire pour tous, du moment où elle aura été consentie par la majorité, sans préjudice des droits de préférence existant en faveur de certaines créances. 1919. — Si le débiteur exécute la convention, ses obligations seront acquittées dans les termes stipulés; mais s'il y manque, en tout ou en partie, le droit des créanciers renaîtra pour tout ce qu'ils n'auront pas reçu de leur créance primitive, et chacun pourra demander la déclaration de déconfiture ou la continuation de cette procédure. 1920. — A défaut de pacte exprès et contraire entre le débiteur et les créanciers, ces derniers, après la liquidation terminée, conserveront leurs droits pour recouvrer, sur les biens que le débiteur peut acquérir ultérieurement, la portion de sa créance qu'il n'a pas touchée. CHAPITRE II. — DE LA CLASSIFICATION DES CRÉANCES. 1921. — Quant au rang dans lequel elles sont payées, les créances se classent dans l'ordre et de la manière établis par ce chapitre. 1922. — Par rapport à certains biens meubles du débiteur, on accorde la préférence: 1° Aux créances pour construction, réparation, conservation ou prix de vente des meubles qui sont au pouvoir du débiteur, jusqu'à concurrence de leur valeur; 2° Aux créances garanties par un gage, qui se trouve, au pouvoir du créancier, sur la chose donnée en gage et jusqu'à concurrence de sa valeur; 3° Aux créances garanties par un cautionnement en effets et valeurs déposés dans un établissement public ou de commerce, sur l'objet et pour la valeur de la garantie; 4° Aux créances des entrepreneurs de transport, sur les les objets transportés, pour le prix du transport, les frais, droits de conduite et de garde jusqu'à la délivrance et durant les trente jours suivants; 5° Aux créances de l'aubergiste, sur les meubles que le débiteur a dans son établissement; 6° Aux créances pour semailles et frais de culture et de récolte avancés au débiteur, sur les fruits de la récolte à laquelle ils ont été employés; 7° Aux créances pour loyers et rentes de l'année, tant sur les meubles du débiteur se trouvant sur l'immeuble loué que sur les fruits de cet immeuble. Si les meubles, sur lesquels porte le droit de préférence, ont été soustraits, le créancier pourra les revendiquer contre celui qui les a, dans le délai de trente jours à dater de la soustraction. 1923. — Par rapport aux immeubles et droits réels du débiteur, on accorde la préférence: 1° Aux créances de l'État sur les biens des contribuables, pour l'importance de la dernière annuité échue et non payée pour les impôts qui grèvent. 2° Aux créances des assureurs sur les biens assurés, pour les primes d'assurances de deux ans, et s'il s'agit d'assurances mutuelles, pour les deux derniers appels qui ont été faits; 3° Aux créances hypothécaires et de réparations mentionnées et transcrites au registre de la propriété, sur les biens hypothéqués ou qui ont été l'objet de la réparation; 4° Aux créances inscrites à titre de provision sur le registre de la propriété, en vertu d'un ordre de justice, pour saisies, séquestres ou exécution de sentences sur les biens mentionnés et seulement pour les créances à venir; 5° Aux créances pour réparations, qui ne sont ni mentionnées, ni inscrites sur les immeubles objet des travaux, et seulement pour des créances distinctes de celles énumérées dans les quatre numéros précédents. 1924. — Par rapport aux autres meubles et immeubles du débiteur, on accorde la préférence: 1° Aux créances de la province ou de la commune, pour les impôts de la dernière annuité échue et non payée, qui ne sont pas compris dans le numéro 1 de l'article 1923; 2° Aux créances provenant: A. Des frais de justice et d'administration de la déconfiture faits dans l'intérêt commun des créanciers, et dûment autorisés et approuvés; B. Des frais des funérailles du débiteur, selon l'usage des lieux, aussi des funérailles de sa femme et des enfants soumis à sa puissance, s'ils n'ont pas de biens propres; C. Des frais de dernière maladie de ces mêmes personnes, s'ils ont été faits dans