AYANT-PROJET RÉVISION DU CODE CIVIL

参考原資料

  • Avant-projet de révision du Code Civil , 1882 [Google Books]
  • Avant-projet de révision du Code civil , Tome Premier , 1882 [Google Books]
  • Avant-projet de révision du Code Civil , Tome Deuxième , 1882 [Google Books]
  • Avant-projet de révision du Code Civil , Tome Troisième , 1882 [Google Books]
  • Avant-projet de révision du Code Civil , Tome Quatrième , 1882 [Google Books]
  • Avant-projet de révision du Code Civil , Tome Cinquième , 1882 [Google Books]
  • Avant-projet de révision du Code Civil , Tome Sixième , 1882 [Google Books]

備考

TITRE PRÉLIMINAIRE. CHAPITRE PREMIER. De la sanction, de la promulgation et de la publication des lois. Article premier. Le Roi sanctionne les lois. La sanction se fait dans les termes suivants, qui sont insérés en tête des lois; lors de leur publication par le Moniteur: « Léopold, Roi des Belges, à tous présents et à venir, Salut. « Les Chambres ont adopté et nous sanctionnons ce qui suit. » Article 2. Le Roi promulgue les lois immédiatement après qu'il les a sanctionnées. La promulgation se fait dans les termes suivants, qui sont insérés à la suite de chaque loi publiée par le Moniteur: « Ordonnons que la présente loi, revêtue du sceau de l'État, soit immédiatement insérée au Moniteur et la déclarons exécutoire. » Article 3. La publication détermine le moment où la loi est censée connue. La loi, est présumée connue et, par suite, obligatoire le dixième jour après son insertion au Moniteur, à moins que le législateur n'ait fixé un autre délai. CHAPITRE II. De l'effet des lois. SECTION Ier. De l'effet des Uns quant au temps qu'elles régissent. Article 4. La loi ne dispose que pour l'avenir; elle n'a point d'effet rétroactif. Article 5. Le législateur peut, en vertu du droit qu'il a de régler les intérêts généraux de la société, modifier les lois, quand même il léserait des intérêts particuliers; son pouvoir ne s'arrête que devant les droits acquis des citoyens; il ne peut leur enlever des droits qui sont dans leur domaine, pas même sous prétexte du salut public. Article 6. Si une loi enlevait expressément aux particuliers un droit qui est dans leur domaine, les juges seraient néanmoins obligés d'appliquer la loi, sauf à porter leur décision à la connaissance du ministre de la justice. Article 7. Les lois politiques rétroagissent, en ce sens que le juge doit appliquer la loi au passé lorsqu'elle a pour objet un intérêt général et que les particuliers ne lui opposent que leur intérêt individuel. Article 8. L'état des personnes est toujours dans le domaine du législateur. Le juge doit appliquer la loi nouvelle, qu'elle paraisse favorable ou défavorable, sauf à respecter les actes légalement faits sous l'empire de la loi ancienne. Article 9. En matière de propriété, le juge ne peut appliquer la loi nouvelle de manière à enlever un droit acquis, c'est-à-dire un droit qui se trouve dans le domaine des particuliers. Article 10. Il n'est pas permis au juge d'appliquer la loi au passé dans tous les cas où le législateur aurait le droit de rétroagir. Le législateur n'est arrêté que par la Constitution, qui défend de dépouiller les propriétaires de leur propriété. Le juge doit respecter tous les droits acquis; il n'a pas pour mission de concilier les intérêts généraux avec les intérêts particuliers. SECTION II. De l'effet des lois quant aux personnes et quant aux biens. Article 11. Les lois concernant l'état et la capacité des personnes régissent les Belges partout où ils se trouvent. Les lois étrangères concernant l'état et la capacité régissent les étrangers qui se trouvent en Belgique, jusqu'à ce qu'ils aient acquis la nationalité belge. Article 12. Les rapports de famille et les droits qui en résultent sont régis par la loi du pays auquel les personnes appartiennent. Les successions déférées par la loi ou par la volonté de l'homme dépendent du statut personnel du défunt. Article 13. Les biens meubles et immeubles sont régis par la loi nationale de celui à qui ils appartiennent. Article 14. Les conventions conclues en pays étranger sont régies par la loi à laquelle les parties contractantes ont entendu se soumettre. A défaut d'une déclaration expresse, le juge recherchera l'intention des parties dans les faits et circonstances de la cause. Si les parties dressent un acte authentique en Belgique, le notaire leur fera connaître les dispositions du présent article. En cas de doute, le juge appliquera la loi personnelle des parties, si elles ont la même nationalité, et la loi du lieu où le contrat se passe, si les parties appartiennent à des nations différentes. Article 15. L'étranger qui contracte en Belgique doit déclarer son statut personnel et, s'il y a lieu, l'incapacité dont il est frappé. S'il ne fait point cette déclaration, les tiers qui traitent avec lui pourront demander l'application du statut belge, pourvu qu'ils soient de bonne foi. Quand les parties dressent en Belgique un acte authentique de leurs conventions, le notaire devra, sous sa responsabilité, exiger qu'elles déclarent si elles sont étrangères et quel est leur statut. Article 16. Les dispositions unilatérales entre-vifs ou à cause de mort sont régies par la loi nationale du disposant, à moins qu'il n'ait manifesté une volonté contraire. Article 17. Les quasi-contrats sont régis par la loi personnelle des parties si elles ont la même nationalité, et par la loi du lieu où le quasi-contrat se forme si elles appartiennent à des nations différentes. Les obligations qui résultent de l'autorité seule de la loi sont régies par la loi personnelle de celui dans l'intérêt duquel sont établis les administrateurs légaux. Les délits civils et les quasi-délits sont régis par la loi du pays où le fait se passe. Article 18. Le statut personnel est déterminé par la nationalité de la personne. Celui qui a deux nationalités, dont l'une lui est reconnue par la loi belge, a pour statut la loi belge tant qu'il n'a pas fait d'option. Le statut de celui qui n'a point de nationalité est déterminé par son domicile et, s'il n'a point de domicile certain, par sa résidence. Le statut personnel se perd avec la perte de la nationalité à laquelle il est attaché. Le changement de nationalité ne modifie le statut que pour l'avenir; il. n'a point d'effet rétroactif. SECTION III. De l'effet des lois quant à la forme des actes. Article 19. Les formes extrinsèques des actes authentiques et sous seing privé sont réglées par la loi du pays où ils sont faits ou passés. Article 20. Ces formes sont obligatoires, quelle que soit la nationalité des parties. Toutefois, quand il s'agit d'écrits sous seing privé, dressés par une seule personne ou par plusieurs ayant la même nationalité, les parties peuvent suivre les formes prescrites par leur loi nationale. Cette disposition reçoit exception quand la loi nationale des parties défend de recevoir un acte dans la forme olographe, ou ne le permet que sous les conditions qu'elle prescrit. Article 21. S'il s'agit d'un contrat ou d'un acte solennel, la solennité est déterminée par la loi qui régit le contrat ou l'acte. Si l'écrit est dressé à l'étranger, on suit la loi locale pour les formes extrinsèques des actes authentiques ou sous seing privé. Article 22. Les actes reçus à l'étranger n'auront d'effet en Belgique qu'après qu'ils auront été visés par le président du tribunal du lieu où les biens sont situés, s'il s'agit d'actes translatifs de droits réels, et par le président du tribunal du domicile ou de la résidence de la partie intéressée, s'il s'agit de droits de créance. Le président est chargé de vérifier si les actes sont dressés dans les formes prescrites par la loi du pays où ils ont été reçus. L'appel de la décision du président sera interjeté par requête adressée à la cour, qui statuera comme en matière d'appel de référé. Article 23. Les formalités concernant l'état et la capacité sont régies par la loi nationale de la personne. Article 24. Les formalités prescrites dans l'intérêt des tiers, pour la translation de la propriété ou des droits personnels et réels, sont régies par la loi territoriale. Article 25. Les formes de procédure sont réglées par la loi du pays où le procès a lieu, et les formes d'exécution par la loi du lieu où les actes ou jugements sont exécutés. Les moyens de preuve sont réglés par les lois du pays où le fait s'est passé. SECTION IV. Des lois d'ordre social. Article 26. Les lois relatives aux droits de la société reçoivent leur application, quels que soient le lieu du contrat, la nationalité des parties intéressées et la nature des biens. Cette règle s'applique: 1° Aux lois qui dépendent du droit public et du droit pénal; 2° Aux lois qui concernent les bonnes mœurs; 3° Aux lois qui abolissent les privilèges politiques en matière de succession; 4° Aux lois qui régissent les prescriptions. La prescription acquisitive est régie par la loi de la situation des biens, et la prescription extinctive par la loi du lieu où l'obligation a été contractée. CHAPITRE III. De l'application des lois. Article 27. Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice. Article 28. Il est défendu aux juges de prononcer, par voie de disposition générale et réglementaire, sur les causes qui leur sont soumises. CHAPITRE IV. De l'interprétation des lois. Article 29. Quand une loi est claire, il ne faut point en éluder la lettre sous prétexte d'en pénétrer l'esprit. Article 30. Il faut vivifier le texte par l'esprit de la loi, la tradition et les discussions; mais l'interprète doit se garder d'introduire dans la loi l'ancien droit qui est abrogé, et les discussions qui ne sont pas la loi. Article 31. L'interprète doit restreindre la loi à l'objet que le législateur a eu en vue; il ne peut pas appliquer la disposition à un ordre de choses auquel elle est étrangère. Article 32. On ne peut se prévaloir contre la loi, quand elle est claire, des conséquences absurdes auxquelles conduit le sens littéral. Article 33. Les exceptions qui ne sont point dans la loi ne doivent point être suppléées; le juge ne peut les étendre d'un cas à un autre, même par voie d'analogie, à moins que l'exception ne soit elle-même une règle ou l'application d'une règle. Article 34. Il n'est pas permis de distinguer lorsque la loi ne distingue pas, à moins que le motif sur lequel la loi est fondée ne rende la distinction nécessaire. CHAPITRE V. De l'autorité de la loi. Article 35. Les parties ne peuvent, sous peine de nullité, déroger, par leurs conventions ou dispositions, aux lois qui règlent l'état ou là capacité des personnes. Article 36. Sont nulles de plein droit les conventions ou dispositions qui violent ou éludent les lois intéressant l'ordre social ou les bonnes mœurs. Article 37. Les actes juridiques sont nuls de plein droit quand une condition requise pour leur existence n'a pas été observée. LITRE PREMIER. DES PERSONNES. PARTIE PREMIÈRE. DES PERSONNS NATURELLES. TITRE PREMIER. De la nationalité. CHAPITRE PREMIER. De l'acquisition de la nationalité. SECTION Ier. Des enfants nés d'un Belge ou d'un étranger. Article 38. Tout enfant né d'un Belge est Belge, quel que soit le lieu de sa naissance. Si les père et mère ont une nationalité différente, l'enfant suivra la nationalité du père ou de la mère belge, sauf à l'enfant qui veut suivre la nationalité étrangère à faire une déclaration d'extranéité conformément à l'article 40. Article 39. L'enfant naturel suit la nationalité du père où de la mère qui l'a reconnu. S'il est reconnu par ses père et mère, il suit la condition de son père ou de sa mère belge. Article 40. L'enfant né en Belgique d'un étranger est Belge, s'il ne déclare point qu'il opte pour sa nationalité étrangère. Cette déclaration devra être faite dans le délai d'une année après qu'il aura atteint l'âge de dix-huit ans. Le déclarant doit produire le consentement exprès de ses père et mère, et, à défaut de père et mère, du conseil de famille. La déclaration ne sera reçue que s'il justifie avoir conservé sa nationalité d'origine par une attestation en due forme, délivrée par le gouvernement du pays auquel il prétend appartenir. La déclaration pourra se faire par procuration spéciale et authentique. Article 41. Tout enfant né en pays étranger d'un Belge qui aurait perdu la qualité de Belge pourra toujours réclamer cette qualité, en faisant la déclaration prescrite par l'article 40. Le même droit appartient à l'enfant né d'une femme belge qui aurait perdu sa nationalité par mariage ou autrement. SECTION II. De la femme étrangère. Article 42. L'étrangère qui épouse un Belge devient Belge de plein droit. Si pendant le mariage le mari change de patrie, la femme suivra sa condition, comme il est dit en l'article 47. SECTION III. De la naturalisation. Article 43. La naturalisation, même ordinaire, confère la qualité de Belge aux enfants de l'étranger naturalisé. Ceux-ci sont néanmoins admis à conserver leur nationalité d'origine, en faisant la déclaration prescrite par l'article 40. Article 44. Les étrangers qui s'établissent en Belgique sans esprit de retour deviennent Belges après dix ans de résidence. CHAPITRE II. De la perte de la qualité de Belge. Article 45. La qualité de Belge se perd: 1° Par la naturalisation acquise en pays étranger; 2° Par tout établissement fait en pays étranger sans esprit de retour. Le Belge domicilié pendant dix ans à l'étranger est présumé s'y être établi sans esprit de retour, sauf la preuve contraire. Un établissement de commerce ne peut pas être allégué comme preuve que le Belge a perdu l'esprit de retour. Article 46. Celui qui a perdu la qualité de Belge peut toujours la recouvrer, à condition qu'il rentre en Belgique avec l'autorisation du Roi, qu'il déclare devant l'officier de l'état civil de la commune où il s'établit qu'il veut fixer son domicile en Belgique et qu'il l'y fixe dans l'année, à compter de sa déclaration. Article 47. La femme suit la condition du mari. Quand le mari est Belge, et qu'il change de patrie, pendant le mariage, la femme deviendra étrangère, si elle acquiert la nationalité de son mari. Il en est de même de la femme belge qui épouse un étranger. Après la dissolution du mariage la femme peut recouvrer la qualité de Belge, pourvu qu'elle réside en Belgique ou qu'elle y rentre et que, dans les deux cas, elle déclare devant l'autorité communale qu'elle veut s'y fixer. Article 48. Le changement de nationalité n'a d'effet que pour l'avenir, sauf disposition contraire dans les lois ou dans les traités. Article 49. La règle que l'enfant conçu est censé né quand il s'agit de son intérêt, peut être invoquée par celui qui veut acquérir ou conserver la qualité de Belge. CHAPITRE III. De la jouissance des droits civils. Article 50. Toute personne jouit des droits civils. Les Belges peuvent être privés de cette jouissance dans les cas prévus par le Gode pénal. TITRE II. Des actes de l'état civil. CHAPITRE PREMIER. Dispositions générales. SECTION Ier. Des actes reçus en Belgique. Article 51. Le bourgmestre ou un échevin désigné par le collège échevinal remplit les fonctions d'officier de l'état civil. L'officier de l'état civil ne peut recevoir ancun acte dans lequel il est partie ou qui concerne son épouse, ses ascendants ou ses descendants. Article 52. Les officiers de l'état civil ne peuvent rien insérer dans les actes qu'ils reçoivent, soit par note, soit par énonciation quelconque, que ce qui doit être déclaré par les comparants. Article 53. Dans le cas où les parties intéressées ne sont point obligées de comparaître en personne, elles pourront se faire représenter par un fondé de procuration spéciale et authentique. Article 54. Les actes de l'état civil seront reçus en présence de deux témoins choisis par les personnes intéressées, de l'un ou de l'autre sexe et majeurs. Les parents peuvent être témoins, ainsi que les étrangers établis dans le royaume. Article 55. Les actes de l'état civil énonceront la commune, la maison, l'année, le jour et l'heure où ils seront reçus, les nom, prénoms et qualité de l'officier devant lequel ils sont passés, les prénoms, noms, âge, profession de tous ceux qui y sont dénommés en qualité de déclarants ou de témoins et les pièces présentées par les parties. Article 56. L'officier de l'état civil donnera lecture des actes aux parties comparantes ou à leur fondé de procuration en présence des témoins. Il y sera fait mention de l'accomplissement de cette formalité. Article 57. Ces actes seront signés par l'officier de l'état civil, par les comparants et les témoins, ou mention sera faite de la cause qui empêche les comparants et les témoins de signer. Article 58. Les actes de l'état civil seront inscrits dans chaque commune sur un ou plusieurs registres tenus doubles. Article 59. Les registres seront côtés et parafés, depuis la première page jusqu'à la dernière, par le président du tribunal ou par un juge délégué en vertu d'une ordonnance du président, laquelle sera inscrite sur la première page du registre. Article 60. Les actes seront inscrits sur les registres de suite sans aucun blanc. Les ratures et les renvois seront approuvés et signés de la même manière que le corps de l'acte. Il n'y sera rien écrit par abréviation et aucune date ne sera mise en chiffres. Article 61. Les registres seront clos et arrêtés par l'officier de l'état civil, à la fin de chaque année; il en fera une déclaration signée de lui, immédiatement après l'inscription du dernier acte. Dans le mois, l'un des doubles sera déposé aux archives de la commune et l'autre au greffe du tribunal de première instance. Article 62. Lors de la rédaction de l'acte, les procurations et autres pièces qui doivent y être annexées seront certifiées et signées par la partie intéressée et il en sera fait mention dans l'acte. Ces pièces seront déposées au greffe du tribunal avec le double des registres. Article 63. Quand il y a lieu d'insérer la mention d'un acte relatif à l'état civil en marge d'un acte inscrit, elle sera faite, à la requête des parties intéressées, par l'officier de l'état civil, sur les registres courants ou sur ceux qui auront été déposés aux archives de la commune, et par le greffier sur les registres déposés au greffe; à l'effet de quoi l'officier de l'état civil en donnera avis dans les trente jours au procureur du roi, qui veillera à ce que la mention soit faite d'une manière uniforme sur les deux registres. Article 64. Toute personne peut se faire délivrer par les dépositaires des registres une copie des actes ou un certificat négatif. Article 65. Les actes inscrits sur les registres, ainsi que les copies délivrées conformes aux registres et légalisées par le président du tribunal ou par le juge qui le remplace, font foi jusqu'à inscription de faux de ce que l'officier public déclare avoir fait, vu et entendu, quand il a mission de le constater. Les déclarations que les comparants doivent faire ne font foi de leur vérité que jusqu'à preuve contraire; si les déclarations reçues par l'officier public ne sont pas prescrites par la loi, elles ne font aucune foi. Article 66. Lorsque les parties intéressées se trouvent dans l'impossibilité de produire des actes inscrits sur les registres, elles pourront prouver les faits de l'état civil par les papiers domestiques émanés des père et mère décédés et autres écritures, ou par témoins. Elles ne seront admises à cette preuve qu'après avoir prouvé par titres ou par témoins qu'il leur est impossible de produire des actes. Cette disposition s'applique: 1° Lorsqu'il n'a pas existé de registres, ou qu'ils sont détruits ou perdus en tout ou en partie; 2° Lorsque les registres sont incomplets, irréguliers ou que la tenue en a été interrompue; 3° Lorsque l'acte invoqué par la partie intéressée a été omis. Expédition des jugements qui contiendront la preuve d'un acte détruit, perdu ou omis, sera transmise par le greffier à l'officier de l'état civil compétent, lequel les transcrira à la suite des registres ou sur un registre supplémentaire. Article 67. Dans tous les cas où l'officier de l'état civil recevra un acte concernant une personne non domiciliée dans la commune, il en enverra une expédition à l'officier de l'état civil du domicile, s'il est connu; cette expédition sera inscrite sur les registres. SECTION II. Des actes de l'état civil reçus en pays étranger. Article 68. Tout acte de l'état civil des Belges en pays étranger pourra être reçu: 4° dans les formes usitées dans ledit pays; 2° conformément aux lois belges par les agents diplomatiques ou par les consuls. Article 69. Les actes de l'état civil reçus par un officier étranger seront transmis dans les trois mois par la partie intéressée à l'agent diplomatique ou consulaire le plus proche; ils pourront aussi être envoyés directement à l'officier de l'état civil indiqué à l'article suivant. Article 70. Les agents diplomatiques et consuls doivent transmettre dans le mois une expédition des actes à eux remis ou par eux reçus, au ministre des affaires étrangères, lequel en fera l'envoi, pour les actes de naissance et de reconnaissance à l'officier de l'état civil du domicile du père ou de la mère si le père est inconnu; pour les actes de mariage, à l'officier de l'état civil des communes du dernier domicile des époux; pour les actes de décès, à l'officier de l'état civil de la commune du dernier domicile du défunt. CHAPITRE II. Des actes de naissance. Article 71. Les déclarations de naissance seront faites, dans les trois jours de l'accouchement, à l'officier de l'état civil du lieu. Le nouveau-né sera présenté, à domicile, au médecin chargé de ce service. Article 72. La naissance de l'enfant sera déclarée par le père ou, à défaut du père, par les docteurs en médecine ou en chirurgie, sages-femmes ou autres personnes qui auront assisté à l'accouchement; et lorsque la mère sera accouchée hors de son domicile, par la personne chez qui elle sera accouchée. La déclaration pourra aussi être faite par la mère ou par son fondé de procuration spéciale. L'acte de naissance sera rédigé de suite, sur le vu du bulletin délivré par le médecin vérificateur. Article 73. L'acte de naissance énoncera le jour, l'heure, la commune et la maison où l'enfant est né, son sexe et les prénoms qui lui sont donnés. Les noms en usage dans les différents calendriers et ceux des personnages connus de l'histoire peuvent seuls être reçus comme prénoms. Les changements de nom ou de prénom légalement autorisés seront mentionnés, à la diligence de la personne intéressée, en marge de l'acte de naissance. Article 74. L'acte de naissance des enfants légitimes indiquera en outre les nom, prénoms, profession et domicile des père et mère. Le nom du père d'un enfant naturel ne sera indiqué que s'il en fait la déclaration. Le nom de la mère sera déclaré et constaté, à moins qu'elle ne l'ait caché. Dans ce cas, l'enfant sera inscrit comme né de père et mère inconnus, et l'officier de l'état civil lui donnera un nom et un prénom. Article 75. L'acte de reconnaissance d'un enfant naturel reçu par l'officier de l'état civil sera inscrit sur les registres à sa date. Il sera fait mention en marge de l'acte de naissance de toute reconnaissance légale. Article 76. Toute personne qui aura trouvé un enfant nouveau-né sera tenue de le remettre à l'officier de l'état civil, ainsi que les vêtements et autres effets trouvés avec l'enfant, et de déclarer toutes les circonstances du temps et du lieu où il aura été trouvé. Il en sera dressé un procès-verbal détaillé, qui énoncera, en outre, l'âge apparent de l'enfant, son sexe, les noms qui lui seront donnés et l'autorité civile à laquelle il sera remis. Ce procès-verbal sera inscrit sur les registres. Si l'enfant exposé a été recueilli dans un hospice, les déclarations précédentes seront faites par le directeur, lequel indiquera, de plus, les nom et prénoms donnés à l'enfant et le numéro d'ordre sous lequel il a été inscrit. Article 77. S'il naît un enfant pendant un voyage de mer, l'acte de naissance sera dressé dans les vingt-quatre heures en présence du père, s'il est présent, et de deux témoins pris parmi les officiers du bâtiment ou, à leur défaut, parmi les hommes de l'équipage. Cet acte sera rédigé par le capitaine, maître ou patron du navire. L'acte de naissance sera inscrit à la suite du rôle d'équipage. Article 78. Au premier port où le bâtiment abordera, le capitaine, maître ou patron sera tenu de déposer deux expéditions authentiques des actes de naissance qu'il aura rédigés, savoir: dans un port belge, au bureau de l'état civil, et dans un port étranger, entre les mains du consul. L'une de ces expéditions restera déposée au bureau de l'état civil ou à la chancellerie du consulat; l'autre sera envoyée au ministre de l'intérieur, qui fera parvenir une copie de lui certifiée de chacun desdits actes à l'officier de l'état civil du domicile du père de l'enfant, ou de la mère, si le père est inconnu; cette copie sera inscrite de suite sur les registres. CHAPITRE III. Des actes de mariage. Article 79. L'acte de mariage doit énoncer: 1° Les prénoms, noms, âge, professions, lieux de naissance, domiciles ou résidences des époux; 2° S'ils sont majeurs ou mineurs; 3° Les prénoms, noms, professions, domiciles ou résidences des pères et mères; 4° Le consentement du curateur, dans le cas où il est requis; 5° La date des publications; 6° Les dispenses accordées pour empêchements au mariage ou pour publications; 7° Les oppositions s'il y en a, leur mainlevée ou la mention qu'il n'y a point eu d'opposition; 8° La déclaration des contractants de se prendre pour époux et le prononcé de leur union par l'officier public; 9° La maison où le mariage a été célébré et les motifs pour lesquels, s'il y a lieu, le mariage a été célébré au domicile des parties; 10° La date des conventions matrimoniales des époux, l'indication du notaire qui les aura reçues, et le régime que les époux ont adopté. Article 80. Le jugement passé en force de chose jugée qui prononce la nullité d'un mariage sera transmis par le greffier, en expédition authentique et aux frais du demandeur, à l'officier de l'état civil du lieu où il a été célébré; celui-ci en fera mention en marge de l'acte de mariage. Article 81. L'officier de l'état civil, après avoir prononcé le divorce, en dressera acte. Il y énoncera les prénoms, noms, âge, domiciles, professions des époux divorcés, le jugement de divorce, dont une copie sera annexée au registre; il y relatera le certificat du greffier constatant que le jugement qui autorise le divorce est rendu en dernier ressort ou passé en force de chose jugée. Article 82. L'officier de l'état civil, après avoir prononcé la séparation de corps, en dressera acte avec les énonciations prescrites par l'article 81. Il dressera également acte de la déclaration, que les époux séparés de corps lui feront, qu'ils rétablissent la vie commune. L'acte énoncera les prénoms, noms, domiciles et professions des époux. CHAPITRE IV. Des actes de décès; Article 83. La déclaration de décès sera faite dans les vingt-quatre heures par les deux plus proches parents ou voisins ou, lorsqu'une personne sera décédée hors de son domicile, par la personne chez laquelle elle sera décédée et un parent ou autre. Immédiatement après que le décès aura été déclaré, le médecin désigné à cet effet par le collège vérifiera la mort. Il constatera, dans le bulletin de vérification, les prénoms, nom, âge et profession du défunt, le lieu, le jour et l'heure du décès, ainsi que la maladie ou l'accident qui aura amené la mort et les signes qui prouvent qu'elle est réelle. Article 84. Aucune inhumation ne sera faite sans une autorisation, sur papier libre et sans frais, de l'officier de l'état civil, qui ne pourra la délivrer que sur le vu du bulletin dressé par le médecin vérificateur, et seulement trente-six heures après la mort. Si le médecin a quelque doute sur la réalité du décès, il en énoncera les motifs dans son bulletin. Il sera sursis, dans ce cas, à l'enterrement jusqu'à ce que le décès ait été constaté par le médecin vérificateur et par un second médecin que le collège échevinal désignera. L'inhumation pourra avoir lieu avant les trente-six heures sur l'avis du médecin vérificateur. Article 85. L'acte de décès sera dressé sur la déclaration faite par les personnes désignées dans l'article 83 et après la remise du bulletin du médecin vérificateur. Cet acte contiendra les prénoms, nom, âge, profession et domicile de la personne décédée, les prénoms et nom de l'autre époux si la personne décédée était mariée ou veuve; le jour et l'heure du décès, les prénoms, noms, âge, professions et domiciles des déclarants et, s'ils sont parents, leur degré de parenté. Le même acte contiendra, de plus, autant qu'on pourra le savoir, les prénoms, noms, âge, professions et domiciles des père et mère du décédé et le lieu de sa naissance. Article 86. Si on déclare à l'officier de l'état civil le décès d'un enfant dont la naissance n'a pas été inscrite sur les registres, il se bornera à constater que l'enfant a été présenté sans vie au médecin vérificateur; il recevra, de plus, la déclaration des témoins touchant les prénoms, noms, professions et demeures des père et mère de l'enfant, ainsi que des an, jour et heure où l'enfant est sorti du sein de sa mère, sans indiquer si l'enfant était vivant ou non. Article 87. En cas de décès dans un hôpital, hospice, collège ou autre établissement public, le supérieur sera tenu d'en donner avis dans les vingt-quatre heures à l'officier de l'état civil, lequel fera constater le décès par le médecin vérificateur et en dressera acte, conformément aux articles 84 et 85, sur la déclaration du supérieur. II en enverra une copie certifiée de lui à l'officier de l'état civil du dernier domicile de la personne décédée, qui l'inscrira sur les registres. Il sera tenu, en outre, dans lesdits établissements, des registres où l'on inscrira une copie de l'acte de décès sur l'expédition délivrée par l'officier de l'état civil, laquelle y sera annexée, ainsi que tous les renseignements qui peuvent intéresser la famille du défunt. Article 88. Lorsqu'il y aura des signes ou indices de mort violente ou d'autres circonstances qui donneront lieu de la soupçonner, le médecin vérificateur en fera mention dans son bulletin et il en donnera immédiatement avis au commissaire de police ou, à son défaut, au bourgmestre. L'officier de police, assisté d'un docteur en médecine ou en chirurgie, dressera procès-verbal de l'état du cadavre et des circonstances y relatives, ainsi que des renseignements qu'il aura pu recueillir sur les prénoms, nom, âge, profession, lieu de naissance et domicile de la personne décédée. L'officier de police transmettra de suite à l'officier de l'état civil du lieu où la personne sera décédée tous les renseignements énoncés dans son procès-verbal, d'après lesquels l'acte de décès sera rédigé. Article 89. Si une ou plusieurs personnes ont péri dans un accident et que l'on ne trouve pas les cadavres, procès-verbal en sera dressé par un officier de police. Il y sera fait mention des prénoms, noms, âge, professions, domiciles des personnes décédées et de l'accident qui les a fait périr. Ce procès-verbal sera transmis au procureur du roi, lequel, sur l'autorisation du tribunal, l'enverra à l'officier de l'état civil, pour être transcrit sur les. registres. Le procès-verbal y sera annexé. Article 90. En cas de décès dans une prison, il en sera donné avis sur-le-champ à l'officier de l'état civil, qui s'y transportera et rédigera l'acte de décès sur la déclaration du médecin et, à son défaut, de l'infirmier et d'un employé civil. Article 91. Dans tous les cas de mort violente, ou dans les prisons, il ne sera fait sur les registres aucune mention de ces circonstances, et les actes de l'état civil seront simplement rédigés dans les formes prescrites par l'article 85. Article 92. En cas de mort pendant un voyage de mer, l'acte de décès sera dressé conformément à l'article 77 du présent Code. Si le vaisseau fait naufrage et que tout l'équipage et les passagers périssent, procès-verbal sera dressé, conformément à l'article 89, par le commissaire maritime du port de l'expédition. Article 93. L'officier de l'état civil est tenu d'envoyer, dans les vingt-quatre heures, copie des actes de décès qu'il reçoit, au juge de paix du canton du domicile de la personne décédée, en lui faisant connaître, autant que possible, s'il y a des héritiers mineurs ou absents. CHAPITRE V. Des actes de l'état civil concernant les militaires hors du territoire du royaume. Article 94. Le gouvernement déterminera, s'il y a lieu, par qui et dans quelles formes seront reçus les actes de l'état civil concernant les militaires hors du territoire du royaume. CHAPITRE VI. Des actes irréguliers et de leur rectification. SECTION Ier. Des actes nuls ou irréguliers. Article 95. Les actes de l'état civil sont nuls de plein droit: 1° S'ils n'ont pas été reçus par un officier de l'état civil; 2° S'ils n'ont pas été inscrits sur les registres à ce destinés; 3° S'ils ne sont pas signés par l'officier public qui les a reçus. Les parties intéressées peuvent, dans les deux derniers cas, poursuivre l'officier de l'état civil. Si le jugement établit l'existence du fait litigieux, il sera inscrit sur les registres et tiendra lieu d'acte. Article 96. Si l'acte est entaché d'une autre irrégularité, il ne sera pas nul, mais il sera sujet à rectification. Article 97. Toute contravention aux articles précédents, de la part des officiers de l'état civil et des dépositaires des registres, si elle n'est pas prévue par le Code pénal, sera punie d'une amende qui ne pourra excéder cent francs. En cas de récidive, l'amende pourra être portée au double. La poursuite se fera devant le tribunal de première instance. Article 98. Tout dépositaire des registres sera civilement responsable des altérations qui y surviendront, sauf son recours, s'il y a lieu, contre les auteurs de ces altérations. Article 99. Le procureur du roi au tribunal de première instance est tenu de vérifier l'état des registres lors du dépôt qui en est fait au greffe. Il dressera un procès-verbal sommaire de la vérification, dénoncera les contraventions ou délits commis par les officiers de l'état civil et requerra contre eux la condamnation aux amendes. SECTION II. De la rectification des actes de l'état civil. Article 100. Les personnes qui y ont un intérêt moral ou pécuniaire peuvent demander la rectification des actes de l'état civil. Les autres parties intéressées seront appelées, s'il y a lieu. Le tribunal statuera sur les conclusions du ministère public. Le ministère public peut d'office requérir la rectification des actes de l'état civil quand la société y a un intérêt évident. Article 101. Le jugement de rectification ne peut jamais être opposé aux parties intéressées qui ne l'ont pas requis ou qui n'y ont pas été appelées. Article 102. Les jugements de rectification seront inscrits sur les registres par l'officier de l'état civil, aussitôt qu'ils lui auront été remis, sur un certificat du greffier constatant qu'il n'existe aucun recours Contre lesdites décisions. Mention en sera faite en marge de l'acte réformé. Article 103. Les actes ne peuvent être inscrits après le délai légal qu'en vertu d'un jugement rendu contradictoirement avec les personnes intéressées et sur les conclusions du ministère public, le tout conformément à l'article précédent. Article 104. Dans tous les cas où un tribunal de première instance connaîtra des actes de l'état civil, la décision sera sujette à appel. TITRE III. Du domicile. Article 105. Le domicile de toute personne, quant à l'exercice de ses droits privés, est au lieu où elle a son principal établissement. Article 106. Le changement de domicile s'opère par le fait d'une habitation réelle dans un autre Lieu, joint à l'intention d'y fixer son principal établissement. Article 107. La preuve île l'intention résulte d'une déclaration expresse faite tant à la commune du lieu qu'on quitte qu'à celle du lieu où l'on a transféré son domicile. Article 108. A défaut de déclaration expresse, la preuve de l'intention dépend des circonstances. Article 109. Le domicile de la femme est celui de son mari. Le mineur a son domicile chez celui qui le représente dans les actes civils, père, mère ou tuteur; l'interdit a le sien chez son tuteur ou curateur. Article 110. Les majeurs qui servent ou travaillent habituellement chez autrui ont le même domicile que la personne qu'ils servent ou chez laquelle ils travaillent, lorsqu'ils demeurent avec elle dans la même maison. Article 111. Les parties contractantes peuvent élire domicile pour l'exécution de leurs conventions. L'élection doit se faire par écrit. Les demandes, significations et poursuites seront faites au domicile convenu, et devant le juge de ce domicile. TITRE IV. Des absents. CHAPITRE PREMIER. De la présomption d'absence. Article 112. Lorsqu'une personne aura disparu de son domicile ou de sa résidence sans donner de ses nouvelles et sans avoir constitué un mandataire général, les parties intéressées, ainsi que les héritiers présomptifs et le ministère public, pourront demander que le tribunal du domicile nomme un administrateur des biens de l'absent. L'administrateur sera pris régulièrement parmi les héritiers présomptifs de l'absent. Article 113. Si la personne présumée absente a laissé un mandataire général, celui-ci administrera les biens pendant toute la durée de la présomption d'absence, sauf au tribunal à le révoquer, ou à le remplacer en cas de renonciation ou de décès, par un autre administrateur. Article 114. L'administrateur nommé par l'absent ou par le tribunal n'a qu'un pouvoir d'administration. Il ne peut intenter une action ni y défendre qu'avec autorisation de justice. Il représente l'absent dans les inventaires, comptes, partages et liquidations dans lesquels il serait intéressé. Article 115. Le tribunal ordonnera, sur la demande de l'administrateur ou sur la réquisition du ministère public, de vendre tout ou partie du mobilier cl de faire emploi du prix. Si les meubles ne sont pas vendus par ordonnance du tribunal, l'administrateur devra les conserver et en rendre compte d'après l'inventaire. S'il y a nécessité ou avantage évident à aliéner ou à hypothéquer les immeubles de l'absent, l'administrateur y pourra procéder avec autorisation de justice. La vente se fera dans les formes prescrites par la loi du 12 juin 1816 pour les mineurs. Article 116. L'administrateur nommé par le tribunal fera procéder à l'inventaire du mobilier et des titres du présumé absent, en présence du procureur du roi ou d'un juge par lui requis. Il pourra demander qu'il soit procédé, par un expert nommé par le tribunal, à la visite des immeubles, à l'effet d'en constater l'état; le rapport sera homologué en présence du procureur du roi; les frais en seront pris sur les biens de l'absent. Cette disposition pourra être appliquée au mandataire constitué par l'absent, sur la demande des héritiers présomptifs, des parties intéressées, ou sur la réquisition du ministère public. Article 117. Les mandataires ou administrateurs jouiront d'un salaire fixé par le tribunal. Ils donneront caution pour la sûreté de leur administration et de la restitution des biens. Us rendront chaque année un compte sommaire au tribunal et ils sont tenus de rendre un compte définitif à l'absent ou aux envoyés en possession. Article 118. Le ministère public est spécialement chargé de veiller aux intérêts des personnes présumées absentes. Il sera entendu sur toutes les demandes qui les concernent. CHAPITRE II. De la déclaration d'absence. Article 119. Lorsque depuis quatre ans on n'aura point eu de nouvelles d'une personne présumée absente, tous ceux qui ont sur ses biens des droits subordonnés à son décès pourront se pourvoir devant le tribunal de son domicile, afin que l'absence soit déclarée. Si l'absent a laissé un mandat général pour l'administration de ses biens, la déclaration d'absence ne pourra être poursuivie qu'après dix années révolues depuis ses dernières nouvelles. La procuration à temps n'empêche pas la déclaration d'absence. Si la procuration générale vient à cesser par la mort ou la renonciation du mandataire, ou si le tribunal prononce sa révocation, la déclaration d'absence ne pourra être poursuivie qu'après dix ans depuis la disparition ou les dernières nouvelles de l'absent. Article 120. Pour constater l'absence, le tribunal, d'après les pièces et documents produits, ordonnera qu'une enquête soit faite contradictoirement avec le procureur du roi, dans l'arrondissement du domicile et dans celui de la résidence, s'ils sont distincts l'un de l'autre. Article 121. Le tribunal, en statuant sur la demande, aura égard aux motifs de l'absence et aux causes qui ont pu empêcher d'avoir des nouvelles de l'individu présumé absent. Article 122. Le procureur du roi enverra, aussitôt qu'ils seront rendus, les jugements tant préparatoires que définitifs au ministre de la justice, qui les rendra publics. Article 123. Le jugement de déclaration d'absence ne sera rendu qu'un an après le jugement qui aura ordonné l'enquête. CHAPITRE III. De renvoi en possession des biens de l'absent. Article 124. Après que l'absence aura été déclarée, le testament, s'il en existe un, sera ouvert à la réquisition des parties intéressées ou du procureur du roi du domicile de l'absent. Le conjoint de celui-ci, les héritiers présomptifs au jour de sa disparition ou de ses dernières nouvelles, l'État, les légataires, donataires, ainsi que tous ceux qui ont sur les biens de l'absent des droits subordonnés à la condition de son décès, seront admis à les exercer, à la charge de donner caution pour les biens susceptibles de restitution. S'ils ne trouvent pas de caution, ils seront tenus de faire emploi du mobilier. La caution sera déchargée après quinze ans. Article 125. Les envoyés en possession gagnent les fruits, sauf, si l'absent reparaît avant quinze ans révolus depuis le jour de sa disparition, à lui restituer le cinquième des revenus, et le dixième s'il ne reparaît qu'après les quinze ans. Après trente ans d'absence, la totalité des revenus leur appartiendra. Article 126. Les envoyés en possession se partagent les biens de l'absent; ils sont tenus des dettes jusqu'à concurrence des biens qu'ils recueillent. Les envoyés sont propriétaires à l'égard des tiers. Si l'absent reparaît, il recouvrera ses biens dans l'état où ils se trouveront. Quant aux actes de disposition faits par les envoyés, il aura action contre eux jusqu'à concurrence de ce dont ils se seront enrichis. Article 127. Si l'absent reparaît ou si son existence est prouvée pendant l'envoi, les effets de la déclaration d'absence cesseront, sauf au tribunal, s'il y a lieu, à prescrire des mesures pour la conservation des biens. Article 128. Les descendants de l'absent peuvent, dans les trente ans à partir de l'envoi en possession, réclamer la restitution de ses biens, comme il est dit en l'article 126. Il en est de même des collatéraux qui seraient parents plus proches que les héritiers envoyés en possession. Dans l'un et l'autre cas, les fruits seront restitués, s'il y a lieu, conformément à l'article 124. Article 129. La succession de l'absent sera ouverte du jour de son décès prouvé, au profit des héritiers les plus proches à cette époque; ils devront agir dans les trente ans à partir de l'ouverture de l'hérédité. Ceux qui auront joui des biens de l'absent seront tenus de les restituer, sous la réserve des fruits par eux acquis en vertu de l'article 125. CHAPITRE IV. Règles communes aux deux périodes de l'absence. SECTION Ier. Du mariage de l'absent et des enfants. § 1er. — Du mariage. Article 130. L'absence de l'un des époux, quelque longue qu'elle soit, n'autorise point l'autre à contracter un nouveau mariage; il ne pourra y être admis que sur la preuve positive du décès de son conjoint. Article 131. Si néanmoins il arrivait que l'époux présent contractât un nouveau mariage, la nullité n'en pourra être demandée, en aucun cas, que par l'absent ou, en son nom, par un fondé de procuration spéciale, muni de la preuve de son existence. Article 132. Si les époux sont communs en biens, le conjoint présent aura, pendant la première période de l'absence, l'administration de la communauté. Il ne pourra disposer des biens qu'avec l'autorisation de justice, comme il est dit en l'article 115. Il sera pourvu, s'il y a lieu, à l'établissement des enfants par un avis du conseil de famille, homologué par le tribunal, sur les conclusions du ministère public. Quant au patrimoine propre des époux, on observera ce qui sera dit à l'article 211 et au titre Du contrat de mariage. § 2. — Des enfants. Article 133. Si le père a disparu laissant des enfants mineurs issus d'un commun mariage, la mère exercera l'autorité paternelle quant à leur éducation et quant à l'administration de leurs biens. Article 134. Si, lors de la disparition du père, la mère était décédée ou si elle vient à décéder avant la déclaration d'absence, la tutelle provisoire appartiendra, après six mois au moins écoulés depuis la disparition, aux aïeuls et, à leur défaut, elle sera déférée par le conseil de famille à un tuteur provisoire. Article 135. Il en sera de même dans le cas où l'un des époux qui disparaît laisse des enfants mineurs issus d'un précédent mariage. Article 136. Les enfants qui naîtront trois cents jours après la disparition de l'absent seront réputés naturels, sauf à ceux qui prétendraient qu'ils sont adultérins à prouver qu'ils ont été conçus pendant la vie de l'absent. SECTION II. Des droits éventuels qui peuvent compéter à l'absent. Article 137. Quiconque réclamera un droit échu à un individu dont l'existence ne sera pas reconnue devra prouver que ledit individu existait quand le droit a été ouvert; jusqu'à cette preuve, il sera déclaré non recevable dans sa demande. Article 138. S'il s'ouvre une succession à laquelle soit appelé un individu dont l'existence n'est pas reconnue, elle sera dévolue exclusivement à ceux avec lesquels il aurait eu le droit de concourir ou à ceux qui l'auraient recueillie à son défaut. Ceux qui recueillent des biens qui devaient revenir à l'absent devront faire dresser inventaire, et faire emploi du mobilier, ou donner caution pour en assurer la restitution. La caution est déchargée après quinze ans. Article 139. Les dispositions des deux articles précédents auront lieu sans préjudice des actions en pétition d'hérédité et d'autres droits, lesquels compéteront à l'absent ou à ses représentants ou ayants cause et ne s'éteindront que par le laps de temps établi pour la prescription. TITRE V. Du mariage. CHAPITRE PREMIER. Des conditions requises pour pouvoir contracter mariage. Article 140. Il n'y a pas de mariage lorsqu'il n'y a point de consentement et que le consentement n'a pas été donné devant un officier de l'état civil. Article 141. Les futurs époux doivent être majeurs. Il est loisible au roi d'accorder des dispenses pour des motifs légitimes. Article 142. Les interdits pour cause de démence ne peuvent contracter mariage. Si l'interdiction d'un des futurs époux est demandée, la célébration du mariage sera suspendue jusqu'à ce qu'un jugement irrévocable ait statué sur la demande. Article 143. Les personnes placées sous curatelle pour faiblesse d'esprit ne peuvent se marier qu'avec le consentement du curateur et sur l'avis du conseil de famille, lequel réglera les conventions matrimoniales. Ce consentement et cet avis seront soumis à l'approbation du tribunal du domicile; les juges, après avoir entendu la personne placée sous curatelle, statueront sur l'avis d'un médecin aliéniste et sur les conclusions du ministère public. Article 144. Le défaut de liberté et l'erreur sur l'individu physique ou sur la personne civile vicient le consentement des époux et donnent lieu à l'action en nullité du mariage. Article 145. On ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier. Article 146. La femme ne peut contracter un second mariage qu'après dix mois révolus depuis la dissolution ou l'annulation du premier. Cet empêchement cesse si la femme accouche dans les dix mois. Article 147. En cas de divorce, l'époux coupable d'adultère ne pourra jamais se marier avec son complice. Article 148. En ligne directe, le mariage est prohibé entre tous les ascendants et descendants légitimes ou naturels et les alliés dans la même ligne. Article 149. En ligne collatérale, le mariage est prohibé: 1° Entre le frère et la sœur, légitimes ou naturels, et les alliés au même degré; 2° Entre oncle ou grand-oncle et nièce ou petite-nièce légitimes ou naturels, et entre tante ou grand'tante et neveu ou petit-neveu légitimes ou naturels, et les alliés au même degré. Article 150. Il est loisible au Roi de lever, pour des causes graves, les prohibitions portées au précédent article, n°2, et pour le mariage entre beau-frère et belle-sœur. Article 151. Le mariage est prohibé: Entre l'adoptant, l'adopté et ses descendants; Entre les enfants adoptifs du même individu; Entre l'adopté et les enfants qui pourraient survenir à l'adoptant; Entre l'adopté et le conjoint de l'adoptant, et réciproquement entre l'adoptant et le conjoint de l'adopté. CHAPITRE II Des formalités préliminaires du mariage. Article 152. Avant la célébration du mariage, l'officier de l'état civil doit faire deux publications orales, à huit jours d'intervalle, un jour de dimanche, devant la porte de la maison commune. Ces publications et l'acte qui en sera dressé énonceront les prénoms, noms, professions et domiciles des futurs époux, leur qualité de majeurs ou de mineurs, et les prénoms, noms, professions et domiciles de leurs pères et mères. L'acte énoncera, en outre, les jours, lieux et heures où les publications auront été faites. Il sera inscrit sur un seul registre, qui sera coté et parafé comme il est dit en l'article 44 et déposé, à la fin de chaque année, au greffe du tribunal de l'arrondissement. Article 153. Les deux publications se feront à la commune du lieu où chacune des parties a son domicile quant au mariage. Si les époux ou l'un d'eux ont, outre ce domicile spécial, un domicile de droit ailleurs, les publications y seront aussi faites. Article 154. Dispense de la seconde publication pourra être accordée, pour cause grave, par le procureur du roi du domicile des futurs époux. Dans ce cas, les premières publications feront mention de la dispense. Si le mariage se célèbre sur le lit de mort, le procureur du roi peut dispenser des deux publications. Article 155. Un extrait des actes de publications sera et restera affiché à la porte de la maison commune pendant les huit jours d'intervalle de l'une à l'autre publication. Le mariage ne pourra être célébré avant le troisième jour depuis et non compris celui de la deuxième publication. Article 156. Si le mariage n'a pas été célébré dans l'année, à compter de l'expiration du délai des publications, il ne pourra plus être célébré qu'après que de nouvelles publications auront été faites, conformément aux articles 152, 153 et 154. Article 157. Les futurs époux doivent remettre à l'officier de l'état civil du domicile où le mariage doit être célébré, les pièces suivantes: 1° Leur acte de naissance; 2° Une expédition authentique des dispenses d'âge, de parenté ou d'alliance qui auraient été accordées; 3° L'acte constatant le décès du premier conjoint, ou le divorce, ou l'annulation du premier mariage, si les futurs époux ou l'un d'eux ont été engagés dans les liens d'un mariage antérieur; 4° Les certificats exigés pour les militaires et le certificat constatant que le futur époux a satisfait à la loi sur la milice; 5° L'acte ou le jugement portant mainlevée de l'opposition, s'il en a été formé; 6° Le certificat constatant que les publications ont été faites conformément à la loi et, s'il y a une dispense, l'acte qui l'accorde. Article 158. Celui des époux qui serait dans l'impossibilité de se procurer son acte de naissance pourra le suppléer en rapportant un acte de notoriété délivré par le juge de paix du lieu de sa naissance ou par celui de son domicile. L'acte de notoriété contiendra la déclaration faite par quatre témoins de l'un ou de l'autre sexe, parents ou non parents, des prénoms, noms, profession et domicile du futur époux, et de ceux de ses père et mère, s'ils sont connus, le lieu et l'époque approximative de sa naissance et les causes qui empêchent d'en rapporter l'acte; chaque témoin fera connaître la source de ses informations. Les témoins signeront l'acte de notoriété, avec le juge de paix, et s'il y en a qui ne puissent ou ne sachent signer, il en sera fait mention. L'acte de notoriété sera présenté au tribunal de première instance du lieu où doit se célébrer le mariage. Le tribunal, après avoir entendu le procureur du roi, donnera ou refusera son homologation, selon qu'il trouvera suffisantés ou insuffisantes les déclarations des témoins et les causes qui empêchent de rapporter l'acte de naissance. Article 159. Si l'officier de l'état civil refuse de célébrer le mariage, à cause de l'insuffisance des pièces et certificats, les parties pourront se pourvoir devant le tribunal de leur domicile, lequel décidera sommairement et sans appel, après avoir entendu le ministère public. Quand le futur époux n'a pu se procurer un acte de notoriété, le tribunal pourra y suppléer par une déclaration assermentée faite par les témoins du mariage ou par le futur lui-même. CHAPITRE III. Des oppositions an mariage. Article 160. Le droit de former opposition à la célébration du mariage appartient à la personne engagée par mariage avec l'une des deux parties contractantes et aux enfants nés du mariage. Article 161. Le père, la mère et les autres ascendants peuvent faire opposition au mariage de leurs enfants et descendants pour tout empêchement légal. Article 162. Le droit d'opposition, pour tout empêchement légal à la célébration du mariage, appartient également aux frères et sœurs, oncles et tantes et aux cousins germains, majeurs, ainsi qu'au tuteur et au curateur. Article 163. Si la femme veut contracter un second mariage, au mépris de l'article 146, le premier mari et, en cas de mort, les parents du mari auront le droit de former opposition. Article 164. Le ministère public doit former opposition au mariage lorsqu'il y a un empêchement légal à ce qu'il soit célébré. Article 165. Tout acte d'opposition doit énoncer la qualité qui donne à l'opposant le droit de la former et les motifs légaux pour lesquels il la fait; il contiendra élection de domicile au siège du tribunal dans l'arrondissement duquel le mariage devra être célébré: le tout à peine de nullité et de l'interdiction de l'huissier qui aurait signé l'acte d'opposition. Article 166. L'acte d'opposition sera signifié à la personne ou au domicile des parties, et à l'officier de l'état civil devant lequel le mariage doit être célébré. Article 167. L'officier de l'état civil fera sans délai une mention sommaire des oppositions sur le registre des publications; il fera aussi mention, en marge de l'inscription desdites oppositions, des jugements ou des actes de mainlevée dont expédition lui aura été remise. Article 168. Si l'opposition est faite par acte d'huissier, et formée par une personne à qui les articles 160-164 en donnent le droit, pour les causes qui y sont déterminées, l'officier de l'état civil ne pourra procéder à la célébration du mariage avant qu'on lui en. ait remis la mainlevée. Article 169. La mainlevée volontaire se donne par acte notarié, reçu en brevet, ou par une déclaration faite à l'officier de l'état civil, lequel en fera mention en marge de l'opposition. Article 170. La mainlevée judiciaire se donne par le tribunal de première instance, lequel prononcera dans les dix jours de la demande. S'il y a appel, il y sera statué dans les dix jours de l'appel. L'officier de l'état civil ne peut célébrer le mariage que lorsque le jugement a acquis force de chose jugée et que le délai pour se pourvoir en cassation est expiré. Article 171. Lorsque l'opposition est fondée sur l'état de démence du futur époux, le tribunal pourra en prononcer la mainlevée pure et simple, sans qu'il y ait lieu de provoquer l'interdiction. Article 172. Si l'opposition est rejetée, les opposants, autres que les ascendants et le ministère public, pourront être condamnés à des dommages et intérêts. Article 173. S'il n'y a point d'opposition et si les publications ont été faites dans plusieurs communes, les parties remettront à l'officier de l'état civil qui célèbre le mariage un certificat délivré par l'officier public de chaque commune, constatant qu'il n'existe point d'opposition. CHAPITRE IV. De la célébration du mariage. Article 174. Le mariage doit être célébré publiquement dans la maison commune, devant l'officier civil de la commune où l'un des époux a une habitation continue de six mois. Article 175. Si l'un des futurs époux est hors d'état de se rendre à la maison commune, le mariage pourra être célébré dans une maison particulière, mais publiquement et en présence de quatre témoins. Mention sera faite de l'empêchement dans l'acte de mariage. Article 176. Les futurs époux doivent comparaître en personne devant l'officier civil, sauf l'exception prévue par l'article 479. Article 177. Au jour désigné par les parties, l'officier de l'état civil, en présence de deux témoins, parents ou non parents, fera lecture aux futurs époux des pièces mentionnées en l'article 157 et du chapitre IX du présent titre, sections I, II et III. Il recevra de chaque partie, l'une après l'autre, la déclaration qu'elles veulent se prendre pour mari et femme, et prononcera, au nom de la loi, qu'elles sont unies par le mariage, et il en dressera acte sur-le-champ. Article 178. L'officier de l'état civil ne peut refuser de célébrer le mariage que pour une cause admise par la loi. En cas de refus, il doit en délivrer un acte motivé. Les parties peuvent se pourvoir contre le refus devant le tribunal, qui statuera, comme en matière urgente, et sur les conclusions du ministère public, sauf appel. Le recours en cassation sera suspensif. CHAPITRE V. Du mariage des Belges à l'étranger et des étrangers en Belgique. Article 179. Les mariages entre Belges résidant en pays étranger et entre Belges et étrangers pourront se faire: 1° Dans les formes usitées dans le pays; 2° Par les agents diplomatiques et consuls de Belgique, conformément aux lois belges; 3° Par l'officier de l'état civil belge de la dernière résidence du Belge, en vertu d'une procuration reçue par le consul, ou d'une procuration sous seing privé légalisée par le consul. Dans tous les cas, le mariage sera publié en Belgique, conformément aux lois belges, et dans le pays où se trouve le Belge, par le consul ou l'agent diplomatique. Si le mariage est célébré par procuration, une expédition de l'acte sera transmise aux agents extérieurs et transcrite sur les registres. Article 180. Le mariage, célébré en pays étranger conformément à l'article 479, sera valable si les Belges n'ont pas contrevenu aux dispositions prescrites sous peine de nullité par le chapitre Ier du présent titre. Article 181. La capacité de l'étranger qui contracte mariage en Belgique est déterminée par sa loi nationale. Néanmoins l'étranger est aussi soumis aux conditions établies par les articles 140, 145, 147, 148, 149 et 151 du présent titre. Article 182. L'étranger qui veut contracter mariage en Belgique doit présenter à l'officier de l'état civil un acte de notoriété délivré par l'autorité compétente de son pays, constatant qu'il réunit les conditions requises par sa loi nationale pour contracter mariage. Article 183. Si l'étranger réside en Belgique, il doit faire, outre les publications ordonnées par les lois de son pays, celles que le présent code prescrit. L'acte de notoriété exigé par l'article 182 constatera que les publications ont été faites, s'il y a lieu. CHAPITRE VI. De la nullité et de l'inexistence du mariage. SECTION Ier. Des demandes en nullité de mariage. Article 184. Le mariage peut être attaqué par celui des époux dont le consentement n'a pas été libre. Lorsqu'il y a eu erreur dans la personne, celui des époux qui a été induit en erreur peut demander la nullité du mariage. Article 185. La demande en nullité, dans les cas prévus par l'article précédent, n'est plus recevable s'il y a eu cohabitation pendant un mois, depuis que l'époux a acquis sa pleine liberté ou que l'erreur a été par lui reconnue. Article 186. Le mariage de l'interdit peut être attaqué par l'interdit, son tuteur, le conseil de famille et le ministère public. L'annulation doit être prononcée s'il est prouvé que l'interdiction existait lors de la célébration du mariage. Si le mariage a été contracté avant le jugement d'interdiction, il pourra être annulé dans le cas où la cause de l'interdiction existait lors de la célébration du mariage. Article 187. Le mariage des faibles d'esprit placés sous curatelle peut être attaqué, s'il a été célébré sans l'observation des conditions requises par l'article 443, par les faibles d'esprit, le curateur, le conseil de famille et le ministère public. Il peut encore être attaqué si la faiblesse d'esprit existait avant le jugement qui a placé le faible d'esprit sous curatelle. Dans les deux cas, le tribunal pourra prononcer la nullité, après avoir pris l'avis du curateur, du conseil de famille et d'un médecin aliéniste. Article 188. Dans les cas prévus par les articles 486 et 487, le mariage ne peut plus être attaqué par le conjoint si la cohabitation a continué pendant un mois depuis la mainlevée de l'interdiction ou du jugement qui a prononcé la mise sous curatelle. Article 189. Tout mariage contracté en contravention aux articles 444, 445, 447, 448, 449 et 454 peut être attaqué par les époux, par les ascendants, par le conseil de famille, par le ministère public et par ceux qui y ont un intérêt né et actuel. Article 190. Il en est de même du mariage qui n'a point été contracté publiquement ou qui n'a pas été célébré devant l'officier public compétent. Cette cause de nullité est abandonnée à l'appréciation du juge. Si le mariage a été célébré à l'étranger, le juge pourra, d'après les circonstances, prononcer la nullité du mariage pour défaut de publications en Belgique. Dans les cas où il n'y a pas d'empêchement dirimant, l'action en nullité pour incompétence de l'officier public ou pour clandestinité se couvre par la possession d'état qui suivra immédiatement la célébration du mariage. Article 191. Le mariage contracté par des mineurs ne peut plus être attaque après que les époux ont atteint l'âge de vingt et un ans. Article 192. L'époux peut attaquer en tout temps le mariage que son conjoint aurait contracté. Si les nouveaux époux opposent la nullité du premier mariage, la validité ou la nullité en devra être préalablement jugée. Article 193. Le ministère public ne peut plus demander la nullité du mariage après qu'il a été dissous par la mort. Il peut se pourvoir en appel contre un jugement qui a prononcé la nullité du mariage. Article 194. En cas d'action en nullité du mariage, le tribunal peut, sur la demande de l'un des époux, ou d'office, ordonner que la femme quittera le domicile conjugal pendant l'instance. Article 195. Le mariage qui a été déclaré nul produit néanmoins les effets civils, tant à l'égard de l'époux qu'à l'égard des enfants, lorsqu'il a été contracté de bonne foi. Si l'un des époux seulement a été de bonne foi, le mariage ne produit les effets civils qu'en sa faveur et en faveur des enfants. Les enfants naturels sont légitimés par le mariage putatif de leurs père et mère. Les époux peuvent invoquer le mariage putatif pour le droit de succession. SECTION II. Du mariage inexistant. Article 196. Le mariage contracté dans le cas prévu par l'article 140 est nul de plein droit. Il ne peut jamais être confirmé et il ne produit aucun effet quand même les époux seraient de bonne foi. Toute personne peut se prévaloir de l'inexistence du mariage. CHAPITRE VII. De la preuve de la célébration du mariage. Article 197. Nul ne peut réclamer les effets civils du mariage s'il ne représente un acte de célébration inscrit sur le registre de l'état civil, sauf les cas prévus par l'article 65. Article 198. La possession d'état ne peut être invoquée par les époux ni par les tiers quand il s'agit d'établir l'état d'époux ou de réclamer les effets civils du mariage. Article 199. Lorsqu'il y a possession d'état et qu'il existe un acte de célébration du mariage, la nullité de cet acte ne pourra être invoquée pour inobservation des formes rappelées par l'article 95. Article 200. Les enfants issus de deux personnes qui sont décédées ou dans l'impossibilité de manifester leur volonté, pourront prouver le mariage de leurs parents et leur légitimité par la possession d'état que ceux-ci avaient comme mari et femme, à condition qu'ils aient eux-mêmes la possession d'état d'enfants légitimes, et que leur acte de naissance, s'il est produit, ne contredise pas l'état qu'ils invoquent. Article 201. Lorsque la preuve d'une célébration légale du mariage se trouve acquise par un procès criminel ou correctionnel, l'inscription de l'arrêt ou du jugement sur les registres de l'état civil tiendra lieu de l'acte de célébration du mariage qui aura été détruit, falsifié ou inscrit sur une feuille volante. CHAPITRE VIII. Dispositions pénales. Article 202. Seront punis d'une amende de vingt-six francs à mille francs les époux et l'officier de l'état civil, si le mariage a été célébré sans que les publications, telles qu'elles sont prescrites par la loi, aient été faites. Article 203. Sera puni d'un emprisonnement de trois mois à deux ans et d'une amende de cent francs à mille francs, l'officier de l'état civil qui a célébré un mariage sachant qu'il existait une cause légale qui s'opposait au mariage et qui en entraînait la nullité. Article 204. Quand le mariage a été annulé pour cause d'un empêchement qui était connu de l'un des époux et qu'il a laissé ignorer à l'autre, l'époux coupable sera condamné à un emprisonnement d'un mois à trois mois et à une amende de cinquante francs à cinq cents francs, sans préjudice des dommages et intérêts que l'époux trompé pourra réclamer. Article 205. Seront punis d'une amende de vingt-six francs à cinq cents francs, la femme qui a contracté mariage au mépris de l'article 146, ainsi que son conjoint et l'officier de l'état civil qui a célébré le mariage. Si la femme a trompé l'officier public et son conjoint en leur laissant ignorer son premier mariage et sa grossesse, elle subira seule l'amende établie par le présent article, et elle sera déchue, de plus, de tous ses avantages matrimoniaux, ainsi que du droit de succession à son mari. Article 206. Sera puni d'une amende de vingt-six francs à cinq cents francs, l'officier de l'état civil qui a contrevenu, de quelque manière que ce soit, aux dispositions des articles 174 à 177, 181 à 183, ou qui a commis quelque autre contravention, non prévue par le présent Code, aux dispositions des chapitres précédents. Article 207. L'action du ministère public pour l'application des peines établies par le présent chapitre sera portée devant le tribunal correctionnel. CHAPITRE IX. Des droits et des devoirs qui naissent du mariage. SECTION Ier. Des droits et des devoirs respectifs des époux. Article 208. Les époux se doivent mutuellement fidélité, secours et assistance. Article 209. La femme est obligée d'habiter avec son mari. Le mari est tenu de recevoir sa femme et de lui fournir tout ce qui est nécessaire pour les besoins de la vie, selon ses facultés et son état. Si la femme ou le mari refusent de cohabiter, le tribunal pourra, suivant les circonstances, autoriser une séparation de fait, comme il sera dit au titre Du divorce et delà séparation de corps. Article 210. Si le mari change de résidence et que la femme refuse de le suivre, le tribunal pourra autoriser une séparation de fait, comme il est dit en l'article précédent. Article 211. La femme mariée est capable de contracter, d'aliéner et d'ester en jugement, quand elle a des propres dont l'administration et la jouissance lui appartiennent. Si les époux sont communs en biens, l'administration de la communauté appartiendra au mari et à la femme, comme il sera dit au titre Du contrat de mariage. Quant aux biens qui restent propres aux époux, on suivra pour l'administration les règles qui seront établies au même titre. Aucun des époux ne pourra, sous ce régime, disposer de ses propres, sans le concours de son conjoint. En cas de dissentiment, le juge pourra autoriser l'époux propriétaire à disposer et à ester en jugement. Article 212. Quand l'un des époux refuse de consentir à un acte juridique qui doit se faire par leur concours, le mari ou la femme, qui veut passer outre, citera son conjoint en conciliation. Si le juge de paix ne parvient pas à concilier les parties, la demande sera portée devant le tribunal d'arrondissement du domicile commun. Les époux seront entendus en chambre du conseil, et le tribunal décidera, sur les conclusions du ministère public, si l'acte peut être fait, en prenant en considération l'intérêt de l'époux demandeur et celui de la famille. Article 213. Si l'un des époux ne peut, pour cause d'absence ou d'interdiction, concourir à un acte pour lequel son consentement est nécessaire, on suivra pour l'administration et la disposition des biens, soit communs, soit propres, les règles qui seront établies au titre Du contrat de mariage. Article 214. La femme peut tester, sous tous les régimes, sans le concours du mari. Article 215. Le juge de paix peut, sous tous les régimes, autoriser la femme à placer à la caisse d'épargne le produit de son travail et les économies faites sur les dépenses de ménage. La femme pourra retirer les sommes inscrites à son livret, sauf au mari à former opposition pour cause de divertissement; dans ce cas, la contestation sera portée devant le tribunal. Article 216. Si l'un des époux fait seul un acte pour lequel la loi exige le concours de son conjoint, l'acte n'aura aucun effet à l'égard de celui-ci, à moins qu'il ne le ratifie; dans ce cas, l'acte pourra lui être opposé à partir de la ratification. SECTION II. Le devoir d'éducation. Article 217. Les époux sont tenus d'entretenir, d'instruire et d'élever leurs enfants. L'instruction est obligatoire pour les enfants jusqu'à quatorze ans. A partir de dix ans, ils pourront être reçus dans les ateliers et fabriques, à condition que le travail et l'instruction alternent suivant le système dit du demi-temps. A partir de l'âge de quatorze ans, les ouvriers et ouvrières seront tenus de suivre une école d'adultes journalière jusqu'à leur majorité. Des lois spéciales régleront: 1° L'instruction obligatoire combinée avec le travail; 2° L'admission des enfants dans les ateliers et fabriques; 3° L'instruction et l'éducation des adultes dans les écoles et les sociétés ouvrières. Article 218. Les frais d'entretien et d'éducation sont supportés par les deux époux, d'après les principes qui régissent leurs conventions matrimoniales. Si les père et mère n'ont pas les moyens suffisants pour subvenir à ces frais, les ascendants et les collatéraux seront tenus d'y contribuer, d'après les règles établies par l'article 222 pour la dette alimentaire. Article 219. Si les père et mère ne remplissent pas les obligations que leur impose l'article 217, ils pourront être déclarés déchus de la puissance paternelle, sur l'action qui appartient, dans ce cas, à tout parent et allié ainsi qu'au ministère public. Toute personne est tenue d'informer le ministère public des faits concernant l'inexécution du devoir d'éducation qui seraient venus à sa connaissance. En cas de déchéance, l'enfant sera confié par le tribunal à un parent ou allié, ou placé dans une maison d'éducation, ou mis en apprentissage, aux frais de ceux qui sont tenus de la dette alimentaire. Article 220. L'enfant n'a pas d'action contre ses père et mère pour un établissement par mariage ou autrement. SECTION III. De l'obligation alimentaire. Article 221. Sont tenus réciproquement de l'obligation alimentaire: 1° Les descendants et les ascendants, ainsi que les conjoints des ascendants et les conjoints des descendants; 2° Les collatéraux jusqu'au sixième degré. Article 222. L'obligation alimentaire incombe, en premier lieu à l'époux, en deuxième lieu aux descendants et aux ascendants, en troisième lieu aux alliés dans la ligne ascendante et descendante, en dernier lieu aux collatéraux parents et alliés. Quand il y a plusieurs parents ou alliés dans la classe appelée à fournir les aliments, la proximité du degré déterminera l'ordre dans lequel les parents et alliés doivent supporter la dette. Si les parents et alliés de la classe ou du degré appelés à fournir les aliments ne peuvent pas payer une pension Convenable, le juge répartira la dette alimentaire entre eux et les parents et alliés de la classe et des degrés subséquents. De même, il pourra répartir la dette alimentaire entre un parent et un allié. Article 223. Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame et de la fortune de celui qui les doit. Quand il s'agit de collatéraux, le juge tiendra compte du degré de parenté et de toutes les circonstances de la cause pour fixer la quotité de la pension alimentaire. Article 224. Le juge pourra augmenter ou réduire la dette alimentaire, d'après les changements qui interviendront dans la situation de celui qui a droit aux aliments et de celui qui les doit. Article 225. La dette alimentaire cesse: 1° Quand les besoins de celui qui y avait droit viennent à cesser; 2° Par le décès de celui qui fournit les aliments; 3° Quand les beau-père et belle-mère ou les gendre et belle-fille convolent en secondes noces; 4° Lorsque l'époux qui produisait l'affinité et les enfants et descendants issus de son union avec l'autre époux, sont décédés. Article 226. Celui qui doit les aliments a le choix de les fournir en nature, ou de payer une pension, sauf au juge, en cas de réclamation de celui qui a droit aux aliments, à fixer le mode de prestation, en prenant en considération les rapports qui existent entre le débiteur et le créancier. CHAPITRE X. De la dissolution du mariage. Article 227. Le mariage se dissout: 1° Par la mort de l'un des époux; 2° Par le divorce légalement prononcé. TITRE VI. Du divorce et de la séparation de corps. CHAPITRE PREMIER. Du divorce. SECTION Ier. Des causes du divorce. Article 228. Le divorce ne peut être demandé que pour les causes déterminées qui suivent: 1° Pour adultère; 2° Pour excès, sévices ou injures graves de l'un des époux envers l'autre; 3° Pour abandon volontaire et malicieux de l'un des époux par l'autre. SECTION II. De l'action en divorce. Article 229. L'action en divorce n'appartient qu'aux époux; elle s'éteint par la mort de l'un d'eux. Article 230. Si l'époux qui aurait le droit de demander le divorce est interdit, le tuteur ou, s'il y a lieu, le subrogé tuteur pourra, avec l'autorisation du conseil de famille, demander la séparation de corps. Après la mainlevée de l'interdiction, l'époux au nom duquel la séparation a été prononcée pourra rétablir la vie commune, comme il est dit à l'article 267, ou demander que la séparation de corps soit convertie en divorce. Article 231. Les formes, dans lesquelles la demande en divorce doit être intentée, instruite et jugée, sont réglées par le Code de procédure civile. Article 232. Le divorce est prononcé par l'officier de l'état civil. L'acte de prononciation sera affiché par extrait dans l'auditoire du tribunal qui a admis le divorce et dans les chambres des avoués et notaires; il sera inséré dans deux journaux désignés par le tribunal. L'extrait contiendra la date de la prononciation du divorce, les noms, profession et demeure des époux, et la mention de la révocation des libéralités et des pensions alimentaires prononcée par le jugement qui admet le divorce. Le divorce ne pourra pas être opposé aux tiers de bonne foi, qui auront un recours contre les conjoints et contre les officiers publics, par la faute desquels la loi n'a pas été observée. SECTION III. De la preuve des causes déterminées. Article 233. La preuve des causes déterminées se fait conformément au Code de procédure civile. Article 234. Le juge peut tenir compte des aveux du défendeur, s'il résulte des circonstances de la cause qu'il est de bonne foi. Article 235. Le serment décisoire et le serment supplétoire ne peuvent être déférés. SECTION IV. Des fins de non-recevoir. Article 236. L'époux demandeur sera déclaré non recevable dans son action, s'il y a eu réconciliation entre les conjoints, soit depuis les faits qui auraient pu autoriser cette action, soit depuis la demande en divorce. Il pourra en intenter une nouvelle pour cause survenue depuis la réconciliation et alors faire usage des anciennes causes pour appuyer sa demande. Article 237. Si le demandeur nie qu'il y ait eu réconciliation, le défendeur en fera preuve conformément aux articles 233-235. SECTION V. Des mesures provisoires. Article 238. Le président du tribunal pourra, sauf appel, autoriser la femme à quitter le domicile conjugal pendant l'instance en divorce, ou ordonner au mari de le quitter. Il indiquera, s'il y a lieu, la maison dans laquelle la femme sera tenue de résider. Le tribunal fixera la provision alimentaire que le mari sera tenu de payer à la femme, si elle n'a point de revenus suffisants qui lui soient propres. Article 239. Si la femme quitte la résidence qui lui a été indiquée, le mari pourra refuser la provision alimentaire et, si la femme est. demanderesse en divorce, la faire déclarer non recevable à continuer ses poursuites. Article 240. Sur la demande, soit du père ou de la mère, soit du conseil de famille ou du procureur du roi, le tribunal décidera à qui l'administration provisoire des enfants sera confiée. Le jugement sera exécuté, s'il y a lieu, par l'emploi de la force publique, par la saisie des revenus de l'époux récalcitrant, ou par sa condamnation à des dommages et intérêts pour chaque jour de retard. Article 241. Le tribunal pourra, sur la demande de la femme, demanderesse ou défenderesse en divorce, prescrire les mesures nécessaires pour la conservation de ses droits. SECTION VI. Des effets du divorce. Article 242. nés époux divorcés pourront se réunir en célébrant de nouveau leur * mariage et en rétablissant leurs conventions matrimoniales telles qu'elles étaient primitivement réglées. Article 243. L'époux qui a obtenu le divorce est chargé de la garde, dé l'entretien et de l'éducation des enfants. Le tribunal, sur la demande du conseil de famille ou du procureur du roi, peut néanmoins ordonner, pour le plus grand avantage des enfants, que tous ou quelques-uns d'eux seront confiés aux soins de l'autre époux ou d'une tierce personne. Article 244. L'époux qui a la garde des enfants exercera l'autorité paternelle. Si les enfants sont confiés à un tiers, celui-ci pourra porter les plaintes qu'il aurait à faire sur leur conduite à un conseil de famille, lequel permettra, s'il y a lieu, de provoquer des mesures disciplinaires prévues au titre De la puissance paternelle, après avoir entendu ou appelé les père et mère. Article 245. Quelle que soit la personne à laquelle les enfants seront confiés, les père et mère conserveront respectivement le droit de surveiller l'entretien et l'éducation de leurs enfants, et ils seront tenus d'y contribuer en proportion de leurs facultés. Article 246. Le droit de succession des enfants sur les biens de leurs père et mère et des parents sur les biens de leurs enfants s'exercera d'après le droit commun. Les enfants nés du mariage conserveront les avantages que les conventions matrimoniales leur assurent. Article 247. L'époux contre lequel le divorce est prononcé perdra tous les avantages que l'autre époux lui avait faits, soit par leur contrat de mariage, soit pendant le mariage. Si l'instance en divorce s'éteint par la mort de l'un des époux, le demandeur ou ses héritiers pourront poursuivre la révocation de ces avantages, en prouvant l'existence de la cause pour laquelle le divorce a été demandé. Article 248. L'époux qui obtient le divorce conservera les avantages à lui faits par l'autre époux, encore qu'ils aient été stipulés réciproques et que la réciprocité n'ait pas lieu. Article 249. Si le divorce est prononcé, par suite d'une demande reconventionnelle, contre chacun des époux, ils seront déchus l'un et l'autre des avantages qui leur ont été faits. Article 250. Les libéralités faites à l'époux coupable par les parents de son conjoint en vue du mariage seront également révoquées. Les pensions promises par le contrat de mariage continueront à être servies à l'époux qui a obtenu le divorce. Article 251. Les révocations et déchéances prononcées par les articles précédents seront rendues publiques par voie d'inscription sur les registres du conservateur des hypothèques. L'époux qui requiert l'inscription présentera au conservateur un bordereau constatant la révocation des libéralités. La mention sera inscrite en marge des actes transcrits et, pour les actes non transcrits, elle sera relatée sur les registres à sa date. Article 252. Le tribunal peut accorder, par le jugement qui admet le divorce, une pension alimentaire à l'époux qui l'a obtenu, contre l'autre époux. Cette pension sera calculée de manière que l'époux conserve la position pécuniaire qu'il avait pendant le mariage. CHAPITRE II. De la séparation de corps. Article 253. La séparation de corps peut être demandée pour cause déterminée et par consentement mutuel. SECTION Ier. De la séparation de corps pour cause déterminée. § Ier. — De l'action en séparation. Article 254. Les époux peuvent demander la séparation de corps dans les cas où il y a lieu au divorce pour cause déterminée. Article 255. L'action en séparation de corps s'éteint par la réconciliation des époux, ainsi qu'il est dit aux articles 236 et 237. Article 256. L'action en séparation de corps est régie par les principes établis par les articles 229 et 230. Article 257. La procédure en séparation de corps est réglée par le Code de procédure civile. Pour la preuve des causes déterminées on applique les articles 233 à 235 du présent Code. Article 258. La séparation de corps est prononcée par l'officier de l'état civil. Article 259. La publicité prescrite par l'article 232 sera observée pour la séparation de corps. Article 260. Pendant le cours de l'instance en séparation de corps, l'époux peut convertir sa demande en une action en divorce. Une fois la séparation prononcée il ne peut demander le divorce que pour nouvelle cause. Article 261. Les articles 238 à 241, concernant les mesures provisoires et de conservation auxquelles peut donner lieu la demande en divorce, recevront leur application à la demande en séparation de corps. § II. — Des effets de la séparation. Article 262. La femme séparée de corps peut acquérir un nouveau domicile. Elle ne peut pas abdiquer sa nationalité. La naturalisation acquise par deux époux séparés de corps est valable s'ils sont de bonne foi; par suite ils pourront divorcer en Belgique si leur nouveau statut autorise le divorce. Article 263. Les dispositions que les articles 243 à 245 contiennent sont applicables aux enfants, en cas de séparation de corps. Article 264. Les déchéances prononcées en cas de divorce par les articles 247 à 251 sont applicables à la séparation de corps. Article 265. L'époux qui obtient la séparation de corps a droit à une pension alimentaire, conformément à l'article 252. L'époux contre lequel la séparation est prononcée ne peut réclamer des aliments que s'il est dans le besoin. Article 266. La séparation de corps emporte séparation de biens. L'époux qui a la garde des enfants sera administrateur des biens qui leur appartiennent; si aucun des époux n'a la garde, le tribunal confiera l'administration, soit à l'un des père et mère, soit à un tiers, et de préférence à un parent. Article 267. Les époux peuvent mettre fin à la séparation de corps, en rétablissant la vie commune; ils feront, à cet effet, une déclaration devant l'officier de l'état civil, qui en dressera acte sur le registre des mariages conformément à l'article 82. La déclaration sera rendue publique dans les formes prescrites par l'article 232. Article 268. Le rétablissement de la vie commune rétablira les conventions matrimoniales des époux, sous les conditions prescrites au titre Du contrat de mariage. Les déchéances prononcées par l'article 264, combiné avec les articles 247-251, cesseront de plein droit par le rétablissement de la vie commune. Mention en sera faite sur les registres du conservateur des hypothèques, à la réquisition des époux. SECTION II. De la séparation volontaire. § Ier — De la séparation par consentement mutuel. Article 269. Les époux ne sont admis à demander la séparation de corps par consentement mutuel qu'après deux ans de mariage. Le code de procédure civile réglera les formes de la demande. Article 270. Les époux soumettront à l'homologation du tribunal leurs conventions sur les points suivants: 1° La garde et l'éducation des enfants nés de leur union, pendant l'instance et après le jugement; 2° La pension alimentaire qui doit être payée à l'époux qui est dans le besoin, pendant l'instance et après le jugement; 3° Le règlement de leurs droits respectifs sur leurs biens. Les créanciers des époux seront mis en cause dans l'instance. Article 271. Les articles 258, 259, 262, 263 et 266, 1er alinéa, sont applicables à la séparation de corps par consentement mutuel. Article 272. Les époux peuvent rétablir la vie commune, comme il est dit en l'article 267, avec l'effet qui y est attaché par le 1er alinéa de l'article 268. § II. — De la séparation par le fait de l'un des époux. Article 273. Si le mari ou la femme refuse de cohabiter, le tribunal pourra, suivant les circonstances, autoriser une séparation de fait, après avoir entendu les époux en chambre du conseil, et sur les conclusions du ministère public. Le président peut autoriser la femme à quitter le domicile conjugal pendant la durée de l'instance. Article 274. Si le tribunal autorise la séparation des époux, il réglera: 1° Leurs droits et obligations en ce qui concerne la garde et l'éducation des enfants issus du mariage; 2° La pension alimentaire que l'un des époux doit, s'il y a lieu, payer à son conjoint. Article 275. Le tribunal prononcera la séparation après que les créanciers auront été mis en cause. Chacun des époux disposera exclusivement du produit de son travail. Article 276. La vie commune sera rétablie dès que l'époux qui avait refusé de cohabiter en manifestera la volonté. Article 277. Si, après cinq ans, la vie commune n'est pas rétablie, les époux pourront demander que la séparation de corps soit prononcée définitivement. TITRE VII. De la paternité et de la filiation. CHAPITRE PREMIER. De la filiation des enfants légitimes. SECTION Ier. Des enfants conçus ou nés pendant le mariage. § Ier. — De l'enfant conçu pendant le mariage. Article 278. L'enfant conçu pendant le mariage a pour père le mari. Article 279. Sont présumés conçus pendant le mariage: 1° L'enfant né cent quatre-vingts jours après la célébration; 2° l'enfant né avant l'expiration de trois cents jours depuis la dissolution ou l'annulation du mariage. Les délais se comptent par heures. Article 280. Néanmoins le mari peut désavouer l'enfant conçu pendant le mariage, s'il prouve que, pendant le temps qui a couru depuis le trois-centième jusqu'au cent quatre-vingtième jour avant la naissance de cet enfant, il était, soit pour cause d'éloignement, soit par l'effet de quelque accident, dans l'impossibilité physique de cohabiter avec sa femme. Article 281. Si les époux sont séparés de corps, le mari peut désavouer l'enfant né trois cents jours après que le jugement de séparation a acquis force de chose jugée. Le désaveu ne sera pas admis s'il y a eu réunion de fait entre les époux. Article 282. Le mari ne peut, en alléguant son impuissance naturelle, désavouer l'enfant. Il peut désavouer l'enfant pour cause d'adultère, s'il justifie par d'autres faits qu'il a été dans l'impossibilité de cohabiter avec sa femme. § II. — De l'enfant conçu avant et né pendant le mariage. Article 283. Le mari a le droit de désavouer l'enfant né avant le cent quatre-vingtième jour du mariage. Article 284. Il ne peut plus exercer ce droit quand il a reconnu l'enfant comme sien. Il y a reconnaissance tacite: 1° Si le mari a eu connaissance de la grossesse avant le mariage; 2° Si l'acte de naissance prouve que le mari y a assisté, soit en personne, soit par un mandataire en vertu d'une procuration authentique; 3° S'il traite l'enfant comme sien. Article 285. L'enfant non désavoué est légitime, quand même, lors de sa conception, le mariage entre le père et la mère aurait été impossible. § III. — De l'action en désaveu. Article 286. L'action en désaveu est personnelle au mari; il ne peut désavouer l'enfant que lorsque celui-ci est né. Les héritiers et autres successeurs universels ne peuvent intenter l'action en désaveu que dans les cas suivants: 1° Si le mari est mort avant d'avoir agi, mais étant encore dans le délai utile pour le faire; 2° Si l'enfant s'est mis en possession des biens du mari ou s'il trouble les héritiers dans cette possession. Article 287. L'action sera portée devant le tribunal du domicile du mari. Si l'enfant est mineur il sera représenté par un tuteur ad hoc, nommé par le tribunal. La mère sera mise en cause après que l'action aura été intentée. Article 288. Le mari doit, sous peine de déchéance, intenter l'action en désaveu dans le délai de deux mois, s'il se trouve sur les lieux de la naissance de l'enfant. Si le mari vit séparé de sa femme, de fait ou de droit, ou si la naissance lui a été cachée, le délai ne court que du jour où le mari en a eu connaissance. Si le mari n'était pas sur les lieux il a trois mois pour agir. Ce délai court du jour où le mari a appris la naissance de l'enfant. Article 289. Les héritiers ont un délai de trois mois, lequel commence à courir du jour où ils ont le droit d'agir d'après l'article 286. Article 290. Le défendeur est-tenu de prouver, s'il y a lieu, que le demandeur est déchu de son droit. SECTION II. De l'enfant né après la dissolution du mariage et de l'action en contestation de légitimité. Article 291. L'enfant né plus de trois cents jours après la dissolution ou l'annulation du mariage sera déclaré illégitime, si sa légitimité est contestée par une partie intéressée. Article 292. Lorsqu'une femme se remarie avant les dix mois depuis la dissolution ou l'annulation de son mariage, le tribunal décidera, d'après les circonstances, si l'enfant auquel elle a donné le jour appartient au premier mari ou au second. Article 293. L'action en contestation de légitimité se prescrit par trente ans, en ce qui concerne les intérêts pécuniaires. SECTION III. Des preuves de la filiation des enfants légitimes. Article 294. Si le mariage dont l'enfant se dit issu est constant, il pourra établir sa filiation maternelle par son acte de naissance, et en prouvant son identité si elle est contestée. La preuve de la maternité entraîne celle de la paternité en vertu de la présomption de l'article 278, sauf au mari à désavouer l'enfant, s'il y a lieu. La preuve de l'identité se fait par témoins; l'enfant n'a besoin d'un commencement de preuve par écrit que dans le cas où il a une possession d'état contraire à son titre. Article 295. A défaut d'acte de naissance, la possession constante de l'état d'enfant légitime prouvera la filiation maternelle et paternelle. Article 296. La possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui indiquent le rapport de filiation et de parenté entre un individu et la famille à laquelle il prétend appartenir. Les principaux de ces faits sont: Que l'individu a toujours porté le nom de celui qu'il prétend avoir pour père; Que ceux dont il se dit l'enfant l'ont toujours traité comme tel, et ont pourvu, en cette qualité, à son entretien, à son éducation et à son établissement; Qu'il a été reconnu constamment pour tel dans la famille et dans la société. Article 297. Nul ne peut réclamer un état contraire à celui que lui donnent son titre de naissance et la possession conforme à ce titre. Réciproquement, nul ne peut contester l'état de celui qui a une possession conforme à son titre de naissance. Article 298. A défaut de titre et de possession constante, ou si l'enfant a été inscrit, soit sous de faux noms, soit comme né de père et mère inconnus, la preuve de la maternité peut se faire par témoins. Il en est de même s'il y a eu supposition ou substitution de part, alors même qu'il y aurait un acte de naissance et une possession conforme. Article 299. Le demandeur devra prouver l'accouchement de la femme dont il se dit l'enfant et son identité. Il ne sera admis à cette preuve que s'il a un commencement de preuve par écrit, qui rend sa demande probable, ou si les présomptions ou indices résultant de faits dès lors constants sont assez graves pour déterminer l'admission de la preuve testimoniale. Le tout, sans préjudice du droit qu'a l'enfant en vertu de l'article 66. Article 300. Le commencement de preuve par écrit résulte des titres de famille, des registres et papiers domestiques, ainsi que des lettres du père ou de la mère, des actes publics et des écrits privés émanés d'une partie engagée dans la contestation ou qui y aurait intérêt si elle était vivante. Article 301. La preuve contraire pourra se faire par tous les moyens propres à établir que le réclamant n'est pas l'enfant de la femme qu'il prétend avoir pour mère, ou même, la maternité prouvée, qu'il n'est pas l'enfant du mari de la mère, sans qu'il soit nécessaire de recourir à l'action en désaveu. SECTION IV. Des actions en réclamation et en contestation d'état. Article 302. L'action en réclamation d'état n'appartient qu'à l'enfant et à ses descendants. Elle est imprescriptible à leur égard; ils n'y peuvent renoncer. Article 303. Les héritiers autres que les descendants ne peuvent réclamer l'état de leur auteur, que s'ils y ont un intérêt pécuniaire, et quand l'enfant est mort avant d'avoir accompli sa vingt-sixième année. Si l'enfant meurt après cet âge, les héritiers sont déchus de ce droit, à moins qu'ils ne prouvent que l'enfant ignorait son état. Article 304. Quand l'action a été intentée par l'enfant, ses héritiers peuvent la suivre, s'ils y ont un intérêt pécuniaire, à moins qu'il n'y ait désistement ou péremption d'instance. Article 305. L'action peut être portée, s'il y a lieu, devant les tribunaux criminels. Dans ce cas, l'état ne peut être prouvé que conformément au présent Code. Article 306. L'action en contestation d'état appartient à tout membre de la famille à laquelle une personne prétend appartenir. Elle est imprescriptible; toute renonciation ou reconnaissance est radicalement nulle. Article 307. Les jugements concernant l'état sont soumis aux principes qui régissent les effets de la chose jugée. CHAPITRE II. Des enfants naturels. SECTION Ier. De la filiation des enfants naturels. § Ier. — Des preuves de la filiation naturelle. Article 308. La maternité naturelle se prouve par l'acte de naissance, si la mère y est indiquée. Article 309. La possession d'état prouve la filiation naturelle, à l'égard du père et de la mère, s'il y a une réunion suffisante de faits qui indiquent un rapport certain de filiation entre l'enfant et les personnes dont il se prétend issu. § II. — De la reconnaissance des enfants naturels. Article 310. L'enfant naturel peut être reconnu: 1° Dans l'acte de naissance, ou par une déclaration postérieure faite devant l'officier de l'état civil; 2° Par tout acte authentique; 3° Par un acte ou écrit sous seing privé émané du père ou de la mère. Article 311. La reconnaissance peut se faire en termes énonciatifs, et résulter d'un aveu tacite prouvé par écrit. Article 312. La reconnaissance peut être faite par les mineurs et les femmes mariées, par les interdits dans un intervalle lucide, et par les faibles d'esprit placés sous curatelle, sauf le droit pour toute partie intéressée de l'attaquer pour cause de surprise. Article 313. L'enfant peut être reconnu, dès qu'il est conçu. La reconnaissance peut avoir lieu après sa mort. Article 314. Le père qui reconnaît l'enfant peut indiquer la mère. Cette indication prouvera la maternité, si la mère la confirme par son aveu, de quelque manière qu'il soit fait. Article 315. La reconnaissance est inexistante: 1° si elle a été faite par une autre personne que par le père ou la mère; 2° si celui qui l'a faite n'avait pas l'usage de sa raison au moment de Pacte. Article 316. La reconnaissance peut toujours être contestée par tous ceux qui y ont intérêt. Article 317. La reconnaissance est déclarative de filiation. Elle ne peut être révoquée; néanmoins la révocation du testament entraîne celle de la reconnaissance qu'il contient. Article 318. Si l'identité de l'enfant ou de l'auteur de la reconnaissance est contestée, elle pourra être prouvée d'après le droit commun. § III. — De la recherche de la paternité et de la maternité. Article 319. La recherche de la paternité est interdite. Elle est admise,par exception, en faveur des parties intéressées: 1° En cas d'enlèvement ou de viol; lorsque l'époque de l'enlèvement ou du viol se rapporte à celle de la conception, le ravisseur ou l'auteur du viol pourra être déclaré père de l'enfant; 2° En cas de promesse de mariage ou de séduction, lorsqu'il y a un commencement de preuve par écrit de la promesse ou de la séduction, ou lorsque les présomptions, résultant de faits dès lors constants, sont assez graves pour déterminer l'admission de la preuve testimoniale. Article 320. La femme peut réclamer des dommages et intérêts quand il y a un engagement contracté en sa faveur, et dans les cas où la recherche de la paternité est admise. Article 321. Les parties intéressées peuvent rechercher la maternité. Elle ne peut être recherchée contre l'enfant. Article 322. Celui qui recherche la maternité doit prouver l'accouchement de la mère et l'identité de l'enfant avec celui dont elle est accouchée. Il ne sera reçu à faire cette preuve par témoins, que s'il a un commencement de preuve par écrit de l'accouchement et de l'identité, ou lorsque les présomptions ou indices, résultant de faits dès lors constants, sont assez graves pour déterminer l'admission de la preuve testimoniale. Article 323. L'article 300 est applicable au commencement de preuve par écrit, exigé par les articles 319 et 322. Article 324. La déclaration de grossesse faite par la mère devant un officier public peut être alléguée, suivant les circonstances, soit comme une reconnaissance volontaire, soit comme un commencement de preuve par écrit, si l'identité est constante. Article 325. Les articles 302 à 307 sont applicables à l'enfant naturel. § IV. — Des droits résultant de la filiation naturelle. Article 326. La filiation naturelle, dûment constatée, rattache l'enfant à la famille de son père et de sa mère. Article 327. L'enfant naturel prend le nom de celui de ses père et mère à l'égard duquel sa filiation est constatée. Si sa filiation est constatée à l'égard de son père et de sa mère il peut porter les noms de l'un et de l'autre. Article 328. Les dispositions des articles 217 à 220, sur le devoir d'éducation qui incombe aux père et mère légitimes, sont applicables aux père et mère naturels, quand la filiation est légalement constatée. L'exercice de la puissance paternelle et de la tutelle à l'égard des enfants naturels sera réglé aux titres qui y sont relatifs. Article 329. Les dispositions des articles 221 à 226, sur l'obligation alimentaire qui incombe aux parents et alliés, sont applicables aux parents et alliés naturels. Article 330. Les droits des enfants naturels sur l'hérédité de leurs parents seront réglés au titre Des successions. § V. — De la filiation adultérine et incestueuse. Article 331. La maternité de l'enfant est prouvée par l'acte de naissance où la mère est indiquée; mais il est défendu, sous peine de nullité, à l'officier de recevoir et de constater les déclarations dont on pourrait induire que l'enfant est né d'un commerce adultérin ou incestueux. Article 332. L'enfant peut invoquer la possession d'état pour prouver sa filiation, conformément à l'article 309. Article 333. Il peut être reconnu, conformément à l'article 310; mais il est défendu, sous peine de nullité, de faire dans l'acte de reconnaissance une mention quelconque d'où l'on pourrait induire que l'enfant est né d'un commerce adultérin ou incestueux. Article 334. L'enfant est admis à la recherche de la maternité, sous les conditions établies par l'article 322. Article 335. La recherche de la paternité est admise dans les cas prévus par l'article 319. Article 336. L'enfant prendra le nom de celui de ses père et mère à l'égard duquel sa filiation est constatée. Si sa filiation est constatée à l'égard de son père et de sa mère, il prendra le nom de celui de ses parents dont l'indication pourra cacher son origine. Article 337. Les dispositions des articles 326 et 328 à 330, relatives aux droits des enfants naturels, sont applicables aux enfants adultérins et incestueux. Article 338. Les articles 311-313, 315-318, 320-325 sont applicables aux enfants adultérins et incestueux. SECTION II. De la légitimation des enfants naturels. Article 339. Les enfants naturels sont légitimés par le mariage subséquent de leurs père et mère, pourvu que leur filiation soit légalement constatée, avant ou après le mariage. Les enfants adultérins ne peuvent être légitimés. Ceux qui sont nés d'un commerce incestueux seront légitimés si le mariage de leurs parents a lieu avec dispense. Article 340. Le mariage des Belges en pays étranger opère légitimation, quand même, d'après la loi de ce pays, le mariage ne légitimerait point les enfants naturels. Si des étrangers se marient en Belgique, on appliquera leur loi personnelle. Si l'un des futurs époux est Belge, l'article 339 recevra son application. Article 341. En cas de prédécès de l'enfant, le mariage de ses père et mère légitimera ses descendants légitimes ou naturels à l'égard de leurs aïeux et de toute la famille. Article 342. La légitimation assimile les enfants légitimés aux enfants légitimes à partir du mariage. Article 343. Les officiers dé l'état civil feront mention en marge de l'acte de naissance des enfants naturels: 1° Des actes de reconnaissance par eux reçus; 2° Des actes de reconnaissance reçus parles officiers publics; ceux-ci doivent en adresser une expédition en due forme à l'officier de l'état civil du lieu de naissance de l'enfant; 3° Des jugements qui constatent la filiation d'un enfant illégitime; le greffier est tenu d'en donner connaissance à l'officier de l'état civil du lieu où l'enfant est né; 4° De la légitimation résultant du mariage des père et mère des enfants naturels, dont les actes de naissance sont inscrits sur les registres. TITRE VIII. De l'adoption. CHAPITRE PREMIER. Des conditions de l'adoption. Article 344. L'adoption est permise aux majeurs de l'un et de l'autre sexe qui n'auront, à l'époque de l'adoption, ni enfants ni descendants légitimes ou naturels nés ou conçus et qui seront plus âgés que celui qu'ils veulent adopter. Article 345. Nul ne peut être adopté par plusieurs, si ce n'est par deux époux. L'un des époux ne peut adopter entre-vifs qu'avec le consentement de son conjoint. Article 346. L'adoption entre-vifs peut avoir lieu pendant la minorité de l'adopté avec le consentement de ses père et mère, ou du survivant. En cas de prédécès des père et mère, le conseil de famille sera appelé à consentir. Si l'enfant n'a point de famille, l'administration des hospices la remplacera. Article 347. L'adoption d'un enfant mineur, faite par testament, doit être acceptée par les personnes appelées à consentir d'après l'article précédent. CHAPITRE II. Des formes de l'adoption. Article 348. L'adoption peut se faire par acte sous seing privé, ou par acte authentique, reçu par notaire ou par l'officier de l'état civil. Article 349. L'acte sera inscrit sur les registres de l'état civil du lieu où l'adoptant est domicilié. L'officier de l'état civil en fera mention en marge de l'acte de naissance. CHAPITRE III. Des effets de l'adoption. Article 350. L'adopté prend le nom de l'adoptant, en l'ajoutant à son nom propre. Article 351. L'adopté reste dans sa famille naturelle, et y conserve tous ses droits. Il n'entre pas dans la famille de l'adoptant. Article 352. L'adoption n'a d'effet qu'entre l'adoptant et l'adopté. Ils sont tenus l'un envers l'autre de la dette alimentaire. Article 353. Si l'adopté est mineur, l'adoptant est obligé de le nourrir, de l'entretenir et de l'élever. Article 354. L'adoptant a le droit de correction que la loi accorde aux père et mère. Article 355. Les droits de successibilité résultant de l'adoption sont réglés au titre Des Successions, Donations et Testaments. Article 356. L'adoption peut être révoquée sur la demande de l'adoptant, si par son ingratitude l'adopté se montre indigne du bienfait qu'il a reçu. TITRE IX. De l'autorité des père et mère. CHAPITRE PREMIER. De l'autorité des père et mère sur la personne de l'enfant. Article 357. L'enfant reste sous l'autorité de ses père et mère jusqu'à sa majorité ou son émancipation. Article 358. Le père exerce cette autorité, durant le mariage, de commun accord avec la mère. En cas de dissentiment, le tribunal décidera. Article 359. Si l'un des époux est mort, absent ou frappé d'aliénation mentale, l'autre aura seul l'exercice de l'autorité paternelle. Article 360. L'enfant, à tout âge, doit honneur et respect à ses père et mère. Article 361. L'enfant ne peut quitter la maison paternelle sans la permission de ses père et mère. S'il la quitte sans y être autorisé, les parents peuvent s'adresser au tribunal pour le forcer à y rentrer. Le tribunal pourra décider, selon les circonstances, qu'il sera placé soit chez un parent ou chez un particulier, soit dans une maison d'éducation ou dans un hospice. Article 362. Le mineur ne peut s'enrôler volontairement qu'avec le consentement de ses père et mère, et à leur défaut, du tuteur autorisé par le conseil de famille. Article 363. Les père et mère peuvent corriger l'enfant; ils n'ont pas le droit de lui infliger des punitions corporelles, ni des châtiments excessifs. Si les parents ont des sujets de mécontentement très graves sur la conduite de l'enfant, ils. adresseront leur plainte au président du tribunal. Celui-ci, s'il y a lieu, renverra les plaignants devant le tribunal qui décidera si l'enfant doit quitter la maison paternelle et où il sera placé. CHAPITRE II. De l'administration des biens de l'enfant. Article 364. Le père, durant le mariage, représente ses enfants mineurs dans tous les actes civils. Il administre leurs biens en bon père de famille. La mère concourt à tous les actes qui ne sont pas d'administration journalière. Article 365. Sont considérés comme actes d'administration, à l'égard des père et mère, les actes énumérés à l'article 447. Le père ne peut faire les actes de disposition énumérés à l'article 448 qu'avec l'autorisation du tribunal donnée en chambre du conseil. Cette autorisation ne peut être accordée que pour cause de nécessité ou d'un avantage évident. On appliquera au père administrateur les dispositions du titre De la tutelle, concernant la vente des biens meubles et immeubles, ainsi que celles qui obligent le tuteur à faire emploi des capitaux et des revenus du mineur. Article 366. Si les intérêts de l'enfant sont en opposition avec ceux du père, ou avec ceux d'un autre enfant soumis à la même autorité, il sera nommé aux enfants un curateur ad hoc par le tribunal du domicile du père. Article 367. Le père doit faire dans le mois inventaire des biens qui échoient à l'enfant. On appliquera au père administrateur les dispositions du titre De la tutelle, concernant l'inventaire. Il est comptable de la propriété et des revenus. Il peut porter en compte les frais d'éducation.. Le père répond de sa gestion, ainsi que la mère, pour les actes auxquels elle concourt. Les dispositions des articles 466 et 469 sont applicables aux père et mère. Article 368. Les donateurs ou testateurs peuvent mettre comme condition aux libéralités qu'ils font à un mineur que l'administration des biens appartiendra à un curateur par eux désigné. Celui-ci rendra chaque année compte de sa gestion aux père et mère. Si son administration cesse pendant la minorité de l'enfant, il sera remplacé par le tribunal. Article 369. Les actes faits par les père et mère, dans les limites de leur pouvoir, ne peuvent être rescindés pour cause de lésion. Les actes faits par le père, sans l'observation des conditions prescrites par la loi, sont nuls de droit. CHAPITRE III. De la déchéance de l'autorité conférée aux père et mère. Article 370. Si les père ou mère abusent de leur autorité, le tribunal les en déclarera déchus et prendra les mesures autorisées par l'article 219. Article 371. Si, dans l'administration des biens, les père ou mère commettent des fautes graves, le tribunal pourra confier la gestion à un curateur, parent ou étranger. Article 372. En cas d'inconduite notoire du père ou de la mère, le tribunal les déclarera déchus de leur autorité, comme il est dit en l'article 370. Article 373. Les père ou mère seront déchus de plein droit de leur autorité sur tous leurs enfants, s'ils ont été condamnés en vertu des articles 379-382 du Code pénal. Article 374. Dans les cas prévus par les articles précédents, le tribunal statuera comme il est dit en l'article 219. Article 375. Dans tous les cas où le tribunal intervient dans l'exercice de l'autorité paternelle, il entendra les parents et l'enfant en chambre du conseil et il statuera sur les réquisitions du ministère public. Article 376. Quand les père et mère sont déclarés déchus de leur autorité, la personne à laquelle les enfants seront confiés leur servira de tuteur, et on appliquera les lois qui régissent la tutelle. Article 377. Les conventions et renonciations qui dérogent à l'autorité que la loi donne aux père et mère sont nulles. CHAPITRE IV. De l'autorité des père et mère naturels. Article 378. Les articles 357, 360, 361, 362 et 263 sont applicables aux père et mère des enfants naturels. Article 379. Si la filiation naturelle n'est établie qu'à l'égard du père ou de la mère, l'autorité sera exercée par celui à l'égard duquel la filiation est constante. Si la filiation est constatée à l'égard des père et mère, l'exercice de l'autorité appartiendra à celui qui a la garde de l'enfant, sauf le droit de surveillance de l'autre. S'il y a conflit entre les père et mère sur la garde de l'enfant, le tribunal décidera. En cas de cohabitation, les père et mère concourent dans l'exercice de l'autorité paternelle. Article 380. Si l'un des père et mère est mort, absent ou atteint d'aliénation mentale, l'autre aura seul l'exercice de l'autorité paternelle. Si l'un des père ou mère se marie, il doit demander au tribunal de lui maintenir le droit d'éducation, sinon il pourra en être déclaré déchu sur la demande du ministère public. Article 381. Le père ou la mère qui a la garde de l'enfant administre ses biens. En cas de cohabitation des père et mère, on applique l'article 364. Article 382. Les articles 365 à 369 sont applicables à l'administration légale des père et mère naturels. Article 383. Les articles 370 à 377 sont aplicables aux père et mère naturels. TITRE X. De la minorité et de la tutelle. CHAPITRE PREMIER. De la minorité. Article 384. Le mineur est l'individu de l'un et de l'autre sexe qui n'a point encore l'âge de vingt et un ans accomplis. Article 385. Le survivant des père et mère continue à exercer l'autorité paternelle sur ses enfants mineurs; la tutelle ne s'ouvre qu'à sa mort. Article 386. Si le survivant veut se marier, il doit, avant la célébration du mariage, convoquer le conseil de famille, qui décidera si l'autorité paternelle lui sera conservée. La délibération sera soumise à l'homologation du tribunal. A défaut de cette convocation, le tribunal pourra déclarer le survivant déchu de l'autorité paternelle sur la demande du ministère public, auquel tout parent pourra dénoncer le fait. Si la mère est maintenue dans l'exercice de son autorité, le second mari sera solidairement responsable de la gestion. Si le survivant est déclaré déchu de la puissance paternelle, on appliquera l'article 376. CHAPITRE II. De la tutelle. SECTION Ier. Dispositions générales. Article 387. Il ne peut y avoir qu'un seul tuteur, quel que soit le nombre des enfants mineurs. S'il y a opposition d'intérêts entre des mineurs soumis à la même tutelle, le tribunal nommera un tuteur ad hoc aux enfants qui ont besoin d'une protection spéciale. Article 388. Les donateurs ou testateurs peuvent mettre comme condition aux libéralités qu'ils font à un mineur sous tutelle que les biens seront administrés par un curateur qu'ils désignent. Ce curateur sera soumis aux obligations qui incombent aux tuteurs. Si son administration cesse pendant la minorité de l'enfant, il sera remplacé par le tribunal. Article 389. Tout tuteur doit accepter la tutelle, à moins qu'il ne soit excusé par le conseil de famille. Si le tuteur ne gère point, ou s'il est en retard d'exercer ses fonctions, toute personne intéressée, les parents et le ministère public pourront demander qu'il soit nommé un administrateur à la tutelle, aux frais du tuteur légal, lequel sera responsable de la gestion du tuteur de fait. SECTION II. Des tuteurs. § 1er. — De la tutelle déférée par le père ou la mère. Article 390. Le dernier mourant des père et mère exerçant l'autorité paternelle a le droit de nommer un tuteur, parent ou étranger. Article 391. La nomination doit être faite par testament, par acte notarié, ou par une déclaration reçue par le juge de paix, assisté de son greffier. § II. — De la tutelle des ascendants. Article 392. A défaut d'un tuteur nommé par le père ou la mère, la tutelle appartient de droit à l'aïeul le plus jeune; et s'il s'excuse, ou s'il meurt, à l'aïeul survivant. § III. — De la tutelle déférée par le conseil de famille. Article 393. Lorsqu'un enfant mineur reste sans père ni mère, ni tuteur élu par le dernier mourant, ni aïeuls, ou lorsque ces tuteurs sont excusés, exclus ou meurent, il sera pourvu par un conseil de famille à la nomination d'un tuteur. Article 394. L'officier de l'état civil, qui reçoit la déclaration de décès d'une personne laissant des enfants mineurs, ou qui célèbre le mariage d'un veuf ou d'une veuve ayant des enfants mineurs du premier lit, doit en informer immédiatement le juge de paix du domicile du mineur. Les parents et alliés du mineur peuvent demander la convocation du conseil de famille. Toute personne peut dénoncer au juge de paix le fait qui donne lieu à la nomination d'un tuteur. § IV. — De la tutelle des enfants admis dans un hospice. Article 395. La tutelle des enfants reçus dans un hospice est exercée conformément à la loi du 25 pluviôse an XIII. Si un orphelin de père ou de mère est admis à l'hospice, l'autorité paternelle sera exercée par la commission administrative. § V. — De la tutelle des enfants naturels. Article 396. Si la filiation de l'enfant naturel n'est pas légalement constatée, il lui sera nommé un tuteur par le tribunal du lieu de sa résidence, à la réquisition du ministère public. L'officier de l'état civil qui reçoit la déclaration qu'un enfant est né de père et mère inconnus en donnera connaissance au procureur du roi. Article 397. Si les père et mère de l'enfant naturel dont la filiation est constatée meurent, la tutelle appartiendra au tuteur testamentaire, à son défaut, à l'aïeul, et, à défaut d'aïeul, le conseil de famille nommera un tuteur. SECTION III. Du subrogé tuteur. Article 398. Dans toute tutelle, sauf celle de l'article 395, il y aura un subrogé tuteur nommé par le conseil de famille. Article 399. Le tuteur testamentaire ou légitime doit, avant d'entrer en fonctions, faire convoquer un conseil de famille pour la nomination du subrogé tuteur. S'il s'est ingéré dans la gestion avant qu'il y ait un subrogé tuteur, le conseil de famille pourra, s'il y a eu dol de la part du tuteur, lui retirer la tutelle. Article 400. Si le conseil de famille nomme le tuteur, la nomination du subrogé tuteur se fera dans la même séance. Le subrogé tuteur sera pris dans celle des deux lignes à laquelle le tuteur n'appartiendra pas. Néanmoins deux frères germains peuvent être nommés, l'un tuteur, l'autre subrogé tuteur. Article 401. En cas de nomination d'un nouveau tuteur, les fonctions du subrogé tuteur cesseront; mais il pourra être réélu. Article 402. Les dispositions contenues dans les sections V et VI du présent chapitre s'appliquent aux subrogés tuteurs. SECTION IV. Du conseil de famille. Article 403. Le conseil de famille sera composé du juge de paix président, des quatre plus proches parents du mineur, du tuteur et du subrogé tuteur, ou, s'il y a lieu, du curateur. Article 404. Sont de droit membres du conseil dans l'ordre suivant: 1° Les ascendants; 2° les frères germains; 3° les oncles. S'il y a plus de quatre ascendants, les plus proches seront appelés, et, en cas de concours de frères ou d'oncles, les plus âgés. A défaut de ces parents, le juge de paix choisira les membres du conseil de famille parmi les parents ou alliés, en tenant compte de la proximité du degré et de l'intérêt du mineur. A défaut de parents et d'alliés, le juge de paix nommera des personnes connues pour avoir eu des relations habituelles d'amitié avec le père ou la mère du mineur. Article 405. Le mineur âgé de seize ans accomplis sera convoqué aux séances du conseil, mais il n'y aura pas voix délibérative. Article 406. Si une personne désignée pour être membre du conseil n'en peut faire partie pour cause d'éloignement ou pour tout autre empêchement légitime, le juge de paix pourra l'en dispenser, sauf à la remplacer d'après les règles établies par l'article 404. Il remplacera de même les membres dont les fonctions viendraient à cesser pendant le cours de la tutelle. Article 407. Les parents, alliés ou amis, appelés à siéger dans un conseil de famille, doivent y assister en personne. Ceux qui, sans excuse légitime, ne comparaîtront pas, seront punis d'une amende qui ne peut excéder cinquante francs et qui sera prononcée sans appel par le juge de paix. En cas d'absence habituelle d'un membre du conseil, le juge de paix en donnera avis au procureur du roi, lequel requerra contre ledit membre la déchéance et la condamnation à une amende de deux cents à cinq cents francs. Le juge de paix le remplacera, conformément aux règles établies par l'article 404. Article 408. Le conseil de famille des enfants naturels dont la filiation est légalement constatée sera composé d'après les règles qui précèdent, sauf que le juge de paix aura, dans tous les cas, le droit de choisir les parents qui y sont appelés. Si les enfants naturels n'ont pas de filiation légale, le juge de paix choisira les membres du conseil parmi les notables de la commune. Article 409. Le conseil de famille est composé, d'après les règles qui précèdent, par le juge de paix du domicile du mineur lors de l'ouverture de la tutelle. Le conseil, une fois composé, est permanent, sauf les changements qui peuvent survenir par le remplacement, la mort, l'excuse ou l'exclusion d'un membre. Quand le tuteur change de domicile, le siège du conseil reste fixé au domicile primitif, sauf au tribunal à en prescrire le déplacement, sur la demande du tuteur ou des membres du conseil. Article 410. Le juge de paix convoque le conseil de famille d'office, ou sur la demande du tuteur, du subrogé tuteur, du curateur, de deux membres du conseil ou de tiers intéressés. Le procureur du roi peut requérir la convocation. La convocation fera connaître l'objet de la délibération. Article 411. Le délai pour comparaître sera réglé par le juge de paix à jour fixe, de manière qu'il y ait entre la convocation notifiée et le jour indiqué pour la réunion du conseil un intervalle de trois jours au moins, quand tous les membres résident dans la commune ou dans la distance de quatre myriamètres; s'il y en a qui sont domiciliés au delà de cette distance, le délai sera augmenté d'un jour par six myriamètres. Article 412. Si un membre se fait excuser et qu'il convienne soit de l'attendre, soit de le remplacer, en ce cas, comme en tout autre où l'intérêt du mineur l'exige, le juge de paix pourra ajourner l'assemblée ou la proroger. Article 413. L'assemblée se tient de plein droit chez le juge de paix, à moins qu'il ne désigne un autre local. Article 414. Pour que le conseil puisse délibérer, il faut que tous les membres aient été convoqués et que trois, au moins, outre le juge de paix, soient présents. Les décisions se prennent à la majorité absolue des voix. En cas de partage, la voix du juge de paix sera prépondérante. S'il se forme plus de deux opinions, la majorité relative suffira. Article 415. Les membres du conseil ne peuvent pas prendre part aux délibérations dans lesquelles ils ont un intérêt personnel. Le tuteur doit s'abstenir quand il s'agit de la nomination, de l'excuse ou de la révocation du subrogé tuteur; de même, le subrogé tuteur, quand il s'agit de l'excuse, de la révocation, ou de la nomination d'un nouveau tuteur. Article 416. Quand les délibérations du conseil de famille ne sont pas unanimes, l'avis motivé de chacun des membres qui le composent, y compris le juge de paix, sera mentionné dans le procès-verbal. Article 417. Le tuteur, le subrogé tuteur, les membres du conseil, le juge de paix et le procureur du roi peuvent attaquer au fond toutes les délibérations du conseil. Article 418. Les délibérations du conseil ne produisent aucun effet: 1° Quand elles ont été prises en l'absence ou sans la participation du juge de paix; 2° Quand les membres du conseil n'ont pas été convoqués; 3° Quand le conseil n'était pas en majorité lors de la délibération; 4° Quand elles n'ont pas été prises à la majorité déterminée par l'article 444. Article 419. Les autres irrégularités entraînent seulement la nullité de la délibération, si l'intérêt du mineur a été lésé. Article 420. Les tiers peuvent attaquer les délibérations du conseil qui portent atteinte à leurs droits; ils ne peuvent les attaquer pour vices de formes que lorsqu'elles sont substantielles. Quant aux formes établies dans l'intérêt des mineurs, les tiers ne peuvent se prévaloir de leur inobservation, à moins que leur intérêt ne se confonde avec celui des mineurs. SECTION V. Des causes qui dispensent de la tutelle. Article 421. Sont dispensés de la tutelle: 1° Les militaires en activité de service; 2° Ceux qui exercent Une fonction publique dans une province autre que celle où la tutelle est établie; 3° Les agents qui remplissent une mission quelconque en pays étranger. Article 422. Ceux qui ont accepté la tutelle postérieurement aux fonctions qui en dispensent ne sont plus admis à s'en faire décharger pour cette cause. Si, à l'expiration de ces fonctions, le tuteur en exercice réclame sa décharge, ou si le tuteur excusé redemande la tutelle, elle pourra lui être rendue par le conseil de famille. Article 423. Ceux qui ne sont ni parents ni alliés du mineur ne peuvent être forcés d'accepter la tutelle que s'il n'y a pas de parent ou allié capable de la gérer, et non dispensé, dans le ressort du tribunal où la tutelle est établie. Si l'excuse pour laquelle les parents ou alliés ont été dispensés cesse, le tuteur étranger pourra demander d'être déchargé de ses fonctions. Article 424. Les tuteurs peuvent présenter des excuses non prévues par la loi, pour être dispensés ou déchargés de leurs fonctions. Article 425. Toute excuse est soumise au conseil de famille. Celui dont la demande est rejetée peut attaquer la décision devant le tribunal de première instance, en remplissant toutefois les fonctions jusqu'à ce que le tribunal ait statué. Article 426. Le conseil de famille peut toujours, dans l'intérêt du mineur, dispenser le tuteur de sa charge quand il demande à s'en démettre. Si la délibération n'est pas prise à l'unanimité, elle devra être soumise à l'homologation du tribunal. SECTION VI. De l'incapacité, des exclusions et destitutions de la tutelle. Article 427. Ne peuvent être tuteurs ni membres des conseils de famille: 1° Les mineurs; 2° Les aliénés interdits ou colloqués et les personnes placées sous curatelle; 3° Les femmes, autres que les ascendantes et les sœurs germaines non mariées; 4° Tous ceux qui ont, ou dont le père, la mère, les ascendants, les descendants ou le conjoint ont avec le mineur un procès dans lequel l'état de ce mineur, ou une partie notable de ses biens sont compromis. Si un de ces incapables gère la tutelle, il peut être forcé de l'abandonner, par délibération du conseil de famille. Article 428. Sont exclus de la tutelle et des conseils de famille, et destituables s'ils sont en exercice: 1° Les gens d'une inconduite notoire, et les tuteurs dont la gestion atteste l'incapacité; 2° Ceux qui ont été dispensés ou déchargés d'une tutelle pour cause d'incapacité, et ceux auxquels le tribunal a retiré l'administration des biens de leurs enfants; 3° Ceux qui ont été destitués d'une tutelle ou de l'autorité paternelle pour cause d'incapacité, d'inconduite ou d'infidélité; 4° Les administrateurs judiciaires révoqués par les tribunaux; 5° Ceux qui encourent l'interdiction, en vertu des articles 34, 32 et 33 du Code pénal. Article 429. Quand il y a lieu à une destitution de tuteur, elle sera prononcée par le conseil de famille, convoqué à la diligence du subrogé tuteur ou d'office par le juge de paix. Celui-ci est tenu de faire cette convocation, si elle est formellement requise par un ou plusieurs parents ou alliés du mineur, au degré de cousin germain ou à un degré plus proche. Article 430. Toute délibération qui prononce l'exclusion ou la destitution du tuteur sera motivée et ne pourra être prise qu'après avoir entendu ou appelé le tuteur. Article 431. Si le tuteur adhère à la délibération, il en sera fait mention et le nouveau tuteur entrera aussitôt en fonctions. S'il y a réclamation, le subrogé tuteur poursuivra l'homologation de la délibération devant le tribunal de première instance, qui prononcera, sauf appel. Le tuteur sera mis en cause. Le tuteur exclu ou destitué peut lui-même assigner le subrogé tuteur pour se faire déclarer maintenu en la tutelle. Article 432. Les parents ou alliés qui ont requis la convocation pourront intervenir dans la cause, qui sera instruite et jugée comme affaire urgente. SECTION VII. De l'administration du tuteur. Article 433. Le tuteur légitime et le tuteur testamentaire entrent en fonctions dès qu'ils ont connaissance de l'ouverture de la tutelle. S'ils ne sont pas sur les lieux, toute personne peut donner connaissance de cette ouverture au juge de paix, lequel notifiera le fait au tuteur. Si la tutelle est déférée par le conseil de famille, en présence du tuteur, celui-ci administrera immédiatement, sinon du jour que sa nomination lui aura été notifiée par le juge de paix. Article 434. Le tuteur prend soin de la personne du mineur. Il continue l'éducation commencée par les parents. S'il veut la changer, il doit agir de concert avec le conseil de famille, sauf recours au tribunal, en cas de dissentiment. L'enfant sera entendu s'il a plus de douze ans. Si l'enfant est en bas âge, le tuteur dirige son éducation. Le subrogé tuteur et les membres du conseil de famille pourront former opposition et demander que le conseil de famille soit convoqué pour délibérer sur l'éducation du mineur. Les articles 360 et 361 sont applicables à la tutelle. Article 435. Le droit de correction est exercé par le tuteur, conformément à l'article 363, premier paragraphe. Le tuteur qui a des sujets de mécontentement très graves contre le mineur en fera rapport au conseil de famille, qui décidera si l'enfant doit quitter le domicile du tuteur et où il sera placé. Le mineur, ou tout parent ou allié, en son nom, pourra également porter plainte devant le conseil, si le tuteur abuse de son autorité, ou s'il néglige de remplir ses devoirs. Article 436. Le tuteur représente le mineur dans tous les actes civils. Il administre ses biens en bon père de famille, et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter d'une mauvaise gestion. Article 437. Dans les dix jours qui suivront celui où le tuteur a été dûment informé de sa qualité, il requerra la levée des scellés qui ont dû être apposés et fera procéder immédiatement à l'inventaire des biens du mineur, en présence du subrogé tuteur; l'inventaire devra être terminé dans le délai d'un mois, sauf prorogation par le juge de paix. Toute dispense de faire inventaire accordée par un testateur sera considérée comme non avenue. Article 438. Si le tuteur est débiteur ou créancier du mineur ou en compte courant avec lui, il doit le déclarer avant l'inventaire. Le notaire lui en fera la réquisition, et mention sera faite au procès-verbal de son interpellation et de la réponse du tuteur. Le tuteur qui, sciemment, ne déclare pas sa créance, en sera déchu de plein droit. S'il ne déclare pas sa dette, sachant qu'il est débiteur, il pourra être destitué. Article 439. Le tuteur qui ne fait pas l'inventaire dans le délai légal peut être destitué. La consistance et la valeur du mobilier non inventorié pourront être constatées par la commune renommée. Article 440. Tant que l'inventaire n'est pas achevé, le tuteur ne peut faire que les actes d'administration qui ne souffrent aucun retard. Article 441. Dans le mois qui suivra la clôture de l'inventaire, le tuteur fera vendre, en présence du subrogé tuteur, aux enchères reçues par un officier public, et après affiches ou publications, dont le procès-verbal de vente fera mention, tous les meubles autres que ceux que le conseil de famille l'aura autorisé à conserver en nature. Le conseil peut permettre au tuteur de faire la vente à l'amiable et dans un délai déterminé. Article 442. Lors de l'entrée en exercice de toute tutelle, le conseil de famille réglera, par aperçu, selon l'éducation qui sera donnée au mineur et selon sa fortune, la somme à laquelle pourra s'élever sa dépense annuelle, ainsi que celle d'administration de ses biens. Le même acte déterminera si le tuteur est autorisé à s'aider, dans sa gestion, d'un ou plusieurs administrateurs salariés et gérant sous sa responsabilité. Article 443. Le tuteur placera à la caisse d'épargne les capitaux du mineur non employés, ainsi que l'excédent des recettes sur les dépenses, au fur et à mesure qu'il touchera des revenus qui ne sont pas nécessaires pour l'entretien du mineur, soit en tout soit en partie. Il devra les intérêts légaux de toute somme non versée. Tout autre emploi ou remploi des deniers pupillaires ne pourra être fait qu'avec l'autorisation du conseil de famille, homologuée par le tribunal. Si le tuteur emploie à son profit les deniers du pupille, il en devra les intérêts de plein droit, ainsi que les intérêts des intérêts. Article 444. Tout tuteur, autre que l'aïeul, remettra chaque année des états de situation de sa gestion au conseil de famille, à l'époque que le conseil fixera. Ces états seront rédigés sans frais, sur papier non timbré, et sans formalité de justice. Le conseil les fera examiner par un de ses membres, et, après en avoir délibéré, il les déposera au greffe de la justice de paix. Une copie en sera remise au subrogé tuteur. Article 445. Le tuteur n'a qu'un droit d'administration. Il ne peut rien faire qui dépasse ce pouvoir qu'en vertu d'une disposition expresse de la loi, et en observant les conditions et les formes qu'elle prescrit. Le tuteur peut s'obliger dans les limites et pour les besoins de son administration. Article 446. Le conseil de famille ne peut modifier les pouvoirs du tuteur, tels qu'ils sont déterminés par la loi. Article 447. Le tuteur doit être autorisé par le conseil de famille pour les actes suivants: 1° Recevoir les capitaux du mineur et en faire emploi; 2° Acquérir des biens meubles ou immeubles, sauf quand il s'agit d'achats concernant les besoins journaliers du mineur ou l'administration de ses biens; 3° Faire des constructions neuves, des reconstructions ou de grosses réparations; 4° Faire des baux excédant neuf ans; les effets de ces baux sont régis par les dispositions du titre Du louage. 5° Accepter une hérédité, un legs ou une donation; 6° Demander un partage, même provisionnel. Le tuteur peut répondre à une action en partage, sans y être autorisé. Le partage se fera dans les formes prescrites par le Code de procédure; si elles n'ont pas été observées, le partage ne sera que provisionnel. Article 448. Le tuteur ne peut faire qu'avec l'autorisation du conseil de famille et l'homologation du tribunal les actes suivants: 1° Aliéner les biens meubles ou immeubles du mineur, les grever de droits réels, emprunter. Toutefois, le tuteur peut vendre sans autorisation les fruits au cours des mercuriales et les meubles sujets à dépérissement. Les établissement de commerce et d'industrie seront aliénés ou continués, selon que l'intérêt du mineur l'exigera; 2° Répudier une succession ou un legs; 3° Intenter une action relative aux droits mobiliers ou immobiliers du mineur, s'en désister, y défendre, acquiescer à une demande relative aux mêmes droits, transiger ou compromettre. Article 449. L'autorisation du conseil de famille doit être spéciale pour chaque acte. Les aliénations, hypothèques et emprunts ne peuvent être autorisés que pour cause de nécessité ou d'un avantage évident. Le conseil de famille indiquera les biens qui doivent être vendus de préférence sous les conditions qu'il jugera utiles. La vente se fera dans les formes prescrites par le Code de procédure. Le conseil pourra autoriser la vente à l'amiable. Article 450. Le tribunal, appelé à homologuer une délibération du conseil de famille, statuera en chambre du conseil, après avoir entendu le ministère public. Le tribunal pourra modifier les délibérations du conseil de famille, si l'intérêt du mineur l'exige. Article 451. La licitation d'un bien appartenant par indivis au mineur se fera conformément aux lois sur la procédure. Article 452. Le tuteur ne peut acheter les biens du mineur, ni devenir cessionnaire d'aucun droit ou créance contre son pupille, à moins que la vente ne se fasse par adjudication publique; si le tuteur se porte adjudicataire, il devra demander l'homologation du tribunal, qui statuera sur l'avis du conseil de famille. Article 453. Le tuteur ne peut prendre à bail les biens du mineur, qu'avec l'autorisation du conseil de famille et l'homologation du tribunal. Article 454. Le mineur est lié par les actes que le tuteur fait dans la limite de ses pouvoirs. Les actes que le tuteur fait sans observer les formes légales sont nuls de droit. SECTION VIII. Des fonctions du subrogé tuteur. Article 455. Le subrogé tuteur est chargé de surveiller la gestion du tuteur. Il ne remplace pas le tuteur lorsque la tutelle est vacante ou abandonnée par absence; en ce cas, il doit, sous peine des dommages et intérêts qui pourront en résulter pour le mineur, provoquer la nomination d'un nouveau tuteur. Article 456. Il doit agir au nom du mineur lorsque les intérêts de celui-ci sont en opposition avec ceux du tuteur; dans ce cas, il sera remplacé par un subrogé tuteur ad hoc. Article 457. te subrogé tuteur peut faire des actes conservatoires. Article 458. Si le subrogé tuteur n'a pas assisté à l'acte dans lequel il devait intervenir en vertu de la loi, l'acte est nul. SECTION IX. Fin de la tutelle. Article 459. La tutelle est une charge personnelle, qui ne passe point aux héritiers du tuteur. Ceux-ci seront seulement responsables de la gestion de leur auteur; et, s'ils sont majeurs, ils seront tenus de la continuer jusqu'à l'entrée en fonctions du nouveau tuteur. Article 460. Le tuteur destitué, excusé ou déchargé, reste soumis aux obligations que la tutelle impose, jusqu'à ce que le nouveau tuteur soit entré en fonctions. Article 461. Si la tutelle cesse par la majorité du pupille, le tuteur continue à administrer comme tel jusqu'à ce qu'il ait rendu ses comptes. Article 462. Ceux qui gèrent provisoirement la tutelle ne peuvent faire que les actes nécessaires ou d'une utilité évidente. SECTION X. Des comptes de la tutelle. Article 463. Tout tuteur est comptable de sa gestion lorsqu'elle finit. Toute dispense qu'un donateur lui aurait accordée est considérée comme non avenue. Article 464. Le compte définitif de tutelle sera rendu au pupille majeur ou émancipé, assisté du subrogé tuteur. Si la tutelle finit dans la personne du tuteur, le compte sera rendu au nouveau tuteur et soumis à l'approbation du conseil de famille. Si la tutelle finit par la mort du mineur, le compte sera rendu à ses héritiers. Les frais du compte sont à la charge du mineur; le tuteur en fera l'avance. Article 465. Le compte doit être rendu dans les trois mois, à partir du jour où la gestion du tuteur a cessé, sauf à la partie intéressée à demander au tribunal une prolongation du délai. Article 466. Toute convention qui pourra intervenir entre le tuteur et le mineur devenu majeur sera nulle, si elle n'a été précédée de la reddition d'un compte détaillé et approuvé par le conseil de famille, et de la remise des pièces justificatives; le tout constaté par un récépissé, enregistré, de l'oyant compte, dix jours au moins avant la convention. Article 467. Toute dépense suffisamment justifiée et dont l'objet est utile sera allouée au tuteur, quand même il aurait excédé les limites de son budget. Article 468. La somme à laquelle s'élèvera le reliquat dû par le tuteur portera intérêt, sans demande, à compter de la clôture du compte. Les intérêts de ce qui sera dû au tuteur par le mineur ne courront que du jour de la sommation de payer qui aura suivi la clôture du compte. Article 469. Toute action du mineur relative à la gestion de la tutelle se prescrit par dix ans. Il en est de même des actions du tuteur ou de ceux qui ont géré la tutelle contre le mineur. La même prescription s'applique aux actions nées de la tutelle entre le pupille et le subrogé tuteur ou les membres du conseil de famille. Les dix ans commencent à courir à compter de la majorité ou de la mort du pupille. Dans le cas de l'article 466, la prescription ne court qu'à partir de l'annulation de la convention. Article 470. Le tuteur, le subrogé tuteur et les membres du conseil de famille sont responsables de leurs fautes, conformément aux principes qui régissent le mandat. TITRE XI. De l'émancipation. Article 471. Le mineur qui se marie avec dispense est émancipé de plein droit par le mariage. Il sera fait mention de l'émancipation dans l'acte de célébration. Article 472. Le mineur, âgé de quinze ans révolus, peut être émancipé par ses père et mère ou par le survivant. Cette émancipation s'opère par la seule déclaration de ceux qui exercent l'autorité paternelle. Elle sera reçue par l'officier de l'état civil. Article 473. Le mineur, resté sans père ni mère, peut aussi, mais seulement à l'âge de dix-huit ans accomplis, être émancipé par le conseil de famille. En ce cas, l'émancipation résultera de la délibération du conseil, laquelle sera transcrite sur les registres de l'état civil. Article 474. Si le tuteur ne fait aucune diligence pour l'émancipation du mineur, le juge de paix pourra d'office convoquer le conseil de famille pour délibérer à ce sujet. Le juge de paix devra faire cette convocation, s'il en est requis par un parent ou allié. Article 475. Le mineur émancipé est placé sous curatelle. Le père et, à défaut de père, la mère sont de droit curateurs. Le dernier mourant, pendant le cours de la curatelle, peut nommer un curateur dans les formes prescrites par l'article 391. Le mari est de droit curateur de sa femme mineure. Dans les autres cas, le curateur est nommé par le conseil de famille. Article 476. Les causes d'excuse, d'incapacité, d'exclusion et de destitution établies pour la tutelle sont applicables à la curatelle. Article 477. Le mineur émancipé peut faire seul les actes de pure administration, sans pouvoir demander la rescision pour cause de lésion. Article 478. Le compte du père administrateur légal sera rendu au mineur émancipé, assisté de son curateur. Article 479. Le mineur émancipé ne peut toucher un capital ou des revenus sans l'assistance de son curateur; celui-ci veille à ce qu'il verse à la caisse d'épargne les deniers qui ne lui sont pas nécessaires pour ses besoins journaliers; le mineur ne pourra demander le remboursement du livret qu'avec l'assistance de son curateur. Tout autre emploi doit être autorisé par le conseil de famille. Article 480. Le mineur ne peut faire qu'avec l'assistance de son curateur les actes pour lesquels le tuteur a besoin, en vertu de l'article 447, de l'autorisation du conseil de famille. Il doit être assisté, même pour défendre à un partage. Article 481. Le mineur émancipé est assimilé au mineur non émancipé pour les actes prévus par l'article 448. Les articles 449 et 450 lui sont applicables. Il devra de plus être assisté de son curateur. Article 482. S'il fait sans être assisté de son curateur un acte pour lequel celte assistance est requise, il aura l'action en rescision, pour cause de lésion. Si les formes prescrites par la loi n'ont pas été observées, le mineur pourra demander la nullité des actes, sans être tenu de prouver qu'il est lésé. Article 483. Si le curateur refuse d'assister le mineur, celui-ci pourra recourir au tribunal, lequel nommera, s'il y a lieu, un curateur ad hoc. Article 484. Le curateur répond de ses fautes, comme le tuteur. Article 485. Le mineur peut être privé par le conseil de famille du bénéfice de l'émancipation, quand il s'en est montré indigne par sa mauvaise gestion ou par son inconduite. Les père et mère et, à leur défaut, les membres du conseil de famille et le curateur peuvent demander la révocation de l'émancipation. Dès le jour où l'émancipation aura été révoquée, le mineur sera soumis à l'autorité paternelle, ou à la tutelle, et il y restera jusqu'à sa majorité accomplie. TITRE XII. De la majorité et de l'interdiction. CHAPITRE PREMIER. De la majorité. Article 486. La majorité est fixée à vingt et un ans accomplis. Le majeur est capable de tous les actes de la vie civile. CHAPITRE II. De l'interdiction. Article 487. Toute personne qui est dans un état habituel d'insanité d'esprit peut être interdite, quand même cet état présente des intervalles lucides. Article 488. L'interdiction peut être provoquée par tout parent, par l'époux et par le procureur du roi. Le jugement intervenu sur la demande de l'un de ceux qui ont le droit d'agir forme chose jugée à l'égard des autres. Article 489. L'interdit est mis sous tutelle. L'époux non séparé de corps est de droit le tuteur de son conjoint interdit. A défaut de conjoint, le père de l'interdit, et à son défaut la mère, sont appelés à la tutelle. Le tuteur légal peut nommer un tuteur à l'interdit dans les formes prescrites par l'article 391. S'il n'y a pas de tuteur légal ni testamentaire, ou si le tuteur est excusé, exclu ou destitué, il sera pourvu à la nomination d'un tuteur par un conseil de famille, suivant les règles prescrites au titre De la tutelle. Article 490. Nul, à l'exception des époux, des ascendants et des descendants, ne sera tenu de conserver la tutelle d'un interdit au delà de dix ans. Article 491. Les lois sur la tutelle des mineurs s'appliquent à la tutelle des interdits. Ceux-ci sont assimilés aux mineurs pour leurs personnes et pour leurs biens. Article 492. Les revenus de l'interdit doivent être essentiellement employés à adoucir son sort et à accélérer sa guérison. Selon le caractère de sa maladie et l'état de sa fortune, le conseil de famille décidera si l'interdit sera traité dans son domicile, placé dans une maison de santé ou dans un hospice. Article 493. Le tuteur de l'interdit n'est pas tenu de faire vendre les meubles qui servent à l'habitation de la famille. Article 494. Les tuteurs légaux sont dispensés de présenter les comptes provisoires requis pendant la durée de la tutelle par l'article 444. Article 495. La dot et les autres conventions matrimoniales des enfants de l'interdit sont réglées par un avis du conseil de famille, homologué par le tribunal. Article 496. L'interdit est frappé d'incapacité quant à ses intérêts pécuniaires à dater du jugement qui prononce l'interdiction. Tous actes qu'il passe postérieurement au jugement sont nuls de droit. La nullité peut être demandée par le tuteur, par l'interdit, ses héritiers ou ayants cause. Article 497. Tous actes antérieurs à l'interdiction peuvent être annulés, si l'insanité d'esprit existait notoirement à l'époque où ces actes ont été faits. Ils peuvent encore être annulés, sans qu'il y ait notoriété, si celui qui a traité avec l'interdit avait connaissance de sa maladie. Article 498. L'interdiction sera révoquée sur la demande de l'interdit, du conjoint, des parents ou du procureur du roi, si la cause qui l'a déterminée a cessé. L'interdit ne pourra reprendre l'exercice de ses droits qu'après le jugement de mainlevée. CHAPITRE III. De l'incapacité des aliénés séquestrés sans être interdits. Article 499. Les aliénés séquestrés auxquels il a été nommé un administrateur provisoire, en vertu de la loi du 48 juin 4850, modifiée par la loi du 28 décembre 1873, sont privés pendant la durée de leur séquestration de l'administration et de la disposition de leurs biens. Article 500. Ils sont représentés par l'administrateur provisoire pour tous les actes civils. L'administrateur est assimilé au tuteur de l'interdit quant à ses obligations et à ses droits; mais il ne doit faire que les actes qui sont nécessaires ou d'une utilité évidente. Article 501. Les actes passés par une personne séquestrée peuvent être attaqués pour cause de démence par l'administrateur provisoire, par l'aliéné et par ses ayants cause. Le tribunal pourra les annuler, sur la preuve qu'ils ont été passés pendant la séquestration, sauf au défendeur à prouver qu'ils ont été faits dans un intervalle lucide. Article 502. L'incapacité des personnes séquestrées cesse quand le tribunal aura déclaré que l'administration provisoire a pris fin. Cette déclaration sera faite sur la preuve de la guérison, conformément à l'article 13 de la loi du 18 juin 1850, modifiée par la loi du 28 décembre 1873, ou sur la demande de ceux qui ont fait séquestrer l'aliéné. CHAPITRE IV. De l'interdiction partielle. Article 503. Les personnes qui sont faibles d'esprit, les sourds-muets, les aveugles de naissance et les prodigues peuvent être mis sous curatelle. Le curateur est nommé par le tribunal, sur la demande de ceux qui ont le droit de poursuivre l'interdiction. Article 504. Les articles 476, 477, 479, 480, 484, 483 et 484 sont applicables à l'interdiction partielle. Le tribunal pourra, d'après les circonstances, décider que les personnes placées sous curatelle ne pourront faire les actes d'administration sans être assistées de leur curateur. Article 505. L'interdiction partielle ne peut être levée que par un jugement constatant que la cause pour laquelle elle a été prononcée a pris fin. TITRE XIII. De la publicité concernant l'état des personnes. CHAPITRE PREMIER. Dispositions générales. Article 506. Il sera tenu, dans chaque commune, par l'officier de l'état civil, un registre spécial concernant l'état des personnes, dans lequel seront inscrits les déclarations, actes et jugements mentionnés aux articles 510 et suivants. Article 507. Ce registre sera tenu en double; l'un des doubles sera déposé, à la fin de chaque année, dans les archives de la province et l'autre dans les archives de la commune. Article 508. Les registres seront publics. Toute personne pourra les consulter, et en demander un extrait, qui sera délivré sur papier libre et sans frais. Article 509. Le conseil provincial fera rédiger, tous les dix ans, un registre général qui contiendra, par ordre des matières, les faits juridiques relatés dans les registres particuliers; il y sera joint une table alphabétique contenant les noms des parties. Le gouvernement pourra ordonner aux époques qu'il déterminera la confection d'un registre d'état pour tout le royaume. CHAPITRE II. De la nationalité. Article 510. L'étranger qui établit son domicile ou sa résidence en Belgique déclarera son âge, son état et la nation à laquelle il appartient. Article 511. L'étranger déclarera s'il est un émigrant, dont l'intention est de se fixer en Belgique sans esprit de retour. Article 512. S'il est marié, l'étranger déclarera encore le nom et l'âge de sa femme et de ses enfants, ainsi que des enfants qui naîtront pendant leur séjour en Belgique. La déclaration comprendra également les modifications que l'état a éprouvées par l'émancipation ou par l'interdiction totale ou partielle. Article 513. Seront inscrites: 1° Les déclarations d'extranéité, faites en vertu de l'article 40 par les étrangers nés en Belgique; 2° Les déclarations d'option faites en pays étranger par les enfants d'un Belge qui y sont nés; 3° La déclaration faite par l'enfant d'un ci-devant Belge, en vertu de l'article 41. Article 514. Si une femme belge épouse un étranger, ou si une étrangère épouse un Belge, l'officier de l'état civil en fera mention. Article 515. Ceux qui ont perdu la qualité de Belge et qui veulent la recouvrer, en vertu des articles 46 et 47, en feront la déclaration. Article 516. Seront inscrits: 1° Les actes de naturalisation obtenus par des étrangers; 2° Les déclarations faites en cas d'annexion d'un territoire à la Belgique ou de séparation d'un territoire détaché de la Belgique, par suite de lois de faveur portées à l'occasion des annexions ou séparations. CHAPITRE III. Domicile et absence. Article 517. Seront soumis à l'inscription: 1° Les déclarations de changement de domicile faites devant l'autorité communale, en vertu de l'article 107; 2° Les jugements qui nomment un administrateur pendant la présomption d'absence, ceux qui déclarent l'absence et ceux qui envoient les héritiers en possession des biens de l'absent. CHAPITRE IV. Mariage, divorce et séparation de corps. Article 518. Seront inscrits: 1° Les dispenses d'âge accordées par le roi, en vertu de l'article 141; 2° Les dispenses accordées par le roi pour lever l'empêchement au mariage résultant de la parenté ou de l'alliance, dans les cas prévus par l'article 150; 3° Les jugements qui prononcent la nullité d'un mariage; 4° Les jugements qui admettent le divorce ou la séparation de corps, et les déclarations de l'officier de l'état civil qui les prononcent; 5° Les jugements qui prononcent la séparation volontaire entre époux (art. 269 et 273); 6° Les déclarations faites par les époux qu'ils rétablissent la vie commune (art. 267 et 272). CHAPITRE V. Paternité et filiation. Article 519. Seront inscrits: 1° Les jugements qui prononcent le désaveu, en vertu des articles 280 à 283; 2° Les jugements qui déclarent l'enfant illégitime, sur une action en contestation de légitimité (art. 291); 3° Les jugements rendus sur une action en réclamation ou en contestation d'état (art. 302 et 306). CHAPITRE VI. Adoption et autorité paternelle. Article 520. Seront soumis à l'inscription: 1° Les actes d'adoption; 2° Les jugements qui enlèvent au père ou à la mère l'autorité paternelle, ou l'administration des biens, en vertu des articles 371 à 374 et 384. CHAPITRE VII. Tutelle et curatelle. Article 521. Toute tutelle sera inscrite, sur la demande du tuteur, dans les quinze jours de son entrée en fonctions. Le subrogé tuteur veillera à ce que l'inscription soit faite. Le juge de paix pourra l'ordonner d'office. L'inscription mentionnera: 1° Les noms, prénoms, âges, conditions et domiciles du mineur ou de l'interdit et du tuteur; 2° Le titre qui confère la qualité de tuteur et le jugement qui prononce l'interdiction; 3° Le jour de l'ouverture de la tutelle; 4° La date des réunions du conseil de famille et l'objet de leurs délibérations, ainsi que les jugements d'homologation. Article 522. Si le tuteur change de domicile et si le siège de la tutelle est transféré dans une autre commune, le tuteur en fera la déclaration sur les registres des deux communes. Article 523. Toute curatelle sera inscrite, sur la demande du curateur, dans les quinze jours de sa nomination. Les membres du conseil de famille veilleront à ce que l'inscription soit faite. Le juge de paix pourra l'ordonner d'office. L'inscription mentionnera: 1° Les noms, prénoms, âges, conditions et domiciles du mineur émancipé et de la personne incapable mise sous curatelle, ainsi que du curateur; 2° Le titre qui confère l'émancipation; 3° La date de l'émancipation ou du jugement d'interdiction partielle; 4° La date des réunions du conseil de famille et l'objet de leurs délibérations. Article 524. Seront encore soumis à l'inscription les jugements qui nomment un administrateur à un aliéné séquestré, et ceux qui nomment un administrateur provisoire à une personne dont l'interdiction est demandée. Article 525. Les jugements qui prononcent la révocation de l'émancipation, la mainlevée de l'interdiction totale ou partielle seront également inscrits. Article 526. Il en sera de même des délibérations du conseil de famille qui déchargent le tuteur ou le curateur de ses fonctions ou qui le destituent. Disposition générale. Article 527. Quand une inscription faite sur le registre d'état est modifiée par une inscription postérieure, la seconde sera mentionnée en marge de la première, avec renvoi. CHAPITRE VIII. Sanction. Article 528. Les officiers publics qui auront négligé de remplir les obligations que leur impose le présent titre seront punis d'une amende de vingt-six francs à cent francs. Elle pourra être portée au double en cas de récidive. Article 529. Les registres seront communiques au juge de paix avant le dépôt qui en doit être fait. Il fera rapport au procureur du roi et signalera les contraventions qui auraient été commises. La poursuite se fera devant le tribunal de première instance. Article 530. S'il est résulté un préjudice de l'inobservation des dispositions prescrites par le présent titre, la partie lésée aura une action en dommages et intérêts contre les officiers publics et les particuliers par la négligence desquels l'inscription n'a pas été faite. DEUXIÈME PARTIE. DES CORPORATIONS. TITRE PREMIER. De l'incorporation légale. Article 531. L'incorporation ne peut être faite que pour cause de nécessité publique, par la loi ou en vertu de la loi. Article 532. La loi peut toujours modifier les corporations et établissements publics, et même les abolir, si l'intérêt public l'exige. Les biens des corporations et des établissements supprimés appartiennent à l'État, qui les affectera à une destination analogue à celle pour laquelle l'incorporation avait été consentie. Article 533. Les corporations n'ont d'autres droits que ceux qui leur sont conférés par l'acte d'incorporation. En dehors de leur destination légale, elles n'ont pas d'existence aux yeux de la loi. Article 534. Les corporations ne peuvent recevoir à titre gratuit que dans les limites de leur destination légale, et par Un acte spécial d'autorisation, comme il sera dit au titre Des donations et testaments. Article 535. Les droits particuliers des corporations seront réglés aux titres qui concernent les Biens, les Donations et Testaments, les Obligations, la Société et la Prescription. Article 536. Les corporations étrangères, autres que l'État, les provinces et les communes, n'ont d'existence légale en Belgique que par une autorisation du gouvernement, sauf disposition contraire dans les traités. L'autorisation peut toujours leur être retirée. Les corporations étrangères légalement existantes peuvent exercer en Belgique les droits qui leur sont accordés par leur incorporation, sous les restrictions qui sont imposées aux corporations analogues créées par nos lois. Celles qui n'ont pas d'existence légale sont assimilées aux sociétés de fait. TITRE II. Des corporations illégales. CHAPITRE PREMIER. De la situation des corporations illégales. Article 537. Les associations ou établissements, qui ne sont pas légalement incorporés, n'existent pas comme corps aux yeux de la loi. Article 538. Tout acte, dans lequel figure une corporation ou un établissement non reconnu sous n'importe quelle forme, est nul de plein droit. Article 539. Toute acquisition faite par une corporation ou un établissement non reconnu, à titre gratuit ou à titre onéreux, de meubles ou d'immeubles, sous quelque forme et dans quelque but que ce soit, directement, ou indirectement par personne interposée, est nulle de plein droit. Article 540. Ceux qui acquièrent des biens pour des corporations ou établissements non reconnus, ou qui les détiennent pour eux, ne sont pas propriétaires. Ils sont tenus au payement des impôts, sans pouvoir exercer aucun droit attaché à la propriété. Article 541. Les membres des corporations ou établissements non reconnus peuvent être propriétaires en leur nom personnel, sauf aux parties intéressées à prouver par toutes voies de droit qu'ils sont personnes interposées au profit d'une corporation illégale. Article 542. Les corporations ou établissements non reconnus ne peuvent agir en justice. Les tiers peuvent agir contre eux comme sociétés de fait et. saisir les biens qu'ils détiennent, sauf le droit de ceux qui revendiquent. Les actions personnelles ou réelles seront intentées contre les membres ou supérieurs, ou contre les détenteurs des biens, quelle que soit leur qualité apparente. CHAPITRE II. De la revendication des biens détenus par les corporations et établissements illégaux. Article 543. Les biens détenus par les communautés ou établissements non reconnus peuvent être revendiqués: 1° par les anciens propriétaires ou par leurs héritiers; 2° par les communes, au nom de l'État. § 1er. — De la revendication par les communes. Article 544. Les biens meubles et immeubles détenus par des corporations ou établissements non reconnus seront revendiqués par la commune de la situation, pour être affectés au service de l'instruction publique. Article 545. La moitié des biens revendiqués appartiendra à la commune demanderesse. L'autre moitié formera un fonds spécial qui sera réparti par le gouvernement entre les communes pour les besoins de l'instruction publique. Article 546. A défaut du conseil communal, les habitants de la commune pourront revendiquer les biens détenus par les corporations ou établissements non reconnus, en offrant sous caution de se charger des frais du procès et de répondre des condamnations qui pourront être prononcées. Article 547. A défaut de la commune ou d'un habitant, l'action appartiendra à tout Belge au profit de sa commune, et sous les conditions déterminées par l'article précédent. L'action devra être formée dans l'année de la publication de l'enquête, qui sera organisée par une loi spéciale. Si aucune action n'est intentée dans ce délai, l'État revendiquera dans le mois qui suivra l'expiration dudit délai. Article 548. Les demandeurs auront droit au quart des biens par eux revendiqués et attribués à une commune. Article 549. La commune au profit de laquelle se fait la revendication ne pourra transiger sur.le procès sans l'intervention des demandeurs. Article 550. Les demandes intentées par les communes ou en leur nom, et celles qui seront formées par l'État, seront transcrites sur un registre spécial au bureau de la conservation des hypothèques dans l'arrondissement duquel les biens sont situés. Article 551. Dans la quinzaine, le demandeur fera insérer au Moniteur un extrait de la demande, comprenant les noms des parties, la désignation des biens revendiqués et la date de la transcription. La demande ne pourra être poursuivie que trois mois après la date de celle insertion. § II. — Des droits de la famille. Article 552. Les anciens propriétaires des biens revendiqués pourront intervenir dans l'instance dans les trois mois qui suivront l'insertion au Moniteur, prescrite par l'article 554, auquel cas les biens leur seront restitués. S'ils n'interviennent pas, ils sont déchus de tout droit. Le droit d'intervenir appartient aussi aux héritiers des anciens propriétaires, ainsi qu'aux héritiers du testateur qui a légué les biens revendiqués. Article 553. La restitution ne se fera que si la bonne foi des vendeurs, donateurs et testateurs est établie. Ils sont de mauvaise foi, s'il est prouvé qu'ils ont disposé sciemment au profit d'une corporation ou d'un établissement non reconnus. Article 554. Les demandeurs en revendication, et à leur défaut ceux qui ont qualité d'agir, seront toujours admis à prouver que ceux auxquels les biens ont été restitués les ont employés d'une manière quelconque au profit d'une corporation ou d'un établissement non reconnus. Dans ce cas, les propriétaires seront condamnés à remettre les biens aux communes, comme il est dit à l'article 548, avec les fruits et les intérêts, sans préjudice des dommages et intérêts qui pourront être prononcés contre eux. § III. — De la prescription et des tiers détenteurs. Article 555. Aucune prescription ne peut être invoquée par les corporations ou établissements non reconnus, ni par les tiers possesseurs de mauvaise foi. Les possesseurs sont réputés de mauvaise foi, s'ils savent que les biens ont été acquis par une corporation non reconnue. LIVRE II. DES BIENS ET DES DIFFÉRENTES MODIFICATIONS DE LA PROPRIÉTÉ. TITRE PREMIER. De la distinction des biens. Article 556. Tous les biens sont meubles ou immeubles. CHAPITRE PREMIER. Des immeubles. Article 557. Les biens sont immeubles par leur nature, par incorporation, par destination, ou par détermination de la loi. Article 558. Les fonds de terre sont immeubles par leur nature. Article 559. Les fruits pendants par branches ou par racines, ainsi que les plantations, sont immeubles par incorporation à l'égard du propriétaire du sol ou de celui qui y a un droit réel. Ils sont meubles à l'égard de celui qui n'y a qu'un droit personnel. Article 560. Sont encore immeubles par incorporation: 4° les bâtiments et leurs accessoires nécessaires, tels que les tuyaux servant à la conduite des eaux; 2° toutes constructions inhérentes au sol; 3° les moulins à vent ou à eau, fixés sur piliers ou faisant partie du bâtiment. Article 561. Les constructions et les plantations sont immeubles à l'égard du propriétaire du sol, quand même elles seraient faites par celui qui n'en est pas le propriétaire; elles sont meubles à l'égard de celui qui n'a qu'un droit personnel, tel que le preneur, alors même qu'elles lui appartiendraient pendant la durée du bail. Article 562. Quand l'incorporation cesse, les plantations et les constructions reprennent leur nature mobilière. Les fruits deviennent meubles à mesure qu'ils sont détachés, quoique non enlevés. Les matériaux détachés d'un édifice et destinés à le réparer ou à le reconstruire conservent leur nature immobilière. Article 563. L'incorporation cesse quand, dans un contrat, les fruits, les plantations ou les constructions sont considérés comme devant être détachés du sol. La mobilisation par convention n'a d'effet qu'entre les parties. Article 564. Sont immeubles par destination les objets que le propriétaire ou le détenteur d'un fonds y a placés pour le service et l'exploitation de ce fonds. Tels sont: Les animaux nécessaires à la culture ou à l'exploitation agricole; Les ustensiles aratoires; Les semences, pailles, fourrages et engrais; Les pigeons des colombiers, les lapins des garennes, les poissons des étangs; Les ruches à miel, les vers à soie; Les machines et ustensiles nécessaires à l'exploitation des fabriques et usines. Article 565. Sont immeubles par destination tous effets mobiliers que le propriétaire a attachés au fonds à perpétuelle demeure. La perpétuelle demeure exige une marque extérieure qui la fait connaître aux tiers. Il en est ainsi quand les effets mobiliers sont scellés au fonds en plomb, en plâtre, à chaux ou à ciment; ou quand ils ne peuvent être détachés sans être fracturés ou détériorés, ou sans briser ou détériorer la partie du fonds à laquelle ils sont attachés. Les glaces, tableaux et autres ornements sont censés mis à perpétuelle demeure, quand il existe un fait matériel d'une adhérence apparente et durable au fonds. Les statues sont immeubles, lorsqu'elles sont placées dans une niche pratiquée exprès pour les recevoir, ou sur un piédestal, avec lequel elles font corps. Article 566. L'immobilisation par destination cesse par la volonté de celui qui a immobilisé les effets mobiliers. Article 567. Sont immeubles par la détermination de la loi les droits que l'on exerce dans un immeuble. Tels sont: 1° La propriété d'un immeuble, l'usufruit, l'usage, l'habitation, l'emphytéose, la superficie, les servitudes et l'hypothèque; 2° Les actions réelles immobilières; 3° Les actions personnelles tendant à donner la propriété d'un immeuble ou d'un démembrement de la propriété. CHAPITRE II Des meubles. Article 568. Les biens sont meubles par leur nature, ou par la détermination de la loi. Article 569. Sont meubles par leur nature les corps qui peuvent se transporter d'un lieu à un autre, soit qu'ils se meuvent par eux-mêmes, comme les animaux, soit qu'ils ne puissent changer de place que par l'effet d'une force étrangère, comme les choses inanimées. Article 570. Sont meubles les bateaux, bacs, navires, moulins et bains sur bateaux, et généralement toutes usines non fixées par des piliers et ne faisant point partie de la maison. Article 571. Les matériaux assemblés pour construire un édifice sont meubles jusqu'à ce qu'ils soient incorporés. Ceux qui proviennent de la démolition d'un édifice deviennent meubles, jusqu'à ce qu'ils soient employés à la reconstruction. Les matériaux restent immeubles dans le cas prévu par l'article 562. Article 572. Sont meubles par la détermination de la loi: 1° La propriété des meubles et les droits réels dans les choses mobilières; 2° Les actions qui ont pour objet des effets mobiliers; 3° Les droits des associés dans les sociétés qui forment un corps moral, encore que le fonds social comprenne des immeubles. Ces droits sont réputés meubles à l'égard des associés seulement, jusqu'à la liquidation; 4° Les rentes perpétuelles ou viagères et les rentes dites foncières. CHAPITRE III. Des biens dans leurs rapports avec les personnes auxquelles ils appartiennent. Article 573. Les particuliers ont la libre disposition des biens qui leur appartiennent, sous les modifications établies par les lois. Les corporations et établissements publics, reconnus par la loi, peuvent acquérir à titre onéreux ou gratuit, sous les conditions déterminées par la loi; leurs biens sont administrés et ne peuvent être aliénés que dans les formes et suivant les règles que la loi établit. Article 574. Le domaine public de l'État, des provinces et des communes comprend les biens que leur destination publique place hors du commerce et qui, comme tels, sont inaliénables et imprescriptibles. Le domaine privé de l'État, des provinces et des communes comprend les biens qui restent dans le commerce et qui, partant, sont aliénables et prescriptibles. Article 575. Les biens du domaine public qui ne servent plus à l'usage auquel ils étaient destinés rentrent dans le domaine privé. Tels sont: les terrains, les fortifications et remparts des places, qui ne sont plus places de guerre: les terrains des routes et des chemins vicinaux supprimés; les parties du rivage de la mer que les eaux cessent de couvrir et de découvrir. Article 576. Font partie du domaine public de l'État: 1° Les rivages de la mer. Sont réputés rivages les terres limitrophes que le plus grand flot de l'année couvre et découvre habituellement; 2° Les ports, havres et rades; 3° Les rivières navigables ou flottables; la rive appartient aux riverains; elle est déterminée par le niveau que les eaux atteignent dans leur crue habituelle; 4° Les chemins, routes et rues à la charge de l'État, avec leurs dépendances; 5° Les voies concédées, canaux et chemins de fer; Les concessionnaires ont un droit réel de jouissance; ils peuvent intenter les actions réelles et possessoires, sauf le droit de l'État d'y intervenir. Les anciennes concessions sont régies par les actes qui les ont établies. 