la dernière année avant le décès; D. Des journées et salaires des employés, journaliers, domestiques pour la dernière année; E. Des avances faites au débiteur et aux membres de sa famille qui sont sous son autorité en comestibles, habillements, chaussures pendant le même laps de temps. F. Des pensions alimentaires servies pendant le temps de la procédure de déconfiture, à moins qu'elles n'aient été faites à titre de libéralité; 3° Aux créances sans privilège spécial, si elles sont établies: A. Par un acte public; B. Par une décision définitive, si la chose a été l'objet d'un procès. Ces créances auront entre elles une préférence d'après l'antériorité des dates des actes et des jugements. 1925. — Ne jouiront d'aucune préférence les créances de toute autre nature, et pour toute autre cause, qui ne sont pas comprises dans les articles précédents. CHAPITRE III. — DE LA PRÉFÉRENCE DES CRÉANCES. 1926. — Les créances, qui jouissent d'un droit de préférence sur des meubles déterminés, excluent toutes les autres, à concurrence de la valeur du meuble sur lequel s'exerce la préférence. Si deux ou plusieurs créances viennent en concours sur des meubles déterminés, on observera, quant à l'ordre de préférence pour le paiement, les règles suivantes: 1° La créance sur gage exclut toutes les autres, à concurrence de la valeur de la chose donnée en gage; 2° Dans le cas de cautionnement, s'il a été légitimement constitué en faveur de plus d'un créancier, la préférence se déterminera par l'ordre des dates auxquelles la garantie a été fournie; 3° Les créances pour avances de semailles, frais de culture et de récolte seront préférées à celles des loyers et rentes, sur les fruits de récolte à laquelle elles ont servi; 4° Dans les autres cas, le prix des meubles se distribuera au prorata entre les créances qui jouissent d'un même droit de préférence sur ces meubles. 1927. — Les créances, qui jouissent d'un droit de préférence sur les immeubles et droits réels déterminés, excluent toutes les autres pour leur importance, à concurrence de la valeur de l'immeuble ou du droit réel sur lequel la préférence s'exerce. Si deux ou plusieurs créances sont en concours sur des immeubles ou des droits réels déterminés, on observera quant à l'ordre de leur préférence les règles suivantes: 1° On préférera dans leur ordre les créances énumérées dans les numéros 1 et 2 de l'article 1923 ou autres comprises dans les numéros suivants; 2° Les créances sur hypothèque ou pour réparations mentionnées et inscrites que vise le numéro 3 de l'article 1923, et les créances comprises dans le numéro 4 du même article auront entre elles une préférence réglée par le rang d'ancienneté des mentions et inscriptions faites sur le registre de la propriété. 3° Les créances pour réparations, non mentionnées et inscrites sur le registre, et que vise le numéro 5 de l'article 1923 auront entre elles un rang de préférence dans l'ordre contraire à l'ancienneté. 1928. — Ce qui restera de l'avoir du débiteur, après le paiement des créances qui jouissent d'un droit de préférence sur des biens déterminés, meubles ou immeubles, sera réuni aux autres biens du débiteur, non grevés, pour le paiement des autres créances. Les créances qui, malgré leur droit de préférence sur des meubles ou des immeubles déterminés, n'ont pas été totalement payées sur la valeur de ces garanties, le seront, pour le surplus, dans l'ordre et la catégorie qui leur appartient d'après leur nature respective. 1929. — Les créances, qui n'ont pas de droit de préférence sur des biens déterminés, et celles qui en ont, pour la somme qui ne leur a pas été payée, ou si on a laissé perdre leur droit de préférence, seront payées d'après les règles suivantes: 1° D'après l'ordre établi dans l'article 1924; 2° Les créances préférables d'après leur date, dans l'ordre de ces dates et, si elles sont identiques, au prorata; 3° Les créances ordinaires que vise l'article 1925, sans faire attention à leurs dates. TITRE XVIII. — DE LA PRESCRIPTION. CHAPITRE PREMIER. — DISPOSITIONS GÉNÉRALES. 