6° Les portes, murs, fossés, remparts des places de guerre et des forteresses; 7° Les édifices et tous les biens mobiliers ou immobiliers consacrés à une destination publique. Article 577. Font partie du domaine privé de l'État: 1° Tous les biens vacants et sans maître, et ceux des personnes qui décèdent sans héritiers ou dont les successions sont abandonnées; 2° Les épaves, quand elles n'appartiennent pas au premier occupant; 3° Les lais et relais de la mer, ainsi que les schoores, déclarés dépendances du domaine de l'État par le décret du Il janvier 1811; 4° Les îles, îlots, atterrissements qui se forment dans le lit des rivières navigables ou flottables, s'il n'y a titre ou prescription contraire. Article 578. Font partie du domaine public des communes: 1° Les rivières non navigables ni flottables; 2° Les eaux destinées à un usage communal; 3° Les chemins vicinaux, les rues et places publiques, les promenades, sauf titre contraire; 4° Les bâtiments destinés à un service public communal, tels que les hôtels de ville, les églises, les écoles, les bibliothèques et musées avec les objets qui s'y trouvent, les halles et abattoirs; 5° Les cimetières. Article 579. Les terres vagues, qui se trouvent sur le territoire d'une commune, appartiennent à son domaine privé. Article 580. Font partie du domaine public des provinces: 1° Les routes provinciales; 2° Les bâtiments provinciaux destinés à un usage public, tels que les palais de justice, les prisons, les gendarmeries, sauf titre contraire. TITRE II. De la propriété. CHAPITRE PREMIER. Droits du propriétaire. Article 581. La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements portés en vertu de la loi, et que cet usage ne lèse pas le droit d'autrui. Article 582. Tout propriétaire peut obliger son voisin au bornage de leurs propriétés contiguës. Le bornage se fait à frais communs. Article 583. Tout propriétaire peut clore son héritage. Il perd son droit au parcours et à la vaine pâture, en proportion du terrain qu'il y soustrait. Article 584. La propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous. Le propriétaire peut faire au-dessus toutes les plantations et les constructions qu'il juge à propos, sauf les exceptions établies au titre Des servitudes. Il peut faire au-dessous toutes les constructions et fouilles qu'il juge à propos, et tirer de ces fouilles tous les produits qu'elles peuvent fournir, sauf les modifications résultant des lois et règlements relatifs aux mines, et des lois et règlements de police. Article 585. Celui qui a une source dans son fonds peut en user dans les limites de sa propriété. Toutefois, l'administration a le droit de réglementer l'usage des eaux de la source, quand elles donnent naissance à une rivière navigable ou non; les tribunaux peuvent également régler cet usage, en conciliant les droits du propriétaire de la source avec le droit des propriétaires inférieurs. Article 586. Le propriétaire inférieur peut acquérir un droit aux eaux de la source, soit en vertu d'un titre qui détermine l'usage que le propriétaire de la source peut en faire, soit par une jouissance non interrompue pendant trente années, à compter du moment où il a fait, sur le fonds supérieur ou sur le sien, des ouvrages apparents destinés à faciliter la chute et le cours de l'eau dans sa propriété. CHAPITRE II. De l'action en revendication. Article 587. Le demandeur en revendication doit prouver sa propriété d'après le droit commun, sauf les exceptions qui suivent. Article 588. Quand le revendiquant produit un titre, et que le défendeur n'en a point, le demandeur obtiendra gain de cause, si son titre est antérieur à la possession du défendeur. Article 589. Quand les deux parties ont un titre émané du même auteur, le premier acquéreur l'emportera, quoique l'auteur commun n'ait pas été propriétaire. Article 590. Lorsque aucune des deux parties n'a un titre, le revendiquant l'emportera, s'il a en sa faveur des probabilités plus fortes que le défendeur. CHAPITRE III. Du droit d'accession. Article 591. La propriété d'une chose, soit mobilière, soit immobilière, donne droit sur tout ce qu'elle produit et sur ce qui s'y unit accessoirement, soit naturellement, soit artificiellement. Ce droit s'appelle droit d'accession. Article 592. Le propriétaire d'une chose est présumé propriétaire des accessoires qui en forment une dépendance nécessaire. Ainsi, le propriétaire d'une usine est réputé propriétaire des barrages et des biefs, si les canaux ont été creusés pour le service de l'usine. Il peut se servir des francs-bords pour la surveillance, l'entretien et le curage des eaux, à charge d'une juste indemnité. SECTION Ier. Des fruits. Article 593. Les fruits naturels de la terre et les fruits civils appartiennent au propriétaire. Les fruits naturels sont: 1° Le produit spontané de la terre; 2° le produit et le croît des animaux. Les fruits civils sont les loyers et fermages, les intérêts des capitaux et les arrérages des rentes. Article 594. Les fruits civils sont réputés s'acquérir jour par jour. Article 595. Le possesseur de bonne foi a droit aux fruits qu'il a consommés, au moment où le propriétaire intente l'action en revendication. Il doit restituer les fruits qu'il n'a pas consommés, ainsi que ceux qu'il perçoit pendant la durée de l'instance. Le possesseur de mauvaise foi doit restituer tous les fruits; il est tenu de tous les dommages-intérêts qui résultent de son dol. Le possesseur est de bonne foi quand il possède comme propriétaire, et en vertu d'un titre translatif de propriété dont il ignore les vices. Il cesse d'être de bonne foi du moment où ces vices lui sont connus. Article 596. Dans les cas où le possesseur doit restituer les fruits, il peut réclamer les dépenses qu'il a faites pour la production des fruits. Tout possesseur a droit à être indemnisé des frais de conservation. Le possesseur de bonne foi peut réclamer les dépenses utiles. Il n'a aucun droit du chef des dépenses d'entretien. Le possesseur de mauvaise foi doit être indemnisé des frais d'entretien. SECTION II. Du droit d'accession sur ce qui s'unit et s'incorpore à la chose. Article 597. Tout ce qui s'unit et s'incorpore à la chose appartient au propriétaire, suivant les règles établies ci-après. § Ier. — De l'accession immobilière. Article 598. Toutes constructions, plantations et ouvrages sur un terrain ou dans l'intérieur sont présumés faits par le propriétaire, à ses frais, et lui appartenir, si le contraire n'est prouvé; sans préjudice de la propriété qu'un tiers pourrait avoir acquise ou pourrait acquérir par prescription, soit d'un souterrain sous le bâtiment d'autrui, soit de toute autre partie du bâtiment. Article 599. Le propriétaire du sol qui a fait des constructions, plantations et ouvrages avec des matériaux qui ne lui appartenaient pas, doit en payer la valeur; il peut aussi être condamné à des dommages-intérêts, s'il y a lieu; mais le propriétaire des matériaux n'a pas le droit de les enlever. Article 600. Lorsque les plantations, constructions et ouvrages ont été faits par un tiers de bonne foi avec ses matériaux, le propriétaire qui revendique doit rembourser au possesseur la plus-value qui en est résultée pour le fonds. Si le tiers est de mauvaise foi, le propriétaire a le choix, ou d'exiger la suppression des travaux aux frais du possesseur avec dommages-intérêts, s'il y a lieu, ou de payer soit la plus-value, soit la dépense. Article 601. Les atterrissements et accroissements qui se forment successivement et imperceptiblement aux fonds riverains d'une rivière s'appellent alluvion. L'alluvion profite au propriétaire riverain, qu'il s'agisse d'une rivière navigable, flottable ou non; à la charge, dans le premier cas, de laisser le marchepied ou chemin de halage, conformément aux règlements. Article 602. Il en est de même des relais que forme l'eau courante qui se retire insensiblement de l'une de ses rives en se portant sur l'autre; le propriétaire de la rive découverte profite de l'alluvion, sans que le riverain du côté opposé y puisse venir réclamer le terrain qu'il a perdu. Article 603. L'alluvion n'a pas lieu pour les eaux qui forment une propriété limitée, telles que les lacs et étangs, canaux et rivières canalisées. Article 604. Si une rivière, navigable ou non, enlève par une force subite une partie reconnaissable d'un fonds riverain et le porte vers un fonds inférieur, ou sur la rive opposée, le propriétaire de la partie enlevée peut la revendiquer dans l'année. Passé ce délai, la demande n'est plus recevable, à moins que le propriétaire du fonds auquel la partie enlevée a été unie n'en ait pas encore pris possession. Article 605. Les îles et atterrissements qui se forment dans les rivières non navigables et non flottables appartiennent aux riverains du côté de la ligne que l'on suppose tracée au milieu de la rivière. Si les îles et atterrissements s'étendent des deux côtés de la ligne, ils appartiennent aux propriétaires des deux rives, à partir de cette ligne. Dans tous les cas où l'île s'est formée des parties reconnaissables d'un fonds riverain, le propriétaire de ce fonds a droit à une indemnité contre celui à qui l'île est attribuée. Article 606. Si une rivière, en se formant un bras nouveau, coupe et embrasse un fonds riverain, de manière à en faire une île, le propriétaire conserve son droit; s'il s'agit d'une rivière navigable, l'État a le droit de se faire céder la propriété de l'île, moyennant indemnité. Article 607. Si une rivière navigable, flottable ou non, se forme un nouveau cours, en abandonnant son ancien lit, ce lit appartiendra aux riverains, à charge par eux d'en payer la valeur, à titre d'indemnité, aux propriétaires des fonds nouvellement occupés dans la proportion du terrain qui a été enlevé à chacun. Article 608. Les pigeons, lapins, poissons, qui passent dans d'autres colombiers, garennes ou étangs, appartiennent au propriétaire de ces objets, sauf les dommages-intérêts dont il est tenu en cas de fraude. § II. — De l'accession mobilière. Article 609. Lorsque deux choses appartenant à différents propriétaires ont été unies de manière à former un tout, et qu'elles sont séparables sans une notable détérioration, chacun d'eux a le droit d'en demander la séparation. Si la séparation ne peut se faire, le tout appartient au propriétaire de la chose qui forme la partie principale, à la charge de payer à l'autre la valeur de la chose qui y a été unie. Est réputée partie principale celle à laquelle l'autre n'a été unie que pour l'usage, l'ornement ou le complément de la première. Si l'une des choses ne peut pas être considérée comme l'accessoire de l'autre, celle-là est réputée principale qui est la plus considérable en valeur, ou en volume, si les valeurs sont à peu près égales. Article 610. Néanmoins quand la chose unie est beaucoup plus précieuse que la chose principale, et quand elle a été employée à l'insu du propriétaire, celui-ci peut demander que la chose unie soit séparée pour lui être rendue, quand même il pourrait en résulter quelque dégradation de la chose à laquelle elle a été jointe. Article 611. Si une personne quelconque a employé une matière qui ne lui appartenait pas à former une chose d'une nouvelle espèce, soit que la matière puisse ou non reprendre sa première forme, celui qui en était le propriétaire a le droit de réclamer la chose qui en a été formée, en remboursant le prix de la main-d'œuvre. Si la main-d'œuvre était tellement importante qu'elle surpassât de beaucoup la valeur de la matière employée, l'industrie serait réputée la partie principale, et l'ouvrier aurait le droit de retenir la chose travaillée, en remboursant le prix de la matière au propriétaire. Article 612. Lorsqu'une personne a employé en partie la matière qui lui appartenait, et en partie celle qui ne lui appartenait pas, à former une chose d'une espèce nouvelle, sans que ni l'une ni l'autre des deux matières soit entièrement détruite, mais de manière qu'elles ne puissent pas se séparer sans inconvénient, la chose est commune aux deux propriétaires, en raison, quant à l'un, de la matière qui lui appartenait; quant a l'autre, en raison de la matière qui lui appartenait et du prix de sa main-d'œuvre. Article 613. La chose formée par le mélange de plusieurs matières appartenant à des propriétaires différents appartient au maître de la chose principale, si celle-ci est de beaucoup supérieure, par la quantité et le prix, à charge de rembourser à l'autre propriétaire la valeur de sa matière. Si aucune des choses ne peut être regardée comme la matière principale, le propriétaire à l'insu duquel les matières ont été mélangées peut en demander la division, si elles peuvent être séparées. S'il n'use pas de ce droit, ou si les matières ne peuvent être séparées sans inconvénient, la propriété du mélange est commune aux propriétaires, dans la proportion de la quantité, de la qualité et de la valeur des matières appartenant à chacun d'eux. Article 614. Lorsque la chose reste en commun entre les propriétaires des matières dont elle a été formée, chacun peut en demander la licitation. Article 615. Dans tous les cas où le propriétaire dont la matière a été employée à son insu peut la réclamer, il a le choix de demander la restitution de sa matière en même nature, quantité, poids, mesure et bonté, ou sa valeur. Article 616. Ceux qui emploient des matières appartenant à d'autres, et à leur insu, peuvent être condamnés à des dommages-intérêts, s'il y a lieu, sans préjudice des poursuites répressives, si le cas y échet. TITRE III. De l'usufruit, de l'usage et de l'habitation. Article 617. Les droits d'usufruit, d'usage et d'habitation se règlent par le titre qui les a établis; dans le silence du litre, on suit les règles ci-après. CHAPITRE PREMIER. De l'usufruit. Article 618. L'usufruit est une servitude, en vertu de laquelle une personne a le droit de jouir des choses dont une autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d'en conserver la substance. Article 619. L'usufruit est établi par la loi ou par la volonté de l'homme. Il peut être constitué ou purement ou à certain jour, ou sous condition, et sur toute espèce de biens, meubles ou immeubles. SECTION Ier. Des droits de l'usufruitier. § Ier. — Droit de l'usufruitier sur les fruits. Article 620. L'usufruitier a droit aux fruits dont jouissait le propriétaire. Quant aux produits, tels que mines, carrières et terre glaise, il n'a droit qu'aux intérêts que le propriétaire lirait du capital. Article 621. Les fruits naturels, pendants par branches ou par racines au moment où l'usufruit s'ouvre, appartiennent à l'usufruitier, sans récompense pour les labours et les semences. Les fruits, qui sont dans le même état au moment où l'usufruit finit, appartiennent au propriétaire, à charge de récompense des labours et des semences. Article 622. L'usufruitier a droit aux fruits naturels ou civils, à proportion de la durée de sa jouissance. Cette règle s'applique aux fermages. Article 623. Si l'usufruit comprend des choses dont on ne peut user sans les consommer, comme l'argent, les grains, les liqueurs, l'usufruitier a le droit de s'en servir, à la charge d'en rendre l'estimation faite au commencement de l'usufruit. A défaut d'estimation, il aura le choix de restituer des choses de pareille quantité et qualité, ou d'en payer la valeur au temps de l'extinction de l'usufruit. Article 624. Si l'usufruit comprend des choses qui se détériorent peu à peu par l'usage, comme du linge, des meubles meublants, l'usufruitier a le droit de s'en servir pour l'usage auquel elles sont destinées; il n'est obligé de les rendre, à la fin de l'usufruit, que dans l'état où elles se trouvent, à la charge d'indemniser le propriétaire, si elles ont été détériorées par son dol ou par sa faute. Article 625. L'usufruitier d'un fonds de commerce a le droit et l'obligation de continuer l'exploitation. Le fonds sera estimé à l'ouverture et à l'extinction de la jouissance, et l'usufruitier sera tenu de restituer une valeur égale à celle qu'il a reçue. Article 626. L'usufruitier d'une rente viagère n'a droit qu'aux intérêts légaux du capital; il doit restituer l'excédent, ainsi que les arrérages touchés par anticipation. Article 627. Si l'usufruit comprend des bois taillis ou des sapinières, l'usufruitier est tenu d'observer l'ordre et la quotité des coupes, conformément à l'aménagement ou à l'usage constant des propriétaires. Il profite sous la même condition des parties de bois de haute futaie qui ont été mises en coupes réglées, de quelque manière que ces coupes se fassent, pourvu qu'il jouisse en bon père de famille du revenu que les propriétaires retiraient du fonds. Dans tous les autres cas, l'usufruitier ne peut toucher aux. arbres de haute futaie. Article 628. L'usufruitier peut prendre, sur les arbres, des produits annuels ou périodiques; il peut aussi prendre des échalas pour les vignes et des tuteurs pour les houblonnières, le tout suivant l'usage du pays ou la coutume des propriétaires. Article 629. L'usufruitier n'a aucun droit aux mines et carrières non encore ouvertes, ni aux tourbières dont l'exploitation n'est pas commencée. Quant à celles qui sont en exploitation à l'ouverture de l'usufruit, il a seulement la jouissance du produit; il doit tenir compte du capital au propriétaire. § II. — Du mode de jouissance de l'usufruitier. Article 630. L'usufruitier jouit, en général, des droits que possède le propriétaire, et il en jouit, dans les limites de son droit, comme le propriétaire lui-même. Il prend les choses dans l'état où elles se trouvent lors de l'ouverture de l'usufruit, avec leurs accessoires, tels que les droits de servitude. Il jouit aussi des alluvions et des îles qui se forment pendant la durée de l'usufruit. L'usufruitier n'a aucun droit au trésor qui pourrait être découvert pendant la durée de sa jouissance. Article 631. L'usufruitier peut retirer des pépinières les jeunes plants, à charge de les remplacer, conformément aux usages des lieux. Les arbres fruitiers qui meurent, ceux môme qui sont arrachés ou brisés par accident, appartiennent à l'usufruitier, à la charge de les remplacer par d'autres. Article 632. Si l'usufruit comprend des créances, l'usufruitier doit faire les significations et les inscriptions prescrites au cessionnaire, pour être saisi à l'égard des tiers. Il peut recevoir et poursuivre le remboursement des créances, en appelant le propriétaire à intervenir pour le placement des capitaux. Article 633. L'usufruitier peut jouir par lui-même, ou donner à bail. Il doit se conformer, pour la durée des baux d'immeubles et leur renouvellement, aux règles établies au titre Du louage pour les baux faits par les administrateurs. Il peut céder son droit, à titre onéreux ou à titre gratuit. Article 634. L'usufruitier peut changer la forme de la chose, pourvu que ces changements ne soient pas préjudiciables au propriétaire. Il peut faire des constructions ou des plantations, et il a le droit de les enlever soit pendant la durée de sa jouissance, soit lors de l'extinction de l'usufruit. Il n'a droit à aucune indemnité pour les constructions, plantations ou améliorations; il peut cependant, ou ses héritiers, enlever les matériaux, arbres, glaces, tableaux et autres ornements, à la charge de rétablir les lieux dans leur premier état. SECTION II. Des obligations de l'usufruitier. Article 635. L'usufruitier ne peut se mettre en possession et jouir des fruits qu'après avoir fait dresser à ses frais, en présence du propriétaire, ou lui dûment appelé, un inventaire des meubles et un état des immeubles, sujets à l'usufruit. L'inventaire peut se faire sous seing privé, si le propriétaire est présent. Si l'usufruitier a été dispensé de faire inventaire par l'acte constitutif, le propriétaire pourra y procéder à ses frais. Article 636. L'usufruitier donne caution de jouir en bon père de famille et de restituer les biens. Cette obligation peut être remplacée par un gage ou une hypothèque. Ne sont pas tenus de fournir caution: 1° l'usufruitier que l'acte constitutif en dispense; 2° le donateur sous réserve d'usufruit. Article 637. Le retard de donner caution ne prive pas l'usufruitier de son droit aux fruits. Si l'usufruitier ne trouve pas de caution, les immeubles seront donnés à bail par le propriétaire, de commun accord avec l'usufruitier, ou confiés à un administrateur nommé par le tribunal. Le juge pourra autoriser l'usufruitier à habiter une maison comprise dans les biens dont il a la jouissance. Les sommes comprises dans l'usufruit seront placées de commun accord. Les titres au porteur seront convertis en litres nominatifs, en faveur du propriétaire, avec mention de l'usufruit. Les denrées seront vendues et le prix en sera pareillement placé. Les intérêts, loyers et fermages appartiendront à l'usufruitier. Article 638. A défaut de cautionnement, le propriétaire peut exiger que les meubles qui dépérissent par l'usage soient vendus, pour le prix en être placé; l'usufruitier jouira de l'intérêt. Cependant, l'usufruitier pourra demander, et le tribunal pourra ordonner, suivant les circonstances, que la partie des meubles nécessaires pour son usage, lui soit délaissée, sous sa simple caution juratoire, à la charge de les représenter à la fin de l'usufruit. Article 639. L'administration des biens soumis à usufruit ne pourra être accordée à un tiers qu'à charge de donner caution. L'administrateur rendra compte chaque année à l'usufruitier, et lui payera le reliquat; à la fin de sa gestion, il rendra compte au propriétaire et à l'usufruitier. Le mandat de l'administrateur pourra être révoqué. Le tribunal nommera un nouvel administrateur dans tous les cas où l'administration vient à cesser. Article 640. L'usufruitier est tenu de faire tous les actes de conservation; notamment, il doit dénoncer les usurpations qui se commettent sur le fonds et tous les faits qui portent atteinte aux droits du propriétaire, sous peine de répondre du dommage qui peut en résulter pour le propriétaire. Article 641. L'usufruitier est tenu aux réparations d'entretien et aux grosses réparations qui sont occasionnées par le défaut de réparations d'entretien, depuis l'ouverture de l'usufruit. L'usufruitier qui fait de grosses réparations dont il n'est pas tenu peut se faire rembourser, sans intérêts, la valeur des ouvrages, jusqu'à concurrence de l'utilité qui subsiste lors de l'extinction de l'usufruit. Si le propriétaire fait les grosses réparations, l'usufruitier devra lui tenir compte des intérêts de la dépense dans la mesure dont il en profite. Article 642. Les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres, le renouvellement entier ou d'une partie notable des toits, des planchers, des digues et aqueducs, des murs de soutènement et d'enceinte. Toutes les autres réparations sont d'entretien. Article 643. L'usufruitier est tenu, pendant sa jouissance, de toutes les charges annuelles de l'héritage, telles que les contributions et autres, qui, dans l'usage, sont censées charges des fruits. Article 644. Quand la charge est imposée sur la propriété et payable pendant l'usufruit, le propriétaire est tenu delà payer; mais l'usufruitier doit lui tenir compte des intérêts. Si l'usufruitier fait l'avance, il a la répétition du capital à la fin de l'usufruit. Si un procès concernant la propriété est soutenu par le propriétaire et par l'usufruitier, ils supporteront les frais dans la proportion de leur intérêt. Si le procès ne concerne que l'usufruit, l'usufruitier sera seul tenu des frais. Article 645. L'usufruitier universel ou à titre universel est tenu des intérêts des dettes et legs dont le patrimoine est grevé, dans la proportion que son legs présente avec le reste de l'hérédité. S'il y a lieu de payer le capital d'une dette, l'usufruitier qui en fait l'avance pourra en réclamer la restitution à la fin de l'usufruit, sans intérêt. Si l'usufruitier ne veut pas faire l'avance, le propriétaire a le choix ou de payer la dette, et, dans ce cas, l'usufruitier lui tient compte des intérêts pendant la durée de l'usufruit, ou de faire vendre jusqu'à due concurrence une portion des biens soumis à l'usufruit. SECTION III. Droits et obligations du propriétaire. Article 646. Le propriétaire peut aliéner la chose sujette à l'usufruit. Cette aliénation ne fait aucun changement dans le droit de l'usufruitier; il continue à jouir de son usufruit, s'il n'y a pas renoncé. Article 647. Le propriétaire ne peut par son fait, ni de quelque manière que ce soit, nuire aux droits de l'usufruitier. Article 648. Les grosses réparations sont à charge du propriétaire. SECTION IV. Comment l'usufruit prend fin. Article 649. L'usufruit s'éteint: 1° Par la mort de l'usufruitier. S'il est accordé à une corporation, il prend fin après (rente ans; 2° Par l'expiration du temps pour lequel il a été accordé; 3° Par la confusion ou la réunion sur la même tête des qualités d'usufruitier et de propriétaire; 4° Par la perte totale de la chose sur laquelle l'usufruit est établi. Si la chose a seulement changé de forme, l'usufruit subsiste. Tel est l'usufruit établi sur un bâtiment qui est détruit par un incendie ou par un autre accident. Si la perte n'est pas totale, l'usufruit subsiste sur ce qui reste. Tel est l'usufruit établi sur un domaine dont un bâtiment fait partie; si le bâtiment est détruit, l'usufruitier jouira du reste du domaine, ainsi que du sol et des matériaux. Article 650. Si l'usufruit n'est établi que sur un animal qui vient à périr sans la faute de l'usufruitier, celui-ci n'est pas tenu d'en rendre un autre, ni d'en payer l'estimation; il n'est tenu de rendre compte au propriétaire que des cuirs ou de leur valeur. Il en est de même si l'usufruit est établi sur un troupeau, et que celui-ci périt entièrement par accident ou par maladie, et sans la faute de l'usufruitier. Si le troupeau ne périt pas entièrement, l'usufruitier est tenu de remplacer, jusqu'à concurrence du croît passé et futur, les têtes des animaux qui ont péri. Article 651. Si l'usufruitier abuse de sa jouissance, soit en aliénant les biens, soit en commettant des dégradations sur le fonds, soit en le laissant dépérir faute d'entretien, le tribunal pourra ordonner qu'il fournisse caution s'il en a été dispensé, ou ordonner que les biens soient loués, ou confier l'administration au propriétaire, ou à un tiers, à charge par ceux-ci de payer annuellement à l'usufruitier ou à ses ayants cause une somme déterminée, représentant les revenus des biens, déduction faite des charges et des frais d'administration. CHAPITRE II. De rasage et de l'habitation. Article 652. Le droit d'usage s'établit et s'éteint de la même manière que l'usufruit. L'usager est tenu, comme l'usufruitier, de donner caution et de faire des états et inventaires; il doit jouir en bon père de famille. Article 653. L'usager n'a droit qu'aux fruits qui sont nécessaires pour ses besoins et ceux de sa famille, quand même il n'aurait pas été marié à l'époque où l'usage lui a été concédé. Article 654. Le droit d'usage ne peut être ni cédé ni loué. Article 655. Si l'usager profite de tout le fonds, il est assujetti aux charges, comme l'usufruitier; s'il ne profite que d'une partie de la chose, il y contribue proportionnellement à sa jouissance. Article 656. Le droit d'habitation est l'usage d'une maison. Il est régi par les mêmes principes que le droit d'usage. Article 657. L'usage des bois et forêts est réglé par des lois particulières. TITRE IV. Des servitudes prédiales. Article 658. La servitude prédiale est une charge imposée sur un héritage, pour l'usage et l'utilité d'un héritage appartenant à un autre propriétaire. La servitude n'établit aucune prééminence d'un héritage sur l'autre. Article 659. Les servitudes prédiales sont établies par la loi ou par le fait de l'homme. CHAPITRE PREMIER. Des servitudes établies par la loi. Article 660. Les servitudes établies par la loi ont pour objet l'utilité publique ou privée. Article 661. Les servitudes établies pour l'utilité publique sont réglées par des lois ou des règlements particuliers. Article 662. Les charges que la loi impose aux propriétaires, l'un à l'égard de l'autre, sont réglées par les lois sur la police rurale et par les dispositions du présent chapitre. SECTION Ier. Des servitudes concernant les eaux. Article 663. Les fonds inférieurs sont assujettis, envers ceux qui sont plus élevés, à recevoir les eaux qui en découlent naturellement, sans que la main de l'homme y ait contribué. Le propriétaire inférieur ne peut faire aucun ouvrage qui fasse refluer les eaux sur l'héritage supérieur ou sur les fonds voisins. Le propriétaire supérieur ne peut rien faire qui aggrave la servitude du fonds inférieur, mais il a le droit de changer la culture et de bâtir. Article 664. Les riverains des cours d'eau non navigables ni flottables peuvent s'en servir pour les besoins de la vie domestique, de l'agriculture et de l'industrie. Quand la rivière traverse leur héritage, ils peuvent en changer le cours, à la charge de la rendre, à la sortie du fonds, à son cours ordinaire. Les riverains peuvent se servir des eaux pour des propriétés qui ne bordent pas la rivière et en céder l'usage, avec l'autorisation de l'autorité communale, à des propriétaires non riverains. Article 665. Les riverains ont un droit égal à l'usage des eaux. S'il s'élève des contestations entre eux, les tribunaux doivent concilier les divers droits qui sont en conflit; dans tous les cas, ils sont tenus d'appliquer les règlements provinciaux et communaux sur le cours et l'usage des eaux. SECTION II. Droits des riverains sur la voie publique. Article 666. Les riverains ont le droit de bâtir le long de la voie publique, à condition qu'ils ne compromettent pas la destination des rues et des places publiques. Article 667. Si l'administration supprime les jours ou les issues, en changeant l'état des lieux, elle est tenue d'indemniser les propriétaires. Les entreprises faites sur la voie publique par tolérance et même en vertu d'une concession ne donnent droit à aucune indemnité. SECTION III. De la copropriété avec indivision. Article 668. Les chemins qui servent de voie commune d'exploitation sont présumés appartenir aux propriétaires dont ils desservent les fonds, sauf la preuve contraire d'une servitude de passage ou d'une possession précaire. Il en est de même des allées, ruelles, cours, fosses d'aisance ou puits, destinés au service de plusieurs maisons. Article 669. S'il y a copropriété, le partage peut toujours être demandé, à moins que la chose commune ne forme une dépendance tellement nécessaire des propriétés principales que, sans sa possession et sa jouissance, ces propriétés seraient de nul usage ou d'un usage notablement amoindri. Article 670. Chacun des copropriétaires peut user de la totalité de la chose, suivant sa destination; mais le droit de l'un est limité par le droit égal des autres. L'un d'eux ne peut, sans le concours des autres, ou sans le faire juger avec eux, changer l'état des lieux. Chacun des communistes contribue aux charges d'après son intérêt. Article 671. Lorsque les différents étages d'une maison appartiennent à divers propriétaires, si les titres de propriété ne règlent pas le mode de réparations et reconstructions, elles doivent être faites ainsi qu'il suit: Les gros murs et le toit sont à la charge de tous les propriétaires, chacun en proportion de la valeur de l'étage qui lui appartient. Le propriétaire de chaque étage fait le plancher sur lequel il marche. Le propriétaire du premier étage fait l'escalier qui y conduit; le propriétaire du second étage fait, à partir du premier, l'escalier qui conduit chez lui, et ainsi de suite. SECTION IV. De la mitoyenneté. § Ier. — Dispositions générales. Article 672. Toute clôture qui sépare des héritages est réputée mitoyenne, à moins qu'il n'y ait qu'un seul héritage en état de clôture, ou s'il n'y a titre, prescription ou marque contraire. Article 673. Les droits et charges de la mitoyenneté sont les mêmes que les droits et charges qui résultent de la copropriété. Article 674. La clôture mitoyenne doit être entretenue à frais communs. Le voisin peut se soustraire à cette charge en abandonnant le droit de mitoyenneté. Article 675. Les produits de la chose mitoyenne appartiennent aux copropriétaires par moitié. § II. — Des murs mitoyens. Article 676. Chacun peut contraindre son voisin, dans les villes et faubourgs, à contribuer aux constructions et réparations de la clôture de séparation de leurs héritages. A défaut de règlements particuliers ou d'usages constants et reconnus, la hauteur de la clôture sera de trois mètres. Article 677. Le propriétaire qui veut bâtir contre un mur non mitoyen ne peut en acquérir la mitoyenneté que du consentement du voisin auquel le mur appartient. Article 678. Dans les villes et dans les campagnes, tout mur servant de séparation entre bâtiments jusqu'à l'héberge, ou entre cours et jardins, et même entre enclos dans les champs, est présumé mitoyen. Article 679. Il y a marque de non-mitoyenneté lorsque la sommité du mur est droite et à plomb de son parement, d'un côté, et présente de l'autre un plan incliné. Lors encore qu'il n'y a que d'un côté ou un chaperon ou des filets et corbeaux de pierre qui y auraient été mis en bâtissant le mur. Dans ces cas, le mur est censé appartenir exclusivement au propriétaire du côté duquel sont l'égout ou les corbeaux et filets de pierre. Article 680. Les réparations et les reconstructions nécessaires du mur mitoyen sont à la charge de tous les copropriétaires, proportionnellement au droit de chacun. Cependant tout copropriétaire, sauf dans les villes et faubourgs, peut se dispenser de contribuer aux réparations et reconstructions en abandonnant le droit de mitoyenneté, pourvu que le mur ne soutienne pas un bâtiment qui lui appartienne. Article 681. L'un des voisins ne peut pratiquer dans le corps d'un mur mitoyen aucun enfoncement, ni y appliquer ou appuyer aucun ouvrage, sans le consentement de l'autre, ou sans avoir, à son refus, fait régler par experts les moyens nécessaires pour que le nouvel ouvrage ne soit pas nuisible aux droits de l'autre. Article 682. Le copropriétaire peut, sous les conditions exigées par l'article 681, bâtir contre le mur mitoyen et y faire placer des poutres ou solives jusqu'à la moitié de l'épaisseur. Article 683. Le copropriétaire peut, sous les mêmes conditions, exhausser le mur mitoyen; mais il doit payer seul la dépense de l'exhaussement, les réparations au-dessus de la hauteur de la clôture commune, ainsi que les ouvrages nécessaires pour que le mur puisse supporter la charge de l'exhaussement. Si le mur n'est pas en état de supporter l'exhaussement, celui qui veut l'exhausser doit le faire reconstruire en entier à ses frais, et l'excédent d'épaisseur se prendra de son côté. Si le voisin éprouve un dommage, même temporaire, par les travaux de l'exhaussement ou de la reconstruction, il aura droit, de ce chef, à une indemnité. Article 684. Le voisin peut contribuer à l'exhaussement, ou en acquérir la mitoyenneté, en payant la moitié de la dépense qu'il a coûté et la valeur de la moitié du sol fourni pour l'excédent d'épaisseur, s'il y en a. Article 685. L'un des voisins ne peut, sans le consentement de l'autre, pratiquer dans le mur mitoyen aucune fenêtre ou ouverture, en quelque manière que ce soit, même à verre dormant. § 3. — Des fossés, haies et arbres mitoyens. Article 686. Il y a marque de non-mitoyenneté du fossé lorsque la levée ou le rejet de la terre se trouve d'un côté seulement. Le fossé est censé appartenir exclusivement à celui du côté duquel le rejet ou la levée se trouve. Article 687. La mitoyenneté du fossé ne peut pas être abandonnée s'il sert habituellement à l'écoulement des eaux. Article 688. Le copropriétaire d'une haie mitoyenne peut la détruire jusqu'à la limite de sa propriété, à la charge de construire un mur sur celte limite. Le copropriétaire d'un fossé mitoyen, qui ne sert qu'à la clôture, a le même droit. Article 689. Les copropriétaires d'un fossé ou d'une haie mitoyens en peuvent provoquer le partage. Article 690. Les arbres qui se trouvent dans la haie ou le fossé mitoyens sont mitoyens; chaque copropriétaire a le droit d'exiger qu'ils soient arrachés. Article 691. Lorsque les arbres meurent, ou qu'ils sont coupés ou arrachés, les copropriétaires les partagent par moitié. SECTION V. Des plantations. Article 692. Sauf dans les villes et faubourgs, il n'est permis d'avoir des arbres, arbrisseaux et arbustes près de la limite du fonds voisin qu'à la distance prescrite par les règlements particuliers actuellement existants, ou par des usages constants et reconnus, et, à défaut de règlements et usages, qu'à la distance de deux mètres de la ligne séparative des deux héritages, pour les plantations dont la hauteur dépasse deux mètres, et à la distance d'un demi-mètre pour les autres plantations. Article 693. Les arbres, arbrisseaux et arbustes peuvent être plantés en espaliers, de chaque côté du mur mitoyen, sans que l'on soit tenu d'observer aucune distance; mais ils ne peuvent dépasser la crête du mur. Si le mur n'est pas mitoyen, le propriétaire seul a le droit d'y appuyer ses espaliers. Article 694. Le voisin peut exiger que les arbres, arbrisseaux et arbustes, plantés à une distance moindre que la distance légale, soient arrachés ou réduits à la hauteur déterminée par l'article 692, à moins qu'il n'y ait titre, destination du père de famille ou prescription trentenaire. Article 695. Si les arbres plantés à la distance légale étendent leurs branches sur le fonds du voisin, celui-ci peut contraindre le propriétaire à les couper. Si ce sont les racines qui avancent sur son héritage, il a le droit de les y couper lui-même. Le tout, sauf litre ou prescription contraire. Article 696. Le voisin a le même droit lorsque le propriétaire a acquis le droit d'avoir des plantations à une distance moindre que la distance légale. SECTION VI. Des distances et des ouvrages intermédiaires requis pour certaines constructions. Article 697. Celui qui fait creuser un canal, un puits, ou une fosse d'aisances et des tuyaux d'écoulement près d'un mur mitoyen ou non; Celui qui veut y construire cheminée ou âtre, forge, four ou fourneau, y adosser une étable, Ou établir contre ce mur un magasin de sel, ou amas de matières corrosives, Est obligé à laisser les distances prescrites par les règlements et usages particuliers sur ces objets, ou à faire les ouvrages prescrits par ces règlements et usages pour éviter de nuire au voisin. Article 698. Celui qui creuse un fossé sur la ligne séparative de deux héritages doit laisser au delà un espace déterminé par les règlements et usages. Le propriétaire du fossé est présumé propriétaire de la répare. SECTION VII. Des vues et des jours sur la propriété de son voisin. Article 699. Le propriétaire d'un mur non mitoyen, joignant immédiatement l'héritage d'autrui, peut pratiquer dans ce mur des jours à fer maillé et verre dormant. Ces jours doivent être garnis d'un treillis de fer, dont les mailles auront un décimètre d'ouverture au plus, et d'un châssis à verre dormant. Ils ne peuvent être établis qu'à vingt-six décimètres au-dessus du plancher ou sol de la chambre qu'on veut éclairer, si c'est à rez-dechaussée, et à dix-neuf décimètres au-dessus du plancher pour les étages supérieurs. Article 700. On ne peut avoir des vues droites ou fenêtres d'aspect, ni balcons ou autres semblables saillies sur l'héritage clos ou non clos de son voisin, s'il n'y a dix-neuf décimètres de distance entre le mur où on les pratique et ledit héritage. On ne peut avoir des vues par côté ou obliques sur le même héritage, s'il n'y a six décimètres de distance. Ces dispositions ne reçoivent pas d'application quand le terrain intermédiaire est une voie publique. Article 701. La distance prescrite par l'article précédent se compte, pour les vues droites, depuis le parement extérieur du mur où l'ouverture se fait; et, s'il y a balcons ou autres saillies, depuis leur ligne extérieure; et, pour les vues obliques, à partir de l'arête du jambage de la fenêtre jusqu'à la ligne de séparation des deux propriétés. Article 702. Le propriétaire qui possède pendant trente ans des vues ou des jours hors des distances légales, avec les conditions requises pour la prescription, acquiert la servitude de vue. SECTION VIII. De l'égout des toits. Article 703. Tout propriétaire doit établir des toits de manière que les eaux pluviales s'écoulent sur son terrain ou sur la voie publique; il ne peut les faire verser sur le fonds de son voisin. SECTION IX. Du droit de passage. Article 704. Le propriétaire dont les fonds sont enclavés, et qui n'a aucune issue sur la voie publique, peut réclamer un passage sur les fonds de ses voisins pour la jouissance de son héritage, à la charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner. Le passage doit régulièrement être pris du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique, et dans l'endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé. Article 705. L'action en indemnité est prescriptible, et le passage doit être continué quoique l'action ne soit plus recevable. Le droit de passage et le droit de l'exercer ne s'acquièrent et ne se perdent pas par la prescription. Article 706. La servitude de passage cesse lorsque l'enclave cesse. SECTION X. Du tour de l'échelle. Article 707. Quand un propriétaire fait réparer son héritage, son voisin est tenu, moyennant indemnité, s'il y a lieu, de lui prêter le passage nécessaire pour transporter les matériaux ou dresser un échafaudage. CHAPITRE II. Des servitudes établies par le fait de l'homme. SECTION Ier. Des diverses espèces de servitudes qui peuvent être établies sur les biens. Article 708. Il est permis aux propriétaires d'établir sur leurs propriétés, ou en faveur de leurs propriétés, telles servitudes que bon leur semble, pourvu qu'elles ne soient imposées ni à la personne, ni en faveur de la personne, mais seulement à un fonds et pour un fonds, et qu'elles n'aient rien de contraire à l'ordre public. L'usage et l'étendue de ces servitudes se règlent par le titre qui les constitue; à défaut de litre, par les règles ci-après. Article 709. Les servitudes sont continues, ou discontinues. Les servitudes continues sont celles dont l'usage est ou peut être continuel sans avoir besoin du fait actuel de l'homme; tels sont les conduites d'eau, les égouts, les vues et autres de celte espèce. Les servitudes discontinues sont celles qui ont besoin du fait actuel de l'homme pour être exercées; tels sont les droits de passage, puisage, pacage et autres semblables. Article 710. Les servitudes sont apparentes, ou non apparentes. Les servitudes apparentes sont celles qui s'annoncent par des ouvrages extérieurs, tels qu'une porte, une fenêtre, un aqueduc. Les servitudes non apparentes sont celles qui n'ont pas de signe extérieur de leur existence; par exemple, la prohibition de bâtir sur un fonds, ou de ne bâtir qu'à une hauteur déterminée. SECTION II. Comment s'établissent les servitudes. Article 711. Les servitudes continues et apparentes s'établissent par titre, par la prescription de trente ans et par la destination du père de famille. Article 712. Les servitudes continues non apparentes et les servitudes discontinues, apparentes ou non apparentes, ne peuvent s'établir que par litres. La possession, même immémoriale, ne suffit pas pour les établir. Article 713. Il y a destination du père de famille lorsqu'il est prouvé que les deux fonds actuellement divisés ont appartenu au même propriétaire, et que c'est par lui que les choses ont été mises ou laissées dans l'état duquel résulte la servitude. SECTION III. Comment s'exercent les servitudes. Article 714. Le droit de servitude comprend tout ce qui est nécessaire pour en user. Ainsi, la servitude de puiser de l'eau à la fontaine d'autrui emporte nécessairement le droit de passage. Article 715. Celui auquel est due une servitude peut faire, à ses frais, tous les ouvrages nécessaires pour en user et pour la conserver. Si le titre met les frais à charge du propriétaire du fonds assujetti, celui-ci peut toujours s'en affranchir, en abandonnant ce fonds au propriétaire du fonds dominant. Article 716. Le propriétaire du fonds servant ne peut rien faire qui tende à diminuer l'usage de la servitude ou à le rendre plus incommode. Ainsi, il ne peut changer l'état des lieux, ni transporter l'exercice de la servitude dans un endroit différent de celui où elle a été primitivement assignée. Si, cependant, l'assignation primitive était devenue plus onéreuse au propriétaire du fonds assujetti, ou si elle l'empêchait d'y faire des réparations avantageuses, il pourrait offrir au propriétaire de l'autre fonds un endroit aussi commode pour l'exercice de ses droits, et celui-ci ne pourrait pas le refuser. Article 717. De son côté, celui qui a un droit de servitude ne peut en user que suivant son titre ou sa possession, sans pouvoir faire, ni dans le fonds assujetti, ni dans le fonds dominant, de changement qui aggrave la condition du premier. Article 718. Si l'héritage pour lequel la servitude a été établie vient à être divisé, la servitude reste due pour chaque portion, sans néanmoins que la condition du fonds assujetti soit aggravée. Ainsi, s'il s'agit d'un droit de passage, chaque propriétaire d'une portion du fonds devra l'exercer par le même endroit. SECTION IV. Comment les servitudes s'éteignent. Article 719. Les servitudes cessent lorsque les choses se trouvent dans un tel état qu'on ne peut plus en user. Elles subsistent, si les choses sont rétablies de manière qu'on puisse en user, à moins qu'il ne se soit écoulé un espace de temps suffisant pour que la prescription soit acquise. Article 720. Toute servitude est éteinte lorsque le fonds à qui elle est due et celui qui la doit sont réunis dans la même main. Si la servitude est apparente, et que le propriétaire dispose de l'un des héritages sans que le contrat contienne aucune convention relative à la servitude, elle continue d'exister activement ou passivement en faveur du fonds aliéné ou sur le fonds aliéné. Article 721. La servitude est éteinte par le non-usage pendant trente ans. Les trente ans commencent à courir du jour où l'on a cessé d'en jouir, lorsqu'il s'agit de servitudes discontinues, ou du jour où il a été fait un acte contraire à la servitude, lorsqu'il s'agit de servitudes continues. La servitude s'éteint encore par la prescription acquisitive de dix à vingt ans. Article 722. Si l'héritage dominant appartient à plusieurs par indivis, la jouissance de l'un empêche la prescription à l'égard de tous. Si l'un des copropriétaires est mineur, il conserve le droit de tous les autres. Article 723. Le mode de la servitude peut se prescrire activement, comme la servitude même, et de la même manière. Si le propriétaire a usé de son droit en partie, il le conserve dans toute son intégrité. TITRE V. De l'emphytéose. Article 724. L'emphytéose est un droit réel qui donne la pleine jouissance d'un immeuble appartenant à autrui, à charge de payer au propriétaire une redevance annuelle, en argent ou en nature. L'emphytéose peut être établie à perpétuité. Article 725. L'emphytéote exerce tous les droits attachés à la propriété du fonds. Il peut aliéner son droit et l'hypothéquer; le propriétaire n'a droit à aucune redevance extraordinaire à l'occasion de l'aliénation ou du partage de la communauté. Article 726. L'emphytéote ne peut rien faire qui diminue la valeur du fonds. Il ne peut ouvrir des mines, carrières ou tourbières. L'emphytéote peut faire tout ce qui améliore l'héritage; il jouit de toute espèce de bois, en se conformant à l'aménagement ou à l'usage constant des propriétaires; il a même le droit de défricher dans l'intérêt de la culture. Article 727. L'emphytéote peut améliorer l'héritage par des constructions et des plantations. Il peut les enlever soit pendant la durée de l'emphytéose, soit à l'expiration de son droit, en rétablissant les lieux dans leur état primitif. Le propriétaire a, en tout cas, un droit de rétention jusqu'au payement de ce qui lui est dû par l'emphytéote. S'il veut conserver les constructions et plantations, il doit en payer la valeur. Article 728. L'emphytéote est assimilé au fermier, en ce qui concerne la redevance qu'il doit payer; il a droit à une remise du prix dans les cas où le fermier peut la réclamer. L'emphytéote et le propriétaire sont tenus des réparations et des charges, d'après les principes qui régissent l'usufruit. Article 729. L'emphytéose s'éteint: 1° Par l'expiration du temps fixé. Il n'y a pas lieu à reconduction tacite; 2° Si l'emphytéote ne paye pas sa redevance pendant cinq années consécutives; 3° Par abus grave de jouissance. L'emphytéote peut prévenir la déchéance, en rétablissant les choses dans leur ancien état et en donnant des garanties pour l'avenir; 4° Par la prescription acquisitive de trente ans et par celle de dix à vingt ans. TITRE VI. De la superficie. Article 730. La superficie est un droit en vertu duquel on peut avoir, à titre de démembrement de la propriété, des constructions ou plantations sur un fonds appartenant à autrui. Le droit de superficie peut être établi à perpétuité. Article 731. Le superficiaire peut aliéner et hypothéquer son droit. Article 732. Le superficiaire a le droit de construire et de planter. Pendant la durée de son droit, il peut enlever les constructions et plantations qu'il a faites, à charge de rétablir les lieux dans leur état primitif. Il en est de même de celles qui se trouvaient sur le fonds, s'il en a payé la valeur. S'il n'en a pas acquis la propriété, il doit les conserver et les rendre, à l'expiration de son droit, au propriétaire. Article 733. Les constructions et plantations faites par le superficiaire, ou acquises par lui, passent, à l'expiration de son droit, au propriétaire, à charge par celui-ci d'en payer la valeur actuelle. Le superficiaire aura le droit de rétention jusqu'au remboursement. Article 734. Le superficiaire est assimilé à l'emphytéote, quant aux charges qui grèvent le fonds. Article 735. Le droit de superficie s'éteint de la même manière que l'emphytéose. LIVRE III. DES DIFFÉRENTES MANIÈRES DONT ON ACQUIERT LA PROPRIÉTÉ. Dispositions générales. Article 736. La propriété des biens s'acquiert par occupation, par la loi, par succession, par donation entre-vifs ou testamentaire, par l'effet des contrats et par prescription. Article 737. La faculté de chasse et de pêche est réglée par des lois particulières. Article 738. Le trésor appartient à celui qui le trouve. Lorsqu'il est trouvé dans le fonds d'autrui, il appartient au propriétaire, si, de mémoire d'homme, le fonds a été occupé par la même famille. Le trésor est toute chose cachée ou enfouie, sur laquelle personne ne peut justifier sa propriété, et qui est découverte par le pur effet du hasard. Article 739. Celui qui trouve un effet mobilier doit le restituer au précédent possesseur; s'il ne le connaît pas, il est tenu de consigner la chose sans retard au commissariat de police du lieu où il l'a trouvée. L'autorité communale fera, pendant deux dimanches consécutifs, des publications, oralement et par la voie des journaux. S'il n'y a pas de réclamation dans les trois ans qui suivent la seconde publication, la chose trouvée deviendra la propriété de l'inventeur. Si le maître de la chose se présente, elle lui sera remise, moyennant le remboursement des frais de publication. Article 740. Les droits sur les effets jetés à la mer, sur les objets que la mer rejette, de quelque nature qu'ils puissent être, sur les plantes et herbages qui croissent sur les rivages de la mer, sont réglés par des lois particulières. TITRE PREMIER. Des successions. CHAPITRE PREMIER. De l'ouverture des successions. Article 741. Les successions s'ouvrent par la mort, au domicile du défunt. Article 742. Si plusieurs personnes, respectivement appelées à la succession l'une du l'autre, périssent dans un même événement, sans qu'on puisse prouver laquelle est décédée la première, il n'y a pas de transmission de droits de l'une à l'autre. CHAPITRE II. De la capacité. SECTION Ier. Des qualités requises pour succéder. Article 743. Pour succéder, il faut nécessairement exister à l'instant de l'ouverture de la succession; ainsi, est incapable de succéder celui qui n'est pas encore conçu. Pour prouver qu'il était conçu lorsque la succession s'est ouverte, l'enfant peut invoquer les présomptions établies au titre De la paternité et de la filiation, et on peut les invoquer contre lui. Article 744. Les étrangers succèdent en Belgique en vertu des articles 12 et 50 du présent Code. S'il y a des cohéritiers belges, ceux-ci n'auront droit à aucun prélèvement du chef des biens dont ils seraient exclus, sauf au gouvernement à provoquer des mesures de représailles, s'il y a lieu. Article 745. Sont incapables de succéder pour cause d'indignité: 1° Celui qui a donné ou tenté de donner la mort au défunt; 2° Celui qui a imputé au défunt un crime, si l'imputation a été jugée calomnieuse; 3° Celui qui a empêché le défunt de tester, ou de révoquer son testament, et celui qui a caché, supprimé ou altéré un testament. Article 746. L'héritier exclu de la succession pour cause d'indignité est tenu de rendre tous les fruits et les revenus dont il a joui depuis l'ouverture de la succession. Les actes d'administration et de disposition qu'il a faits sont nuls à l'égard des héritiers appelés à la succession; ils sont valables à l'égard des tiers de bonne foi. Article 747. Les effets de l'indignité cessent quand le défunt, par acte entre-vifs ou par testament, a déclaré l'indigne capable de succéder. Article 748. L'indignité du père n'empêche pas ses enfants ou descendants de succéder soit de leur chef, soit par représentation. SECTION II. De la capacité de disposer ou de recevoir par donation et par testament. § Ier. — Dispositions générales. Article 749. On ne peut disposer de ses biens, à titre gratuit, que par donation entre-vifs ou par testament, dans les formes ci-après établies. Article 750. La donation entre-vifs est un contrat par lequel le donateur se dépouille de la chose donnée, en faveur du donataire qui l'accepte. Article 751. Le testament est un acte par lequel le testateur dispose, pour le temps où il n'existera plus, de tout ou partie de ses biens, et qu'il peut révoquer. Article 752. Toutes personnes peuvent disposer et recevoir, par donation entre-vifs ou par testament, excepté celles que la loi en déclare incapables. § 2. — De la capacité de disposer. Article 753. Le mineur ne peut aucunement disposer, sauf ce qui sera dit au chapitre V, du présent titre. Article 754. Pour faire une donation entre-vifs ou un testament, il faut être sain d'esprit. Les personnes placées sous conseil judiciaire peuvent, par testament, faire des dispositions rémunératoires à titre particulier, eu égard aux facultés du disposant et aux services rendus. § 3. — De la capacité de recevoir. Article 755. Pour être capable de recevoir entre-vifs, il faut être conçu au moment où l'acte de donation est passé. Pour être capable de recevoir par testament, il faut être conçu à l'époque du décès du testateur. les dispositions relatives à l'incapacité et à l'indignité de succéder sont applicables à la succession testamentaire. Article 756. Les enfants adultérins et incestueux, reconnus comme tels, ne peuvent rien recevoir, par donation entre-vifs ou par testament, au delà de ce qui leur est accordé par l'article 791. Article 757. Le tuteur ne peut recevoir de celui qui a été son pupille, si le compte définitif de la tutelle n'a été rendu et apuré avant la donation ou le testament. Sont exceptés les ascendants, descendants, frères, sœurs, ou époux du donateur ou du testateur. Article 758. Les médecins, chirurgiens, pharmaciens et tous ceux qui ont traité une personne pendant la maladie dont elle meurt, ne peuvent profiter des dispositions entre-vifs ou testamentaires qu'elle aurait faites en leur faveur pendant le cours de cette maladie. Sont exceptées: 1° Les dispositions rémunératoires faites à titre particulier, eu égard aux facultés du disposant et aux services rendus; 2° Les dispositions universelles, dans le cas de parenté jusqu'au quatrième degré inclusivement, et celles qui sont faites au profit du mari médecin. Les mêmes règles seront observées à l'égard des ministres des cultes. Article 759. Le testateur ne peut faire de dispositions au profit du notaire ou de toute autre personne qui a reçu le testament, ni d'un témoin qui y est intervenu. Cette incapacité s'applique également à celui qui a écrit le testament mystique. Article 760. Toute disposition faite au profit d'un incapable est nulle, soit qu'on la déguise sous la forme d'un contrat onéreux, soit qu'on la fasse sous le nom de personnes interposées. Sont réputées personnes interposées les père et mère, les enfants et descendants, et l'époux, non séparé de corps, de la personne incapable. § IV. — Des corporations et des établissements publics. Article 761. Les corporations même reconnues ne sont capables de recevoir à titre gratuit qu'en vertu d'un arrêté spécial qui les y autorise. Article 762. Elles ne peuvent recevoir de libéralité que pour le service à raison duquel elles ont été reconnues. Toute disposition faite pour une autre destination sera appliquée à la destination légale. Article 763. L'enseignement public peut seul être gratifié; les libéralités seront recueillies par l'État, les provinces ou les communes, conformément à la loi du 49 décembre 4864. Les hospices peuvent recevoir des libéralités pour l'instruction des orphelins, qui est à leur charge. Les fondations de bourses ne peuvent profiter qu'à ceux qui font leurs études dans une école publique. Article 764. La charité publique peut seule être gratifiée. Toute libéralité qui a pour objet la distribution d'aumônes ou de secours à domicile sera recueillie par les bureaux de bienfaisance. Toute libéralité qui a pour objet l'entretien des pauvres dans des établissements où ils sont reçus appartiendra aux hospices. Les congrégations hospitalières reconnues peuvent recevoir des libéralités pour l'objet de leur mission; elles ne peuvent enseigner, ni recevoir pour l'enseignement même gratuit des pauvres. Les libéralités qui ont pour objet l'amélioration matérielle, intellectuelle et morale de la classe ouvrière seront recueillies par les communes. Article 765. Les fabriques d'église peuvent recevoir pour les besoins du culte et pour les services religieux. Elles ne peuvent recevoir pour l'enseignement religieux ou laïque, ni des aumônes pour les pauvres. Les communes peuvent recevoir pour la construction d'églises, pour l'établissement de cimetières et pour la fondation de crèches. Article 766. Toute libéralité faite dans un esprit de perpétuité, sous quelque forme que ce soit, en faveur de la charité privée ou des écoles privées, est une fondation. Toute fondation est censée faite dans l'intérêt de ceux à qui l'œuvre doit profiter et sera attribuée, par arrêté royal, aux organes légaux de la bienfaisance et de l'enseignement. Les libéralités faites au profit de l'enseignement qui se donne dans les séminaires, dans les églises paroissiales et consistoriales, sont réputées faites pour des écoles libres. Article 767. La nature du service qui fait l'objet de la libéralité légale ou illégale emporte institution en faveur de l'établissement préposé à ce service. Cet établissement doit demander l'autorisation de l'accepter, qu'il soit institué ou non. Si l'autorisation n'est pas demandée, ou si l'acceptation n'a pas lieu, l'autorisation du roi vaudra acceptation. Article 768. L'acceptation peut se faire provisoirement sous la réserve de l'autorisation; elle lie le donateur dès qu'elle lui a été notifiée. Article 769. Les libéralités n'auront leur effet qu'autant qu'elles seront autorisées par arrêté royal. Le roi peut refuser l'autorisation, ou autoriser l'acceptation partielle en réduisant la libéralité. Les fondations peuvent toujours être supprimées ou modifiées, si l'intérêt général l'exige. Article 770. Les dons manuels sont soumis à l'autorisation; la remise à l'établissement gratifié ne vaut que comme acceptation provisoire. L'autorisation ne peut plus être donnée après la mort du donateur. Article 771. Les fondations ont leur effet à partir de l'acceptation provisoire de l'établissement gratifié. § V. — Des legs faits à des personnes incertaines. Article 772. Les legs faits à des personnes incertaines sont nuls. Tout legs fait pour les pauvres en général, ou pour certaines catégories de pauvres, sera recueilli par le bureau de bienfaisance et distribué par lui. Article 773. Les legs faits avec la clause expresse ou tacite que le légataire connaît les intentions du testateur, ou avec une clause analogue, sont censés faits pour des œuvres de bienfaisance, et attribués à la commune, qui les emploiera pour l'instruction et l'éducation des classes ouvrières. Il en est de même des legs faits pour bonnes œuvres ou œuvres pies. § VI. — Des conditions illicites. Article 774. Les conditions impossibles et celles qui sont contraires aux lois ou aux mœurs sont nulles et annulent la libéralité à laquelle elles sont attachées. Par exception, ces conditions sont réputées non écrites dans les fondations d'utilité publique, malgré la clause révocatoire que le disposant y aurait insérée. CHAPITRE III. De la succession légitime. SECTION Ier. Dispositions générales. § Ier. — De la parenté. Article 775. Les parents jusqu'au sixième degré succèdent, d'après la proximité du degré de parenté, dans l'ordre et suivant les règles ci-après établis. Article 776. La proximité de parenté s'établit par le nombre de générations; chaque génération s'appelle un degré. Article 777. La suite des degrés forme la ligne: on appelle ligne directe la suite des degrés entre personnes qui descendent l'une de l'autre; ligne collatérale, la suite des degrés entre personnes qui ne descendent pas les unes des autres, mais qui descendent d'un auteur commun. On distingue la ligne directe, en ligne directe descendante et ligne directe ascendante. La première est celle qui lie le chef avec ceux qui descendent de lui; la deuxième est celle qui lie une personne avec ceux dont elle descend. Article 778. En ligne directe, on compte autant de degrés qu'il y a de générations entre les personnes: ainsi le fils est, à l'égard du père, au premier degré, le petit-fils au second; et réciproquement du père et de l'aïeul à l'égard des fils et petit-fils. Article 779. En ligne collatérale, les degrés se comptent par les générations, depuis l'un des parents jusques et non compris l'auteur commun, et depuis celui-ci jusqu'à l'autre parent. Ainsi deux frères sont au deuxième degré; l'oncle et le neveu sont au troisième degré, les cousins germains au quatrième, et ainsi de suite. § II. — De la représentation. Article 780. La représentation est une fiction de la loi, dont l'effet est de faire entrer les représentants dans le degré et dans les droits du représenté. Article 781. La représentation a lieu à l'infini dans la ligne directe descendante. Elle est admise dans tous les cas, soit que les enfants du défunt concourent avec les descendants d'un enfant prédécédé, soit que tous les enfants du défunt étant morts avant lui, les descendants des dits enfants se trouvent entre eux en degrés égaux ou inégaux. Article 782. La représentation n'a pas lieu en faveur des ascendants; le plus proche exclut toujours le plus éloigné. Article 783. En ligne collatérale, la représentation est admise en faveur des enfants et des descendants de frères ou sœurs du défunt, soit qu'ils viennent à sa succession concurremment avec des oncles ou tantes, soit que tous les frères et sœurs du défunt étant prédécédés, la succession se trouve dévolue à leurs descendants en degrés égaux ou inégaux. Article 784. Dans tous les cas où la représentation est admise, le partage s'opère par souche. Si une même souche a produit plusieurs branches, la subdivision se fait aussi par souche dans chaque branche, et les membres de la même branche partagent entre eux par tête. Article 785. On ne représente pas les personnes vivantes; partant, les enfants d'un héritier qui a renoncé ne peuvent pas le représenter, à moins qu'ils ne soient en concours avec d'autres descendants qui usent du bénéfice de représentation. On peut représenter celui à la succession duquel on a renoncé. SECTION II. Des divers ordres de succession. § Ier. — Des parents légitimes. Article 786. Les enfants ou leurs descendants succèdent à leurs père et mère, aïeuls, aïeules ou autres ascendants. Sous le nom d'enfants sont compris les enfants légitimés et adoptifs et leurs descendants. Les enfants adoptifs ne sont pas les successibles des parents de l'adoptant. Tous les enfants succèdent par tête, quand ils sont appelés de leur chef; ils succèdent par souche, lorsqu'ils viennent tous ou en partie par représentation. Article 787. Si le défunt laisse des ascendants, le plus proche recueille toute l'hérédité. S'il y en a plusieurs du degré le plus proche, et qu'ils appartiennent à la même ligne, ils partagent par tête; s'ils sont de lignes différentes, la moitié de la succession est dévolue aux ascendants paternels, et l'autre moitié aux ascendants maternels. Dans chaque ligne, le partage se fait par tête. Article 788. Les frères et sœurs et leurs descendants succèdent avec les ascendants les plus proches. A défaut d'ascendants, les frères et sœurs et leurs descendants prennent toute l'hérédité. S'il y a des frères et sœurs de différents lits, les unilatéraux ne prennent que la moitié de la part affectée aux germains. Le partage se fait par tête. Quand les descendants des frères et sœurs viennent par représentation, le partage se fait par souche. Article 789. Si le défunt ne laisse ni descendants, ni ascendants, ni frères et sœurs, ni descendants d'eux, la succession est déférée aux collatéraux les plus proches, sans distinction de ligne paternelle ou maternelle. § II. — Des parents naturels. Article 790. Les enfants naturels dont la filiation est légalement établie ont les mêmes droits que les enfants légitimes dans la succession de leurs père et mère et des parents de leurs père et mère. Les descendants légitimes ou naturels de l'enfant jouissent des mêmes droits. Article 791. Les enfants adultérins ou incestueux dont la filiation est constatée légalement succèdent à titre d'enfants naturels, comme il est dit en l'article 790. Si les actes de reconnaissance d'où résulte leur filiation établissent les relations adultérines ou incestueuses auxquelles ils doivent le jour, ils ne succèdent pas; la loi ne leur accorde que des aliments, qui seront fixés eu égard à la fortune de leurs père et mère. Article 792. Le droit de succession que la loi donne aux enfants naturels appartient, par réciprocité, aux parents paternels et maternels de ces enfants, quand ceux-ci meurent sans laisser de postérité naturelle ou légitime. § III. — Du conjoint survivant. Article 793. Lorsque le défunt laisse des enfants, le conjoint survivant aura l'usufruit de la moitié des biens qui composent l'hérédité. Si le conjoint concourt avec des ascendants, il prendra les deux tiers de l'hérédité. S'il n'y a que des collatéraux, le conjoint a droit à toute la succession. Article 794. Le conjoint divorcé ou séparé de corps ne succède pas. § IV. — De l'État et des hospices. Article 795. A défaut de parents et de conjoint, la succession est acquise à l'État. Les biens que l'État recueille formeront un fonds spécial destiné à l'instruction et à l'éducation des classes ouvrières. Article 796. Les hospices succèdent, de préférence à l'État, 1° aux biens délaissés par les orphelins décédés sans héritiers, 2° aux effets mobiliers, tels que les vêtements, apportés par les malades décédés dans un hôpital. § V. — Du retour successoral. Article 797. Les ascendants succèdent aux choses par eux données à leurs enfants ou descendants décédés sans postérité. Le même droit appartient à l'adoptant sur les biens donnés à l'adopté. Article 798. Le retour s'exerce sur les biens donnés qui se trouvent en nature dans la succession. Le prix des biens aliénés, les actions en reprise, et les biens acquis en remploi ou en échange retournent également au donateur. CHAPITRE IV. De la succession testamentaire. SECTION Ier. De la forme des testaments. § Ier. — Des testaments ordinaires. Article 799. Un testament pourra être olographe, ou fait par acte public, ou dans la forme mystique. Article 800. Un testament ne pourra être fait dans le même acte, par deux ou plusieurs personnes, soit au profit d'un tiers, soit à titre de disposition réciproque et mutuelle. Article 801. Le testament olographe ne sera point valable, s'il n'est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur. Article 802. Le testament public est reçu par un notaire, en présence de deux témoins. Le testateur déclarera au notaire, en présence des témoins, sa volonté, qui sera rédigée par écrit par les soins du notaire. Lecture du testament sera donnée au testateur et aux témoins. Le testament devra être signé par le testateur; s'il déclare qu'il ne sait ou ne peut signer, il sera fait dans l'acte mention de sa déclaration. Le testament sera signé par le notaire et par les témoins; néanmoins, dans les campagnes, il suffira qu'un des témoins signe. Article 803. Le testament mystique ou secret peut être écrit par le testateur ou par un tiers; il doit en tout cas être signé par le testateur. Le papier qui contient les dispositions ou celui qui sert d'enveloppe sera clos de manière que le testament ne puisse être enlevé sans bris ni fracture. Le testateur le remettra ainsi clos au notaire et à deux témoins, ou il le fera clore en leur présence, et il déclarera que le contenu de ce papier est son testament écrit et signé de lui, ou écrit par un autre et signé de lui. Sur ce papier ou sur l'enveloppe, le notaire dressera l'acte de suscription qui mentionnera le fait de la remise, la déclaration du testateur, le mode de clôture, et la présence des témoins. L'acte sera signé par le testateur, les témoins et le notaire. Si le testateur, par un empêchement survenu depuis la signature du testament, ne peut signer l'acte de suscription, le notaire fera mention de sa déclaration. Tout ce que dessus sera fait de suite cl sans divertir à autres actes. Article 804. Ceux qui ne savent ou ne peuvent lire ne pourront faire de dispositions dans la forme du testament mystique. Celui qui sait lire, mais qui n'a pu signer ses dispositions quand il les a fait écrire, déclarera les avoir lues et indiquera la cause qui l'a empêché de les signer; le notaire en fera mention dans l'acte de suscription. Article 805. Le testateur qui ne peut pas parler pourra disposer dans la forme mystique, en écrivant au haut de l'acte de suscription, en présence du notaire et des témoins, que l'acte qu'il leur présente est son testament. On observera au surplus tout ce qui est prescrit par l'article 803. Article 806. Les témoins d'un testament doivent être mâles et majeurs. § II. — Des règles particulières à certains testaments. Article 807. Les testaments des militaires et des individus employés dans les armées pourront être reçus par un officier ayant au moins le grade de lieutenant. Celte disposition ne s'applique qu'à ceux qui sont en expédition militaire hors du territoire belge, ou qui, dans l'intérieur, se trouvent dans une place assiégée. Le testament fait dans la forme ci-dessus sera nul six mois après que le testateur sera revenu dans un lieu où il peut tester dans les formes ordinaires. Article 808. Les testaments faits dans un lieu avec lequel toute communication est interceptée à cause de la peste ou autre maladie contagieuse pourront être faits devant le juge de paix ou devant un membre du collège échevinal. Ces testaments deviendront nuls six mois après que les communications auront été rétablies dans le lieu où le testateur se trouve, ou six mois après qu'il aura passé dans un lieu où elles ne seront point interrompues. Article 809. Les testaments faits sur mer pourront être reçus par le capitaine ou patron du bâtiment, ou par ceux qui le remplacent. Ces testaments ne seront valables qu'autant que le testateur mourra en mer, ou dans les trois mois après qu'il sera descendu à terre, et dans un lieu où il peut tester dans les formes ordinaires. Article 810. Les testaments compris dans les articles ci-dessus seront reçus en présence de deux témoins et signés au moins par l'un deux; il sera fait mention de la cause pour laquelle l'autre n'a pas signé. Ces testaments seront également signés par le testateur et par ceux qui les auront reçus. Si le testateur ne sait ou ne peut signer, il en sera fait mention. § III. — Des testaments reçus en pays étranger. Article 811. Les Belges peuvent tester en pays étranger, dans les formes prescrites par les lois locales. Ils peuvent faire un testament sous signature privée, dans les formes de l'article 801, même dans les pays dont les lois n'admettent pas le testament olographe. Ils ne peuvent pas faire de testament conjonctif en pays étranger. Article 812. Les testaments faits en pays étranger ne pourront être exécutés sur les biens situés en Belgique, qu'après avoir été enregistrés au bureau du domicile du testateur, s'il en a conservé un, sinon au bureau de son dernier domicile connu en Belgique; et dans le cas où le testament contiendrait des dispositions d'immeubles qui y seraient situés, il devra être, en outre, enregistré au bureau de la situation de ces immeubles, sans qu'il puisse être exigé un double droit. Disposition générale. Article 813. Si les formalités auxquelles les divers testaments sont assujettis par les dispositions de la présente section n'ont pas été observées le testament ne peut avoir aucun effet. Le testament nul en la forme ne peut être confirmé par le testateur. Les héritiers peuvent le confirmer en renonçant au droit d'en demander la nullité. SECTION II. Des dispositions testamentaires. § Ier. — Des legs. Article 814. Toute personne pourra disposer par testament, soit sous le titre d'institution d'héritier, soit sous le titre de legs, soit sous toute autre dénomination propre à manifester sa volonté. Article 815. Les dispositions testamentaires sont universelles, ou à titre universel, ou à titre particulier. Le legs universel est la disposition par laquelle le testateur donne à une ou plusieurs personnes un droit éventuel à l'universalité des biens qu'il laissera à son décès. Le legs d'une fraction du patrimoine est un legs à titre universel, de même que le legs de tous les immeubles, ou de tout le mobilier, ou d'une quotité fixe de tous les immeubles ou de tout le mobilier. Tout autre legs ne forme qu'une disposition à titre particulier. Article 816. Le legs de la chose d'autrui est valable, s'il résulte du testament que le testateur savait que la chose ne lui appartenait pas. L'héritier a, dans ce cas, le choix d'acquérir la chose léguée pour la remettre au légataire, ou de lui en payer le juste prix. Le legs de la chose de l'héritier est valable à titre de charge, s'il résulte du testament que le testateur savait que la chose appartenait à son héritier. Article 817. La chose léguée sera délivrée avec les accessoires nécessaires, et dans l'état où elle se trouvera au jour du décès du testateur. Article 818. Lorsque celui qui a légué la propriété d'un immeuble l'a ensuite augmentée par des acquisitions, ces acquisitions, fussent-elles contiguës, ne seront pas censées, sans une nouvelle disposition, faire partie du legs. Il en sera autrement des embellissements, ou des constructions nouvelles, faites sur le fonds légué, ou d'un enclos dont le testateur aurait augmenté l'enceinte. Article 819. Si, avant le testament ou depuis, la chose léguée a été hypothéquée pour une dette de la succession, ou même pour la dette d'un tiers, ou si elle est grevée d'un usufruit, ou d'un autre droit réel immobilier, celui qui doit acquitter le legs n'est point tenu de la dégager, à moins qu'il n'ait été chargé de le faire par une disposition expresse du testateur. Article 820. Lorsque le legs est d'une chose indéterminée, l'héritier n'est pas obligé de la donner de la meilleure qualité, et il ne peut l'offrir de la plus mauvaise. Article 821. Le legs fait au créancier n'est pas censé en compensation de sa créance, ni le legs fait au domestique en compensation de ses gages. § II. — De la modalité des legs. Article 822. La disposition testamentaire est conditionnelle, quand, dans l'intention du testateur, elle ne doit avoir effet qu'autant que l'événement incertain, formant la condition, arrivera ou n'arrivera pas. Cette disposition sera caduque si le légataire décède avant l'accomplissement de la condition. Article 823. Si, dans l'intention du testateur, l'arrivée de l'événement ne fait que suspendre l'exécution de la disposition, le legs est à terme, et le légataire a droit à la chose léguée dès l'ouverture de la succession. Article 824. Si le legs est sous condition, ou à terme, le légataire peut exiger que l'héritier lui fournisse caution, ou une autre garantie suffisante. Il en est de même si le legs est fait sous une condition négative, qui dépend du fait du légataire. § III. — De la révocation des testaments et de leur caducité. Article 825. Les testaments pourront être révoqués par un changement de volonté déclaré soit dans un acte revêtu des formes légales d'un testament, soit dans un acte devant notaire, ou dans un acte sous seing privé écrit et signé par le testateur. Le testament nul comme tel, mais valable comme acte révocatoire, emportera révocation des testaments antérieurs, à moins que l'intention contraire du testateur ne résulte du second testament. Article 826. La révocation faite dans lin testament postérieur aura tout son effet, quoique ce nouvel acte tombe par le prédécès de l'héritier institué ou du légataire, ou par leur incapacité, ou par leur refus de recueillir, à moins que l'intention contraire du testateur ne résulte du second testament. Article 827. Les testaments postérieurs, qui ne révoquent pas d'une manière expresse les précédents, n'annuleront que les dispositions de ceux-ci qui sont incompatibles avec les nouvelles, ou contraires. Pour décider si les dispositions sont contraires ou incompatibles, le juge prendra uniquement en considération la volonté du testateur, en l'interprétant en fait plutôt qu'en droit. Article 828. Si le testateur aliène tout ou partie de la chose léguée, le legs est révoqué pour tout ce qui a été aliéné, à moins que l'intention contraire ne résulte des circonstances de la cause. Article 829. La survenance d'un enfant posthume révoque le testament, si le testateur ignorait en mourant que sa femme fût enceinte. Article 830. Les legs peuvent être révoqués pour cause d'inexécution des charges imposées au légataire, si ces charges ont une importance telle, que dans l'intention du testateur elles sont une condition de la libéralité. Article 831. Les legs peuvent être révoqués pour cause d'ingratitude, si le légataire a commis contre la personne ou les biens du testateur des délits que celui-ci a ignorés ou qui sont postérieurs à son décès. L'action peut être intentée par ceux qui profiteraient de la révocation; elle doit l'être dans l'année à compter du jour où ils ont pu connaître le délit. Quant aux effets de l'ingratitude, on applique les principes établis pour la révocation des donations par l'article 860. Article 832. Toute disposition testamentaire sera caduque, si le légataire n'a pas survécu au testateur, ou s'il est incapable de la recueillir. Toutefois, les descendants du légataire prédécédé ou incapable profiteront du legs dans le cas où ils jouissent du bénéfice de représentation, à moins que le testateur n'ait manifesté une volonté contraire, ou que le legs, par sa nature, ne soit attaché à la personne du légataire. Article 833. Le legs est caduc, si la chose léguée a totalement péri pendant la vie du testateur. Article 834. Lorsque le légataire ne recueille pas la chose, pour quelque cause que ce soit, elle reste aux héritiers, ou autres successeurs qui étaient grevés du legs, à moins qu'il n'y ait lieu au droit d'accroissement. Les libéralités attachées au legs qui perd son effet tomberont ou seront maintenues d'après l'intention du testateur. Article 835. Il y a lieu à accroissement au profit des colégataires, si telle est l'intention du testateur. Le testateur est réputé vouloir l'accroissement, lorsqu'il lègue une seule et même chose à plusieurs personnes, soit par une seule disposition, soit par des dispositions séparées. L'accroissement a lieu, même quand le testateur a assigné des parts à chacun des colégataires, à moins qu'il ne résulte du testament et des circonstances de la cause qu'il a voulu faire des legs distincts. L'accroissement se fait avec la charge attachée au legs qui reste sans effet, sauf au légataire à renoncer au legs qui lui accroît. § IV. — Des exécuteurs testamentaires. Article 836. Le testateur peut nommer un ou plusieurs exécuteurs testamentaires, dans les formes prescrites par l'article 825. Article 837. Celui qui ne peut pas s'obliger ne peut pas être exécuteur testamentaire. La femme mariée ne peut accepter l'exécution testamentaire qu'avec l'autorisation de son mari. Si elle est séparée de biens, soit par contrat de mariage, soit par jugement, elle le pourra, avec le consentement de son mari, ou, à son refus, avec autorisation de la justice. Article 838. Nul n'est tenu d'accepter l'exécution testamentaire; on peut y renoncer même après l'avoir acceptée. L'exécuteur testamentaire peut être révoqué par le tribunal pour les causes qui autorisent la destitution du tuteur. Ses fonctions cessent quand il tombe en déconfiture ou en faillite. Article 839. Le testateur peut donner à l'exécuteur testamentaire la saisine de tout son mobilier, ou d'une partie, mais elle ne pourra durer au delà de l'année à compter du jour où l'exécuteur testamentaire a été mis en possession. Celui-ci ne peut pas exiger la saisine, si elle ne lui a pas été donnée. L'héritier peut faire cesser la saisine, en offrant de remettre à l'exécuteur testamentaire la somme suffisante pour payer les legs mobiliers ou en justifiant de ce payement. Article 840. Les exécuteurs testamentaires feront apposer les scellés, s'il y a des héritiers mineurs, interdits ou absents. Ils feront faire, en présence de l'héritier présomptif, ou lui dûment appelé, l'inventaire des biens de la succession; ils ne peuvent pas en être dispensés par le testateur. Ils provoqueront la vente du mobilier, à défaut de deniers suffisants pour acquitter les legs. Si le produit de celte vente ne suffit point, ils procéderont à la vente des immeubles, en présence de l'héritier; avec son concours, l'aliénation pourra se faire de gré à gré. Ils veilleront à ce que le testament soit exécuté, et ils pourront, en cas de contestation sur son exécution, intervenir pour en soutenir la validité. Article 841. Le testateur peut donner d'autres pouvoirs à l'exécuteur testamentaire, pourvu qu'ils n'aient rien de contraire à l'ordre public et aux mœurs. Ainsi il peut, par un acte revêtu des solennités des testaments, prescrire la manière dont il entend être enterré, et charger un exécuteur testamentaire de veiller à l'exécution de ses dernières volontés, même de son vivant. Il peut charger l'exécuteur testamentaire de liquider la succession et de l'administrer pendant la liquidation. Les héritiers ne peuvent s'y opposer que s'ils sont tous d'accord pour partager immédiatement les biens à l'amiable. Article 842. Les pouvoirs de l'exécuteur testamentaire ne passent point à ses héritiers. Dans tous les cas où l'exécuteur cesse de gérer, avant que l'exécution du testament soit achevée, le tribunal pourvoira à son remplacement. Article 843. L'exécuteur testamentaire répond de sa gestion, comme le mandataire. S'il y a plusieurs exécuteurs testamentaires, et que le testateur ait divisé leurs fonctions, la responsabilité se divise également. Si le testateur n'a pas divisé les fonctions, un seul pourra agir au défaut des autres, et sera responsable pour le tout de sa gestion. En tous cas, ils répondent solidairement du mobilier dont ils sont saisis, à moins que la saisine ne soit partagée entre eux. Article 844. L'exécuteur testamentaire rend compte de sa gestion dans l'année du décès, sans qu'il puisse en être dispensé par le testateur; mais celui-ci peut prolonger la durée de sa gestion. Il ne peut réclamer aucun salaire. Les frais faits par l'exécuteur testamentaire pour l'apposition des scellés, l'inventaire, le compte, et les autres frais relatifs à ses fonctions, seront à la charge de la succession. CHAPITRE V. De la succession contractuelle. SECTION Ier. Des donations entre-vifs. § I. — De la forme des donations entre-vifs. Article 845. Toute donation doit se faire par acte devant notaire, avec minute; si elle n'est pas faite dans les formes légales, elle ne peut avoir aucun effet. Il n'y a d'exception que pour les dons modiques à litre de récompense ou autrement, qu'il est d'usage de faire de la main à la main. Article 846. La renonciation est soumise aux formes des donations, quand elle emporte transmission gratuite de biens, sauf dans les cas où la loi ne la considère pas comme une libéralité. Article 847. L'acceptation du donataire doit résulter d'un acte authentique, mais elle peut être tacite. La donation n'existe que lorsque l'acceptation est parvenue à la connaissance du donateur. Article 848. Le donateur et le donataire peuvent consentir par procuration authentique, donnée avec minute. Le pouvoir de donner doit être spécial; le pouvoir d'accepter peut être général pour les donations qui auraient été ou qui pourraient être faites. Une expédition de la procuration sera annexée à la minute de la donation et de l'acceptation qui serait faite par acte séparé. Article 849. La donation faite à un mineur ou à un interdit devra être acceptée par son tuteur, autorisé du conseil de famille. Le mineur émancipé pourra accepter avec l'assistance de son curateur. Néanmoins, les père et mère et les autres ascendants, quoiqu'ils ne soient ni tuteurs ni curateurs, pourront accepter les donations faites aux mineurs et interdits. Si la donation est faite par le tuteur, ou par un ascendant, l'acceptation, à défaut d'un représentant légal du donataire, se fera par un tuteur ad hoc nommé par le tribunal, sur la demande du donateur. Article 850. Le sourd-muet qui sait exprimer sa pensée peut accepter par lui-même ou par un fondé de pouvoir. S'il ne sait pas exprimer sa pensée, l'acceptation se fera par son curateur, ou, à son défaut, par un curateur ad hoc, nommé par le tribunal sur la demande du donateur. Article 851. Les incapables auront un recours, pour défaut d'acceptation, contre ceux qui sont chargés d'accepter, et, s'il y a lieu, contre le donateur tenu de provoquer la nomination d'un tuteur ou d'un curateur ad hoc. § II. — De l'irrévocabilité des donations. Article 852. Les donations mobilières n'auront d'effet que pour les meubles dont un état estimatif signé du donateur et du donataire, ou de ceux qui acceptent pour lui, aura été annexé à la minute de la donation. § III. — De l'effet des donations. Article 853. Le donateur pourra stipuler le droit de retour des objets donnés, soit pour le cas du prédécès du donataire seul, soit pour le cas du prédécès du donataire et de ses descendants. Ce droit ne pourra être stipulé qu'au profit du donateur. Article 854. L'effet du retour est de résoudre les actes de disposition faits par le donataire. Les baux seront maintenus et le donataire ne sera pas obligé de restituer les fruits. Article 855. La donation peut être révoquée pour cause d'inexécution des charges sous lesquelles elle a été faite, pour cause d'ingratitude, et pour cause de survenance d'enfants. Article 856. La révocation pour cause d'inexécution des charges est soumise aux principes qui régissent la condition résolutoire tacite dans les contrats bilatéraux. Le donataire ne restitue les fruits qu'à partir de la demande; les baux qu'il a consentis seront maintenus. Article 857. La donation ne pourra être révoquée pour cause d'ingratitude que dans les cas suivants: 1° Si le donataire a attenté à la vie du donateur; 2° S'il s'est rendu coupable envers lui de sévices, délits ou injures graves; 3° S'il lui refuse des aliments. Article 858. Toutes donations peuvent être révoquées pour cause d'ingratitude, sauf celles qui sont faites aux époux en faveur du mariage. Article 859. La demande en révocation pour cause d'ingratitude doit être formée dans l'année, à compter du jour du fait imputé au donataire ou du jour que le fait aura pu être connu par le donateur ou par ses héritiers. La révocation ne pourra être demandée par le donateur contre les héritiers du donataire, ni par les héritiers du donateur contre le donataire, à moins que le donateur ne soit décédé dans l'année où le fait a eu lieu. L'action intentée peut être continuée par les héritiers ou contre les héritiers. Article 860. Entre le donateur et le donataire, la donation est résolue rétroactivement. A l'égard des tiers, elle est résolue à partir du jour où la demande en révocation aura été rendue publique, conformément à l'article 3 de la loi hypothécaire. Les actes faits antérieurement seront maintenus à l'égard des tiers de bonne foi. Article 861. Celui qui n'avait point d'enfant ou de descendant actuellement vivant dans le temps de la donation pourra en demander la révocation, s'il lui survient un enfant légitime, ou s'il légitime un enfant naturel né depuis la donation. Si l'enfant légitime naît après la mort du donateur, la révocation, pourra être demandée par les représentants de l'enfant, en prouvant que le donateur ignorait que sa femme fût enceinte. Sont exceptées les donations faites en faveur du mariage et celles faites par les conjoints l'un à l'autre. Article 862. L'action en révocation pour survenance d'enfant doit être intentée dans l'année de la naissance de l'enfant; elle ne peut plus l'être après sa mort. Article 863. L'effet de la révocation est régi par le principe de la condition résolutoire, tel qu'il est modifié par l'article 856. Article 864. Dans les cas prévus par les articles 854, 856 et 861, l'hypothèque de la dot et des conventions matrimoniales sera maintenue, si les autres biens de l'époux donataire ne suffisent pas, et si la donation lui a été faite par le même contrat de mariage duquel résultent ces droits. SECTION II. De la succession contractuelle. § Ier. — De l'institution contractuelle faite au profit des époux. Article 865. Les père et mère, les autres ascendants, les parents collatéraux des époux, et même les étrangers, pourront disposer de tout ou partie des biens qu'ils laisseront au jour de leur décès, tant au profit des dits époux qu'au profit des enfants à naître de leur mariage, dans le cas où le donateur survivrait à l'époux donataire. Il y a lieu au droit d'accroissement entre époux codonataires. L'institution, quoique faite au profit seulement des époux ou de l'un d'eux, sera toujours, dans le cas de survie du donateur, présumée faite au profit des enfants et descendants à naître de leur mariage. Ceux-ci sont aussi appelés en cas de renonciation des époux donataires. Les enfants et descendants peuvent être institués directement, à l'exclusion des époux. Si les enfants et descendants viennent à la succession, il y a lieu au droit de représentation. Article 866. L'institution contractuelle pourra être faite cumulativement des biens présents et à venir. Si un état des biens et des dettes du donateur existants au jour de la donation est annexé à l'acte, il sera libre au donataire de s'en tenir aux biens présents, en renonçant au surplus des biens du donateur. A défaut de cet état, le donataire sera obligé d'accepter ou de répudier l'institution pour le tout, en prenant les biens, s'il accepte, dans l'état où ils se trouveront lors du décès du donateur. Article 867. Toute donation faite en faveur du mariage sera caduque si le mariage ne s'ensuit pas. L'institution contractuelle deviendra caduque si le donateur survit à l'époux donataire et à sa postérité. Article 868. Toutes donations faites aux époux par leur contrat de mariage seront, lors de l'ouverture de la succession du donateur, réductibles à la portion dont la loi lui permettait de disposer. § II. — Des dispositions entre époux, soit par contrat de mariage, soit pendant le mariage. Article 869. Les époux pourront lors du mariage, ou pendant le mariage, se faire réciproquement, ou l'un des deux a l'autre, une donation de biens présents, ou une institution contractuelle. Article 870. Les donations entre-vifs ne seront pas censées faites sous la condition de la survie du donataire, si cette condition n'est exprimée, et elles seront soumises à toutes les conditions et formes ci-dessus prescrites pour ces sortes de donations. Article 871. Les institutions contractuelles entre époux sont soumises aux règles établies par le paragraphe premier ci-dessus, sauf qu'elles ne sont point censées faites au profit des enfants issus du mariage, en cas de prédécès de l'époux donataire. Article 872. Toutes donations faites entre époux pendant le mariage, quoique qualifiées entre-vifs, seront toujours révocables. Article 873. Les donations réciproques entre époux ne pourront se faire par un seul et même acte. CHAPITRE VI. De la quotité disponible et de la réduction. SECTION Ier. De la quotité disponible et de la réserve. § Ier. — De la quotité disponible de droit commun. Article 874. Les libéralités, soit par actes entre-vifs soit par testament, ne pourront excéder une part d'enfant: la moitié des biens du disposant, s'il ne laisse à son décès qu'un enfant; le tiers, s'il laisse deux enfants; le quart, s'il en laisse trois, et ainsi de suite. Sont compris sous le nom d'enfants les descendants en quelque degré que ce soit; néanmoins, ils ne sont comptés que pour l'enfant dont ils prennent la place dans la succession du disposant. Les enfants renonçants ou indignes ne sont pas comptés pour calculer le montant de la quotité disponible. Article 875. Les libéralités ne pourront excéder la moitié des biens si, à défaut d'enfant, le défunt laisse ses père et mère ou des ascendants dans les deux lignes venant à la succession; s'il n'y a d'ascendants que dans une ligne, le disponible sera de trois quarts. L'ascendant donateur n'a pas droit à une réserve sur les biens donnés; il ne doit pas contribuer à fournir la quotité disponible. Article 876. A défaut de descendants et d'ascendants, les libéralités pourront épuiser la totalité des biens, sous la restriction des droits de l'époux survivant. Article 877. Lorsque le défunt laisse des enfants et un conjoint, celui-ci sera compte pour un enfant dans le calcul de la quotité disponible; mais il n'aura que l'usufruit de sa part. Si le conjoint concourt avec des ascendants, la portion disponible ordinaire sera réduite d'un quart au profit de l'époux réservataire. S'il n'y a que des collatéraux, la réserve de l'époux sera de la moitié des biens. Article 878. Il faut être héritier pour avoir droit à la réserve. Le successible qui renonce perd son droit à la réserve. § II. — De la quotité disponible entre époux. Article 879. L'homme ou la femme qui, ayant des enfants d'un autre lit, contracteront un second ou subséquent mariage ne pourront donner à leurs nouveaux époux qu'une part d'enfant le moins prenant, sans que, dans aucun cas, ces donations puissent excéder le quart des biens. Article 880. Les donations indirectes que les époux se feraient au delà de ce qui leur est permis sont sujettes à réduction. Les donations déguisées ou faites à personnes interposées sont nulles. Article 881. Sont réputées faites à personnes interposées les donations de l'un des époux aux enfants ou à l'un des enfants de l'autre époux, issus d'un autre mariage, et celles faites par le donateur aux parents dont l'autre époux sera héritier présomptif au jour de la donation, encore que ce dernier n'ait point survécu à son parent donataire. SECTION II. De la réduction. Article 882. Les dispositions, soit entre-vifs, soit à cause de mort, qui excèdent la quotité disponible, seront réduites à celte quotité, lors de l'ouverture de la succession. Article 883. Pour déterminer la réduction, on forme une masse de tous les biens existants lors du décès du donateur ou testateur, déduction faite des dettes. On y réunit fictivement ceux dont il a été disposé par donations. On estime les biens donnés entre-vifs à la valeur qu'ils auraient eue s'ils étaient restés dans les mains du donateur. Les choses consomptibles ou destinées à être vendues sont estimées à la valeur qu'elles avaient lors de la donation. On calcule, sur la masse ainsi composée, quelle est, eu égard à la qualité des héritiers que le donateur laisse, la quotité dont il a pu disposer. Article 884. Les libéralités faites à des non-réservataires s'imputent sur la quotité disponible. Il en est de même des libéralités faites avec préciput à un réservataire qui accepte. Article 885. La valeur en pleine propriété des biens aliénés, soit à fonds perdu soit avec réserve d'usufruit, à l'un des héritiers présomptifs en ligne directe est imputée sur la portion disponible; l'excédent, s'il y en a, sera réductible au profit de la masse. Celte imputation et cette réduction ne pourront être demandées par les autres héritiers présomptifs en ligne directe qui auraient consenti à l'aliénation. Article 886. La réduction des dispositions entre-vifs ou testamentaires ne pourra être demandée que par les réservataires, par leurs héritiers ou ayants cause. Article 887. Si la disposition par acte entre-vifs ou par testament est d'un usufruit ou d'une rente viagère, dont le revenu excède celui de la quotité disponible, les réservataires auront l'option ou d'exécuter la disposition, ou de faire l'abandon de la propriété de la quotité disponible. Il en est de même si la disposition est faite en nue propriété d'une quotité excédant la portion disponible. Article 888. Lorsque la valeur des donations entre-vifs excède ou égale la quotité disponible, toutes les dispositions testamentaires seront caduques. Article 889. Lorsque les dispositions testamentaires excèdent soit la quotité disponible, soit la portion de cette quotité qui reste après avoir déduit la valeur des donations entre-vifs, la réduction sera faite au marc le franc, sans distinction entre les legs universels et les legs particuliers. Article 890. Néanmoins, dans tous les cas où le testateur aura expressément déclaré qu'il entend que tel legs soit acquitté de préférence aux autres, celte préférence aura lieu, et le legs ne sera réduit qu'autant que la valeur des autres ne remplirait pas la réserve légale. Article 891. Après avoir épuisé la valeur de tous les biens compris dans les legs, on réduira les donations entre-vifs, en commençant par la dernière, et ainsi de suite en remontant des dernières aux plus anciennes. Si l'un des donataires est insolvable, l'héritier pourra demander la réduction des donations antérieures. Article 892. La réduction se fait en nature. Toutefois, si la donation réductible a été faite par préciput à l'un des réservataires venant à la succession, il pourra retenir, sur les biens donnés, sa part dans la réserve, si les biens non disponibles sont de même espèce. Si les biens ne sont pas de même espèce, la réduction de l'excédent se fait en nature, quand le retranchement en peut être opéré commodément. Dans le cas contraire, si l'excédent est de plus de moitié de la valeur de l'immeuble, le donataire doit rapporter l'immeuble en totalité, sauf à prélever sur la masse la valeur de la portion disponible. Si cette portion excède la moitié de la valeur de l'immeuble, le donataire peut retenir l'immeuble en totalité, sauf à moins prendre et à récompenser ses cohéritiers en argent ou autrement. Article 893. L'action en réduction ou revendication pourra être exercée par les héritiers contre les tiers détenteurs des biens faisant partie des donations et aliénés par les donataires, de la même manière et dans le même ordre que contre les donataires eux-mêmes, et discussion préalablement faite de leurs biens. Celte action devra être exercée suivant l'ordre des dates des aliénations, en commençant par la plus récente. Article 894. Les droits réels consentis par le donataire tombent par l'effet de la réduction, sauf l'application de l'exception établie par l'article 854. Article 895. Le donataire restitue les fruits et les intérêts de ce qui excède la portion disponible, à compter du jour du décès du donateur, si la demande en réduction a été faite dans l'année, sinon du jour de la demande. CHAPITRE VII. De la transmission de l'hérédité. SECTION Ier. Transmission de la propriété. Article 896. La propriété des biens héréditaires passe de plein droit à tous les successeurs ab intestat, testamentaires ou contractuels, dès l'instant de l'ouverture de la succession. Article 897. La donation entre-vifs transmet la propriété de la chose donnée au donataire, dès qu'elle est parfaite, sans qu'il soit besoin de tradition. A l'égard des tiers, on applique les principes établis aux titres Des obligations, De la vente et Des hypothèques. Article 898. L'institution contractuelle transmet au donataire le titre d'héritier; le donateur ne peut plus disposer, à titre gratuit, des biens compris dans la donation, si ce n'est pour sommes modiques, à titre de récompense, ou autrement; il conserve le droit d'en disposer à titre onéreux. L'institution doit être transcrite. Dans le cas prévu par l'article 866, premier paragraphe, le donataire aura le droit de revendiquer les biens présents qui auraient été aliénés. Article 899. La succession ouverte, quoique non acceptée, se transmet aux héritiers des successeurs ab intestat et testamentaires, ainsi que des donataires universels. SECTION II. Transmission de la possession. § Ier. — De la succession ab intestat. Article 900. Les héritiers légitimes et naturels sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt. Les successeurs spéciaux doivent demander la délivrance aux héritiers saisis. Article 901. L'État doit se faire envoyer en possession par justice. L'administration des domaines qui prétend droit à la succession est tenue de faire apposer les scellés et de faire dresser inventaire, dans les formes prescrites pour l'acceptation des successions sous bénéfice d'inventaire. Elle doit demander l'envoi en possession au tribunal de première instance dans le ressort duquel la succession est ouverte. Le tribunal ne peut statuer sur la demande qu'après avoir entendu le procureur du roi. Si l'administration ne remplit pas les formalités prescrites par le présent article, elle pourra être condamnée aux dommages-intérêts envers les héritiers, s'il s'en présente. § II. — De la succession testamentaire. Article 902. Les légataires universels et à titre universel ont la saisine au même titre que les successeurs ab intestat. Article 903. Tout testament olographe sera, avant d'être misa exécution, présenté au président du tribunal de première instance de l'arrondissement dans lequel la succession est ouverte. Ce testament sera ouvert, s'il est cacheté. Le président dressera procès-verbal de la présentation, de l'ouverture et de l'état du testament, dont il ordonnera le dépôt entre les mains d'un notaire. Si le testament est mystique, sa présentation, son ouverture, sa description et son dépôt seront faits de la même manière; mais l'ouverture ne pourra se faire qu'en présence du notaire et des témoins, signataires de l'acte de suscription, qui se trouveront sur les lieux, ou eux appelés. Article 904. Le notaire qui a dans ses minutes un testament de quelque nature qu'il soit, doit à la mort du testateur, en donner connaissance aux parties intéressées. Article 905. Les légataires universels et à titre universel, institués par un testament olographe ou mystique, seront tenus de se faire envoyer en possession par une ordonnance du président mise au bas d'une requête, à laquelle sera joint l'acte de dépôt. L'envoi en possession est subordonné à la production d'un testament ayant une existence légale en la forme. L'appel de la décision du président sera interjeté et jugé comme en matière de référé. Si le légataire est envoyé en possession, les successeurs légitimes pourront requérir des mesures conservatoires, à charge par eux d'attaquer le testament. Article 906. Les légataires à titre particulier doivent demander la délivrance des choses qui leur sont léguées au successeur ab intestat ou testamentaire débiteur du legs; si celui-ci ne consent pas volontairement la délivrance, les légataires devront se pourvoir en justice. Article 907. Les frais de la demande en délivrance sont à la charge de la succession, sans qu'il puisse en résulter de réduction de la réserve légale. Les droits d'enregistrement sont dus par le légataire. Le tout, s'il n'en a été autrement ordonne par le testateur. Chaque legs pourra être enregistré séparément, sans que cet enregistrement profite à aucun autre qu'au légataire ou à ses ayants cause. Article 908. Le légataire, qui n'a pas obtenu la délivrance, ne peut se mettre en possession de la chose léguée, ni agir contre les tiers détenteurs. Les légataires particuliers et tous légataires en usufruit n'ont droit aux fruits ou intérêts qu'à compter du jour de la demande en délivrance, ou du jour que cette délivrance leur a été volontairement consentie. Par exception, les fruits ou intérêts courent au profit de légataire, dès le jour du décès: 1° lorsque le testateur a expressément déclaré sa volonté à cet égard dans le testament; 2° lorsqu'une rente viagère ou une pension a été léguée à titre d'aliments. § III. — De la succession contractuelle. Article 909. Les héritiers contractuels sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt. Ceux qui sont institués à litre particulier sont assimilés aux légataires particuliers. CHAPITRE VIII. De l'acceptation et de la répudiation des successions. SECTION Ier. Des successions ab intestat et testamentaires. § Ier. — De l'exception dilatoire. Article 910. Nul n'est tenu d'accepter une succession qui lui est échue. Article 911. Une succession peut être acceptée purement et simplement ou sous bénéfice d'inventaire. Article 912. L'héritier a trois mois pour faire inventaire, à compter du jour de l'ouverture de la succession. Il a de plus, pour délibérer sur son acceptation ou sur sa renonciation, un délai de quarante jours, qui commencent à courir du jour de l'expiration des trois mois donnés pour l'inventaire. Après l'expiration de ces délais, l'héritier, en cas de poursuite dirigée contre lui, peut demander un nouveau délai, que le tribunal saisi de la contestation accorde ou refuse suivant les circonstances. Article 913. Si l'héritier renonce ou accepte sous bénéfice d'inventaire, lorsque les délais sont expirés ou avant, les frais par lui faits légitimement jusqu'à cette époque sont à la charge de la succession. Les frais de poursuite faits par les créanciers, à l'expiration du délai de trois mois et quarante jours, sont à la charge de la succession, si l'héritier justifie, ou qu'il n'avait pas eu connaissance du décès, ou que les délais ont été insuffisants soit à raison de la situation des biens, soit à raison des contestations survenues; s'il n'en justifie pas, les frais restent à sa charge personnelle. Article 914. Pendant la durée de ces délais, l'héritier ne peut être contraint à prendre qualité, et il ne peut être obtenu contre lui de condamnation. Après l'expiration des délais, les créanciers peuvent l'obliger à se prononcer; et s'il reste dans l'inaction, le faire condamner comme héritier pur et simple. Article 915. L'héritier est tenu de veiller à la conservation de l'hérédité avec les soins d'un bon père de famille; il doit faire les actes conservatoires, de surveillance et d'administration provisoire; et il est responsable du préjudice que les créanciers et les légataires éprouvent de l'inaccomplissement de cette obligation; s'il y a dans la succession des objets susceptibles de dépérir ou dispendieux à conserver, l'héritier doit procéder à la vente, après s'être fait autoriser par justice. Cette vente se fera par officier public, après les affiches et publications réglées par le Code de procédure. Article 916. S'il y a des héritiers appelés au défaut de celui qui reste dans l'inaction après le délai de trois mois et quarante jours, ils pourront demander que le tribunal fixe au successible un délai dans lequel il sera tenu d'accepter ou de répudier la succession. S'il ne se prononce pas, il sera réputé renonçant, et les héritiers subséquents auront un nouveau délai de trois mois et quarante jours à partir de l'expiration du délai fixé par le juge. Le droit héréditaire est prescrit après trente ans. § II. — De l'acceptation. Article 917. L'acceptation peut être expresse ou tacite. Elle est expresse, quand le successible manifeste par un écrit l'intention d'être héritier. Elle est tacite, quand il fait un acte qui suppose nécessairement son intention d'accepter; on ne peut pas considérer comme tel l'acte qu'il a le droit de faire en une autre qualité que celle d'héritier. Article 918. La donation, vente ou transport que fait de ses droits successifs un des cohéritiers, soit à un étranger, soit à tous ses cohéritiers, soit à quelques-uns, emporte de sa part acceptation de la succession. Il en est de même: 1* de la renonciation, quoique gratuite, que fait un des héritiers au profit d'un ou de plusieurs de ses cohéritiers; 2° de la renonciation qu'il fait même au profit de tous ses cohéritiers indistinctement, lorsqu'il reçoit le prix de sa renonciation. Article 919. L'héritier qui a diverti ou recelé des effets d'une succession, ou qui a omis sciemment et de mauvaise foi de les comprendre dans l'inventaire, est déchu de la faculté d'y renoncer et de l'accepter sous bénéfice d'inventaire; il demeure héritier pur et simple, nonobstant sa renonciation, sans pouvoir prétendre aucune part dans les objets divertis, recélés ou omis. Article 920. L'acceptation ne peut être attaquée que pour cause de dol ou de violence; l'héritier ne peut pas réclamer sous prétexte de lésion: si l'on découvre un testament inconnu lors de l'acceptation, il ne sera tenu d'acquitter les legs que jusqu'à concurrence de l'actif héréditaire. Article 921. Lorsque celui à qui une succession est échue est décédé sans l'avoir acceptée ou répudiée, il transmet son droit à ses héritiers. Si ceux-ci ne sont pas d'accord pour accepter ou pour répudier l'hérédité, celui qui accepte acquiert seul la succession avec les charges. § III. — De la renonciation. Article 922. La renonciation doit être faite au greffe du tribunal de première instance dans l'arrondissement duquel la succession s'est ouverte, sur un registre particulier tenu à cet effet. Article 923. L'héritier renonçant est censé n'avoir jamais été héritier; sa part passe à ceux qui l'auraient recueillie, s'il n'avait pas été appelé à la succession. L'accroissement résultant de la renonciation d'un héritier est toujours volontaire. Article 924. L'héritier non réservataire qui renonce à la succession peut retenir le don entre-vifs, ou réclamer le legs à lui fait par le défunt. Il ne peut pas renoncer sous la condition que la libéralité soit valable. Article 925. Les créanciers de celui qui renonce en fraude de leurs droits peuvent attaquer la renonciation et se faire autoriser par justice à accepter la succession. Dans ce cas, la renonciation n'est annulée qu'en faveur des créanciers, et jusqu'à concurrence seulement de leurs créances; elle ne l'est pas au profit de l'héritier qui a renoncé. SECTION II. Des successions contractuelles. Article 926. Les héritiers contractuels peuvent accepter ou renoncer, comme les héritiers légitimes et testamentaires. Les principes qui régissent l'acceptation et la renonciation leur sont applicables. SECTION III. Du bénéfice d'inventaire. Article 927. La déclaration d'un héritier, qu'il entend ne prendre cette qualité que sous bénéfice d'inventaire, doit être faite au greffe du tribunal de première instance dans l'arrondissement duquel la succession s'est ouverte; elle doit être inscrite sur le registre destiné à recevoir les actés de renonciation. Le greffier fera transcrire cette déclaration dans les huit jours, ail bureau des hypothèques, sur un registre à ce destiné. La déclaration sera inopérante si le testateur a interdit l'acceptation bénéficiaire. Article 928. Cette déclaration n'aura d'effet qu'autant qu'elle est précédée ou suivie d'un inventaire fidèle et exact de tous les biens de la succession, dans les formes réglées par le Code de procédure et dans les délais déterminés ci-après. Un état des immeubles dressé par un expert sera annexé à l'inventaire. Les scellés seront apposés immédiatement après l'ouverture de la succession, à moins que l'héritier ne déclare accepter purement et simplement. Article 929. L'héritier qui est en possession réelle des biens doit faire inventaire dans les trois mois à compter de l'ouverture de l'hérédité, ou du jour qu'il a appris qu'elle lui était dévolue, sinon il est censé avoir accepté la succession purement et simplement, sauf à demander un nouveau délai au tribunal. L'héritier qui a procédé à l'inventaire dans les délais, avant d'avoir fait la déclaration prescrite par l'article 927, a, pour délibérer sur son acceptation ou sur sa renonciation, un délai de quarante jours qui commencent à courir du jour de l'expiration des trois mois donnés pour l'inventaire et prolongés, s'il y a lieu, ou du jour de la clôture de l'inventaire, s'il a été terminé avant les trois mois; ce délai passé, il est considéré comme héritier pur et simple. Article 930. Si l'héritier n'est pas en possession réelle de la succession et qu'une instance soit introduite contre lui, les délais pour faire inventaire et pour délibérer courront à partir de la demande. Si aucune instance n'est introduite contre le successible, la faculté d'accepter sous bénéfice d'inventaire sera prescrite après une année à compter du jour de l'expiration de ces délais. L'héritier pourra encore accepter purement et simplement et renoncer tant que le droit héréditaire n'est pas prescrit. Article 931. Si l'un des héritiers accepte sous bénéfice d'inventaire et l'autre purement et simplement, il y aura acceptation bénéficiaire pour toute l'hérédité. Article 932. Le bénéfice d'inventaire a pour effet de séparer le patrimoine du défunt de celui de l'héritier. L'héritier conserve contre la succession les droits et actions qu'il avait contre le défunt. Il n'est obligé au payement des dettes que jusqu'à concurrence des biens qu'il a recueillis. Les créanciers du défunt conservent sur les biens de la succession le gage qu'ils avaient sur ces biens. Les créanciers et les légataires sont payés de préférence aux créanciers de l'héritier, à condition de prendre inscription sur chacun des immeubles de la succession, dans le mois qui suivra la transcription prescrite par l'article 927. Les créanciers de l'héritier ne peuvent saisir les biens de la succession tant que la liquidation de l'hérédité ne sera pas achevée. Article 933. L'administration de la succession acceptée sous bénéfice d'inventaire est soumise aux règles établies pour la déconfiture. Les créanciers pourront néanmoins charger l'héritier de liquider la succession sous les conditions qu'ils stipulent. SECTION IV. Des successions vacantes. Article 934. Lorsque, après l'expiration des délais pour faire inventaire et pour délibérer, il ne se présente personne qui réclame une succession, qu'il n'y a pas d'héritier connu, ou que les héritiers connus y ont renoncé, cette succession est réputée vacante. Il en est de même si dans une succession déférée ab intestat, les héritiers du premier degré ont renoncé. Article 935. Le tribunal de première instance, dans l'arrondissement duquel la succession est ouverte, nomme un curateur sur la demande des personnes intéressées, ou sur la réquisition du procureur du roi. Le jugement sera rendu public, à la diligence du greffier, par la voie des journaux. Article 936. Le curateur à une succession vacante est tenu, avant tout, d'en faire constater l'état par un inventaire. Il en exerce et poursuit les droits, et il répond aux demandes formées contre elle; il administre sous la charge de faire verser les deniers à la caisse dos consignations et de rendre compte à qui il appartiendra, même pendant la durée de sa gestion, si les créanciers le demandent. Article 937. Quant à l'administration, on suit les règles établies sur la déconfiture. Article 938. A partir du jugement qui nomme le curateur, les créanciers de la succession ne peuvent plus faire d'actes de poursuite. Si un héritier se présente pour recueillir la succession, les créanciers peuvent exercer leurs droits quand la succession est acceptée purement et simplement, ou sous bénéfice d'inventaire. Les délais courront à partir de l'acceptation. CHAPITRE IX. Du partage et des rapports. SECTION Ier. De l'action en partage. Article 939. Pendant l'indivision, les héritiers doivent administrer l'hérédité de commun accord, ou nommer un administrateur; s'ils ne s'entendent pas, le tribunal le nommera. Les pouvoirs du gérant sont réglés par la convention, ou, par le tribunal, lequel ne pourra autoriser que les actes d'administration provisoire. Article 940. Les héritiers peuvent, pendant l'indivision, poursuivre, chacun pour sa part héréditaire, le payement des créances; ils ne peuvent pas revendiquer les immeubles qui dépendent de la succession. Chaque héritier peut aliéner et hypothéquer les biens de la succession pour sa part indivise. Article 941. Tout ce que l'un des héritiers reçoit, pendant l'indivision, du chef de l'hérédité, et tout bénéfice qu'il retire des contrats relatifs à un bien de l'hérédité est rapporté à la masse. S'il a joui d'un bien de la succession, il rendra compte des fruits qu'il a perçus. Il doit les intérêts quand il les a reçus, et s'il jouit des intérêts dus à l'hérédité, il en devra les intérêts. Article 942. Nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision; et le partage peut toujours être provoqué, nonobstant conventions contraires. On peut cependant convenir de suspendre le partage pendant un temps limité, qui ne peut excéder cinq ans; si la convention est faite pour un terme plus long, elle est réduite à ce terme. Le testateur ne peut pas prohiber le partage, ni le suspendre. Article 943. L'action en partage est indivisible, en ce sens qu'elle doit être formée contre tous les héritiers. Si tous les héritiers n'y figurent pas, il n'y a point de partage. Article 944. Elle est imprescriptible, tant que l'indivision dure. Le partage peut être demandé, même quand l'un des héritiers aurait joui séparément des biens ou d'une partie des biens, s'il n'y a eu une convention de partage définitif, ou une possession de trente ans, à titre de propriétaire. Article 945. L'action en partage, à l'égard des cohéritiers absents ou incapables, est exercée conformément aux articles 114,126,447,5°, 480,491,500 et 504. Les non-présents sont représentés par un notaire, commis par le tribunal, à la requête de la partie la plus diligente. SECTION II. Du partage provisionnel. Article 946. Le partage provisionnel ne porte que sur la jouissance. Il est volontaire ou légal. Article 947. Le partage provisionnel volontaire ne peut être consenti que par ceux qui ont la capacité de faire un partage de propriété. Article 948. Il y a partage provisionnel légal, quand un partage définitif est fait sans l'observation des formes prescrites par la loi: 1° Par le tuteur, autorisé du conseil de famille; 2° Par le mineur émancipé, assisté de son curateur; 3° Par ceux qui ont le droit de représenter les absents ou les non-présents. Article 949. Le partage provisionnel légal est provisionnel à l'égard de tous les héritiers. Il ne peut être confirmé, en ce sens que la confirmation vaille partage définitif. SECTION III. De la forme du partage. Article 950. Entre les héritiers, aucune forme n'est requise pour la validité du partage; il peut être fait par tel acte qu'ils jugent convenable, et la preuve est régie par le droit commun. Article 951. Quand des mineurs, des interdits, des aliénés colloqués, des personnes placées sous curatelle, des absents ou des non-présents sont intéressés dans un partage, il se fera dans les formes prescrites par la loi du 12 juin 1816. Article 952. Si les héritiers majeurs ne s'entendent pas, le partage sera fait en justice, conformément aux règles qui seront établies par le Code de procédure. SECTION IV. Des rapports. Article 953. Les enfants et descendants ainsi que le conjoint qui succèdent ab intestat doivent rapporter à leurs cohéritiers tout ce qu'ils ont reçu du défunt, directement ou indirectement, à moins que le donateur ne les ait dispensés du rapport. Article 954. Le donataire qui n'était pas héritier présomptif lors de la donation, mais qui est successible au jour de l'ouverture de la succession, doit également le rapport, à moins que le donateur ne l'en ait dispensé. Article 955. La dispense de rapport peut résulter d'une donation postérieure. Dans ce cas, l'héritier dispensé du rapport et venant à la succession ne peut retenir la libéralité que jusqu'à concurrence de la quotité disponible; l'excédent est sujet à réduction. Article 956. L'héritier qui renonce à la succession ne peut retenir la libéralité, ni comme réservataire, ni comme donataire. Article 957. Le fils venant de son chef à la succession du donateur n'est pas tenu de rapporter le don fait à son père, quand même il aurait accepté la succession de celui-ci; mais si le fils ne vient que par représentation, il doit rapporter ce qui avait été donné à son père, même dans le cas où il aurait répudié sa succession. Article 958. Si les dons sont faits conjointement à deux époux, dont l'un seulement est successible, celui-ci en rapporte la moitié; si les dons sont faits à l'époux successible, il les rapporte en entier. Article 959. Le rapport ne se fait qu'à la succession du donateur. Article 960. Le rapport n'est dû que par le cohéritier à son cohéritier; il n'est pas dû aux légataires ni aux créanciers de la succession acceptée sous bénéfice d'inventaire. Article 961. Le rapport est dû de ce qui a été employé pour l'établissement d'un des héritiers ou pour le payement de ses dettes. Le prix du remplacement est une dette du remplacé, quand il se fait dans son seul intérêt. S'il profite à un ou à plusieurs enfants, il sera considéré comme une dette commune à ceux dans l'intérêt desquels il se fait. Article 962. Les frais de nourriture, d'entretien, d'éducation, d'apprentissage, les frais ordinaires d'équipement, ceux de noces et présents d'usage ne doivent pas être rapportés. Article 963. Il en est de même des profits que l'héritier a pu retirer de conventions passées avec le défunt, si ces conventions ne présentaient aucun avantage indirect lorsqu'elles ont été faites. Article 964. Pareillement le rapport n'est pas dû pour les associations entre le défunt et l'un de ses héritiers, si elles ne présentaient aucun avantage indirect lors du contrat, et si les conditions en ont été réglées par un acte authentique. Article 965. Les fruits et les intérêts des choses sujettes à rapport ne sont dus qu'à compter du jour de l'ouverture de la succession. Article 966. L'immeuble qui a péri par cas fortuit dans les mains du donataire et sans sa faute n'est pas sujet à rapport. Article 967. Le rapport se fait en nature, ou en moins prenant, par voie d'imputation ou de prélèvement. Les prélèvements se font, autant que possible, en objets de même nature, qualité et bonté, que les objets non rapportés en nature. Article 968. Le rapport se fait en nature à l'égard des immeubles. Il n'a lieu qu'en moins prenant: 1° quand le donataire a aliéné ou hypothéqué l'immeuble avant l'ouverture de la succession; il est dû de la valeur de l'immeuble à celle époque; 2° lorsqu'il y a dans la succession des immeubles de même nature, valeur et bonté, dont on puisse former des lots à peu près égaux pour les autres cohéritiers. Article 969. Dans tous les cas, il doit être tenu compte au donataire des impenses qui ont amélioré la chose, eu égard à ce dont sa valeur se trouve augmentée à l'ouverture de la succession. Il doit être tenu pareillement compte au donataire des impenses nécessaires qu'il a faites pour la conservation de la chose, encore qu'elles n'aient point amélioré le fonds. Le donataire, de son côté, doit tenir compte des dégradations qui ont diminué la valeur de l'immeuble, par son fait, ou par sa faute et négligence. Ces indemnités portent intérêt de plein droit. Article 970. Dans le cas où l'immeuble a été aliéné par le donataire, les améliorations ou dégradations faites par l'acquéreur doivent être imputées conformément à l'article précédent. Article 971. Le cohéritier qui fait le rapport en nature d'un immeuble jouit du droit de rétention jusqu'au remboursement effectif des sommes qui lui sont dues pour impenses ou améliorations. Article 972. Le rapport du mobilier n'a lieu qu'en moins prenant. Il se fait sur le pied de la valeur du mobilier, lors de la donation, d'après l'état estimatif annexé à l'acte; et, à défaut de cet état, d'après une estimation par experts, s'il s'agit d'un don manuel; dans les autres cas, la donation est nulle et les biens donnés sont sujets à revendication. Article 973. Le rapport de l'argent donné se fait en moins prenant dans le numéraire de la succession. En cas d'insuffisance, le donataire peut se dispenser de rapporter du numéraire en abandonnant, jusqu'à due concurrence, du mobilier, et, à défaut de mobilier, des immeubles de la succession. SECTION V. De la division des créances et des dettes. Article 974. Les héritiers du créancier peuvent demander la dette pour les parts dont ils sont saisis. De son côté, le débiteur a le droit de payer à chaque héritier sa part dans la créance. Article 975. Le partage peut attribuer à l'un des copartageants la totalité d'une créance, si elle n'a pas été éteinte pendant l'indivision en tout ou en partie par le payement ou par la compensation. L'héritier ne sera saisi à l'égard des tiers qu'en remplissant les formalités prescrites pour la cession des créances. Article 976. Les successeurs universels sont tenus des dettes, legs et charges de la succession à l'égard des créanciers et des légataires, et ils y contribuent pour la part dont ils sont saisis. Ils sont tenus indéfiniment, sauf s'ils acceptent la succession sous bénéfice d'inventaire. Article 977. Les successeurs universels qui ont payé une dette pour leur part héréditaire ont un recours contre les successeurs à titre particulier, ab intestat ou testamentaires, ainsi que contre les donataires entre-vifs, jusqu'à concurrence de leur émolument. Ne contribuent pas aux dettes et charges les legs rémunératoires et les legs d'aumônes. Article 978. Le principe de la division des dettes entre les successeurs reçoit exception: 1° lorsque la dette est d'un corps certain; 2° lorsque l'un des successeurs est chargé seul par le titre de l'exécution de l'obligation; 3° lorsqu'il résulte soit de la chose qui fait l'objet de l'engagement, soit de la fin qu'on s'est proposée dans le contrat, que l'intention des contractants a été que la dette ne pût s'acquitter partiellement. Dans le premier cas, le successeur qui possède la chose due, et dans le deuxième, celui qui est chargé seul de la dette, peut être poursuivi pour le tout, sauf son recours contre ses cohéritiers. Dans le troisième cas, les successeurs doivent s'entendre pour le payement intégral de la dette. Article 979. Si l'un des successeurs, sur la poursuite d'un créancier hypothécaire, paye toute la dette, il n'aura de recours contre les autres successeurs que pour la part que chacun d'eux doit personnellement en supporter, même dans le cas où il se serait fait subroger aux droits des créanciers. Article 980. En cas d'insolvabilité d'un successeur contre lequel il y a lieu à une action récursoire, sa part est répartie sur tous les autres au marc le franc. Article 981. Lorsque des immeubles de la succession sont grevés d'une rente perpétuelle, chacun des successeurs peut exiger qu'elle soit remboursée et les immeubles rendus libres avant qu'on procède au partage. Si la succession est partagée dans l'état où elle se trouve, l'immeuble spécialement grevé doit être estimé au même taux que les autres biens; il est fait déduction du capital de la rente sur le prix total; le successeur dans le lot duquel tombe cet immeuble demeure seul chargé du service de la rente, et il doit en garantir les autres successeurs. Article 982. Les titres exécutoires contre le défunt sont pareillement exécutoires contre les successeurs personnellement; néanmoins les créanciers ne pourront en poursuivre l'exécution que huit jours après la signification de ces titres à la personne ou au domicile du successeur. Article 983. Les créanciers d'un copartageant, pour éviter que le partage ne soit fait en fraude de leurs droits, peuvent s'opposer à ce qu'il y soit procédé hors de leur présence. Ils ont le droit d'y intervenir à leurs frais; mais ils ne peuvent pas attaquer, pour cause de fraude, un partage consommé, à moins qu'ils n'aient formé opposition, et qu'il n'y ait été procédé sans eux. SECTION VI. De la séparation des patrimoines. Article 984. Tout créancier du défunt et tout créancier de l'héritier peuvent demander la séparation du patrimoine du défunt d'avec le patrimoine de l'héritier. Ils seront tenus, dans les trois mois de l'ouverture de l'hérédité, de faire apposer les scellés cl dresser inventaire de tous biens de la succession et de ceux de l'héritier. Article 985. L'action doit être formée contre les créanciers dans les six mois de l'ouverture de l'hérédité. Les créanciers qui ne demandent pas la séparation des patrimoines dans ce délai sont censés y renoncer et restent créanciers personnels de l'héritier. L'héritier peut intervenir dans l'instance pour contester la demande. Article 986. Le jugement qui prononce la séparation nommera un curateur aux biens du défunt. Le curateur est chargé de liquider la succession dans les formes prescrites pour la liquidation des successions acceptées sous bénéfice d'inventaire. Il répond aux actions des créanciers. Article 987. Le jugement sera transcrit au bureau des hypothèques, sur le registre destiné aux acceptations bénéficiaires. Inscription sera prise sur chacun des immeubles de la succession par les créanciers dans les formes prescrites pour les inscriptions hypothécaires. Les hypothèques et les aliénations de meubles et d'immeubles consenties pendant les six mois par l'héritier ne pourront être opposées aux créanciers. Article 988. Entre les créanciers du défunt, la séparation des patrimoines ne produit aucun effet, sauf que ceux qui la demandent seront payés sur les biens de la succession, de préférence à ceux qui ne l'ont pas demandée. Article 989. Le droit de gage indivisible que les créanciers avaient sur les biens du défunt reste indivisible contre la succession. Article 990. Les créanciers du défunt qui obtiennent la séparation des patrimoines ont un recours subsidiaire contre l'héritier. En cas de concours de créanciers, ils seront colloqués après les créanciers personnels de l'héritier. Il en est de même dans le cas où les créanciers de l'héritier demandent la séparation des patrimoines. SECTION VII. Des effets du partage et de la garantie des lots. Article 991. Le partage échange la propriété indivise de chaque copartageant contre une part divisée; il est soumis à tous les principes qui régissent les actes translatifs de propriété. Article 992. Les cohéritiers demeurent respectivement garants, les uns envers les autres, des troubles et évictions seulement qui procèdent d'une cause antérieure au partage. La garantie n'a pas lieu si l'espèce d'éviction soufferte a été exceptée par une clause particulière et expresse de l'acte de partage; elle cesse si c'est par sa faute que le cohéritier souffre l'éviction. Article 993. Chacun des héritiers est personnellement obligé, en proportion de sa part héréditaire, d'indemniser son cohéritier de la perte que lui a causée l'éviction, en estimant la chose à la valeur qu'elle avait lors du partage. Si l'un des cohéritiers se trouve insolvable, la portion dont il est tenu doit être également répartie entre le garanti et tous les cohéritiers solvables. Article 994. La garantie à raison de l'insolvabilité du débiteur n'est pas due, quand elle n'est survenue que depuis le partage consommé. SECTION VIII. De la résolution et de la rescision du partage. Article 995. La condition résolutoire n'est pas sous-entendue dans le partage; elle peut être stipulée par les copartageants. Article 996. Il n'y a pas de partage quand tous les cohéritiers n'y ont pas consenti. Ceux qui n'ont pas participé au partage ne peuvent pas le confirmer. Article 997. Les partages peuvent être rescindés pour cause de violence ou de dol. La simple omission d'un objet de la succession ne donne pas ouverture à l'action en rescision, mais seulement à un supplément à l'acte de partage. Article 998. Il y a lieu à rescision lorsqu'un des héritiers établit à son préjudice une lésion de plus du quart. Pour juger s'il y a lésion, on estime les objets suivant leur valeur à l'époque du partage. Article 999. L'action en rescision est admise contre tout acte qui a pour objet de faire cesser l'indivision entre cohéritiers, encore qu'il fût qualifié de vente, d'échange et de transaction, ou de toute autre manière, et alors même qu'il n'y aurait aucune simulation. Article 1000. L'action n'est pas admise contre une vente de droit successif faite sans fraude à l'un des héritiers, à ses risques et périls, par ses autres cohéritiers ou par l'un d'eux. Article 1001. Le défendeur à la demande en rescision pour lésion peut en arrêter le cours et empêcher un nouveau partage, en offrant et en fournissant au demandeur le supplément de sa portion héréditaire en nature. Article 1002. Si le partage est rescindé, les copartageants rapportent à la masse les fruits et les intérêts qu'ils ont perçus. Les intérêts des soultes sont restitués à l'héritier qui les a payées. Quant aux actes de disposition, ils sont censés avoir été faits pendant l'indivision. Article 1003. Le cohéritier qui a aliéné son lot, en tout ou en partie, n'est plus recevable à intenter l'action en rescision pour dol ou violence, si l'aliénation qu'il a faite est postérieure à la découverte du dol, ou à la cessation de la violence. La lésion reste sous l'empire des règles établies au titre Des obligations. SECTION IX. Des partages faits par père, mère ou autres ascendants, entre leurs descendants. Article 1004. Les père et mère et autres ascendants pourront faire, entre leurs enfants et descendants, la distribution réelle et le partage effectif de leurs biens. Article 1005. Le partage pourra être fait entre-vifs par acte sous seing privé, ou par testament, dans les formes prescrites pour les dispositions testamentaires. S'il est fait entre-vifs, le père, la mère ou l'ascendant conservent l'usufruit des biens par eux partagés. Article 1006. L'ascendant peut faire un partage d'attribution. Article 1007. Les copartagés entre eux sont considérés comme héritiers ayant fait le partage de l'hérédité. Ils sont tenus des dettes; ils se doivent la garantie et jouissent des privilèges que la loi accorde aux copartageants. Article 1008. Si tous les biens que l'ascendant laisse au jour de son décès n'ont pas été compris dans le partage, ceux de ces biens qui n'y auront pas été compris seront partagés conformément à la loi. Les copartagés par acte entre-vifs ne peuvent plus renoncer à la succession qui fait l'objet du partage, ils peuvent seulement renoncer à la succession qui s'ouvre au décès. Article 1009. Si tous les enfants et descendants qui existent lors du partage n'y ont pas été compris, l'acte ne produira aucun effet. S'il survient un enfant après le partage, l'acte sera nul de plein droit; mais les actes faits avant la naissance seront maintenus. Article 1010. Le partage peut être attaqué pour cause de lésion de plus du quart, dans le délai de cinq ans. La prescription court à partir de la perfection du contrat, ou à partir du décès de l'ascendant, selon que le partage est entre-vifs ou à cause de mort. Article 1011. Le partage peut encore être attaqué dans le cas où il résulte du partage et des dispositions faites par préciput que l'un des copartagés a un avantage plus grand que la loi ne le permet. L'action en réduction de l'avantage ne peut être formée qu'après la mort de l'ascendant; elle dure trente ans. Article 1012. L'enfant qui, pour une des causes exprimées par les deux articles précédents, attaquera le partage fait par l'ascendant, devra faire l'avance des frais de l'estimation, et il les supportera en définitive, ainsi que les dépens de la contestation, si la réclamation n'est pas fondée. CHAPITRE X. Des substitutions. SECTION Ier. Des substitutions prohibées. Article 1013. Les substitutions sont prohibées. Toute disposition par laquelle le donataire, l'héritier institué ou le légataire est chargé de conserver et de rendre à sa mort à un tiers, est nulle, môme à l'égard du donataire, de l'héritier institué, ou du légataire. Article 1014. Sont nulles les dispositions contenant la faculté illimitée ou limitée d'élire. Article 1015. Le legs fait avec condition résolutoire est nul, quand la condition ne doit s'accomplir qu'à la mort de l'institué. Article 1016. La disposition par laquelle un tiers est appelé à recueillir le don, l'hérédité ou le legs, dans le cas où le donataire, l'héritier institué ou le légataire ne le recueillerait pas, est valable. Si la disposition peut être interprétée comme substitution vulgaire ou comme substitution fidéicommissaire, il faut l'entendre dans le premier sens, à moins qu'il ne soit certain que le disposant a voulu faire une substitution prohibée. Article 1017. Il en est de même de la disposition entre-vifs ou testamentaire par laquelle l'usufruit est donné à l'un et la nue propriété à l'autre. SECTION II. Des substitutions permises. Article 1018. Les biens dont les père et mère ont la faculté de disposer pourront être par eux donnés, en tout ou en partie, à un ou plusieurs de leurs enfants, par acte entre-vifs ou testamentaire, avec la charge de rendre. ces biens aux enfants nés et à naître, au premier degré seulement, des dits donataires. Le même droit appartient à l'aïeul, en cas de prédécès de ses petits ou arrière-petits-enfants. Article 1019. Sera valable, en cas de mort sans enfants, la disposition que le défunt aura faite par acte entre-vifs ou testamentaire, au profit d'un ou de plusieurs de ses frères ou sœurs, de tout ou partie des biens qui ne sont point réservés par la loi dans sa succession, avec la charge de rendre ces biens aux enfants nés et à naître, au premier degré seulement, des dits frères ou sœurs donataires. Le même droit appartient aux frères et sœurs, en cas de prédécès de leurs frères et sœurs, en faveur de leurs enfants ou descendants. Article 1020. Les dispositions permises par les deux articles précédents ne seront valables qu'autant que la charge de restitution sera au profit de tous les enfants nés et à naître du grevé, sans exception ni préférence d'âge ou de sexe. Article 1021. Si le grevé de restitution meurt, laissant des descendants, ceux-ci jouissent de la représentation dans tous les cas où elle est admise dans la succession ab intestat. Article 1022. Si l'enfant, le frère ou la sœur auxquels des biens auraient été donnés par actes entre-vifs, sans charge de restitution, acceptent une nouvelle libéralité par acte entre-vifs ou testamentaire, sous la condition que les biens précédemment donnés demeurent grevés de cette charge, il ne leur est plus permis de diviser les deux dispositions faites à leur profit et de renoncer à la seconde pour s'en tenir à la première, quand même ils offriraient de rendre les biens compris dans la seconde disposition. Article 1023. Le disposant peut, en donnant le disponible, imposer, avec le consentement du grevé, la charge de conserver et de rendre la réserve. Article 1024. Il y aura dans toute substitution un tuteur nommé dans l'acte par le disposant, et à son défaut par le tribunal de l'arrondissement où la succession s'ouvre. Le grevé qui n'aura pas provoqué la nomination d'un tuteur, dans le mois du décès du disposant, sera déchu du bénéfice de la disposition, s'il est en faute, et, s'il y a lieu, le droit sera déclaré ouvert au profit des appelés par le tribunal, à la diligence des appelés ou de leurs parents, ou d'office sur la poursuite du ministère public. Article 1025. Le tuteur administre les biens en bon père de famille; il doit donner caution. Il jouit d'une indemnité qui sera fixée par l'acte de nomination, et dans le silence de l'acte, par le tribunal. Article 1026. Dans le mois de l'ouverture de la succession, le tuteur fera procéder, en présence du grevé et des appelés, à l'inventaire des biens substitués, meubles et immeubles, avec estimation. Article 1027. Dans le mois qui suivra l'inventaire, le tuteur fera procéder à la vente, par affiches et enchères, de tous les meubles compris dans la disposition. Les choses mobilières qui auraient été comprises dans la disposition, à la condition expresse de les conserver en nature, seront rendues dans l'état où elles se trouveront lors de la restitution. Les objets mobiliers immobilisés par destination seront censés compris dans la substitution; le grevé sera seulement tenu d'en rendre de même espèce et d'une égale valeur. Article 1028. Le tuteur versera à la caisse d'épargne tous les deniers qu'il touchera, en attendant qu'il en fasse emploi. L'emploi sera fait conformément à ce qui aura été ordonné par l'auteur de la disposition; et dans le silence de l'acte, en rentes sur l'État ou en acquisition d'immeubles. Article 1029. Le tuteur rend chaque année compte de sa gestion au grevé, et il lui remet les fruits et intérêts, déduction faite des frais d'administration. A la fin de sa gestion, il rend un compte général à qui de droit. Article 1030. Les dispositions par acte entre-vifs ou testamentaire, à charge de restitution, seront, à la diligence du tuteur, rendues publiques, savoir: quant aux immeubles et aux objets mobiliers, par la transcription des actes sur les registres du bureau des hypothèques du lieu de la situation; et quant aux créances hypothécaires ou privilégiées, par l'inscription sur les biens affectés à l'hypothèque ou au privilège. Il en est de même des acquisitions faites à titre d'emploi. Article 1031. Le grevé peut aliéner et hypothéquer les biens substitués et transiger, avec l'autorisation du tribunal, s'il y a nécessité absolue ou avantage évident. Article 1032. Les baux faits par le tuteur ne sont obligatoires pour les substitués et pour les grevés que pour le terme de neuf ans, dans lequel le preneur se trouvera lors de l'ouverture ou lors de la caducité de la substitution. Article 1033. Le tuteur exerce les actions concernant les biens substitués avec l'autorisation du tribunal; le grevé et les substitués seront appelés dans l'instance. Article 1034. La substitution s'ouvre: 1° à la mort du grevé; 2° par l'arrivée du terme, ou par l'accomplissement de la condition fixée par le disposant; 3° lorsque le grevé est déchu du bénéfice de la disposition; 4° par l'abandon anticipé de la jouissance aux appelés, sauf les droits des tiers. Article 1035. Les femmes des grevés n'auront, sur les biens à rendre, de recours subsidiaire, en cas d'insuffisance des biens libres, que pour le capital des deniers dotaux, et dans le cas seulement où le disposant l'aurait expressément ordonné. Article 1036. Si le grevé a fait de grosses réparations ou des impenses utiles, il aura un recours contre les appelés. Il en est de même s'il a acquitté des charges qui grèvent la propriété. Article 1037. Les appelés ont la saisine; ils profitent des fruits à partir de l'ouverture de la substitution. Si les fruits sont pendants à ce moment, le grevé pourra réclamer les frais de semence et de labour. CHAPITRE XI. De Faction en pétition d'hérédité. Article 1038. L'action en pétition d'hérédité appartient à tous ceux qui ont droit à l'hérédité, en tout ou en partie, contre ceux qui la détiennent, en tout ou en partie, en qualité de successeurs du défunt. Elle est divisible. Article 1039. Celui qui détient l'hérédité est héritier apparent, quand même il serait usurpateur, ou que son titre serait notoirement nul. Article 1040. L'action dure trente ans, même quand la succession est mobilière. Article 1041. Le possesseur de mauvaise foi répond de toutes les suites de son dol; il n'a de droit contre l'héritier véritable que s'il l'a enrichi par son fait. Le possesseur de bonne foi n'est tenu qu'en tant qu'il s'enrichit. Est possesseur de bonne foi celui qui s'est mis en possession des biens d'une succession dans lu croyance qu'ils lui appartenaient. Article 1042. L'héritier apparent est tenu de délaisser au demandeur tous les biens héréditaires qui se trouvent en sa possession, ainsi que leurs accessoires, sauf à se faire indemniser par l'héritier de ce que ces choses lui ont coûté, s'il les a acquises de ses deniers. Article 1043. Le défendeur doit rendre compte à l'héritier de tout profit qu'il a retiré de la succession, quand même ce profit proviendrait des soins du possesseur. Le possesseur de bonne foi n'est tenu que jusqu'à concurrence de ce dont il s'est enrichi au jour de la demande. Le possesseur de mauvaise foi est tenu de rendre tout ce qui lui est provenu des biens de la succession, quand même il l'aurait dissipé. Le possesseur de bonne foi est présumé s'être enrichi de tout ce qui lui est provenu de l'hérédité, sauf la preuve contraire. Article 1044. Tout héritier apparent peut réclamer ses impenses nécessaires. L'héritier doit rembourser au possesseur de bonne foi toutes les dépenses utiles et même les dépenses voluptuaires. Le possesseur de mauvaise foi ne peut réclamer que la plus-value résultant de la dépense lors de la demande; il peut également emporter ce qui peut être enlevé sans détériorer le fonds. Article 1045. Le possesseur de mauvaise foi est tenu de tous les dommages-intérêts résultant des dégradations arrivées par son fait. Le possesseur de bonne foi n'est tenu que des profits qu'il a retirés des dégradations. Le possesseur de mauvaise foi répond du cas forfuit, à moins que les choses n'eussent péri également chez l'héritier. Article 1046. Si l'héritier apparent a vendu un bien héréditaire, il doit restituer le prix qu'il a reçu; s'il est de mauvaise foi, il doit la valeur quand le prix ne représente pas la valeur. L'héritier qui a fait donation de la chose doit en restituer la valeur, s'il est de mauvaise foi; le possesseur de bonne foi n'est tenu que s'il a retiré un profit de la libéralité. Article 1047. L'héritier apparent qui a acheté des biens avec les deniers de la succession doit restituer les deniers, à moins que les choses achetées ne soient devenues l'accessoire d'un bien héréditaire. Le possesseur de bonne foi ne doit compte à l'héritier que de la valeur de la chose, s'il l'a achetée plus qu'elle ne vaut. Article 1048. Le possesseur de bonne foi ne doit pas restituer les fruits qu'il a perçus avant la demande, ni les intérêts, à moins qu'il ne soit prouvé qu'il en a profité. Le possesseur de mauvaise foi doit compte même des fruits qu'il aurait pu percevoir. L'héritier apparent doit compte des intérêts des deniers héréditaires qu'il a touchés, d'après la distinction établie par l'article 1044. Article 1049. Les actes d'administration faits par l'héritier apparent sont valables, si ceux qui ont contracté avec lui sont de bonne foi. TITRE II. Des obligations. CHAPITRE PREMIER. Des sources des obligations. Article 1050. Les obligations dérivent de la loi, des contrats, des quasi-contrats, des délits et des quasi-délits. La loi ne régit les contrats qu'à défaut de conventions des parties. SECTION Ier. Des contrats. Article 1051. Le contrat est le concours de consentement par lequel une ou plusieurs personnes s'obligent à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose, envers une ou plusieurs autres, qui ont une action contre les premières. Article 1052. Le contrat est synallagmatique ou bilatéral lorsque, au moment où intervient le concours de consentement, les contractants s'obligent réciproquement les uns envers les autres, de manière que chacun est tout ensemble créancier et débiteur. Article 1053. Le contrat est unilatéral lorsqu'une ou plusieurs personnes sont obligées envers une ou plusieurs autres, sans que, de la part de ces dernières, il y ait d'engagement. Article 1054. Les contrats solennels sont ceux qui exigent un acte authentique pour leur existence. Ce sont: la donation, le contrat de mariage et l'hypothèque. Dans les contrats non solennels, l'écrit authentique ou sous seing privé ne sert qu'à la preuve. La validité ou la nullité du contrat sont indépendantes de la validité ou de la nullité de l'écrit qui le constate. SECTION II. Des conditions requises pour l'existence ou la validité des contrats. Article 1055. Les conditions requises pour l'existence d'une convention sont: 1° Le consentement des parties; 2° Un objet certain qui forme la matière de l'engagement; 3° Une cause licite de s'obliger; 4° La solennité dans les contrats solennels. La capacité n'est requise que pour la validité des conventions. Article 1056. Quand une condition requise pour l'existence d'une convention manque, il n'y a pas de contrat; le prétendu contrat est nul de plein droit et ne peut produire aucun effet. Il n'y a ni créancier, ni débiteur, ni prescription, ni confirmation. Toute personne peut opposer l'inexistence de l'acte. Article 1057. Quand une condition requise pour la validité d'un contrat manque, le contrat est nul, c'est-à-dire annulable. La nullité peut être couverte par la confirmation, et il y a lieu à la prescription de cinq ans établie par l'article 1326. L'action en nullité ne peut être formée que par la partie dans l'intérêt de laquelle elle a été établie, à moins que la nullité ne soit d'intérêt public; dans ce cas, toute partie intéressée peut s'en prévaloir. § Ier. — Du consentement. Article 1058. Le consentement se forme par le concours de l'offre et de l'acceptation. L'acceptation donnée par lettre n'oblige le pollicitant que lorsqu'elle est parvenue à sa connaissance. Le contrat se forme au lieu où l'offre a été faite, et où l'acceptation est reçue. Article 1059. Le consentement n'est point valable s'il n'a été donné que par erreur, ou s'il a été extorqué par violence, ou surpris par dol. Article 1060. L'erreur de fait ou de droit annule le contrat, s'il est évident qu'elle a été la cause déterminante de la convention. Article 1061. L'erreur n'est une cause de nullité que lorsqu'elle tombe sur une qualité de la chose que les parties ont eue principalement en vue, et qui, dans leur intention, forme la substance de la chose. L'erreur n'est pas une cause de nullité quand elle ne tombe que sur la personne avec laquelle on a l'intention de contracter, à moins que la considération de cette personne ne soit la cause principale de la convention. Article 1062. La violence exercée contre celui qui a contracté l'obligation est une cause de nullité, encore qu'elle ait été exercée par un tiers autre que celui au profit duquel la convention a été faite. Article 1063. Il y a violence lorsqu'elle est de nature à faire impression sur un être sensé, et qu'elle peut lui inspirer la crainte actuelle d'exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable. On a égard, en cette matière, à l'âge, au sexe et à la condition des personnes. Article 1064. La violence est une cause de nullité du contrat, non seulement lorsqu'elle a été exercée sur la partie contractante, mais encore lorsqu'elle l'a été sur son époux ou sur son épouse, sur ses descendants ou ses ascendants. Article 1065. La seule crainte révérentielle envers le père, la mère ou autre ascendant, sans qu'il y ait eu de violence exercée, ne suffit point pour annuler le contrat. Article 1066. Le dol est une cause de nullité de la convention, lorsque les manœuvres pratiquées par l'Une des parties sont telles que, sans ces manœuvres, l'autre n'aurait pas contracté. Toutes autres tromperies donnent lieu à une action en dommages-intérêts. Article 1067. La lésion ne vicie pas le consentement; elle n'est une cause de rescision pour les majeurs que dans le partage, et pour les conventions faites par des incapables dans les cas déterminés par la loi. Article 1068. On ne peut, en son propre nom, promettre le fait d'un tiers. Néanmoins on peut se porter fort pour un tiers, en promettant le fait de celui-ci, sauf l'indemnité contre celui qui s'est porté fort ou qui a promis de faire ratifier, si le tiers refuse de tenir l'engagement. Article 1069. On ne peut pareillement stipuler au profit d'un tiers, sauf lorsque telle est la condition d'une stipulation que l'on fait pour soi-même, ou d'une donation que l'on fait à un autre. Celui qui a fait cette stipulation ne peut plus la révoquer, si le tiers a déclaré vouloir en profiter. Article 1070. On est censé avoir promis et stipulé pour soi et pour ses héritiers et ayants cause, à moins que le contraire ne soit exprimé ou ne résulte de la nature de la convention. Les obligations personnelles passent aux héritiers quand l'action est intentée ou que le débiteur a été mis en demeure. § II. — De la capacité des parties contractantes. Article 1071. Toute personne peut contracter, si elle n'en est pas déclarée incapable par la loi. Article 1072. Les incapables de contracter sont: Les mineurs; Les aliénés interdits, et ceux qui sont séquestrés; Ceux qui sont frappés d'interdiction en vertu d'une condamnation pénale; Ceux qui sont frappés d'interdiction partielle; Et généralement tous ceux à qui la loi défend certains contrats. N° 1. — Du mineur. Article 1073. Le mineur ne peut attaquer pour cause de lésion les actes faits par le tuteur ou le père, administrateur légal, dans les limites de leurs pouvoirs, sauf à agir en dommages-intérêts contre eux. Le mineur peut demander la nullité des actes que le tuteur ou le père ont faits sans observer les formes prescrites aux litres De la tutelle et De l'autorité des père et mère. Le mineur peut agir sans être tenu de prouver qu'il est lésé. Article 1074. Le mineur peut demander la nullité des actes qu'il a faits seul sans observer les formes prescrites au titre De la tutelle; il n'est pas tenu de prouver qu'il a été lésé. S'il s'agit d'actes pour lesquels la loi ne prescrit aucune forme, le mineur en pourra demander la rescision pour cause de lésion. Article 1075. Le mineur émancipé peut demander la rescision pour cause de lésion des actes qu'il a faits seul dans les cas où la loi exige l'assistance de son curateur. Si les formes prescrites par la loi n'ont pas été observées, le mineur peut demander la nullité des actes, sans être tenu de prouver qu'il est lésé. N° 2. — De l'interdiction partielle. Article 1076. Les personnes placées sous curatelle, en vertu de l'article 503 du présent Code, peuvent agir en rescision ou en nullité, dans les cas où le mineur émancipé peut former ces actions. N° 3. — Dispositions générales. Article 1077. Dans les cas où les incapables peuvent agir en nullité, pour inobservation des formes légales, le défendeur sera admis à prouver que le vice de forme ne leur a causé aucun préjudice. Si cette preuve est faite, l'action en nullité sera rejetée. Il en est de même de la demande en nullité des actes passés par un interdit ou par un aliéné séquestré. Article 1078. Le défendeur à l'action en rescision pour cause de lésion peut en arrêter le cours en indemnisant l'incapable du préjudice que Pacte lui a causé. Le défendeur à l'action en nullité a le même droit. Article 1079. Les personnes capables de s'engager ne peuvent opposer l'incapacité de ceux avec lesquels elles ont contracté. § III. — De l'objet des contrats. Article 1080. Les choses qui sont dans le commerce peuvent seules être l'objet des conventions. Article 1081. Pour qu'une chose puisse faire l'objet d'un contrat, il faut qu'elle soit au moins déterminée quant à son espèce. La quotité de la chose peut être incertaine, pourvu qu'elle puisse être déterminée. Article 1082. Les choses futures peuvent faire l'objet d'un contrat. On ne peut cependant, sous peine de nullité, renoncer à une succession non ouverte, ni faire aucune stipulation sur une pareille succession, à moins que la convention ne se fasse avec le consentement de celui de la succession duquel il s'agit. § IV. — De la cause. Article 1083. L'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet. Article 1084. La cause est illicite quand elle est prohibée par une loi d'intérêt général, quand elle est contraire au droit public ou aux bonnes mœurs. Article 1085. Ce qui a été payé sans cause, sur fausse cause, ou sur cause illicite, est sujet à répétition. SECTION III. De l'effet des contrats. § Ier. — Dispositions générales. Article 1086. Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Article 1087. Les conventions doivent être exécutées de bonne foi. Elles obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature. § II. — De la translation de la propriété et des risques. Article 1088. La propriété des choses certaines et déterminées, meubles ou immeubles, se transfère entre les parties par le seul effet de la perfection du contrat. Quand les choses sont indéterminées, la propriété ne se transfère qu'au moment où elles sont déterminées soit par le concours de consentement, soit par la délivrance. Article 1089. La propriété des immeubles et des droits réels immobiliers se transfère à l'égard des tiers par la transcription, comme il sera dit au titre Des privilèges et hypothèques. Article 1090. A l'égard des tiers, la propriété des choses mobilières se transmet par la tradition, à condition que le créancier soit de bonne foi. En cas de conflit entre deux acheteurs successifs, dont aucun n'a été mis en possession, le premier sera préféré au second. Article 1091. La propriété des meubles incorporels se transmet à l'égard des tiers par l'inscription, comme il sera dit au titre De la vente. Article 1092. Le créancier supporte les risques de la chose, quand le débiteur a rempli son obligation en la conservant avec les soins d'un bon père de famille, à moins que le débiteur ne soit en demeure. § III. — De l'effet des conventions à l'égard des tiers. Article 1093. Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes; elles ne nuisent point aux tiers et elles ne leur profitent pas, sauf dans le cas prévu par l'article 1069. Article 1094. Les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur, à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la personne. Article 1095. Les créanciers peuvent aussi, en leur nom personnel, demander la nullité des actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits. Dans les actes à titre onéreux il faut la fraude des deux parties contractantes. Dans les actes à titre gratuit il suffit de la fraude du débiteur. L'action dure cinq ans; elle ne profite qu'aux créanciers antérieurs à l'acte frauduleux. Si l'acte est annulé, tous les droits consentis par l'acquéreur tombent; les créanciers auront l'action en revendication contre les tiers acquéreurs, sauf à ceux-ci à opposer l'usucapion. § IV. — De l'interprétation des conventions. Article 1096. Si les termes d'une convention sont clairs et ne laissent aucun doute sur l'intention des parties, il faut s'en tenir au sens littéral des clauses. Lorsque les termes paraissent contraires à l'intention, d'ailleurs évidente, des contractants, il faut suivre cette intention. Article 1097. Lorsqu'une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt l'entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet, que dans le sens avec lequel elle n'en pourrait produire aucun. Article 1098. Les termes susceptibles de deux sens doivent être pris dans le sens qui convient le plus à la matière du contrat. Article 1099. Ce qui est ambigu s'interprète par ce qui est d'usage dans le pays où le contrat est passé. Article 1100. On doit suppléer dans le contrat les clauses qui y sont d'usage, quoiqu'elles n'y soient pas exprimées. Article 1101. Toutes les clauses des conventions s'interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l'acte entier. Article 1102. Dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation. Article 1103. Quelque généraux que soient les termes dans lesquels une convention est conçue, elle ne comprend que les choses sur lesquelles il paraît que les parties se sont proposé de contracter. Article 1104. Lorsque dans un contrat on a exprimé un cas pour l'explication de l'obligation, on n'est pas censé avoir voulu par là restreindre l'étendue que l'engagement reçoit de droit aux cas non exprimés. SECTION IV. Des quasi-contrats. Article 1105. Le quasi-contrat est un fait volontaire et licite, dont la loi fait résulter une obligation envers un tiers ou une obligation réciproque entre les parties. § Ier. — De la gestion d'affaires. Article 1106. Celui qui gère volontairement l'affaire d'autrui contracte l'engagement tacite de continuer la gestion qu'il a commencée, jusqu'à ce que le maître soit en état d'y pourvoir. Il doit se charger également de toutes les dépendances de cette même affaire. Le gérant est obligé de continuer sa gestion, encore que le maître vienne à mourir avant que l'affaire soit consommée, jusqu'à ce que l'héritier ait pu en prendre la direction. Article 1107. Le gérant se soumet à toutes les obligations qui résulteraient d'un mandat exprès que lui aurait donné le propriétaire. Article 1108. Il est tenu d'apporter à la gestion de l'affaire tous les soins d'un bon père de famille. Néanmoins, les circonstances qui l'ont conduit à se charger de l'affaire peuvent autoriser le juge à modérer les dommages et intérêts qui résulteraient des fautes ou de la négligence du gérant. Article 1109. Le maître dont l'affaire a été bien administrée doit remplir les engagements que le gérant a contractés en son nom, l'indemniser de tous les engagements personnels qu'il a pris, et lui rembourser toutes les dépenses utiles ou nécessaires qu'il a faites, avec les intérêts du jour de ses avances. Article 1110. Celui qui s'est ingéré dans les affaires d'autrui dans l'intérêt du propriétaire, mais sans qu'il y ait quasi-contrat de gestion d'affaires, a action contre le maître jusqu'à concurrence du profit que le maître en a retiré lors de la demande. § II. — De la répétition de l'indû. Article 1111. Il y a lieu à la répétition de l'indû quand une chose a été payée sans être due, et que le payement a été fait par erreur. Article 1112. Le demandeur en répétition doit prouver d'abord qu'il a fait un payement indû. Il y a payement indû: quand une chose a été payée sans qu'il y eût une dette; quand la dette était due par un autre que celui qui l'a payée, ou à un autre que celui qui a reçu le payement. Article 1113. Le demandeur doit prouver ensuite qu'il a payé par erreur. Il y a présomption d'erreur lorsqu'il prouve qu'il a payé ce qu'il ne devait pas, sauf au défendeur à prouver que le payement lui a été fait à titre de libéralité, ou pour une autre juste cause. Article 1114. Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui dont il l'a indûment reçu. Si c'est par erreur, il est tenu en tant qu'il s'est enrichi; si c'est sciemment, il doit réparer tout le préjudice causé par son dol. Article 1115. L'obligation de restituer cesse dans le cas où le créancier, ayant reçu le payement de celui qui n'était pas débiteur, a supprimé son litre, sauf le recours de celui qui a payé contre le véritable débiteur, en tant que celui-ci s'est enrichi du payement. Il en est de même si le créancier a laissé prescrire la dette, ou s'il a renoncé aux privilèges, hypothèques, cautionnements qui garantissaient sa créance, ou s'il a négligé de les conserver. Article 1116. Celui qui a reçu indûment un capital ou une chose produisant des fruits doit, s'il est de mauvaise foi, restituer les intérêts et les fruits, du jour du payement; s'il est de bonne foi, il ne doit restituer les intérêts et les fruits que s'il en a profité. Article 1117. Si la chose indûment reçue est un immeuble ou un meuble corporel, celui qui l'a reçue de bonne foi n'est pas responsable de la perte, ni de la détérioration résultant de son fait; celui qui est de mauvaise foi est garant de la perte arrivée même par cas fortuit, à moins que la chose n'eût également péri chez celui qui l'a payée. Article 1118. Si celui qui a reçu de bonne foi a vendu la chose, il ne doit restituer que le prix de la vente; s'il est de mauvaise foi, il doit restituer la valeur en tant qu'elle dépasse le prix, avec tous les dommages et intérêts. Article 1119. Celui auquel la chose est restituée doit tenir compte au possesseur, même de mauvaise foi, des dépenses nécessaires qui ont conservé la chose, et des dépenses utiles jusqu'à concurrence de la plus-value qui en est résultée. Le possesseur de bonne foi a droit à tout ce qu'il a dépensé pour travaux d'amélioration et même de simple agrément; celui qui est de mauvaise foi a seulement le droit d'emporter ce qui peut être enlevé sans détérioration. SECTION V. Des délits et des quasi-délits. § Ier. — Des faits dommageables. Article 1120. Tout fait illicite de l'homme, quel qu'il soit, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Article 1121. En matière de délits et de quasi-délits, le débiteur répond même de son imprudence et de sa négligence. Article 1122. Toute lésion d'un droit conventionnel ou légal est un fait illicite et oblige l'auteur à réparer le dommage qui en résulte, même quand il aurait usé de son droit. Celui qui cause un dommage en usant de son droit, sans léser le droit d'autrui, n'est pas tenu de le réparer. Article 1123. Celui qui en plaidant ou dans l'exécution d'un jugement agit de mauvaise foi, ou avec imprudence, est tenu de réparer le dommage qu'il cause. Article 1124. L'État est soumis à la responsabilité générale, résultant du dommage causé par la lésion d'un droit. Article 1125. Il en est de même des fonctionnaires et officiers ministériels, quand il n'existe aucune convention entre eux et la partie lésée. Si le dommage est causé par l'inexécution d'une convention, on applique le principe qui régit la faute conventionnelle. Article 1126. L'action en dommages et intérêts appartient à tous ceux qui sont lésés par le délit ou le quasi-délit. Article 1127. La faute de la partie lésée ne dispense pas l'auteur du fait dommageable de répondre de sa faute. Mais le tribunal prendra cette circonstance en considération pour modérer les dommages et intérêts. Article 1128. Dans l'évaluation des dommages et intérêts le juge tiendra compte de la gravité de la faute. Article 1129. S'il y a plusieurs auteurs du fait dommageable, le tribunal divisera la condamnation; il pourra cependant, suivant les circonstances, déclarer les auteurs solidairement responsables. § II. — De la responsabilité. N° 1. — De la responsabilité du fiait d'autrui. Article 1130. On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre. Article 1131. Les père et mère sont responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs non émancipés, habitant avec eux. Article 1132. Les instituteurs et les artisans sont responsables du dommage causé par leurs élèves et apprentis pendant le temps qu'ils sont sous leur surveillance. Article 1133. Les père et mère, instituteurs et artisans cessent d'être responsables s'ils prouvent qu'ils n'ont pu empêcher le fait qui donne lieu à la responsabilité. Article 1134. Les commettants sont responsables du dommage causé par leurs préposés, dans les fonctions auxquelles ils les ont employés ou à l'occasion de ces fonctions. Les domestiques sont les préposés de leur maître; les ouvriers, de celui qui traite avec eux; les commis, de celui qui les emploie à son service. L'État est responsable, à titre de commettant, quand il agit par l'intermédiaire d'un de ses agents; il n'est pas commettant quand le fonctionnaire, quoique subordonné à l'État, exerce de son chef la mission sociale qui lui est déléguée. N° 2. — De la responsabilité du dommage causé par des animaux, ou par des choses. Article 1135. Le propriétaire d'un animal, ou celui qui s'en sert, est responsable du dommage que l'animal a causé, soit qu'il fût sous sa garde, soit qu'il fût égaré ou échappé. Article 1136. Le propriétaire d'un bois ne répond du dommage causé par le gibier qui s'y trouve que s'il s'est multiplié par sa faute, en ne le détruisant pas lui-même et en refusant aux voisins la permission de le détruire. Article 1137. On est responsable du dommage causé par le fait des choses que l'on a sous sa garde. Il en est ainsi d'une machine à vapeur qui fait explosion. Le propriétaire est présumé en faute, sauf preuve contraire. Article 1138. Le propriétaire d'un bâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsqu'elle est arrivée par une suite du défaut d'entretien ou par le vice de sa construction. Quand un bâtiment menace ruine, les voisins ont une action pour forcer le propriétaire à faire les réparations ou reconstructions nécessaires, et ils peuvent se faire autoriser à réparer le bâtiment ou à le détruire aux frais du défendeur. N° 3. — Disposition générale. Article 1139. L'action civile naissant d'un fait délictueux se prescrit d'après les règles établies par le présent Code. CHAPITRE II. Des diverses espèces d'obligations. Des obligations naturelles d'après le Code Napoléon. SECTION Ier. De l'obligation de donner, de faire ou de ne pas faire. § Ier. — En quoi consiste l'obligation de donner et celle de faire. Article 1140. L'obligation de donner emporte celle de livrer la chose. Si la chose est déterminée, le créancier peut contraindre le débiteur à lui en faire la délivrance. Si la chose est indéterminée, le créancier peut, avec l'autorisation du tribunal, faire exécuter l'obligation aux frais du débiteur. Article 1141. L'obligation de donner emporte encore celle de conserver la chose jusqu'à la livraison, à peine de dommages et intérêts envers le créancier. Article 1142. Celui qui a stipulé un fait peut exiger que ce fait soit presté, et le tribunal doit condamner le débiteur à celte prestation. Le créancier ne peut pas demander directement, et le débiteur ne peut pas offrir, des dommages et intérêts au lieu de la prestation du fait. Article 1143. Le créancier a aussi, en cas d'inexécution, le droit de demander que le tribunal l'autorise à faire exécuter l'obligation aux frais du débiteur. Article 1144. Si l'exécution directe de l'obligation de faire est impossible, l'obligation se résout en dommages et intérêts. Article 1145. Si l'obligation consiste à ne pas faire, le créancier a le droit de demander que ce qui a été fait en contravention à l'engagement soit détruit; il a aussi le droit de demander que le tribunal l'autorise à le détruire aux dépens du débiteur, sans préjudice des dommages et intérêts, s'il y a lieu. Celui qui contrevient à l'obligation de ne pas faire doit les dommages et intérêts par le seul fait de la contravention. § II. — Conséquences de l'inexécution de l'obligation. N° 1. — De la faute. Article 1146. Le débiteur doit apporter à l'exécution de son obligation tous les soins d'un bon père de famille, soit que la convention n'ait pour objet que l'utilité de l'une des parties, soit qu'elle ait pour objet leur utilité commune. Celte règle reçoit des modifications dans certains contrats, dont les effets sont déterminés aux titres qui les concernent. N° 2. — De la demeure. Article 1147. Le débiteur est constitué en demeure: 1° par une sommation ou par un acte équivalent, tel que la reconnaissance de la dette; 2° par l'effet de la convention, lorsqu'elle porte que, sans qu'il soit besoin d'acte, et par la seule échéance du terme, il sera en demeure; 3° lorsque la chose qu'il s'est obligé de donner ou de faire ne pouvait être donnée ou faite que dans un certain temps, qu'il a laissé passer. Lorsqu'il a promis de ne pas faire, il est en demeure par le seul fait de la contravention. Article 1148. Le débiteur qui est en demeure doit les dommages et intérêts. Le créancier peut de plus demander l'exécution de l'obligation et la résolution du contrat, s'il est synallagmatique. Article 1149. Le débiteur qui est en demeure supporte les risques, à moins qu'il ne prouve que la chose eût également péri chez le créancier, si elle lui eût été livrée. N° 3. — Des dommages et intérêts résultant de l'inexécution de l'obligation. Article 1150. Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au payement de dommages et intérêts, à raison de l'inexécution de l'obligation, quand il est en faute ou en demeure, encore qu'il n'y ail aucune mauvaise foi de sa part. Article 1151. Si les dommages et intérêts proviennent du retard dans l'exécution, le créancier ne peut les réclamer que lorsqu'il a mis le débiteur en demeure de remplir son obligation. Article 1152. Il n'y a lieu à aucuns dommages et intérêts toutes les fois que le débiteur justifie que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée. Il en est ainsi lorsque, par suite d'une force majeure ou d'un cas fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit. Article 1153. Le créancier a droit aux dommages et intérêts résultant de la perle qu'il a faite et du gain dont il a été privé, sauf les exceptions et modifications ci-après. Article 1154. Quand le débiteur est de bonne foi, il n'est tenu que des dommages et intérêts dont la cause a été prévue ou qu'on a pu prévoir lors du contrat. Article 1155. Le débiteur de mauvaise foi est tenu de tous les dommages et intérêts auxquels son dol a donné lieu, pourvu qu'ils en soient une suite directe et immédiate. Article 1156. Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre. Article 1157. Dans les obligations qui se bornent au payement d'une certaine somme, les dommages et intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent que dans la condamnation aux intérêts légaux. Il y a exception: 1° en cas de dol du débiteur; 2° dans la société et le cautionnement; 3° en matière de lettres de change. Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perle. Ils sont dus du jour de la demeure, sauf dans les cas où la loi les fait courir de plein droit. Article 1158. Les intérêts échus et liquidés peuvent produire des intérêts sous les conditions suivantes: 1° Il faut qu'ils soient demandés en justice; dans ce cas, les intérêts légaux courront du jour de la demande, ou qu'ils soient convenus postérieurement à l'échéance; dans ce cas, la convention en réglera le taux; 2° Il faut que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière. Article 1159. Dans les comptes courants, l'intérêt des intérêts est réglé par les usages du commerce. Article 1160. Les monts-de-piété et les caisses d'épargne sont soumis à des règlements spéciaux, quant à la capitalisation des intérêts. Article 1161. Les règles sur l'anatocisme ne s'appliquent pas aux revenus, tels que les fermages, loyers, arrérages de rentes perpétuelles ou viagères, ni aux restitutions de fruits, ni aux intérêts payés par un tiers en acquit du débiteur. SECTION II. Des obligations conditionnelles. § Ier. — De la condition en général et de ses diverses espèces. Article 1162. La condition est un événement futur et incertain, qui suspend les effets de l'obligation ou sa résolution. Article 1163. Toute condition d'une chose impossible, ou contraire aux bonnes mœurs, ou prohibée par la loi, est nulle et rend nulle l'obligation qui en dépend. Article 1164. La condition de ne pas faire une chose immorale ou illicite rend nulle l'obligation contractée sous cette condition. Article 1165. La condition casuelle est celle qui dépend du hasard et qui n'est nullement au pouvoir du créancier, ni du débiteur. Article 1166. La condition potestative est celle qui fait dépendre les effets de la convention d'un événement qu'il est au pouvoir de l'une ou de l'autre des parties contractantes de faire arriver ou d'empêcher. Article 1167. La condition mixte est celle qui dépend à la fois de la volonté de l'une des parties contractantes et de la volonté d'un tiers. Article 1168. La condition qui fait dépendre l'obligation de la pure volonté du débiteur est nulle et rend nulle l'obligation qui en dépend. Article 1169. Toute condition doit être accomplie de la manière dont les parties ont vraisemblablement voulu et entendu qu'elle le fût. Article 1170. Lorsqu'une obligation est contractée sous la condition qu'un événement arrivera dans un temps fixe, celte condition est censée défaillie lorsque le temps est expiré sans que l'événement soit arrivé. S'il n'y a point de temps fixe, la condition peut toujours être accomplie, et elle n'est censée défaillie que lorsqu'il est devenu certain que l'événement n'arrivera pas. Article 1171. Si une obligation est contractée sous la condition qu'un événement n'arrivera pas dans un temps fixe, la condition est accomplie lorsque ce temps est expiré sans que l'événement soit arrivé; elle l'est également si, avant le terme, il est certain que l'événement n'arrivera pas; et s'il n'y a pas de temps déterminé, elle n'est accomplie que lorsqu'il est certain que l'événement n'arrivera pas. Article 1172. La condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous celle condition, qui en a empêché l'accomplissement. Article 1173. La condition accomplie a un effet rétroactif au jour auquel l'engagement a été contracté. Les deux parties peuvent faire des actes de disposition pendant que la condition est en suspens; l'événement de la condition décide lesquels sont valables. S'il y a lieu de faire un bail, les deux parties devront agir de commun accord. Le bail fait par une seule partie ne liera pas l'autre. Les fruits perçus avant l'accomplissement de la condition appartiendront à celui qui sera propriétaire en vertu de la rétroactivité de la condition. Article 1174. Le créancier peut, avant que la condition soit accomplie, exercer tous les actes conservatoires de son droit. Article 1175. Si le créancier meurt avant l'accomplissement de la condition, ses droits passent à son héritier. § II. — De la condition suspensive. Article 1176. La condition suspensive, tant qu'elle n'est pas accomplie, suspend les effets de l'obligation. La propriété n'est pas transférée; le créancier n'acquiert qu'un droit de propriété conditionnel. Le débiteur ne doit pas; s'il paye par erreur, il peut répéter. Article 1177. Si la chose périt par cas fortuit, pendant que la condition est en suspens, le risque est pour le créancier. Article 1178. Si la chose s'est détériorée par la faute du débiteur, le créancier a le droit ou de résoudre l'obligation, ou d'exiger la chose dans l'état où elle se trouve; dans les deux cas, il peut réclamer des dommages et intérêts. Si la chose s'est détériorée sans la faute du débiteur, le créancier est tenu d'exécuter le contrat, en prenant la chose dans l'état où elle se trouve. § III. — De la condition résolutoire. Article 1179. L'obligation contractée sous condition résolutoire est pure et simple quant à son existence et à ses effets; sa résolution seule est suspendue. Si la condition s'accomplit, l'obligation est censée n'avoir jamais existé; les choses sont remises dans l'état où elles étaient avant le contrat; chacune des parties restitue ce qu'elle a reçu. La résolution opère de plein droit. Article 1180. Si la chose périt pendant que la condition résolutoire est en suspens, le risque est pour le créancier conditionnel. Il en est de même si la chose est détériorée sans la faute du débiteur conditionnel. Article 1181. La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera pas à son engagement. Quand il y a inexécution partielle, le juge prendra en considération l'étendue de l'engagement auquel le débiteur a manqué. La résolution, dans ce cas, n'opère pas de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention, lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution, avec les dommages et intérêts dans les deux cas. La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé un délai au débiteur, selon les circonstances. On applique, du reste, à la condition résolutoire tacite les principes qui régissent la condition résolutoire expresse. SECTION III. Des obligations à terme. Article 1182. Le terme ne suspend pas les effets de l'engagement, il en retarde seulement l'exécution. Article 1183. Lorsqu'il n'y a pas de terme stipulé, l'obligation doit être exécutée immédiatement, à moins qu'il n'y ait un terme tacite, résultant de la nature de l'obligation ou de l'intention des parties. En cas de contestation, le juge en fixera la durée. Il en est de même si le terme a été laissé à la volonté du débiteur; telle est la clause portant que le débiteur payera quand il le pourra. Article 1184. Le terme est présumé stipulé en faveur du débiteur, à moins qu'il ne résulte de la stipulation, ou des circonstances, qu'il a été convenu en faveur du créancier ou des deux parties. Dans ce dernier cas, le terme forme la loi des parties contractantes; dans les deux autres cas, celui au profit duquel le terme a été convenu peut seul y renoncer. Article 1185. Ce qui est dû à terme ne peut être exigé avant l'échéance du terme; mais ce qui a été payé d'avance ne peut être répété, même quand le débiteur aurait ignoré qu'il avait un terme, mais, dans ce cas, il peut répéter l'escompte du capital payé. Article 1186. Le débiteur ne peut plus réclamer le bénéfice du terme: 1° lorsqu'il est tombé en faillite ou en déconfiture; 2° lorsqu'il ne donne pas au créancier les garanties qu'il lui a promises; 3° lorsque les sûretés que la loi ou le contrat donne au créancier sont diminuées par son fait, ou par cas fortuit; dans ce dernier cas, le débiteur est admis à fournir des sûretés nouvelles. SECTION IV. Des obligations alternatives. Article 1187. L'obligation alternative comprend deux choses, dont l'une seulement est due, au choix du débiteur ou du créancier. Article 1188. L'obligation cesse d'être alternative, quand l'une des choses ne pouvait en faire l'objet; elle se réduit à une seule chose. Article 1189. La propriété de la chose qui sera payée n'est transmise au créancier que lorsqu'elle est déterminée par le choix du débiteur ou du créancier, bien que les deux choses soient des corps certains. Les risques, dans la même hypothèse, sont pour le créancier. Article 1190. Le choix appartient au débiteur s'il n'a pas été accordé au créancier. Article 1191. Le débiteur peut se libérer en payant l'une des deux choses promises; mais il ne peut pas forcer le créancier à recevoir une partie de l'une et une partie de l'autre. Article 1192. Si les héritiers du débiteur, ou du créancier, qui a le choix, ne s'entendent pas sur la chose qu'ils veulent payer ou recevoir, le juge leur fixera un délai; à l'expiration de ce délai, il décidera quelle chose doit être livrée. Article 1193. L'option n'a d'effet que du jour où elle a été exercée. Si le choix appartient au débiteur, il le notifiera au créancier. Article 1194. Lorsque le choix appartient au débiteur, la perte de l'une des choses, même par sa faute, réduit l'obligation à celle qui reste; le débiteur n'a pas le droit d'offrir le prix de celle qui a péri. Si toutes deux ont péri, et que le débiteur soit en faute à l'égard de l'une d'elles, il doit payer le prix de celle qui a péri la dernière. Article 1195. Lorsque le choix appartient au créancier, et que l'une des choses a péri, le créancier doit avoir celle qui reste, si l'autre a péri sans la faute du débiteur; si le débiteur est en faute, le créancier peut demander la chose qui reste, ou le prix de celle qui a péri. Si les deux choses ont péri, et que le débiteur soit en faute à l'égard des deux, le créancier peut demander le prix de l'une ou de l'autre, à son choix; si le débiteur n'est en faute qu'à l'égard de l'une, il peut demander le prix de la chose qui a péri par la faute du débiteur. Article 1196. Les mêmes principes s'appliquent au cas où il y a plus de deux choses comprises dans l'obligation alternative. SECTION V. Des obligations solidaires. § Ier. — De la solidarité entre les créanciers. Article 1197. L'obligation est solidaire entre plusieurs créanciers lorsque le titre donne expressément à chacun d'eux le droit de demander le payement du total de la créance, et que le payement fait à l'un d'eux libère le débiteur, encore que le bénéfice de l'obligation soit partageable et divisible entre les divers créanciers. Article 1198. Les créanciers solidaires sont associés pour le bénéfice de l'obligation; chacun d'eux a mandat de faire tout ce qui est avantageux aux autres; il ne peut rien faire qui pourrait leur être préjudiciable. Article 1199. Le débiteur doit payer toute la dette au créancier qui le poursuit, sans pouvoir opposer le bénéfice de division. Tant qu'il n'est pas prévenu par une poursuite, le débiteur a le choix de payer à l'un ou à l'autre des créanciers solidaires. Article 1200. La mise en demeure du débiteur par l'un des créanciers fait courir les intérêts à l'égard de tous. Article 1201. Tout acte qui interrompt la prescription à l'égard de l'un des créanciers solidaires profite aux autres créanciers. La suspension de la prescription, résultant de la minorité de l'un des créanciers, ne profite pas aux autres. Article 1202. La remise qui n'est faite que par l'un des créanciers ne libère le débiteur que pour la part de ce créancier. L'un des créanciers ne peut nover l'obligation que pour sa part. La compensation et la confusion ne produisent d'effet que pour la part du créancier qui devient débiteur ou héritier du débiteur. Il en est de même de la chose jugée et de la transaction. § II. — De la solidarité entre les débiteurs. Article 1203. Il y a solidarité entre codébiteurs lorsqu'ils sont obligés par la convention ou par la loi à prester une même chose, de manière que chacun puisse être contraint pour la totalité, et que le payement fait par un seul libère les autres envers le créancier. Article 1204. Pour qu'une dette soit solidaire il faut une stipulation expresse des parties, ou une disposition formelle de la loi. Article 1205. L'obligation peut être solidaire quoique l'un des débiteurs soit obligé différemment au payement de la même chose; par exemple, si l'un n'est obligé que conditionnellement, tandis que l'engagement de l'autre est pur et simple, ou si l'un a pris un terme qui n'est pas accordé à l'autre. Article 1206. Le créancier d'une obligation solidaire peut s'adresser à celui des débiteurs qu'il veut choisir, sans que celui-ci puisse lui opposer le bénéfice de division. Le débiteur poursuivi ne peut pas demander que ses codébiteurs soient mis en cause, même pour faire statuer sur le recours qu'il aura contre eux. Les poursuites faites contre l'un des débiteurs n'empêchent pas le créancier d'en exercer de pareilles contre les autres. Article 1207. Si la chose due a péri par la faute ou pendant la demeure de l'un ou de plusieurs des débiteurs solidaires, les autres seront tenus du prix de la chose et des dommages et intérêts, sauf leur recours contre le codébiteur par la faute duquel la chose a péri. Article 1208. Les poursuites faites contre l'un des débiteurs solidaires interrompent la prescription à l'égard de tous. Article 1209. La mise en demeure de l'un des débiteurs solidaires fait courir les intérêts à l'égard de tous. Article 1210. Le codébiteur solidaire poursuivi par le créancier peut opposer les exceptions qui résultent de la nature de la dette et celles qui lui sont personnelles; il ne peut se prévaloir des exceptions qui sont personnelles à l'un de ses codébiteurs, même pour la part que celui-ci doit supporter dans la dette. Article 1211. Le créancier qui fait remise de la solidarité à l'un des codébiteurs conserve son action solidaire contre les autres; le débiteur déchargé reste débiteur de sa part, et il est tenu des suites de l'insolvabilité de ses codébiteurs. Article 1212. Il y a remise tacite de la solidarité: 1° Lorsque le créancier reçoit divisément la part de l'un des débiteurs sans réserver ses droits et que la quittance porte que c'est pour sa part; 2° Lorsque le créancier poursuit l'un des débiteurs pour sa part, si le débiteur acquiesce, ou s'il intervient un jugement de condamnation. Le créancier qui reçoit divisément et sans réserve la portion de l'un des débiteurs dans les arrérages ou intérêts de la dette ne perd la solidarité que pour les arrérages ou intérêts échus, à moins que le payement divisé n'ait été continué chaque année, pendant dix ans consécutifs. Article 1213. L'obligation solidaire se divise de plein droit entre les débiteurs, qui n'en sont tenus entre eux que chacun pour sa part. Article 1214. Le codébiteur d'une dette solidaire, qui l'a payée en entier, ne peut répéter contre les autres que la part de chacun d'eux avec l'intérêt de ses avances. Il en est ainsi même dans le cas où le débiteur qui a payé la dette se serait fait subroger aux droits du créancier. La perle qu'entraîne l'insolvabilité de l'un d'eux se répartit par contribution entre les autres codébiteurs solvables et celui qui a fait le payement. Article 1215. Dans le cas où le créancier a fait remise de la solidarité à l'un des débiteurs, celui-ci supporte sa part dans la perle résultant de l'insolvabilité d'un ou de plusieurs des autres codébiteurs. Article 1216. Si l'affaire pour laquelle la dette a été contractée ne concerne que l'un des coobligés solidaires, celui-ci sera tenu de toute la dette à l'égard des autres codébiteurs qui ne seront, par rapport à lui, que des cautions. SECTION VI. Des obligations divisibles et indivisibles. Article 1217. L'obligation est divisible ou indivisible, selon qu'elle a pour objet ou une chose qui dans sa livraison, ou un fait qui dans sa prestation, est ou n'est pas susceptible de division, soit matérielle, soit intellectuelle. Article 1218. L'obligation est indivisible, quoique la chose ou le fait qui en est l'objet soit divisible de sa nature, si le rapport sous lequel la chose ou le fait sont considérés dans l'obligation ne rend pas celle-ci susceptible d'une exécution partielle. Article 1219. La solidarité ne rend pas l'obligation indivisible, et l'indivisibilité ne la rend pas solidaire. Article 1220. Chacun de ceux qui ont contracté ensemble une obligation indivisible en est tenu pour le total. Il en est de même des héritiers de ceux qui ont contracté une pareille dette. Article 1221. Le créancier peut poursuivre tous les débiteurs d'une obligation indivisible, chacun pour sa part, et exiger l'exécution de l'obligation pour le total contre chacun d'eux. Si l'un des débiteurs est poursuivi seul, il peut demander un délai, afin de mettre les autres en cause. Chacun sera condamné pour sa part, mais l'exécution se fera pour le total, sauf le recours de celui qui a exécuté l'obligation contre les autres. Si la dette est de nature à ne pouvoir être acquittée que par un seul des débiteurs assigné par le créancier, il sera condamné pour le total, sauf son recours. Article 1222. S'il y a plusieurs créanciers d'une obligation indivisible, chacun peut exiger en totalité l'exécution de l'obligation. L'un des créanciers ne peut faire seul remise de la totalité de la dette, ni recevoir seul le prix au lieu de la chose. S'il a seul remis la dette ou reçu le prix de la chose, les autres créanciers ne peuvent demander la chose indivisible qu'en tenant compte de la portion du créancier qui a fait la remise ou qui a reçu le prix. SECTION VII. Des obligations avec clause pénale. Article 1223. La clause pénale est celle par laquelle une personne, pour assurer l'exécution d'une convention, s'engage à quelque chose en cas d'inexécution. Article 1224. La peine est la compensation des dommages et intérêts que le créancier souffre de l'inexécution de l'obligation principale. Il ne peut demander en même temps le principal et la peine, à moins qu'elle n'ait été stipulée pour le simple retard. Article 1225. La peine est encourue par la mise en demeure du débiteur. Article 1226. Le créancier, au lieu de demander la peine stipulée contre le débiteur qui est en demeure, peut poursuivre l'exécution de l'obligation principale. Article 1227. La peine fait la loi des parties; le créancier n'est pas admis à prouver qu'elle est insuffisante, ni le débiteur qu'elle est excessive. Le juge peut néanmoins modifier la peine lorsque l'obligation principale a été exécutée en partie. Article 1228. La nullité de l'obligation principale entraîne celle de la clause pénale. La nullité de la clause pénale n'entraîne pas celle de l'obligation principale. Article 1229. Lorsque l'obligation contractée avec une clause pénale est d'une chose indivisible, la peine est encourue par la contravention d'un seul des héritiers du débiteur, et elle peut être demandée, soit en totalité contre l'héritier qui a contrevenu, soit contre chacun des cohéritiers pour leur part, et hypothécairement pour le tout, sauf leur recours contre celui qui a fait encourir la peine. Article 1230. Lorsque l'obligation contractée sous une peine est divisible, la peine n'est encourue que par celui des héritiers du débiteur qui a contrevenu à son engagement, el pour sa part seulement dans la dette, sans qu'il y ait d'action contre ceux qui ont exécuté l'obligation. Celte règle reçoit exception si la clause pénale a été ajoutée pour que le payement ne pût se faire partiellement et que l'un des héritiers ail empêché l'exécution de l'obligation pour la totalité; en ce cas, la peine entière peut être exigée contre lui et contre les autres héritiers pour leur part seulement, sauf leur recours. CHAPITRE III. De l'extinction des obligations. Article 1231. Les obligations s'éteignent: par le payement, la novation, la remise volontaire, la compensation, la confusion, la perte de la chose, la nullité ou la rescision et la prescription. SECTION Ier. Du payement. § Ier. — Du payement en général. Article 1232. Tout payement suppose une dette; ce qui a été payé sans être dû est sujet à répétition. La répétition n'est pas admise à l'égard des dettes de conscience, qui ont été volontairement acquittées. Article 1233. Une obligation peut être acquittée par toute personne qui y est intéressée, telle qu'un coobligé ou une caution. L'obligation peut même être acquittée par un tiers qui n'y est point intéressé, soit au nom et en l'acquit du débiteur, soit en son nom propre. Le tiers qui a payé la dette a un recours contre le débiteur s'il est son mandataire, ou son gérant d'affaires; s'il ne l'est pas, le tiers n'a d'action que jusqu'à concurrence de ce dont le débiteur s'est enrichi par le payement. Article 1234. L'obligation de faire ne peut être acquittée par un tiers contre le gré du créancier, lorsque ce dernier a intérêt à ce qu'elle soit remplie par le débiteur lui-même. Article 1235. Lorsque le payement a pour objet de transférer la propriété de la chose donnée en payement, il n'est valable que si celui qui paye est propriétaire de la chose et capable de l'aliéner. Si le débiteur n'est pas propriétaire de la chose, le créancier peut demander la nullité du payement, même quand il serait devenu propriétaire de la chose par l'usucapion ou la possession, à moins qu'il ne l'ait consommée. Le débiteur peut également agir en nullité du payement, même si le créancier a consommé la chose de bonne foi. Si le débiteur, quoique propriétaire, était incapable d'aliéner, il pourra agir en nullité, même quand le créancier aurait consommé la chose de bonne foi. Article 1236. Le payement doit être fait au créancier ou à quelqu'un ayant pouvoir de lui, ou qui soit autorisé par justice ou par la loi à recevoir pour lui. Le payement fait à celui qui n'aurait pas pouvoir de recevoir pour le créancier est valable, si celui-ci le ratifie ou s'il en a profité. Article 1237. Le payement fait de bonne foi à celui qui est en possession de la créance est valable, encore que le possesseur en soit par la suite évincé. Article 1238. Le payement fait au créancier n'est point valable, s'il était incapable de le recevoir, à moins qu'il ne l'ait confirmé ou que le débiteur ne prouve que la chose payée a tourné au profit du créancier. Article 1239. Le payement fait par le débiteur à son créancier, au préjudice d'une saisie ou d'une opposition, n'est pas valable à l'égard des créanciers saisissants ou opposants; ceux-ci peuvent, selon leur droit, le contraindre à payer de nouveau, sauf, en ce cas seulement, son recours contre le créancier. Article 1240. Le payement de dettes d'argent doit se faire en espèces métalliques ayant cours légal en Belgique, d'après leur valeur nominale à l'époque où la dette est payée. Le débiteur ne peut payer en billets de banque que si la loi leur donne un cours forcé. S'il y a augmentation ou diminution dans le cours légal des monnaies, la dette sera toujours de la somme numérique énoncée au contrat. La remise de billets à ordre ou de lettres de change ne tient pas lieu de payement, à moins qu'il ne soit prouvé que les parties ont voulu faire novation. Article 1241. Le débiteur d'un corps certain et déterminé est libéré par la remise de la chose en l'état où elle se trouve lors de la livraison, pourvu que les détériorations qui y sont survenues ne viennent point de sa faute, ni de celle des personnes dont il est responsable, ou qu'avant ces détériorations il ne fût pas en demeure. Article 1242. L'obligation, quoique susceptible de division, doit être exécutée entre le créancier et le débiteur, comme si elle était indivisible; le débiteur ne peut pas forcer le créancier à recevoir le payement partiel de la dette. Article 1243. Si la dette est d'une chose qui ne soit déterminée que par son espèce, le débiteur ne sera pas tenu, pour être libéré, de la donner de la meilleure qualité, mais il ne pourra l'offrir de la plus mauvaise. Article 1244. Le payement doit être exécuté dans le lieu désigné par la convention. Si le lieu n'y est pas désigné, le payement, lorsqu'il s'agit d'un corps certain et déterminé, doit être fait dans le lieu où était, au temps de l'obligation, la chose qui en fait l'objet. Hors ces deux cas, le payement doit être fait au domicile du débiteur lors du contrat. Article 1245. Les frais du payement sont à la charge du débiteur. § II. — De l'imputation des payements. Article 1246. Le débiteur de plusieurs dettes fongibles de même espèce a le droit de déclarer, lorsqu'il fait un payement intégral, quelle dette il entend acquitter, pourvu qu'il ait le droit de payer. L'imputation d'un payement partiel ne peut se faire qu'avec le consentement du créancier. Article 1247. Le débiteur d'une dette qui porte intérêt ou produit des arrérages ne peut point, sans le consentement du créancier, imputer le payement sur le capital, de préférence aux arrérages ou intérêts; le payement fait sur le capital et les intérêts, mais qui n'est point intégral, s'impute d'abord sur les intérêts. Article 1248. Lorsque le débiteur de diverses dettes a accepté une quittance par laquelle le créancier a imputé ce qu'il a reçu sur l'une de ces dettes spécialement, le débiteur ne peut plus demander l'imputation sur une dette différente, à moins qu'il n'y ait eu dol ou surprise de la part du créancier. Article 1249. Lorsque les parties n'ont pas fait l'imputation, on applique les règles suivantes: L'imputation se fait d'abord sur la dette échue, même quand elle serait moins onéreuse que celles qui ne sont point échues. Si toutes les dettes sont échues, ou si aucune ne l'est, le payement doit être imputé sur la dette que le débiteur avait pour lors le plus d'intérêt à acquitter. Si les dettes sont d'égale nature, l'imputation se fait sur celle qui doit échoir la première, et si elles sont sans terme, sur la plus onéreuse. Toutes choses égales, l'imputation se fait proportionnellement. § III. — Du payement avec subrogation. Article 1250. La subrogation est une fiction par laquelle le créancier est censé céder ses droits à un tiers qui le paye. Elle est conventionnelle ou légale. Article 1251. La subrogation est conventionnelle, lorsque le créancier, recevant son payement d'un tiers, le subroge dans tous ses droits. Celte subrogation doit être expresse et faite en même temps que le payement. Article 1252. Il y a encore subrogation conventionnelle, lorsque le débiteur emprunte une somme à l'effet de payer sa dette et de subroger le prêteur dans les droits du créancier. Celle subrogation peut aussi être consentie par celui qui a intérêt à payer, et qui est subrogé en vertu de la loi au créancier; s'il emprunte des deniers pour payer, il peut subroger le prêteur. Pour que celte subrogation soit valable, il faut que l'acte d'emprunt et la quittance soient passés devant notaires; que dans l'acte d'emprunt il soit déclaré que la somme a été empruntée pour faire le payement; que, dans la quittance, il soit déclaré que le payement a été fait des deniers fournis à cet effet par le nouveau créancier; et qu'il y ait une déclaration expresse de subrogation. Cette subrogation s'opère sans le concours de la volonté du créancier. Article 1253. Dans les deux cas de subrogation conventionnelle, le subrogé n'est saisi de la créance à l'égard des tiers qu'en remplissant les formalités prescrites pour la cession aux titres De la vente et Des hypothèques. Article 1254. La subrogation a lieu de plein droit: 1° Au profit de celui qui, étant créancier, même chirographaire, paye an autre créancier, antérieur ou postérieur, dont la créance est garantie par un privilège ou une hypothèque; 2° Au profit de celui qui, étant tenu avec d'autres ou pour d'autres au payement de la dette, avait intérêt de l'acquitter; 3° Au profit de l'héritier bénéficiaire qui a payé de ses deniers les dettes de la succession. Article 1255. La subrogation conventionnelle ou légale transporte au subrogé la créance avec tous les droits qui y sont attachés; elle a effet, tant contre le débiteur, que contre les tiers, tels que les cautions et les tiers détenteurs. Article 1256. Si la dette est garantie par un cautionnement et par une hypothèque, le tiers détenteur qui paye ne peut pas faire valoir la subrogation contre la caution. Article 1257. Lorsqu'il y a plusieurs tiers détenteurs d'immeubles hypothéqués à la même dette, celui qui la paye sera subrogé aux droits du créancier contre les autres, mais le recours se divisera en proportion de la valeur des héritages. Article 1258. La subrogation ne peut nuire au créancier. Lorsqu'il n'a été payé qu'en partie, il peut exercer ses droits pour ce qui lui reste dû, par préférence à celui dont il n'a reçu qu'un payement partiel. Si le créancier consent une seconde subrogation du restant de la créance, il transmettra son droit de préférence au nouveau subrogé. § IV. — Des offres de payement et de la consignation. Article 1259. Lorsque le créancier refuse de recevoir son payement, le débiteur peut lui faire des offres réelles, et, au refus du créancier de les accepter, consigner la somme ou la chose offerte. Article 1260. Pour que les offres réelles soient régulières, il faut: 1° Qu'elles soient faites au créancier ayant la capacité de recevoir, ou à celui qui a pouvoir de recevoir pour lui; 2° Qu'elles soient faites par une personne capable de payer; 3° Qu'elles comprennent la totalité de la somme exigible, des arrérages ou intérêts dus, des frais liquidés, et l'engagement de payer les frais non encore liquidés; 4° Qu'elles soient faites en espèces d'or ou d'argent ayant cours légal, ou en billets de banque que la loi autorise à donner en payement; 5° Que le terme soit échu, s'il a été stipulé en faveur du créancier; 6° Que la condition sous laquelle la dette a été contractée soit arrivée; 7° Qu'elles soient faites au lieu convenu pour le payement, et s'il n'y a pas de convention spéciale sur ce lieu, qu'elles soient faites à la personne du créancier, ou à son domicile, ou au domicile élu pour l'exécution de la convention; 8° Qu'elles soient faites par un notaire ou par un huissier. Article 1261. La consignation ne doit pas être autorisée par le juge; mais, pour être régulière, il faut: 1° Qu'elle soit précédée d'une sommation signifiée au créancier, et contenant l'indication du jour, de l'heure et du lieu où la chose offerte sera déposée; 2° Que le débiteur se dessaisisse de la chose offerte, en la remettant au bureau de la conservation des hypothèques dans l'arrondissement duquel les offres ont été faites; 3° Que l'officier public dresse procès-verbal de la nature des espèces offertes, du refus qu'a fait le créancier de les recevoir, ou de sa non-comparution, el enfin du dépôt; 4° Qu'en cas de non-comparution du créancier, le procès-verbal du dépôt lui soit signifié avec sommation de retirer la chose déposée. Article 1262. L'omission ou l'irrégularité des formes prescrites par les deux articles précédents n'entraîne la nullité des offres ou de la consignation, que si le créancier prouve que le payement ainsi fait lui serait préjudiciable. Article 1263. Les frais des offres réelles et de la consignation sont à la charge de celle des parties qui les a occasionnés. Article 1264. Les offres régulières refusées par le créancier le constituent en demeure, indépendamment de la consignation. Elles empêchent la mise en demeure du débiteur, et elles purgent la demeure qu'il avait encourue, si la dette est d'un corps certain; si la chose est indéterminée, le débiteur n'est plus tenu des intérêts moratoires. Article 1265. Les offres réelles libèrent le débiteur à partir de la consignation; elles tiennent lieu, à son égard, de payement, lorsqu'elles sont valablement faites; les intérêts cessent de courir, et la chose consignée demeure aux risques du créancier. Article 1266. Tant que la consignation n'a point été acceptée parle créancier, le débiteur peut la retirer; s'il la retire, les codébiteurs et les cautions ne sont point libérés. Article 1267. Lorsqu'un jugement passé en force de chose jugée a déclaré les offres et la consignation valables, le débiteur ne peut plus, même du consentement du créancier, retirer la consignation au préjudice des codébiteurs et des cautions. Article 1268. Si le créancier consent à ce que le débiteur retire les choses consignées après que les offres et la consignation ont été déclarées valables par un jugement passé en force de chose jugée, il se forme un nouveau contrat entre les parties; le créancier n'aura d'hypothèque qu'en vertu d'une nouvelle stipulation, comme en cas de novation. Article 1269. Si la chose due est un corps certain qui doit être livré où il se trouve, le débiteur doit faire sommation au créancier de l'enlever. Si le créancier n'enlève pas la chose, le débiteur pourra obtenir du juge la permission de la mettre en dépôt dans un autre lieu. Si la chose doit être livrée au domicile du créancier, le débiteur doit, au refus du créancier de la recevoir, demander au juge d'indiquer le lieu où le dépôt se fera. Article 1270. Si la dette a pour objet des choses indéterminées, telles que des quantités de blé ou de vin, le débiteur doit, avant de faire les offres, demander l'autorisation au juge, lequel fera constater si les choses dues se trouvent au domicile du débiteur, ou au lieu par lui indiqué. Les offres se feront par voie de sommation, à moins que le juge n'ordonne, d'après les circonstances, qu'elles soient faites au domicile du créancier. Le juge indiquera aussi le lieu où les choses seront consignées, au refus du créancier d'accepter les offres. SECTION II. De la novation. Article 1271. La novation s'opère de trois manières: 1° Lorsque le débiteur contracte envers son créancier une nouvelle dette qui est substituée à l'ancienne, laquelle est éteinte; 2° Lorsqu'un nouveau débiteur est substitué à l'ancien, qui est déchargé par le créancier; 3° Lorsque, par l'effet d'un nouvel engagement, un nouveau créancier est substitué à l'ancien, envers lequel le débiteur se trouve déchargé. Article 1272. La novation ne peut s'opérer que si le créancier est capable de disposer du droit qu'il a en vertu de l'obligation primitive, et si le débiteur qui contracte la nouvelle obligation est capable de s'obliger. Article 1273. La novation ne se présume pas; il faut que la volonté de l'opérer résulte clairement de ce qui s'est passé entre les parties. Article 1274. La novation par la substitution d'un nouveau débiteur peut s'opérer sans le concours du premier débiteur. Article 1275. La simple indication, faite par le débiteur d'une personne qui doit payer à sa place, n'opère point novation. Il en est de même de la simple indication, faite par le créancier, d'une personne qui doit recevoir pour lui. Article 1276. La délégation, par laquelle un débiteur donne au créancier un autre débiteur qui s'oblige envers le créancier, n'opère point novation, si le créancier ne déclare expressément qu'il entend décharger son débiteur qui a fait la délégation. Article 1277. Le créancier qui a déchargé le débiteur qui a fait la délégation n'a point de recours contre ce débiteur, si le délégué devient insolvable. Par exception, le créancier conserve sa créance s'il s'est réservé expressément un recours en cas d'insolvabilité, ou si le délégué était déjà en faillite ou tombé en déconfiture au moment de la délégation. Dans ces cas, la novation est réputée conditionnelle. Article 1278. La novation faite entre le créancier et l'un des débiteurs solidaires libère les codébiteurs. La novation opérée à l'égard du débiteur principal libère les cautions. Néanmoins, si le créancier a exigé dans le premier cas l'accession des codébiteurs, ou, dans le second cas, celle des cautions, l'ancienne créance subsiste, si les codébiteurs ou les cautions refusent d'accéder au nouvel engagement. Article 1279. Les hypothèques de l'ancienne créance ne passent point à celle qui lui est substituée, à moins que le créancier ne les ait expressément réservées. Article 1280. Le créancier peut faire cette réserve dans la novation qui s'opère par la substitution d'une nouvelle dette ou d'un nouveau créancier. Quand la novation se fait par la substitution d'un nouveau débiteur, les hypothèques de la première dette ne peuvent point passer sur les biens du nouveau débiteur, mais le créancier peut, avec le consentement de l'ancien débiteur, stipuler que les hypothèques établies sur ses biens seront maintenues pour la garantie de la dette nouvelle. Article 1281. Lorsque la novation s'opère entre le créancier et l'un des débiteurs solidaires, les hypothèques de l'ancienne créance peuvent être réservées sur les biens de celui qui contracte la nouvelle dette; elles ne peuvent être réservées sur les biens des codébiteurs libérés qu'avec leur consentement. SECTION III. De la remise de la dette. Article 1282. La remise gratuite de la dette est une libéralité soumise à toutes les règles qui régissent les donations entre-vifs, même en ce qui concerne la forme, à moins que la remise n'équivaille à un don manuel. Article 1283. Il y a présomption de libération quand le créancier remet volontairement au débiteur soit le litre original sous signature privée ou en brevet, soit la grosse du titre. Article 1284. Dans les deux cas, le débiteur qui invoque la présomption doit prouver, d'après le droit commun, que les éléments constitutifs de la présomption existent. Dans le premier cas, la preuve contraire est prohibée; elle est admise dans le second. Article 1285. La remise au débiteur de la chose qu'il a donnée en nantissement ne fait pas présumer sa libération. Article 1286. La remise conventionnelle au profit de l'un des codébiteurs solidaires ne libère pas les autres; mais le créancier ne peut réclamer la dette que déduction faite de la part de celui auquel il a fait la remise. Article 1287. La remise conventionnelle accordée au débiteur principal libère les cautions. La remise accordée à la caution ne libère pas le débiteur principal. Celle accordée à l'une des cautions ne libère pas les autres. Article 1288. La remise tacite de l'article 1283 profite à toutes les parties intéressées. Si le créancier remet son titre à l'un des débiteurs solidaires, il y a présomption de libération au profit des autres. S'il le remet à la caution, le débiteur principal et les autres cautions pourront invoquer la présomption de libération établie par l'article 1283. SECTION IV. De la compensation. Article 1289. Lorsque deux personnes se trouvent débitrices l'une envers l'autre, il s'opère entre elles une compensation qui éteint les deux dettes. Article 1290. La compensation s'opère de plein droit par la seule force de la loi, même à l'insu des débiteurs. Les deux dettes s'éteignent réciproquement, à l'instant où elles existent à la fois, jusqu'à concurrence de leurs quotités respectives. Article 1291. La compensation n'a lieu qu'entre deux dettes qui ont également pour objet une somme d'argent, ou une certaine quantité de choses fongibles de la même espèce, et qui sont également liquides et exigibles. Article 1292. Le terme de grâce n'est pas un obstacle à la compensation. Article 1293. Pour qu'il y ait lieu à la compensation, le créancier de l'une des obligations doit être débiteur personnel et principal de l'autre; et réciproquement le créancier de celle-ci doit être débiteur personnel et principal de celle-là. Article 1294. La caution peut opposer la compensation de ce que le créancier doit au débiteur principal; mais celui-ci ne peut opposer la compensation de ce que le créancier doit à la caution. Le débiteur solidaire peut opposer la compensation de ce que le créancier doit à son codébiteur. Article 1295. Si le créancier vend sa créance, le débiteur pourra opposer au cessionnaire la compensation de ce que le cédant lui devait lors de la signification de la cession, même quand la dette serait née postérieurement à la cession. Il ne peut opposer la compensation des créances postérieures à la signification. Si le débiteur était créancier lors de l'acceptation qu'il fait de la cession, il renonce aux effets de la compensation qui s'était opérée au moment où il est devenu créancier du cédant. Article 1296. Quand un créancier du créancier saisit la créance entre les mains du débiteur, celui-ci peut lui opposer la compensation de ce que le créancier lui devait avant la saisie-arrêt; si le débiteur est devenu créancier depuis la saisie-arrêt, il ne peut opposer la compensation au saisissant. Article 1297. Quand une société forme une personne morale, la compensation ne peut pas se faire entre les dettes de la société et les créances de l'un des associés, et réciproquement. Si la société ne forme pas une personne morale, la compensation a lieu. Article 1298. Lorsque les deux dettes ne sont pas payables au même lieu, la compensation s'opère en faisant raison des frais de la remise. Article 1299. La compensation n'a pas lieu au préjudice des droits acquis à un tiers. Article 1300. La compensation a lieu, quelles que soient les causes de l'une ou de l'autre des dettes, excepté dans le cas: 1° De la demande en restitution d'un dépôt irrégulier, quand la chose déposée ne doit pas être restituée en nature; 2° D'une dette que la loi déclare insaisissable, telle qu'une dette d'aliments. Article 1301. Si le débiteur paye une dette qui était de droit éteinte par la compensation, il renonce aux effets de la compensation, qui est considérée comme ne s'étant pas opérée. Le débiteur pourra exercer la créance qu'il n'a pas opposée en compensation, mais il ne peut se prévaloir, au préjudice des tiers, des cautionnements, privilèges et hypothèques qui y étaient attachés, à moins qu'il n'ait eu une juste cause d'ignorer la créance qui devait compenser sa dette. Les effets de la renonciation sont les mêmes dans le cas prévu par l'article 1295. Article 1302. Lorsqu'il y a plusieurs dettes compensables dues par la même personne, on suit pour la compensation les règles établies pour l'imputation par l'article 1249. SECTION V. De la confusion. Article 1303. Lorsque les qualités de créancier et de débiteur se réunissent dans la même personne, il se fait une confusion de droit qui éteint la dette. Article 1304. La confusion qui s'opère dans la personne du débiteur principal profite à ses cautions. Celle qui s'opère dans la personne de la caution éteint le cautionnement; elle n'éteint pas l'obligation principale. L'extinction du cautionnement par la confusion n'éteint pas l'action du créancier contre celui qui s'est rendu caution de la caution. Article 1305. Lorsque l'un des débiteurs solidaires devient l'héritier unique du créancier, ou lorsque le créancier devient l'unique héritier de l'un des débiteurs, la confusion n'éteint la créance solidaire que pour la part du débiteur ou du créancier. SECTION VI. De la perte de la chose due. Article 1306. Lorsque le corps certain et déterminé qui était l'objet de la dette vient à périr, l'obligation de délivrer la chose est éteinte, si la chose a péri sans la faute du débiteur et avant qu'il fût en demeure. Il en est de même si la chose est mise hors du commerce. Lors même que le débiteur est en demeure, s'il ne s'est pas chargé des cas fortuits, l'obligation est éteinte dans le cas où la chose fût périe chez le créancier, si elle lui eût été livrée. Le débiteur est tenu de prouver le cas fortuit qu'il allègue. Article 1307. Le voleur répond du cas fortuit, alors même que la chose eût péri chez le propriétaire, si elle n'avait pas été soustraite. Article 1308. Lorsque l'obligation est éteinte par la perte ou la mise hors du commerce de la chose, les droits et actions qui appartenaient au débiteur par rapport à cette chose passent au créancier. Article 1309. Lorsqu'un immeuble, des récoltes ou des effets mobiliers ont été assurés contre l'incendie ou tout autre fléau, la somme qui, en cas de sinistre, sera due par l'assureur devra être affectée au payement des créances hypothécaires ou privilégiées, sauf à l'assureur de l'appliquer à la réparation de l'objet assuré, avec le concours de l'assuré et de ses créanciers. Il en sera de même de toute indemnité due par des tiers à raison de la perte, ou de la détérioration de la chose grevée de privilège ou d'hypothèque. L'indemnité sera payée dans l'ordre fixé par les créanciers et, en cas de contestation, par le tribunal. SECTION VII. De l'action en nullité ou en rescision des conventions. § Ier. — De l'action en nullité. Article 1310. Les conventions auxquelles manque une condition requise pour leur existence ne donnent pas lieu à une action en nullité. Article 1311. Les conventions nulles ou annulables donnent lieu à une action en nullité; elles produisent tous leurs effets tant qu'elles n'ont pas été annulées. Article 1312. Le demandeur doit prouver qu'une condition prescrite par la loi pour la validité de l'acte n'a point été observée; il n'est pas tenu de prouver la lésion. Le défendeur est admis à prouver que Pacte, quoique vicié, n'a causé aucun préjudice au demandeur; dans ce cas, la demande sera rejetée. § II. — De l'action en rescision des mineurs. Article 1313. Quand le mineur agit en rescision, le tribunal décidera, d'après les circonstances, s'il y a lésion, et si elle est assez notable pour que la convention soit rescindée. Article 1314. Ceux qui ont contracté avec le mineur ne peuvent pas se prévaloir de la lésion pour demander la rescision du contrat. L'action n'appartient pas aux coobligés du mineur. Article 1315. Le mineur n'est pas restituable contre les obligations résultant de son délit ou quasi-délit. Article 1316. La simple déclaration de majorité faite par le mineur n'est point un obstacle à la restitution. Article 1317. Le mineur commerçant ou artisan n'est point restituable contre les engagements qu'il a pris à raison de son commerce ou de son art. § III. — De la confirmation. Article 1318. La confirmation est un acte unilatéral par lequel celui qui a le droit de demander la nullité d'une convention y renonce dans le but d'effacer le vice. L'obligation confirmée est censée n'avoir jamais été viciée. Article 1319. Les conventions inexistantes ou nulles de plein droit ne peuvent pas être confirmées. Telle est la donation nulle en la forme; le donateur doit la refaire dans la forme légale. Article 1320. Les héritiers des parties contractantes ne peuvent pas confirmer quand leur auteur n'en avait pas le droit. Par exception, les héritiers du donateur peuvent confirmer la libéralité, d'après le droit commun. Article 1321. Un contrat non solennel peut être confirmé, quoique l'acte qui le constate ne soit point signé des parties, à moins qu'il ne soit prouvé qu'il n'y avait qu'un projet de convention. Article 1322. La confirmation est expresse ou tacite. Elle est expresse quand la volonté de celui qui renonce à l'action en nullité résulte d'une déclaration formelle. La déclaration ne doit pas être faite par écrit; si un acte en est dressé, on applique les principes qui régissent la preuve littérale. Article 1323. La confirmation est tacite quand la partie intéressée pose un fait qui implique nécessairement la volonté de renoncer à l'action en nullité. Telle est l'exécution de l'obligation, si celui qui l'exécute avait la capacité de renoncer et connaissait le vice qui rend l'acte nul. Article 1324. Quand le vice persiste pendant un certain temps, la confirmation ne peut se faire que lorsque le vice a cessé. Article 1325. La confirmation expresse ou tacite emporte renonciation aux moyens et exceptions que l'on pouvait opposer à l'acte confirmé. La confirmation ne rétroagit pas au préjudice des tiers qui avaient un droit réel dans la chose qui fait l'objet du contrat confirmé. Elle rétroagit à l'égard des tiers créanciers chirographaires. § IV. — De la prescription de l'action en nullité. Article 1326. L'action en nullité des conventions se prescrit par cinq ans. Article 1327. La prescription de cinq ans est assujettie aux règles qui régissent la confirmation; elle ne s'applique pas aux actes inexistants. Article 1328. Toutes les nullités se couvrent par la prescription, sauf celles qui sont d'ordre public. Article 1329. La prescription court du jour où la convention a été formée, à moins que la partie intéressée ne prouve qu'elle n'a eu connaissance du vice que postérieurement au contrat. Article 1330. Quand l'acte est nul pour cause d'incapacité, la prescription ne commence à courir que lorsque l'incapacité a cessé, et à partir du jour où la partie intéressée a eu connaissance de l'acte et du vice qui le rend nul. Article 1331. Si l'acte est nul pour vice de consentement, la prescription ne commence à courir que du jour où la violence a cessé, ou du jour que l'erreur ou le dol ont été connus. Article 1332. L'exception de nullité est soumise à la même prescription que l'action. § V. — De l'effet de l'annulation. Article 1333. Le contrat annulé est censé n'avoir jamais existé. Si le contrat a été exécuté, les parties doivent être remises dans l'état où elles étaient avant d'avoir contracté. Article 1334. Lorsque les mineurs, les interdits ou les personnes placées sous curatelle sont admis, en ces qualités, à attaquer leurs engagements, la restitution de ce qui leur a été payé, ou des fruits qu'ils ont perçus pendant la minorité, l'interdiction ou la curatelle, ne peut pas être exigée, à moins qu'il ne soit prouvé que ce qui a été payé ou ce qu'ils ont perçu a tourné à leur profit. Article 1335. Ceux qui n'ont sur une chose que des droits sujets à annulation ne peuvent concéder aux tiers que des droits soumis à la même annulation. CHAPITRE IV. De la preuve. Article 1336. Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le payement ou le fait qui a produit l'extinction de l'obligation. Article 1337. Tout fait allégué en justice doit être prouvé conformément aux règles établies dans les sections suivantes, sur la preuve littérale, la preuve testimoniale, les présomptions, l'aveu de la partie et le serment. SECTION Ier. De la preuve littérale. Article 1338. L'écrit que les parties dressent de leurs conventions ne concerne que la preuve. La validité ou la nullité de l'acte n'a aucune influence sur la validité du fait juridique que l'écrit constate. § Ier. — De l'acte authentique. Article 1339. L'acte authentique est celui qui a été reçu par un officier public compétent et capable, et avec les formes requises. Article 1340. L'acte sous seing privé devient authentique par la reconnaissance qui en est faite en justice ou devant notaire. L'acte de dépôt donne seulement une date certaine à l'écrit déposé. Article 1341. L'acte qui n'est pas authentique, par suite d'un défaut de forme ou parce qu'il a été reçu par un officier public ayant qualité de le recevoir, mais incapable ou incompétent à raison du lieu, vaudra comme écriture privée, à condition qu'il soit signé par toutes les parties contractantes. L'acte ne pourra valoir comme acte sous seing privé si l'officier public y est intervenu comme partie intéressée. Article 1342. L'acte authentique fait foi par lui-même: provision est due au titre. En cas de conflit entre plusieurs actes authentiques, le juge doit suspendre provisoirement l'exécution de l'acte litigieux. Article 1343. L'acte authentique prouve jusqu'à inscription de faux: 1° les faits juridiques que l'officier public constate comme les ayant accomplis, s'il avait mission de les accomplir; 2° les faits juridiques que l'officier voit ou entend et qu'il a mission de constater. L'acte authentique ne fait foi que jusqu'à preuve contraire de la vérité des déclarations émanées des parties. Article 1344. L'acte authentique fait à l'égard des tiers la même foi qu'entre les parties. Article 1345. En cas de plainte en faux criminel, l'exécution de Pacte argüé de faux sera suspendue par la mise en accusation. En cas d'inscription en faux, les tribunaux pourront, suivant les circonstances, suspendre provisoirement l'exécution de l'acte. Article 1346. Les contre-lettres n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes; on ne peut les opposer aux tiers. § II. — De l'acte sous seing privé. Article 1347. Aucune forme n'est prescrite pour la validité des actes sous seing privé, sauf la signature des parties contractantes. La signature doit être apposée après que l'acte est écrit; tout blanc seing est nul. Article 1348. L'acte sous seing privé ne fait pas foi par lui-même; il n'a de force probante que s'il est reconnu ou vérifié. Article 1349. Celui à qui on oppose un acte sous seing privé est obligé d'avouer ou de désavouer formellement son écriture ou sa signature. Ses héritiers ou ayants cause peuvent se contenter de déclarer qu'ils ne connaissent pas la signature ou l'écriture de leur auteur. Article 1350. Dans le cas où la partie désavoue son écriture ou sa signature, et dans le cas où ses héritiers ou ayants cause déclarent ne les point connaître, le juge les vérifie ou en ordonne la vérification en justice. Article 1351. L'acte sous seing privé reconnu ou vérifié fait, entre les parties et à l'égard des tiers, la même foi que l'acte authentique, en ce qui regarde le fait matériel des déclarations; il prouve jusqu'à preuve contraire la vérité de ces déclarations. Article 1352. Les actes sous seing privé n'ont de date certaine à l'égard des tiers que lorsque l'antidate est devenue impossible. Il en est ainsi notamment: 1° si l'acte a été enregistré; dans ce cas, il a date certaine du jour de l'enregistrement; si deux actes ont été enregistrés le même jour, ils ont la même date; 2° si celui ou l'un de ceux qui ont souscrit l'acte est mort; l'acte alors a date certaine du jour du décès; 3° si la substance de l'acte est constatée par des actes authentiques, tels que procès-verbaux de scellés ou d'inventaire; l'acte en ce cas a date certaine du jour de ces actes. Article 1353. Le tiers qui a connaissance de l'acte au moment où il traite ne peut point soutenir que l'acte n'a pas date certaine à son égard. Article 1354. Par exception à l'article 1352, les tribunaux peuvent admettre les quittances que le débiteur produit, quoiqu'elles n'aient pas date certaine, si la bonne foi du débiteur est établie. Article 1355. Les registres des marchands ne font pas foi contre les personnes non marchandes des fournitures et autres obligations qui y sont portées. Article 1356. Les livres des marchands font preuve contre eux; mais celui qui en veut tirer avantage ne peut les diviser en ce qu'ils contiennent de contraire à ses prétentions. Article 1357. Les registres, papiers domestiques et feuilles volantes ne forment point un titre pour celui qui les a écrits. Ils font foi contre lui:1° lorsqu'ils énoncent formellement un payement reçu; 2° lorsqu'ils contiennent la mention expresse que la note a été faite pour suppléer le défaut de litre en faveur du créancier. Article 1358. L'écriture mise par le créancier à la suite, en marge ou au dos d'un titre, fait foi, quoique non signée ni datée par lui, lorsqu'elle tend à établir la libération du débiteur, pourvu que le titre soit toujours resté en la possession du créancier. Il en est de même: 1° de l'écriture mise par le créancier au dos, en marge ou à la suite du double d'un titre, pourvu que le double soit entre les mains du débiteur; 2° des mentions libératoires écrites à la suite d'une première quittance. § III. — Des tailles. Article 1359. Les tailles corrélatives à leurs échantillons font foi entre les personnes qui sont dans l'usage de constater ainsi les fournitures qu'elles font et reçoivent en détail. § IV. — Des copies des actes authentiques. Article 1360. Les copies, lorsque le titre original subsiste, ne font foi que de ce qui est contenu au titre, dont la représentation peut toujours être exigée. Article 1361. Lorsque le titre original n'existe plus, les copies font foi d'après les distinctions suivantes: 1° Les grosses ou premières expéditions font la même foi que l'original. Il en est de même des copies qui ont été tirées par l'autorité du magistrat, parties présentes ou dûment appelées, ou de celles qui ont été tirées en présence des parties et de leur consentement réciproque; 2° Les copies qui, sans l'autorité du magistrat, ou sans le consentement des parties, et depuis la délivrance des grosses ou premières expéditions, ont été tirées sur la minute de l'acte par le notaire qui l'a reçu, ou par l'un de ses successeurs, ou par officiers publics qui, en cette qualité, sont dépositaires des minutes, peuvent, en cas de perte de l'original, servir de commencement de preuve par écrit; 3° Les copies, tirées sur une minute par un notaire, ou par un officier public, qui n'en est pas le dépositaire légal, de même que les copies des copies, ne peuvent être considérées que comme simples renseignements. Article 1362. La transcription d'un acte sur les registres publics ne pourra servir que de commencement de preuve par écrit, et à la condition: 1° qu'il soit constant que toutes les minutes du notaire, de l'année dans laquelle l'acte paraît avoir été fait, soient perdues, ou que l'on prouve que la perte de la minute de cet acte a eu lieu par un accident particulier; 2° que le répertoire du notaire constate que l'acte a été fait à la même date. Lorsqu'au moyen du concours de ces deux circonstances la preuve par témoins sera admise, il sera nécessaire que ceux qui ont été témoins à l'acte soient entendus. Article 1363. L'enregistrement des actes authentiques forme un commencement de preuve, en ce sens que le juge peut déférer le serment d'office à la partie intéressée. § V. — Des actes récognitifs. Article 1364. L'acte récognitif est celui qui renferme la reconnaissance du titre primordial; ce qu'il contient de plus ou de moins, ou de différent, n'a aucun effet. Article 1365. Le débiteur peut toujours demander la représentation du titre primordial, sans distinguer si la teneur de ce titre y est ou non relatée. SECTION II. De la preuve testimoniale. Article 1366. Aucun fait juridique excédant la somme ou valeur de six cents francs, même le dépôt volontaire, ne peut être prouvé par témoins. Article 1367. Pour déterminer si la limite pécuniaire est dépassée, il faut considérer le moment où le fait juridique est posé. Article 1368. La preuve testimoniale, sur la demande d'une somme même moindre de six cents francs, ne peut être admise, lorsque celle somme est déclarée être le restant ou faire partie d'une créance plus forte qui, à raison de son montant, ne peut être prouvée par témoins. Article 1369. Celui qui a formé une demande excédant six cents francs ne peut plus être admis à la preuve testimoniale, même en restreignant la demande primitive. Article 1370. La preuve testimoniale n'est pas admissible si la demande contient, outre le capital, des intérêts, qui, réunis au capital, excèdent la somme de six cents francs. Article 1371. Si dans la même instance une partie fait plusieurs demandes dont il n'y ait point de litre par écrit, et que, jointes ensemble, elles excèdent la somme de six cents francs, la preuve par témoins n'en peut être admise, encore que la partie allègue que ces créances proviennent de différentes causes, et qu'elles se soient formées en différents temps, si ce n'était que ces droits procédassent, par succession, donation ou autrement, de personnes différentes. Article 1372. Toutes les demandes, à quelque titre que ce soit, qui ne sont pas entièrement justifiées par écrit, seront formées par un seul exploit. Les demandes qui seraient formées dans des instances successives ne pourront être prouvées par témoins, même quand elles seraient inférieures à six cents francs. Article 1373. Aucune preuve par témoins n'est reçue contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes, ni pour les interpréter, encore qu'il s'agisse d'une somme ou valeur moindre de six cents francs. Article 1374. Les règles qui prohibent la preuve testimoniale reçoivent exception en matière de commerce. En matière civile, il n'est pas permis d'y déroger. Le juge doit rejeter la preuve par témoins, quand même les parties seraient d'accord pour l'admettre. Article 1375. Les règles qui prohibent la preuve testimoniale reçoivent encore exception lorsqu'il existe un commencement de preuve par écrit, ou lorsque les présomptions ou indices, résultant de faits dès lors constants, sont assez graves pour déterminer l'admission des témoignages. On appelle commencement de preuve par écrit tout écrit émané de celui à qui on l'oppose, ou de celui qu'il représente, ou par lequel il a été représenté, et qui rend vraisemblable le fait allégué. Article 1376. En troisième lieu, les règles qui prohibent la preuve testimoniale reçoivent exception toutes les fois qu'il n'a pas été possible au demandeur de se procurer une preuve littérale du fait litigieux. Cette exception s'applique: 1° Aux quasi-contrats, aux délits et aux quasi-délits. Si le fait dommageable suppose l'existence d'un contrat, celui-ci doit être prouvé conformément au droit commun, avant que la partie soit admise à établir par témoins le délit ou le quasi-délit; 2° A la simulation, quand des tiers attaquent l'acte; Au dol entre les parties, quand la convention est prouvée; A la fraude, quand des tiers attaquent l'acte, et à la fraude à la loi, dans l'intérêt de toute partie intéressée; 3° Aux dépôts nécessaires faits en cas d'incendie, ruine, tumulte ou naufrage, et à ceux faits par les voyageurs dans un hôtel, le tout suivant la qualité des personnes et les circonstances du fait; 4° Aux obligations contractées en cas d'accidents imprévus, où l'on ne pourrait pas avoir fait des actes par écrit; 5° Au cas où le créancier a perdu le titre qui lui servait de preuve littérale, par suite d'un cas imprévu et résultant d'une force majeure. Article 1377. Dans le cas de fraude à la loi, ou de violation de la loi, la preuve des faits litigieux pourra se faire par la commune renommée. Le juge pourra admettre aussi à cette preuve ceux qui ont été dans l'impossibilité de se procurer même une preuve testimoniale. SECTION III. Des présomptions. Article 1378. Les présomptions sont des conséquences que la loi ou le magistrat lire d'un fait connu à un fait inconnu. § Ier. — Des présomptions légales. Article 1379. La présomption légale est celle qui est attachée par une loi spéciale à certains actes ou à certains faits; tels sont: 1° Les actes que la loi déclare nuls, comme faits en fraude de ses dispositions, d'après leur seule qualité; 2° Les cas dans lesquels la loi déclare la propriété ou la libération résulter de certaines circonstances déterminées; 3° L'autorité que la loi accorde à la chose jugée. Article 1380. L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut: 1° Que la chose demandée soit la même; la chose demandée est la même si le second jugement, en le supposant rendu conformément aux conclusions principales ou reconventionnelles des parties, détruisait le premier en tout ou en partie; 2° Que la demande soit fondée sur la même cause; la cause est le fait juridique qui constitue le fondement du droit; quand la cause est identique, il y a chose jugée, quand même elle serait établie par d'autres moyens, c'est-à-dire par d'autres preuves de fait et de droit qui servent à prouver le fondement de la demande ou de l'exception; 3° Que la demande soit entre les mêmes parties; les ayants cause qui ont un droit réel dans la chose, tels que les créanciers hypothécaires, ne sont pas censés être parties dans le jugement qui intervient postérieurement; 4° Que la demande soit formée par les parties et contre elles en la même qualité. Article 1381. La présomption légale dispense de toute preuve celui au profit duquel elle existe. Toute présomption légale admet la preuve contraire, sauf lorsqu'elle est d'ordre public; telle est l'autorité de la chose jugée. § II. — Des présomptions de l'homme. Article 1382. Les présomptions de l'homme sont abandonnées aux lumières et à la prudence du magistrat. Le juge ne peut admettre ces présomptions que dans les cas où la loi admet la preuve testimoniale. Les présomptions invoquées par le juge doivent être graves, précises et concordantes. SECTION IV. De l'aveu. Article 1383. L'aveu est la reconnaissance qu'une personne fait d'une chose contestée, dans l'intention que cette déclaration fasse foi en faveur de la partie au profit de laquelle elle est intervenue. Article 1384. L'aveu est judiciaire ou extrajudiciaire. L'allégation d'un aveu extrajudiciaire purement verbal est inutile, quand il s'agit d'une demande dont la preuve testimoniale ne serait point admissible. Article 1385. L'aveu fait pleine foi contre celui qui l'a fait, s'il a la capacité de disposer de la chose sur laquelle il porte. Article 1386. Le mandataire ne peut faire d'aveu sans un pouvoir Spécial. Article 1387. L'aveu ne peut être divisé contre celui qui l'a fait. Article 1388. Il n'y a pas indivisibilité de l'aveu: 1° Quand il y a des aveux distincts sur des faits différents; 2° Quand le fait contesté est prouvé indépendamment de l'aveu; 3° Quand on combat l'aveu dans un de ses éléments comme contraire à la vérité; la preuve contraire se fera d'après le droit commun. Article 1389. L'aveu ne peut être révoqué, à moins qu'on ne prouve qu'il a été la suite d'une erreur de fait. Il ne peut être révoqué sous prétexte d'une erreur de droit. SECTION V. Du serment. § Ier. — Dispositions générales. Article 1390. Le serment est un acte civil. Article 1391. Le serment judiciaire est de deux espèces: 1° Celui qu'une partie défère à l'autre pour en faire dépendre le jugement de la cause; il est appelé décisoire; 2° Celui qui est déféré d'office par le juge au demandeur sur la valeur de la chose demandée; il est appelé serment en plaids. § II. — Du serment décisoire. Article 1392. Le serment décisoire ne peut être déféré que sur un fait personnel à la partie à laquelle on le défère. Article 1393. II faut, de plus, que le fait soit relevant, c'est-à-dire de nature à entraîner la décision de la contestation, et que l'intention de celui qui défère le serment soit d'en faire dépendre le jugement de la cause. Article 1394. Le serment décisoire peut être déféré sur toute contestation qui peut faire l'objet d'une transaction, dans quelque instance que ce soit, au possessoire comme au pétitoire. Article 1395. La délation du serment est une transaction offerte par la partie qui le défère; elle doit être acceptée par la partie à laquelle il est déféré. Article 1396. Celui auquel le serment est déféré qui le refuse ou ne consent pas à le référer à son adversaire, ou l'adversaire à qui il a été référé qui le refuse, doit succomber dans sa demande ou dans son exception. Article 1397. Le serment ne peut être déféré ou accepté que par celui qui a la capacité de transiger. Article 1398. Le serment peut être déféré en tout état de cause, et encore qu'il n'existe aucun commencement de preuve de la demande ou de l'exception sur laquelle il est provoqué. Article 1399. Le serment ne peut être référé quand le fait qui en est l'objet n'est pas celui des deux parties, mais est purement personnel à celui auquel le serment avait été déféré. Article 1400. La partie qui a déféré ou référé le serment ne peut plus se rétracter lorsque l'adversaire a consenti à faire ce serment. Article 1401. Lorsque le serment déféré ou référé a été fait, l'adversaire n'est point recevable à en prouver la fausseté, sauf les poursuites répressives s'il y a lieu. Article 1402. Le serment prêté ou refusé fait pleine foi; il a l'autorité de la chose jugée, et exclut toute preuve contraire. Il ne forme preuve qu'au profit de celui qui l'a déféré ou contre lui, et au profit de ses héritiers et ayants cause ou contre eux. Article 1403. Le serment déféré par l'un des créanciers solidaires au débiteur ne libère celui-ci que pour la part de ce créancier. Article 1404. Le serment déféré par le créancier à l'un des débiteurs solidaires et prêté par lui ne profite pas aux autres. Article 1405. Le serment déféré au débiteur principal et prêté par lui ne libère pas les cautions. Le serment déféré à la caution et prêté par elle ne profite pas au débiteur principal. § III. — Du serment déféré d'office sur la valeur de la chose demandée. Article 1406. Le juge ne peut déférer au demandeur le serment sur la valeur de la chose demandée que lorsqu'il est impossible de la constater autrement. Le juge doit, en ce cas, déterminer la somme jusqu'à concurrence de laquelle le demandeur sera cru sur son serment. TITRE III. De la déconfiture. § 1. — De la déclaration de déconfiture et de ses effets. Article 1407. La déconfiture est déclarée par le tribunal du domicile du débiteur insolvable, soit sur l'aveu du débiteur, soit sur la demande d'un ou de plusieurs créanciers. Article 1408. A compter du jour où la déconfiture est déclarée, le débiteur est dessaisi de plein droit de l'administration et de la disposition de tous ses biens. Article 1409. Les créanciers ont une action collective, pour la conservation, la liquidation et la distribution du prix des biens du débiteur, entre tous les ayants droit. Cette action est exercée par un curateur, sous la surveillance d'un juge-commissaire, nommés l'un et l'autre par le jugement déclaratif de déconfiture. Article 1410. La loi du 18 avril 1851 s'applique à la déconfiture, sauf les modifications résultant des dispositions du présent titre. Article 1411. Les actes passés par le débiteur dessaisi, postérieurement au jugement, sont nuls de droit, comme ayant été faits par une personne incapable. Article 1412. Les actes antérieurs au jugement pourront être annulés sur la demande du curateur, s'ils ont été faits au préjudice des créanciers. S'il s'agit d'un acte à litre onéreux, le demandeur devra prouver que l'insolvabilité était notoire lors de l'acte. Quant aux actes à titre gratuit, il suffira de prouver que le débiteur avait connaissance de son insolvabilité. § II. — Vérification des créances. Article 1413. Dans les dix jours à partir du jugement déclaratif de la déconfiture, les créanciers déclareront leurs créances au greffe du tribunal et y feront le dépôt de leurs titres. Article 1414. Le curateur, de commun accord avec le juge-commissaire, en fera la vérification. Article 1415. Au jour fixé par le juge-commissaire, le curateur convoquera les créanciers vérifiés et il invitera, par annonce dans les journaux, les créanciers qui n'ont pas déclaré leurs créances à en faire la déclaration. Le curateur fera rapport des créances vérifiées. S'il s'élève une contestation sur une créance, le juge-commissaire la décidera. § III. — Administration des biens. Article 1416. Le curateur fera tous actes conservatoires, en se conformant à la loi du 18 avril 1854, à moins que le tribunal ne l'en dispense. Le juge-commissaire remplira les fonctions que les lois attribuent au juge de paix. Article 1417. Les curateur versera à la caisse d'épargne, sans délai, les deniers trouvés dans la caisse du débiteur, et, à mesure qu'il les touchera, les sommes provenant du recouvrement des créances ou de la vente des meubles et effets sujets à dépérissement ou à dépréciation. En cas de retard, le curateur devra de plein droit les intérêts des sommes qu'il n'aura point versées. Article 1418. Les sommes déposées ne pourront être retirées que sur mandat du curateur. Article 1419. Le curateur pourra payer, avec l'autorisation du juge-commissaire, les créanciers privilégiés sur la généralité des meubles. § IV. — Du concordat. Article 1420. Les dispositions de la loi sur les faillites, relatives au concordat, sont applicables à la déconfiture. Article 1421. Le débiteur n'est libéré que jusqu'à concurrence des sommes payées aux créanciers; ceux-ci conservent leurs droits contre lui, s'il revient à meilleure fortune. § V. — De la vente des biens et du payement des créanciers. Article 1422. Si le concordat est refusé, le curateur procède à la vente des biens du débiteur. Article 1423. La vente des immeubles se fait dans les formes prescrites par la loi du 42 juin 4846. Article 1424. Le Code de procédure règle les formes dans lesquelles se fera la vente des meubles. Le juge-commissaire peut autoriser le curateur à les vendre de gré à gré. Article 1425. Le montant de l'actif sera distribué entre les créanciers dans l'ordre arrêté par l'assemblée des créanciers sur le rapport du curateur et du juge-commissaire. § VI. — Conséquences de la déconfiture quant au débiteur. Article 1426. Lorsque toutes les opérations sont terminées, le tribunal en prononcera la clôture, sur le rapport du curateur et du juge-commissaire, le ministère public entendu; le tribunal décidera si le débiteur est en faute et quelle en est la gravité. Le débiteur déclaré en faute sera privé de ses droits électoraux et du droit d'être juré. Si la faute est grave et approche du dol, il sera condamné comme banqueroutier simple, ou comme banqueroutier frauduleux, selon les distinctions faites par la loi du 18 avril 1851. Article 1427. Le débiteur qui n'est qu'en faute peut être réhabilité quand il aura payé ses dettes intégralement, en principal, intérêts et frais. Les articles 586-592 de la dite loi sont applicables au débiteur déconfit. § VII. — Des successions en déconfiture. Article 1428. Les successions bénéficiaires et les successions vacantes sont censées être en déconfiture; on applique par analogie les dispositions ci-dessus à l'administration et à la liquidation de ces successions. § VIII. — Disposition générale. Article 1429. Dans les assemblées de créanciers, la majorité se compte d'après le montant des créances. TITRE IV. Du contrat de mariage. CHAPITRE PREMIER. Dispositions générales. SECTION Ier. De la nature et de la forme du contrat de mariage. Article 1430. La loi ne régit l'association conjugale, quant aux biens, qu'à défaut de conventions spéciales, que les futurs époux peuvent faire comme ils le jugent à propos, pourvu qu'elles ne soient pas contraires aux bonnes mœurs, ni au droit public, ni aux dispositions prohibitives du présent Code. Article 1431. Les futurs époux ne peuvent faire aucune convention ou renonciation dont l'objet serait de changer l'ordre légal des successions, soit par rapport à eux-mêmes dans la succession de leurs enfants ou descendants, soit par rapport à leurs enfants entre eux; sans préjudice des donations entre-vifs ou testamentaires qui peuvent être faites conformément au présent Code. Article 1432. Les futurs époux ne peuvent pas stipuler d'une manière générale que leur association sera réglée par l'une des anciennes coutumes, abrogées par la loi du 30 ventôse an XII, ou par le Code Napoléon, qui est abrogé par le présent Code, ou par une autre loi étrangère. Article 1433. Toutes conventions matrimoniales seront rédigées, avant le mariage, par acte devant notaire. Elles ne peuvent recevoir aucun changement, ni total, ni partiel, après la célébration du mariage. Tout ce qui tient à la forme de l'acte est requis pour l'existence de la convention. Article 1434. Les parties contractantes peuvent changer leurs conventions matrimoniales, avant la célébration du mariage, par acte passé dans la même forme que le contrat de mariage. Nul changement ou contre-lettre n'est valable sans la présence et le consentement simultané de toutes les personnes qui ont été parties dans le contrat de mariage. Article 1435. Tous changements et contre-lettres, même revêtus des formes prescrites par l'article précédent, sont sans effet à l'égard des tiers s'ils n'ont été rédigés à la suite de la minute du contrat de mariage, et le notaire ne pourra, à peine des dommages et intérêts des parties intéressées, délivrer ni grosse, ni expédition du contrat de mariage, sans transcrire à la suite le changement ou la contre-lettre. Article 1436. Le mineur autorisé à se marier est habile à consentir les conventions matrimoniales relatives à ses biens; les conventions et donations qu'il y fera sont valables, pourvu qu'il ait été assisté, dans le contrat, par ses père et mère ou par son tuteur. Article 1437. Les incapables qui se marient sans faire un contrat de mariage sont soumis au régime de la communauté légale. SECTION II. Des régimes matrimoniaux. Article 1438. Les futurs époux qui ne font pas de contrat de mariage par acte devant notaire sont censés adopter le régime de la communauté légale. Il en est de même des époux qui déclarent, d'une manière générale, qu'ils entendent se marier sous le régime de la communauté. Article 1439. La communauté légale est une communauté universelle de tous les biens, meubles el immeubles, présents et futurs, des époux, telle qu'elle est organisée par le présent titre. Article 1440. Ce régime forme le droit commun de la Belgique, mais les parties peuvent aussi adopter l'une des clauses de communauté conventionnelle prévues par le présent litre, et même exclure la communauté, en se soumettant au régime dotal. Article 1441. Les étrangers qui se marient en Belgique sont censés adopter le régime qui forme le droit commun dans leur pays, à moins qu'il ne résulte des circonstances que leur intention est de se marier sous le régime de la communauté universelle ou sous tout autre régime. CHAPITRE II. Du régime en communauté. Article 1442. La communauté, soit légale, soit conventionnelle, commence à partir du mariage contracté devant l'officier de l'état civil. Article 1443. La communauté ne forme pas une personne civile. Les époux deviennent copropriétaires par indivis des biens qui entrent en communauté. Disposition commune à la communauté légale et à la communauté conventionnelle. Article 1444. Lorsque l'un des époux ou tous deux ont des enfants de précédents mariages et que la communauté légale ou conventionnelle tendrait dans ses effets à donner à l'un des époux au delà de la portion réglée par l'article 879, les enfants du premier lit de l'autre époux auront l'action en retranchement de l'excédent. Les simples bénéfices, résultant des travaux communs et des économies faites sur les revenus respectifs, quoique inégaux, des deux époux, ne sont pas considérés comme un avantage fait au préjudice des enfants du premier lit. PREMIÈRE PARTIE. DE LÀ COMMUNAUTÉ LÉGALE. SECTION Ier. De l'actif de la communauté universelle. § Ier. — Disposition générale. Article 1445. La communauté se compose activement: 1° De tous les meubles et immeubles que les époux possédaient au jour de la célébration du mariage; 2° De tous les meubles et immeubles qui leur échoient pendant le mariage, à titre de succession ou de donation, si le testateur ou le donateur n'a exprimé le contraire; 3° De tous les meubles et immeubles acquis pendant le mariage; 4° De tous les fruits, revenus, intérêts et arrérages, de quelque nature qu'ils soient, échus ou perçus pendant le mariage et provenant des biens qui sont propres aux époux; 5° Des bénéfices provenant du travail des époux. § II. — Dispositions particulières aux cas où il y a des propres. Article 1446. Les futurs époux peuvent stipuler que leurs biens n'entreront pas en communauté, qu'ils leur resteront propres, soit pour le tout, soit en partie. Article 1447. Tout bien possédé par des époux, mariés sous le régime de la communauté universelle, est réputé commun, s'il n'est prouvé que l'un des époux l'a stipulé propre ou qu'il l'a reçu par donation ou legs à titre de propre. Article 1448. Les donations, quand même elles ne seraient faites qu'à l'un des époux, tombent en communauté, à moins que le donateur n'ait déclaré expressément que le bien donné sera propre au donataire. Article 1449. Si l'un des époux possède, à litre de propre, un bois, une mine ou une carrière, la communauté n'a droit aux produits que comme usufruitière. Si une coupe de bois qui, d'après les règles de l'usufruit, devait profiter à la communauté n'a point été faite, il en sera dû récompense à la communauté. Article 1450. L'immeuble, acquis pendant le mariage en échange d'un immeuble propre à l'époux, est subrogé à celui qui a été aliéné, sauf récompense s'il y a soulte. SECTION II. Du passif de la communauté universelle. Article 1451. La communauté se compose passivement: 1° De toutes les dettes, de quelque nature qu'elles soient, dont les. époux étaient grevés au jour de la célébration du mariage, ou dont se trouvent chargées les successions qui leur échoient pendant le mariage. Si les époux ont exclu de la communauté leurs immeubles présents ou futurs, de même que si des immeubles leur sont donnés ou légués avec la clause qu'ils n'entreront pas en communauté, les dettes relatives à ces immeubles en seront également exclues: le tout sauf récompense si la communauté paye des dettes relatives aux immeubles qui restent propres aux époux; 2° Des dettes tant en capitaux qu'en intérêts ou arrérages contractées par les époux pendant la communauté, conformément aux règles établies dans la section III De l'administration de la communauté; 3° Des intérêts et arrérages seulement des dettes personnelles aux deux époux, dans le cas où ils ont un patrimoine propre; 4° Des réparations usufructuaires des immeubles qui n'entrent point en communauté; 5° Des aliments des époux, de l'éducation et de l'entretien des enfants et de toute autre charge du mariage. SECTION III. De l'administration de la communauté. § Ier. — Dispositions générales. Article 1452. La communauté est administrée par les deux époux conjointement. Article 1453. Sont exceptés les