1930. — Par la prescription, on acquiert, de la manière et sous les conditions fixées par la loi, la propriété et les autres droits réels. De même s'éteignent, par l'effet même de la prescription, les droits et les actions de toute sorte. 1931. — Les personnes, capables d'acquérir par les autres modes légitimes d'acquisition, peuvent acquérir les biens et les droits par prescription. 1932. — Les droits et actions s'éteignent par la prescription au préjudice de toutes sortes de personnes, même des personnes juridiques, dans les délais fixés par la loi. Les personnes, privées de l'administration de leurs biens, conservent le droit d'actionner leurs représentants dont la négligence a amené la prescription. 1933. — La prescription, acquise par un copropriétaire ou un communiste, profite aux autres. 1934. — La prescription produit ses effets juridiques au profit d'une succession ou contre elle, avant d'avoir été acceptée et même pendant le temps accordé pour faire inventaire et délibérer. 1935. — Les personnes capables d'aliéner peuvent renoncer à la prescription acquise, mais non au droit de prescrire pour l'avenir. On considère qu'on renonce tacitement à la prescription, lorsqu'on fait des actes desquels il résulte qu'on doit supposer que le droit acquis est abandonné. 1936. — Sont susceptibles de prescription toutes les choses qui sont dans le commerce. 1937. — Les créanciers et toute autre personne, intéressée à se prévaloir de la prescription, pourront l'invoquer malgré la renonciation expresse ou tacite du débiteur. 1938. — Les dispositions du présent titre s'entendent sans préjudice de ce qui est édicté par ce Code ou par les lois spéciales sur les cas de prescription exceptionnelle. 1939. — La prescription commencée avant la publication de ce Code sera régie par les lois antérieures; toutefois si, depuis qu'il est exécutoire, tout le temps qu'il assigne à une prescription était écoulé, on devra l'appliquer, alors même que le délai fixé par les lois antérieures était plus étendu. CHAPITRE II. — DE LA PRESCRIPTION DE LA PROPRIÉTÉ ET DES AUTRES DROITS RÉELS. 1940. — Pour la prescription ordinaire de la propriété et des autres droits réels, il est nécessaire de posséder les choses avec bonne foi et juste titre, pendant le temps fixé par la loi. 1941. — La possession doit être à titre de propriétaire, publique, paisible et non interrompue. 1942. — Ne profitent pas pour la possession, les actes ayant le caractère possessoire, s'ils sont accomplis en vertu de la permission ou de la simple tolérance du propriétaire. 1943. — Pour les effets de la prescription, la possession s'interrompt naturellement ou civilement. 1944. — La possession est naturellement interrompue, lorsqu'elle cesse pendant plus d'un an pour quelque cause que ce soit. 1945. — L'interruption civile se produit par une assignation judiciaire notifiée au possesseur, même en vertu de l'ordonnance d'un juge incompétent. 1946. — Une assignation judiciaire sera considérée comme non avenue et elle n'interrompra pas la prescription: 1° Si elle est nulle pour n'avoir pas les formes légales; 2° Si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l'instance; 3° Si l'action contre le possesseur est rejetée. 1947. — L'appel en conciliation produit également l'interruption civile, du moment où, dans les deux mois de sa date, le litige sur la possession ou la propriété est soumis au juge. 1948. — Toute reconnaissance expresse ou tacite, que le possesseur fait du droit du propriétaire, interrompt la prescription. 1949. — Contre un titre inscrit sur le registre de la propriété, la prescription ordinaire de la propriété ou des droits réels appartenant à un tiers n'aura lieu qu'en vertu d'un autre titre également inscrit, et elle ne commencera à courir qu'à dater de l'inscription. 1950. — La bonne foi du possesseur consiste dans la croyance que la personne, de qui il a reçu la chose, en était propriétaire et pouvait transmettre son droit. 