actes d'administration journalière que la femme peut faire seule comme associée. Quand l'un des conjoints est dans l'impossibilité d'agir, par suite d'absence, d'interdiction ou de collocation dans une maison de santé, l'autre a le droit d'administrer seul. Article 1454. Les actes de disposition des biens de la communauté, à titre onéreux ou à titre gratuit, ne peuvent être consentis que par les époux conjointement. Si l'un des époux refuse de consentir, on procédera conformément à l'article 212. Article 1455. Chacun des époux peut léguer sa part dans la communauté ou un effet particulier. Dans ce dernier cas, le légataire ne peut réclamer l'effet en nature que s'il tombe au lot des héritiers du testateur; s'il ne tombe pas dans leur lot, il aura la récompense de la valeur totale de la chose léguée, sur la part des héritiers dans la communauté, cl, s'il y a lieu, sur les biens propres du testateur. Article 1456. La communauté ne peut être obligée que par les dettes contractées en commun par les deux époux. Il y a exception dans les cas prévus par l'article 4453. Article 1457. Si la dette contractée par l'un des époux avant le mariage n'a point de date certaine, l'autre peut demander à prouver que la dette a été contractée durant le mariage; par suite, le créancier n'aura point d'action contre la communauté. Article 1458. Aucun des époux ne peut obliger la communauté par ses délits ou ses quasi-délits. Article 1459. Les dettes de communauté ne sont considérées comme dettes du mari que lorsqu'il a concouru au contrat. § II. — Dispositions particulières. Article 1460. Si la femme abuse du pouvoir d'obliger la communauté par les actes d'administration journalière, en contractant des dettes excessives, le mari en pourra demander la nullité. Le tribunal peut, dans ce cas, déclarer la femme déchue de son pouvoir et ordonner la publication du jugement dans deux journaux. Article 1461. Si l'un des époux est dans l'impossibilité de consentir à un acte de disposition, conformément à l'article 4454, l'acte ne pourra être fait qu'avec autorisation de justice. Article 1462. L'article 4456 est applicable à l'acceptation des successions échues à l'un des époux; la communauté n'est tenue des dettes que si le conjoint de l'héritier a concouru à l'acceptation. SECTION IV. De l'administration des biens propres aux époux. § Ier. — Des remplois. Article 1463. L'époux qui vend un immeuble propre peut acheter avec les deniers provenant de l'aliénation un autre immeuble, qui lui sera propre à titre de remploi. Article 1464. Pour qu'il y ait remploi, il faut que l'époux déclare, lors d'une acquisition, qu'elle est faite des deniers provenus de l'aliénation de l'immeuble qui lui était personnel, et pour lui tenir lieu de remploi. Article 1465. Si le prix du propre aliéné a été versé dans la communauté sans remploi, l'époux a seulement droit, lors de la dissolution de la communauté, au prélèvement du prix. Article 1466. L'époux qui a des deniers propres peut en faire emploi en immeubles et stipuler que ces immeubles lui seront propres. § II. — Des récompenses. Article 1467. Toutes les fois que l'un des époux a tiré un profit personnel des biens de la communauté, il en doit la récompense. Il en est ainsi quand l'époux prend sur la communauté une somme, soit pour payer le prix ou partie du prix d'un bien à lui propre, ou le rachat de servitudes, soit pour le recouvrement, la conservation ou l'amélioration de ses biens personnels. Article 1468. Toutes les fois que la communauté a tiré un profit des biens propres de l'un des époux, elle en doit la récompense. Il on est ainsi: 1° s'il est vendu un immeuble propre à l'un des époux, ou si l'on s'est rédimé en argent de servitudes dues à un héritage propre à l'un d'eux et que le prix en ait été versé dans la communauté, le tout sans remploi; 2° si une mine a été ouverte pendant la durée de la communauté dans un fonds propre à l'un des époux, et que les produits en aient été versés dans la communauté. Article 1469. Le montant de la récompense consiste dans la somme qui a été versée dans la communauté, ou qui a été prise sur les propres de l'époux, sans considérer l'emploi qui en a été fait par l'époux ou par la communauté. § III. — Des dettes contractées par la femme conjointement avec le mari. Article 1470. La femme qui s'oblige conjointement avec son mari n'est réputée, à l'égard de celui-ci, s'être obligée que comme caution; elle doit être indemnisée de l'obligation qu'elle a contractée, si elle prouve qu'elle s'est obligée pour les affaires de la communauté ou du mari. § IV. — Des actes d'administration et de disposition. Article 1471. Les époux conservent l'administration de leurs biens propres, à la charge de verser dans la communauté les fruits qu'ils perçoivent. Article 1472. L'époux est responsable envers son conjoint si, par sa mauvaise gestion, il compromet le droit d'usufruit de la communauté. Article 1473. Les époux peuvent disposer de leurs biens propres à titre onéreux ou à titre gratuit, mais le conjoint doit concourir à ces actes, ainsi qu'à tout autre qui peut compromettre la jouissance de la communauté. En cas de dissentiment, le juge autorisera l'acte, s'il y a lieu, conformément aux articles 241 et 212. SECTION V. De la (lot. Article 1474. La dol est le bien que les futurs époux reçoivent en se mariant pour supporter les charges du mariage. Article 1475. La dot est une libéralité, quoiqu'elle soit constituée par les père et mère; elle est soumise aux principes qui régissent les donations, quant au fond et quant à la forme. Article 1476. Lorsque la dot est constituée par père et mère, ils en sont débiteurs personnels, et chacun d'eux en est tenu pour moitié, lors même que l'époux doté aurait des biens à lui propres. La règle reste applicable, sauf conventions contraires, si la dot est promise ou fournie en biens personnels à l'un des père et mère ou en biens de la communauté. L'époux sur les biens duquel la dot est payée ou la communauté auront, dans ce cas, une récompense contre le débiteur de la dot. Article 1477. L'époux marié sous le régime de la communauté ne peut obliger ni les biens de la communauté, ni ses biens propres, par la dot qu'il constitue, qu'avec le concours de son conjoint. Article 1478. Si le survivant des père et mère constitue une dol pour biens paternels et maternels, la dot se prendra d'abord sur les biens du conjoint prédécédé; le constituant n'est censé s'obliger personnellement que pour le surplus. Article 1479. La dot doit être rapportée à la succession de celui qui l'a fournie. Article 1480. Si la dot consiste en une pension annuelle, l'époux donataire continuera à la toucher après la dissolution du mariage par la mort de son conjoint, à moins qu'elle n'ait été limitée à la durée du mariage. Elle subsiste même après la mort de l'époux donataire, s'il y a des enfants. Article 1481. Les intérêts de la dot, quels que soient les objets dotaux, courent de plein droit du jour du mariage, quoiqu'il y ait terme pour le payement, s'il n'y a stipulation contraire. Article 1482. Ceux qui constituent une dot sont tenus à la garantie des objets constitués. SECTION VI. De la dissolution de la communauté. Article 1483. La communauté se dissout: par la mort de l'un des époux; par le divorce; par la séparation de corps; par la séparation de biens. § Ier. — De la mort. Article 1484. L'époux survivant est tenu de faire inventaire. Le subrogé tuteur doit y assister, s'il y a des enfants mineurs. Le subrogé tuteur, qui n'a point veillé à ce que l'inventaire soit dressé, est tenu solidairement avec l'époux survivant de toutes les condamnations qui peuvent être prononcées au profit des mineurs. Les parties intéressées sont admises à prouver par toute preuve, même par la commune renommée, la consistance et la valeur des effets qui n'ont pas été inventoriés. § II. — De la séparation de biens. Article 1485. Chacun des époux peut demander la séparation de biens, lorsque les désordres de son conjoint lèsent les intérêts de la communauté, au point que celle-ci ne puisse plus atteindre son but. Article 1486. Ainsi la femme peut demander la séparation lorsque le mari dissipe le mobilier dotal et les fruits de ses propres, de manière à compromettre la fortune qu'elle a apportée en communauté, ainsi que les reprises auxquelles elle a droit du chef de ses propres. Article 1487. Do même, le mari peut demander la séparation de biens lorsque la femme fait des dépenses excessives pour elle et pour le ménage, en abusant de son pouvoir d'administration, et que, d'autre part, elle refuse son concours aux actes d'administration ou de disposition soit des biens de la communauté, soit des biens propres du mari. Article 1488. Toute séparation de biens volontaire est nulle; elle doit être poursuivie en justice, dans les formes déterminées par le Code de procédure. Article 1489. Les créanciers des époux ne peuvent pas demander la séparation sans leur consentement. Si le défendeur est en faillite ou en déconfiture, la communauté est censée dissoute dans l'intérêt des créanciers du demandeur; ils exerceront, dans ce cas, les droits de leur débiteur jusqu'à concurrence du montant de leurs créances. Article 1490. Les créanciers des époux peuvent demander la nullité de la séparation de biens prononcée ou exécutée en fraude de leurs droits: ils peuvent même intervenir dans l'instance sur la demande pour la contester. Article 1491. La femme séparée de biens reprend la jouissance de ses propres; elle a le droit de les administrer et d'en disposer, sans le concours du mari. Article 1492. La femme doit contribuer, proportionnellement à ses facultés et à celles du mari, tant aux frais du ménage qu'aux dépenses d'éducation des enfants communs. Article 1493. Les effets du jugement qui prononce la séparation de biens remontent au jour de la demande. Article 1494. La communauté, dissoute par la séparation de biens, peut être rétablie du consentement des époux. Elle ne peut l'être que par un acte passé devant notaire, qui doit être rendu public dans les formes prescrites par le Code de procédure. La communauté rétablie reprend son effet du jour du mariage; les choses sont remises au même état que s'il n'y avait point eu de séparation, sans préjudice néanmoins des actes qui ont pu être faits dans cet intervalle par la femme, conformément à l'article 1491. Article 1495. Toute convention par laquelle les époux rétabliraient leur communauté, sous des conditions différentes de celles qui la réglaient antérieurement, est nulle. Article 1496. L'époux peut exiger caution de son conjoint pour la garantie des droits de survie qu'il aura à exercer. Il en est de même dans le cas où la communauté est dissoute par la séparation de corps ou par le divorce. SECTION VII. Des conséquences de la dissolution de la communauté. § Ier. — De l'acceptation et de la renonciation. Article 1497. Les époux sont communs quant aux biens et quant aux dettes, en vertu de. la loi ou de leurs conventions matrimoniales, sans qu'il y ait lieu d'accepter la communauté. Article 1498. Les époux ne peuvent pas renoncer à la communauté, si ce n'est avec autorisation de justice, dans le cas où la loi leur permet de demander la séparation de biens. Article 1499. Le tribunal ne peut autoriser l'époux à renoncer que s'il a fait inventaire immédiatement après la dissolution de la communauté, et s'il prouve que le mauvais état de la communauté provient des désordres de son conjoint. Article 1500. La renonciation se fera au greffe, dans les huit jours du jugement qui l'a autorisée. Article 1501. Le conjoint et les créanciers de la communauté peuvent attaquer la renonciation, en prouvant que l'époux renonçant a contribué à ruiner la communauté par ses désordres. Us peuvent intervenir dans l'instance pour combattre la demande. § II. — Du partage de la communauté. Article 1502. Après la dissolution de la communauté, l'actif se partage et le passif est supporté de la manière ci-après déterminée. N° 1. — Du partage de l'actif. Article 1503. Les époux rapportent à la masse des biens existants tout ce dont ils, sont débiteurs envers la communauté, à titre de récompense ou d'indemnité, d'après les règles prescrites dans le cas où ils ont des biens propres. Article 1504. Si l'un des époux a pris avec le concours de son conjoint des sommes ou des biens dans la communauté pour doter un enfant d'un autre lit, ou pour doter personnellement un enfant commun, il en fera également rapport à la masse. Article 1505. Chaque époux prélève sur la masse: 1° les biens qui lui sont propres ou les biens qui ont été acquis en remploi; 2° les indemnités qui lui sont dues par la communauté, dans le cas où il a des propres. Article 1506. Les prélèvements s'exercent, pour les biens qui n'existent plus en nature, d'abord sur l'argent comptant, ensuite sur le mobilier, et subsidiairement sur les immeubles de la communauté. Article 1507. Si les époux sont en concours avec d'autres créanciers, ceux-ci peuvent exiger que les créances des époux soient exercées d'après le droit commun. Article 1508. En cas d'insuffisance de la communauté, la femme et le mari peuvent exercer leurs reprises sur les biens personnels de leur conjoint, en prouvant que l'insuffisance des biens communs provient de ses désordres. Article 1509. Après que les prélèvements des époux ont été exécutés sur la masse, le surplus se partage par moitié entre eux. Celui des époux qui a diverti ou recélé quelques effets de la communauté, soit avant, soit après la dissolution, est privé de sa portion dans les dits effets. Article 1510. Les récompenses dues par la communauté ou à la communauté portent intérêt de plein droit, à partir de la dissolution de la communauté. Article 1511. Les donations que l'un des époux a faites à l'autre ne s'exécutent que sur la part du donateur dans la communauté et sur ses biens personnels. Article 1512. Après le partage consommé, si l'un des époux est créancier personnel de l'autre, comme si le prix de son bien propre a été employé dans l'intérêt personnel de l'autre, il exerce sa créance sur la part qui est échue à celui-ci dans la communauté, ou sur ses biens personnels. Article 1513. Les créances personnelles que les époux ont à exercer l'un contre l'autre ne portent intérêt que du jour de la mise en demeure. N° 2. — Du passif de la communauté. Obligation et contribution. Article 1514. Chaque époux est tenu à l'égard des créanciers de payer la totalité des dettes qu'il a personnellement contractées. Article 1515. L'époux est tenu pour moitié, comme commun en biens, des dettes de la communauté qu'il n'a pas contractées, sauf le bénéfice d'émolument, s'il y a lieu. Article 1516. Chacun des époux contribue aux dettes pour moitié, sauf le bénéfice d'émolument, s'il y a lieu. Article 1517. Les dettes contractées dans l'intérêt personnel d'un époux doivent être supportées par lui pour le tout. N° 3. — Du bénéfice d'émolument. Article 1518. Les époux jouissent du bénéfice d'émolument sous les conditions prescrites par l'article 1499. Article 1519. L'époux qui a obtenu le bénéfice d'émolument n'est tenu, à l'égard des créanciers, de la moitié des dettes pour lesquelles il peut être poursuivi comme époux commun en biens, que jusqu'à concurrence de son émolument, à charge de rendre compte aux créanciers tant du contenu de l'inventaire qu'il a dû dresser que de ce qui lui est échu par le partage. Article 1520. Le bénéfice d'émolument peut être opposé au conjoint dans le règlement de la contribution pour toute espèce de dettes, même celles que l'époux a personnellement contractées. N° 4. Dispositions générales. Article 1521. L'époux qui a payé une dette de la communauté au delà de sa moitié n'a point de répétition contre le créancier pour l'excédent, à moins que la quittance n'exprime que ce qu'il a payé était pour sa part. Article 1522. L'époux qui est poursuivi pour la totalité d'une dette de communauté, comme détenteur d'un immeuble grevé d'hypothèque, a de droit son recours pour la moitié de cette dette contre l'autre époux. Article 1523. Les dispositions précédentes ne font point obstacle à ce que, par le partage, l'un des copartageants soit chargé de payer une quotité de dettes autre que la moitié, même de les acquitter entièrement. Toutes les fois que l'un des copartageants a payé des dettes de la communauté au delà de la portion dont il était tenu, il y a lieu au recours de celui qui a trop payé contre l'autre. Article 1524. Le partage de la communauté, pour tout ce qui concerne les formes, les effets du partage, la garantie qui en résulte et la rescision, est soumis à toutes les règles établies au litre Des successions pour les partages entre cohéritiers. Article 1525. Les héritiers des époux jouissent de tous les droits qui appartiennent à leurs auteurs, et ils sont soumis aux mêmes obligations. § III. — Des effets de la renonciation. Article 1526. L'époux qui renonce perd toute espèce de droit sur les biens de la communauté, même sur ceux qui y sont entrés de son chef. Article 1527. L'époux renonçant a le droit de reprendre ses propres, lorsqu'ils existent en nature, ou les biens qui ont été acquis en remploi, ainsi que le prix de ses biens personnels s'il a été versé dans la communauté, de même que toutes autres indemnités que la communauté lui doit pour avoir tiré un profit de ses propres. Les articles 1508 et 1510 sont applicables à l'exercice de ces reprises. Article 1528. L'époux renonçant n'est plus tenu, à l'égard des créanciers, des dettes de communauté qu'il n'a pas contractées; il reste tenu à leur égard des dettes dont il est débiteur personnel, sauf son recours contre son conjoint. Article 1529. L'époux renonçant ne contribue pas, à l'égard de son conjoint, aux dettes de la communauté, quand même elles procéderaient de son chef, à moins qu'elles n'aient été contractées dans l'intérêt de ses propres; dans ce cas, il les supporte pour le tout. § IV. — Des droits de la veuve et des héritiers mineurs. Article 1530. La veuve a droit: 1° aux habits de deuil pour elle, ses enfants et ses domestiques; 2° aux aliments ainsi qu'à l'habitation pendant l'année du deuil, le tout aux frais de la masse commune. Article 1531. Les droits accordés à la veuve par l'article 1530 appartiennent aussi aux enfants, si la communauté se dissout par la mort de la femme. Article 1532. Les enfants et le père survivant pourront continuer à habiter la maison commune pendant l'année du deuil; si elle est tenue à bail, le loyer sera pris sur la masse commune. DEUXIÈME PARTIE. DE LA COMMUNAUTÉ CONVENTIONNELLE ET DES RÉGIMES EXCLUSIFS DE LA COMMUNAUTÉ. CHAPITRE PREMIER. De la communauté conventionnelle. SECTION Ier. Des conventions qui dérogent à la communauté légale. Article 1533. Les époux peuvent modifier la communauté légale par toute espèce de conventions non contraires aux articles 4430-4432 du présent titre. Article 1534. La communauté conventionnelle reste soumise aux règles de la communauté légale, pour tous les cas où il n'y a pas été dérogé implicitement ou explicitement par le contrat. Article 1535. Les conventions matrimoniales qui dérogent à la communauté légale, ainsi que celles qui l'excluent, n'ont d'effet à l'égard des tiers qu'à partir du jour où elles ont été transcrites sur un registre public, tenu au greffe du tribunal dans le ressort duquel le mariage a été célébré, ou dans lequel l'acte de mariage, célébré en pays étranger, a été inscrit sur les registres de l'état civil. SECTION II. De la communauté d'acquêts. Article 1536. Lorsque les époux stipulent qu'il n'y aura entre eux qu'une communauté d'acquêts, ils sont censés exclure de la communauté leurs biens respectifs, présents et futurs, meubles et immeubles, ainsi que les dettes de chacun d'eux, actuelles et futures. Article 1537. Chacun des époux prélève en ce cas, lors de la dissolution de la communauté, ses apports dûment justifiés, et le partage se borne aux acquêts faits par les époux ensemble ou séparément durant le mariage et provenant tant de leur travail que des économies faites sur les fruits et revenus de leurs biens. Article 1538. La justification des apports immobiliers se fait d'après le droit commun. Article 1539. Le mobilier existant lors du mariage, ou échu à chacun des époux pendant la communauté, doit régulièrement être constaté par inventaire ou état en bonne forme, tel qu'un acte de partage. L'inventaire ou l'état peut être fait par acte sous seing privé. Toutefois les tribunaux peuvent, selon les circonstances, admettre une autre preuve de l'apport. Telle serait la déclaration des époux faite au contrat de mariage, de la consistance et de la valeur du mobilier existant lors du mariage, ou une reconnaissance donnée par l'un des époux que le mobilier, apporté par son conjoint ou à lui échu, est d'une consistance et d'une valeur par lui indiquées. Article 1540. Les créanciers sont toujours admis à contester l'apport, quand il n'est pas prouvé par un acte authentique; les actes sous seing privé n'ont de date certaine à leur égard que par l'enregistrement. Article 1541. Si l'apport du mobilier présent ou futur n'a pas été légalement constaté, il est réputé acquêt et l'époux n'en peut exercer la reprise. SECTION III. Des clauses qui modifient la communauté d'acquêts. Article 1542. La communauté peut être réduite aux acquêts mobiliers ou immobiliers. Les acquisitions devront être faites de commun accord par les époux. Article 1543. Les époux peuvent stipuler que les acquêts appartiendront au survivant. Ils peuvent aussi les attribuer aux enfants à naître. SECTION IV. Des clauses de réalisation ou stipulations de propres. § Ier. — Des clauses expresses. Article 1544. Les époux peuvent exclure de la communauté tout ou partie de leur mobilier présent et futur. Article 1545. Les époux peuvent aussi exclure de la communauté leurs immeubles présents et futurs, en tout ou en partie. Article 1546. Ces clauses peuvent être réciproques ou stipulées par l'un des époux seulement; tout est subordonné à leurs convenances. Article 1547. Les époux peuvent se servir de tels termes qu'ils veulent; quoique ces clauses soient de droit étroit, le juge doit, avant tout, rechercher l'intention des parties, el si leur intention est d'étendre la clause, il doit l'interpréter en ce sens. Article 1548. Le mobilier ou les immeubles stipulés propres restent la propriété de l'époux, qui seul peut les aliéner. Les créanciers du mari ne peuvent saisir les meubles, ni les immeubles que la femme a stipulés propres. Article 1549. L'époux prélève en nature, avant le partage, les meubles et les immeubles qu'il a stipulés propres; ils sont à ses risques. L'apport doit être constaté comme dans la communauté d'acquêts (art. 1538-1541). Article 1550. L'exclusion du mobilier ou des immeubles emporte l'exclusion du passif qui y correspond. Les créanciers n'ont aucune action contre la communauté ni sur les biens qui la composent. Si l'exclusion ne porte que sur une quotité de biens, ou sur des objets déterminés, les créanciers peuvent poursuivre la communauté pour le tout, sauf le règlement de la portion contributoire entre époux. § II. — Des clauses d'apport. Article 1551. Il y a clause d'apport: 4° quand les époux conviennent de mettre en communauté des objets mobiliers ou des immeubles déterminés; la limitation qu'ils font de leur apport à ces objets emporte réalisation tacite du surplus; 2° lorsque les époux ou l'un d'eux stipulent qu'ils mettent leur mobilier ou leurs immeubles en communauté jusqu'à concurrence d'une somme ou d'une valeur déterminée; ils sont par cela seul censés se réserver le surplus. Article 1552. Quand l'apport porte sur des objets déterminés, la propriété en est transmise à la communauté par le seul fait de la convention. La seconde clause de l'article 4531 rend l'époux débiteur envers la communauté de la somme qu'il a promis d'y mettre. Si la communauté est évincée des effets que l'époux y a mis, il en est garant d'après le droit commun. Article 1553. La clause d'apport de l'article 1551, n°1, emporte exclusion des dettes antérieures au mariage; il doit être fait raison par l'époux débiteur à l'autre des dettes qui diminueraient l'apport promis. La séparation des dettes peut être opposée aux créanciers à condition que les époux aient fait inventaire de leur mobilier. Article 1554. La clause d'apport du n°2 de l'article 1551 n'emporte pas translation de propriété, ni séparation de dettes. L'époux a le droit de prélever, lors de la dissolution de la communauté, la valeur de ce dont son mobilier excède sa mise en communauté. Article 1555. Les principes qui régissent la réalisation du mobilier s'appliquent à la stipulation de propres immobiliers. § III. — De la clause d'emploi. Article 1556. La clause d'emploi est celle qui stipule qu'une somme d'argent sera employée en achat d'immeubles. La stipulation peut se faire, soit par le donateur dans l'acte de donation, soit par les époux dans leur contrat de mariage. Article 1557. La clause a pour effet de rendre propre l'immeuble acquis à titre d'emploi. Si l'emploi n'est pas fait, la somme reste propre à l'époux. Article 1558. Pour que l'emploi produise ses effets, l'acte doit constater que l'acquisition a été faite en exécution de la clause d'une donation ou d'un contrat de mariage. L'acte doit être transcrit pour que l'emploi puisse être opposé aux tiers. § IV. — Des effets des stipulations de propres. Article 1559. Lorsque l'époux met son mobilier ou ses immeubles en communauté jusqu'à concurrence d'une certaine somme, il ne peut pas les aliéner sans le concours de son conjoint. Article 1560. Les créanciers de l'époux qui a fait la stipulation ne peuvent pas saisir le mobilier et les immeubles qui sont entrés dans la communauté en vertu de la clause. Article 1561. Quand la communauté devient propriétaire en vertu de la clause, la chose est à ses risques. Article 1562. Dans les cas où les époux, en faisant un apport, se réservent facilement le surplus, les juges décideront, en recherchant l'intention des parties, si le surplus se rapporte aux biens présents et futurs. Article 1563. La consistance et la valeur du mobilier présent et futur, dans les clauses de réalisation tacite, se prouvent d'après les règles établies pour la communauté d'acquêts (art. 1538-1541). CHAPITRE II. Des régimes exclusifs de la communauté. SECTION Ier. De la séparation de biens. Article 1564. La séparation de biens conventionnelle est régie par les principes établis par le présent Code pour la séparation de biens judiciaire. Article 1565. La femme séparée conserve l'entière administration de ses biens, meubles et immeubles. Article 1566. La femme séparée peut aliéner son mobilier et ses immeubles. Toutefois si ces actes de disposition peuvent compromettre le droit que le mari a en vertu de l'article 1567, il devra y donner son consentement, conformément à l'article 1473 du présent Code. Article 1567. Chacun des époux contribue aux charges du mariage, suivant les conventions contenues en leur contrat: et s'il n'en existe point à cet égard, la femme contribue à ces charges, jusqu'à concurrence du tiers de ses revenus. Article 1568. Si la femme ne remplit pas son obligation, ou si elle se met dans, l'impossibilité de la remplir, le mari peut demander que le tribunal détermine un autre moyen de pourvoir aux charges. De même si le mari n'emploie pas les deniers de la femme à leur destination légale, la femme peut demander que le tribunal prescrive telles mesures que les circonstances exigeront. Article 1569. La femme séparée a la jouissance de ses revenus. Si elle donne procuration à son mari d'administrer ses biens, avec charge de lui rendre compte des fruits, il sera tenu à son égard comme tout mandataire. Si la femme laisse la jouissance des biens à son mari, sans mandat, elle est censée lui abandonner les fruits pour ses besoins et ceux de la famille. Le mari ne devra compte, en ce cas, sur la demande de la femme ou à la dissolution du mariage, que des fruits existants et des revenus qu'il aurait placés ou employés à son profit personnel; il n'est point comptable des fruits consommés. Article 1570. Si le mari a joui des biens malgré l'opposition constatée de la femme, il est comptable envers elle de tous les fruits tant existants que consommés. SECTION II. Du régime dotal. Article 1571. Les futurs époux, qui entendent se marier sous le régime dotal, en doivent faire la déclaration expresse dans le contrat de mariage. La simple stipulation que la femme se constitue ou qu'il lui est constitué des biens en dot, ne suffit pas pour soumettre ces biens au régime dotal. § Ier. — De la constitution de dot. Article 1572. Tout ce que la femme se constitue ou qui lui est donné en contrat de mariage est dotal, s'il n'y a stipulation contraire. Article 1573. La constitution de dot peut frapper tous les biens présents et à venir de la femme, ou tous ses biens présents, ou ses biens à venir, ou une partie de ses biens présents et à venir, ou môme un objet individuel. Article 1574. Tous les biens de la femme qui n'ont pas été constitués en dot sont paraphernaux. Article 1575. Les conventions de dotalité doivent être interprétées dans un sens restrictif. En cas de doute, le juge se prononcera contre la dotalité. Article 1576. La constitution, en termes généraux, de tous les biens de la femme ne comprend pas les biens à venir. Article 1577. Si la femme se réserve certains biens comme paraphernaux, les autres seront par cela même dotaux. Article 1578. La dot ne peut être constituée ni même augmentée pendant le mariage. Toutefois la dotalité peut résulter de la subrogation dans les cas et sous les conditions déterminées par la loi. Article 1579. Le contrat de mariage peut stipuler qu'emploi sera fait des deniers dotaux en immeubles; les biens acquis en exécution de cette clause seront dotaux, et partant inaliénables. L'acte d'acquisition doit contenir la déclaration que l'acquisition est faite avec les deniers dotaux, en vertu d'une clause du contrat de mariage. Article 1580. L'immeuble donné en payement de la dot constituée en argent est dotal. L'acte constatant la dation en payement doit être transcrit pour que la dotalité puisse être opposée aux tiers. Article 1581. Si un immeuble dotal est aliéné en vertu de l'une des causes prévues par l'article 1593, et s'il y a un excédent du prix de vente au-dessus des besoins reconnus, l'immeuble acquis en remploi de ces deniers sera dotal, à condition que l'acte d'acquisition déclare l'origine des deniers et la destination de l'immeuble. Pour que la dotalité puisse être opposée aux tiers, il faut, de plus, que l'acte d'acquisition soit transcrit. Article 1582. Si un immeuble dotal indivis entre la femme et des tiers est licité, l'immeuble acheté avec les deniers qui forment la part de la femme dans le prix sera dotal, à condition que l'acte d'emploi constate l'origine des deniers; il doit être transcrit pour que la dotalité puisse être opposée aux tiers. Article 1583. L'immeuble reçu par la femme en échange d'un fonds dotal, conformément à l'article 1594, est dotal. Il en est de même de l'immeuble acquis pour faire emploi de la soulte, à condition que l'acte d'emploi mentionne l'origine des deniers * et leur destination. L'acte d'emploi doit être transcrit pour que la dotalité puisse être opposée aux tiers. § II. — Des droits du mari sur les biens dotaux. Article 1584. Le mari seul a l'administration des biens dotaux pendant le mariage. Il a seul le droit d'en poursuivre les débiteurs et détenteurs, d'en percevoir les fruits et les intérêts et de recevoir le remboursement des capitaux. Cependant il peut être convenu, par le contrat de mariage, que la femme touchera annuellement, sur ses seules quittances, une partie de ses revenus pour son entretien et ses besoins personnels. Article 1585. Le mari n'est pas tenu de fournir caution pour la réception de la dol, s'il n'y a pas été assujetti par le contrat de mariage. § III. — Des droits du mari quand il devient propriétaire des biens dotaux. Article 1586. Si la dot comprend des choses dont on ne peut faire usage sans les consommer, le mari en devient propriétaire, à charge d'en rendre de pareille quantité, qualité et valeur à la fin de sa jouissance. Il en est de même si la dot comprend des objets mobiliers destinés à être vendus. Article 1587. Si la dot ou partie de la dot consiste en objets mobiliers mis à prix par le contrat, sans déclaration que l'estimation n'en fait pas vente, le mari en devient propriétaire, et n'est débiteur que du prix donné au mobilier. Article 1588. L'estimation donnée à l'immeuble constitué en dol n'en transporte point la propriété au mari, s'il n'y en a déclaration expresse. Article 1589. Quand le mari devient propriétaire des biens dotaux, il a tous les droits qui découlent de la propriété. § IV. — De l'inaliénabilité de la dot. N° 1. — De l'inaliénabilité des immeubles dotaux. Article 1590. Les immeubles dotaux ne peuvent être aliénés ou hypothéqués pendant le mariage, ni par le mari, ni par la femme, ni par les deux conjointement, sauf les exceptions qui suivent. Article 1591. La femme peut, avec le concours de son mari, donner ses biens dotaux pour l'établissement de leurs enfants communs, et même des enfants qu'elle aurait d'un mariage antérieur. En cas de dissentiment des époux, le tribunal décidera s'il y a lieu de disposer des biens dotaux. Article 1592. L'immeuble dotal peut être aliéné ou hypothéqué si l'aliénation en a été permise par contrat de mariage. Article 1593. L'immeuble dotal peut encore être aliéné avec permission de justice: 1° Pour tirer de prison le mari ou la femme; 2° Pour fournir des aliments à la famille, quand l'un des époux est tenu de la dette alimentaire; 3° Pour payer les dettes de la femme, antérieures au mariage, quand elles ont une date certaine, ainsi que pour les dettes de ceux qui ont constitué la dol, quand la femme en est tenue; 4° Pour faire de grosses réparations indispensables pour la conservation d'un immeuble ou d'une partie d'un immeuble dotal; 5° Lorsqu'un immeuble se trouve indivis avec des tiers et qu'il est reconnu impartageable. L'aliénation, dans ces divers cas, se fera d'après les formes prescrites par le Code de procédure civile. L'excédent du prix de la vente au-dessus des besoins reconnus sera dotal, et il en sera fait emploi comme tel au profit de la femme. N° 2 — Des conséquences de l'inaliénabilité. Article 1594. L'immeuble dotal peut être échangé par la femme contre un autre immeuble de même valeur, pour les quatre cinquièmes au moins, avec autorisation de justice, après une estimation par experts nommés d'office par le tribunal. Dans ce cas, l'immeuble reçu en échange sera dotal; l'excédent du prix, s'il y en a, le sera aussi, et il en sera fait emploi comme tel au profit de la femme. Article 1595. Si la femme a aliéné l'immeuble dotal, elle peut demander la nullité de l'aliénation d'après le droit commun qui régit l'action en nullité. Si c'est le mari qui l'a aliéné, la femme peut agir en revendication. Les héritiers de la femme ont les mêmes droits que leur auteur. La femme ne peut agir qu'après la dissolution du mariage, ou après la dissolution du régime dotal par la séparation de biens. Article 1596. Le mari peut exercer pendant le mariage l'action en nullité qui appartient à la femme. Quand c'est lui qui a vendu, il peut revendiquer, pendant le mariage, comme administrateur des biens de la femme, en demeurant néanmoins sujet aux dommages-intérêts de l'acheteur, s'il n'a pas déclaré dans le contrat que le bien vendu était dotal. Si le fonds dotal a été vendu par les deux époux, on applique les principes qui régissent l'aliénation faite par la femme. Article 1597. Les immeubles dotaux sont imprescriptibles pendant le mariage, en ce sens que la prescription ne court point contre la femme. Elle commence à courir après la dissolution du mariage, et même pendant le mariage, si le régime est dissous par la séparation de biens. Il en est même ainsi si le tiers possède en vertu d'une vente consentie par le mari ou par la femme. N° 3. — De l'inaliénabilité et de la publicité de la dot mobilière. Article 1598. La dot mobilière est inaliénable. Article 1599. Si la dot comprend des rentes sur l'État, des titres industriels ou commerciaux, soit nominatifs, soit au porteur, ou des meubles corporels, le contrat de mariage ou un inventaire signé des parties et du notaire en contiendra la description. L'état sera transcrit avec le contrat de mariage sur le registre destiné à la publicité des conventions matrimoniales. Il en sera délivré copie par le greffier à ceux qui la demanderont. Article 1600. A défaut de cette publicité, la dotalité des effets mobiliers ne pourra pas être opposée aux tiers de bonne foi. Article 1601. Les effets mobiliers dont la dotalité est rendue publique conformément à l'article 1599 ne peuvent être aliénés pendant le mariage, ni par le mari, ni par la femme, ni par les deux conjointement, sauf dans les cas où la loi permet l'aliénation des immeubles dotaux. Néanmoins, le juge peut autoriser l'aliénation du mobilier dotal pour cause de nécessité ou d'avantage évident. Article 1602. Si des effets dotaux ont été aliénés hors ces cas, la femme, le mari et leurs héritiers pourront demander la nullité de la vente ou revendiquer les effets aliénés, d'après les distinctions faites par les articles 1595 et 1596. L'action doit être intentée dans l'année de la vente. N° 4. — Des conséquences de l'inaliénabilité des biens dotaux. Article 1603. La femme, en contractant, n'oblige point ses biens dotaux, ni ses meubles, ni ses immeubles, pourvu que la dotalité ait été rendue publique. Article 1604. La femme ne peut céder la créance en restitution qu'elle a contre son mari ni subroger le cessionnaire à l'hypothèque légale qu'elle a sur les biens de son mari. Elle ne peut faire aucun acte qui puisse compromettre sa dot, ni directement, ni indirectement. Article 1605. Les créanciers antérieurs au mariage conservent leur gage sur les biens que la femme se constitue en dot, pourvu que les dettes aient date certaine, mais ils ne peuvent saisir que la nue propriété des biens. Ils n'ont pas d'action sur les biens qui sont donnés à la femme par son contrat de mariage. Article 1606. Si les dettes ont été contractées dans l'intervalle qui sépare le contrat de mariage de la célébration du mariage, les créanciers n'auront pas le droit de saisir les biens de la femme. Article 1607. Si la femme s'oblige pendant le mariage, les créanciers n'auront aucune action sur ses biens dotaux, même après la dissolution du mariage par la mort du mari. Ils ne peuvent agir que sur ses biens paraphernaux et sur les biens qu'elle acquerra. Article 1608. La femme n'engage pas non plus les fruits de sa dot par les obligations qu'elle contracte pendant le mariage. Les créanciers ont action sur les fruits des biens dotaux après la dissolution du mariage. § V. — De la séparation de biens. Article 1609. Le mari doit administrer en bon père de famille. Il est soumis à toutes les obligations de l'usufruitier. Article 1610. Si la dot de la femme est mise en péril, ou si le mari manque à ses obligations d'administrateur et d'usufruitier, la femme pourra demander la séparation de biens, conformément aux articles 1488-1493. Article 1611. La séparation prononcée par le juge dissout le régime dotal et le remplace par celui de la séparation de biens. Toutefois, les effets produits par le régime dotal subsistent; les biens frappés de dotalité restent inaliénables. Les créanciers antérieurs à la séparation ne peuvent pas les saisir. § VI. — De la restitution de la dot. Article 1612. La femme qui demande la restitution de sa dot doit prouver que le mari l'a reçue. Toutefois, si le mariage a duré dix ans depuis l'échéance des termes pris pour le payement de la dot, la femme ou ses héritiers pourront la répéter contre le mari après la dissolution du mariage, sans être tenus de prouver qu'il l'a reçue, à moins qu'il ne justifiât de diligences inutiles par lui faites pour s'en procurer le payement. Article 1613. Si les biens ont été constitués par la femme, elle doit faire la preuve de la réception d'après le droit commun. Si la dot a été constituée par un tiers, la femme peut prouver par témoins et par présomptions que le mari l'a reçue. Article 1614. La restitution des biens dotaux se fait en nature quand la femme en est restée propriétaire. Article 1615. Si les biens ont augmenté de valeur sans le fait du mari, il n'a droit à aucune indemnité. S'il a amélioré les biens par ses travaux, il peut réclamer les dépenses utiles jusqu'à concurrence de la plus-value, et la totalité des dépenses nécessaires; les réparations restent à sa charge. En cas de diminution de valeur, le mari restitue les biens dans l'état où ils se trouvent lors de la dissolution du régime dotal. Article 1616. Le mari jouit du droit de rétention pour ce qui lui est dû à titre d'impenses. Article 1617. Si les meubles dont la femme est restée propriétaire ont été détériorés par cas fortuit, le mari est libéré en prouvant le cas fortuit. Il en est de même s'ils ont dépéri par l'usage et sans la faute du mari. La femme peut retirer les effets du trousseau à l'usage de sa personne, quand même la valeur en serait plus grande que ceux qu'elle a apportés, et sans distinguer si elle en est restée ou non propriétaire. Article 1618. Si la dot comprend des obligations, actions ou constitutions de rente qui ont péri, ou souffert des retranchements qu'on ne puisse imputer à la négligence du mari, il n'en sera point tenu compte et il se libérera en restituant les titres. Article 1619. Si un usufruit ou une rente viagère ont été constitués en dot, le mari ne doit restituer à la dissolution du mariage que le droit, et non les fruits ou arrérages échus pendant le mariage. Article 1620. Le mari doit les intérêts et les fruits de la dot, de plein droit, à partir de la dissolution du mariage. Article 1621. A la dissolution du mariage, les fruits des immeubles dotaux se partagent entre le mari et la femme ou leurs héritiers, à proportion du temps qu'il a duré, pendant la dernière année. L'année commence à partir du jour où le mariage a été célébré. Article 1622. Le mari qui ne devient pas propriétaire des biens dotaux peut être contraint à les restituer sans délai après la dissolution du mariage. Si le mari en devient propriétaire, la restitution ne peut être exigée qu'un an après la dissolution. Article 1623. La femme doit rapporter à la succession du donateur la dot qu'elle a reçue ou l'action en restitution qu'elle a contre son mari. Mais si le mari était déjà insolvable, et n'avait ni art ni profession lorsque le père a constitué une dot à sa fille, celle-ci ne sera tenue de rapporter à la succession du père que l'action qu'elle a contre celle de son mari pour s'en faire rembourser. Article 1624. Si le mariage est dissous par la mort du mari, la femme a le choix d'exiger les intérêts et les fruits de sa dot pendant l'an de deuil, ou de se faire fournir des aliments pendant ce temps aux dépens de la succession du mari. Dans les deux cas, l'habitation durant cette année et les habits de deuil doivent lui être fournis sur la succession, et sans imputation sur les fruits et les intérêts à elle dus. § VII. — Des biens paraphernaux. Article 1625. Les biens paraphernaux sont soumis aux règles qui concernent la séparation de biens judiciaire et conventionnelle. Article 1626. Si la femme a des biens dotaux, elle contribue aux charges du mariage par les fruits et les intérêts de sa dot. Si tous ses biens sont paraphernaux, elle y contribue pour le tiers de ses revenus, sauf convention contraire. § VIII. — Dispositions générales. Article 1627. En se soumettant au régime dotal, les époux peuvent néanmoins stipuler une société d'acquêts, dont les effets sont réglés par les articles relatifs à la communauté d'acquêts. Article 1628. L'inaliénabilité des biens dotaux peut être stipulée sous tous les régimes; la stipulation doit être faite en termes exprès, mais non sacramentels. Elle est expresse quand l'ensemble des clauses du contrat de mariage ne laisse pas de doute sur la volonté des parties de rendre les biens inaliénables. L'intention des parties ne peut pas résulter des circonstances de la cause. TITRE V. De la vente. CHAPITRE PREMIER. De la nature et de la forme de la vente. Article 1629. La vente est une convention par laquelle l'un des contractants s'oblige à transférer la propriété d'une chose, et l'autre à payer une certaine somme d'argent, comme prix de celte chose. Article 1630. La forme de la vente n'est soumise à aucune règle spéciale. Entre les parties, l'écrit authentique ou sous seing privé qui constate la vente ne sert que de preuve, à moins que les contractants n'aient fait de la rédaction d'un acte une condition de leurs conventions. Article 1631. A l'égard des tiers, on applique les règles établies par le présent titre pour la cession des créances, et au titre Des privilèges et hypothèques pour la transmission des droits réels immobiliers. Article 1632. La vente est parfaite entre les parties et la propriété est acquise à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès que l'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée, ni le prix payé. A l'égard des tiers, la propriété se transfère d'après les distinctions établies par les articles 1089 et 1090. Article 1633. La promesse réciproque de vendre et d'acheter vaut vente et elle en produit tous les effets. La promesse unilatérale de vendre ou d'acheter oblige le promettant, si elle a été acceptée par celui à qui elle est faite; elle ne vaut vente que lorsque celui-ci a déclaré qu'il veut acheter ou vendre. Article 1634. L'effet de la vente faite sous condition suspensive ou résolutoire, ou qui a pour objet deux ou plusieurs choses alternatives, est réglé par les principes généraux des conventions. Article 1635. Lorsque des marchandises sont vendues au poids, au compte ou à la mesure, la propriété n'en est pas transférée à l'acheteur tant que les choses vendues restent indéterminées. Si les marchandises sont vendues en bloc, la propriété en est transmise à l'acheteur d'après le droit commun. Article 1636. A l'égard du vin, de l'huile et des autres choses que l'on est dans l'usage de goûter avant d'en faire l'achat, il n'y a point de vente, si les parties s'en sont rapportées au goût de l'acheteur, tant que celui-ci ne les a point goûtées et agréées; il n'y a qu'une promesse unilatérale de vente. Article 1637. La vente faite à l'essai est présumée faite sous une condition soit suspensive, soit résolutoire. Article 1638. Si la vente a été faite avec des arrhes, dans l'intention que chacun des contractants soit libre de se départir du contrat, celui qui les a données pourra user de cette faculté en les perdant, et celui qui les a reçues, en restituant le double. Article 1639. Le prix de la vente doit être déterminé et désigné par les parties. Article 1640. Le prix peut cependant être laissé à l'arbitrage d'un tiers; dans ce cas la vente est conditionnelle. Article 1641. Les parties ne peuvent pas convenir que le choix des arbitres se fera postérieurement à la vente. Article 1642. En aucun cas, le juge ne peut désigner les arbitres; il ne lui est pas permis de modifier l'estimation qu'ils ont faite. Article 1643. Le prix de la vente doit être sérieux, et convenu avec l'intention qu'il pourra être exigé de l'acheteur. La vileté du prix n'empêche pas qu'il soit sérieux, si, dans la pensée des parties, il forme une condition essentielle de la vente. Le prix ne doit pas non plus être proportionné à la valeur de la chose: le prix disproportionné est sérieux, si telle est l'intention des parties. CHAPITRE II Qui peut acheter ou vendre. Article 1644. Tous ceux auxquels la loi ne l'interdit pas peuvent acheter ou vendre. Article 1645. Ne peuvent se rendre acquéreurs ou cessionnaires, sous peine de nullité, ni par eux-mêmes, ni par personnes interposées: 1° Les pères, des biens et droits dont ils ont l'administration légale; 2° Les tuteurs et cotuteurs, des biens et droits des mineurs et des interdits; 3° Les administrateurs, des biens et droits appartenant aux aliénés colloqués dans un hospice ou une maison de santé; 4° Les mandataires, des biens qu'ils sont chargés de vendre; 5° Les administrateurs des communes et établissements publics, des biens et droits dont la gestion leur est confiée; 6° Les officiers publics, des biens nationaux dont les ventes se font par leur ministère. Article 1646. Les magistrats, les greffiers, huissiers, avoués, avocats et notaires, ne peuvent devenir cessionnaires, à peine de nullité, des droits et actions litigieux qui sont de la compétence du tribunal ou de la cour dans le ressort desquels ils exercent leurs fonctions. La nullité peut être invoquée par toutes les parties intéressées, même par les cessionnaires. CHAPITRE III. Des choses qui peuvent être vendues. Article 1647. Tout ce qui est dans le commerce peut être vendu, lorsque des lois particulières n'en ont pas prohibé l'aliénation. Article 1648. On ne peut vendre la succession d'une personne vivante, à moins qu'elle n'y consente. Article 1649. Si, au moment de la vente, la chose vendue est périe en totalité, il n'y a pas de vente. Si une partie seulement de la chose est périe, il est au choix de l'acquéreur d'abandonner la vente, ou de demander la partie conservée, en faisant déterminer le prix par la ventilation. CHAPITRE IV. Des obligations du vendeur. SECTION Ier. Dispositions générales. Article 1650. Le vendeur a deux obligations principales: 1° de transférer la propriété de la chose qu'il vend, et, par suite, de la délivrer; 2° de garantir la chose qu'il vend. Article 1651. Tout pacte obscur, concernant l'état de la chose vendue, s'interprète contre le vendeur. SECTION II. Du transport de la propriété. Article 1652. Quand le vendeur vend la chose d'autrui, l'acheteur peut immédiatement demander la résolution de la vente, en prouvant que la chose n'appartenait pas au vendeur. Article 1653. Si l'acheteur ignorait que la chose fût à autrui, il a droit à des dom-mages-intérêts; alors même qu'il le savait, il peut demander la restitution du prix avec les intérêts; le tout en vertu de la résolution du contrat. Article 1654. Quand l'acheteur ne peut pas prouver que le vendeur a vendu la chose d'autrui, il a seulement le droit de suspendre le payement du prix, s'il est troublé ou s'il a un juste sujet de craindre d'être troublé par une action hypothécaire ou en revendication, jusqu'à ce que le vendeur ait fait cesser le trouble ou qu'il ait donné caution. SECTION III. De la délivrance. Article 1655. La délivrance est le transport de la chose vendue en la possession et jouissance de l'acheteur. Article 1656. L'obligation de délivrer les immeubles est remplie de la part du vendeur lorsqu'il a remis les clefs, s'il s'agit d'un bâtiment, ou lorsqu'il a remis ses litres de propriété. Article 1657. La délivrance des effets mobiliers s'opère: ou par la remise de la chose de la main à la main, ou par la remise des clefs des bâtiments qui les contiennent, ou même par le seul consentement des parties, si le transport ne peut pas s'en faire au moment de la vente, ou si l'acheteur les avait déjà en sa possession à un autre titre. Article 1658. La délivrance des droits et créances se fait, ou par la remise des titres, ou par l'usage que l'acquéreur en fait du consentement du vendeur. Article 1659. Les frais de la délivrance sont à la charge du vendeur, et ceux de l'enlèvement à la charge de l'acheteur. Article 1660. Le vendeur doit faire la délivrance dès que la vente est parfaite, à moins qu'il n'ait stipulé un terme. Néanmoins il n'est pas tenu de délivrer la chose si l'acheteur n'en paye pas le prix, et que le vendeur ne lui ait pas accordé un délai pour le payement. Il n'est pas non plus obligé à la délivrance, quand même il aurait accordé un délai pour le payement, si, depuis la vente, l'acheteur est tombé en faillite ou en déconfiture, de sorte que le vendeur se trouve en danger imminent de perdre le prix; à moins que l'acheteur ne lui donne caution de payer au terme. Article 1661. La délivrance doit se faire au lieu où était, au temps de la vente, la chose qui en est l'objet, s'il n'en a été autrement convenu. Article 1662. Si le vendeur manque à faire la délivrance dans le temps et au lieu convenus, l'acquéreur pourra, à son choix, demander la résolution de la vente, ou sa mise en possession, si le retard ne vient que du fait du vendeur. Article 1663. Dans tous les cas, le vendeur doit être condamné aux dommages-intérêts, s'il résulte un préjudice pour l'acquéreur du défaut de délivrance au terme et au lieu convenus. Article 1664. La chose doit être délivrée en l'état où elle se trouve au moment de la vente, en ce sens que le vendeur ne peut plus en changer l'état; l'acheteur supporte les cas fortuits si la chose a été détériorée. Depuis ce jour, tous les fruits appartiennent à l'acquéreur. Article 1665. L'obligation de délivrer la chose comprend ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel, ainsi que les droits du vendeur à la chose vendue. Quant aux accessoires, il faut consulter l'intention des parties contractantes. Article 1666. Le vendeur est tenu de délivrer la contenance telle qu'elle est portée au contrat, sous les modifications ci-après exprimées. Article 1667. Si la vente d'un immeuble a été faite avec indication de la contenance, à raison de tant la mesure, le vendeur est obligé de délivrer à l'acquéreur, s'il l'exige, la quantité indiquée au contrat; Et si la chose ne lui est pas possible, ou si l'acheteur ne l'exige pas, le vendeur est obligé de souffrir une diminution proportionnelle du prix. Si, dans ce cas, il se trouve une contenance plus grande que celle exprimée au contrat, l'acquéreur a le choix de fournir le supplément du prix, ou de se désister du contrat, si l'excédent est d'un vingtième au-dessus de la contenance déclarée. Article 1668. Si la convention, tout en indiquant la contenance, ne porte pas que la vente est faite à raison de tant la mesure, il n'y a lieu ni à un supplément ni à une diminution du prix pour l'excédent de mesure ou pour le déficit; à moins que la différence de la mesure réelle à celle exprimée au contrat ne soit d'un vingtième en plus ou en moins, eu égard à la totalité des biens vendus; le tout, sauf stipulation contraire. Article 1669. Dans le cas où il y a lieu à augmentation de prix pour excédent de mesure, l'acquéreur a le choix, ou de se désister du contrat, ou de fournir le supplément du prix, et ce, avec les intérêts s'il a gardé l'immeuble. Article 1670. Dans tous les cas où l'acheteur a le droit de se désister du contrat, le vendeur est tenu de lui restituer, outre le prix, s'il l'a reçu, les frais du contrat. Article 1671. L'action en supplément de prix de la part du vendeur et celle en diminution de prix ou en résiliation du contrat de la part de l'acheteur doivent être intentées dans l'année, à compter du jour du contrat, sous peine de déchéance. Article 1672. S'il a été vendu deux fonds par le même contrat, et pour un seul et même prix, avec la désignation de la mesure de chacun, et qu'il se trouve moins de contenance en l'un et plus en l'autre, on fait compensation jusqu'à due concurrence, et l'action, soit en supplément, soit en diminution du prix, n'a lieu que suivant les règles ci-dessus établies. SECTION IV. De la garantie. Article 1673. La garantie que le vendeur doit à l'acheteur a deux objets: le premier est la possession paisible de la chose vendue; le second, les défauts cachés de cette chose ou les vices résolutoires. § 1er. — De la garantie en cas d'éviction. Article 1674. L'objet primitif de la garantie est de défendre l'acheteur contre les tiers qui le troublent dans l'exercice de son droit. L'obligation et l'exception de garantie sont indivisibles. Article 1675. Tout vendeur est obligé de droit à garantir l'acheteur de l'éviction qu'il souffre dans la totalité ou dans une partie de l'objet vendu. Article 1676. La garantie est de droit, mais les parties peuvent l'étendre ou la diminuer; elles peuvent même convenir que le vendeur ne sera soumis à aucune garantie. Article 1677. Malgré la stipulation de non-garantie, le vendeur est tenu de ses faits personnels postérieurs à la vente, et de la restitution du prix en cas d'éviction. Article 1678. Le vendeur ne doit pas restituer le prix quand la vente est aléatoire. Article 1679. Si l'acquéreur est évincé, il a droit de demander contre le vendeur 1° la restitution du prix et des intérêts, à charge par lui de restituer les fruits; 2° les frais faits sur la demande en garantie et ceux faits par le demandeur originaire; 3° les frais et loyaux coûts du contrat; 4° les dommages et intérêts suivant les règles établies au titre Des obligations, et notamment les dommages et intérêts prévus par les articles suivants. Article 1680. Lorsque à l'époque de l'éviction la chose vendue se trouve diminuée de valeur, ou considérablement détériorée, soit par la négligence de l'acheteur, soit par dés accidents de force majeure, le vendeur n'en est pas moins tenu de restituer la totalité du prix. Mais si l'acquéreur a tiré profit des dégradations par lui faites, le vendeur a droit de retenir sur le prix une somme égale à ce profit. Article 1681. Si la chose vendue se trouve avoir augmenté de valeur à l'époque de l'éviction, indépendamment même du fait de l'acquéreur, le vendeur est tenu de lui payer ce qu'elle vaut au-dessus du prix de la vente. Article 1682. Si le vendeur a vendu de mauvaise foi le fonds d'autrui, il sera obligé de rembourser à l'acquéreur toutes les dépenses même voluptuaires que celui-ci aura faites sur le fonds. Le vendeur de bonne foi n'est tenu de rembourser à l'acquéreur que les dépenses utiles. Article 1683. Si l'acquéreur n'est évincé que d'une partie de la chose et qu'elle soit de telle conséquence, relativement au tout, qu'il n'eût point acheté sans la partie dont il a été évincé, il peut demander la résolution de la vente. Article 1684. Si, dans le cas de l'éviction d'une partie du fonds vendu, la vente n'est pas résolue, la valeur de la partie dont l'acquéreur se trouve évincé lui est remboursée suivant l'estimation à l'époque de l'éviction, et non proportionnellement au prix total de la vente, soit que la chose ait augmenté ou diminué de valeur. Article 1685. Si l'héritage vendu se trouve grevé, sans qu'il en ait été fait de déclaration, de droits réels qui démembrent la propriété, et qu'ils soient d'une telle importance qu'il y ait lieu de présumer que l'acquéreur n'aurait pas acheté, s'il en avait été instruit, il peut demander la résolution du contrat, si mieux il n'aime se contenter d'une indemnité. Article 1686. L'acheteur ne peut pas demander la résolution s'il avait connaissance de la charge lors de la vente; il est présumé la connaître s'il s'agit d'une servitude apparente. Si la vente n'est pas résiliée, l'acheteur a droit à une indemnité qui s'estime comme dans le cas de l'article 4684. Article 1687. La garantie pour cause d'éviction cesse lorsque l'acquéreur s'est laissé condamner par un jugement en dernier ressort, ou dont l'appel n'est plus recevable, sans appeler le vendeur en cause, si celui-ci prouve qu'il existait des moyens suffisants pour faire rejeter la demande. § II. — De la garantie des vices résolutoires. Article 1688. Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue, qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui en diminuent tellement l'usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, s'il les avait connus. Article 1689. Le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même. Il ne doit pas de garantie à l'acheteur si celui-ci avait connaissance du vice, quoiqu'il fût caché. Article 1690. Le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie. Article 1691. L'acheteur qui demande la résolution de la vente doit prouver que le vice existait au temps du contrat. Article 1692. En cas de résolution de la vente, les dommages et intérêts sont réglés d'après les principes généraux établis au titre Des obligations. Article 1693. Si la chose viciée a péri par suite de sa mauvaise qualité, la perte est pour le vendeur, qui restera tenu de la garantie. Il en est de même si la chose périt par cas fortuit. Article 1694. L'action pour vices résolutoires a lieu dans toutes ventes, même dans celles qui se font par autorité de justice. Article 1695. Un arrêté royal déterminera quels sont les vices résolutoires dans les cas non prévus par les arrêtés pris en exécution de la loi du 28 janvier 1850. Ce même arrêté fixera le délai dans lequel l'action résolutoire devra être formée. CHAPITRE V. Des obligations de l'acheteur. Article 1696. Les principales obligations de l'acheteur sont: 1° de prendre livraison de la chose; 2° de payer le prix au jour et au lieu réglés par le contrat; 3° de payer les frais de vente. SECTION Ier. Du payement du prix. Article 1697. S'il n'a rien été réglé à cet égard lors de la vente, l'acheteur doit payer le prix au lieu et dans le temps où doit se faire la délivrance. Si la délivrance a lieu successivement, le payement du prix se fera partiellement, lors de chaque fourniture, ou pour le tout, lors de l'une des fournitures partielles, selon l'intention des parties contractantes. Si le vendeur a accordé un terme à l'acheteur, on rentre dans le droit commun, à moins que l'intention du vendeur ne soit contraire. Article 1698. L'acheteur doit l'intérêt du prix: 1° si telle est la convention des parties; 2° s'il a été mis en demeure, à partir de la demeure; 3° si la chose vendue produit des fruits ou d'autres revenus, ou s'il en retire une utilité appréciable en argent. Article 1699. Si l'acheteur ne paye pas le prix, le vendeur peut demander la résolution de la vente. Article 1700. La résolution de la vente d'immeubles est prononcée de suite si le vendeur est en danger de perdre la chose et le prix. Si ce danger n'existe pas, le juge peut accorder à l'acquéreur un délai plus ou moins long, selon les circonstances. Ce délai passé, sans que l'acquéreur ait payé, la résolution de la vente sera prononcée. Article 1701. S'il a été stipulé, lors de la vente d'immeubles que, faute de payement du prix dans le terme convenu, la vente sera résolue de plein droit, la résolution aura lieu sans l'intervention du juge, du moment que le vendeur aura fait connaître sa volonté d'opter pour la résolution par une sommation. Jusque-là la vente subsiste et l'acheteur a le droit de payer. Les parties sont, du reste, libres de stipuler le pacte commissoire dans tels termes et avec tel effet qu'elles jugent convenables. SECTION II. De l'obligation de retirer la chose vendue. Article 1702. L'acheteur doit retirer la chose dans le délai fixé par le contrat, et, à défaut de convention, par les usages du lieu. Article 1703. S'il n'y a pas de terme fixé pour le retirement, l'acheteur doit y procéder de suite. S'il ne le fait point, le vendeur peut demander la résolution de la vente, ou se faire autoriser par le juge à déposer les marchandises dans un lieu désigné par le jugement. Le vendeur a droit aux dommages-intérêts après la mise en demeure de l'acheteur. Article 1704. Si le vendeur a fait des dépenses pour la conservation ou l'entretien de la chose, l'acheteur devra les lui rembourser. Article 1705. S'il y a un délai fixé pour le retirement des denrées ou marchandises, la résolution de la vente aura lieu sans mise en demeure, au profit du vendeur, avec dommages-intérêts, s'il y a lieu, après l'expiration du terme convenu. CHAPITRE VI. De la résolution de la vente et de la faculté de rachat. Article 1706. Indépendamment des causes de résolution expliquées dans ce titre, et de celles qui sont communes à toutes les conventions, le contrat de vente peut être résolu par l'exercice de la faculté de rachat. Il ne peut pas être rescindé pour cause de lésion. Article 1707. La résolution volontaire consentie par les parties n'est pas une résolution de la vente, quand même elle se ferait en cas d'inexécution des engagements de l'une des parties; c'est une nouvelle vente. Article 1708. La résolution peut être prononcée par le juge pour inexécution des engagements de l'une des parties, sans que cette inexécution ait été constatée par une mise en demeure. Article 1709. La faculté de rachat ou de réméré est une condition résolutoire potestative, en vertu de laquelle le vendeur peut reprendre la chose vendue, moyennant le remboursement du prix et des autres prestations mentionnées à l'article 4746. Article 1710. La faculté de rachat ne peut être stipulée pour un terme excédant cinq années. Si elle a été stipulée pour un terme plus long, elle est réduite à ce terme. Article 1711. Le terme fixé est de rigueur et ne peut être prolongé par le juge. Article 1712. Faute par le vendeur d'avoir usé de son droit dans le terme prescrit, l'acquéreur demeure propriétaire irrévocable. Article 1713. Le délai court contre toutes personnes, même contre les mineurs; sauf, s'il y a lieu, le recours contre qui de droit. Article 1714. Pendant que la condition du rachat est en suspens, l'acheteur est propriétaire, sous condition résolutoire, et le vendeur a un droit conditionnel sur la chose. Les actes de disposition que l'un et l'autre peuvent faire sont affectés de la même condition. Article 1715. La résolution de la vente s'opère dès que le vendeur déclare qu'il veut exercer son droit. Article 1716. Le vendeur qui use du pacte de rachat doit rembourser à l'acheteur: 4° le prix cl les intérêts; 2° les frais et loyaux coûts de la vente; 3° les réparations nécessaires et celles qui ont augmenté la valeur du fonds, jusqu'à concurrence de cette augmentation. Il ne peut entrer en possession qu'après avoir satisfait à toutes ces obligations. Article 1717. Quand la vente est résolue, les droits consentis par l'acheteur le sont également. Il y a exception pour les baux faits sans fraude. Article 1718. En cas de revente, le vendeur à pacte de rachat peut revendiquer l'immeuble contre le second acquéreur. Article 1719. Si l'acquéreur à pacte de réméré d'une partie indivise d'un héritage s'est rendu acquéreur de la totalité sur une licitation provoquée contre lui, il peut obliger le vendeur à retirer le tout, lorsque celui-ci veut user du pacte. Article 1720. L'exercice du droit de rachat est divisible; si plusieurs ont vendu conjointement, et par un seul contrat, un héritage commun, ou si un vendeur unique laisse plusieurs héritiers, chacun ne peut user du pacte que pour sa part. Néanmoins l'acquéreur peut exiger que tous les covendeurs ou tous les cohéritiers soient mis en cause, afin de se concilier pour la reprise de l'héritage entier, et s'ils ne se concilient pas, il sera renvoyé de la demande. Article 1721. Si la vente d'un héritage appartenant à plusieurs n'a pas été faite conjointement et de tout l'héritage ensemble, et que chacun n'ait vendu que la pari qu'il y avait, chacun peut exercer le droit de rachat pour sa part. L'acheteur ne peut pas forcer, dans ce cas, celui qui l'exerce pour sa part, à retirer le tout. Article 1722. Si l'acquéreur a laissé plusieurs héritiers, le droit de rachat ne peut être exercé contre chacun d'eux que pour sa part, dans le cas où elle est encore indivise, et dans le cas où la chose vendue a été partagée entre eux. Mais, s'il y a eu partage de l'hérédité et que la chose vendue soit échue au lot de l'un des héritiers, la résolution peut être demandée contre celui-ci pour le tout. CHAPITRE VII. De la licitation. Article 1723. Si une chose commune à plusieurs ne peut être partagée commodément et sans perte; ou si, dans un partage fait de gré à gré de biens communs, il s'en trouve quelques-uns qu'aucun des copartageants ne puisse ou ne veuille prendre, la vente s'en fait aux enchères, et le prix en est partagé entre les copropriétaires. Article 1724. Chacun des copropriétaires est le maître de demander que les étrangers soient appelés à la licitation; ils sont nécessairement appelés, lorsque l'un des copropriétaires est mineur. Article 1725. Quand les copartageants sont tous majeurs, ils peuvent consentir que la licitation soit faite devant un notaire désigné par eux. La licitation judiciaire se fait dans les formes prescrites par le Code de procédure. Article 1726. La licitation est un partage quand l'un des communistes se rend adjudicataire; c'est une vente quand un étranger se porte adjudicataire. CHAPITRE VIII. Du transport des créances et autres droits. Article 1727. Le transport ou la cession est un contrat par lequel on vend des droits. Article 1728. Tout droit peut être cédé, même les droits futurs, tels que les loyers el fermages et les arrérages de rente. Article 1729. Les droits ne peuvent être déclarés incessibles que par la loi. Article 1730. Entre les parties la vente est parfaite, et la propriété est acquise au cessionnaire dès qu'il y a concours de consentement sur la chose et le prix. La délivrance s'opère par la remise du litre. Article 1731. A l'égard des tiers, le cessionnaire ne devient propriétaire que par l'inscription de la cession sur les registres du conservateur des hypothèques. Article 1732. Le cessionnaire doit de plus faire connaître la cession au débiteur, par un écrit authentique ou sous seing privé, pour avoir la possession de la créance à son égard. Article 1733. La cession d'une créance comprend les accessoires de la créance, tels que caution, privilège et hypothèque. La question de savoir si tous les droits du cédant relatifs à la créance cédée sont compris dans la cession, dépend de l'intention des parties contractantes. Article 1734. Celui qui vend un droit doit en garantir l'existence au temps du transport, quoiqu'il soit fait sans garantie. Il ne répond de la solvabilité du débiteur que lorsqu'il s'y est engagé, et jusqu'à concurrence seulement du prix qu'il a retiré de la créance. Article 1735. Lorsque le cédant a promis la garantie de la solvabilité du débiteur, cette promesse ne s'entend que de la solvabilité actuelle et ne s'étend pas au temps à venir, si les parties ne l'ont expressément stipulé. CHAPITRE IX. De la vente d'une hérédité. Article 1736. La vente d'une hérédité peut avoir pour objet: 1° Les biens héréditaires spécifiés dans le contrat: c'est une vente ordinaire; 2° Les droits successifs du vendeur: c'est la vente d'un droit universel; 3° Les prétentions du vendeur sur une succession: c'est un contrat aléatoire. Article 1737. Quand la vente a pour objet les biens héréditaires, la propriété se transmet entre les parties et à l'égard des tiers d'après le droit commun. Article 1738. La vente de droits successifs, même aléatoire, doit être inscrite sur les registres du conservateur des hypothèques, pour qu'elle puisse être opposée aux tiers. Si elle comprend des créances, l'acheteur doit, avant de pouvoir poursuivre les débiteurs, leur notifier son litre, conformément à l'article 1732. Article 1739. Le vendeur d'objets héréditaires est tenu à la garantie d'après le droit commun. Le vendeur de droits successifs ne doit garantir que sa qualité d'héritier. Article 1740. La vente de droits successifs comprend tout ce qui est provenu de la succession lors de la cession, et tout ce qui en proviendra. Si le vendeur avait déjà profité des fruits de quelque fonds, ou reçu le montant de quelque créance appartenant à l'hérédité, ou vendu quelques effets de la succession, il est tenu de rembourser à l'acquéreur ce dont il a profité, s'il ne les a pas expressément réservés lors de la vente. Article 1741. Le vendeur reste tenu des dettes et charges, à l'égard des créanciers et légataires. L'acheteur ne devient pas héritier. Entre les parties, le vendeur est censé n'avoir pas été héritier, les dettes éteintes par confusion revivent, le vendeur en doit tenir compte à l'acheteur. L'acquéreur, de son côté, doit rembourser au vendeur ce que celui-ci a payé pour les dettes et charges de la succession, et lui faire raison de tout ce dont il était créancier, s'il n'y a stipulation contraire. TITRE VI. De l'échange. Article 1742. L'échange est un contrat par lequel les parties s'obligent de donner respectivement une chose pour une autre. Article 1743. L'échange s'opère par le seul consentement, de même que la vente. Article 1744. Si l'un des copermutants a déjà reçu la chose à lui donnée en échange, el qu'il prouve ensuite que l'autre contractant n'est pas propriétaire de celte chose, il ne peut pas être forcé à livrer celle qu'il a promise en contre-échange, mais seulement à rendre celle qu'il a reçue. Article 1745. Le copermutant qui est évincé de la chose qu'il a reçue en échange a le choix de réclamer des dommages-intérêts ou de répéter sa chose. Article 1746. Toutes les autres règles prescrites pour le contrat de vente s'appliquent à l'échange. TITRE VII. Do louage. Article 1747. Il y a deux sortes de contrats de louage: celui des choses et celui d'ouvrage. CHAPITRE PREMIER. Du louage des choses. Article 1748. Le louage des choses est un contrat par lequel l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige de lui payer. Article 1749. On peut louer toutes sortes de biens meubles ou immeubles. Article 1750. On appelle bail à loyer le louage des maisons et celui des meubles; bail à ferme, celui des héritages ruraux. Article 1751. Les baux des biens nationaux, des biens des communes, des provinces et des établissements publics, sont soumis à des règlements particuliers. SECTION Ier. Des règles communes aux baux des maisons et des biens ruraux. § Ier. — De la forme et de la preuve. Article 1752. Le louage n'est soumis à aucune condition de forme. Il est parfait entre les parties des qu'elles sont convenues de la chose et du prix. L'acte qui en est dressé ne sert que de preuve littérale. Article 1753. L'effet des baux d'immeubles à l'égard des tiers est réglé au titre Des hypothèques. Article 1754. Les règles générales sur les preuves s'appliquent au louage. § II. — Du droit de sous-louer. Article 1755. Le preneur a le droit de sous-louer la chose, soit en tout, soit en partie. Article 1756. La transmission du bail constitue un nouveau louage, quand même les parties se seraient servies du mot « cession », à moins qu'elles n'aient clairement manifesté la volonté de faire une vente du droit de bail; dans ce cas on applique les règles du contrat de vente. Article 1757. La faculté de sous-louer tout ou partie de la chose peut être interdite par le contrat. Cette clause est toujours de rigueur. § III. — De la durée de certains baux. Article 1758. Les administrateurs de biens d'autrui, tels que les usufruitiers, les pères et tuteurs, ne peuvent donner à bail que pour un terme de neuf ans. Quand leur administration prend fin, les baux déplus de neuf ans ne sont obligatoires pour le propriétaire que pour la période de neuf ans dans laquelle le preneur se trouve. Article 1759. Les administrateurs peuvent renouveler les baux à ferme, trois ans avant leur expiration, et tes baux à loyer, deux ans avant cette époque. Les baux renouvelés plus tôt seront sans effet à l'égard du propriétaire, à moins que leur exécution n'ait commencé pendant le cours de l'administration. § IV. — Des obligations du bailleur. Article 1760. Le bailleur est obligé par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière: 1° de livrer au preneur la chose louée; 2° d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée; 3° d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail. Article 1761. Le bailleur est tenu de délivrer la chose avec tous ses accessoires, notamment le vestibule et la cour. Article 1762. Il doit la délivrer en bon état de réparations, sans distinguer entre les réparations locatives et les grosses réparations. Article 1763. Si le bailleur ne fait point la délivrance, le preneur peut l'y contraindre par autorité de justice, ou demander la résolution du contrat, avec dommages et intérêts, dans l'un et l'autre cas. Il en est de même si des tiers s'opposent par voies de fait à ce que le preneur se mette en possession. Article 1764. Si le bailleur ne fait pas les réparations qu'il est tenu de faire lors de la délivrance, le preneur peut demander que le tribunal l'autorise à les exécuter, aux frais du bailleur. Article 1765. Le bailleur doit faire à la chose, pendant la durée du bail, toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que les locatives. Article 1766. Il en est ainsi même des réparations rendues nécessaires par un cas fortuit. Toutefois si la chose louée est détruite en totalité par un cas fortuit, le bail est résilié de plein droit; si elle est détruite en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix ou la résiliation du bail. Dans l'un et l'autre cas, il n'y a lieu à aucun dédommagement. Article 1767. Si le bailleur ne fait pas les réparations nécessaires, le preneur peut demander la résolution du bail; il peut aussi demander que le tribunal l'autorise à exécuter les travaux aux frais du bailleur. Article 1768. Il est dû garantie au preneur pour tous les vices ou défauts de la chose, quand même le bailleur ne les aurait pas connus lors du contrat, ou qu'ils ne se produiraient que pendant la durée du bail, s'ils empêchent ou diminuent l'usage de la chose. Article 1769. Le preneur pourra de ce chef demander la résolution du contrat et des dommages-intérêts. Article 1770. Le bailleur est tenu de ses faits personnels, quand il en résulte un trouble dans la jouissance de la chose louée. Article 1771. Si, durant le bail, la chose louée a besoin de réparations urgentes et qui ne puissent être différées jusqu'à sa fin, le preneur doit les souffrir, quelque incommodité qu'elles lui causent, et quoiqu'il soit privé, pendant qu'elles se font, d'une partie de la chose louée. Mais, si ces réparations durent plus de quarante jours, le prix du bail sera diminué à proportion du temps et de la partie de la chose louée dont il aura été privé. Si les réparations sont de telle nature qu'elles empêchent d'atteindre l'objet du bail, le preneur pourra le faire résilier. Il en sera ainsi quand les réparations rendent inhabitable ce qui est nécessaire au logement du preneur et de sa famille, ou si elles empêchent le locataire de continuer son commerce. Article 1772. Le bailleur ne peut, pendant la durée du bail, apporter à l'état de la chose louée aucun changement qui puisse nuire à la jouissance à laquelle le preneur a droit. Article 1773. Le bailleur n'est pas garant des troubles de fait. Il y a trouble de fait quand les auteurs ne prétendent aucun droit sur la chose louée, et que le preneur a action contre eux en son nom personnel pour empêcher ou faire cesser les voies de fait par lesquelles il est troublé dans sa jouissance. Si le preneur ne parvient pas à empêcher ou à réprimer les voies de fait, il aura un recours contre le bailleur pour la réparation du dommage qu'il a éprouvé. Article 1774. Il n'y a pas trouble de fait, et le bailleur est garant quand le tiers, soit une administration publique, soit un particulier, a agi en vertu d'un droit qui lui appartient. Article 1775. Le bailleur doit garantir le preneur contre les troubles de droit. Il y a trouble de droit: 1° quand un tiers exerce une voie de fait en prétendant avoir un droit sur la chose louée; 2° quand un tiers intente au preneur une action en délaissement de tout ou partie de la chose louée. Dans ces deux cas, le preneur doit appeler le bailleur en garantie, et il doit être mis hors d'instance, s'il l'exige, en nommant le bailleur pour lequel il possède. Article 1776. Dans les cas où le bailleur est garant du trouble, le preneur peut demander la résiliation du bail, si le bailleur est en faute, ou si le preneur est privé de la jouissance de la chose. Si la jouissance est seulement diminuée par le double, le preneur aura droit à une diminution de prix. Le preneur peut en outre réclamer des dommages-intérêts d'après le droit commun. Article 1777. Dans tous les cas, le preneur est tenu de dénoncer le trouble au propriétaire. § V. — Des obligations du preneur. Article 1778. Les obligations principales du preneur sont: 1° D'user de la chose en bon père de famille et suivant la destination qui lui a été donnée par les conventions expresses ou tacites des parties; 2° De payer le prix du bail; 3° De payer les frais d'actes et autres accessoires. Article 1779. Le prix doit être payé aux termes convenus, et, à défaut de convention, aux termes fixés par l'usage des lieux. Article 1780. Le payement se fait, sauf convention contraire, au domicile du bailleur. Article 1781. Quand le bailleur ne remplit pas ses obligations, le juge peut autoriser le preneur à suspendre le payement du prix. Article 1782. Si le preneur n'agit pas en bon père de famille, il y a abus. Toutefois, il n'y a pas abus, si le preneur a, en vertu de la convention, le droit de faire ce qu'il a fait, quand même il en résulterait un dommage pour le bailleur. Article 1783. Il y a abus quand le preneur quitte les lieux loués sans le consentement du bailleur. Article 1784. Le preneur ne peut faire aucun changement à la chose louée, à moins que ce changement ne soit nécessaire ou utile à sa jouissance. Il doit, en ce cas, rétablir la chose en son ancien état, à la fin du bail, si le bailleur l'exige. Article 1785. Le preneur ne peut changer la destination pour laquelle la chose a été louée, en vertu de la convention expresse ou tacite des parties. Article 1786. En cas d'abus dommageable, le bailleur peut, suivant les circonstances, faire résilier le bail. Si la chose est louée pour l'usage d'une industrie, le juge, en cas de conflit entre l'industrie et la propriété, devra user de son pouvoir discrétionnaire, de manière à concilier les droits du propriétaire avec l'intérêt de l'industrie. Article 1787. En cas de changement de destination, le bail peut aussi être résilié, suivant les circonstances, quand même le changement ne serait pas dommageable au bailleur. Article 1788. A l'expiration du bail, le preneur doit restituer la chose louée avec ses accessoires, le tout non détérioré par sa faute. Article 1789. S'il a été fait un état des lieux entre le bailleur et le preneur, celui-ci doit rendre la chose telle qu'il l'a reçue, suivant cet état, excepté ce qui a péri ou a été dégradé par l'usage légitime de la chose, par vétusté ou par force majeure. Article 1790. S'il n'a pas été fait d'état des lieux, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations de toute espèce, et il doit les rendre tals, sauf la preuve contraire. Article 1791. Le preneur répond des dégradations et des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu sans sa faute. Article 1792. Le preneur est tenu des dégradations et des pertes qui arrivent par le fait des personnes de sa maison, ou de ses sous-locataires, à moins qu'il ne prouve qu'aucune faute ne lui est imputable. Article 1793. Il répond de l'incendie, à moins qu'il ne prouve que le feu a éclaté sans sa faute. Article 1794. S'il y a plusieurs locataires, la responsabilité se divise entre eux, à moins qu'ils ne prouvent que l'incendie a commencé dans l'habitation de l'un d'eux, auquel cas celui-là seul en est tenu; ou que quelques-uns ne prouvent que l'incendie n'a pu commencer chez eux, auquel cas ceux-là n'en sont pas tenus. § VI. — De la fin du bail et de la tacite reconduction. Article 1795. Le bail finit de plein droit par l'expiration du temps pour lequel il a été contracté sans qu'il soit nécessaire de donner congé. Si le bail a été fait sans durée fixe, il ne finit que par le congé que l'une des parties donne à l'autre, en observant les délais fixés par l'usage des lieux. Article 1796. Le bail fait pour trois, six ou neuf ans, est fait pour neuf ans. Chacune des parties, peut y mettre lin à l'expiration de la troisième ou de la sixième année, en donnant congé. Article 1797. Le bail peut encore avoir une durée fixe en vertu de la loi ou de l'usage des lieux. Ce bail cesse aussi de plein droit à l'expiration du terme légal ou coutumier, sauf aux parties à stipuler qu'un congé devra être signifié dans le délai qu'elles déterminent. Article 1798. Le bail d'un fonds rural, quand les parties n'en ont pas fixé la durée, est censé fait pour le temps qui est nécessaire afin que le preneur recueille tous les fruits de l'héritage affermé. Le bail d'une maison, quand les parties n'en ont pas fixé la durée, est censé fait pour un an. Le bail d'un appartement meublé est censé fait à l'année, quand il a été fait à tant par an; au mois, quand il a été fait à tant par mois; au jour, s'il a été fait à tant par jour. Si rien ne constate que le bail ait été fait par an, par mois ou par jour, le contrat est censé fait pour le temps fixé par l'usage des lieux. Le bail des meubles fournis pour garnir une maison est censé fait pour la durée du bail principal. Article 1799. Si, à la fin des baux qui cessent de plein droit, le preneur reste et est laissé en possession, après l'expiration du terme conventionnel, légal ou coutumier, il s'opère un nouveau bail par le consentement tacite du preneur et du bailleur. Article 1800. Lorsqu'il y a un congé signifié par l'une des parties, il n'y a pas lieu à reconduction tacite, quoiqu'il y ait eu continuation de jouissance. Article 1801. La reconduction tacite est régie par toutes les conditions stipulées dans le contrat primitif, y compris la durée du bail, sauf que la caution et l'hypothèque qui garantissaient le premier bail ne passent point à la reconduction tacite. Article 1802. Le contrat de louage se résout par la perte de la chose louée. Si le preneur est empêché de jouir de la chose par un cas fortuit, tel qu'une guerre ou une révolution, il pourra demander la résiliation du bail. Article 1803. Le contrat de louage ne cesse point par la mort du bailleur, ni par celle du preneur. Toutefois les héritiers du preneur pourront demander, suivant les circonstances, la résiliation du bail. Article 1804. Le contrat de louage se résout par le défaut respectif du bailleur et du preneur de remplir leurs engagements. La résolution ne peut pas être demandée par la partie qui est elle-même en défaut de remplir ses obligations. Le juge doit tenir compte de la gravité de l'infraction; il peut, d'après les circonstances, ne pas prononcer la résolution du bail. Article 1805. En cas de résiliation du bail par la faute du preneur, celui-ci est tenu de payer le prix du bail pendant le temps nécessaire à la relocation, sans préjudice des dommages-intérêts qui ont pu résulter de l'abus. Article 1806. Le bail consenti par un simple possesseur cesse quand le propriétaire revendique la chose louée. Article 1807. Le bail tombe si le droit de propriété du bailleur est annulé ou résolu. Article 1808. La sous-location tombe avec le droit du sous-bailleur. Article 1809. Si le bailleur vend la chose louée, l'acquéreur pourra expulser le preneur en l'avertissant par un congé, un an à l'avance, à moins que celui-ci ne prouve qu'il a un bail dont la durée est fixée par la convention, par la loi, ou par l'usage des lieux. L'acquéreur qui connaissait, lors de la vente, l'existence et la durée du bail, ne peut pas expulser le preneur. Article 1810. L'acquéreur peut toujours expulser le preneur quand le vendeur s'est réservé ce droit par le contrat de bail. L'acquéreur qui veut user de ce droit doit avertir le locataire au temps d'avance usité dans le lieu pour les congés. Si le bail est d'un fonds rural, il doit avertir le fermier au moins un an à l'avance. Article 1811. Le bailleur est tenu d'indemniser le preneur expulsé. A défaut de conventions, les dommages-intérêts sont fixés comme suit: Dans les baux à loyer, le bailleur est tenu de payer une somme égale au prix du loyer pendant le temps qui, suivant l'usage des lieux, est accordé entre le congé et la sortie. S'il s'agit de biens ruraux, l'indemnité est du tiers du prix du bail pour tout le temps qui reste à courir. L'indemnité se réglera par experts, s'il s'agit d'établissements industriels qui exigent de grandes avances. Les preneurs jouissent du droit de rétention jusqu'à ce qu'ils aient touché l'indemnité qui leur est due. Article 1812. Les parties contractantes peuvent stipuler qu'en cas de vente de la chose louée, le preneur ne pourra pas être expulsé. Elles peuvent même convenir que le preneur jouira de la chose louée à titre de droit réel, et, partant, qu'il pourra opposer son bail à tout tiers. Article 1813. L'acquéreur à pacte de rachat ne peut user de la faculté d'expulser le preneur, tant qu'il n'est pas devenu propriétaire incommutable. § VII. — Des constructions et plantations faites par le preneur. Article 1814. Le preneur a le droit de faire des constructions et des plantations nécessaires ou utiles à sa jouissance, à condition qu'il use de la chose louée suivant sa destination. Article 1815. Si les travaux constituent un abus de jouissance, le bailleur peut s'y opposer et en demander la suppression immédiate. Article 1816. Le preneur peut, pendant le bail, enlever les constructions et plantations qu'il a faites dans la limite de son droit. Article 1817. Le bailleur peut forcer le preneur à enlever les ouvrages subsistant à la fin du bail, et à remettre les choses dans l'état où il les a reçues. Article 1818. Le bailleur ne peut pas opposer son droit d'accession au preneur; partant, il n'a pas le droit de conserver les constructions et plantations en indemnisant le preneur. Sauf convention contraire, lors du contrat, ou à la fin du bail. SECTION II. Des règles particulières aux baux à loyer. Article 1819. Le locataire qui ne garnit pas la maison de meubles suffisants pour garantir le payement des loyers, privilégiés en vertu du titre Des hypothèques, peut être expulsé, à moins qu'il ne donne des sûretés qui répondent de ces loyers. Article 1820. Le locataire est tenu des réparations locatives ou de menu entretien, s'il n'y a clause contraire. Les réparations locatives sont déterminées par l'usage des lieux. Ce sont, entre autres, les réparations à faire aux âtres, contre-cœurs, chambranles et tablettes des cheminées; Au récrépiment du bas des murailles des appartements et autres lieux d'habitation, à la hauteur d'un mètre; Aux pavés et carreaux des chambres, lorsqu'il y en a seulement quelques-uns de cassés; Aux vitres, à moins qu'elles ne soient cassées par la grêle ou autres accidents extraordinaires et de force majeure, dont le locataire ne peut être tenu; Aux portes, croisées, planches de cloison ou de fermeture de boutiques, gonds, targettes et serrures. Article 1821. Aucune des réparations réputées locatives n'est à la charge du locataire, quand elles ne sont occasionnées que par vétusté ou force majeure. Article 1822. Le curement des puits et celui des fosses d'aisances sont à la charge du bailleur, s'il n'y a clause contraire. Article 1823. Le bailleur ne peut résoudre la location, encore qu'il déclare vouloir occuper la maison, s'il n'y a eu convention contraire. S'il a été convenu dans le contrat de louage que le bailleur pourrait venir occuper la maison, il est tenu de signifier un congé aux époques déterminées par l'usage des lieux, mais il ne doit pas de dommages-intérêts au preneur. SECTION III. Des règles particulières aux baux à ferme et du colonage partiaire. Article 1824. Si, dans un bail à ferme, on donne aux fonds une contenance moindre ou plus grande que celle qu'ils ont réellement, il n'y a lieu à augmentation ou à diminution de prix pour le fermier que dans les cas et suivant les règles exprimées au titre De la vente. Article 1825. Le fermier est tenu de garnir le fonds des bestiaux et des ustensiles nécessaires à son exploitation et suffisants pour garantir le privilège du bailleur. Article 1826. Le fermier doit engranger dans les lieux à ce destinés d'après le bail. Article 1827. Le fermier doit cultiver en bon père de famille, et de manière à améliorer les fonds, mais sans pouvoir changer la destination qui leur est donnée par le contrat. Dans les fermes de pâturage, il ne lui est pas permis de défricher. Dans les fermes de grande culture, il n'est pas lié par le mode de jouissance du propriétaire ou des anciens fermiers. Il est tenu de fumer les terres au moins tous les trois ans. Il ne peut vendre les pailles; il doit les convertir en engrais pour amender les terres d'où elles proviennent. Article 1828. Si le fermier ne garnit pas le fonds, comme le veut l'article 4825, s'il abandonne la culture, s'il ne cultive pas en bon père de famille, conformément à l'article 1827, s'il emploie la chose louée à un autre usage que celui auquel elle a été destinée, ou, en général, s'il n'exécute pas les clauses du bail, et qu'il en résulte un dommage pour le bailleur, celui-ci peut, suivant les circonstances, faire résilier le bail. En cas de résiliation provenant du fait du fermier, celui-ci est tenu des dommages-intérêts. Article 1829. Le fermier est tenu, sous peine de tous dommages et intérêts, d'avertir le propriétaire des usurpations qui peuvent être commises sur le fonds. Cet avertissement doit être donné dans le délai réglé, en cas d'assignation, suivant la distance des lieux. Article 1830. Si le bail est fait pour plusieurs années, et que, pendant la durée du bail, la totalité ou la moitié au moins d'une récolte soit enlevée par des cas fortuits, le fermier peut demander une remise des fermages, à moins qu'il ne soit indemnisé par les récoltes précédentes. S'il n'est pas indemnisé, l'estimation de la remise ne peut avoir lieu qu'à la fin du bail, auquel temps il se fait une compensation de toutes les années de jouissance. Le juge peut néanmoins dispenser provisoirement le preneur de payer une partie du prix en raison de la perte soufferte. Article 1831. Si le bail n'est que d'une année, et que la perte soit de la totalité des fruits, ou au moins de la moitié, le preneur sera déchargé d'une partie proportionnelle des fermages. Il ne pourra prétendre aucune remise si la perte est moindre de moitié. Article 1832. Lorsque la perte des fruits arrive après qu'ils sont séparés de la terre, le juge pourra accorder au fermier une indemnité qu'il fixera d'après les circonstances de la cause. Article 1833. Le fermier ne peut demander de remise: 1° si la cause du dommage était existante et connue à l'époque où le bail a été passé; 2° si le preneur s'est chargé des cas fortuits par une stipulation expresse. Celte stipulation ne s'entend que des cas fortuits ordinaires, tels que grêle, foudre, gelée ou coulure. Elle ne s'entend point des cas fortuits extraordinaires, tels que les ravages de la guerre, ou une inondation, auxquels le pays n'est pas ordinairement sujet, à moins que le preneur n'ait été chargé de tous les cas fortuits prévus ou imprévus. Article 1834. Le colonage partiaire est un bail à ferme dont le prix consiste dans une quote-part des fruits produits par le fonds. Article 1835. Le colonage est soumis aux règles générales du bail à ferme, sauf les exceptions consacrées par la loi. Article 1836. Le colon répond de l'incendie, comme tout preneur. Article 1837. Le colon ne peut pas sous-louer, si la faculté ne lui en a été expressément accordée par le bail. En cas de contravention, le bailleur peut demander la résiliation du bail avec dommages-intérêts. Article 1838. Si le colon ou le bailleur viennent à mourir, les héritiers pourront, selon les circonstances, demander que le louage soit résilié. Article 1839. Le colon ne peut pas réclamer d'indemnité quand la totalité ou la moitié de la récolte périssent par cas fortuit. CHAPITRE II. Du louage d'ouvrage et d'industrie. Article 1840. Le louage d'ouvrage est un contrat par lequel l'une des parties s'engage à faire quelque chose pour l'autre, moyennant un prix convenu entre elles. On appelle loyer le louage du travail ou du service. Article 1841. Il y a trois espèces principales de louage d'ouvrage et d'industrie: 1° Le louage des gens de travail qui s'engagent au service de quelqu'un; 2° Celui des voituriers, tant par terre que par eau, qui se chargent du transport des personnes ou des marchandises; 3° Celui des entrepreneurs d'ouvrages par suite de devis ou marchés. Ce contrat est un louage lorsque la matière est fournie par celui pour qui l'ouvrage se fait. SECTION Ier. Du louage des domestiques et ouvriers. Article 1842. On ne peut engager ses services qu'à temps, ou pour une entreprise déterminée. Article 1843. Si une contestation quelconque s'élève entre le maître et le domestique, la preuve se fera, par le maître comme par le domestique, d'après le droit commun. SECTION II. Des commis. Article 1844. Le contrat qui intervient entre les commettants et les commis est un louage de services. Article 1845. A défaut de conventions spéciales, ce contrat est régi par les principes établis au titre Des obligations. Quand le commis est un mandataire, il est soumis aux règles établies au titre Du mandat. Article 1846. L'une des parties ne peut pas mettre fin au contrat en donnant congé à l'autre; il ne peut être révoqué que de leur consentement mutuel. Si l'une des parties n exécute pas ses engagements, l'autre peut demander la résolution du contrat. Quand le contrat porte que le patron peut révoquer le commis, celui-ci ne peut pas réclamer de dommages-intérêts, en cas de révocation. SECTION III. Des voituriers par terre et par eau. § 1er. — Règles générales. Article 1847. Les entrepreneurs de voitures publiques par terre et par eau, et ceux des roulages publics, doivent tenir registre de l'argent, des effets et des paquets dont ils se chargent. L'inscription sur ces registres forme une preuve littérale du contrat. A défaut de cette inscription, la preuve du contrat se fait d'après le droit commun, notamment en ce qui concerne la preuve par témoins. Article 1848. Les voituriers sont responsables de la perte et des avaries des choses qui leur sont confiées, à moins qu'ils ne prouvent qu'elles ont été perdues et avariées par cas fortuit ou force majeure. Article 1849. En cas de perte ou d'avarie, l'expéditeur n'est pas tenu de prouver que le voiturier est en faute. Article 1850. Si la chose a péri, le voiturier est tenu de rembourser la valeur intégrale, quand même elle ne lui aurait pas été déclarée. La remise à l'expéditeur, d'un bulletin portant qu'en cas de perte il n'aura droit qu'à une somme fixe, ne le lie point, à moins qu'il ne soit prouvé qu'il a accepté cette condition. Les parties peuvent convenir que le voiturier payera une somme moindre, mais le voiturier ne peut pas stipuler qu'il ne répondra pas de sa faute; si elle est prouvée, il doit rembourser toute la perte. Article 1851. Les voituriers répondent non seulement de ce qu'ils ont déjà reçu dans leur bâtiment ou voiture, mais encore de ce qui leur a été remis sur le port ou dans l'entrepôt, pour être placé dans leur bâtiment ou voiture. Article 1852. Ils répondent du vol comme les aubergistes, auxquels ils sont, sous ce rapport, assimilés. § II. — Du transport par chemin de fer. Article 1853. Les tarifs réglementaires des chemins de fer de l'État n'ont pas la force d'un arrêté royal obligatoire pour les particuliers. Ils ne peuvent pas déroger à la loi. Article 1854. Les tarifs font connaître les conditions auxquelles l'État se charge des transports et en dehors desquelles il ne lui est pas permis de contracter; par suite, les clauses des tarifs deviennent nécessairement la loi des parties contractantes, sans qu'il soit besoin d'une convention expresse, alors même que ces clauses dérogeraient au droit commun. Article 1855. Les clauses peuvent diminuer la responsabilité de l'État voiturier en cas de perte; mais si l'État est en faute, il doit rembourser toute la perte. Article 1856. Les clauses de non-garantie n'empêchent pas que l'État réponde de sa faute. SECTION IV. Des devis et des marchés. Article 1857. Le marché est un contrat de louage d'ouvrage qui intervient entre le maître et l'entrepreneur, contrat par lequel celui-ci s'oblige à confectionner l'ouvrage, moyennant un prix fixé à raison de la valeur de l'ouvrage et non à raison du travail. Article 1858. Lorsqu'on charge quelqu'un de faire un ouvrage, on peut convenir qu'il fournira seulement son travail ou son industrie, ou bien qu'il fournira aussi la matière. Le premier contrat est un louage, le second une vente. Article 1859. Si, dans le cas où l'ouvrier fournit la matière, la chose vient à périr par cas fortuit avant d'être livrée, la perte est pour l'ouvrier, qui perd aussi, dans ce cas, le travail, à moins que le maître ne lût en demeure de recevoir la chose. Article 1860. Dans le cas où l'ouvrier fournit seulement son travail ou son industrie, si la chose vient à périr, l'ouvrier n'est tenu que s'il est en faute. La perte fortuite est pour le maître; l'ouvrier doit prouver le cas fortuit qu'il allègue. Article 1861. Si la chose a péri sans aucune faute de l'ouvrier, il peut réclamer son salaire, quand même l'ouvrage n'aurait pas été remis et que le maître ne fût pas en demeure de le vérifier. Article 1862. S'il s'agit d'un ouvrage à plusieurs pièces ou à la mesure, la vérification peut s'en faire par parties; elle est censée fait pour toutes les parties payées, si le maître paye l'ouvrier en proportion de l'ouvrage fait. Article 1863. Lorsque le maître a reçu l'ouvrage, l'ouvrier cesse d'être responsable de la perte, alors même qu'il y aurait malfaçon. Article 1864. Si les défauts ne se révèlent qu'après la réception de l'ouvrage, l'ouvrier en sera responsable, comme si l'ouvrage n'avait pas été reçu. Article 1865. Le maître peut résilier par sa seule volonté le louage d'ouvrage, quoique l'ouvrage soit déjà commencé, en dédommageant l'entrepreneur de toutes ses dépenses, de tous ses travaux et de tout ce qu'il aurait pu gagner dans l'entreprise. Article 1866. Le contrat de louage d'ouvrage est dissous par la mort de l'ouvrier, de l'architecte ou entrepreneur, même quand l'ouvrier a fourni la matière. Article 1867. Mais le maître est tenu de payer en proportion du prix porté à la convention, à leur succession, la valeur des ouvrages faits et celle des matériaux préparés, si ces travaux ou matériaux peuvent lui être utiles. Article 1868. Les architectes et les entrepreneurs répondent de leur faute, d'après le droit commun qui régit les obligations conventionnelles, dans toute espèce d'ouvrages qu'ils exécutent ou dirigent pour le maître: constructions, reconstructions, réparations ou autres gros ouvrages, malgré la vérification et la réception des ouvrages. Ils répondent notamment du vice de construction, du vice du sol et des matériaux, à charge par le maître de prouver ces vices. Leur responsabilité dure dix ans; après ce délai, ils sont déchargés de la garantie. Article 1869. L'entrepreneur répond du fait des personnes qu'il emploie. Article 1870. Les maçons, charpentiers et autres ouvriers qui ont été employés à la construction d'un bâtiment ou d'autres ouvrages faits à l'entreprise, ont une action directe contre celui pour lequel les ouvrages ont été faits, jusqu'à concurrence de ce dont il se trouve débiteur envers l'entrepreneur, au moment où leur action est intentée. Article 1871. Lorsqu'un architecte ou un entrepreneur s'est chargé de la construction à forfait d'un bâtiment, il ne peut demander une augmentation de prix sous prétexte d'augmentation de la main-d'œuvre ou des matériaux, ni sous prétexte de changements ou d'augmentations faits sur le plan, si ces changements ou augmentations n'ont pas été expressément autorisés et le prix convenu avec le propriétaire. L'architecte devra prouver l'autorisation, sauf au propriétaire à établir qu'il y a eu surprise. Article 1872. Les maçons, charpentiers, serruriers et autres ouvriers qui font directement des marchés à prix fait, sont astreints aux règles prescrites dans la présente section; ils sont entrepreneurs dans la partie qu'ils traitent. TITRE VIII. De la société. CHAPITRE PREMIER. Dispositions générales. Article 1873. La société est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes conviennent de mettre quelque chose en commun, dans la vue de partager Je bénéfice qui pourra en résulter, et, s'il y a lieu, de supporter en commun la perte. Article 1874. Toute société doit avoir un objet licite, et être contractée pour l'intérêt commun des parties. Chaque associé doit y apporter de l'argent, ou d'autres biens, ou son industrie. Article 1875. Les dispositions du présent titre ne s'appliquent aux sociétés de commerce que dans les points qui n'ont rien de contraire aux lois et usages du commerce. SECTION Ier. Des sociétés illicites. Article 1876. Est illicite la société dans laquelle des fonctionnaires publics, tels que notaires, ou des officiers ministériels, tels que huissiers ou avoués, font entrer comme mise les émoluments de leurs fonctions ou offices. Est illicite la société formée pour faire la contrebande en pays étranger. Article 1877. Toute personne intéressée peut se prévaloir de l'inexistence d'une société illicite. Les associés peuvent réclamer leurs apports contre celui qui en est détenteur. Si une société illicite est déclarée inexistante, le juge ordonnera que les bénéfices seront attribués à un établissement de bienfaisance ou affectés au service de l'instruction publique. Article 1878. Les associations religieuses qui se forment dans le but de reconstituer la mainmorte sont des sociétés illicites; on applique à leurs membres les principes qui régissent ces sociétés. SECTION II. De la personnification des sociétés. Article 1879. La société civile ne forme pas une individualité juridique distincte de celle des associés. Article 1880. Les sociétés étrangères, quand même elles seraient considérées comme personnes civiles par les lois du pays où elles se forment, ne jouissent pas de la personnification en Belgique, à moins qu'une loi ou un traité ne la leur accorde. SECTION III. Des sociétés d'agrément. Article 1881. Les sociétés d'agrément ne sont point des sociétés civiles. Article 1882. Elles peuvent contracter comme les sociétés, en ce sens que les membres figurent dans les conventions comme propriétaires, créanciers ou débiteurs. Article 1883. S'il existe lin mobilier commun, on applique les principes qui régissent la communauté de fait. Article 1884. Les membres ne sont propriétaires que s'ils ont figuré dans les conventions, personnellement ou par mandataire; ils ne sont pas représentés par le président, quand même le règlement lui donnerait le droit de représenter la société. CHAPITRE II. Des diverses espèces de sociétés. Article 1885. SECTION Ier. Des sociétés universelles. Article 1886. On distingue deux sortes de sociétés universelles: la société de tous biens présents et la société universelle de gains. Article 1887. La société de tous biens présents est celle par laquelle les parties mettent en commun tous les biens meubles et immeubles qu'elles possèdent actuellement, et les profits qu'elles pourront en tirer. Elles peuvent aussi y comprendre toute autre espèce de gains, mais les biens qui pourraient leur avenir par succession, donation ou legs, n'entrent dans celte société que pour la jouissance; toute stipulation tendant à y faire entrer la propriété de ces biens est prohibée, sauf entre époux, comme il est dit au titre Du contrat de mariage. Article 1888. La société universelle de gains renferme tout ce que les parties acquerront par leur industrie, à quelque titre que ce soit, pendant le cours de la société; les meubles que chacun des associés possède au temps du contrat y sont aussi compris; mais leurs immeubles personnels n'y entrent que pour la jouissance. Article 1889. La simple convention de société universelle, faite sans autre explication, n'emporte que la société universelle de gains. Article 1890. Nulle société universelle ne peut avoir lieu qu'entre personnes respectivement capables de se donner ou de recevoir l'une de l'autre, et auxquelles il n'est point défendu de s'avantager au préjudice d'autres personnes. SECTION II. Des sociétés particulières. Article 1891. La société particulière est celle qui ne s'applique qu'à certaines choses déterminées, ou à leur usage, ou aux fruits à en percevoir. Le contrat par lequel plusieurs personnes s'associent, soit pour une entreprise déterminée, soit pour l'exercice de quelque métier ou profession, est aussi une société particulière. CHAPITRE III. Des engagements des associés entre eux et à l'égard des tiers. SECTION Ier. Des engagements des associés entre eux. § Ier. — De l'apport. Article 1892. Le transport de propriété a pour effet de rendre les associés copropriétaires indivis de la chose qui fait l'objet de l'apport. Article 1893. La propriété entre associés se transfère dès que le contrat de société est parfait par le concours de volontés, quoique la tradition n'ait pas été faite. A partir de ce moment, l'associé qui fait l'apport cesse d'être propriétaire exclusif pour devenir copropriétaire. Article 1894. Les associés deviennent propriétaires à l'égard des tiers, d'après le droit commun qui régit la transmission de la propriété des immeubles, des meubles et des créances. Article 1895. Chaque associé est débiteur envers la société de tout ce qu'il a promis d'y apporter. Lorsque cet apport consiste en un corps certain, et que la société en est évincée, l'associé est garant envers la société, de la même manière qu'un vendeur l'est envers son acheteur. Article 1896. Si le contrat indique la contenance de l'immeuble dont l'associé promet l'apport et qu'il y ait un déficit, l'associé est tenu d'indemniser la société. S'il y a un excédent, les associés doivent lui en tenir compte. Article 1897. Quand l'apport consiste dans l'usage de certaines choses ou dans les fruits à en percevoir, la propriété reste à l'associé; la société en a seulement la jouissance, à litre d'usufruit ou de bail, selon l'intention des parties contractantes. Article 1898. L'associé qui devait apporter une somme d'argent à la société, et qui ne l'a point fait, devient, de plein droit et sans mise en demeure, débiteur des intérêts de cette somme, à compter du jour où elle devait être payée. Il est en demeure, par la nature du contrat, pour tous les avantages que son apport doit procurer à la société. Outre l'intérêt légal, il est tenu de plus amples dommages-intérêts, s'il y a lieu. Article 1899. L'associé doit aussi compte à la société des fruits de la chose dont il a promis l'apport, tant de ceux qu'il a perçus, que de ceux qu'il aurait pu percevoir, sans mise en demeure. Article 1900. Les associés qui ont promis d'apporter leur industrie à la société lui doivent compte de tous les gains qu'ils ont faits par l'espèce d'industrie qui est l'objet de celle société. Ils ne doivent pas compte des gains qu'ils retirent d'une industrie qui ne fait pas l'objet de la société. § II. — De la responsabilité des associés. Article 1901. L'associé est tenu, envers la société, des dommages qu'il lui a causés par sa faute, sans pouvoir compenser avec ces dommages les profits que son industrie lui aurait procurés dans d'autres affaires. L'associé répond de la faute dont tout débiteur est tenu d'après le droit commun. Article 1902. Chaque associé doit rapporter à la masse commune ce qu'il a perçu du fonds commun, et il en doit les intérêts, sans mise en demeure, à partir du jour où il a perçu la chose, en la détournant de sa destination, sans préjudice de plus amples dommages-intérêts, s'il y a lieu. Article 1903. L'associé doit toujours subordonner son intérêt particulier à l'intérêt social. Article 1904. Lorsqu'un associé est, pour son compte particulier, créancier d'une somme exigible envers une personne qui doit aussi à la société une somme également exigible, l'imputation de ce qu'il reçoit de ce débiteur doit se faire sur la créance de la société et sur la sienne, dans la proportion des deux créances, encore qu'il eût par sa quittance dirigé l'imputation intégrale sur sa créance particulière; mais s'il a exprimé dans sa quittance que l'imputation serait faite en entier sur la créance de la société, cette stipulation sera exécutée. Article 1905. Lorsqu'un associé a reçu sa part entière de la créance commune, et que le débiteur est devenu depuis insolvable, cet associé est tenu de rapporter à la masse commune ce qu'il a reçu, encore qu'il eût donné spécialement quittance pour sa part. § III. — Des obligations de la société envers les associés. Article 1906. L'associé, qui s'oblige à apporter la propriété d'une chose à la société, n'a pas droit à la restitution de son apport, lors de la dissolution. Article 1907. Si la chose périt par cas fortuit avant que l'associé ait été mis en demeure de la livrer, elle périt pour la société. Si l'apport est d'une chose indéterminée, elle est aux risques de l'associé débiteur. Quand l'associé a effectué sa mise, la chose est aux risques de la société. Article 1908. Dans les cas où la chose déterminée périt avant que la société en soit devenue propriétaire, la perle opère la dissolution de la société. La société est également dissoute dans tous les cas par la perte de la chose, lorsque la jouissance seule a été mise en commun, et que la propriété en est restée à l'associé. Mais la société n'est pas rompue par la perte de la chose quand elle périt après que la société en est devenue propriétaire. Article 1909. Si les choses dont la jouissance seulement a été mise dans la société sont des corps certains et déterminés, qui ne se consomment point par l'usage, elles sont aux risques de l'associé propriétaire. Si ces choses se consomment, si elles se détériorent en les gardant, si elles ont été destinées à être vendues, ou si elles ont été mises dans la société sur une estimation faite de commun accord, elles sont aux risques de la société. Si la chose a été estimée, l'associé ne peut répéter que le montant de son estimation. Article 1910. Un associé a action contre la société à raison des sommes qu'il a déboursées pour elle, el de l'intérêt de ces sommes; il peut même réclamer les intérêts des intérêts, s'il a dû les payer pour se procurer les fonds dont il a fait l'avance à la société. L'associé a encore action contre la société à raison des obligations qu'il a contractées de bonne foi pour les affaires de la société, et dey risques inséparables de sa gestion. Article 1911. Dans les divers cas où la société est débitrice, la dette se divise entre les associés à raison de leurs parts dans la société; la perte résultant de l'insolvabilité de l'un d'eux doit être supportée par les associés solvables. § IV. — Du règlement des parts. Article 1912. Lorsque le contrat de société ne détermine point la part de chaque associé dans les bénéfices ou dans les pertes, la part de chacun est en proportion de sa part dans le fonds de la société. A l'égard de celui qui n'a apporté que son industrie, sa part dans les bénéfices ou dans les pertes est réglée, comme si sa mise était égale à celle de l'associé qui a le plus apporté. Article 1913. Si les associés ont seulement réglé leur part dans les bénéfices, leur part dans les pertes sera fixée de la même manière. Article 1914. Si les associés sont convenus de s'en rapporter à l'un d'eux ou à un tiers pour le règlement des parts, ce règlement ne peut être attaqué s'il n'est évidemment contraire à l'équité. Nulle réclamation ne sera admise s'il s'est passé plus de trois mois depuis que la partie qui se prétend lésée a eu connaissance du règlement, ou si ce règlement a reçu de sa part un commencement d'exécution. Article 1915. Les parties peuvent convenir que les bénéfices seront partagés d'une manière inégale. Mais la convention qui donne à l'un des associés la totalité des bénéfices est nulle. Est nulle aussi la convention qui donne au survivant la totalité des bénéfices, y compris les apports. Article 1916. La convention qui affranchirait de toute contribution aux pertes les sommes ou effets mis dans le fonds de la société par un ou plusieurs des associés est également nulle. Article 1917. Les clauses déclarées nulles par les articles 1915 et 1916 ont pour effet de rendre la société nulle de plein droit. § V. — De l'administration de la société. Article 1918. Il y a dans toute société un administrateur gérant. Article 1919. L'administrateur peut être nommé, soit par le contrat de société, soit par un acte postérieur. Dans le premier cas, le consentement de tous les associés est requis pour la nomination et pour la révocation du gérant, sauf stipulation contraire dans l'acte de société. Dans le second cas, l'administrateur est révocable comme un simple mandataire. Article 1920. Le gérant, nommé par une clause du contrat de société, peut faire tous les actes qui rentrent dans l'objet de la société. Le gérant simple mandataire est assimilé à un mandataire général. Le tout, sauf convention contraire. Article 1921. Lorsqu'il y a plusieurs gérants, dont les fonctions sont déterminées, chacun doit se renfermer dans les limites de ses attributions; dans ces limites, il peut agir seul, sans que les autres aient le droit d'y former opposition. Ce qu'il ferait en dépassant ces limites n'aura aucun effet à l'égard de la société, sauf ce qui sera dit au titre Du mandat. Si leurs fonctions n'ont pas été déterminées, ils doivent tous concourir dans les actes de gestion, à moins que l'un des administrateurs ne se trouve dans l'impossibilité actuelle de prêter son concours. Les autres gérants doivent veiller, dans ce cas, à ce que l'administrateur empêché soit remplacé. Article 1922. A défaut de stipulations spéciales sur le mode d'administration, on applique les règles suivantes: 1° Les associés sont censés s'être donné réciproquement le pouvoir d'administrer l'un pour l'autre. Ce que chacun fait est valable, même pour la part de ses associés, sans qu'il ail pris leur consentement; sauf le droit qu'ont ces derniers, ou l'un d'eux, de s'opposer à l'opération avant qu'elle soit conclue. 2° Chaque associé a le droit d'obliger ses associés à faire avec lui les dépenses nécessaires pour la conservation des choses de la société. 3° L'un des associés ne peut faire d'innovations sur les immeubles dépendants de la société, même quand il les soutiendrait avantageuses, si les autres associés n'y consentent. Article 1923. Dans le cas prévu par l'article 4922, les associés administrateurs ne peuvent aliéner, ni engager les choses même mobilières qui dépendent de la société. Article 1924. Chaque associé peut, sans le consentement de ses associés, s'associer une tierce personne relativement à la part qu'il a dans la société; il ne peut pas, sans ce consentement, l'associer à la société, lors même qu'il en serait gérant. § VI. — Des obligations des associés à l'égard des tiers. Article 1925. Pour que la société soit obligée à l'égard des tiers par l'engagement d'un associé, il faut: 4° que celui-ci ait agi en cette qualité pour le compte de la société; 2° qu'il ait pouvoir d'obliger la société en vertu d'un mandat exprès ou tacite; 3° qu'il ait agi dans les limites de son pouvoir. Article 1926. Si l'associé a agi en son propre nom, la société n'est pas obligée à l'égard des tiers; elle n'est tenue à l'égard de l'associé que si elle a profité de la chose. Si l'associé s'est obligé sans pouvoir, mais pour le compte de la société, le tiers aura action contre la société, en tant qu'elle s'est enrichie. Article 1927. Dans les sociétés autres que celles de commerce, les associés ne sont pas tenus solidairement des dettes sociales; ils sont tenus à l'égard du créancier avec lequel ils ont contracté, chacun pour une somme et part égales, encore que la part de l'un d'eux dans la société fût moindre, si l'acte n'a pas spécialement restreint l'obligation de celui-ci sur le pied de cette part. CHAPITRE IV. Durée de la société. Article 1928. La société commence à l'instant même du contrat, s'il ne désigne une autre époque. Article 1929. La société finit de plein droit par l'expiration du temps pour lequel elle a été contractée. Article 1930. S'il n'y a pas de convention sur la durée de la société, elle est censée contractée pour toute la vie des associés; ou s'il s'agit d'une affaire dont la durée soit limitée, pour tout le temps que doit durer cette affaire. Article 1931. Lorsque la durée de la société est illimitée, la dissolution s'opère par la volonté de l'une des parties; celle-ci doit notifier sa renonciation à tous les associés. La renonciation est nulle, si elle n'est pas de bonne foi, ou si elle est faite à contre-temps. La renonciation n'est; pas de bonne foi, lorsque l'associé renonce pour s'approprier à lui seul le profit que les associés s'étaient proposé de retirer en commun. Elle est faite à contre-temps lorsque les choses ne sont plus entières, et qu'il importe à la société que sa dissolution soit différée. Article 1932. La société à temps limité peut être prorogée du consentement de tous les associés. La prorogation peut être expresse ou tacite. Elle se prouve d'après le droit commun. Article 1933. Si la société est prorogée après que le terme est expiré, il se forme une nouvelle société; si la prorogation se fait avant l'expiration du terme, l'ancienne société continue. Article 1934. La société finit par l'extinction de la chose qui en forme l'objet. Article 1935. La société finit encore de plein droit par la mort de l'un des associés. S'il a été stipulé qu'en cas de mort de l'un des associés la société continuerait avec son héritier, ou seulement entre les associés survivants, ces dispositions seront suivies; au second cas, l'héritier du décédé n'a droit qu'au partage de la société, eu égard à la situation de cette société lors du décès, et ne participe aux droits postérieurs qu'autant qu'ils sont une suite nécessaire de ce qui s'est fait avant la mort de l'associé auquel il succède. Article 1936. La société finit aussi de plein droit quand l'un des associés est interdit, colloqué dans une maison de santé, ou mis sous curatelle pour faiblesse d'esprit ou prodigalité. Article 1937. La société finit encore de plein droit par la faillite ou par la déconfiture de l'un des associés. Article 1938. La dissolution des sociétés à terme ne peut être demandée par l'un des associés avant le terme convenu, qu'autant qu'il y en a de justes motifs, comme lorsqu'un associé manque à ses engagements, ou qu'une infirmité habituelle le rend inhabile aux affaires de la société, ou autres cas semblables dont la légitimité et la gravité sont laissées à l'arbitrage des juges. Article 1939. Les règles concernant le partage des successions, les droits et obligations des copartageants et des créanciers, les effets du partage, la garantie et la rescision, s'appliquent au partage entre associés. L'associé qui aurait diverti ou recélé quelques effets de la société est privé de sa portion dans ces effets. CHAPITRE V. Des sociétés charbonnières. Article 1940. Les sociétés charbonnières sont assimilées aux sociétés commerciales dont elles empruntent la forme, en ce qui concerne la personnification; elles constituent une individualité juridique distincte de celle des associés ou actionnaires. Article 1941. Les principes qui régissent les sociétés personnifiées ou incorporées s'appliquent aux sociétés charbonnières. Article 1942. Les sociétés charbonnières sont perpétuelles de leur nature. CHAPITRE VI. Des sociétés personnifiées ou incorporées. Article 1943. Les associations de personnes, sans distinguer si elles forment des sociétés civiles ou non, ne peuvent être personnifiées ou incorporées que par la loi ou en vertu de la loi. Article 1944. Les sociétés incorporées peuvent contracter, acquérir à titre onéreux ou gratuit, disposer de leurs biens et agir en justice. Article 1945. Les corporations ne peuvent contracter, ni posséder que par l'intermédiaire de leurs administrateurs ou gérants, nommés par la charte d'incorporation ou en exécution des statuts. Les associés n'ont aucun pouvoir de les représenter. Ils n'ont d'autre droit que leur part dans les bénéfices ou dans le fonds social. Article 1946. Le directeur gérant est nommé par l'assemblée générale des actionnaires, conformément aux statuts. L'assemblée générale exerce le pouvoir constituant; elle modifie, s'il y a lieu, les statuts. Les décisions se prennent à la majorité fixée par les statuts, et, dans le silence des statuts, à la majorité absolue des votants. Dans les sociétés charbonnières, on a égard à la majorité des intérêts, sauf convention contraire. Article 1947. Les créanciers de la société ont pour débiteur l'être fictif avec lequel ils ont traité, et pour gage le fonds social. Us ne sont pas créanciers des associés, et les créanciers des associés ne sont pas créanciers de la société; ils n'ont pour gage que les biens de leur débiteur, sauf à exercer les droits de leur débiteur dans le fonds social, après que les créanciers de la société sont payés. Article 1948. Les sociétés incorporées ne prennent pas fin par la mort de l'un des associés, ni par sa renonciation. Article 1949. Le pouvoir qui a incorporé la société peut toujours retirer l'octroi. Quand les sociétés sont purement d'intérêt privé, elles finissent par la volonté unanime des associés, sauf disposition contraire des chartes d'incorporation. Article 1950. Quand une corporation est dissoute, l'actif social se partage entre les associés, à moins que la société ne soit d'intérêt public; dans ce cas, ses biens sont attribués au service de l'instruction publique. CHAPITRE VII. De la communauté. Article 1951. La communauté diffère de la société, en ce que les communistes n'ont pas pour but de tirer un profit de la chose commune. Article 1952. On peut convenir de rester en communauté pendant cinq ans. A défaut de convention, le partage peut toujours être demandé. Article 1953. Les communistes sont copropriétaires; à ce titre, ils ont les mêmes droits que les associés. Article 1954. Chacun des communistes est tenu de contribuer, pour sa part dans la communauté, aux réparations qui doivent être faites aux choses communes; mais il peut se libérer, en abandonnant sa part dans la chose. Article 1955. Le communiste peut librement disposer de sa part, avec cet effet que le cessionnaire prend sa place. Article 1956. Les communistes ne sont pas mandataires les uns des autres; l'un ne peut faire aucun acte concernant la chose commune, sans le concours des copropriétaires. Article 1957. Les communistes ne sont pas tenus de veiller aux intérêts communs. Article 1958. La communauté finit par le partage, par l'abandon que l'un des communistes fait de sa part à un autre, et par l'extinction de la chose commune. TITRE IX. Du prêt. Article 1959. Il y a deux sortes de prêts: Celui des choses non fongibles; ce sont, en général, les choses non consomptibles, dont on peut user sans les détruire; on l'appelle prêt à usage ou commodat; Et celui des choses fongibles; ce sont, en général, les choses consomptibles, qui se consomment par l'usage; on l'appelle prêt de consommation ou simplement prêt. CHAPITRE PREMIER. Du prêt à usage ou commodat. SECTION Ier. De la nature du prêt à usage. Article 1960. Le prêt à usage est un contrat par lequel l'une des parties livre une chose à l'autre afin de s'en servir pour ses besoins, à la charge par l'emprunteur de la rendre au terme convenu. A défaut de convention, la restitution doit se faire lorsque la chose a servi à l'usage pour lequel elle a été empruntée. Le juge peut obliger l'emprunteur à la rendre plus tôt, si pendant la durée du contrat, il survient au prêteur un besoin imprévu et pressant de sa chose. Article 1961. Le prêteur ne contracte aucune obligation naissant du contrat. Si, pendant la durée du prêt, l'emprunteur a été forcé, pour la conservation de la chose, à quelque dépense extraordinaire, nécessaire et tellement urgente qu'il n'ait pas pu en prévenir le prêteur, celui-ci sera tenu de la lui rembourser. Article 1962. Si, pour user de la chose, l'emprunteur a fait quelque dépense, il ne peut pas la répéter. Article 1963. Le prêteur répond, comme toute personne, de son dol. Lorsque la chose prêtée a des défauts tels qu'elle puisse causer un préjudice à celui qui s'en sert, le prêteur est responsable, s'il connaissait les défauts et n'en a pas averti l'emprunteur. Article 1964. Le prêt à usage, est essentiellement gratuit. Il est personnel, à moins que les parties n'aient manifesté une volonté contraire. Article 1965. Les choses consomptibles peuvent faire l'objet du commodat aussi bien que les choses non consomptibles, si telle est la volonté des parties contractantes. Article 1966. Le prêteur demeure propriétaire de la chose prêtée. Il supporte les risques. SECTION II. Des engagements de l'emprunteur. Article 1967. L'emprunteur est tenu de veiller, en bon père de famille, à la garde et à la conservation de la chose prêtée. Il ne peut s'en servir qu'à l'usage déterminé par sa nature ou par la convention; le tout à peine de dommages-intérêts, s'il y a lieu. Article 1968. Si l'emprunteur emploie la chose à un autre usage, ou pour un temps plus long qu'il n'en a le droit, il sera tenu de la perte arrivée, même par cas fortuit. Article 1969. Si la chose périt par un cas fortuit dont l'emprunteur aurait pu la garantir, en employant la sienne propre, ou si, ne pouvant conserver que l'une des deux, il a préféré la sienne, il est tenu de la perle de l'autre. Article 1970. Si la chose a été estimée en la prêtant, la perte qui arrive, même par cas fortuit, est pour l'emprunteur, s'il n'y a convention contraire. Article 1971. Si la chose se détériore par le seul effet de l'usage pour lequel elle a été empruntée, et sans aucune faute de l'emprunteur, il n'est pas tenu de la détérioration. Article 1972. Si plusieurs ont emprunté conjointement la même chose, ils en sont solidairement responsables envers le prêteur. Article 1973. L'emprunteur ne peut pas retenir la chose par compensation de ce que le prêteur lui doit. Article 1974. Dans les cas où l'emprunteur répond du cas fortuit, il cesse d'être responsable s'il prouve que la chose eût également péri s'il n'avait point été en faute. Article 1975. Si l'emprunteur manque à ses engagements, sans qu'il en résulte un préjudice pour le prêteur, celui-ci pourra demander que le contrat soit résilié. CHAPITRE II. Du prêt de consommation ou simple prêt. SECTION Ier. De la nature du prêt de consommation. Article 1976. Le prêt de consommation est un contrat par lequel l'une des parties livre à l'autre une certaine quantité de choses fongibles, à la charge par cette dernière de lui en rendre autant de même espèce et qualité, au terme convenu. Article 1977. L'emprunteur devient propriétaire de la chose prêtée, et c'est pour lui qu'elle périt, de quelque manière que la perte arrive. Article 1978. On ne peut pas donner, à titre de prêt de consommation, des choses qui, quoique de même espèce, diffèrent dans l'individu, tels que les animaux. SECTION II. Des engagements de l'emprunteur. Article 1979. S'il n'a pas été fixé de terme pour la restitution, le juge peut accorder à l'emprunteur un délai suivant les circonstances. Article 1980. S'il a été seulement convenu que l'emprunteur payerait quand il pourrait, ou quand il en aurait les moyens, le juge fixera un terme de payement suivant les circonstances. Article 1981. Si l'emprunteur est dans l'impossibilité de rendre les choses en même quantité et qualité, il est tenu d'en payer la valeur eu égard au temps et au lieu où la chose devait être rendue d'après la convention. Si ce temps et ce lieu n'ont pas été réglés, le payement se fait au prix du temps et du lieu où l'emprunt a été fait. Article 1982. Si l'emprunteur ne rend pas les choses prêtées ou leur valeur au terme convenu, il en doit l'intérêt du jour où il a été mis en demeure. CHAPITRE III. Du prêt à intérêt. Article 1983. Il est permis de stipuler des intérêts pour simple prêt, soit d'argent, soit de denrées, ou autres choses mobilières. Article 1984. L'emprunteur qui a payé des intérêts qui n'étaient pas stipulés ne peut ni les répéter ni les imputer sur le capital. Article 1985. L'intérêt est légal ou conventionnel. L'intérêt légal est fixé par la loi. Le taux de l'intérêt conventionnel est déterminé librement par les parties contractantes; il se prouve d'après le droit commun. Article 1986. La quittance du capital, donnée sans réserve des intérêts, en fait présumer le payement et en opère la libération. CHAPITRE IV. Des rentes constituées. Article 1987. On peut stipuler un intérêt moyennant un capital que le prêteur s'interdit d'exiger. Ce prêt prend le nom de constitution de rente. Article 1988. La rente peut être constituée de deux manières: en perpétuel ou en viager. SECTION Ier. Des rentes viagères. Article 1989. Les règles concernant les rentes viagères sont établies au titre Des contrats aléatoires. SECTION II. Des rentes perpétuelles. § Ier. — De la rente établie sous forme de prêt. Article 1990. Dans les rentes perpétuelles, le prêteur s'interdit d'exiger le capital; il n'a droit qu'aux intérêts sous le nom d'arrérages. Article 1991. Les règles concernant le taux de l'intérêt conventionnel s'appliquent aux arrérages. Article 1992. Les arrérages de rente produisent intérêt à partir de la convention ou de la mise en demeure. Article 1993. La rente constituée en perpétuel est essentiellement rachetable. Le débiteur peut rembourser le capital à volonté, à moins que les parties n'aient stipulé que le rachat ne sera pas fait avant le délai fixé par la convention, ou sans avoir averti le créancier au terme d'avance qu'elles auront déterminé. Article 1994. Le rachat est divisible, à moins que l'intention des parties n'ait été de le rendre indivisible au profit du créancier contre les héritiers du débiteur. Article 1995. Le capital de la rente devient exigible, en ce sens que le débiteur peut être contraint au rachat: 1° S'il cesse de remplir ses obligations pendant deux années, sans qu'il soit nécessaire de le mettre en demeure; 2° S'il manque à fournir au prêteur les sûretés promises par le contrat, ou lorsque par son fait il a diminué les sûretés qu'il avait données; 3° Lorsqu'il tombe en faillite ou en déconfiture. Article 1996. Dans les cas où le capital de la rente est remboursé sur la demande du débiteur, ou sur l'action du créancier, le rachat se fait au taux auquel la rente a été constituée. § II. — De la rente établie pour prix ou comme condition de la cession d'un immeuble. Article 1997. La rente peut être établie à perpétuité pour prix de la vente d'un immeuble, ou comme condition de la donation d'un immeuble. Article 1998. Cette rente, vulgairement appelée foncière, est soumise aux principes qui régissent les rentes constituées. Si l'acte constitutif est une vente ou une donation, on applique les principes qui régissent la vente et la donation avec charge. TITRE X. Du dépôt et du séquestre. CHAPITRE PREMIER. Du dépôt. Article 1999. Le dépôt est un contrat par lequel l'une des parties reçoit la chose d'autrui, à charge de la garder et de la restituer en nature à l'autre partie. Article 2000. Le dépôt n'est parfait que par la tradition de la chose. La tradition est censée faite quand le dépositaire se trouve déjà nanti, à quelque autre titre, de la chose que l'on consent à lui laisser à litre de dépôt. Il ne peut avoir pour objet que des choses mobilières. VI. 1 Article 2001. Le dépôt est un contrat essentiellement gratuit. Si un salaire est stipulé pour le dépositaire, le contrat prend la nature du louage. Article 2002. Le dépôt est volontaire ou nécessaire. SECTION Ier. Du dépôt volontaire. Article 2003. Le dépôt volontaire se forme par le consentement réciproque, de la personne qui fait le dépôt et de celle qui le reçoit. Article 2004. Le dépôt volontaire ne peut régulièrement être fait que par le propriétaire de la chose déposée, ou de son consentement exprès ou tacite. Quand même il serait fait par une personne qui n'est pas propriétaire de la chose, le dépôt sera valable entre les parties; le dépositaire sera tenu des obligations que le contrat lui impose; il devra restituer le dépôt, sans pouvoir exiger du déposant la preuve qu'il était propriétaire de la chose. Néanmoins, s'il découvre que la chose a été volée, et quel en est le véritable propriétaire, il doit dénoncer à celui-ci le dépôt qui lui a été fait, avec sommation de le réclamer dans un délai déterminé et suffisant. Si celui auquel la dénonciation a été faite néglige de réclamer le dépôt, le dépositaire est valablement déchargé par la tradition qu'il en fait au déposant. Le propriétaire de la chose peut la revendiquer d'après le droit commun. Article 2005. Le dépôt volontaire ne peut avoir lieu qu'entre personnes capables de contracter. Néanmoins, si une personne capable accepte le dépôt fait par une personne incapable, elle est tenue de toutes les obligations d'un dépositaire, tant que la nullité du dépôt n'a pas été prononcée par le juge, sur la demande de l'incapable. L'action du déposant sera formée par celui qui le représente. Si l'incapable se prévaut de son incapacité pour demander la nullité du dépôt, le dépôt annulé ne produira aucun effet, comme tel; le déposant pourra revendiquer la chose contre le dépositaire, mais celui-ci n'aura aucune action à raison du dépôt. Article 2006. Le dépôt fait par une personne capable à un incapable, est nul; si le dépositaire invoque son incapacité, le déposant n'a contre lui que l'action en revendication de la chose déposée, tant qu'elle existe dans la main du dépositaire, ou une action en restitution jusqu'à concurrence de ce qui a profité à ce dernier. Article 2007. Le dépôt volontaire doit être prouvé par écrit. La preuve testimoniale n'en est reçue que dans les cas et sous les conditions déterminées au titre Des obligations. Article 2008. Si le déposant n'a pas d'écrit, et que la preuve testimoniale ne soit pas admissible, il peut invoquer l'aveu du dépositaire, ou lui déférer le serment. A défaut d'aveu, et si le déposant ne défère pas le serment, celui qui est attaqué comme dépositaire en est cru sur sa déclaration, soit pour le fait même du dépôt, soit pour la chose qui en faisait l'objet, soit pour le fait de sa restitution. SECTION II. Des obligations du dépositaire. Article 2009. Le dépositaire doit apporter dans la garde de la chose déposée les mêmes soins qu'il apporte dans la garde des choses qui lui appartiennent. Article 2010. La disposition de l'article 2009 doit être appliquée avec plus de rigueur: 1° si le dépositaire s'est offert lui-même pour recevoir le dépôt; 2° s'il a stipulé un salaire pour la garde de la chose; 3° si, en vertu du contrat, le dépôt profite au dépositaire; 4° s'il a été convenu expressément que le dépositaire répondrait de toute espèce de faute. Article 2011. Même dans les cas où le dépositaire est tenu d'une manière plus rigoureuse, il ne répond pas des accidents de force majeure, à moins que le cas fortuit n'ait été amené par sa faute, ou que la chose n'ait péri après qu'il a été mis en demeure de la restituer, sauf au dépositaire à prouver qu'elle eût péri quand même il l'aurait restituée. Article 2012. Le dépositaire ne peut se servir de la chose déposée, sans le consentement exprès ou tacite du déposant. Si la chose périt par cas fortuit pendant qu'il s'en sert, il répondra de la perte. Article 2013. Il ne doit point chercher à connaître quelles sont les choses qui lui ont été confiées, quand même elles ne seraient pas dans un coffre fermé ou sous une enveloppe cachetée. Article 2014. Le dépositaire doit rendre identiquement les choses mêmes qu'il a reçues, quoiqu'elles soient fongibles. Ainsi, quand des sommes monnayées ont été déposées, le dépositaire doit restituer les sommes mêmes qu'il a reçues du déposant. Article 2015. Le dépositaire n'est tenu de rendre la chose déposée que dans l'état où elle se trouve au moment de la restitution. Les détériorations qui ne sont pas survenues par sa faute sont à la charge du déposant. Article 2016. Le dépositaire auquel la chose a été enlevée par une force majeure, et qui a reçu un prix à la place, doit restituer ce qu'il a reçu; s'il a une action, il doit la céder au déposant. Article 2017. L'héritier du dépositaire, qui a vendu de bonne foi la chose dont il ignorait le dépôt, n'est tenu que de rendre le prix qu'il a reçu, ou de céder son action contre l'acheteur, s'il n'a pas touché le prix. Article 2018. Si la chose déposée a produit des fruits qui aient été perçus par le dépositaire, il est obligé de les restituer. Il en est de même si une créance productive d'intérêts lui a été confiée. Article 2019. Le dépositaire doit l'intérêt de l'argent qu'il a reçu en dépôt: 1° du jour où il a été mis en demeure de faire la restitution; 2° du jour où il se sert des deniers qui lui ont été confiés. Article 2020. Le dépositaire ne doit restituer la chose déposée qu'à celui qui la lui a confiée, ou à celui au nom duquel le dépôt a été fait, ou à celui qui a été indiqué pour le recevoir. Article 2021. En cas de mort du déposant, la chose déposée ne peut être rendue qu'à son héritier, quand même un tiers aurait été indiqué dans le contrat pour recevoir le dépôt, à moins que ce tiers n'ait un droit à la chose. S'il y a plusieurs héritiers, la chose doit être rendue à chacun d'eux pour leur part. Si la chose est indivisible, les héritiers doivent s'accorder entre eux pour la recevoir. Article 2022. Si le déposant a changé d'état; par exemple, s'il a été interdit ou colloqué dans une maison de santé, le dépôt ne peut être restitue qu'à l'administrateur qui le représente. Article 2023. Si le dépôt a été fait par un tuteur ou par un administrateur, dans l'une de ces qualités, il ne peut être restitué qu'à la personne que ce tuteur ou cet administrateur représentaient, si leur gestion est finie. Article 2024. Le dépôt doit être remis au déposant aussitôt qu'il le réclame, lors même que le contrat aurait fixé un délai pour la restitution, à moins qu'il n'existe entre les mains du dépositaire une saisie-arrêt ou une opposition à la restitution et au déplacement de la chose déposée. Le dépositaire ne peut pas restituer la chose déposée, tant que le terme exprès ou tacite pour lequel le dépôt a eu lieu n'est pas écoulé. Article 2025. Si le contrat de dépôt désigne le lieu dans lequel la restitution doit être faite, le dépositaire est tenu d'y porter la chose déposée. Les frais de transport sont à la charge du déposant. Article 2026. Si le contrat ne désigne point le lieu de la restitution, elle doit se faire au lieu où se trouve la chose, quand même elle se trouverait dans un lieu plus éloigné que celui où elle a été remise au dépositaire, pourvu qu'elle y ait été transportée sans malice. Article 2027. Toutes les obligations du dépositaire cessent s'il vient à découvrir et à prouver qu'il est propriétaire de la chose déposée. SECTION III. Des obligations du déposant. Article 2028. Le déposant est tenu de rembourser au dépositaire les dépenses qu'il a faites pour la conservation de la chose déposée, et de l'indemniser de toutes les pertes que le dépôt peut lui avoir occasionnées. Article 2029. Le dépositaire peut réclamer les intérêts de ses avances. Il a même droit aux intérêts des intérêts, s'il a dû les payer pour se procurer les sommes nécessaires pour faire les dépenses de conservation. Le déposant n'est pas tenu de rembourser au dépositaire les dépenses utiles, pas même jusqu'à concurrence de ce dont il a profité. Article 2030. Le dépositaire peut retenir la chose déposée, jusqu'à l'entier payement de ce qui lui est dû à raison du dépôt. SECTION IV. Du dépôt nécessaire. Article 2031. Le contrat de dépôt est nécessaire, lorsque les parties ont été forcées de le consentir par quelque accident, tel qu'un incendie, une ruine, un pillage, un naufrage ou un autre événement imprévu. Article 2032. La preuve par témoins est reçue indéfiniment pour le dépôt nécessaire. Article 2033. Le dépôt nécessaire est d'ailleurs régi par toutes les régies du dépôt volontaire. Article 2034. Les aubergistes et hôteliers sont responsables des effets que le voyageur apporte chez eux; ce dépôt est assimilé au dépôt nécessaire, quant à la preuve testimoniale. Le juge pourra ordonner cette preuve, suivant la qualité des personnes et les circonstances du fait; mais les aubergistes et hôteliers sont tenus de la faute d'après le droit commun qui régit la faute conventionnelle. Article 2035. Ils répondent même du vol ou du dommage des effets du voyageur, soit que le vol ait été commis ou que le dommage ait été causé par les domestiques et préposés de l'hôtellerie, ou par des étrangers allant et venant dans l'hôtellerie. Ils ne sont pas responsables des vols commis avec force armée ou autre force majeure. CHAPITRE II. Du séquestre. Article 2036. SECTION Ier. Du séquestre conventionnel. Article 2037. Le séquestre conventionnel est le dépôt fait par deux ou plusieurs personnes, d'une chose contentieuse, entre les mains d'un tiers qui s'oblige à la rendre, après la contestation terminée, à la personne qui sera jugée devoir l'obtenir. Article 2038. Le séquestre peut n'être pas gratuit. S'il est salarié, il tient du louage, quant à la faute dont est tenue la personne chargée de la garde. S'il est gratuit, il est soumis aux règles du dépôt proprement dit, sauf les différences ci-après énoncées. Article 2039. Le séquestre peut avoir pour objet, non seulement des effets mobiliers, mais même des immeubles. Quand le séquestre a pour objet des immeubles, le dépositaire doit administrer et percevoir les fruits. Article 2040. Le dépositaire chargé du séquestre ne peut être déchargé, avant la contestation terminée, que du consentement de toutes les parties intéressées, ou pour une cause jugée légitime, telle qu'une infirmité habituelle. Article 2041. Chacun des déposants est tenu solidairement des dépenses de conservation faites par le dépositaire, et du salaire qu'il a stipulé. SECTION II. Du séquestre judiciaire. Article 2042. La justice peut ordonner le séquestre d'un immeuble ou d'une chose mobilière dont la propriété ou la possession est litigieuse entre deux ou plusieurs personnes. Le juge ne doit ordonner le séquestre que dans des cas très graves, tel que celui où il y aurait danger pour l'une des parties dans la possession dont jouit la partie adverse. Article 2043. Le séquestre judiciaire est donné soit à une personne dont les parties intéressées sont convenues, soit à une personne nommée d'office par le juge. Dans l'un et l'autre cas, celui auquel la chose a été confiée est soumis à toutes les obligations qu'emporte le séquestre conventionnel. Article 2044. Le gardien des meubles saisis est salarié par le saisissant. Il est soumis au droit commun en ce qui concerne la faute. Le gardien doit représenter les meubles saisis, soit à la décharge du saisissant pour la vente, soit au débiteur saisi, en cas de mainlevée de la saisie. TITRE XI. Des contrats aléatoires. Article 2045. Le contrat aléatoire est une convention dont les effets, quant aux avantages et aux pertes, dépendent d'un événement incertain. Tels sont: le contrat d'assurance et le contrat de rente viagère. CHAPITRE PREMIER. Du jeu et du pari. Article 2046. Le jeu et le pari sont contraires aux bonnes mœurs; la loi ne les reconnaît pas comme contrats. Article 2047. La loi refuse tout effet au jeu: aucune des parties ne peut s'en prévaloir à son profit. La partie qui gagne n'a pas d'action, et le perdant ne peut répéter ce qu'il a payé, à moins qu'il n'y ait eu de la part du gagnant dol, supercherie ou escroquerie. Article 2048. Les jeux qui tiennent à l'adresse et à l'exercice du corps sont exceptés de la disposition précédente. Néanmoins, le tribunal peut rejeter la demande quand la somme lui paraît exagérée. Article 2049. Les dispositions des articles 2046 et 2047 s'appliquent aux jeux de bourse, s'il est constaté que les parties ont entendu jouer. Les marchés à terme sérieux seront exécutés comme toute convention licite. CHAPITRE II. De la rente viagère. SECTION Ier. Des conditions requises pour la validité du contrat. Article 2050. La rente viagère peut être constituée à titre onéreux ou à titre gratuit. Dans ce dernier cas, c'est une libéralité, soit entre-vifs, soit testamentaire, tant pour le fond, que pour la forme. Article 2051. La rente viagère est un contrat aléatoire lorsqu'il y a chance de gain ou de perte pour chacune des parties. Article 2052. La rente viagère peut être constituée soit sur la tête de celui qui en fournit le prix, soit sur la tête d'un tiers qui n'a aucun droit d'en jouir. Elle peut être constituée sur une ou plusieurs têtes. Article 2053. La rente viagère peut être constituée au profit d'un tiers, quoique le prix en soit fourni par une autre personne. Dans ce cas, la rente est une libéralité quant au fond; mais elle n'est pas une libéralité quant à la forme, pourvu qu'elle soit constituée sous les conditions établies par l'article 1069. Article 2054. Tout contrat de rente viagère créée à titre onéreux, sur la tête d'une personne qui était morte au jour du contrat, ne produit aucun effet. Article 2055. Il en est de même du contrat par lequel la rente a été créée sur la tête d'une personne atteinte de la maladie dont elle est décédée dans les vingt jours de la date du contrat. Article 2056. La rente viagère peut être constituée au taux qu'il plaît aux parties contractantes de fixer. SECTION II. Des effets du contrat entre les parties contractantes. Article 2057. Le débirentier est tenu de servir la rente pendant toute la vie du crédirentier, quelle qu'en soit la durée, et quelque onéreux qu'ait pu devenir le service de la rente. Le constituant ne peut se libérer du payement de la rente, en offrant de rembourser le capital, quand même il renoncerait à la répétition des arrérages payés; le tout sauf convention contraire. Le rachat peut être stipulé aux conditions dont les parties conviennent. Article 2058. La rente viagère n'est acquise au crédirentier que dans la proportion du nombre de jours qu'a vécu la personne sur la tête de laquelle la rente a été créée. Néanmoins, s'il a été convenu qu'elle serait payée d'avance, le terme qui a dû être payé est acquis du jour où le payement a dû être fait. Article 2059. Le crédirentier ne peut demander les arrérages qu'en justifiant de son existence, ou de la vie de la personne sur la tête de laquelle la rente a été constituée. Article 2060. Le crédirentier peut céder son droit et ses créanciers peuvent le saisir. Néanmoins, la rente viagère peut être stipulée insaisissable, quand elle a été constituée à titre gratuit. Les sommes et pensions données ou léguées pour aliments sont insaisissables de plein droit. SECTION III. De l'extinction de la rente viagère. Article 2061. La rente viagère est attachée à l'existence de la personne ou des personnes sur la tête desquelles elle est créée. Article 2062. Celui au profit duquel la rente viagère a été constituée, moyennant un prix, peut demander la résolution du contrat, si le débirentier ne lui donne pas les sûretés stipulées pour son exécution, ou s'il les diminue par son fait. Il en est de môme si les sûretés ont péri ou ont été diminuées par un accident; mais, dans ce cas, le débiteur est admis à en fournir de nouvelles. Article 2063. Le seul défaut de payement des arrérages de la rente n'autorise point le crédirentier à demander la résolution du contrat quand il est aléatoire: il n'a que le droit de saisir et de faire vendre les biens de son débiteur et de faire ordonner ou consentir, sur le produit de la vente, l'emploi d'une somme dont les intérêts suffisent pour le service des arrérages. Il en est de même quand les parties stipulent que, à défaut de payement des arrérages, le contrat sera résolu. TITRE XII. Du mandat. CHAPITRE PREMIER. De la nature, de la forme et de l'étendue du mandat. Article 2064. Le mandat est un contrat par lequel une personne s'oblige à faire quelque chose pour une autre qui l'en a chargée et en son nom. Article 2065. Le mandat peut être exprès ou tacite. L'acceptation du mandat peut n'être que tacite, et résulter de l'exécution qui lui a été donnée par le mandataire. Article 2066. Le mandat peut être gratuit ou salarié. Article 2067. Le juge ne peut pas réduire, pour cause d'excès, le salaire fixé par convention. Article 2068. Tout mandat doit avoir un objet licite; si l'objet est illicite, le mandat est inexistant. Tels sont: 4° le mandat de jouer à la bourse; 2° le mandat de transmettre une chose à une corporation illégale; 3° la convention entre le créancier d'un droit litigieux et l'avocat ou l'avoué, qui se charge de lui en procurer le payement, moyennant l'abandon d'une quotité du droit. Article 2069. Le mandat n'est assujetti à aucune forme; il se prouve d'après le droit commun. La procuration peut même se donner par lettre. Article 2070. Le mandataire ne peut faire des actes de propriété que si le mandat lui en donne le pouvoir en termes exprès. Tout autre mandat n'embrasse que les actes d'administration, sans distinguer s'il a été donné pour toutes les affaires du mandant, ou pour certaines affaires seulement, ou s'il est conçu en termes généraux ou non. Article 2071. Le mandataire qui n'a qu'un pouvoir d'administrer ne peut faire aucun acte de disposition. Article 2072. Le mandataire ne peut rien faire au delà de son mandat: le pouvoir de transiger ne renferme pas celui de compromettre. CHAPITRE II. Des obligations du mandataire. Article 2073. Le mandataire doit accomplir le mandat, en observant sa forme, tant qu'il en demeure chargé. Le mandataire répond des dommages-intérêts résultant de l'inexécution du mandat, ou de l'inobservation de la forme. Article 2074. Le mandataire salarié répond du dol et des fautes qu'il commet dans sa gestion, d'après le droit commun; si le mandat est gratuit, les juges appliqueront la responsabilité avec moins de rigueur. Article 2075. Quand il y a plusieurs mandataires, la responsabilité se divise entre eux; ils ne sont tenus solidairement que si la solidarité a été expressément stipulée, alors même qu'ils sont établis par un même acte. Article 2076. Dans le silence du contrat, le mandataire peut se substituer quelqu'un, à condition que la substitution ne nuise pas au mandant; si elle lui cause un dommage, le mandataire répondra de la gestion du substitué. Quand le mandat donne le droit de substitution, sans désigner la personne, et que le mandataire use de ce droit, le mandat cesse; néanmoins, le mandataire répondra de la gestion du substitué, si celui-ci était notoirement incapable ou insolvable. Lorsque le mandat désigne la personne que le mandataire est autorisé à se substituer, il est entièrement déchargé, en usant de ce droit. Dans tous les cas, le mandant peut agir directement contre la personne que le mandataire s'est substituée. Article 2077. Tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant. Article 2078. Le mandataire doit l'intérêt des sommes qu'il a employées à son usage, à dater de cet emploi, et de celles dont il est reliquataire, à compter du jour qu'il est mis en demeure. CHAPITRE III. Des obligations du mandant. Article 2079. Le mandant doit rembourser au mandataire les avances et frais que celui-ci a faits pour l'exécution du mandat, et lui payer ses salaires lorsqu'il en a été promis. S'il n'y a aucune faute imputable au mandataire, le mandant ne peut se dispenser de faire ce remboursement et ce payement, lors môme que l'affaire n'aurait pas réussi, ni faire réduire le montant des frais et avances, sous le prétexte qu'ils pouvaient être moindres. Article 2080. L'intérêt des avances faites par le mandataire lui est dû par le mandant, à dater du jour des avances constatées. Article 2081. Le mandant doit indemniser le mandataire des pertes que celui-ci a essuyées à l'occasion de sa gestion, sans imprudence qui lui soit imputable. Article 2082. Lorsque le mandataire a été constitué par plusieurs personnes, même pour une affaire commune, chacune d'elles n'est tenue que pour sa part envers lui de tous les effets du mandat, à moins que la solidarité n'ait été stipulée expressément. CHAPITRE IV. Des obligations du mandataire et du mandant à l'égard des tiers. Article 2083. Le mandataire ne contracte aucune obligation envers les tiers avec lesquels il traite en cette qualité. Néanmoins, le mandataire est tenu à l'égard des tiers pour ce qu'il a fait au delà de ses pouvoirs, s'il n'a pas donné aux tiers une connaissance suffisante de son mandat, ou s'il s'est soumis personnellement à la garantie. Article 2084. Les obligations du mandataire sont les obligations du mandant. Le mandant n'est tenu d'exécuter les engagements contractés par le mandataire, que si le mandataire a traité en cette qualité, et dans les limites de ses pouvoirs. Article 2085. Si le mandataire traite en son nom personnel, il sera obligé à l'égard des tiers, comme s'il n'avait pas de mandat. Il sera aussi obligé envers son mandant. Mais il n'y aura aucun lien entre le mandant et les tiers; il peut seulement se faire céder les actions du mandataire contre les tiers. Article 2086. Quand le mandataire dépasse les bornes de son mandat, ses actes n'ont aucun effet à l'égard du mandant; à moins que le mandant ne les ratifie expressément ou tacitement. La ratification équivaut au mandat, mais elle ne rétroagit pas au jour du mandat, ni à l'égard des tiers, ni entre les parties. CHAPITRE V. Des manières dont le mandat finit. Article 2087. Le mandat finit: 1° Par la mort du mandant. Toutefois le mandataire est tenu d'achever la chose commencée au décès du mandant, s'il y a péril en la demeure; 2° Par la mort du mandataire. Les héritiers doivent en donner avis au mandant, et pourvoir, en attendant, à ce que les circonstances exigent, pour l'intérêt du mandant; 3° Par l'interdiction, la déconfiture ou la faillite, soit du mandant, soit du mandataire; 4° Par la révocation du mandataire. La révocation du mandat peut être tacite: la constitution d'un nouveau mandataire pour la même affaire vaut révocation du premier, à compter du jour où elle a été notifiée à celui-ci. Quand le mandat est salarié, la révocation ne peut avoir lieu que pour cause légitime, et le mandataire a droit à une indemnité, à moins qu'il n'ait été révoqué pour avoir démérité; 5° Par la renonciation du mandataire. Celui-ci ne peut renoncer que si le mandat est gratuit et si la renonciation ne cause aucun préjudice au mandant. Quand le mandat est salarié, la renonciation n'est permise que dans le cas où le mandataire ne pourrait continuer la gestion, sans en éprouver un préjudice considérable. Article 2088. Si le mandataire ignore la mort du mandant, ou l'une des autres causes qui font cesser le mandat, ce qu'il a fait dans cette ignorance est valide. Article 2089. Dans les cas ci-dessus, les engagements du mandataire sont exécutés à l'égard des tiers de bonne foi. TITRE XIII. Du cautionnement. CHAPITRE PREMIER. De la nature et de l'étendue du cautionnement. Article 2090. Celui qui se rend caution d'une obligation se soumet envers le créancier à satisfaire à cette obligation, si le débiteur n'y satisfait pas lui-même. Article 2091. Le cautionnement est un contrat de bienfaisance, mais il n'est pas essentiellement gratuit; la caution peut stipuler une indemnité pour le service qu'elle rend au débiteur. Le cautionnement gratuit est une libéralité assujettie aux règles du rapport et de la réduction; il n'est pas une donation quant à la forme. Article 2092. Le cautionnement ne peut exister que sur une obligation valable. Néanmoins, on peut cautionner une obligation contractée par une personne incapable. Article 2093. Le cautionnement doit être exprès. On n'est caution que si l'on s'est oblige à ce litre. Article 2094. Le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur, ni être contracté sous des conditions plus onéreuses. Il peut être contracté pour une partie de la dette seulement, et sous des conditions moins onéreuses. Le cautionnement qui excède la dette, ou qui est contracté sous des conditions plus onéreuses, n'est point nul: il est seulement réductible à la mesure de l'obligation principale. Article 2095. Si l'obligation de la caution a été limitée par la convention, on ne peut l'étendre au delà de ces limites. En cas de doute, le cautionnement est de stricte interprétation. Article 2096. Lorsque les termes du contrat sont généraux et indéfinis, la caution est censée accéder à tous les engagements du débiteur résultant du contrat principal. Article 2097. Le juge décide, d'après les termes du contrat et l'intention commune des parties, si le cautionnement est limité ou illimité. Article 2098. Le cautionnement indéfini d'une obligation principale s'étend à tous les accessoires de la dette, même aux frais de la première demande et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution. Article 2099. Le débiteur obligé à fournir caution, en vertu de la loi, d'un jugement ou de la convention, doit en présenter une qui ait la capacité de s'obliger et qui soit solvable. Article 2100. La solvabilité de la caution s'estime eu égard à sa fortune, sans distinguer entre les meubles et les immeubles. Article 2101. Lorsque la caution reçue par le créancier, volontairement ou en justice, est ensuite devenue insolvable, il doit en être donné une autre. Cette règle reçoit exception dans le cas seulement où la caution n'a été donnée qu'en vertu d'une convention par laquelle le créancier a exigé une telle personne pour caution. CHAPITRE II. De l'effet du cautionnement. SECTION Ier. De l'effet du cautionnement entre le créancier et la caution. Article 2102. Lorsque le créancier agit contre la caution, celle-ci peut lui opposer le bénéfice de discussion, à moins qu'elle n'y ait renoncé; elle est censée y renoncer tacitement, lorsqu'elle s'oblige solidairement avec le débiteur, en ce sens qu'elle peut être poursuivie, comme si elle était tenue seule au payement de la dette. Article 2103. La caution doit requérir la discussion sur les premières poursuites dirigées contre elle. Son silence implique qu'elle renonce au bénéfice de discussion, sauf à elle à prouver qu'elle n'a pas eu l'intention d'y renoncer. Article 2104. La caution qui requiert la discussion doit indiquer au créancier les biens du débiteur principal, et avancer les deniers suffisants pour les discuter. Article 2105. Le créancier est, jusqu'à concurrence des biens indiqués, responsable, à l'égard de la caution, de l'insolvabilité du débiteur principal, survenue par le défaut de poursuites. Article 2106. Quand plusieurs personnes se rendent cautions du même débiteur pour une même dette, l'obligation du cautionnement se divise entre elles; le créancier ne peut agir contre chaque caution que pour sa part, à moins qu'il n'ait stipulé expressément la solidarité. SECTION II. De l'effet du cautionnement entre le débiteur et la caution. Article 2107. La caution qui a payé a son recours contre le débiteur principal: si le fidéjusseur a cautionné le débiteur à son su, il a l'action du mandat; si c'est à son insu, il a l'action de gestion d'affaires. Dans l'un et l'autre cas, la caution a droit à être indemnisée complètement. Article 2108. La caution a un recours: 1° pour le principal, c'est-à-dire pour tout ce qu'elle a dû payer au créancier, même les intérêts; 2° pour les intérêts de toutes les avances qu'elle a faites, même des intérêts qu'elle a dû payer; 3° pour les frais et les dommages-intérêts s'il y a lieu, et pour les frais par elle faits depuis qu'elle a dénoncé au débiteur principal les poursuites dirigées contre elle. Article 2109. La caution, qui a payé une première fois n'a point de recours contre le débiteur principal qui a payé une seconde fois, lorsqu'elle ne l'a point averti du payement qu'elle a fait; sauf son action en répétition contre le créancier. Lorsque la caution a payé sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal, elle n'aura point de recours contre lui dans le cas où, au moment du payement, ce débiteur aurait eu des moyens pour faire déclarer la dette éteinte; sauf son action en répétition contre le créancier. Article 2110. La caution qui a payé la dette est subrogée à tous les droits qu'avait le créancier contre le débiteur. Article 2111. Lorsqu'il y avait plusieurs débiteurs principaux solidaires d'une même dette, la caution qui les a tous cautionnés a, contre chacun d'eux, le recours pour la répétition du total de ce qu'elle a payé. Article 2112. La caution, même avant d'avoir payé, peut agir contre le débiteur principal, pour être par lui indemnisée: 1° Lorsqu'elle est poursuivie en justice pour le payement; 2° Lorsque le débiteur a fait faillite, ou est en déconfiture; 3° Lorsque le débiteur s'est obligé à lui rapporter sa décharge dans un certain temps; 4° Lorsque la dette est devenue exigible par l'échéance du terme pour lequel elle avait été contractée; 5° Au bout de dix années, lorsque l'obligation principale n'a point de terme fixe d'échéance, à moins qu'elle ne soit pas de nature à pouvoir être éteinte avant un certain temps déterminé; L'action de la caution, dans ces divers cas, tend à obtenir la décharge du cautionnement, ou une indemnité qui la garantisse des poursuites du créancier et du danger de l'insolvabilité du débiteur. La caution peut demander que le montant de l'indemnité soit consigné. SECTION III. De l'effet du cautionnement entre les cofidéjusseurs. Article 2113. Lorsque plusieurs personnes ont cautionné un même débiteur pour une même dette, la caution qui a acquitté la dette a un recours contre les autres cautions, chacune pour sa part. Mais ce recours n'a lieu que lorsque la caution a payé dans l'un des cas énoncés en l'article précédent. CHAPITRE III. De l'extinction du cautionnement. Article 2114. L'obligation qui résulte du cautionnement s'éteint par les mêmes causes que les autres obligations. Article 2115. La compensation ne s'opère pas de plein droit quand la caution devient créancière du créancier de l'obligation principale: elle ne s'opère que du jour où elle a été opposée par la caution. Article 2116. L'extinction de l'obligation principale entraîne l'extinction du cautionnement. Article 2117. Le cautionnement est éteint par la dation en payement. L'acceptation volontaire que le créancier a faite d'un immeuble, ou d'un effet quelconque, en payement de la dette principale décharge la caution, encore que le créancier vienne à en être évincé. Article 2118. Le cautionnement s'éteint par la novation opérée à l'égard du débiteur principal. La prorogation de terme accordée par le créancier au débiteur principal n'opère pas novation et ne décharge pas la caution, qui peut, en ce cas, poursuivre le débiteur pour le forcer au payement. Article 2119. La caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et qui sont inhérentes à la dette. Mais elle ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur, telles que les causes d'incapacité. Article 2120. Lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opérer en faveur de la caution, celle-ci peut lui opposer l'exception de subrogation, par l'effet de laquelle elle sera déchargée. CHAPITRE IV. De la caution légale et de la caution judiciaire. Article 2121. Le débiteur, obligé par la loi ou par un jugement à fournir une caution, et qui ne peut pas en trouver, est reçu à donner à sa place un gage ou une hypothèque. TITRE XIV. De la transaction. CHAPITRE PREMIER. Définition et conditions. Article 2122. La transaction est un contrat qui intervient sur un droit douteux, pour terminer une contestation née, ou pour prévenir une contestation à naître, entre les contractants, qui renoncent à une partie de leurs prétentions. Article 2123. Pour transiger, il faut avoir la capacité de disposer des objets compris dans la transaction. Les communes, les provinces et les établissements publics ne peuvent transiger qu'avec l'autorisation ou l'approbation requise par les lois qui les régissent. Les tuteurs, et les autres administrateurs légaux des biens d'autrui, ne peuvent transiger qu'en remplissant les formalités prescrites par la loi. Article 2124. On peut transiger sur toute espèce de droits d'intérêt privé, notamment sur l'action civile naissant d'un délit. On ne peut pas transiger sur des droits d'ordre public, par exemple sur l'état des personnes. Article 2125. La transaction doit être rédigée par écrit; elle ne peut être prouvée par témoins, quand même il y aurait un commencement de preuve par écrit. CHAPITRE II. Des effets de la transaction. Article 2126. La transaction met fin au litige, et produit entre les parties l'exception de chose jugée. Article 2127. Les transactions se renferment dans leur objet: la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu. Article 2128. Les transactions ne règlent que les différends qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui y est exprimé. Article 2129. Si celui qui a transigé sur un droit qu'il avait de son chef acquiert ensuite un droit semblable du chef d'une autre personne, il n'est pas, quant au droit nouvellement acquis, lié par la transaction antérieure. Article 2130. La transaction faite par l'un des intéressés ne lie point les autres intéressés et ne peut être opposée par eux. Article 2131. La transaction ne contient pas, par elle-même, une translation de propriété; elle est simplement déclarative des droits sur lesquels elle porte. Article 2132. La transaction est divisible ou indivisible, selon l'intention des contractants. CHAPITRE III. De la nullité et de l'inexistence de la transaction. Article 2133. L'erreur sur la personne rend la transaction nulle, et même inexistante s'il en résulte une erreur sur l'objet. Article 2134. L'erreur de droit ne vicie pas la transaction. Article 2135. L'erreur de calcul commise