1951. — Les conditions de bonne foi, exigées pour la possession dans les articles 433, 435 et 436 de ce Code, sont également nécessaires pour caractériser la bonne foi requise pour la prescription de la propriété et des autres droits réels. 1952. — On considère comme juste titre, celui qui légalement suffit pour transférer la propriété ou le droit réel auquel s'applique la prescription. 1953. — Le titre, qui sert de base à la prescription, doit être véritable et valable. 1954. — Le juste titre doit se prouver, on ne le présume jamais. 1955. — La propriété des biens meubles se prescrit par la possession de bonne foi, non interrompue pendant trois ans. De même la propriété des biens meubles se prescrit par la possession non interrompue pendant six ans, sans qu'aucune autre condition soit nécessaire. Quant au droit du propriétaire de revendiquer le meuble perdu ou dont il a été illégalement privé, comme en ce qui concerne les choses acquises en vente publique, en bourse, foire ou marché, ou d'un négociant légalement établi et se livrant habituellement à la vente de choses semblables, on se conformera à la disposition de l'article 464 de ce Code. 1956. — Les meubles dérobés ou volés ne pourront être prescrits par ceux qui les auront dérobés ou volés, ni par leurs complices ou recéleurs, avant la prescription du crime ou du délit, ou de la peine et de l'action en responsabilité civile née du délit ou de la contravention. 1957. — La propriété et les autres droits réels sur les immeubles se prescrivent par la possession durant dix ans entre personnes présentes et durant vingt ans entre personnes absentes. 1958. — Pour les effets de la prescription, on considère comme absent celui qui réside à l'étranger ou dans les provinces d'outre-mer. Si pendant une partie du temps il a été absent et présent pendant une autre, on considère deux années d'absence comme en formant une seule pour compléter les dix années de présence. L'absence, qui ne serait pas d'une année entière et continue, n'entrera pas en compte dans le calcul. 1959. — On prescrit encore la propriété et les autres droits réels sur les immeubles par la possession non interrompue durant trente ans, sans qu'il soit besoin de titre ou de bonne foi et sans distinction entre présents et absents, sauf l'exception édictée par l'article 539. 1960. — Dans le compte du temps nécessaire pour la prescription, on observera les règles suivantes: 1° Le possesseur actuel peut compléter le temps nécessaire pour la prescription en réunissant sa possession à celle de son auteur; 2° On présume que le possesseur actuel, qui possédait déjà à une époque antérieure, a continué de posséder pendant le temps intermédiaire, sauf la preuve contraire; 3° Le jour où on commence à compter le temps de la prescription est compté comme entier, mais le dernier doit être complètement révolu. CHAPITRE III. — DE LA PRESCRIPTION DES ACTIONS. 1961. — Les actions se prescrivent par la simple expiration du temps fixé par la loi. 1962. — Les actions sur les meubles se prescrivent par six ans à dater de la perte de la possession, à moins que le possesseur n'en ait acquis la propriété dans un délai plus restreint, conformément à l'article 1955; sont exceptés les cas de perte et de vente publique, ceux de vol et de détournement, pour lesquels on se conformera à la disposition du paragraphe 3 de l'article cité. 1963. — Les actions réelles sur les immeubles se prescrivent par trente ans. Cette disposition ne porte pas atteinte aux règles d'acquisition de la propriété et des droits réels par prescription. 1964. — L'action hypothécaire se prescrit par vingt ans, les actions personnelles, qui n'ont pas de durée spécialement déterminée, par quinze ans. 1965. — Sont imprescriptibles entre cohéritiers, co-propriétaires et propriétaires voisins, les actions en partage de l'hérédité ou de la chose commune, ainsi que celles en bornage des propriétés contiguës. 1966. — Par l'expiration du délai de cinq ans, se prescrivent les actions pour exiger l'accomplissement des obligations suivantes: 1° Celle en paiement des pensions alimentaires; 2° Celle en paiement des loyers des baux, qu'il s'agisse d'immeubles ruraux ou urbains; 3° Celle en paiement de toutes autres créances qui doivent se payer chaque année ou à des dates plus rapprochées. 1967. — Par l'expiration du délai de trois ans se prescrivent les actions pour assurer l'accomplissement des obligations suivantes: 1° Celle en paiement aux juges, avocats, enregistreurs, notaires, greffiers, experts, mandataires, procureurs, des honoraires, droits, frais et déboursés, faits dans l'accomplissement de leur charge et office, pour les affaires de leur compétence; 2° Celle en paiement aux pharmaciens des remèdes qu'ils ont fournis; aux maîtres et professeurs des honoraires et rétributions dus pour leur enseignement ou pour l'exercice de leur art ou de leur profession; 3° Celle en paiement aux artisans, domestiques et journaliers du montant de leurs gages, de leurs fournitures et des avances qu'ils ont faites à propos de leurs services; 4° Celle en paiement aux maîtres d'hôtel de la nourriture et de l'habitation; aux commerçants du prix des marchandises vendues à des non commerçants ou à des commerçants qui font un trafic différent. Le temps, pour la prescription des actions, que visent les trois paragraphes précédents, se comptera à dater du moment où les parties ont réciproquement cessé leurs rapports. 1968. — On prescrit par un an; 1° L'action pour recouvrer ou conserver la possession; 2° L'action civile en réparation de l'injure et de la calomnie et l'action née des obligations dérivant de la faute ou de la négligence que vise l'article 1902. La prescription court du moment où la victime a connu son préjudice. 1969. — Le temps pour la prescription de toutes sortes d'actions se comptera à dater du jour où on a pu les exercer, lorsqu'un texte spécial n'en disposera pas autrement. 1970. — Le temps, pour la prescription des actions qui ont pour objet de réclamer l'accomplissement d'obligations sur capital produisant une rente ou des intérêts, commencera à dater du dernier paiement de cette rente ou de ces intérêts. Il en est de même du capital d'un cens délégué. Dans les cens emphytéotique et réservé, le temps de la prescription se compte à partir du dernier paiement de la rente ou pension. 1971. — Le délai de prescription des actions pour exiger l'accomplissement des obligations consacrées par jugement, commence au jour où le jugement est devenu définitif. 1972. — Le délai de prescription des actions en reddition de compte court du jour où ceux, qui doivent rendre le compte, ont cessé leurs fonctions. Pour l'action en paiement d'un solde de compte, le délai court du moment où il a été accepté par les parties intéressées. 1973. — La prescription des actions s'interrompt par leur exercice devant les Tribunaux, par la réclamation extra-judiciaire du créancier, et par tout acte du débiteur reconnaissant sa dette. 1974. — L'interruption de la prescription des actions solidaires profitera ou préjudiciera également à tous les créanciers et débiteurs. Cette disposition s'applique également aux héritiers du débiteur, quelle que soit la nature de leurs obligations. Dans les obligations conjointes, si le créancier demande à un des débiteurs plus que sa part, cela ne suffit pas pour interrompre la prescription vis-à-vis des co-débiteurs. 1975. — L'interruption de la prescription contre le débiteur principal, produite par une demande judiciaire de la dette, a son effet même contre la caution; mais la caution ne souffrira pas des demandes extra-judiciaires du créancier ou des reconnaissances privées du débiteur. DISPOSITION FINALE. 1976. — Demeurent abrogés toutes les lois, usages et coutumes constituant le droit civil, pour toutes les matières qui font l'objet de ce Code, ils seront désormais sans force et sans vigueur non seulement comme lois obligatoires, mais même comme droit accessoire. Cette déclaration ne s'applique pas aux lois que ce Code déclare maintenir.