par les parties doit être réparée. Article 2136. Si le titre sur lequel la transaction a été faite est inexistant, la transaction sera nulle de plein droit. La transaction sera nulle, si le titre est nul. Toutefois la transaction sera valable, si les parties ont expressément traité sur l'inexistence ou sur la nullité du titre. Article 2137. La transaction faite sur pièces qui depuis ont été reconnues fausses est nulle de plein droit. Article 2138. La transaction sur un procès terminé par un jugement passé en force de chose jugée, dont les parties ou l'une d'elles n'avaient point connaissance, est sans cause, et par suite inexistante. Si le jugement ignoré des parties était susceptible d'appel, la transaction est viciée par l'erreur, ce qui permet d'en demander la nullité. Article 2139. Lorsque la transaction n'a qu'un objet, et qu'il est constaté par des titres nouvellement découverts, que l'une des parties n'avait aucun droit, la convention sera nulle de plein droit. Lorsque les parties ont transigé sur toutes les affaires qu'elles pouvaient avoir ensemble, la convention sera également inexistante pour le tout, par la découverte de nouveaux titres relatifs à un des objets de la transaction, s'il est constaté par le juge que, dans l'intention des contractants, la transaction était indivisible. TITRE XV. Du nantissement. Article 2140. Le nantissement est un contrat par lequel un débiteur remet à son créancier une chose pour sûreté de la dette. Article 2141. Le nantissement d'une chose mobilière s'appelle gage; celui d'une chose immobilière s'appelle antichrèse. CHAPITRE PREMIER. Du gage. Article 2142. Le gage confère au créancier le droit de se faire payer sur la chose qui en est l'objet, par privilège et préférence aux autres créanciers. Article 2143. Pour donner une chose en gage, il faut en être propriétaire et capable de l'aliéner. Le gage de la chose d'autrui est nul. Article 2144. On peut donner en gage toutes choses mobilières qui sont dans le commerce, incorporelles et corporelles, pourvu qu'elles soient susceptibles de possession. Article 2145. Le gage peut être donné par un tiers pour le débiteur. Article 2146. Aucune forme n'est requise pour établir le gage entre les parties; il se prouve d'après le droit commun. Article 2147. A l'égard des tiers le privilège du créancier gagiste n'a lieu que s'il est rendu public, comme il sera dit au titre Des privilèges et hypothèques. La publicité est prescrite pour tout gage, commercial ou civil. Article 2148. Entre les créanciers le privilège n'a de rang que du jour où les formalités de publicité ont été remplies. Article 2149. Le créancier ne peut exercer les droits que le gage lui donne contre le débiteur et contre les tiers, que si l'objet du gage a été mis et est resté en sa possession. Article 2150. Le créancier ne peut à défaut de payement, disposer du gage; sauf à faire ordonner en justice que ce gage lui demeurera en payement jusqu'à due concurrence, d'après une estimation faite par experts, ou qu'il sera vendu aux enchères. Toute clause qui autoriserait le créancier à s'approprier le gage ou à en disposer sans les formalités ci-dessus, est nulle. Article 2151. Jusqu'à l'expropriation, s'il y a lieu, le débiteur reste propriétaire du gage; le créancier ne peut pas user de la chose, il la détient à titre de droit réel, mais précairement. S'il en use sans y être autorisé, le débiteur peut en réclamer la restitution sans avoir payé la dette. Article 2152. Le créancier répond de la perte ou de la détérioration de la chose, d'après le droit commun. Article 2153. Si une créance portant intérêt a été donnée en gage, le créancier impute ces intérêts sur ceux qui peuvent lui être dus. Si la dette pour sûreté de laquelle la créance a été donnée en gage ne porte point elle-même intérêt, l'imputation se fera sur le capital. Article 2154. Le débiteur ne peut réclamer la restitution du gage qu'après avoir entièrement payé, tant en principal qu'intérêts et frais, la dette pour sûreté de laquelle le gage a été donné. S'il existait de la part du même débiteur, envers le même créancier, une autre dette contractée postérieurement à la mise en gage, et devenue exigible avant le payement de la première dette, le créancier pourra exercer son droit de rétention jusqu'à ce qu'il ait été entièrement payé de l'une et de l'autre dette, lors même qu'il n'y aurait eu aucune stipulation pour affecter le gage au payement de la seconde; mais il n'aura pas le privilège. Article 2155. Le gage est indivisible nonobstant la divisibilité de la dette entre les héritiers du débiteur et ceux du créancier. L'héritier du débiteur qui a payé sa portion de la dette ne peut demander la restitution de sa portion dans le gage, tant que la dette n'est pas entièrement acquittée. Réciproquement, l'héritier du créancier qui a reçu sa portion de la dette ne peut remettre le gage au préjudice de ceux de ses cohéritiers qui ne sont pas payés. Article 2156. Le débiteur doit rembourser au créancier le total des dépenses qu'il a faites pour la conservation de la chose, et la plus-value des dépenses utiles. CHAPITRE II. De l'antichrèse. Article 2157. L'antichrèse donne au créancier le droit de percevoir les fruits de l'immeuble. L'antichrésiste doit imputer annuellement les fruits sur les Intérêts, s'il lui en est dû, et ensuite sur le capital de sa créance. S'il néglige de percevoir les fruits, il en est responsable envers le débiteur. L'antichrésiste doit rendre compte chaque année de ses recettes et de ses dépenses. Article 2158. L'antichrésiste peut jouir par lui-même ou donner à ferme aux mêmes conditions que l'usufruitier. Article 2159. Le créancier est tenu, s'il n'en est autrement convenu, de payer, au nom de débiteur et pour son compte, les contributions et les charges annuelles de l'immeuble. Article 2160. L'antichrésiste doit faire les travaux nécessaires pour la conserva loin et pour la jouissance de l'immeuble. Il ne peut pas faire de nouvelles constructions; s'il en fait, il n'a pas d'action de ce chef contre le débiteur; mais si celui-ci veut les conserver, il doit payer la plus-value. Article 2161. Pour donner un immeuble en antichrèse, il faut être propriétaire et capable d'aliéner. Article 2162. L'antichrèse ne s'établit que par écrit; la preuve testimoniale n'en est pas reçue. Article 2163. L'acte d'antichrèse doit être rendu public par la transcription. Article 2164. Le débiteur ne peut, avant l'entier acquittement de la dette, réclamer la jouissance de l'immeuble qu'il a donné en antichrèse, à moins que l'antichrésiste n'abuse de la jouissance. Le créancier peut toujours renoncer à l'antichrèse, pour se décharger des obligations que lui impose la jouissance. Article 2165. L'antichrésiste ne peut, à défaut de payement, disposer de l'immeuble; mais les parties peuvent convenir que l'immeuble lui demeurera en payement, jusqu'à due concurrence, d'après une estimation faite par experts; elles peuvent aussi stipuler que l'immeuble, au lieu d'être exproprié, sera vendu aux enchères. Toute clause qui autoriserait le créancier à s'approprier l'immeuble, ou à en disposer, sans les formalités ci-dessus, est nulle. Article 2166. Les parties peuvent encore convenir que les fruits se compenseront avec les intérêts, ou totalement ou jusqu'à une certaine concurrence. Article 2167. Le créancier antichrésiste n'a pas de droit réel dans l'immeuble. Son droit ne porte que sur les fruits; il est mobilier et sans privilège; toutefois le créancier peut l'opposer aux tiers. Article 2168. Le débiteur reste propriétaire de l'immeuble donné en antichrèse, il peut l'aliéner et Hypothéquer, mais sans porter atteinte au droit qu'il a accordé à l'antichrésiste sur les fruits. L'acquéreur et le créancier hypothécaire doivent respecter le droit de l'antichrésiste. Article 2169. L'acquéreur ne peut pas déposséder le créancier antichrésiste; il a seulement le droit de réclamer la jouissance de l'immeuble, en payant entièrement la dette pour laquelle l'immeuble a été donné en antichrèse. Article 2170. Les créanciers hypothécaires peuvent exercer leur droit de suite contre l'antichrésiste, en respectant son droit de jouissance et de rétention. A cet effet, le saisissant est tenu de faire insérer dans le cahier des charges la clause que l'immeuble est grevé d'antichrèse et que l'adjudicataire versera son prix entre les mains de l'antichrésiste avant d'entrer en possession. Article 2171. Les créanciers chirographaires du débiteur ne peuvent saisir l'immeuble antichrésé qu'après avoir payé au créancier l'intégralité de sa créance. Article 2172. Si la dette pour laquelle l'immeuble a été donné en antichrèse n'est pas échue, l'antichrésiste peut refuser le payement que les tiers lui offrent; il conserve, dans ce cas, la possession de l'immeuble, en imputant les fruits sur les intérêts. TITRE XVI. Des privilèges et hypothèques. CHAPITRE PRÉLIMINAIRE. Transcription et inscription. SECTION Ier. Des faits juridiques soumis à la publicité. Article 2173. Tous les faits juridiques que les tiers ont intérêt à connaître sont soumis à la publicité par la voie de la transcription ou par celle de l'inscription. Article 2174. Les faits juridiques dont la loi ordonne la publicité, et qui n'ont pas été rendus publics par la voie légale, ne peuvent être opposés aux tiers de bonne foi; ils sont considérés à leur égard comme n'existant pas, à moins que la loi ne leur donne un effet. Article 2175. La transcription consiste dans la copie littérale des actes qui constatent un fait juridique soumis à la publicité. Elle se fait sur des registres tenus par les conservateurs des hypothèques ou par les greffiers des tribunaux civils et des tribunaux de commerce. Article 2176. L'inscription consiste dans des mentions portées sur des registres publics par les officiers désignés en l'article 2175, sur les déclarations contenues dans les bordereaux que leur remettent les parties intéressées. Article 2177. La loi détermine le mode de publicité d'après l'intérêt des tiers; s'ils sont intéressés à connaître toutes les clauses des actes soumis à la publicité, ces actes seront transcrits. Si les tiers sont seulement intéressés à connaître certains faits essentiels, les actes seront inscrits. Article 2178. Les actes sous seing privé et les actes authentiques sont admis à la transcription et à l'inscription. SECTION II. De la transcription. Article 2179. Seront transcrits: 1° Les actes constatant la transmission de la propriété et des démembrements de la propriété des immeubles, autres que les privilèges et hypothèques; 2° Les actes constatant la cession de droits mobiliers, réels ou personnels, et la subrogation à ces droits. Le cessionnaire peut agir en déclaration de la créance contre le débiteur, même avant l'échéance de la dette, pourvu que la créance soit certaine et liquide; le tout conformément aux articles 570 et suivants du code de procédure; 3° Les actes portant renonciation aux droits prévus par le n°1; 4° Les jugements qui constatent l'existence de ces mêmes droits en vertu d'une convention verbale; 5° Les actes d'adjudication reçus par notaire et tenant lieu de titres; 6° Les actes de partage, comprenant des immeubles ou des droits mobiliers; 7° Les baux d'immeubles excédant neuf années, ou contenant quittance d'au moins trois années de loyer. Si le bail n'a pas été transcrit, le preneur peut néanmoins l'opposer à l'acquéreur, mais seulement pour la période de neuf années dans laquelle il se trouve, et à condition que le bail ait date certaine. Article 2180. Seront transcrites: 1° Les donations entre-vifs de biens immeubles; 2° L'institution contractuelle; 3° La substitution permise, sans distinguer si elle est faite par donation entre-vifs ou par testament, ni si elle a pour objet des immeubles ou des objets mobiliers. Article 2181. A défaut de publicité des donations et des substitutions, on applique l'article 2174. Article 2182. Les testaments seront transcrits quand ils contiennent une disposition de propriété immobilière ou d'un démembrement de cette propriété. Tant que la transcription n'a pas eu lieu, le légataire et l'héritier ne peuvent faire aucun acte d'aliénation. Article 2183. Les conservateurs des hypothèques tiendront un registre public des mutations qui s'opèrent ab intestat. A cet effet, les receveurs de l'enregistrement leur enverront, dans les quinze jours, un extrait des déclarations de succession. Les tiers pourront demander des extraits du registre aux successions. SECTION III. De l'inscription. § 1er. — Des biens et des droits réels. Article 2184. Seront inscrits: 1° La convention par laquelle le propriétaire d'un fonds livre au fermier des animaux pour la culture; 2° La convention qui établit une rente perpétuelle, conformément à l'article 1997 du présent Code. L'inscription mentionnera les conditions du rachat, notamment le terme après lequel la rente pourra être remboursée; 3° Les conventions par lesquelles l'État ou les concessionnaires de travaux acquièrent des immeubles pour cause d'utilité publique; 4° Les jugements qui prononcent l'expropriation à ce titre. § II. — Des successions, donations et testaments. Article 2185. Seront inscrits: 1° Les dispositions de biens mobiliers par donation ou par testament; 2° Les jugements qui envoient l'État en possession des biens sans maître, meubles ou immeubles, et notamment les jugements rendus contre les corporations frauduleuses et les établissements illégaux; 3° Les jugements qui déclarent un successible incapable ou indigne de succéder; 4° Les jugements qui déclarent non écrites les conditions contraires aux lois ou aux bonnes mœurs, dans les dispositions entre-vifs ou testamentaires, quand ces dispositions sont d'intérêt général; 5° Les jugements qui décident qu'un successible a fait acte d'héritier, ou qui le condamnent comme héritier pur et simple; et ceux qui le déclarent déchu du bénéfice d'inventaire, pour avoir recélé les biens de la succession, ou pour avoir omis de les comprendre dans l'inventaire; 6° Les jugements qui prononcent la nullité ou l'inexistence d'une donation, d'un testament, ou de l'acceptation d'une succession; 7° Les jugements qui nomment un curateur à une succession vacante. L'inscription fera connaître les pouvoirs du curateur; 8° Les jugements qui prononcent la séparation des patrimoines; 9° Les jugements qui annulent un partage ou qui le déclarent inexistant; 10° Les dispositions de dernière volonté qui nomment un exécuteur testamentaire. L'inscription fera connaître ses pouvoirs. § III. — Des obligations. Article 2186. Seront soumis à l'inscription: 1° Les stipulations faites au profit d'un tiers; 2° Les conventions faites sous une condition suspensive ou résolutoire, ou sous une alternative; 3° Les jugements et conventions intervenus en cas de déconfiture et de faillite; 4° Les demandes tendant à faire déclarer la résolution, la révocation, l'annulation ou l'inexistence d'une convention, et les décisions rendues sur ces demandes. Ces demandes ne seront recevables que si elles ont été inscrites. L'exception doit être suppléée d'office par le juge et elle peut être opposée en tout état de cause. Dans les cas où la révocation rétroagit, elle a effet à l'égard des tiers, alors même que lé jugement n'aurait pas été inscrit; les greffiers seront tenus des dommages-intérêts qui pourront résulter pour les tiers du défaut d'inscription. Dans les cas où la révocation ne rétroagit pas, elle n'a effet à l'égard des tiers que du jour où la demande a été inscrite. En aucun cas, les greffiers ne peuvent délivrer une expédition des jugements avant qu'il leur ait été justifié qu'ils ont été inscrits. Le défaut de publicité n'empêche pas la rétroactivité dans les cas de nullité, de résolution et de révocation rétroactive. § IV. — Des contrats. Article 2187. Seront soumis à l'inscription: 1° Le contrat de mariage. Si le contrat adopte sans modification un régime prévu par le présent Code, l'inscription se bornera à indiquer le régime; si les époux ont apporté des modifications au régime légal, l'inscription les mentionnera; 2° Les transactions mobilières, telles que la vente et le louage, le prêt à intérêt, les rentes perpétuelles et viagères, le cautionnement et le nantissement; 3° Les contrats de sociétés autres que celles qui contiennent un transport de propriété immobilière. L'inscription fera connaître le capital social, les parts des associés, le mode d'administration et les pouvoirs des administrateurs. Les décisions des assemblées générales qui fixent le dividende annuel seront également rendues publiques; 4° Le mandat. L'inscription fera connaître l'étendue des pouvoirs du mandataire, et la répartition de leurs fonctions, s'il y en a plusieurs. SECTION IV. Des formalités relatives à la publicité. Article 2188. Les actes soumis à la transcription doivent être copiés en entier par le conservateur. Il doit également transcrire les pièces accessoires annexées à l'acte, si elles en font partie intégrante; telles sont les procurations. Néanmoins, les parties contractantes peuvent exiger que le conservateur ne transcrive qu'un extrait analytique signé par elles. Si l'extrait est incomplet, les signataires seront responsables du dommage qui en pourra résulter pour les tiers. Article 2189. Les inscriptions seront rédigées par les parties qui requièrent la publicité; si elles ne contiennent pas toutes les mentions qui intéressent les tiers, les requérants seront tenus des dommages-intérêts qui en pourront résulter. Article 2190. Ceux qui requièrent la transcription représenteront au conservateur des hypothèques l'original sous seing privé, ou une copie de l'acte authentique. Article 2191. Les actes reçus à l'étranger sont admis à la publicité en Belgique. Si l'acte est authentique, l'authenticité en devra être vérifiée, conformément à l'article 22 du présent Code. S'il est sous seing privé, les signatures devront être légalisées. CHAPITRE PREMIER. Dispositions générales. Article 2192. Quiconque est obligé personnellement est tenu de remplir ses engagements sur tous ses biens mobiliers ou immobiliers, présents et à venir. Article 2193. Les biens du débiteur sont le gage commun de ses créanciers, et le prix s'en distribue entre eux par contribution, à moins qu'il n'y ait entre les créanciers des causes légitimes de préférence. Article 2194. Les causes légitimes de préférence sont les privilèges et hypothèques. Article 2195. Le droit de rétention n'existe que dans les cas prévus par la loi, et il ne peut être opposé aux tiers qu'en vertu d'un texte formel. CHAPITRE II. Des privilèges. Article 2196. Le privilège est un droit que la loi donne à un créancier, à raison de la qualité de sa créance, d'être préféré aux créanciers chirographaires. Le privilège l'emporte sur l'hypothèque: 1° lorsque le privilège et l'hypothèque sont inscrits le même jour; 2° lorsque l'hypothèque a été constituée postérieurement à la naissance du privilège et avant la transcription de l'acte qui lui donne naissance. Si l'hypothèque était inscrite au moment où le privilège prend naissance, elle l'emportera sur le privilège. Article 2197. Les créanciers privilégiés qui sont dans le même rang sont payés par concurrence. Article 2198. Les privilèges peuvent être sur les meubles ou sur les immeubles. SECTION Ier. Des privilèges sur les meubles et sur les immeubles. Article 2199. Les frais de justice sont privilégiés à l'égard de tous les créanciers dans l'intérêt desquels ils ont été faits, sous les conditions suivantes: 1° Que celui qui a fait les frais ait stipulé ce droit de préférence; 2° Qu'une convention entre les créanciers en ait déterminé le montant; 3° Que cette convention ou un état y annexé décrive les biens meubles ou immeubles grevés du privilège et leur valeur; 4° Que cette convention, homologuée par le tribunal, soit rendue publique dans les formes prescrites par le § 3 ci-après. SECTION II. Des privilèges sur les meubles. Article 2200. Ces privilèges sont généraux ou particuliers sur certains meubles. § Ier. — Des privilèges généraux sur les meubles. Article 2201. Les créances privilégiées sur la généralité des meubles sont celles ci-après exprimées et s'exercent dans l'ordre suivant: 1° Les frais de justice faits dans l'intérêt commun des créanciers, sous les conditions déterminées par l'article 2199; les frais de gestion des déconfitures et des faillites, sous les mêmes conditions; 2° Les frais de dernière maladie pendant un an, à condition que le droit de préférence ait été stipulé par convention, et que les frais aient été taxés par le tribunal; 3° Les salaires des gens de service pour l'année échue et ce qui est dû sur l'année courante; le salaire des commis pour six mois, et celui des ouvriers pour un mois. Le tout sous la condition que la convention tacite intervenue entre les parties soit approuvée par les autres créanciers; 4° Les fournitures de subsistances faites au débiteur et à sa famille.pendant les six mois, à condition que le privilège soit convenu par les parties et que lé montant des fournitures soit arrêté par elles, approuvé par les autres créanciers, et homologué par le tribunal, puis rendu public, conformément au § 3 ci-après. Les époques ci-dessus indiquées sont celles qui précèdent la mort, la déconfiture ou la faillite. § II. — Des privilèges sur certains meubles. Article 2202. Le bailleur a un privilège pour les loyers et fermages sous les conditions suivantes: 1° Le bail stipulera que le preneur donne en gage au bailleur les meubles nécessaires pour l'habitation de la maison; Pacte les décrira et en déterminera la valeur; 2° Les parties peuvent convenir que le privilège s'étendra aux autres obligations du preneur, jusqu'à concurrence d'une somme déterminée; 3° Le privilège ne garantit les loyers que pour deux années échues, s'il s'agit d'une maison, et pour trois années, s'il s'agit d'une ferme. Les loyers et fermages à échoir ne sont pas privilégiés; 4° La convention sera rendue publique comme il est dit dans le § 3. Article 2203. Les parties peuvent aussi stipuler que la créance d'ustensiles servant à l'exploitation sera payée sur le prix de ces ustensiles, et la créance des frais de la récolte de l'année, sur le prix de cette récolte, par préférence aux autres créanciers, même au bailleur, à condition de décrire les objets grevés du privilège, d'évaluer le montant de ces créances et de rendre la convention publique. Article 2204. Le créancier gagiste a un privilège sur le gage, sous les conditions déterminées au titre Du nantissement. Article 2205. L'ouvrier qui, par son travail, conserve une chose, ou l'améliore, peut stipuler qu'il aura le droit de la retenir jusqu'à ce qu'il soit payé de sa créance, et qu'il sera préféré aux autres créanciers sur le prix de la chose conservée ou améliorée par lui, sous les conditions suivantes: 1° que la convention détermine la valeur de la chose au moment où elle lui est livrée; 2° que le privilège soit rendu public par une inscription prise sur un bordereau signé dos deux parties, dans lequel elles fixent le montant de la créance privilégiée. Les parties peuvent étendre ce privilège à la conservation d'un droit, sous les conditions suivantes: 1° Que la convention détermine la nature du travail et le prix auquel le créancier aura droit; 2° Que cette convention soit rendue publique par l'inscription; 3° Que le bordereau signé des deux parties constate que le droit a été conservé et fixe le montant des frais pour lesquels le créancier aura un privilège. Article 2206. Le vendeur peut se réserver le droit de rétention, tant que le prix n'est point payé, ainsi qu'un privilège sur la chose vendue. L'inscription mentionnera que le prix n'a pas été payé. Article 2207. Le privilège des frais de conservation et d'amélioration ainsi que celui du vendeur subsisteront, lorsque les objets mobiliers qui en sont grevés deviennent immeubles par-destination, ou incorporation, à condition que l'immobilisation soit rendue publique par une mention faite en marge de l'inscription du privilège, dans la huitaine du jour où les effets auront été immobilisés. Le privilège sera conservé pendant deux ans. Si, avant l'expiration des deux années, le débiteur tombe en faillite ou en déconfiture, le privilège vaudra jusqu'à la liquidation. Article 2208. Le vendeur a de plus le droit de saisir les objets vendus, entre les mains de l'acheteur, afin d'empêcher celui-ci de les revendre, pourvu que la saisie se fasse dans la huitaine de la livraison. La déchéance du droit de saisir emporte celle de l'action en résolution à l'égard des autres créanciers. Article 2209. Le voyageur et l'aubergiste peuvent convenir que celui-ci aura un privilège sur les effets que le voyageur transporte dans son auberge, pour les fournitures qui lui seront faites. L'inscription fera connaître les effets, ainsi que le montant des fournitures. Article 2210. Le voiturier peut stipuler un privilège pour les frais de voiture et les dépenses accessoires. La convention en déterminera le montant. Article 2211. Quand un fonctionnaire cause un préjudice dans l'exercice de ses fonctions par un délit ou par un quasi-délit, la partie lésée aura un privilège sur les fonds du cautionnement et sur les intérêts échus, en vertu d'une convention tacite, à condition que le montant des dom-mages-intérêts soit déterminé par une convention des parties intéressées, ou, s'il y a lieu, par jugement. Ces actes serviront de base à l'inscription. § III. — De la conservation des privilèges mobiliers. Article 2212. Les privilèges mobiliers, soit généraux, soit spéciaux, ne produisent d'effet que s'ils sont rendus publics par une inscription sur les registres du conservateur des hypothèques. Article 2213. L'inscription fera connaître: la créance privilégiée, le montant du privilège et les objets grevés du privilège. Article 2214. Le créancier mentionnera dans son bordereau les autres faits juridiques concernant le privilège et intéressant les tiers, sinon il ne pourra les leur opposer. Telle serait l'immobilisation des effets mobiliers par incorporation ou par destination. § IV. — Du rang des privilèges mobiliers en cas de concours entre eux. Article 2215. Entre les créanciers privilégiés, la préférence se règle par la loi, en tenant compte de l'intention des parties contractantes. Article 2216. Les frais de justice priment toutes les créances dans l'intérêt desquelles ils ont été faits. Article 2217. Les frais faits pour la conservation de la chose priment les privilèges antérieurs; ils ne priment point les privilèges postérieurs. Article 2218. Le créancier gagiste, l'aubergiste et le voiturier sont préférés au vendeur de l'objet mobilier qui leur sert de gage, à moins qu'ils n'aient su, en le recevant, que le prix en était encore dû. Article 2219. Le privilège du vendeur ne s'exerce qu'après celui du bailleur, à moins que, lors du transport des meubles dans les lieux loués, le vendeur n'ait fait connaître au bailleur que le prix n'en avait pas été payé. Article 2220. Le privilège des gens de service prime les privilèges spéciaux. SECTION III. Des privilèges sur les immeubles. Article 2221. Le vendeur peut stipuler un privilège sur l'immeuble vendu, pour le payement du prix et des charges qui font partie du prix, à condition de les évaluer si elles ne consistent pas en argent. En stipulant le privilège, il renonce au droit de résolution. Le vendeur peut aussi stipuler le droit de résolution sous les conditions qu'il juge convenables; dans ce cas il n'a pas de privilège. La vente doit, en tout cas, être constatée par Un acte sous seing privé ou authentique; le vendeur y déclarera le droit qu'il s'est réservé, si l'acheteur ne paye pas le prix. Article 2222. Les copermutants peuvent stipuler un privilège sur les immeubles réciproquement échangés, pour le payement des soultes ou de la somme fixe déterminée par l'acte à titre de dommages et intérêts en cas d'éviction. Ils peuvent également stipuler la résolution de l'échange. Dans les deux cas, on applique à l'échange ce que l'article 2221 dit de la vente. Article 2223. Le donateur peut stipuler un privilège sur l'immeuble donné, pour la garantie de l'exécution des charges pécuniaires ou des autres prestations liquides imposées au donataire, à condition de les évaluer. Il peut aussi stipuler la résolution de la donation. S'il opte pour le privilège, il renonce au droit de résolution et réciproquement. Article 2224. Les cohéritiers ou copartageants peuvent stipuler un privilège pour le payement des soultes. Ce privilège devra être restreint par l'acte de partage à un ou plusieurs des immeubles compris dans le lot chargé de la soulte, dans les limites de la nécessité. Les colicitants peuvent stipuler un privilège sur le bien licite, pour le payement du prix de la licitation, ou le droit de résolution, dans le cas où un étranger se porterait adjudicataire. On applique dans ce cas l'article 2221. Les copartageants peuvent encore stipuler un privilège pour le cas d'éviction, en fixant la somme à laquelle l'héritier évincé aura droit et en restreignant, le privilège aux immeubles nécessaires pour garantir l'égalité des copartageants. Article 2225. Les architectes, entrepreneurs et ouvriers, employés pour faire des travaux quelconques sur un fonds, peuvent stipuler un privilège pour leur créance, jusqu'à concurrence de la plus-value qui résultera des travaux, à condition que la convention constate la valeur du fonds au moment où ils commencent, et qu'une autre convention, dressée après la réception des travaux, constate la plus-value qui en résulte. S'il y a des créanciers inscrits sur le fonds, ils seront appelés aux deux conventions. SECTION IV. De la conservation des privilèges immobiliers. § Ier. — Des privilèges qui se conservent par la transcription. Article 2226. Les privilèges du vendeur, du copermutant, du donateur et des copartageants, se conservent par la transcription: 1° De l'acte de vente, constatant que la totalité ou partie du prix est due au vendeur; 2° De l'acte d'échange, constatant qu'il est dû aux copermutants des soultes, ou une somme fixe à titre de dommages-intérêts en cas d'éviction; 3° De l'acte de donation, constatant les charges pécuniaires ou autres prestations liquides imposées au donataire; 4° De l'acte de partage ou de l'acte de licitation. La transcription de ces actes conserve aussi le privilège du prêteur légalement subrogé aux droits du vendeur, du copermutant, du donateur et des copartageants. Si les contractants ne requièrent pas la transcription, le subrogé pourra la requérir en son nom. Article 2227. Néanmoins le conservateur des hypothèques est tenu, sous peine de dommages-intérêts envers les tiers, de faire d'office, au moment de la transcription, l'inscription sur son registre: 1° De l'acte de vente constatant que la totalité ou partie du prix reste due au vendeur; 2° De l'acte d'échange constatant qu'il est dû aux copermutants des soultes ou une somme fixe à titre de dommages-intérêts en cas d'éviction; L'inscription d'office comprendra la somme stipulée à titre de dommages-intérêts, en cas d'éviction. 3° De l'acte de donation constatant les charges pécuniaires et autres prestations liquides imposées au donataire; 4° De l'acte de partage contenant des soultes et des stipulations relatives à la garantie en cas d'éviction. Article 2228. Les créanciers privilégiés pourront, par une clause formelle de l'acte, dispenser le conservateur de prendre l'inscription d'office. Dans ce cas, ils seront déchus de l'action résolutoire, mais ils conserveront leur droit de préférence d'après le rang que leur donnera l'inscription qu'ils ont prise. Article 2229. La transcription ne conserve les privilèges que pendant quinze ans. Avant l'expiration de ce délai, les créanciers devront renouveler l'inscription prise d'office par le conservateur, ou prendre, en leur nom, une inscription qui constatera la transcription. A défaut de renouvellement, les créanciers privilégiés seront déchus de l'action résolutoire; ils conserveront leur droit de préférence sur les créanciers chirographaires, selon le rang que leur donnera l'inscription qu'ils pourront prendre après l'expiration du délai légal. Article 2230. La transcription de l'acte qui donne naissance au privilège conserve le privilège, lequel primera les hypothèques consenties postérieurement, par la priorité de son inscription. Si des hypothèques ont été consenties avant la transcription, le créancier privilégié les primera également, en ce sens qu'elles ne peuvent lui être opposées tant qu'il n'y a pas eu transcription, quand même elles auraient été inscrites avant la transcription de l'acte. Article 2231. Lorsque le créancier privilégié est déchu de son privilège ou que le privilège s'éteint, il sera déchu par cela même de son action résolutoire. Article 2232. Le vendeur, l'échangiste et le donateur ne peuvent exercer le droit de résolution que s'ils se le sont réservé; les tiers intéressés ne peuvent pas en arrêter l'exercice en indemnisant le demandeur. Article 2233. Les sommes que le demandeur en résolution pourra être condamné à restituer seront affectées au payement des créances hypothécaires. § II. — Des privilèges qui se conservent par l'inscription. Article 2234. Les architectes, entrepreneurs et ouvriers conservent leur privilège: 1° Par l'inscription faite, avant le commencement des travaux, de la convention qui constate l'état des lieux; 2° Par l'inscription de la seconde convention faite dans la quinzaine de la réception des ouvrages. Si cette double inscription est faite, le privilège aura rang à partir de la première inscription. Après le délai de quinzaine prescrit par le présent article, les Créanciers privilégiés peuvent encore prendre inscription, mais ils n'auront plus rang qu'à partir du jour de cette inscription. Article 2235. Les cessionnaires de créances privilégiées conservent le privilège attaché à la créance, en prenant inscription en leur nom. Si le privilège est déjà inscrit, le conservateur mentionnera la cession en marge de l'inscription. SECTION V. Des droits du trésor public. Article 2236. Le fisc n'a de privilège qu'en vertu d'une convention faite avec le débiteur et rendue publique par une inscription. Article 2237. Un arrêté royal déterminera pour chaque privilège: 1° le mode de spécialisation du privilège, quant aux biens grevés et quant à la créance privilégiée; 2° les clauses de la convention nécessaires pour garantir l'intérêt du fisc, en le conciliant avec l'intérêt des tiers. CHAPITRE III. Dos hypothèques. SECTION Ier. Dispositions générales. Article 2238. L'hypothèque est un droit réel immobilier sur les immeubles affectés à l'acquittement d'une obligation. L'hypothèque donne un droit de préférence sur les créanciers chirographaires et un droit de suite contre les tiers détenteurs de l'immeuble hypothéqué. Elle est, de sa nature, indivisible et subsiste en entier sur tous les immeubles affectés, sur chacun et sur chaque portion de ces immeubles. Article 2239. L'hypothèque n'a lieu que dans les cas et suivant les formes autorisés par la loi. Elle est conventionnelle ou testamentaire. Article 2240. L'hypothèque conventionnelle est celle qui dépend des conventions et de la forme extérieure des actes et des contrats. Article 2241. L'hypothèque testamentaire est celle qui est établie par testament sur un ou plusieurs immeubles spécialement désignés par le testateur, pour garantie des legs par lui faits. Article 2242. Sont seuls susceptibles d'hypothèques: 1° Les biens immobiliers qui sont dans le commerce; 2° Les droits d'usufruit, d'emphytéose et de superficie, établis sur les mêmes biens pendant la durée de ces droits. L'hypothèque acquise s'étend aux accessoires réputés immeubles, et aux améliorations faites à l'immeuble hypothéqué. Article 2243. Le détenteur de l'immeuble ne peut faire aucun acte de propriété, ni d'administration, qui puisse nuire au créancier; il ne peut ni défricher, ni faire des coupes extraordinaires. Le créancier hypothécaire est tenu de respecter les coupes ordinaires, faites de bonne foi, d'après l'usage des lieux, sauf à exercer son droit sur le prix non payé. Le détenteur peut faire des baux de neuf ans; s'ils dépassent cette durée, ils seront réduits conformément à l'article 4758 du présent code. Article 2244. Les meubles n'ont pas. de suite par hypothèque. L'hypothèque des navires et bâtiments de mer est réglée par une loi spéciale. SECTION II. Des hypothèques conventionnelles. Article 2245. Les hypothèques conventionnelles ne peuvent être consenties que par les propriétaires de l'immeuble, qui ont la capacité de l'aliéner. L'hypothèque de la chose d'autrui est nulle. Article 2246. Ceux qui n'ont sur l'immeuble qu'un droit suspendu par une condition, ou résoluble, ou sujet à rescision, ne peuvent consentir qu'une hypothèque soumise aux mêmes conditions ou à la même rescision. Article 2247. Les biens des absents, des mineurs et des interdits ne peuvent être hypothéqués que dans les cas déterminés par le présent code. Article 2248. L'hypothèque conventionnelle ne peut être consentie que par acte authentique. Si le créancier n'est pas présent à l'acte, il devra accepter par acte authentique. Les procurations à l'effet de constituer hypothèque doivent être données dans la même forme. Article 2249. L'hypothèque peut être constituée en pays étranger sur des biens situés en Belgique; mais elle n'aura d'effet en Belgique, que si Pacte est authentique, et que l'authenticité soit constatée par le président du tribunal de la situation des biens. Le président vérifiera si Pacte et la procuration sont authentiques d'après les lois du pays où ils ont été reçus. L'appel de la décision du président sera jugé comme en matière sommaire. Le tout sauf disposition contraire dans les traités. Article 2250. Pour que l'hypothèque conventionnelle ait une existence légale, elle doit être spéciale quant aux biens et quant à la créance. Article 2251. Le titre constitutif de l'hypothèque, ou un acte authentique postérieur, déclarera spécialement la nature et la situation de chacun des immeubles actuellement appartenant au débiteur, sur lesquels l'hypothèque est consentie. Les biens à venir ne peuvent pas être hypothéqués. Article 2252. Si les immeubles affectés à l'hypothèque ont péri ou ont éprouvé des dégradations, de manière qu'ils soient devenus insuffisants pour la sûreté du créancier, celui-ci a le droit de réclamer le remboursement de sa créance. Néanmoins, le débiteur pourra offrir un supplément d'hypothèque, si la perle ou les dégradations ont eu lieu sans sa faute. Article 2253. L'hypothèque peut être constituée pour sûreté d'un crédit ouvert, à concurrence d'une somme déterminée qu'on s'oblige à fournir. Elle prend rang à dater de son inscription, sans égard aux époques successives de la délivrance des fonds, qui pourra être établie par tous moyens légaux. Article 2254. Si la créance garantie par l'hypothèque est conditionnelle, la condition sera mentionnée dans l'inscription. Article 2255. Si la créance est indéterminée, telle qu'une créance de dommages-intérêts, les parties devront l'évaluer. SECTION III. Des hypothèques légales. § Ier. — De l'hypothèque de la femme. Article 2256. La femme peut stipuler une hypothèque par contrat de mariage, en la spécialisant, pour les droits qui naissent de ses conventions matrimoniales. Cette hypothèque aura rang à partir de l'inscription que la femme peut requérir immédiatement. Article 2257. La femme peut aussi se réserver de prendre inscription sur les biens de son mari pour la sûreté des droits qui naîtront pendant le mariage, tels que les obligations qu'elle contractera avec son mari, les donations et legs qui lui seront faits, et les successions qui lui écherront. Article 2258. L'inscription ne pourra être prise que sur un acte de spécialisation consenti par le mari, ou, sur son refus, par le tribunal. Dans ce dernier cas, le mari pourra demander que l'hypothèque inscrite pour les reprises de la femme soit réduite aux sommés qu'elle peut avoir à réclamer, et restreinte aux immeubles suffisants pour les garantir. § II. — De l'hypothèque des mineurs et des interdits. Article 2259. Le mineur ne peut avoir d'hypothèque que dans le cas de tutelle dative. Article 2260. Si le tribunal condamne le tuteur à des dommages-intérêts pour mauvaise gestion, le conseil de famille pourra prendre inscription sur les biens du tuteur, qui sont nécessaires pour garantir la créance du mineur. Article 2261. L'inscription sera prise par le greffier de la justice de paix, en vertu de la délibération du conseil de famille, homologuée sur ses diligences. Article 2262. Ces principes s'appliquent aux interdits et aux aliénés colloqués dans un hospice ou dans une maison de santé. SECTION IV. Du rang des créanciers hypothécaires. Article 2263. Les créanciers hypothécaires ne peuvent exercer leur droit de préférence sur les créanciers chirographaires que si leur hypothèque est inscrite. Article 2264. Entre les créanciers hypothécaires, le rang s'établit par la date de l'inscription. S'il y a plusieurs créanciers inscrits le même jour, le rang se détermine d'après le numéro d'ordre sous lequel la remise des bordereaux aura été mentionnée par le conservateur au registre de dépôts. Article 2265. L'inscription n'est pas requise pour l'existence de l'hypothèque; elle a seulement pour objet de sauvegarder l'intérêt des tiers. Tout tiers peut se prévaloir du défaut d'inscription, sauf celui qui connaissait l'hypothèque au moment où il a traité avec le propriétaire de l'immeuble. CHAPITRE IV. De l'inscription des privilèges et hypothèques. SECTION Ier. Du mode de l'inscription. Article 2266. Les inscriptions se font au bureau de conservation des hypothèques dans l'arrondissement duquel sont situés les biens soumis au privilège ou à l'hypothèque. Article 2267. L'inscription se fait à la requête du créancier, même incapable. Elle doit être prise sur les propriétaires dont les biens sont grevés d'hypothèque, soit débiteurs, soit tiers. Article 2268. Le privilège et l'hypothèque peuvent être inscrits tant qu'ils existent. En cas de mort du débiteur, l'inscription doit être prise sur ses héritiers ou au nom du défunt, dans les trois mois de l'ouverture de la succession, quand même celle-ci aurait été acceptée sous bénéfice d'inventaire. L'inscription ne peut plus être prise après la transcription de l'acte d'aliénation de l'immeuble, ni après la faillite ou la déconfiture du débiteur. Article 2269. Le créancier qui requiert l'inscription doit remettre au conservateur une expédition authentique de l'acte qui donne naissance au privilège ou à l'hypothèque. Le conservateur peut néanmoins, sous sa responsabilité, opérer l'inscription sans que le créancier lui représente cet acte. Article 2270. Le créancier doit encore remettre au conservateur deux bordereaux sur papier libre, contenant les mentions suivantes: 1° Les noms, prénoms, qualités ou désignations précises du créancier et du débiteur, leur domicile réel et le domicile qui sera élu par le créancier dans l'arrondissement; 2° L'indication spéciale de l'acte qui confère le privilège ou l'hypothèque, et la date de cet acte; 3° Le montant du capital et des accessoires des créances pour lesquelles l'inscription est requise, et le terme assigné à leur payement; 4° L'indication spéciale de la nature et de la situation de chacun des immeubles grevés d'hypothèque ou de privilège. Article 2271. Le conservateur fait mention, sur son registre, du contenu des bordereaux; il remet aux requérants l'expédition du titre et l'un des bordereaux, au pied duquel il certifie avoir fait l'inscription dont il indique la date, le volume et le numéro d'ordre. Article 2272. Un arrêté royal pris en exécution de la présente loi déterminera les mentions que doivent contenir les inscriptions prises pour les actes autres que les privilèges et hypothèques, et, partant, les bordereaux sur lesquels les inscriptions seront prises. Article 2273. Le créancier qui prend inscription est tenu de faire élection de domicile dans l'arrondissement du bureau; à défaut de quoi, toutes significations relatives à l'inscription pourront être faites au procureur du roi. Néanmoins, le créancier peut élire un autre domicile dans le même arrondissement par une déclaration qu'il remet au conservateur. Article 2274. Le créancier privilégié ou hypothécaire, inscrit pour un capital produisant intérêts ou arrérages, sera colloqué au même rang que pour son capital, pour trois années; pour les autres années, il aura rang à partir de l'inscription particulière qu'il prendra. Article 2275. L'omission d'une formalité prescrite pour les inscriptions par le présent code, ou par l'arrêté royal pris pour son exécution, n'entraînera pas la nullité de l'inscription, à moins qu'il n'en soit résulté un préjudice pour les tiers. SECTION II. Du renouvellement des inscriptions et de la péremption. Article 2276. Les inscriptions conservent les effets de l'hypothèque et du privilège pendant quinze années à compter de leur date. Si elles n'ont pas été renouvelées avant l'expiration de ce délai, elles seront périmées; les créanciers ne pourront plus exercer le droit de préférence, ni le droit de suite, et ils seront déchus, s'il y a lieu, de l'action résolutoire. Article 2277. Si les créanciers renouvellent l'inscription avant l'expiration des quinze ans, ils conserveront tous leurs droits, à condition que l'inscription nouvelle contienne l'indication précise de l'inscription renouvelée; sinon elle ne vaudra que comme inscription première. Article 2278. Même après l'expiration des quinze ans, les créanciers pourront prendre une inscription qui vaudra comme première inscription, à moins que l'immeuble hypothéqué n'ait été aliéné et que l'acte d'aliénation ne soit transcrit. Article 2279. Le tuteur et le subrogé tuteur veilleront à ce que l'inscription prise au profit d'un mineur, d'un interdit ou d'une personne placée dans un établissement d'aliénés, soit renouvelée; ils seront solidairement responsables du défaut de renouvellement. Article 2280. Le conservateur mentionnera en marge des inscriptions non renouvelées qu'elles sont périmées. Article 2281. Les frais des inscriptions et de leur renouvellement sont à la charge du débiteur, sauf stipulation contraire; l'avance en est faite par celui qui requiert l'inscription. Les frais de la transcription sont à la charge de l'acquéreur. SECTION III. De la radiation et de la réduction des inscriptions. Article 2282. Les inscriptions sont rayées du consentement des parties intéressées. Si un cessionnaire ou un mandataire consent à la radiation, le conservateur peut exiger qu'il justifie de sa qualité par acte authentique. Article 2283. Quand la radiation se fait après l'extinction de la dette, aucune capacité n'est requise de la part de celui qui la consent. S'il consent à radier l'inscription avant que la dette soit éteinte, il doit être capable de faire la renonciation en vertu de laquelle l'inscription est radiée. Article 2284. La radiation doit être ordonnée par les tribunaux, lorsque l'inscription a été faite sans être fondée sur un titre, ou lorsqu'elle l'a été en vertu d'un litre, soit irrégulier, soit éteint ou soldé, ou lorsque les droits de privilège ou d'hypothèque sont effacés par les voies légales. Article 2285. La radiation peut être demandée par toute partie intéressée, tels que le débiteur, le tiers acquéreur, les créanciers postérieurs. Article 2286. L'action principale est formée contre le créancier devant le tribunal de la situation des biens. Si l'action est incidente, le juge de la demande principale sera compétent pour statuer sur la radiation. Article 2287. L'inscription ne peut être rayée qu'en vertu d'un jugement en dernier ressort ou passé en force de chose jugée. Si le jugement est par défaut ou susceptible d'appel, la radiation ne pourra se faire qu'après l'expiration des délais de l'opposition ou de l'appel. Article 2288. La réduction de l'inscription est une radiation partielle qui se fait soit sur les immeubles grevés d'hypothèque, soit sur la créance hypothécaire. Les principes qui régissent la radiation s'appliquent à la réduction. Article 2289. Ceux qui requièrent la radiation ou la réduction déposeront, au bureau du conservateur, soit l'expédition de l'acte authentique ou-Pacte en brevet, portant consentement, soit l'expédition du jugement. Un extrait littéral de Pacte authentique suffit lorsque le notaire y déclare que Pacte ne contient ni conditions, ni réserves. Les actes de consentement à radiation ou réduction, passés en pays étranger, doivent être visés par le président du tribunal de la situation des biens, qui en vérifiera l'authenticité, ainsi qu'il est dit en l'article 2249. Article 2290. Les actions en radiation ou en réduction sont dispensées du préliminaire de conciliation; elles seront portées devant le tribunal dans le ressort duquel l'inscription a été prise. Cependant les parties intéressées peuvent convenir qu'en cas de contestation la demande sera portée devant le tribunal qu'elles désigneront. Article 2291. Les actions auxquelles les inscriptions peuvent donner lieu contre les créanciers seront intentées par exploits faits à leur personne, ou au dernier des domiciles élus sur le registre; et ce nonobstant le décès, soit des créanciers, soit de ceux chez lesquels ils auront fait élection de domicile. CHAPITRE V. De l'effet des privilèges et des hypothèques contre les tiers détenteurs. Article 2292. Les créanciers, ayant privilège ou hypothèque inscrits sur un immeuble, le suivent dans quelques mains qu'il passe, pour l'exproprier et être payés suivant l'ordre de leurs inscriptions. Article 2293. Le tiers détenteur est soumis à l'expropriation, comme détenteur d'un immeuble que les créanciers privilégiés et hypothécaires ont le droit de faire vendre. Article 2294. Le tiers détenteur peut empêcher l'expropriation, en payant les dettes hypothécaires qui grèvent l'immeuble, ou en délaissant l'immeuble. Article 2295. Les créanciers ne peuvent exproprier l'immeuble que trente jours après commandement fait au débiteur personnel et sommation faite au tiers détenteur de payer ou de délaisser. Article 2296. Le tiers détenteur est tenu de payer les dettes intégralement, les capitaux et les intérêts conservés par les inscriptions. Il jouit des termes et délais accordés au débiteur personnel. Article 2297. Le délaissement est l'abandon de la détention de l'immeuble, par le tiers détenteur, pour s'exempter de l'expropriation. Il se fait au greffe du tribunal de la situation des biens, qui en donne acte au tiers détenteur. Sur la demande du plus diligent des intéressés, il est nommé à l'immeuble délaissé un curateur sur lequel l'expropriation se poursuit. Article 2298. Le délaissement peut être fait par tous les tiers détenteurs qui ne sont pas personnellement obligés à la dette. Article 2299. Les héritiers du débiteur peuvent délaisser quand ils ont payé la part de la dette dont ils sont tenus personnellement. Le tiers détenteur peut délaisser quoiqu'il ait reconnu l'obligation en celle qualité seulement, ou qu'il ail été condamné comme tel. Article 2300. Le détenteur qui a fait le délaissement peut néanmoins reprendre l'immeuble en payant toute la dette et les frais. Si l'immeuble délaissé périt, il périt pour le détenteur. S'il est vendu, le reliquat après le payement des dettes appartient au détenteur. Article 2301. Le tiers détenteur, propriétaire d'un immeuble démembré, ne peut rien faire qui diminue la garantie hypothécaire. S'il détériore l'immeuble, il sera tenu d'indemniser le créancier. Article 2302. S'il fait des travaux sur le fonds, il peut réclamer la plus-value au créancier. Quand les travaux sont nécessaires, il a droit à toute la dépense. Article 2303. Le tiers détenteur doit les fruits aux créanciers qui le poursuivent, à compter du jour où ils l'ont sommé de payer ou de délaisser. Si les poursuites ont été interrompues pendant trois ans, les fruits seront dus aux créanciers, à partir de la nouvelle sommation qu'ils feront. Article 2304. Les droits réels que le tiers détenteur avait sur l'immeuble dont il a fait l'acquisition s'éteignent par confusion; le détenteur en reprendra l'exercice après l'adjudication prononcée sur lui. Les hypothèques consenties par le tiers détenteur subsistent après l'expropriation. Article 2305. Le tiers détenteur qui délaisse ou qui paye, ou qui est exproprié, alors même qu'il se porterait adjudicataire, est subrogé aux droits du créancier contre le débiteur personnel. Il a de plus l'action en garantie, d'après le droit commun. Article 2306. Le tiers détenteur a encore le droit de purger la propriété des privilèges, des hypothèques, et du droit de résolution qui appartient aux créanciers, en observant les formalités prescrites par le chapitre VIII ci-après. CHAPITRE VI. De la transmission des privilèges et hypothèques. Article 2307. Les privilèges et hypothèques se transmettent avec la créance, en vertu de la subrogation et de la cession; ils ne peuvent pas se transmettre sans la créance à laquelle ils sont attachés. Article 2308. La femme peut renoncer au bénéfice de l'inscription qu'elle a prise sur les biens du mari, soit directement au profit du mari, soit indirectement dans l'intérêt des tiers qui traitent avec lui, comme acquéreurs ou créanciers. Cette renonciation n'a d'effet qu'au profit de celui dans l'intérêt duquel elle est faite; l'inscription subsiste à l'égard des autres parties intéressées. Article 2309. La renonciation peut être expresse ou tacite. Pour qu'il y ail renonciation tacite, il faut que le fait dont on l'induit ne puisse pas recevoir une autre interprétation que celle de la volonté de la femme de renoncer à son inscription. CHAPITRE VII. De l'extinction des privilèges et hypothèques. Article 2310. Les privilèges et hypothèques s'éteignent: 1° Par l'extinction de l'obligation principale; 2° Par la renonciation du créancier; pour renoncer, le créancier doit avoir la capacité d'aliéner; 3° Par la purge; 4° Par la prescription; Tant que les biens sont dans les mains du débiteur, le privilège et l'hypothèque s'éteignent par la prescription du droit principal. Quand le débiteur aliène l'immeuble hypothéqué, il y a lieu à deux prescriptions: celle du droit principal dont l'extinction entraîne celle du privilège ou de l'hypothèque, et celle de l'action contre le tiers détenteur, qui s'opère par vingt ans. Les inscriptions prises par le créancier n'interrompent pas le cours de la prescription; mais le tiers détenteur peut être contraint de fournir à ses frais un titre récognitif de l'hypothèque, à dater de la transcription de son acte d'acquisition. Dix-huit ans après la date de ce titre, il est tenu de le renouveler, s'il possède encore l'immeuble hypothéqué. Cette reconnaissance interrompt la prescription; 5° Par la perte de la chose grevée du privilège ou de l'hypothèque. CHAPITRE VIII. De la purge. Article 2311. La purge est un moyen d'effacer les privilèges et les hypothèques, ainsi que l'action résolutoire qui appartient au vendeur, au copermutant et au donateur. Article 2312. Si les créanciers hypothécaires ne poursuivent pas le tiers détenteur, il peut user de la faculté de purger, dès que son titre est transcrit, mais il doit le faire dans l'année de la transcription. Article 2313. Si les créanciers poursuivent le tiers détenteur, il est tenu, dans les trente jours de la sommation qui lui est faite, de faire aux créanciers inscrits la notification préalable à la purge. Article 2314. Si le tiers détenteur n'use pas de son droit dans les délais fixés par la loi, la faculté de purger est éteinte. Article 2315. Tout acquéreur peut purger, s'il n'est pas débiteur personnel. Article 2316. Il doit notifier aux créanciers, aux domiciles par eux élus dans les inscriptions: 1° Un extrait de son litre, contenant la désignation des parties, l'indication précise des immeubles, le prix et les charges faisant partie du prix de la vente, l'évaluation de ces charges, et celle du prix même, s'il consiste en une rente viagère, ou en toute obligation autre, que celle de payer un capital fixe, enfin l'évaluation de la chose, si elle a été donnée ou cédée à tout autre titre qu'à celui de vente; 2° L'indication de la date, du volume et du numéro de la transcription; 3° Un tableau sur trois colonnes, dont la première contiendra la date des hypothèques et celle des inscriptions, ainsi que l'indication du volume et du numéro de ces inscriptions; la seconde, le nom des créanciers, et la troisième, le montant des créances inscrites. Article 2317. Cette notification ne doit être faite qu'aux créanciers inscrits avant la transcription de l'acte d'acquisition. Toute inscription prise sur les précédents propriétaires, postérieurement à celte transcription, est inopérante. Article 2318. Le nouveau propriétaire déclarera, par le même acte, qu'il acquittera les dettes et charges hypothécaires jusqu'à concurrence du prix ou de la valeur déclarée, sans déduction aucune au profit du vendeur ou de tout autre. Sauf disposition contraire dans les titres de créances, il jouira des termes et délais accordés au débiteur originaire et il observera ceux stipulés contre ce dernier. Les créances non échues qui ne viennent que pour partie en ordre utile seront immédiatement exigibles, à l'égard du nouveau propriétaire, jusqu'à celle concurrence, et pour le tout à l'égard du débiteur. Article 2319. Si parmi les créanciers privilégiés il s'en trouve qui, lors de la constitution du privilège, ont opté pour la résolution, le propriétaire qui purge les sommera d'exercer l'action résolutoire dans les dix jours. Pendant l'instance en résolution, la procédure de purge sera suspendue. Si la résolution est rejetée, le jugement constatera que le privilège est éteint. Par suite, les droits du nouveau propriétaire seront inattaquables. Si la résolution est prononcée, la procédure de purge tombe. Article 2320. Lorsque le nouveau propriétaire a fait la notification prescrite par l'article 2316 dans le délai fixé, tout créancier inscrit peut requérir la mise de l'immeuble aux enchères, à la charge: 1° Que cette réquisition sera signifiée par huissier au nouveau propriétaire, dans les quarante jours au plus de la notification faite par ce dernier, en y ajoutant un jour par cinq myriamètres de distance entre le domicile élu et le domicile réel du créancier le plus éloigné du tribunal qui doit connaître de l'ordre; 2° Qu'elle contiendra soumission du requérant, ou d'une personne présentée par lui, de porter le prix à un vingtième en sus de celui stipulé dans le contrat, ou déclaré par le nouveau propriétaire. Cette enchère portera sur le prix principal et les charges, sans aucune réduction préjudiciable aux créanciers inscrits. Elle ne devra point porter sur les frais du premier contrat; 3° Que la même signification sera faite, dans le même délai, au précédent propriétaire et au débiteur personnel; 4° Que l'original et les copies de ces exploits seront signés par le créancier requérant, ou son fondé de procuration expresse, lequel, en ce cas, est tenu de donner copie de sa procuration. Ils devront aussi être signés, le cas échéant, parle tiers enchérisseur; 5° Que le requérant offrira de donner caution personnelle ou hypothécaire, jusqu'à concurrence de 25 p. c. du prix et des charges; ou, qu'ayant consigné une somme équivalente, il notifiera copie du certificat de consignation. Le tout à peine de nullité. Article 2321. La surenchère devient commune à tous les créanciers; elle leur profite, et elle leur nuit, si elle est nulle. Le créancier enchérisseur ne peut pas se désister de sa réquisition, quand même il payerait le montant de la soumission. Pour que le désistement soit valable à l'égard des autres créanciers, il faut qu'ils l'acceptent. Le créancier qui se désiste peut sommer les autres créanciers de poursuivre l'adjudication dans la quinzaine; s'ils ne la poursuivent pas, leur inaction vaudra acceptation, mais l'import de la soumission leur restera acquis. Article 2322. La surenchère et la distribution du prix entre les créanciers ont lieu suivant les formes établies par le Code de procédure civile. Article 2323. Si les créanciers ne requièrent pas la mise aux enchères dans les formes et le délai prescrits, la valeur de l'immeuble demeure définitivement fixée au prix stipulé dans le contrat, ou déclaré par le nouveau propriétaire. Les inscriptions qui ne viennent pas en ordre utile sur le prix seront rayées pour la partie qui l'excédera, par suite de l'ordre amiable ou judiciaire qui sera dressé conformément aux lois de procédure. Le nouveau propriétaire se libérera des privilèges et hypothèques, soit en payant aux créanciers en ordre utile l'import des créances exigibles ou de celles qu'il lui est facultatif d'acquitter, soit en consignant le prix jusqu'à concurrence de ces créances. Il reste soumis aux privilèges et hypothèques venant en ordre utile, à raison des créances non exigibles dont il ne voudrait ou ne pourrait se libérer. Article 2324. Dans le cas où le titre du nouveau propriétaire comprendrait des immeubles et des meubles, ou plusieurs immeubles, les uns hypothéqués, les autres libres, ou hypothéqués à une autre dette qu'à celle du créancier; ou si les immeubles hypothéqués sont situés dans des arrondissements différents, quoique soumis à la même exploitation, le prix de chaque immeuble frappé d'inscriptions particulières et séparées sera déclaré dans la notification du nouveau propriétaire, par ventilation, s'il y a lieu, du prix total exprimé dans le titre. Le créancier surenchérisseur ne pourra, en aucun cas, être contraint d'étendre sa soumission ni sur le mobilier, ni sur d'autres immeubles que ceux qui sont hypothéqués à sa créance et situés dans le même arrondissement; sauf le recours du nouveau propriétaire contre ses auteurs, pour l'indemnité du dommage qu'il éprouverait, soit de la division des objets de son acquisition, soit de celle de son exploitation. Article 2325. L'adjudicataire est tenu, au delà du prix de son adjudication, de restituer à l'acquéreur ou au donataire dépossédé les frais de son contrat, ceux de la transcription, les frais de notification et ceux faits pour parvenir à la revente. Article 2326. L'acquéreur ou le donataire qui conserve l'immeuble mis aux enchères, en se rendant dernier enchérisseur, n'est pas tenu de faire transcrire l'acte d'adjudication. Article 2327. L'acquéreur qui se sera rendu adjudicataire aura son recours, tel que de droit, contre le vendeur, pour le remboursement de ce qui excède le prix stipulé par son titre, et pour l'intérêt de cet excédent, à compter du jour de chaque payement. Article 2328. Si un tiers se rend adjudicataire, il doit transcrire le titre par lequel il devient propriétaire. L'acquéreur dépossédé par suite du droit hypothécaire des créanciers qui ont requis la mise aux enchères aura son recours conformément à l'article 2305. CHAPITRE IX. De la publicité des registres et de la responsabilité des conservateurs. SECTION Ier. Des obligations du conservateur. Article 2329. Le conservateur est chargé de transcrire sur un registre à ce destiné les actes dont la loi ordonne la publicité par la voie de la transcription. Article 2330. Il inscrit les privilèges et hypothèques établis sur les biens situés dans l'arrondissement où il exerce ses fonctions, ainsi que les autres faits juridiques, dont la loi ordonne la publicité. Un arrêté royal déterminera les bureaux où les divers actes devront être inscrits. Article 2331. Les formalités de la publicité sont remplies par le conservateur sur la réquisition des parties intéressées, sauf dans les cas où les lois ou arrêtés lui commandent d'agir d'office. Article 2332. Le conservateur est tenu, sur la demande des tiers, de leur délivrer des certificats constatant les faits juridiques dont la loi ordonne la publicité, ou des copies des transcriptions et inscriptions faites sur les registres. Il peut exiger que les tiers lui fassent leurs réquisitions par écrit. Article 2333. Les conservateurs devront tenir: 1° Un registre de dépôts, où seront constatées par numéros d'ordre, et à mesure qu'elles s'effectueront, les remises des titres dont on requiert la transcription ou l'inscription; 2° Des registres où seront portées les transcriptions; 3° Des registres où seront portées les inscriptions des privilèges et hypothèques, et les radiations ou réductions; 4° Des registres où seront portées les autres inscriptions prescrites par la loi; 5° Un registre sur papier libre, où ils porteront par extrait, au fur et à mesure de la remise des actes, sous les noms de chaque propriétaire grevé, et à la case qui lui est destinée, les inscriptions, radiations et autres actes qui le concernent. Ils indiqueront aussi les registres où chacun des actes est porté, et le numéro sous lequel il est consigné. Article 2334. Les conservateurs donneront au requérant, s'il le demande, une reconnaissance de la remise des actes ou bordereaux destinés à être transcrits ou inscrits. Cette reconnaissance indiquera le numéro du registre sous lequel la remise a été inscrite. Ils ne pourront opérer les transcriptions et inscriptions sur les registres à ce destinés qu'à la date et dans l'ordre des remises qui leur en ont été faites. Article 2335. Si plusieurs litres, soumis à la publicité, ont été présentés le même jour à la conservation des hypothèques, la préférence se détermine d'après le numéro d'ordre sous lequel la remise des litres aura été mentionnée au registre des dépôts. Article 2336. Les registres des conservateurs sont cotés et parafés à chaque feuillet, par premier et dernier, par l'un des juges du tribunal dans le ressort duquel le bureau est établi. Le registre de dépôts sera arrêté chaque jour comme ceux d'enregistrement des actes. Article 2337. Les mentions de dépôts, les inscriptions et les transcriptions sont faites sur les registres de suite, sans aucun blanc ni interligne, à peine contre le conservateur de dommages-intérêts des parties. SECTION II. De la responsabilité du conservateur. Article 2338. Les conservateurs sont responsables du préjudice qu'ils causent aux particuliers, en ne remplissant pas leurs fonctions ou en les remplissant mal. Article 2339. Celui qui réclame des dommages-intérêts contre eux doit prouver qu'ils ont commis une faute qui leur est imputable et que cette faute leur a causé un préjudice. Article 2340. Les conservateurs sont notamment responsables du préjudice résultant: De l'omission, sur leurs registres, des transcriptions d'actes soumis à celle formalité, et des inscriptions requises en leurs bureaux, ainsi que de la nullité de la transcription ou de l'inscription, si elle leur est imputable; Du défaut de mention, dans leurs certificats, d'une ou de plusieurs des transcriptions ou inscriptions existantes, à moins que l'erreur ne provienne de désignations insuffisantes qui ne peuvent leur être imputées. Article 2341. En cas de purge, si le conservateur omet dans des certificats une ou plusieurs des hypothèques inscrites, l'immeuble en sera affranchi dans les mains du nouveau propriétaire. Le créancier dont le droit a été omis a une action en dommages-intérêts contre le conservateur, si celui-ci est en faute, c'est-à-dire si la demande du certificat indique clairement le débiteur à charge duquel les inscriptions ont été prises. Toutefois le créancier omis peut requérir la mise aux enchères, dans le délai utile, et se faire colloquer dans l'ordre, tant que le prix n'a pas été payé ou tant que l'ordre ouvert n'est pas devenu définitif; dans ce cas, il n'a pas d'action contre le conservateur. Article 2342. Dans les cas mêmes où il y a faute et préjudice, la responsabilité du conservateur est limitée au dommage qui est résulté de sa faute. Article 2343. En aucun cas, les conservateurs ne peuvent refuser, ni retarder les transcriptions ou inscriptions, ni la délivrance des certificats, sous peine de dommages-intérêts des parties; à l'effet de quoi procès-verbaux des refus ou retards seront, à la diligence dés requérants, dressés soit par un juge de paix, soit par un huissier ou un notaire. Article 2344. Le conservateur n'a pas le droit de corriger les écritures portées sur les registres; mais il peut opérer, à ses frais, la rectification des erreurs qu'il aurait commises, en portant sur ses registres, à la date courante, une transcription des actes et bordereaux précédée d'une note qui relatera l'acte irrégulier; il est, dans ce cas, affranchi pour l'avenir de la responsabilité qu'il a encourue, mais il en reste tenu pour le passé. Article 2345. La responsabilité des conservateurs est soumise à la prescription ordinaire tant qu'ils sont en fonctions; elle finit dix ans après leur cessation, quand le cautionnement est éteint. TITRE XVII. De la prescription. CHAPITRE PREMIER. Dispositions générales. Article 2346. La prescription est un moyen d'acquérir ou de se libérer par un certain laps de temps, et sous les conditions déterminées par la loi. Article 2347. Toutes personnes, y compris les personnes dites civiles, peuvent prescrire et on peut prescrire contre elles. Article 2348. Quelle que soit la durée de la prescription, on applique les règles établies par le présent litre. CHAPITRE II. Du cours de la prescription. SECTION Ire. Du point de départ de la prescription. Article 2349. La prescription acquisitive court du moment que celui qui l'invoque a commencé à posséder. Article 2350. La prescription extinctive commence dès que l'action est née. Si l'action est personnelle, la prescription commence avec la naissance de l'obligation. Article 2351. Il y a exception quand l'obligation est conditionnelle ou à terme. Dans ce cas, la prescription ne court pas jusqu'à ce que la condition ou le terme soit arrivé. La prescription de l'action en garantie notamment ne court point jusqu'à ce que l'éviction ait lieu. Article 2352. L'exception de l'article 2351 n'est pas applicable aux droits réels. La prescription court dans ce cas dès qu'un tiers possède la chose sur laquelle le droit est réclamé, quand même le droit serait affecté d'une condition ou d'un terme. Ainsi la prescription court au profit du tiers détenteur d'un immeuble hypothéqué, quand même le droit du créancier hypothécaire serait conditionnel ou à terme, sauf au créancier à interrompre la prescription, en demandant un titre récognitif. SECTION II. Des causes qui suspendent la prescription. Article 2353. La prescription court contre toutes personnes, à moins qu'elles ne soient dans quelque exception établie par la loi. Article 2354. La prescription ne court point entre époux. Article 2355. Elle est suspendue, pendant le mariage, en faveur de la femme mariée sous le régime dotal, en cas d'aliénation du fonds dotal. Si la prescription avait commencé avant le mariage, elle continuera à courir; elle commence à courir après la dissolution du mariage ou après la séparation des biens. Article 2356. La prescription est encore suspendue pendant le mariage, dans tous les cas où l'action de la femme réfléchirait contre le mari; tel est celui où le mari, ayant vendu le bien propre de la femme sans son consentement, est garant de la vente. SECTION III. Des causes qui interrompent la prescription. Article 2357. La prescription peut être interrompue ou naturellement ou civilement. Article 2358. Il y a interruption naturelle, lorsque, le possesseur est privé, pendant plus d'un an, de la jouissance de la chose, soit par l'ancien propriétaire, soit même par un tiers. La prescription est interrompue, quoique le possesseur ail été dépossédé par violence, s'il reste plus d'un an sans agir contre celui qui l'a dépossédé violemment. Article 2359. L'interruption civile résulte d'actes judiciaires ou de la reconnaissance de celui qui prescrit. Article 2360. Une citation en justice, ou une citation en conciliation, suivie d'une assignation donnée dans les délais de droit à celui qu'on veut empêcher de prescrire, interrompent la prescription, lors même que la citation aurait été donnée devant un tribunal incompétent. Il en est de même d'un commandement ou d'une saisie. Article 2361. L'interruption est regardée comme non avenue: si l'assignation est nulle pour défaut de forme, si le demandeur se désiste de sa demande, s'il laisse périmer l'instance, ou si la demande est rejetée. Article 2362. La prescription est interrompue par la reconnaissance que le débiteur ou le possesseur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait. Article 2363. Tous ceux qui y ont intérêt peuvent se prévaloir de l'interruption naturelle. Article 2364. L'interruption civile n'a d'effet qu'entre ceux qui figurent dans le fait juridique d'où elle procède; elle ne s'étend pas d'une personne à l'autre. Article 2365. Néanmoins, l'interruption de la prescription à l'égard de l'un des débiteurs solidaires a effet à l'égard de tous, même contre leurs héritiers. L'interruption à l'égard de l'un des héritiers d'un débiteur.solidaire n'a aucun effet contre les autres héritiers; elle n'a effet, à l'égard des autres codébiteurs, que pour la part de cet héritier dans la dette. Pour interrompre la prescription de toute la dette à l'égard des codébiteurs, le créancier doit agir contre tous les héritiers du débiteur décédé. CHAPITRE III. Des effets de la prescription et de la renonciation. Article 2366. La prescription n'opère pas de plein droit; elle doit être opposée par celui qui a le droit de l'invoquer. Le juge ne peut pas la suppléer d'office. Article 2367. La prescription peut être opposée en tout état de cause, même devant la cour d'appel, à moins que le fait de n'avoir pas opposé ce moyen ne doive être considéré, d'après les circonstances, comme une renonciation tacite. Article 2368. On ne peut d'avance renoncer à la prescription: on peut renoncer à la prescription acquise. Article 2369. La renonciation est expresse ou tacite: la renonciation tacite résulte d'un fait qui suppose nécessairement l'abandon du droit acquis, c'est-à-dire que le fait doit être de telle nature que l'on ne puisse pas lui donner une autre interprétation que la volonté de renoncer à la prescription. Article 2370. Celui qui ne peut aliéner ne peut renoncer à la prescription acquise. Article 2371. La renonciation n'a d'effet que contre celui de qui elle émane. Les créanciers ou les tiers, ayant intérêt à ce que la prescription soit acquise, peuvent l'opposer, quoique le débiteur ou le propriétaire y renonce. CHAPITRE IV. Des conditions requises pour la prescription. SECTION Ier. Des conditions générales. Article 2372. On ne peut acquérir ni perdre par la prescription le domaine des choses ou des droits qui ne sont pas dans le commerce. Article 2373. Sont imprescriptibles les biens qui appartiennent au domaine public de l'État, des provinces ou des communes. Ces biens deviennent prescriptibles du moment où ils cessent de faire partie du domaine public. Article 2374. Sont encore imprescriptibles les facultés qui sont l'exercice de la liberté naturelle appartenant à tout homme. SECTION II. De la possession. Article 2375. La possession est la détention ou la jouissance d'une chose ou d'un droit que nous tenons ou que nous exerçons par nous-mêmes, ou par un autre qui la tient ou qui l'exerce en notre nom. Article 2376. La possession ne peut servir de base à la prescription que si elle avertit le propriétaire qu'un tiers possède son héritage comme en étant le maître ou comme prétendant le devenir. Article 2377. La possession doit être continue; c'est-à-dire que le possesseur doit faire les actes réguliers de jouissance qu'un bon père de famille pose. Article 2378. La possession doit être non interrompue. Elle est interrompue, par l'interruption naturelle ou civile de la prescription. La possession qui a couru jusqu'au moment où la prescription est interrompue est considérée comme non avenue. La possession doit être paisible, c'est-à-dire non troublée, sans que le trouble constitue une interruption de la prescription. Article 2379. Les actes de violence ne peuvent fonder une possession capable d'opérer la prescription. La possession utile ne commence que lorsque la violence a cessé. Article 2380. La possession doit être publique, c'est-à-dire exercée au vu et su de tous ceux qui l'ont voulu voir et savoir, et non équivoque. Elle est équivoque quand elle est douteuse, c'est-à-dire quand on ne sait point si elle est la manifestation d'un droit, ou un pur fait. Article 2381. La possession doit être à titre de propriétaire, c'est-à-dire que par ses actes de jouissance le possesseur manifeste clairement la volonté d'être propriétaire. Article 2382. Les actes de pure faculté et ceux de simple tolérance ne peuvent fonder ni possession ni prescription. Article 2383. Les possesseurs précaires, c'est-à-dire ceux qui possèdent pouf autrui, tels que le fermier, l'usufruitier, le dépositaire, ne prescrivent jamais, par quelque laps de temps que ce soit. Leurs héritiers ne peuvent non plus prescrire; mais leurs successeurs à titre particulier peuvent prescrire. Les possesseurs précaires peuvent néanmoins prescrire, si le titre de leur possession est interverti, soit par une cause venant d'un tiers, soit par la contradiction qu'ils ont opposée au droit du propriétaire. Article 2384. On ne peut point par sa seule volonté changer la cause et le principe de sa possession; en ce sens, nul ne peut prescrire contre son titre. Mais on peut prescrire contre son titre, en ce sens que le débiteur prescrit la libération de l'obligation qu'il a contractée. Article 2385. Celui qui allègue la possession est tenu de la prouver, avec les caractères requis pour servir de base à la prescription. La preuve se fait d'après le droit commun, sauf l'application des présomptions ci-après établies. Article 2386. On est toujours présumé posséder pour soi, et à titre de propriétaire, s'il n'est prouvé qu'on a commencé à posséder pour un autre. Article 2387. Quand on a commencé à posséder pour autrui, on est toujours présumé posséder au même titre, s'il n'y a preuve du contraire. Article 2388. Le possesseur actuel qui prouve avoir possédé anciennement est présumé avoir possédé dans le temps intermédiaire, sauf la preuve contraire. SECTION III. Du temps. § Ier. — Dispositions générales. Article 2389. La prescription se compte par jours et non par heures. On ne prend pas en considération les fractions de jour, ni au début, ni à la fin de la prescription. Article 2390. Les mois se comptent date par date, sans considérer leur durée inégale. Les années, même bissextiles, sont comptées pour 365 jours. Article 2391. Pour compléter la prescription, on peut joindre à sa possession celle de son auteur, de quelque manière qu'on lui ait succédé, soit à titre universel ou particulier, soit à titre gratuit ou onéreux. Toutefois, le successeur à titre universel continue la possession de son auteur, bonne ou vicieuse, tandis que le successeur à titre particulier commence une possession nouvelle, indépendante de celle de son auteur, bonne ou vicieuse par elle-même. Article 2392. Si la possession du défunt était utile, celle de son successeur universel le sera également; si elle était vicieuse, l'héritier ne pourra pas prescrire. Le successeur particulier, au contraire, ne pourra joindre sa possession à celle de son auteur que si celle-ci était utile; si elle était vicieuse, le successeur particulier pourra commencer une nouvelle possession. § II. — De la prescription de vingt ans. Article 2393. Toutes les actions personnelles se prescrivent par vingt ans. Les droits réels s'éteignent également par vingt ans; néanmoins, le droit de propriété ne s'éteint que si un tiers a possédé l'héritage de bonne foi pendant vingt ans. Article 2394. Après dix-huit ans de la date du dernier titre, le débiteur d'une rente peut être contraint à fournir à ses frais un titre nouveau à son créancier ou à ses ayants cause. § III. — De la prescription de quinze ans. Article 2395. Celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par quinze ans. Article 2396. Le titre inexistant pour vice de forme ne peut servir de base à la prescription de quinze ans. Il en est de même du titre nul au fond, si la nullité en est prononcée. Article 2397. La bonne foi doit exister lors de l'acquisition, et continuer pendant toute la durée de la possession. Article 2398. La bonne foi est toujours présumée; c'est à celui qui allègue la mauvaise foi à la prouver. § IV. — De quelques prescriptions particulières. Article 2399. L'action en révocation ou en résolution se prescrit par cinq ans. Article 2400. Il en est de même de l'action en nullité de tout acte entre-vifs ou testamentaire. Article 2401. Les arrérages des rentes perpétuelles et viagères; ceux des pensions alimentaires; les loyers et fermages; les intérêts conventionnels, moratoires et légaux, et généralement toutes les prestations qui s'accroissent jour par jour, se prescrivent par cinq ans. Article 2402. Se prescrivent par six mois: 1° L'action des maîtres et instituteurs des sciences et arts, pour les leçons qu'ils donnent au mois; 2° L'action des commis, contre-maîtres, chefs d'atelier, facteurs, secrétaires, précepteurs, gouvernantes, garde-malades; 3° L'action des hôteliers et traiteurs, à raison du logement et de la nourriture qu'ils fournissent, ainsi que l'action des cafetiers, marchands de vins en détail et cabaretiers; 4° L'action des ouvriers et gens de travail, pour le payement de leurs journées, fournitures et salaires. Article 2403. Se prescrivent par un an: 1° L'action des médecins, chirurgiens et pharmaciens, pour leurs visites, opérations et médicaments; 2° Celle des huissiers, pour le salaire des actes qu'ils signifient et des commissions qu'ils exécutent; 3° Celle des marchands, pour les marchandises qu'ils vendent aux particuliers non marchands; 4° Celle des maîtres de pension, pour le prix de la pension de leurs élèves, et des autres maîtres pour le prix de l'apprentissage; 5° Celle des domestiques qui se louent à l'année, pour le payement de leur salaire. Article 2404. L'action des avoués, pour le payement de leurs frais et salaires, se prescrit par deux ans, à compter du jugement des procès, ou de la conciliation des parties, ou de la révocation des dits avoués. A l'égard des affaires non terminées, ils ne peuvent former de demandes pour leurs frais et salaires qui remontent à plus de cinq ans. Article 2405. La prescription, dans les cas ci-dessus, a lieu, quoiqu'il y ait eu continuation de fournitures, livraisons, services et travaux. Elle cesse de courir, en ce sens que l'on rentre dans le droit commun de la prescription de vingt ans, lorsqu'il y a eu compte arrêté, reconnaissance de la dette, ou citation en justice non périmée. Article 2406. Néanmoins, ceux auxquels ces prescriptions sont opposées peuvent déférer le serment à ceux qui les opposent, sur la question de savoir si la dette a été réellement payée. Le serment pourra être déféré aux veuves et héritiers, ou aux tuteurs de ces derniers, pour qu'ils déclarent s'ils ne savent pas que la chose soit due. Article 2407. Les juges et avoués sont déchargés des pièces cinq ans après le jugement des procès. Les huissiers, après deux ans, depuis l'exécution de la commission, ou la signification des actes dont ils étaient chargés, en sont pareillement déchargés. CHAPITRE V. De la prescription des choses mobilières. Article 2408. En fait de meubles, la possession vaut titre, c'est-à-dire que la revendication des choses mobilières n'est pas admise. Article 2409. Pour que l'article 2408 soit applicable, il faut: 1° Qu'il s'agisse de meubles corporels ou de valeurs au porteur; il ne s'applique pas aux créances, ni aux universalités des meubles. 2° Que la possession soit à titre de propriétaire; si le tiers possède à litre précaire, il ne peut pas invoquer l'exception de possession; 3° Que la possession soit réelle et que le possesseur soit de bonne foi. Article 2410. Par exception, celui qui a perdu, ou auquel on a volé ou escroqué une chose, peut a revendiquer pendant trois ans, à compter du jour de la perte ou du vol, contre le possesseur même de bonne foi, sauf à celui-ci son recours contre celui duquel il la tient. Le tout sans préjudice de l'action personnelle qui appartient au propriétaire contre celui qui a trouvé la chose, ou contre le voleur, l'escroc et leurs complices. Article 2411. Le tiers possesseur évincé n'a pas d'action contre le propriétaire revendiquant pour être remboursé du prix qu'il a payé. Il y a exception lorsque la chose volée, perdue ou escroquée, a été achetée dans une foire ou dans un marché, à la Bourse, ou dans une vente publique, ou d'un marchand vendant des choses pareilles, ou chez un changeur qui vend habituellement des valeurs négociables.